Titre : Gil Blas / dir. A. Dumont
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1909-10-25
Contributeur : Dumont, Auguste (1816-1885). Directeur de publication
Contributeur : Gugenheim, Eugène (1857-1921). Directeur de publication
Contributeur : Mortier, Pierre (1882-1946). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 25 octobre 1909 25 octobre 1909
Description : 1909/10/25 (N11947,A30). 1909/10/25 (N11947,A30).
Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-209
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 11/10/2012
GIL, GLAS. - hUNDI 26 OCTOBRE 1900.
COLONIES PROTECTORATS
ET PAYS D'INFLUENCE
Au Maroc
Moulay-Hafid qui, après la chute de Bou-
Hamara, caressait l'espoir de mobiliser et de
lancer contre l'Espagne, les tribus, jusque-là.
hostiles au Maghzen, de la région. de Taza,
oui leur avait fait promettre, en même temps
que son appui, moral et des secours effectifs
en armes et en munitions, l'envoi d'une me-
ftalla, a dû renoncer à ce projet, devenu im-
praticable.
La seule offre de son alliance a eu pour
effet immédiat d'arrêler net l'élan des tribus
berbèves, prêtes à se porter au secours des
Riffains de Nador et de Sélouan. Riata, Tsoul,
Branès, etc., loin de courir sus à 1 Espagne,
s'apprêtent à recevoir à coups ae fusils iu., ic-
iruliers qu'aurait la folie d'envoyer chez eux
le descendant du Prophète, et à les traiter
comme le furent, il y a quelques années, ceux
d'Abd.el-Aziz qui, prudemment, après quel-
ques escarmouches, s'en revinrent à Fez.
On songe d'ailleurs, dans cette partie du
Maghreb. à 'confier le commandement su-
prême des tribus révoltées contre 1 autorité
chéri tienne, à quelque personnage marquant,
qui ait. les qualités requises pour .succéder au
défunt rogui. Et — chose assez invraisembla-
ble, mais qui, pourtant, est parfaitement exac-
te — des noms soiii mis en avant par certains
mécontents de l'entourage même du sultan,
pressurés jusqu'à la ruine, qui verraient avec
joie le retour d'un maître qui leur fut clément
et dont ra'llure débonnaire est plus que jamais
appréciée : Abd-el-Aziz.
Les candidats dont .on prononce déjà les
noms et qu'on désigne comme aptes à pren-
dre en mains l'autorité souveraine à Taza,
sont au nombre de trois : Bou-Amama, Si
Abd-el-Malek ben Mahieddine et Si Abd-er-
Jlhaman Zerhouni..
Le premier est vraisemblablement le fils de
notre vieil adversaire, mort il y a peu de
temps, et contre lequel il nous fallut lutter
énergiquement naguère au Touat et en d'au-
tres lieux. Son fils, pour une cause dont le
souvenir m'échappe, fit,, un jour, connais-
sance avec les géôles chérifiennes. Bou-Ama-
ma, prisant à sa valeur la magnanimité con.
hme de la France, vint Implorer son aide pour
le salut du prisonnier. Son appel fut entendu
'et le Maghzen accorda à notre représentant ce
que ni les prières ni les menaces du vieux
marabout n'avaient pu obtenir. Des bienfaits
de ce genre, tôt ou tard, portent leurs fruits.
Si Àbd-el-Malek ben Mahieddine est sur-
tout le candidat du clan demeuré fidèle à la
cause d'Abd-el-Aziz, clan; que les. exactions et.
la politique violente de Moulay-Hafid grossit
lous les iouro.
Quant à Si Abd-er-Rhaman Zerhounj, il est
le propre cousin (du défunt rogui, dont il fut
encore le khalifa. Ce double titre lui vaut
nombre de partisans.
La haine du sultan actuel, chez les anciens
sujets de Bou-Hamara, est à ce point irrécon-
cillablc, que Riata, Tsoul ou Branès sont dé-
cidés à tout plutôt que de subir la domina-
tion du Maghzen. Le jour n'est point éloigne,
à en juger par certains symptômes, où, a
l'exemple des Beni-Snassen et des Berbères
des Chaouïas. les .populations de la banlieue
de Taza viendront d'elles-mêmes nous deman-
der à. bénéficier d'un régime de paix féconde
analogue à celui dont jouissent les tribus
qu'abrite, soit temporairement, soit à titre
définitif, le drapeau tricolore.
Peu à peu, le vieux Mtaghreb se désagrège.
- Moulay-Hafid, par sa cruauté froide, par son
extraordinaire égoïsme qui le pousse, pour
satisfaire ses besoins d'argent, à pressurer
sans vergogne, fût-ce les populations d'un
loyalisme éprouvé, à mettre les charges à 1 en-
can, à multiplier, comme à plaisir, les diffi.
cultés sous -ses pas, aura contribué largement
à ébranler l'édifice qui se crevasse de toutes
parts.
Jacques d'Urville.
MOULAY-HAFID CONTRE LES PUISSANCES
Nouveaux attentats contre les protégés français,
anglais et espagnols
Tanner,. 24 octobre. — Mustapha-Erremiqui,
frère du caïd d'El-Ksar, vient d'entrer à El-Ksar
amenant une bande de prisonniers faits dans la
région et partmi lesquels se trouvent des protégés
français, anglais et espagnols.
Les craintes de pillage sont vives à El-Ksar. De
nombreux habitants se sont enfuis par crainte de
représailles.
On se demande où ira l'insolence de ragent de
Moulay-Hafid.
- SaM et M. Hiiit
L'aifaire des Comores
Monsieur le directeur,
Suivant l'invitation de l'é:pigraphe que porte
-le lUre de votre estimé journal, je lis le Gil
îitus régulièrement et, observateur fidèle du
carpe diem, j'y trouve au jour le jour l'utile
- mêlé à l'agréable.
Mais pourtant, un filet du 21 septembre der-
nier, à la rubrique colonies, et au sujet de l'ab,
dication du sultan de la Grande-Comore, Saïd-
Ali m'a surpris. Vous me permettrez de vous
expliquer pourquoi, car votre souci de « la
note exacte » est proverbiale, et votre collabo-
rateur J, d'Urville est généralement trop bien
renseigné pour craindre d'admettre, une fois
par hasard, le redressement d'une entorse à
la vérité.
Je ne vous ai pas écrit puis toi, parce que
mon érudition était restée en douane avec mes
cantines. Durant les vingt dernières années,
j'ai croisé maintes fois dans la mer des Indes,
et des stations réitérées dans ces parages
m'ont permis de suivre les événements poli-
tiques et autres de la plus curieuse des lies,
de Gaziza, la Grande-Comore.
Or, mon attention fut éveillée par cette
phrase de votre collaborateur : « Les îles Co-
mores sont des satellites de Madagascar ».
La distance entre la Grande-Comore et Mada-
gascar étant de trois cents milles en mer, il
est excessif d'imaginer une pareille force d'at-
traction. En réalité l'archipel dont la Grande-
Comore fait partie, a son existence propre et
sa sphère d'activité indépendante. Lorsqu'on
regarde, dans son cabinet, des mappemondes
ou des cartes à très petite échelle, on peut
avoir de ces erreurs d'optique. Mais celui qui
a. parcouru lui-même ces régions, sait à quoi
s'en tenir et rectifie le point visuel.
La suite du .filet, rédigé du reste avec sa-
veur, m'a prouvé que la bonne foi de votre
îédacteur avait été surprise et m'a remis en
mémoire un proverbe de là-bas : « Grande
- est la justice de l'homme blanc ; plus grande
est la puissance d'un mensonge. n
M. J. d'Urville s'est laissé persuader, en
effet, que Saïd-Ali était un héros infortuné,
une lamentable victime persécutée par un mé-
chant personnage, le traître du mélodrame
classique, le colon Humblot
Laissez-moi vous raconter brièvement ce
que ]o sais.
Remontons ki- une trentaine d'années. La
Grande-Comore était alors une île à peu près
sauvage, sans culture, exploitée seulement par
» les négriers, les traficants de chair humaine,
qui y trouvaient une marchandise assez abon-
dante, puisque la population était évaluée à
35.000 Arabes et nègres. Mais des guerres in-
cessantes entre les "petits potentats qui se par-
tageaient le pays, ainsi que de fréquentes in-
vasions malgaches, entretenaient la misère et
la barbarie. La forêt vierge couvrait presque
tout le territoire, car les indigènes ne cou-
paient du bois que pour construire leurs ca-
banes et leurs pirogues, et ne pénétraient dans
les fourrés que pour la récolte du miel.
Les principiôules de cette pétaudière primi-
tive se prétendaient descendants directs de
Mahomet, ce qui leur assignait un rang élevé
dans l'aristocratie musulmane et leur inspi"
ruifc une vanité démesurée.
Au moment dont je parle, la Grande-Co-
more était divisée en cinq sultanats princi.
paux tous répartis entre les membres de la
famille du sultan Achmed. Un petit-fils de en
sultan, le nommé Saïd-AGv qui avait, paraît-il.
lté désigné par son grancl-père pour lui suc-
céder, jouait le rôle de prétendant, réfugié à
Mayotte.. Il eut recours au commandant do
cette. île, le colonel français Colomb qui, après
avoir vu le testament d'Achmed, consentit à
favoriser l'installation de Saïd-Ali comme sul-
tan de la Grande-Comore , et, après des lut-
tes sanglantes, notamment contre le protégÓ
du sultan de Zanzibar, Moussafonmou, Saïd.
Ali devint grâce à notre appui, en 1881, sul-
tan de toute l'île.
Mais les Anglais et les Allemands avaient
remarqué la Grande-Comore, et guettaient
cette proie, dont l'état anarchique semblait
fendre la coliquête facile. Sur l'entrefaite, un
Français, jeune et énergique, M. Humblot, dé-
barqua dans l'île, en 1884. Il venait chargé
par le ministre de l'instruction publique d'une
mission scientifique aux Comores. Il parcou-
rut fe premier cette terre encore inexplorée,
s'ouvrit un chemin à travers la forêt vierge,
triompha de l'hostilité des safuvages et fanati-
ques comoriens et s'aperçutnombre de régions stérilisées par les érup-
tions volcaniques, malgré le manque d'eau
courante, il y avait à divers endroits un sol
fertile, des pâturages, et la forêt même était
une richesse. On y pouvait établir, en em-
ployant les indigènes, une importante exploi-
tation agricole : telle fut l'œuvre que M. Hum-
blot concut et narvint à réaliser.
Saïd-Ali commença par s'assoder aux vues
de M. Humblot, auquel il concéda les terres
vacantes, car il y trouvait un intérêt : il
fournissait la main.d'œuvre contre espèces.
Lu Société de la Grande-Comore put ainsi se
développer et prospérer, grâce à la vigou-
reuse direction de son fondateur. Et qui fut
déconcerté par cette rapide initiative ? Ce fut
le compétiteur anglais et l'allemand, qui cher-
chaient l'un et l'autre à soustraire à l'influence
française les îles indépendantes du canal do
Mozambique. Il y avait à Anjouan un con-
sul anglais ; un autre Anglais était fixé à
Mohely. Les Allemands s'établissaient sur la
côte orientale d'Afrique et convoitaient Zanzi-
bar et les Comores. Ils adressèrent à M. Hum..
blot d'es propositions Iséduisantes pour substituer à sa société ; il leur répondit en
faisant demander officiellement par le sultan
Saïd-Ali, au résident de la République, le pro-
tectorat de la France. Un traité fut signé, le
5 novembre 1885, à bord de l'aviso Boursaint,
par Said-Ali. et ses ministres d'une part, et
M. Humblot, assisté par le commandant du
Boursaint et ses officiers, d'autre part. La
Grande-Comore était acquise 'désormais à l'in-
fluence française.
Dès lors, M. Humblot s'occupa de transfor-
mer le grand domaine qui nous était ouvert.
planta, sur des étendues gagnées sur la
forêt, des caféiers, vanilliers, cacaoyers, gi-
rofliers, cannes à sucre,, etc. Il apprit le tra-
vail et la culture à des milliers de Corn ori pris
ii l' uvi-iiiibtt » eniin dans la large acception
du mot. Et', grâce à ses efforts, la Grande-
Comore devint de plus en plus une dépen-
dance française, ce qui porta -ombrage à Saïd-
Ali. Celui-ci ne pardonnait pas, d'ailleurs, à
M. Humblot, de le gêner dans son commerce
d'esclaves. Pourtant, le « grand colon » avait
été, à diverses reprises, le sauveur du sultan.
dont il avait payé la rançon à ses vainqueurs
les Bodjmiens, puis il avait obtenu l'envoi
d'un navire de guerre et .de marins français,
qui avaient soumis définitivement -ces uoaji-
niens. Mais Saïd-Ali, une fois hors de danger,
songea à se débarrasser de M. Humbilot., son
bienfaiteur, qui avait été chargé, à titre gra-
tuit, des fonctions de résident à la Grande-
Comore, le 11 octobre. 1889, et avait obtenu le
6 janvier 1892, un nouveau traité assurant à
la France une situation prépondérante. dans
l'administration de ce pays. M. Huimblot eut
à lutter à tour de rôle contre des insurgés nui
voulaient détrôner Saïd-Ali, et contre ce der-
nier, furieux de ne pp.s pouvoir rétablir les
vieux abus et les redevances anciennes.
Comme il était die plus en -plus évident que
rien ne lasserait M. Humblot, qu'il tiendrait
tête à tout le monde, et poursuivrait quand
même jusqu'au bout sa mission colonisatrice ;
comme on n'avait même pas l'espoir de le
faire rappeler par le gouvernement, puisqu'il
était le représentant à demeure d'une so-
ciété agricole, Saïd-Ali résolut de le faire as-
sassiner.
Le 2 août 1893, M. Humblot fut assailli par
trois séides du sultan,- embusqués ; il fut
frappé a-u côté droit par une sa,gaie qui, pé-
nétrant dans J'abdomen, y resta en entier, le
manche étant cassé par la violence du choc et
la pointe sortant à gauche ; en même temps,
il recevait sur l'épaule droite deux terribles
coups de sabre. Il eut néanmoins la force de
tirer sur ses agresseurs, qu'il mit en fuite ;
il arracha lui-même la sagaie, contint ses in-
testins qui sortaient par la plaie, et fut ra-
mené presque mourant chez lui par des ou-
vriers que la détonation avait attirés. Seule sa
robuste constitution le sauva. - - - -
Cet attentat commis par des gens à la solde
do Saïd-Ali, donna la .mesure de l'audace et
de la cruauté du sultan ; il fallait renoncer
à coloniser l'île ou châtier le coupable. Sa
peine n'eut rien de cruel : on l'interna il
Diego-Suarez, ptuis on l'envoya à la Réunion,
libre, en lui faisant une rente de 10.000 francs.
Il conserva le titre de sultan de la Grande-
Comore et ne laissa1 pas que l'intriguer contre
nous, jusqu'à ces derniers temps, où 11 a
abdiqué moyennant- une augmentation de sa
pension et la rosette d'officier de la Légion
d'Honneur. Voilà cette lamentable victime !
On accorde des revenus à ce meurtrier arabe,
et on le décore de l'ordre des braves ! Celui
qu'on accable, c'est le bon Français, qui nous
a donné une belle colonie et a fait pénétrer
la culture et la civilisation dans une île où
l'on ne connaissait avant lui que la sauvage-
rie, la paresse, la crasse, la tuerie perpétuelle
et la traite des noirs. Dans les vingt-cinq der-
nières années, la populmation. de la Grande-
Comore a presque doublé. Je vous le dis, il
serait à souhaiter que ious eussions beau-
coup d'Humblot. Nous aurions moins à dési-
rer pour notre empire colonial. Entre un
Iïumtlot et un Saïd-Ali, le choix paraît facile.
Pourtant, d'un côté, nous voyons un barbare,
Pourtant, l'intstigateur d'un criminel attentat,
reconnu
décoré officier de la Légion d'honneur. (11
est vrai que le personnage par qui fut négo-
ciée la chose avait jeté: antérieurement sa dé-
coration aux orties 1) et, de l'autre côté, nous
lisons les attaques qu'on multiplie dans des
« campagnes » de presse contre un excellent
colon qui a régénéré la Grande-Comore et l'a
rendue française.
C'est-il avec ce genre d'encouragements que
l'on compte fomenter chez nous le patriotisme
et l'esprit colonisateur. Voilà, monsieur le Di-
recteur, une question à laquelle la réponse
des lecteurs de votre honorable journal n'est
pns douteuse, car il reste en France quelque
'souci des intérêts nationaux, quelque justice
et quelque bon sens.
Lazare.
NOUVELLES MILITAIRES
ABMÉE
L'incident de Pontivy
Pontivy, 24 octobre. — M. Berlaud, vétérinaire
en nremier, au 2e chasseurs, qui frappa le cavalier
Tregre, rappelé par le télégraphe, a été accompn-
gné par un sous-oficier jusqu'à la caserne, pour
être mis aux arrêts de rigueur. L'enquête continue.
MARINE
A l'arsenal de Toulon
Toulon, 23 octobre. — A la suite de méfaits comr
mis aux abords de l'arsenal et du mouillage de la
flottille des contre-torpilleurs, des ordres sévères
ont été donnés par les autorités maritimes pour
que les chaloupes à vapeur poursuivent les mal-
faiteurs. Ce soir, un de ces derniers, qui avait fait
feu sur un matelot qui le poursuivait, a été arrêté.
Les fonctionnaires ont été doublés sur certains
points de l'arsenal.
Les" Camelots du Roy au Luxembourg
Une bagarre
Les « Camelots du Roy » avaient pro-
jeté un nouvel acte de vandalisme contre le mo-
nument de Seheurer-Kestner. A cet effet, on voyait
enlrer, hier, vers cinq heures, dans le Jardin du
Luxembourg, une cinquantaine de ces messieurs.
Mais un nombre à peu près égal d'étudiants répu-
blicains avaient été Drévenus ; ceux-ci vinrent à
la rencontre de la « Royale Camelote » et une
courte bagarre se produisit.
Finalement, les deux partis furent dispersés par
les agents qui opérèrent l'arrestation. d'un étu-
diant républicain.
Le jeune homme arrêté a, d'ailleurs, été remis
immédiatement en liberté.
- 4>
La Tempête
Sur les côtes bretonnes : nombreux sinistres
Brest. 24 octobre. — Une tempête du sud-oues'
souffle avec violence sur les côtes depuis hier soir.
Le bateau sardinier Eclaireur. de Concarneau, s'est
échoué sur les rochers de la pointe du Cabellou.
Le bâtiment a sombré ; l'équipage est sauvé.
Le matelot llelgoualch, du bateau les Droits-de-
l'Homme, rentrant à Lesconil, a été enlevé par
une lame et projeté à la mer. Il a été sauvé par
le bateau de pêche 2766.
Le bateau sardinier Carabinier, patron Lozivit,
de Concarneau, allant à Penmarch, a abordé au
large des lies Glenans le bateau de pêche 2827,
de Lesconil, lui causant une voie d'eau. Il n'y a
pas eu d'accident de personne.
Le canot à voiles du Magellan, bâtiment-école
des mousses, a chaviré sous une rafale au sortir
Ùù port de guerre. Les mousses qui se trouvaient
à bord ont été sauvés.
Emouvant sauvetage
Honfleur. 24 octobre. — Ce matin, à 4 heures,
le bateau de pêche Pairiote-C. 656, de Dives, a été
jeté à la côte par un coup de vent violent de l'ouest ;
il s'est échoué en aval de Honfleur, à cent mètres
des jetées.
Le canot de sauvetage Honfleur est parti au se-
cours du bateau naufragé, déjà rempli d'eau.
Après le sauvetage de deux pêcheurs, qui s'ê-
taient réfugiés dans la mâture, un coup de mer
violent jeta le canot sauveteur sur -le Patriote, en-
levant à la mer deux des sauveteurs, qui, après de
nombreux efforts de l'équipage, furent sauvés à
Ifiur tour.
Le bateau de sauvetage est rentré à 5 IL 1/2,.
1 Un Crime à Robinson
Tentative d'assassinat sur une rentière -
Le joli village de Robinson a été mis en émoi
hier matin par une tentative d'assassinat qui n'a
échoué que grâce à l'intervention toute fortuite
d'une habitante de la localité.
Mme Elise Bagot, âgée de soixante-cinq ans,
possède en usufruit depuis plusieurs années une
maison située, 4, rue d'Aulnay. En outre, le pro-
priétaire de cet immeuble, M. Pierre Brioson,
sert à la sexagénaire une rente viagère dont le
capital, à la mort de cette dernière, doit revenir
à un nommé Antoine Brioson, âgé de soixante-
cinq ans, qui habite également l'immeuble de la
rue d'Aulnay. Trouvant sans doute que ce capi-
tal tardait trop à lui échoir, celui-ci a voulu sup-
primer le seul obstacle qui l'empêchait de deve-
nir rentier et a tenté d'assassiner Mme Hagot.
Il était environ sept heures du matin r p&n&-
imnt, dauo» îa, ciicbMiore de la sexagénaire, située
au rez-de-chaussée, Antoine Brioson s'est avancé
sur elle et l'ayant saisie à la gorge, l'a frappée
de sept coups d'un poinçon long et effilé. Griè.
vement atteinte au bas-ventre et au sein gauche,
Mme Hagot s'est affaissée, tandis que le meur-
trier, dérangé par une porteuse de pain, s'em-
pressait de prendre la fuite.
M. Lefèvre, commissaire de police de Sceaux,
a fait transporter Mme Hagot à l'hôpital Cochin
et recherche le meurtrier; On croit que ce der-
nier s'est fait justice.
—..
Faits Divers
Accident mortel. — Un employé de commerce,
M. Joseph Salavy, âgé de trente-cinq ans, descen-
dait, flier matin, à bicyclette, la rue Julien-Lacroix,
où il habitait. Entraîné tout à coup, il perdit les
pédales.
Le cycliste fit alors agir son frein, mais arraché
de sa selle par la brusquerie de l'arrêt, il fut pro-
jeté contre un reverbère.
Des passants le relevèrent et le transportèrent
dans une pharmacie, où malgré les soins, il ne
tarda pas à expirer. Le malheureux s'était fracturé
le crâne.
Enfants écrasés. — L'Esplanade des Invalidas
a été, hier matin, le théâtre d'un grave accidenl.
Deux enfants qui jouaient au cerceau, ont été
renversés par une voiture de maître, dont les roues
leur ont passé sur le corps.
Le plus jeune, Charles Delard, âgÓ de sept ans,
demeurant 45, rue Saint-Dominique, qui avait la
poitrine défoncée, a été transporté à l'hôpital des
Enfants-Malades. :,
Le second, Jean Rullin, figé de neuf ans, blessé
à la jambe gauche, a été reconduit rue de Lille, au
domicile de ses parents.
Après la rupture. — Lasse des mauvais traite.
ments que lui faisait subir René Chemin, ironie
ans, menuisier, avec qui elle vivait, Louise Mon.
ceau, fleuriste, quittait, il y a quinze jours, le
domicile commun, rue de Flandre, pour aller ha-
biter seule, rue Riquet. Chemin se mit à la re-
cherche de la jeune femme, se promettant de se
venger de son abandon.
la nuit dernière, la fleuriste rentrait chez elle,
quand Chemin, qui était accompagné de deux rô-
deurs, lui barra le passage. -, -
Pendant que 'les compagnons du menuisier fai-
saient le guet, Chemin se ruait sur son ancienne
maîtresse et la frappait de plusieurs coups do
casse-tête sur le crâne. Une fois la malheureuse
évanouie, il lui déroba son porte-monnaie et deux
bagues en or. -
Dix minutes plustard, les agents découvraient
la fleuriste et la transportaient à l'hôpital Saint-
Louis.
Son misérable amant et les gens qui l'accom-
pagnaient sont activement recherchés par la
Sûreté.
Nouvelles de partout
PROVINCE (24 oclobre)
Pau. — Une usine, située à Uzos, près de Pau,
a été entièrement détruite cette nuit par un incen-
die. Les pertes sont élevées.
Poitiers. — Ce matin, vers 5. h. 30, le nommé
Langevin (Jean), garçon boulanger, 27 ans, a tenté
d'assassiner pour la voler la nommée Bernard
(Marcelle), 25 ans. -
Langevin a été arrêté.
Pontivy. La brigade de la police mobile de
Nantes a arrêté, à Rennes, le nommé Marcel Le
Brigand, accusé d'avoir assassiné, le 22 septembre,
M. Duringer, brasseur à Pontivy, en lui portant un
coup de poignard dans le vêntre.
Dans la chambre de Le Brigand, on a décou-
vert des lettres échangées entre Le Brigand et
Mme Duringer, et l'arme qu'on #suppose avoir ser-
vi au crime.
M. Duringer, le brasseur assassiné, était, pa-
raît-il, un alcoolique, et l'on se trouverait en pré-
'Bence d'un crime passionnel. *
Rouen. — Le champ des opérations du parquet de
Houcn s'étend, en ce qui concerne le sujeb de l'af-
faire d'avortement et d'infanticides. Après le doc-
teur Bouju et sa maîtresse, la femme Sénard, dont
l'enfant fut étouffé par le médecin, a été arrêtée ce
soir,
D'autres arrestations sont imminentes.
Lo Curî«iix.
--
AVANT-PREMIERE
« Lysistrata » aux Bouffes-Parisiens
Le 22 décembre 1892 — dix-sept ans déjà - le
Grand-Théâtre donnait la première représentation
de Lysistrata, de M. Maurice Donnay, chansonnier
du Chat-Noir.
Demain, les BouITes-Parisiens reprennent Lysis-
trata, de M. Maurice Donnay, de l'Académie fran-
caise : une reprise en avait été faite dans l'inter-
valle par MM. Porel et Albert Carré, directeurs du
Vaudeville, en 1896.
Aristophane n'eut, pour ainsi dire, aucune part
à réclamer dans le succès de Lysistrata : ceux
qui ont lu ses œuvres savent qu'il s'est plu iï
amasser dans celle-ci les obscénités : les Grecs,
dont l'àme fut la plus fine "et la plus artistique du
monde ancien, dont l'idéal s'éleva plus haut que
tout autre, n'eurent, par un phénomène singulicr,
aucune notion de la décence, voire de la pudeur,
"et Aristophane n'a pas écrit une scène de celle
verveuse comédie, où la plaisanterie, grosse et
crue, ne s'étale avec un réalisme outré ! Nous pou-
vons donc nous consoler de l'accusation de cor.
ruption qu on nous adresse parfois, en pensant
(m'en fait de démoralisation nous n'avons rien in.
venté I Celle des Athéniens n'a pas trop nui au
développement de leur génie ; un tel exemple est
pour nous assez honorable !
M. l\ £ iurice Donnay avait à compter avec notre
atticisme, qui s'effarouche plus aisément : il a
écrit Lysistratâ avec le plus pur esprit parisien et
boulevardier ; cet esprit fut tel qu'il séduisit par
sa bonne humeur, sa désinvolture, nar sa blague
même 1
11 a supprimé les grossièretés qui encombrent
les premières scènes de Lysistrata, tout en leur
conservant leur légèreté grivoise : les Athéniennes
y évoquent, en toute liberté, les choses de 1 amour ;
quelques-unes jouissent d'un « tempérament exces-
sif » ; elles connaissent, et à fond, les mystères
de la volupté ; mais tout se passe en paroles, el
M. Maurice Donnay, moins osé qu'Aristophane,
nous en épargne le geste.
Quel chemin parcouru depuis l'époque du Chat-
Noiry de Rodolphe Salis, où M. Maurice Donnay
déjeunait parfois d'un sonnet pour souper d'uno
ballade, suivant la pittoresque expression de M.
Léo Marchés 1 Heures inoubliables, où, dans un
exil charmant de trois mois au bord de la mer et
dans la paix des champs, il s'enferma avec son
ami le musicien Amédée Dutacq et rapporta cette
Lysislrata, qui, poème et musique, est, au bout
de dix-sept ans, demeurée aussi exquise, aussi sé-
duisante. aussi moderne !
Que sont devenus }Pg interprètes de Lysistrata ?
C'est d'abord Mme Réjane, deux fois triomphante,
à la création et à la première reprise ! La cour-
tisane Salabacca, ce fut Mme Tessandier, puis
Mlle Rosa Bruck : ce sera demain la resplendis.
sante Félyne. Mlle Augustine Leriche d'abord, Mlle
Cécile Caron ensuite furent Lampitos, la femme
au tempérament excessif : ce sera demain Mlle
Marguerite Lavigne, dont l'outrancière fantaisie
sera à la hauteur du rôle. Mlle Suzanne Carlix,
deux fois Callyce, cède son rôle à Mlle Alice Clair-
ville ; la brune Valdec succède à Mlle Cécile Sorel,
qui succédait elle-même à Mlle Montéharmont. Myr-
talo, créée par Mlle Blanche Dufrène, repris par
Mlle Lucy Gérard, sera Mlle Mario Calvill ; Cyn-
na, Mlle Florisey après Mlles Suzanne Munte et
Drunzer.
Tout un lot de courtisanes et d'honnêtes femmea
était incarné par Mlles Aimée Martial, Melcy, Su-
zanne Avril, Léo Renn, etc.; elles seront rempla-
cées par d'autres qui entrent dans la carrière quand
leurs aînées y sont encore et dont or dit beaucoup
de bien !
M. Lucien Guitry, puis M. Dumény furent Aga-
thos, dont le rôle est repris par M. Roger Karl ;
M. Hasti succède à MM. Montbard et André Cal
mettes ; M. Savry, à M. Maury ; M. Sauriac, tN
MM. Lugné-Poë et Boisselot.
Le prologue sera dit par M. Félix Gandera, quo
son succès récent 'dans les- Deux Visages a déjà
mis en valeur ; Cynésias sera M. Telegen, après
MM. Matrat et Numès ; M. Bouthors succède an
joyeux Torin.
On sait le grand, effort artistique accompli par
la nouvelle et aimable directrice des Bouffes-Pari.
siens, la grande artiste Mme Cora Laparcerie, pour
donner à Lusistrata une somptueuse mise en scène,
digne de celles qu'elle eut déjà, et les soins qu'elle
a apportés à moderniser luxueusement le vieux
théâtre Comte, qui en avait d'ailleurs bien. besoin :
tout fait présager pour cette Lysistrata troisième
le succès éclatant de ses aînées I
Charles Bert.
■ ■ ammm——■—«a—w—" ■'
Les Concerts Classiques
Je n'ai pas grand'chose à dire de la Damna-
tion de Faust que l'Association des Concerts
Colonne donnait hier, au Ghâtelet,; devant une
salle comble. Mme Litwinne a obtenu son ha-
bituel succès ; le ténor Granier remplaçait
Van Dyck comme un débutant peut suppléer
à l'autorité d'un grand artiste ; Méphistophé-
lés était chanté d'une voix mordante et expres-
sive par M. Huberdeau ; enfin M. Pierné, qui
remplaçait M. Colonne, a dirigé à souhait.
Pour la critique, pour le public avide de
nouveau sinon d'inédit, le programme des
concerts Lamoureux présentait l'attrait d'une
première audition, le Tsar Saltan, de Rimsky-
Korsakow. A cet attrait venait se joindre un
fragment -du premier acte de la ltVaUcyrie,
charité par Mme Jeanne Raunay et M. Imbart
de la Tour. J'ai déjà dit, l'autre jour, ce que
je pense de ces œuvres théâtrales, -de ces oeu-
vres du répertoire que donnent nos sociétés
de concerts ; je ne pourrais que me répéter.
La seule excuse qui se puisse trouver, c'est
que ce morcellement nous permit d'entendre
Mme Jeanne Raunay chanter le rôle de la
blanche Sieglinde .; Mme Raunay a fait va-
loir avec sa belle autorité, sa noblesse de style,
ce fleurissement éperdu de thèmes amoureux
qui forme la fin du premier acte de la. Wal-
kyrie. E'IIe a été très chaleureusement applau-
die, ainsi que le ténor Imbart de la Tour, de
qui les moyens vocaux sont aidés par une
diction intelligente et expressive. L'orchestre
qui avait, sous la conduite de M. Chevillard,
interprété en toute perfection la deuxième
symphonie de Beethoven, m'a paru hésitant
dans la Walkyrie ; accrocs aux cuivres dès le
début, manque de sonorité des violoncelles
quand apparaît lp lied du Printemps.
Par contre, interprétation supérieure du pré-
lude de Fervaal, de M. Vincent d'Indy ; voilà
une page inspirée et rêveuse, un hymne dis-
cret que chantent les cordes, et que les cordes
de l'Association Lamoureux ont supérieure-
ment chantée.
J'ai gardé pour la fin le Tsar Saltany comme
on conserve une friandise pour terminer un
repas. C'est, en effet, une vraie friandise mu-
sicale que cette suite d'orchestre extraite du
conte lyrique de Rimsky-Korsakow. Elle se
compose de trois numéros. Dans le premier,
le tsar Saltan s'en va-t-en guerre, car il défile
sur une marche joyeuse, quelque chose com-
me une chanson, d'allure héroïque et aussi un
peu banale, mais d'une. bien plaisante colo-
ration orchestrale. Le numéro deux nous dé-
crit les angoisses et les pleurs de la tsarine
abandonnée au caprice des flots. Là, nous
sommes en pleine virtuosité instrumentale :
dés cordes et des bois sur une tenue de cui-
vres décrivent le bruissement des flots ; un
chant douloureux du cor nous module 1a dou-
leur de la tsarine. Enfin, le morceau le plus,
brillant est le numéro 3 : l'évücation de l'Ile
magique. Ce n'est plus seulement ingénieux,
c'est de la féerie symphonique, une féerie de
sons diaprés, de combinaisons harmoniuues.
oomme le Rimsky-Korsakow de Shéhé-rézadc
en sait être le magicien et le musicien.Allègre-
ment des gnomes dansent sur un rythme dis-
cret et spirituel que martèle une note de xylo.
phone et de flûte ; l'auditeur sautille avec l'or-
chestre, tant H a l'illusion d'être balayé avec
cette musique ; puis une mélodie s'élève, un
de ces lieder nationaux russes sans doute, qui
célèbre la vue -de l'île ou l'arrivée dans l'île ;
c'est chanté par les cordes et les bois, et ce
thème, d'une belle venue, est repris, coloré,
par l'orchestre entier qui s'unit en un triom-
phe de sonorités éclatantes et de colorations
séduisantes. M, Chevillard a dirigé cette suite
avec esprit, avec goût, avec pré-ciisiuii aussi ;
il semblait partieper à l'allégresse de cette
musique.
*
ÇA ET LA
M. Adolphe Jullien, le critique musical
averti des Débats, a connu de près Ernest
Reyer ; en maints feuilletons il en analysa les
partitions. Mieux encore, il succéda à l'auteur
de Sigurd et de Salammbô au rez-de-chaussée
de ces mêmes Débats. Il était donc tout dési-
gné pour .écrire avec compétence la biogra-
phie du maître disparu. Le Reyer qu'il vient
de publier dans la eoliection des Musiciens
célèbres (Laurens, éditeur) est mieux qu'une
biographie ; c'est, notées par un ami fervent,
la carrière et les péripéties de la carrière du
grand mùsieien.
- Adolphe Jullien mous présente un Reyer vi-
vant et agissant. Il rrous le montré arrivant à
Paris, allant offrir sa première partition, le
Selam, au directeur-de l'Opéra-Comique, et
conciliant eon métier de compositeur avec
celui, non .moins -délicat à tenir, de critique
musical. Il faut rendre cette justice à Rcycr,
et M. Adolphe Julien met cette, qualité bien
en lumière, que Reyer critique musical, ne se
servit jamais de sa plume poiur être utile à
Reyer musicien de théâtre. C'est là un exem-
ple de conscience artistique digne d'être cité.
L'élude de M. Adolphe Jullien abonde en sou-
venirs personnels ; nous assistons aux luttes
du compositeur contre l'entêtement et la rou-
tine des directeurs de théâtres, luttes qui abou-
tissent aux triomphés de Sigurd et de Sa-
lammbô à l'étranger d'abord, puis enfin à
Paris. Le livre de M. Adolphe Jullien est atta-
chant comme un roman.
M. Paul Dup'in, le compositeur autodidacte,
dont j'ai maintes fois parlé, notamment à pro-
pos du très curieux concert où il révéla ses
œuvres, publie chez Senart, Roudaniezv un re-
cueil de doiize mélodies, d'une saveur étrange,
en do h ors de toute formule d'école ; c'est d'un
art très personnel et' très prenant à là fois.
Ajouterai-je que pour les interpréter il ne faut
pas seulement être un chanteur ou une chan-
teuse ? Il faut les comprendre.
Du même auteur le quatuor Parent exécu-
tait vendredi dernier, au Salon d'Automne,
un quatuor à cordes d'après le Jean Christo-
phe de M. Romain Rolland. Je n'ai pu assis-
ter à cette SOOrucB. Mais je me réserve d'en
parler après une prochaine audition. 11 faut,
en tout cas, féliciter M. Paail Dupin de se con-
sacrer désormais à la composition de qua-
tuors ; ce sont là des exemples artistiques et
désinlérossés qui se font rares à notre époque.
Louis Schneider.
Le Théâtre
Au THÉATRE DES ARTS : PUlcinella, piècë en trois
actes, en vers, de Mlle J. d'Orliac. — Mélilla,
drame antique en un acte, de M. A. Meunier.
J'ai rendu compte, cet été, de Pulcinella, la
pièce de 'Mlle J. d'Orliac qui fut jouée à
Champigny, sur le théâtre de la Nature. Le
théâtre des Arts vient de reprendre cette fan-
taisie symbolique qui combat, non sans géné-
rosité, l'égoïsme philosophique de Nietzsche.
L'oeuvre est un peu confuse, mais elle n'est
pas sans poésie et sans profondeur. Elle fait
le plus grand honneur à Mlle d'Orliac.
Elle est jouée avec conviction et avec .pitto-
resque pas Mlle Derigny, qui tient le rôle créé
par Mme Tessandier. Mlle Bertile Leblanc,
aux regards purs, à la voix harmonieuse, est
une touchante Colombine. M. Mirman est un
-Scaramouche intelligent et M. Durozat repré-
sente avec force un vieux berger qui excite
l'humanité à s'affranchir de la bonté.
Mais Mlle Véra Sergine a triomphé. Par la
puissance de son talent, elle donne à la pièce
la cohésion qui risquerait de lui manquer.
Elle est gaie, angoissée, tragique. Elle expri.
me, avec une souplesse admirable, les révol.
tes, les doutes, la sublime résignation de pul-
cinella. Elle est une petite bohémienne et elle
est aussi une âme douloureuse, hésitante, cii-
ininelle et radieuse. On l'a longuement accla-
mée. Comment la Comédie-Française ne s'at-
tache-t-elle pas une telle artiste ?
Au début de la soirée, on avait joué un pe-
tit acte antique de M, Meunier. Le public a
souri en écoutant les souffrances de la joueuse
do flûte M éliUa. Elle aime le beau Lecnès ;
mais elle rie veut pas lui appartenir pour ne
pas souiller la pureté de ce sentiment. Ainsi
la fille Elisa ne se donnait pas au petit soldat
qu'elle chérissait : elle le tuait. Mélitta ne
frappe pas Lécnès ; elie se suicide et, devant
son cadavre, Léonès avoue qu'il ne soupçon-
nait pas p.n Allà une telle beauté.
Naguère, à l'OEuvre, en des soirées d'art,
cet acte aurait peut-être soulevé l'enthousias-
me des fidèles. Les spectateurs, hier, ne l'ont
pas pris au sérieux. La foi s'en va. Du moins
on a. rendu justice à la sincérité de Mlle Géo
Dicily et à la grâce de Mlle Sylvaire.
Et il convient de dire qu au vaudeville, en
matinée, avant les danses délicieuses des !
sœurs Wiesenthal, nous avons applaudi un
joli arrangement de Je dine chez ma mère.
M. Hugues Delorme a orné cette pièce aux
grâces anciennes de vers légers, spirituels, et
parfois surannés à dessein. Le succès a été
vif. Les interprètes, aux costumes Louis-Phi-
lippe, ont droit à des félicitations. Mlle Carè-
ze est une gentille soubrette ; M. Joffre est
un rapin ému à la diction très nette. Mlle Cor.
mon — la Grisi — est pllus belle que ne le
fut la célèbre danseuse. Ses attitudes sont har-
monieuses. Elle joue simplement et elle met
en valeur l'harmonie des vers. Son articula-
tion est précise. C'est .une bonne comédienne
et MM. Porel et Peter Carin ont eu raison de
s'assurer son concours.
Et pourquoi la Comédie-Française n'inscrit-
elle pas à son répertoire Je dinc chez ma mè-
re ? L'un des auteurs, M. Adrien Decourcel-
les, fut rendant quinze ans un lecteur de la
Maison. On acquitterait pour sa mémoire une
dette de reconnaissance. Cet acte agréable çt
célèbre trouverait aussi dans notre théâtre
subventionné de bons interprètes : Mlle Sorel
et M. Georges Beer.
, Nozière.
Leurs Toilettes
AU THÉÂTRE
Avec quelle impatience n'attendait-on pas la
réouverture du théâtre de la Renaissance et la gé-
nérale de la Petite Chocolatière, qui devait servir
de début à la direction de M. Tarride.
L'intérêt était doublé encore par la présence de
Mme Marthe Régnier, l'enfant chérie du public,
dont la grâce nous a parue plus juvénile encore
dans ce cadre si féminin.
A tout seigneur, tout honneur.
Je coummencerai donc par vous décrire les robes
de la petite directrice, qui sait être en môme temps
une délicieuse ingénue.
Mme Marthe Régnier porte aux deux premiers
8ICtes une robe de mousseline de soie rose plissée,
sur laquelle se jouent de mignonnes petites guir-
landes dn roses brodées ton sur ton. A son entrée
en scène, cette fraiohe toilelte est dissimulée sous
un confortable manteau d'automobile en drap ci-
tron, qu'un col rond et de larges revers en soie
noire, parsemée de pois blancs, assombrit joli-
ment.
Elle porte avec ce vêtement un petit bonnet
fraise écrasée, tout voilé de mousseline de soie
de même nuance que de lilliputiennes ailes, plan-
tées en aéroplane, maintiennent sur le devant.
Pour ce chapeau, comme pour celui du 30 acte,
une toute petite toque de tulle gris argent galonnée
et fleurie de roses mousses corail — il est inutile,
n'est-ce pas, de vous nommer ce maître Lewis ?
La note grise apportée par cette toque mignonne
est fort heureuse pour la robe de mousseline de
soie crevette parsemée de broderies que Benjamine
Lapistolle revêt pour sa visite au ministère tandis
--tftttltS' eterator e~o~, ocHo. impétueuse gamine, prise
d'une vocation religieuse subite, nous apparali mo-
destement habilîiè de cachemire gris perle sur le-
quel est jeté une petite mante bonne femme qu un
chapeau de velours gris fort amusant do forme
surmonte délicieusement.
Il me reste enfin, après vous avoir décrit toutes
ces merveilles, à parler un peu des robes simples
mais charmantes de Mlle Jane Sabrier. Celle-ci
porte au premier acte une toilette de petit lainage
à carreau gris et jaune qu'une ceinture de satin
noir relève très agréablement. A la fin de ce même
acte, le petit modèle Rosette, réveillé en sursaut
par les impétueux coups de trompe de l'auto en
panne, sorti précipitamment de sa chambre pour
nous montrer un petit peignoir blanc garni de ga-
lons, très amusant de forme.
J'ai beaucoup aimé aussi la robe du deux; cette
toilette de mousseline blanche et bleue est infini-
ment chic dans sa simplicité.
Pour terminer, un mot encore sur la robe de li-
berty bleu nattier foncé, du dernier acte, puis il
ne me restera plus à vous dire que toute la gloire
dont Bechoff David s'est, une fois de plus, couvert
hier soir, avec toutes les créations inédites dont
jo viens de vous parler si chaleureusement.
Clarens.
JpSwT*! dans voire intérêt eziger,chez tous les bons marchands
yp^§ us fâhmt-m A COUDRE-NEW-HBPE
^aâSl £ ïiiLfScsi'SînIssii3fi{iia31lSllSMl £ S.Up6rfedit»f.Ftstffl»3,»telifri
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(ancienne "REVUE DES REVUES ")
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goureusement inédits de premier ordre, collabora-
teurs les plus illustres, analyse des revues les plus
importantes du monde entier, etc., etc.. parait le
1" et le 15 cle chaque mois.
Paris et la France, 24 fr. par an; 14 fr. pour 6 mois
Etranger, 28 fr. — 16 fr. -
Les nouveaux abonnés recevront gratuitement
plusieurs primes importantes.
On s'abonne du lcr de chaque mois.
Spécimen gratuit sur demande.
Paris, 45, rue Jacob.
Directeur: Jean Finot.
CourrierdesThéâtres
Aujourd'hui :
Au Vaudeville, à quatre heures précises, pre-
mière des six matinées annoncées des sœurs
Wiesenthal dans leurs Poèmes dansés.
Jour de l'an d'Etoile, comédie en un acte, en
vers, de M. Hugues Delorme, commencera la re-
présentation.
Ce epectacte ne pourra être donné plus de six
fois les sœurs Wiesenthal ayant des engagements
antérieurs avec les grands théâtres de l'Allema-
gne.
Ce soir :
A l'Opéra, 8 heures, Faust (M31es Mary Gar.
den, Courbièree, Goulancourt, MM. Mura tore,
Marcoux, Dangès). Danse : Mlles Aida Boni, Meu-
nier, Johnsson).
A la Comédie-Française, 8 h. 1/2, l' Honneur et
l'Argent, comédie en cinq actee, en vers, de Fran-
çois Ponsard :
MM. J. Truffier, Monsieur Mercier ; Lcilner, Ro-
dolphe ; Louis Delaunay, un Capitaliste ; Siblol,
le Notaire ; Joliet, an Vieux Monsieur ; Falcon-
nier, 3e Créancier ; Hamel, un Homme d'Etat ;
Grandval, 101 Créancier ; Garay, 4e Créancier ;
Lafon, 2* Créancier ; R. Alexahdre, Georges ; Jac-
ques, Guilhène, te. ami • Georges Le Roy, 3*
Ami ; Décard, un Clerc de Notaire ; Ch. Ber-
teaux, 2° Ami.
Mmes Lara, Laure : Lynnès, une Vieille Fille ;
Maille. Lucile. ,
A l'Opéra-Comique, 8 h. 3/4, représentation po-
pulaire à prix réduits, avec location : Lakmé
(Mlle Zeppilli, MM. Sens et Chasne).
A l'Odéon, 8 11 1/4 (20 série de l'abonnement du
lundi : les Emigrants, la Bigote.
Au Lyrique-MunicjpaJ, soirée de gala, offerte
par le comité républicain du comméence. de l'in-
dustrie et de l'agriculture, aux délégués de l'As-
sociation internationale et commerciale de la cité
do Londres. Voici le programme de cette soirée
exceptionnelle :
Premier acte de la Favorite, Mme Nady Blan-
card, MM. Granier ch Sylvain ;
Troisième acte de Lucie (air de la Folie), Mlle
Chambellan ;
Grand air du troisième acte du Prophète, M.:
Alvarez el les encours :
Quatrième acte des lIuguenots, Mlle Lucienne
Bréval, MM. Affre et Delpany ;
Quatrième acte du Trouvère, Mmes Lilvinne et
Nady Blancard, MM. Granier, Ponzio.
Au Trianon-Lyrique, 8 h. 1/2, le raMon de
Ploërmel.
Aux Variétés et au Châtelet, rclâche.
MÉDAILLON
Emilienne Franville.
Voici le vrai lupe de la petite étoile parisienne,
qui ne demande qu'à grandir et qui occupera
peut-être une des premières places parmi les ve-
dettes de théâtre : brune, avec ses jolis yeux
bleus, son petit nez retroussé, bien ouvert à la
brise du printemps, son minois enjoué, ses lèvres
rieuses, toujours entr'ouvertes pour un mot d'es-
prit,' on ne peut, en eUel, être plus Parisienne
qu"Emilienne Franville : elle l'est royalement et
c'est pour cela oue sa jortune l'attache à la Co-
médie-Royale, à moins que ce sçil elle-même qui
retienne la fortune à la Comédie-Royale.
Comédienne adroite et excellente chanteuse, elle
a déjà une jolie carrière artistique ; son passage
au Palais-Royal et aux Folies-Dramaliques avait
été très remarqué ; elle lit une tournée brillante
en Russie et en Allemagne et elle était admira-
blement préparée à devenir l'étoile de la Comé-
die-Royale. Depuis deux ans, elle a créé une inli-
nité de rôles sur la petite scène au cadre d'or :
elle (ut charmante dans l'Entreprise délicate, ex-
quise dans le Roman chez la Postière, presque
tragique dans Peau de chien, les deux actes de
M. Henry Caen ; elle est. en ce moment, déli-
cieusement perverse dans Avant 4es courses, la
(ine comédie de M. Nozière, qui va doubler le cap
de la centième. La façon dont elle interpréta. Je
rôle de Farfadet, dans Fraisidis, la jolie pièce de
M. Jacques Redelsperger, permet d'espérer qu'on
reprendra prochainement ce charmant ouvrage.
Sans doute Mlle -Emilienne Franville fera-t-elle
cet hiver, une importante création au Vaudeville,
par permission spéciale du directeur de la Comé-
die-Royale, qui n'a rien à refuser à M. Henry
Caen, L'auieur de la pièce reçue paé MM. Porel et
Peter Carin. -
En attendant ces nouveaux, lauriers, Mlle Emi-
tienne Franville se recueille au Vésinet et con-
sacre les belles après-midi d'aulomne à bicycler
avec passion : et c'est parce qu'elle apporte un
peu de passion dans tout ce qu'elle fait, qu1 Emi-
lienne Franville est une artiste. - CHARLES BERT.
La reprise de « Lysistrata n :
D'un commun accord avec M. Maurice Donnay et
pour pousser au dernier point de perfection la mise
en scène « extrêmement compliquée et d'un luxe vé-
ritable i de Lysistrata, Mme Cora Laparcerie re-
met au jeudi 28 et au vendredi 29 octobre la répé-
tition générale et la première représentation de
l'œuvre de M. Maurice Donnay, aux Bouffes-Pa-
risiens.
Quelques notes ;
A l'Odéon, malgré l'énorme complication de la
mise en scène des Emigrants, les entr'actes sont ré-
glés de telle façon que La Bigote,.Ia délicieuse co-
médie de M. Jules Renard, commence a 10 heures
et que le spectacle se termine à minuit moins dix.
— A l'occasion des fêtes de la Toussaint, le CbA.
.telet donnera deux matinées de la Petite Capo-
raie, le dimanche 31 octobre et le lundi 1er novem-
bre.
On peut louer dès maintenant :
Aux Variétés :
Aujourd'hui lundi, relûche pour les répétitions
d'ensemble du Circuit. la comédie nouvelle de MM.
Georges Feydeau et Francis de Croisset, dont la
répétition 2 générale aura lieu après-demain soir
mercredi, 27 oclobre, et la première représentation
jeudi 28 octobre.
Les bureaux de location seront ouverts dès au-
jourd'hui pour les représentations du Circuit, dans
lequel M. Brasseur, Mme Marie Magnier, Mlle Lan-
tclme, feronk leur rentrée aux Variétés, et dont les
principaux rôles seront joués par MM. Guy, Max
DéarlY. Prince, Morcicey, Carpentier, Mlle Diéterle,
etc., etc.
-"'X'-
A la Porte-Saint Martin :
Malgré les services de première et de seconde N.
présentations très importants, la Grille a fait ec.
caisser, en trois jours : vendredi, samedi et di-
manche, le total plutôt coquet de 30.155 francs, te.
quel dépasse sensiblement le chiffre correspondanl
de l'Affaire des Poisons. C'est le record depuis
Cyrano. Voici donc la forte pièce d'Henri Bern-
stein repartie pour une carrière triomphale, avec
Lucien Guitry, qui, — comme le constatait l'una-
nimité de la critique, — atteint dans ce redoutable
rôle de Cortelon une maîtrise dramatique inégalée
et inégalable, et avec tes remarquables artistes qui
l'entourent, Mmes Gabrielle Darziat et Léonie
Yahuc, MM. Jean Coquelin, Pierre Magnier et Mos-
nier, en tête.:
Au Palais-Royal
Au Palais-Royal :
Très obligemment prêté par M. Henry Caen, di-
recteur de la Comédie Royale, à son confrère et
ami M. Eugène Htfros, M. Saulieu créera un rôle
important dans la Revanche d'Eve, la pièce de
MM. Antony Mars et de Beil, qui passera quand
le succès de Family-Holel le permettra.
'- -'l -
Au Trianon-Lyrique :
Voilà une fois de plus que Montmartre aura sw
attirer le loutrpublic élégant, car la Femme à
Papa, au Trianon-Lyrique, est un des plus grands
succès qu'ait eu le coquet théâtre qui, cependant,
n'en a pas été à court depuis quatre ans. Rosalia
Lambrecht est 1a Judic du jour et, à se rappeler ce
que l'inoubli ble artiste avait fait du rôle de la
Femme à Papa, on est enthousiasmé de voir qu'il
ait été possible à Rosaiia Lambrecht de faire une
nouvelle composition si remarquable et pourtant si,
différente de celle de Judic.
Au théâtre des Arts :
La direction du théâtre, qui vient d'effectuer sa
réouverture avec Vera Sergine dans Pulcinella,
nous prie d'informer le public qu'elle a décidé de
donner satisfaction aux nombreuses demandes qui
lui ont été faites pendant la saison dernière, rela-
tivement aux prix des fauteuils d'orchestre et de
balcon.
Le tarif de ces places est fixé dorénavant à 5, 4j
et 3 francs.
Aux Trente Ans de Théâtre :
La. fêle de Gounod que donneront jeudi prochain
1 EXPOSITION mercier FE
du 15 Octobre au 15 Novembre 100e Fbg St-Antoine
SALONS PETIT-POINT & AUBUSSON, (ParIs)
COLONIES PROTECTORATS
ET PAYS D'INFLUENCE
Au Maroc
Moulay-Hafid qui, après la chute de Bou-
Hamara, caressait l'espoir de mobiliser et de
lancer contre l'Espagne, les tribus, jusque-là.
hostiles au Maghzen, de la région. de Taza,
oui leur avait fait promettre, en même temps
que son appui, moral et des secours effectifs
en armes et en munitions, l'envoi d'une me-
ftalla, a dû renoncer à ce projet, devenu im-
praticable.
La seule offre de son alliance a eu pour
effet immédiat d'arrêler net l'élan des tribus
berbèves, prêtes à se porter au secours des
Riffains de Nador et de Sélouan. Riata, Tsoul,
Branès, etc., loin de courir sus à 1 Espagne,
s'apprêtent à recevoir à coups ae fusils iu., ic-
iruliers qu'aurait la folie d'envoyer chez eux
le descendant du Prophète, et à les traiter
comme le furent, il y a quelques années, ceux
d'Abd.el-Aziz qui, prudemment, après quel-
ques escarmouches, s'en revinrent à Fez.
On songe d'ailleurs, dans cette partie du
Maghreb. à 'confier le commandement su-
prême des tribus révoltées contre 1 autorité
chéri tienne, à quelque personnage marquant,
qui ait. les qualités requises pour .succéder au
défunt rogui. Et — chose assez invraisembla-
ble, mais qui, pourtant, est parfaitement exac-
te — des noms soiii mis en avant par certains
mécontents de l'entourage même du sultan,
pressurés jusqu'à la ruine, qui verraient avec
joie le retour d'un maître qui leur fut clément
et dont ra'llure débonnaire est plus que jamais
appréciée : Abd-el-Aziz.
Les candidats dont .on prononce déjà les
noms et qu'on désigne comme aptes à pren-
dre en mains l'autorité souveraine à Taza,
sont au nombre de trois : Bou-Amama, Si
Abd-el-Malek ben Mahieddine et Si Abd-er-
Jlhaman Zerhouni..
Le premier est vraisemblablement le fils de
notre vieil adversaire, mort il y a peu de
temps, et contre lequel il nous fallut lutter
énergiquement naguère au Touat et en d'au-
tres lieux. Son fils, pour une cause dont le
souvenir m'échappe, fit,, un jour, connais-
sance avec les géôles chérifiennes. Bou-Ama-
ma, prisant à sa valeur la magnanimité con.
hme de la France, vint Implorer son aide pour
le salut du prisonnier. Son appel fut entendu
'et le Maghzen accorda à notre représentant ce
que ni les prières ni les menaces du vieux
marabout n'avaient pu obtenir. Des bienfaits
de ce genre, tôt ou tard, portent leurs fruits.
Si Àbd-el-Malek ben Mahieddine est sur-
tout le candidat du clan demeuré fidèle à la
cause d'Abd-el-Aziz, clan; que les. exactions et.
la politique violente de Moulay-Hafid grossit
lous les iouro.
Quant à Si Abd-er-Rhaman Zerhounj, il est
le propre cousin (du défunt rogui, dont il fut
encore le khalifa. Ce double titre lui vaut
nombre de partisans.
La haine du sultan actuel, chez les anciens
sujets de Bou-Hamara, est à ce point irrécon-
cillablc, que Riata, Tsoul ou Branès sont dé-
cidés à tout plutôt que de subir la domina-
tion du Maghzen. Le jour n'est point éloigne,
à en juger par certains symptômes, où, a
l'exemple des Beni-Snassen et des Berbères
des Chaouïas. les .populations de la banlieue
de Taza viendront d'elles-mêmes nous deman-
der à. bénéficier d'un régime de paix féconde
analogue à celui dont jouissent les tribus
qu'abrite, soit temporairement, soit à titre
définitif, le drapeau tricolore.
Peu à peu, le vieux Mtaghreb se désagrège.
- Moulay-Hafid, par sa cruauté froide, par son
extraordinaire égoïsme qui le pousse, pour
satisfaire ses besoins d'argent, à pressurer
sans vergogne, fût-ce les populations d'un
loyalisme éprouvé, à mettre les charges à 1 en-
can, à multiplier, comme à plaisir, les diffi.
cultés sous -ses pas, aura contribué largement
à ébranler l'édifice qui se crevasse de toutes
parts.
Jacques d'Urville.
MOULAY-HAFID CONTRE LES PUISSANCES
Nouveaux attentats contre les protégés français,
anglais et espagnols
Tanner,. 24 octobre. — Mustapha-Erremiqui,
frère du caïd d'El-Ksar, vient d'entrer à El-Ksar
amenant une bande de prisonniers faits dans la
région et partmi lesquels se trouvent des protégés
français, anglais et espagnols.
Les craintes de pillage sont vives à El-Ksar. De
nombreux habitants se sont enfuis par crainte de
représailles.
On se demande où ira l'insolence de ragent de
Moulay-Hafid.
- SaM et M. Hiiit
L'aifaire des Comores
Monsieur le directeur,
Suivant l'invitation de l'é:pigraphe que porte
-le lUre de votre estimé journal, je lis le Gil
îitus régulièrement et, observateur fidèle du
carpe diem, j'y trouve au jour le jour l'utile
- mêlé à l'agréable.
Mais pourtant, un filet du 21 septembre der-
nier, à la rubrique colonies, et au sujet de l'ab,
dication du sultan de la Grande-Comore, Saïd-
Ali m'a surpris. Vous me permettrez de vous
expliquer pourquoi, car votre souci de « la
note exacte » est proverbiale, et votre collabo-
rateur J, d'Urville est généralement trop bien
renseigné pour craindre d'admettre, une fois
par hasard, le redressement d'une entorse à
la vérité.
Je ne vous ai pas écrit puis toi, parce que
mon érudition était restée en douane avec mes
cantines. Durant les vingt dernières années,
j'ai croisé maintes fois dans la mer des Indes,
et des stations réitérées dans ces parages
m'ont permis de suivre les événements poli-
tiques et autres de la plus curieuse des lies,
de Gaziza, la Grande-Comore.
Or, mon attention fut éveillée par cette
phrase de votre collaborateur : « Les îles Co-
mores sont des satellites de Madagascar ».
La distance entre la Grande-Comore et Mada-
gascar étant de trois cents milles en mer, il
est excessif d'imaginer une pareille force d'at-
traction. En réalité l'archipel dont la Grande-
Comore fait partie, a son existence propre et
sa sphère d'activité indépendante. Lorsqu'on
regarde, dans son cabinet, des mappemondes
ou des cartes à très petite échelle, on peut
avoir de ces erreurs d'optique. Mais celui qui
a. parcouru lui-même ces régions, sait à quoi
s'en tenir et rectifie le point visuel.
La suite du .filet, rédigé du reste avec sa-
veur, m'a prouvé que la bonne foi de votre
îédacteur avait été surprise et m'a remis en
mémoire un proverbe de là-bas : « Grande
- est la justice de l'homme blanc ; plus grande
est la puissance d'un mensonge. n
M. J. d'Urville s'est laissé persuader, en
effet, que Saïd-Ali était un héros infortuné,
une lamentable victime persécutée par un mé-
chant personnage, le traître du mélodrame
classique, le colon Humblot
Laissez-moi vous raconter brièvement ce
que ]o sais.
Remontons ki- une trentaine d'années. La
Grande-Comore était alors une île à peu près
sauvage, sans culture, exploitée seulement par
» les négriers, les traficants de chair humaine,
qui y trouvaient une marchandise assez abon-
dante, puisque la population était évaluée à
35.000 Arabes et nègres. Mais des guerres in-
cessantes entre les "petits potentats qui se par-
tageaient le pays, ainsi que de fréquentes in-
vasions malgaches, entretenaient la misère et
la barbarie. La forêt vierge couvrait presque
tout le territoire, car les indigènes ne cou-
paient du bois que pour construire leurs ca-
banes et leurs pirogues, et ne pénétraient dans
les fourrés que pour la récolte du miel.
Les principiôules de cette pétaudière primi-
tive se prétendaient descendants directs de
Mahomet, ce qui leur assignait un rang élevé
dans l'aristocratie musulmane et leur inspi"
ruifc une vanité démesurée.
Au moment dont je parle, la Grande-Co-
more était divisée en cinq sultanats princi.
paux tous répartis entre les membres de la
famille du sultan Achmed. Un petit-fils de en
sultan, le nommé Saïd-AGv qui avait, paraît-il.
lté désigné par son grancl-père pour lui suc-
céder, jouait le rôle de prétendant, réfugié à
Mayotte.. Il eut recours au commandant do
cette. île, le colonel français Colomb qui, après
avoir vu le testament d'Achmed, consentit à
favoriser l'installation de Saïd-Ali comme sul-
tan de la Grande-Comore , et, après des lut-
tes sanglantes, notamment contre le protégÓ
du sultan de Zanzibar, Moussafonmou, Saïd.
Ali devint grâce à notre appui, en 1881, sul-
tan de toute l'île.
Mais les Anglais et les Allemands avaient
remarqué la Grande-Comore, et guettaient
cette proie, dont l'état anarchique semblait
fendre la coliquête facile. Sur l'entrefaite, un
Français, jeune et énergique, M. Humblot, dé-
barqua dans l'île, en 1884. Il venait chargé
par le ministre de l'instruction publique d'une
mission scientifique aux Comores. Il parcou-
rut fe premier cette terre encore inexplorée,
s'ouvrit un chemin à travers la forêt vierge,
triompha de l'hostilité des safuvages et fanati-
ques comoriens et s'aperçut
tions volcaniques, malgré le manque d'eau
courante, il y avait à divers endroits un sol
fertile, des pâturages, et la forêt même était
une richesse. On y pouvait établir, en em-
ployant les indigènes, une importante exploi-
tation agricole : telle fut l'œuvre que M. Hum-
blot concut et narvint à réaliser.
Saïd-Ali commença par s'assoder aux vues
de M. Humblot, auquel il concéda les terres
vacantes, car il y trouvait un intérêt : il
fournissait la main.d'œuvre contre espèces.
Lu Société de la Grande-Comore put ainsi se
développer et prospérer, grâce à la vigou-
reuse direction de son fondateur. Et qui fut
déconcerté par cette rapide initiative ? Ce fut
le compétiteur anglais et l'allemand, qui cher-
chaient l'un et l'autre à soustraire à l'influence
française les îles indépendantes du canal do
Mozambique. Il y avait à Anjouan un con-
sul anglais ; un autre Anglais était fixé à
Mohely. Les Allemands s'établissaient sur la
côte orientale d'Afrique et convoitaient Zanzi-
bar et les Comores. Ils adressèrent à M. Hum..
blot d'es propositions Iséduisantes pour
faisant demander officiellement par le sultan
Saïd-Ali, au résident de la République, le pro-
tectorat de la France. Un traité fut signé, le
5 novembre 1885, à bord de l'aviso Boursaint,
par Said-Ali. et ses ministres d'une part, et
M. Humblot, assisté par le commandant du
Boursaint et ses officiers, d'autre part. La
Grande-Comore était acquise 'désormais à l'in-
fluence française.
Dès lors, M. Humblot s'occupa de transfor-
mer le grand domaine qui nous était ouvert.
planta, sur des étendues gagnées sur la
forêt, des caféiers, vanilliers, cacaoyers, gi-
rofliers, cannes à sucre,, etc. Il apprit le tra-
vail et la culture à des milliers de Corn ori pris
ii l' uvi-iiiibtt » eniin dans la large acception
du mot. Et', grâce à ses efforts, la Grande-
Comore devint de plus en plus une dépen-
dance française, ce qui porta -ombrage à Saïd-
Ali. Celui-ci ne pardonnait pas, d'ailleurs, à
M. Humblot, de le gêner dans son commerce
d'esclaves. Pourtant, le « grand colon » avait
été, à diverses reprises, le sauveur du sultan.
dont il avait payé la rançon à ses vainqueurs
les Bodjmiens, puis il avait obtenu l'envoi
d'un navire de guerre et .de marins français,
qui avaient soumis définitivement -ces uoaji-
niens. Mais Saïd-Ali, une fois hors de danger,
songea à se débarrasser de M. Humbilot., son
bienfaiteur, qui avait été chargé, à titre gra-
tuit, des fonctions de résident à la Grande-
Comore, le 11 octobre. 1889, et avait obtenu le
6 janvier 1892, un nouveau traité assurant à
la France une situation prépondérante. dans
l'administration de ce pays. M. Huimblot eut
à lutter à tour de rôle contre des insurgés nui
voulaient détrôner Saïd-Ali, et contre ce der-
nier, furieux de ne pp.s pouvoir rétablir les
vieux abus et les redevances anciennes.
Comme il était die plus en -plus évident que
rien ne lasserait M. Humblot, qu'il tiendrait
tête à tout le monde, et poursuivrait quand
même jusqu'au bout sa mission colonisatrice ;
comme on n'avait même pas l'espoir de le
faire rappeler par le gouvernement, puisqu'il
était le représentant à demeure d'une so-
ciété agricole, Saïd-Ali résolut de le faire as-
sassiner.
Le 2 août 1893, M. Humblot fut assailli par
trois séides du sultan,- embusqués ; il fut
frappé a-u côté droit par une sa,gaie qui, pé-
nétrant dans J'abdomen, y resta en entier, le
manche étant cassé par la violence du choc et
la pointe sortant à gauche ; en même temps,
il recevait sur l'épaule droite deux terribles
coups de sabre. Il eut néanmoins la force de
tirer sur ses agresseurs, qu'il mit en fuite ;
il arracha lui-même la sagaie, contint ses in-
testins qui sortaient par la plaie, et fut ra-
mené presque mourant chez lui par des ou-
vriers que la détonation avait attirés. Seule sa
robuste constitution le sauva. - - - -
Cet attentat commis par des gens à la solde
do Saïd-Ali, donna la .mesure de l'audace et
de la cruauté du sultan ; il fallait renoncer
à coloniser l'île ou châtier le coupable. Sa
peine n'eut rien de cruel : on l'interna il
Diego-Suarez, ptuis on l'envoya à la Réunion,
libre, en lui faisant une rente de 10.000 francs.
Il conserva le titre de sultan de la Grande-
Comore et ne laissa1 pas que l'intriguer contre
nous, jusqu'à ces derniers temps, où 11 a
abdiqué moyennant- une augmentation de sa
pension et la rosette d'officier de la Légion
d'Honneur. Voilà cette lamentable victime !
On accorde des revenus à ce meurtrier arabe,
et on le décore de l'ordre des braves ! Celui
qu'on accable, c'est le bon Français, qui nous
a donné une belle colonie et a fait pénétrer
la culture et la civilisation dans une île où
l'on ne connaissait avant lui que la sauvage-
rie, la paresse, la crasse, la tuerie perpétuelle
et la traite des noirs. Dans les vingt-cinq der-
nières années, la populmation. de la Grande-
Comore a presque doublé. Je vous le dis, il
serait à souhaiter que ious eussions beau-
coup d'Humblot. Nous aurions moins à dési-
rer pour notre empire colonial. Entre un
Iïumtlot et un Saïd-Ali, le choix paraît facile.
Pourtant, d'un côté, nous voyons un barbare,
Pourtant, l'intstigateur d'un criminel attentat,
reconnu
décoré officier de la Légion d'honneur. (11
est vrai que le personnage par qui fut négo-
ciée la chose avait jeté: antérieurement sa dé-
coration aux orties 1) et, de l'autre côté, nous
lisons les attaques qu'on multiplie dans des
« campagnes » de presse contre un excellent
colon qui a régénéré la Grande-Comore et l'a
rendue française.
C'est-il avec ce genre d'encouragements que
l'on compte fomenter chez nous le patriotisme
et l'esprit colonisateur. Voilà, monsieur le Di-
recteur, une question à laquelle la réponse
des lecteurs de votre honorable journal n'est
pns douteuse, car il reste en France quelque
'souci des intérêts nationaux, quelque justice
et quelque bon sens.
Lazare.
NOUVELLES MILITAIRES
ABMÉE
L'incident de Pontivy
Pontivy, 24 octobre. — M. Berlaud, vétérinaire
en nremier, au 2e chasseurs, qui frappa le cavalier
Tregre, rappelé par le télégraphe, a été accompn-
gné par un sous-oficier jusqu'à la caserne, pour
être mis aux arrêts de rigueur. L'enquête continue.
MARINE
A l'arsenal de Toulon
Toulon, 23 octobre. — A la suite de méfaits comr
mis aux abords de l'arsenal et du mouillage de la
flottille des contre-torpilleurs, des ordres sévères
ont été donnés par les autorités maritimes pour
que les chaloupes à vapeur poursuivent les mal-
faiteurs. Ce soir, un de ces derniers, qui avait fait
feu sur un matelot qui le poursuivait, a été arrêté.
Les fonctionnaires ont été doublés sur certains
points de l'arsenal.
Les" Camelots du Roy au Luxembourg
Une bagarre
Les « Camelots du Roy » avaient pro-
jeté un nouvel acte de vandalisme contre le mo-
nument de Seheurer-Kestner. A cet effet, on voyait
enlrer, hier, vers cinq heures, dans le Jardin du
Luxembourg, une cinquantaine de ces messieurs.
Mais un nombre à peu près égal d'étudiants répu-
blicains avaient été Drévenus ; ceux-ci vinrent à
la rencontre de la « Royale Camelote » et une
courte bagarre se produisit.
Finalement, les deux partis furent dispersés par
les agents qui opérèrent l'arrestation. d'un étu-
diant républicain.
Le jeune homme arrêté a, d'ailleurs, été remis
immédiatement en liberté.
- 4>
La Tempête
Sur les côtes bretonnes : nombreux sinistres
Brest. 24 octobre. — Une tempête du sud-oues'
souffle avec violence sur les côtes depuis hier soir.
Le bateau sardinier Eclaireur. de Concarneau, s'est
échoué sur les rochers de la pointe du Cabellou.
Le bâtiment a sombré ; l'équipage est sauvé.
Le matelot llelgoualch, du bateau les Droits-de-
l'Homme, rentrant à Lesconil, a été enlevé par
une lame et projeté à la mer. Il a été sauvé par
le bateau de pêche 2766.
Le bateau sardinier Carabinier, patron Lozivit,
de Concarneau, allant à Penmarch, a abordé au
large des lies Glenans le bateau de pêche 2827,
de Lesconil, lui causant une voie d'eau. Il n'y a
pas eu d'accident de personne.
Le canot à voiles du Magellan, bâtiment-école
des mousses, a chaviré sous une rafale au sortir
Ùù port de guerre. Les mousses qui se trouvaient
à bord ont été sauvés.
Emouvant sauvetage
Honfleur. 24 octobre. — Ce matin, à 4 heures,
le bateau de pêche Pairiote-C. 656, de Dives, a été
jeté à la côte par un coup de vent violent de l'ouest ;
il s'est échoué en aval de Honfleur, à cent mètres
des jetées.
Le canot de sauvetage Honfleur est parti au se-
cours du bateau naufragé, déjà rempli d'eau.
Après le sauvetage de deux pêcheurs, qui s'ê-
taient réfugiés dans la mâture, un coup de mer
violent jeta le canot sauveteur sur -le Patriote, en-
levant à la mer deux des sauveteurs, qui, après de
nombreux efforts de l'équipage, furent sauvés à
Ifiur tour.
Le bateau de sauvetage est rentré à 5 IL 1/2,.
1 Un Crime à Robinson
Tentative d'assassinat sur une rentière -
Le joli village de Robinson a été mis en émoi
hier matin par une tentative d'assassinat qui n'a
échoué que grâce à l'intervention toute fortuite
d'une habitante de la localité.
Mme Elise Bagot, âgée de soixante-cinq ans,
possède en usufruit depuis plusieurs années une
maison située, 4, rue d'Aulnay. En outre, le pro-
priétaire de cet immeuble, M. Pierre Brioson,
sert à la sexagénaire une rente viagère dont le
capital, à la mort de cette dernière, doit revenir
à un nommé Antoine Brioson, âgé de soixante-
cinq ans, qui habite également l'immeuble de la
rue d'Aulnay. Trouvant sans doute que ce capi-
tal tardait trop à lui échoir, celui-ci a voulu sup-
primer le seul obstacle qui l'empêchait de deve-
nir rentier et a tenté d'assassiner Mme Hagot.
Il était environ sept heures du matin r p&n&-
imnt, dauo» îa, ciicbMiore de la sexagénaire, située
au rez-de-chaussée, Antoine Brioson s'est avancé
sur elle et l'ayant saisie à la gorge, l'a frappée
de sept coups d'un poinçon long et effilé. Griè.
vement atteinte au bas-ventre et au sein gauche,
Mme Hagot s'est affaissée, tandis que le meur-
trier, dérangé par une porteuse de pain, s'em-
pressait de prendre la fuite.
M. Lefèvre, commissaire de police de Sceaux,
a fait transporter Mme Hagot à l'hôpital Cochin
et recherche le meurtrier; On croit que ce der-
nier s'est fait justice.
—..
Faits Divers
Accident mortel. — Un employé de commerce,
M. Joseph Salavy, âgé de trente-cinq ans, descen-
dait, flier matin, à bicyclette, la rue Julien-Lacroix,
où il habitait. Entraîné tout à coup, il perdit les
pédales.
Le cycliste fit alors agir son frein, mais arraché
de sa selle par la brusquerie de l'arrêt, il fut pro-
jeté contre un reverbère.
Des passants le relevèrent et le transportèrent
dans une pharmacie, où malgré les soins, il ne
tarda pas à expirer. Le malheureux s'était fracturé
le crâne.
Enfants écrasés. — L'Esplanade des Invalidas
a été, hier matin, le théâtre d'un grave accidenl.
Deux enfants qui jouaient au cerceau, ont été
renversés par une voiture de maître, dont les roues
leur ont passé sur le corps.
Le plus jeune, Charles Delard, âgÓ de sept ans,
demeurant 45, rue Saint-Dominique, qui avait la
poitrine défoncée, a été transporté à l'hôpital des
Enfants-Malades. :,
Le second, Jean Rullin, figé de neuf ans, blessé
à la jambe gauche, a été reconduit rue de Lille, au
domicile de ses parents.
Après la rupture. — Lasse des mauvais traite.
ments que lui faisait subir René Chemin, ironie
ans, menuisier, avec qui elle vivait, Louise Mon.
ceau, fleuriste, quittait, il y a quinze jours, le
domicile commun, rue de Flandre, pour aller ha-
biter seule, rue Riquet. Chemin se mit à la re-
cherche de la jeune femme, se promettant de se
venger de son abandon.
la nuit dernière, la fleuriste rentrait chez elle,
quand Chemin, qui était accompagné de deux rô-
deurs, lui barra le passage. -, -
Pendant que 'les compagnons du menuisier fai-
saient le guet, Chemin se ruait sur son ancienne
maîtresse et la frappait de plusieurs coups do
casse-tête sur le crâne. Une fois la malheureuse
évanouie, il lui déroba son porte-monnaie et deux
bagues en or. -
Dix minutes plustard, les agents découvraient
la fleuriste et la transportaient à l'hôpital Saint-
Louis.
Son misérable amant et les gens qui l'accom-
pagnaient sont activement recherchés par la
Sûreté.
Nouvelles de partout
PROVINCE (24 oclobre)
Pau. — Une usine, située à Uzos, près de Pau,
a été entièrement détruite cette nuit par un incen-
die. Les pertes sont élevées.
Poitiers. — Ce matin, vers 5. h. 30, le nommé
Langevin (Jean), garçon boulanger, 27 ans, a tenté
d'assassiner pour la voler la nommée Bernard
(Marcelle), 25 ans. -
Langevin a été arrêté.
Pontivy. La brigade de la police mobile de
Nantes a arrêté, à Rennes, le nommé Marcel Le
Brigand, accusé d'avoir assassiné, le 22 septembre,
M. Duringer, brasseur à Pontivy, en lui portant un
coup de poignard dans le vêntre.
Dans la chambre de Le Brigand, on a décou-
vert des lettres échangées entre Le Brigand et
Mme Duringer, et l'arme qu'on #suppose avoir ser-
vi au crime.
M. Duringer, le brasseur assassiné, était, pa-
raît-il, un alcoolique, et l'on se trouverait en pré-
'Bence d'un crime passionnel. *
Rouen. — Le champ des opérations du parquet de
Houcn s'étend, en ce qui concerne le sujeb de l'af-
faire d'avortement et d'infanticides. Après le doc-
teur Bouju et sa maîtresse, la femme Sénard, dont
l'enfant fut étouffé par le médecin, a été arrêtée ce
soir,
D'autres arrestations sont imminentes.
Lo Curî«iix.
--
AVANT-PREMIERE
« Lysistrata » aux Bouffes-Parisiens
Le 22 décembre 1892 — dix-sept ans déjà - le
Grand-Théâtre donnait la première représentation
de Lysistrata, de M. Maurice Donnay, chansonnier
du Chat-Noir.
Demain, les BouITes-Parisiens reprennent Lysis-
trata, de M. Maurice Donnay, de l'Académie fran-
caise : une reprise en avait été faite dans l'inter-
valle par MM. Porel et Albert Carré, directeurs du
Vaudeville, en 1896.
Aristophane n'eut, pour ainsi dire, aucune part
à réclamer dans le succès de Lysistrata : ceux
qui ont lu ses œuvres savent qu'il s'est plu iï
amasser dans celle-ci les obscénités : les Grecs,
dont l'àme fut la plus fine "et la plus artistique du
monde ancien, dont l'idéal s'éleva plus haut que
tout autre, n'eurent, par un phénomène singulicr,
aucune notion de la décence, voire de la pudeur,
"et Aristophane n'a pas écrit une scène de celle
verveuse comédie, où la plaisanterie, grosse et
crue, ne s'étale avec un réalisme outré ! Nous pou-
vons donc nous consoler de l'accusation de cor.
ruption qu on nous adresse parfois, en pensant
(m'en fait de démoralisation nous n'avons rien in.
venté I Celle des Athéniens n'a pas trop nui au
développement de leur génie ; un tel exemple est
pour nous assez honorable !
M. l\ £ iurice Donnay avait à compter avec notre
atticisme, qui s'effarouche plus aisément : il a
écrit Lysistratâ avec le plus pur esprit parisien et
boulevardier ; cet esprit fut tel qu'il séduisit par
sa bonne humeur, sa désinvolture, nar sa blague
même 1
11 a supprimé les grossièretés qui encombrent
les premières scènes de Lysistrata, tout en leur
conservant leur légèreté grivoise : les Athéniennes
y évoquent, en toute liberté, les choses de 1 amour ;
quelques-unes jouissent d'un « tempérament exces-
sif » ; elles connaissent, et à fond, les mystères
de la volupté ; mais tout se passe en paroles, el
M. Maurice Donnay, moins osé qu'Aristophane,
nous en épargne le geste.
Quel chemin parcouru depuis l'époque du Chat-
Noiry de Rodolphe Salis, où M. Maurice Donnay
déjeunait parfois d'un sonnet pour souper d'uno
ballade, suivant la pittoresque expression de M.
Léo Marchés 1 Heures inoubliables, où, dans un
exil charmant de trois mois au bord de la mer et
dans la paix des champs, il s'enferma avec son
ami le musicien Amédée Dutacq et rapporta cette
Lysislrata, qui, poème et musique, est, au bout
de dix-sept ans, demeurée aussi exquise, aussi sé-
duisante. aussi moderne !
Que sont devenus }Pg interprètes de Lysistrata ?
C'est d'abord Mme Réjane, deux fois triomphante,
à la création et à la première reprise ! La cour-
tisane Salabacca, ce fut Mme Tessandier, puis
Mlle Rosa Bruck : ce sera demain la resplendis.
sante Félyne. Mlle Augustine Leriche d'abord, Mlle
Cécile Caron ensuite furent Lampitos, la femme
au tempérament excessif : ce sera demain Mlle
Marguerite Lavigne, dont l'outrancière fantaisie
sera à la hauteur du rôle. Mlle Suzanne Carlix,
deux fois Callyce, cède son rôle à Mlle Alice Clair-
ville ; la brune Valdec succède à Mlle Cécile Sorel,
qui succédait elle-même à Mlle Montéharmont. Myr-
talo, créée par Mlle Blanche Dufrène, repris par
Mlle Lucy Gérard, sera Mlle Mario Calvill ; Cyn-
na, Mlle Florisey après Mlles Suzanne Munte et
Drunzer.
Tout un lot de courtisanes et d'honnêtes femmea
était incarné par Mlles Aimée Martial, Melcy, Su-
zanne Avril, Léo Renn, etc.; elles seront rempla-
cées par d'autres qui entrent dans la carrière quand
leurs aînées y sont encore et dont or dit beaucoup
de bien !
M. Lucien Guitry, puis M. Dumény furent Aga-
thos, dont le rôle est repris par M. Roger Karl ;
M. Hasti succède à MM. Montbard et André Cal
mettes ; M. Savry, à M. Maury ; M. Sauriac, tN
MM. Lugné-Poë et Boisselot.
Le prologue sera dit par M. Félix Gandera, quo
son succès récent 'dans les- Deux Visages a déjà
mis en valeur ; Cynésias sera M. Telegen, après
MM. Matrat et Numès ; M. Bouthors succède an
joyeux Torin.
On sait le grand, effort artistique accompli par
la nouvelle et aimable directrice des Bouffes-Pari.
siens, la grande artiste Mme Cora Laparcerie, pour
donner à Lusistrata une somptueuse mise en scène,
digne de celles qu'elle eut déjà, et les soins qu'elle
a apportés à moderniser luxueusement le vieux
théâtre Comte, qui en avait d'ailleurs bien. besoin :
tout fait présager pour cette Lysistrata troisième
le succès éclatant de ses aînées I
Charles Bert.
■ ■ ammm——■—«a—w—" ■'
Les Concerts Classiques
Je n'ai pas grand'chose à dire de la Damna-
tion de Faust que l'Association des Concerts
Colonne donnait hier, au Ghâtelet,; devant une
salle comble. Mme Litwinne a obtenu son ha-
bituel succès ; le ténor Granier remplaçait
Van Dyck comme un débutant peut suppléer
à l'autorité d'un grand artiste ; Méphistophé-
lés était chanté d'une voix mordante et expres-
sive par M. Huberdeau ; enfin M. Pierné, qui
remplaçait M. Colonne, a dirigé à souhait.
Pour la critique, pour le public avide de
nouveau sinon d'inédit, le programme des
concerts Lamoureux présentait l'attrait d'une
première audition, le Tsar Saltan, de Rimsky-
Korsakow. A cet attrait venait se joindre un
fragment -du premier acte de la ltVaUcyrie,
charité par Mme Jeanne Raunay et M. Imbart
de la Tour. J'ai déjà dit, l'autre jour, ce que
je pense de ces œuvres théâtrales, -de ces oeu-
vres du répertoire que donnent nos sociétés
de concerts ; je ne pourrais que me répéter.
La seule excuse qui se puisse trouver, c'est
que ce morcellement nous permit d'entendre
Mme Jeanne Raunay chanter le rôle de la
blanche Sieglinde .; Mme Raunay a fait va-
loir avec sa belle autorité, sa noblesse de style,
ce fleurissement éperdu de thèmes amoureux
qui forme la fin du premier acte de la. Wal-
kyrie. E'IIe a été très chaleureusement applau-
die, ainsi que le ténor Imbart de la Tour, de
qui les moyens vocaux sont aidés par une
diction intelligente et expressive. L'orchestre
qui avait, sous la conduite de M. Chevillard,
interprété en toute perfection la deuxième
symphonie de Beethoven, m'a paru hésitant
dans la Walkyrie ; accrocs aux cuivres dès le
début, manque de sonorité des violoncelles
quand apparaît lp lied du Printemps.
Par contre, interprétation supérieure du pré-
lude de Fervaal, de M. Vincent d'Indy ; voilà
une page inspirée et rêveuse, un hymne dis-
cret que chantent les cordes, et que les cordes
de l'Association Lamoureux ont supérieure-
ment chantée.
J'ai gardé pour la fin le Tsar Saltany comme
on conserve une friandise pour terminer un
repas. C'est, en effet, une vraie friandise mu-
sicale que cette suite d'orchestre extraite du
conte lyrique de Rimsky-Korsakow. Elle se
compose de trois numéros. Dans le premier,
le tsar Saltan s'en va-t-en guerre, car il défile
sur une marche joyeuse, quelque chose com-
me une chanson, d'allure héroïque et aussi un
peu banale, mais d'une. bien plaisante colo-
ration orchestrale. Le numéro deux nous dé-
crit les angoisses et les pleurs de la tsarine
abandonnée au caprice des flots. Là, nous
sommes en pleine virtuosité instrumentale :
dés cordes et des bois sur une tenue de cui-
vres décrivent le bruissement des flots ; un
chant douloureux du cor nous module 1a dou-
leur de la tsarine. Enfin, le morceau le plus,
brillant est le numéro 3 : l'évücation de l'Ile
magique. Ce n'est plus seulement ingénieux,
c'est de la féerie symphonique, une féerie de
sons diaprés, de combinaisons harmoniuues.
oomme le Rimsky-Korsakow de Shéhé-rézadc
en sait être le magicien et le musicien.Allègre-
ment des gnomes dansent sur un rythme dis-
cret et spirituel que martèle une note de xylo.
phone et de flûte ; l'auditeur sautille avec l'or-
chestre, tant H a l'illusion d'être balayé avec
cette musique ; puis une mélodie s'élève, un
de ces lieder nationaux russes sans doute, qui
célèbre la vue -de l'île ou l'arrivée dans l'île ;
c'est chanté par les cordes et les bois, et ce
thème, d'une belle venue, est repris, coloré,
par l'orchestre entier qui s'unit en un triom-
phe de sonorités éclatantes et de colorations
séduisantes. M, Chevillard a dirigé cette suite
avec esprit, avec goût, avec pré-ciisiuii aussi ;
il semblait partieper à l'allégresse de cette
musique.
*
ÇA ET LA
M. Adolphe Jullien, le critique musical
averti des Débats, a connu de près Ernest
Reyer ; en maints feuilletons il en analysa les
partitions. Mieux encore, il succéda à l'auteur
de Sigurd et de Salammbô au rez-de-chaussée
de ces mêmes Débats. Il était donc tout dési-
gné pour .écrire avec compétence la biogra-
phie du maître disparu. Le Reyer qu'il vient
de publier dans la eoliection des Musiciens
célèbres (Laurens, éditeur) est mieux qu'une
biographie ; c'est, notées par un ami fervent,
la carrière et les péripéties de la carrière du
grand mùsieien.
- Adolphe Jullien mous présente un Reyer vi-
vant et agissant. Il rrous le montré arrivant à
Paris, allant offrir sa première partition, le
Selam, au directeur-de l'Opéra-Comique, et
conciliant eon métier de compositeur avec
celui, non .moins -délicat à tenir, de critique
musical. Il faut rendre cette justice à Rcycr,
et M. Adolphe Julien met cette, qualité bien
en lumière, que Reyer critique musical, ne se
servit jamais de sa plume poiur être utile à
Reyer musicien de théâtre. C'est là un exem-
ple de conscience artistique digne d'être cité.
L'élude de M. Adolphe Jullien abonde en sou-
venirs personnels ; nous assistons aux luttes
du compositeur contre l'entêtement et la rou-
tine des directeurs de théâtres, luttes qui abou-
tissent aux triomphés de Sigurd et de Sa-
lammbô à l'étranger d'abord, puis enfin à
Paris. Le livre de M. Adolphe Jullien est atta-
chant comme un roman.
M. Paul Dup'in, le compositeur autodidacte,
dont j'ai maintes fois parlé, notamment à pro-
pos du très curieux concert où il révéla ses
œuvres, publie chez Senart, Roudaniezv un re-
cueil de doiize mélodies, d'une saveur étrange,
en do h ors de toute formule d'école ; c'est d'un
art très personnel et' très prenant à là fois.
Ajouterai-je que pour les interpréter il ne faut
pas seulement être un chanteur ou une chan-
teuse ? Il faut les comprendre.
Du même auteur le quatuor Parent exécu-
tait vendredi dernier, au Salon d'Automne,
un quatuor à cordes d'après le Jean Christo-
phe de M. Romain Rolland. Je n'ai pu assis-
ter à cette SOOrucB. Mais je me réserve d'en
parler après une prochaine audition. 11 faut,
en tout cas, féliciter M. Paail Dupin de se con-
sacrer désormais à la composition de qua-
tuors ; ce sont là des exemples artistiques et
désinlérossés qui se font rares à notre époque.
Louis Schneider.
Le Théâtre
Au THÉATRE DES ARTS : PUlcinella, piècë en trois
actes, en vers, de Mlle J. d'Orliac. — Mélilla,
drame antique en un acte, de M. A. Meunier.
J'ai rendu compte, cet été, de Pulcinella, la
pièce de 'Mlle J. d'Orliac qui fut jouée à
Champigny, sur le théâtre de la Nature. Le
théâtre des Arts vient de reprendre cette fan-
taisie symbolique qui combat, non sans géné-
rosité, l'égoïsme philosophique de Nietzsche.
L'oeuvre est un peu confuse, mais elle n'est
pas sans poésie et sans profondeur. Elle fait
le plus grand honneur à Mlle d'Orliac.
Elle est jouée avec conviction et avec .pitto-
resque pas Mlle Derigny, qui tient le rôle créé
par Mme Tessandier. Mlle Bertile Leblanc,
aux regards purs, à la voix harmonieuse, est
une touchante Colombine. M. Mirman est un
-Scaramouche intelligent et M. Durozat repré-
sente avec force un vieux berger qui excite
l'humanité à s'affranchir de la bonté.
Mais Mlle Véra Sergine a triomphé. Par la
puissance de son talent, elle donne à la pièce
la cohésion qui risquerait de lui manquer.
Elle est gaie, angoissée, tragique. Elle expri.
me, avec une souplesse admirable, les révol.
tes, les doutes, la sublime résignation de pul-
cinella. Elle est une petite bohémienne et elle
est aussi une âme douloureuse, hésitante, cii-
ininelle et radieuse. On l'a longuement accla-
mée. Comment la Comédie-Française ne s'at-
tache-t-elle pas une telle artiste ?
Au début de la soirée, on avait joué un pe-
tit acte antique de M, Meunier. Le public a
souri en écoutant les souffrances de la joueuse
do flûte M éliUa. Elle aime le beau Lecnès ;
mais elle rie veut pas lui appartenir pour ne
pas souiller la pureté de ce sentiment. Ainsi
la fille Elisa ne se donnait pas au petit soldat
qu'elle chérissait : elle le tuait. Mélitta ne
frappe pas Lécnès ; elie se suicide et, devant
son cadavre, Léonès avoue qu'il ne soupçon-
nait pas p.n Allà une telle beauté.
Naguère, à l'OEuvre, en des soirées d'art,
cet acte aurait peut-être soulevé l'enthousias-
me des fidèles. Les spectateurs, hier, ne l'ont
pas pris au sérieux. La foi s'en va. Du moins
on a. rendu justice à la sincérité de Mlle Géo
Dicily et à la grâce de Mlle Sylvaire.
Et il convient de dire qu au vaudeville, en
matinée, avant les danses délicieuses des !
sœurs Wiesenthal, nous avons applaudi un
joli arrangement de Je dine chez ma mère.
M. Hugues Delorme a orné cette pièce aux
grâces anciennes de vers légers, spirituels, et
parfois surannés à dessein. Le succès a été
vif. Les interprètes, aux costumes Louis-Phi-
lippe, ont droit à des félicitations. Mlle Carè-
ze est une gentille soubrette ; M. Joffre est
un rapin ému à la diction très nette. Mlle Cor.
mon — la Grisi — est pllus belle que ne le
fut la célèbre danseuse. Ses attitudes sont har-
monieuses. Elle joue simplement et elle met
en valeur l'harmonie des vers. Son articula-
tion est précise. C'est .une bonne comédienne
et MM. Porel et Peter Carin ont eu raison de
s'assurer son concours.
Et pourquoi la Comédie-Française n'inscrit-
elle pas à son répertoire Je dinc chez ma mè-
re ? L'un des auteurs, M. Adrien Decourcel-
les, fut rendant quinze ans un lecteur de la
Maison. On acquitterait pour sa mémoire une
dette de reconnaissance. Cet acte agréable çt
célèbre trouverait aussi dans notre théâtre
subventionné de bons interprètes : Mlle Sorel
et M. Georges Beer.
, Nozière.
Leurs Toilettes
AU THÉÂTRE
Avec quelle impatience n'attendait-on pas la
réouverture du théâtre de la Renaissance et la gé-
nérale de la Petite Chocolatière, qui devait servir
de début à la direction de M. Tarride.
L'intérêt était doublé encore par la présence de
Mme Marthe Régnier, l'enfant chérie du public,
dont la grâce nous a parue plus juvénile encore
dans ce cadre si féminin.
A tout seigneur, tout honneur.
Je coummencerai donc par vous décrire les robes
de la petite directrice, qui sait être en môme temps
une délicieuse ingénue.
Mme Marthe Régnier porte aux deux premiers
8ICtes une robe de mousseline de soie rose plissée,
sur laquelle se jouent de mignonnes petites guir-
landes dn roses brodées ton sur ton. A son entrée
en scène, cette fraiohe toilelte est dissimulée sous
un confortable manteau d'automobile en drap ci-
tron, qu'un col rond et de larges revers en soie
noire, parsemée de pois blancs, assombrit joli-
ment.
Elle porte avec ce vêtement un petit bonnet
fraise écrasée, tout voilé de mousseline de soie
de même nuance que de lilliputiennes ailes, plan-
tées en aéroplane, maintiennent sur le devant.
Pour ce chapeau, comme pour celui du 30 acte,
une toute petite toque de tulle gris argent galonnée
et fleurie de roses mousses corail — il est inutile,
n'est-ce pas, de vous nommer ce maître Lewis ?
La note grise apportée par cette toque mignonne
est fort heureuse pour la robe de mousseline de
soie crevette parsemée de broderies que Benjamine
Lapistolle revêt pour sa visite au ministère tandis
--tftttltS' eterator e~o~, ocHo. impétueuse gamine, prise
d'une vocation religieuse subite, nous apparali mo-
destement habilîiè de cachemire gris perle sur le-
quel est jeté une petite mante bonne femme qu un
chapeau de velours gris fort amusant do forme
surmonte délicieusement.
Il me reste enfin, après vous avoir décrit toutes
ces merveilles, à parler un peu des robes simples
mais charmantes de Mlle Jane Sabrier. Celle-ci
porte au premier acte une toilette de petit lainage
à carreau gris et jaune qu'une ceinture de satin
noir relève très agréablement. A la fin de ce même
acte, le petit modèle Rosette, réveillé en sursaut
par les impétueux coups de trompe de l'auto en
panne, sorti précipitamment de sa chambre pour
nous montrer un petit peignoir blanc garni de ga-
lons, très amusant de forme.
J'ai beaucoup aimé aussi la robe du deux; cette
toilette de mousseline blanche et bleue est infini-
ment chic dans sa simplicité.
Pour terminer, un mot encore sur la robe de li-
berty bleu nattier foncé, du dernier acte, puis il
ne me restera plus à vous dire que toute la gloire
dont Bechoff David s'est, une fois de plus, couvert
hier soir, avec toutes les créations inédites dont
jo viens de vous parler si chaleureusement.
Clarens.
JpSwT*! dans voire intérêt eziger,chez tous les bons marchands
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1" et le 15 cle chaque mois.
Paris et la France, 24 fr. par an; 14 fr. pour 6 mois
Etranger, 28 fr. — 16 fr. -
Les nouveaux abonnés recevront gratuitement
plusieurs primes importantes.
On s'abonne du lcr de chaque mois.
Spécimen gratuit sur demande.
Paris, 45, rue Jacob.
Directeur: Jean Finot.
CourrierdesThéâtres
Aujourd'hui :
Au Vaudeville, à quatre heures précises, pre-
mière des six matinées annoncées des sœurs
Wiesenthal dans leurs Poèmes dansés.
Jour de l'an d'Etoile, comédie en un acte, en
vers, de M. Hugues Delorme, commencera la re-
présentation.
Ce epectacte ne pourra être donné plus de six
fois les sœurs Wiesenthal ayant des engagements
antérieurs avec les grands théâtres de l'Allema-
gne.
Ce soir :
A l'Opéra, 8 heures, Faust (M31es Mary Gar.
den, Courbièree, Goulancourt, MM. Mura tore,
Marcoux, Dangès). Danse : Mlles Aida Boni, Meu-
nier, Johnsson).
A la Comédie-Française, 8 h. 1/2, l' Honneur et
l'Argent, comédie en cinq actee, en vers, de Fran-
çois Ponsard :
MM. J. Truffier, Monsieur Mercier ; Lcilner, Ro-
dolphe ; Louis Delaunay, un Capitaliste ; Siblol,
le Notaire ; Joliet, an Vieux Monsieur ; Falcon-
nier, 3e Créancier ; Hamel, un Homme d'Etat ;
Grandval, 101 Créancier ; Garay, 4e Créancier ;
Lafon, 2* Créancier ; R. Alexahdre, Georges ; Jac-
ques, Guilhène, te. ami • Georges Le Roy, 3*
Ami ; Décard, un Clerc de Notaire ; Ch. Ber-
teaux, 2° Ami.
Mmes Lara, Laure : Lynnès, une Vieille Fille ;
Maille. Lucile. ,
A l'Opéra-Comique, 8 h. 3/4, représentation po-
pulaire à prix réduits, avec location : Lakmé
(Mlle Zeppilli, MM. Sens et Chasne).
A l'Odéon, 8 11 1/4 (20 série de l'abonnement du
lundi : les Emigrants, la Bigote.
Au Lyrique-MunicjpaJ, soirée de gala, offerte
par le comité républicain du comméence. de l'in-
dustrie et de l'agriculture, aux délégués de l'As-
sociation internationale et commerciale de la cité
do Londres. Voici le programme de cette soirée
exceptionnelle :
Premier acte de la Favorite, Mme Nady Blan-
card, MM. Granier ch Sylvain ;
Troisième acte de Lucie (air de la Folie), Mlle
Chambellan ;
Grand air du troisième acte du Prophète, M.:
Alvarez el les encours :
Quatrième acte des lIuguenots, Mlle Lucienne
Bréval, MM. Affre et Delpany ;
Quatrième acte du Trouvère, Mmes Lilvinne et
Nady Blancard, MM. Granier, Ponzio.
Au Trianon-Lyrique, 8 h. 1/2, le raMon de
Ploërmel.
Aux Variétés et au Châtelet, rclâche.
MÉDAILLON
Emilienne Franville.
Voici le vrai lupe de la petite étoile parisienne,
qui ne demande qu'à grandir et qui occupera
peut-être une des premières places parmi les ve-
dettes de théâtre : brune, avec ses jolis yeux
bleus, son petit nez retroussé, bien ouvert à la
brise du printemps, son minois enjoué, ses lèvres
rieuses, toujours entr'ouvertes pour un mot d'es-
prit,' on ne peut, en eUel, être plus Parisienne
qu"Emilienne Franville : elle l'est royalement et
c'est pour cela oue sa jortune l'attache à la Co-
médie-Royale, à moins que ce sçil elle-même qui
retienne la fortune à la Comédie-Royale.
Comédienne adroite et excellente chanteuse, elle
a déjà une jolie carrière artistique ; son passage
au Palais-Royal et aux Folies-Dramaliques avait
été très remarqué ; elle lit une tournée brillante
en Russie et en Allemagne et elle était admira-
blement préparée à devenir l'étoile de la Comé-
die-Royale. Depuis deux ans, elle a créé une inli-
nité de rôles sur la petite scène au cadre d'or :
elle (ut charmante dans l'Entreprise délicate, ex-
quise dans le Roman chez la Postière, presque
tragique dans Peau de chien, les deux actes de
M. Henry Caen ; elle est. en ce moment, déli-
cieusement perverse dans Avant 4es courses, la
(ine comédie de M. Nozière, qui va doubler le cap
de la centième. La façon dont elle interpréta. Je
rôle de Farfadet, dans Fraisidis, la jolie pièce de
M. Jacques Redelsperger, permet d'espérer qu'on
reprendra prochainement ce charmant ouvrage.
Sans doute Mlle -Emilienne Franville fera-t-elle
cet hiver, une importante création au Vaudeville,
par permission spéciale du directeur de la Comé-
die-Royale, qui n'a rien à refuser à M. Henry
Caen, L'auieur de la pièce reçue paé MM. Porel et
Peter Carin. -
En attendant ces nouveaux, lauriers, Mlle Emi-
tienne Franville se recueille au Vésinet et con-
sacre les belles après-midi d'aulomne à bicycler
avec passion : et c'est parce qu'elle apporte un
peu de passion dans tout ce qu'elle fait, qu1 Emi-
lienne Franville est une artiste. - CHARLES BERT.
La reprise de « Lysistrata n :
D'un commun accord avec M. Maurice Donnay et
pour pousser au dernier point de perfection la mise
en scène « extrêmement compliquée et d'un luxe vé-
ritable i de Lysistrata, Mme Cora Laparcerie re-
met au jeudi 28 et au vendredi 29 octobre la répé-
tition générale et la première représentation de
l'œuvre de M. Maurice Donnay, aux Bouffes-Pa-
risiens.
Quelques notes ;
A l'Odéon, malgré l'énorme complication de la
mise en scène des Emigrants, les entr'actes sont ré-
glés de telle façon que La Bigote,.Ia délicieuse co-
médie de M. Jules Renard, commence a 10 heures
et que le spectacle se termine à minuit moins dix.
— A l'occasion des fêtes de la Toussaint, le CbA.
.telet donnera deux matinées de la Petite Capo-
raie, le dimanche 31 octobre et le lundi 1er novem-
bre.
On peut louer dès maintenant :
Aux Variétés :
Aujourd'hui lundi, relûche pour les répétitions
d'ensemble du Circuit. la comédie nouvelle de MM.
Georges Feydeau et Francis de Croisset, dont la
répétition 2 générale aura lieu après-demain soir
mercredi, 27 oclobre, et la première représentation
jeudi 28 octobre.
Les bureaux de location seront ouverts dès au-
jourd'hui pour les représentations du Circuit, dans
lequel M. Brasseur, Mme Marie Magnier, Mlle Lan-
tclme, feronk leur rentrée aux Variétés, et dont les
principaux rôles seront joués par MM. Guy, Max
DéarlY. Prince, Morcicey, Carpentier, Mlle Diéterle,
etc., etc.
-"'X'-
A la Porte-Saint Martin :
Malgré les services de première et de seconde N.
présentations très importants, la Grille a fait ec.
caisser, en trois jours : vendredi, samedi et di-
manche, le total plutôt coquet de 30.155 francs, te.
quel dépasse sensiblement le chiffre correspondanl
de l'Affaire des Poisons. C'est le record depuis
Cyrano. Voici donc la forte pièce d'Henri Bern-
stein repartie pour une carrière triomphale, avec
Lucien Guitry, qui, — comme le constatait l'una-
nimité de la critique, — atteint dans ce redoutable
rôle de Cortelon une maîtrise dramatique inégalée
et inégalable, et avec tes remarquables artistes qui
l'entourent, Mmes Gabrielle Darziat et Léonie
Yahuc, MM. Jean Coquelin, Pierre Magnier et Mos-
nier, en tête.:
Au Palais-Royal
Au Palais-Royal :
Très obligemment prêté par M. Henry Caen, di-
recteur de la Comédie Royale, à son confrère et
ami M. Eugène Htfros, M. Saulieu créera un rôle
important dans la Revanche d'Eve, la pièce de
MM. Antony Mars et de Beil, qui passera quand
le succès de Family-Holel le permettra.
'- -'l -
Au Trianon-Lyrique :
Voilà une fois de plus que Montmartre aura sw
attirer le loutrpublic élégant, car la Femme à
Papa, au Trianon-Lyrique, est un des plus grands
succès qu'ait eu le coquet théâtre qui, cependant,
n'en a pas été à court depuis quatre ans. Rosalia
Lambrecht est 1a Judic du jour et, à se rappeler ce
que l'inoubli ble artiste avait fait du rôle de la
Femme à Papa, on est enthousiasmé de voir qu'il
ait été possible à Rosaiia Lambrecht de faire une
nouvelle composition si remarquable et pourtant si,
différente de celle de Judic.
Au théâtre des Arts :
La direction du théâtre, qui vient d'effectuer sa
réouverture avec Vera Sergine dans Pulcinella,
nous prie d'informer le public qu'elle a décidé de
donner satisfaction aux nombreuses demandes qui
lui ont été faites pendant la saison dernière, rela-
tivement aux prix des fauteuils d'orchestre et de
balcon.
Le tarif de ces places est fixé dorénavant à 5, 4j
et 3 francs.
Aux Trente Ans de Théâtre :
La. fêle de Gounod que donneront jeudi prochain
1 EXPOSITION mercier FE
du 15 Octobre au 15 Novembre 100e Fbg St-Antoine
SALONS PETIT-POINT & AUBUSSON, (ParIs)
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