Titre : La Fronde / directrice Marguerite Durand
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1898-08-26
Contributeur : Durand, Marguerite (1864-1936). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327788531
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 26 août 1898 26 août 1898
Description : 1898/08/26 (A2,N261). 1898/08/26 (A2,N261).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6703380w
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-LC2-5702
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/01/2016
deux délits il ex.iatait. M tel tien qu'on
pouvait et devait lei OQMtdérer comme
connexes et en faire M tort Indivisible,
ee qui permettait, en raison de la con-
nexitéetde l'indiviiibUi#,4erenvoyer
les deux inculpés devant la même Juri-
diction, le tribunal correctionnel.
Y. Judet s'est rendu hier avec son
léroueur chez M. Plocy, juge d'instruc-
lion, chez lequel il a pris connaissance
je la commission rogatoire envoyée à
Toulouse.
_____
Il paraîtrait que le Conseil d'enquête
n'a pris encore aucune décision en ee
qui concerne le conoaandant Esterhasy.
1511e serait ajournée à tantôt, affirmai»
le Sêir d'laier.
YVONNE LECLAIRE.
Bourse du Travail de Lyon
• Le 13 août un avait tien à la Bourse êu Tn-
vail use réunion privé* importante organisée
fil! llfaioB syndicale des fiâmes itéuaies.
La ettoyftane Bonaevial. délfenie 6m Syndicat
de rwn»M|iioniost dePMHdeuLkM **SI"
■mt le *roét des fMBnMMt fédmmm as iow,-
ait 40 fnmek, était changée delà conférence.
Noua devons, tout d'abord, dire que la con-
férencière a aimpiement., aats phraseolagie
inutile, mais avec l'éloquence raello qui mon-
tre la conviction, développé son sujet fort inté-
ressant et qui comprenait, nen seutement les re-
vendications féministes, mais encore les re-
vumUeatione sorialw» auxquelles elle* sont inti-
■nessent Ufte8. Dopuis éc longues années sur la
brèche. niMé* à tous les grands mouvements
uvvrters, ancien membre du Conseil d'adminis-
tration à la Bourse du Travail de P.iri», la
ritoyenne Bonnevial était naturellement dési-
gnée pour cette iléraonstaralion.
Nous sommes heureuses de saluer en elle le
noyau de vaillantes propagantistes lowalistes
qu!, sans trovr, apporte toute leur activité à la
noltition dett grands problèmes sociaux.
La citoyenne Bonaevial démontre qu'il est
nécessaire que la femme prenne part aux rc-
vendicaUout» générale» du prolétariat; qu'il est
néceesaire qu elle ne reste pu en detiors des
cJiaJoas8iow; mlércdant ces diverses questions;
que la question des revendications purement
féminine» est étroitement liée à l'avancement
social et à l'avènement d'une meilleure organi-
sation.
.A.Jrès avoir parlé des organisations féministes
de Paris, moMtn' que la plupart de celles-ci
n'avaient pas peur d'aborder les questions poli-
tiques sociales et que sur ce sujet elles étaient
«m» avancées que les groupes socialistes, elle
fait appel aux citoyennes et Citoyens présents et
les enKUffe à faire tous, leurs efforts wour la
flOBStilutioo des syndicats d'ouvriers des pro-
fession* de femmes.
Fort à propos. elle fait ressortir les consé-
quences de la mauvaise éducation donnée dès
le début de la vie aux femmes et aux hommes
qnr l'on sàt>are dès les premières années de l'é-
cole, leur donnant une éducation séparée, lais-
sant germer ainsi dans la conscience des uns-et
des autres un s' ntunent de défiance préjudicia-
ble à la bonne harmonie sociale et a l'entente
tntolligenle des droits et des devoirs de l'un et
de l'autre sexe.Elle préconise lacoéducation inté-
grale affirmant que seul ce système d'éducation
»eut donner à la remmeett. l'homme,le sentiment
exact du devoir et à la première, la force inorale
nécessaire pour éviter les vicissitudes dont elle
est victime dans la société actuelle.
Après la citoyenne Bonnevial, tes citoyens
.narouueL et Bessct prennent la parole et ren-
trant dans les vues de l'oratrice, engagent les
camarades à faire leurs efforts pour que 4a
'bonne impression produite par cette reunion
avorte ses fruits. Il faut, disent-ils, que les ci-
toyennes se mettent résolument à l'œnvre pour
^ constitution de nouveaux syndicats féminins,
citoyen Bessel fait ressortir les avantages de
la coéducation intégrale.
La réunion est levée à 11 heures.
E serait à désirer que de pareilles réunions se
renouvelassent souvent, à désirer égalemcntque
les citoyennes et citoyens se lissent un devoir d'y
assister et d'apporter sur les questions leur opi-
tuon et leurs idées, de semblables discutions
jae pouvant être que profitables à l'avancement
ides idées socialistes.
La citoyenne Bonnevial est encore pour quel-
ques joun;,croyons-nous,t Lyon, nous espérons
,d'aller que l'an (ntigab le propagandiste voudra bien avant
'aller reprenudrc ses occupations,! cvenir parmi
nous traiter un flcs sujets qu'elle connaît si bien;
quelques-uns de nos camarades {prendraient
«gaiement la parole et l'on pourrait a cette fu-
ture réunion, jeter sérieusement les hases de la
fwopagande à faire pour la constitution de syn-
dicats féminins et I organisation de conférences
mixtes uui auraient lieu le ulus souvent possible.
JUDITH GARNIER.
Secrétaire de ('Union syndicale des Dames I
Réunies de Lyon.
LE CRIME DE LA RUE D'ENGHIEN
Ainsi que nous l'avions annoncé, M.
remercier, juge d'instruction a essayé
hier matin de reconstituer rue d'Rnghien, |
la scène de la mort de la petite Lucie
Ouyon.
A cet effet, les époux Guyon ont été
extraits il cinq heures du matin, le mari
de la prison de la Santé, la femme de
Saint-Lazare et ont été amenés, en voi-
ture couverte, rue d'Enghien où ils
étaient placés dans deux pièces différen-
.tes de leur appartement.
Leur arrivée avait passé inaperçue,
mais dès que le bruit se fût répandu
que la reconstitution allait avoir lieu,
les fenêtres se sont garniç» de furieux
et peu à peu la foule s'eet mmir jus-
qu à nécessiter l'interrupftiMI do la circu-
lation des voitures.
Quekmef minutes aprèi,»rri¥éent M.
Lemenaec, ju®§ d'instmetioo al M. Jla-
m ar'l' aous-chef de la Sftulé, bientôt tes
avocaW. des Inculpés, ne Monteux et
Milliard.
Tout d'abord, le juge d'instruction ft
le ipus-chef de lit. Sûreté s# sont rendus
chez toutes les perasoues qui, de leurs
fenêtres, pouvaient apereevolrcelie# des
époux Guyon. Partout, les mêmes ré-
ponses leur ont été faites : la petite fil-
lette n'a jamais été vue à la fenêtre. On
ignorait son existence.
Deux voisins seulement savaient
qu'elle existait pour l'avoir rencontrée
autrefois avec la mère mais ils la
croyaient à la campagne et tous ont été
d'accord sur ce fait très important que
la fenêtre après Ja chute de l'enfant et
avant que son cadavre ne fat découvert,
était fermée.
Ces interrogatoires terminés, les ma-
gistrats montent dans 14 chambre de Lu-
cie Guyon et on amène la mère de l'en.
fant.
— Expliquez-nous, lui dit M. Le mer-
cier comment votre enfant a au se sui-
cider,et d'abord placez les battants de la
fenêtre et attacbez les rideaux comme
vous l'aviez fait la veille de sa mort.
Mme Guyon, très calme, très maîtresse
d*eUe-méine,ayant toujours son air arro-
gant arrange les rideaux de la fenêtre et
montre que sa fille a dû passer entre les
battants, la barre d'appui et le bas de la
fenêtre en se glissant comme une couleu-
vre sans rien déranger et se laisser tom-
ber dans le vide.
M. Lemercier fait alors amener un
enfant de douze ans, le petit Antoine
Jacquot, à peu près de la taille de la pe-
tite Lucie Guyon et la marâtre se place
près de la fenêtre coin me elle suppose
que sa fille elle-même a dû se placer
pour sauter.
M. Lemercier lui fait remarquer com-
bien sa version est inadmissible car la
fenêtre après la chute de l'enfant serait
restée plus largement ouverte et les
rideaux attachés par des épingles se se-
raient déchirés, ou les épingles se se-
raient détachées.
— Votre fille, vous le voyez, n'a pu se
suicider, comme vous le dites. C'est donc
vous qui l'avez jetée par la fenêtre !
A cette accusation directe la marâtre
se borne à répondre : La petite malheu-
reuse, comme elle nous fait avoir des
misères !
Et cette phrase revient ensuite à cha-
que instant dans sa bouche.
M. Lemercier l'interroge sur son man-
que de soins pour l'enfant.
— C'est faux, s'écrie-t-ellc, je lui ache-
tais au contraire toutes sortes de recons-
tituants : des phosphates, de la peptone,
du kola. du quinquina, du fer, etc.
— C'est facile de s'en assurer, fait le
juge d'instruction. Vous devez avoir
quelques-unes des fioles et des boites
ayant contenu ces médicaments. Veuil-
lez les faire voir.
Malheureusement pour Mme Guyon
les recherches qu'on fait en sa présence
dans la cuisine, dans le buffet, les pla-
cards, les armoires, ies tiroirs des meu-
bles restent infructueuses.
Aucune fiole, aucune boîte de phar-
macie..
— Vous avez encore menti lui dit le
juge :
— La petite misérable ! la petite misé-
rable! répondMmeOuyondont les poings
se sont serrés et qui la figure contrac-
tée semble vouloir se jeter sur le juge.
M. Lemercier en a terminé avec la
marâtre Il donne l'ordro qii*elle soit con-
duite iL sa voiture et ramenée à la
Sûreté.
Son départ donne lieu à de gros inci-
dents.
La foule s'était amassée devant le 29
de la rue d'Enghien et plus de deux mille
personnes étaient là, commentant la
mort de la petite Lucie. Les esprits s'é-
taient surexcités et quand on vit sortir
Mme Guyon, une poussée énorme se
produisit Les cris : à mort: à l'écbafaud !
uez-la ! se font entendre.
Une main s'abat sur la tête de la ma-
râtre, lui arrache son chapeau qu'un
agent ramasse et lui rend. Elle s'en sert
pour cacher son visage. On la jette en
quelque sorte dans la voiture et le cocher
veut partir au galop, mais des mains vi-
goureuses se sont attachées aux brides,
et l'officier de paix, M. Jean, est obligé
de faire charger les agents pour dégager
la voiture, qui part à toute vitesse dans
la direction du faubourg Saint-Denis.
Là, un nouvel incident se produit. Le
cheval est à nouveau arrêté et la voi-
ture est entourée par une foule mi1—
çante, hurlant les cris : * A mort! A la
lanterne ! Mme Guyon a perdu toute aftn
arrogance.Blle se serre contre les agent».
Un ouvrier armé d'une bouteille passe
son ta» par lAOftftière et wiUafrtp.
per. thieeeni iKowine le eoop, M. Jean
accourt au pas de charge avec mm sow
cowadt et dégage à noavwu la ToUjro
qui arrive à la fûreté ma nouveau* ta.
cidenl».
Pendant ce temps M, IAmercier fc#r-
roge bi. Guye». Autant ea femme mail
hautaine, arrogante, autant H ettafra&ta,
afrmssé. Il ne répond que par monosyl-
labe et on lui arrache en quelque sorte
les paroles.
Il nie du reste comme sa femme tous '
les faits qui lui sont reprochés et soutient
qu'il dooîwt4 sa fille tous lai Miof... .
nécessaires.
M. Lemercier, après quelques ques-
tions peu importantes, le fait descendue
dans râtelier vitré de l'emballeur où est
tombé le corps de l'enfant.
Là, de nouvelles constatations sont
faites.On place le petit Jacquot sur l'éta-
bli à l'endroit où la petite Lucie a été
trouvée ; de l'eau est jeté à la place où se
trouvaient les traces de sang et qui marque
l'endroit où le corps était tombé et il est
démontré que le corps jeté par quelqu'un
devait tomber comme il Tétait. Tandis
que l'enfant se jetant lui-même par la fe-
nêtre serait tombé à un autre endroit.
Le corps, en effet, est à peinera un mo-
tre 20 du mur de la fenêtre.
Un architecte relève alors le plan des
lieux, puis Guyon est emmenè à son
tour pour être conduit à la Sûreté.
Son départ donne lieu comme celui de
sa femme, à des scènes de sauvagerie,
mais les dispositions sont mieux prises
par la police, et le fiacre qui l'emmène
disparaît par la rue d'Hauteville sans in-
cident.
A la Sûreté, on sert à déjeuner aux
époux Guyon, qui sont chacun dans une
cellule différente et Mme Guyon a été
conduite ensuite dans le cabinet de M.
Lemercier, qui l'a confrontée avec plu-
sieurs de ses voisins.
DÉROULÈDE
d'après Drumont
C'est toujours amusant de s'apercevoir
de la fausseté, du creux des théories de
certains leaders de la politique actuelle.
Ces bons messieurs sont peut-être très
sincùres quand ils écrivent, mais il faut
avouer que leur esprit n'est pas long-
temps homogène, et que leur conscience
n'est qu'une conscience-girouette.
M. Drumont ouvre largement ses bras
à M. Déroulède. Le refuge est charmant...
Cette admiration présente nous laisse
pensives quand nous la comparons à ce
que ce même M. Drumont écrivait dans
la France Juive.
Voici des extraits de l'opinion d'alors,
du directeur de la Libre Parole sur le
poète des Chants du soldat :
Figurez-vous un Dérouléde vraiment p&*
triote...
V 9
* •
Au moment où Déro ,.ilèfle et la Ligue des
Patriotes provoquaient niaisement l'Allemagne,
nous n'avions même pas de munitions.
•
... Pour faire réussir le coup il faut trouver
un imbécile de bonne foi ; Déroulède est ' là. Il
est absolument incapable, j'en suis convaincu,
d'avoir reçu quoi que ce soit pour jouer le rôle
de l'agent provocateur. C'est simplement un
typ.î bien actuel, l'homme affolé de réclame,
ayant le besoin d'être toujours en scène. Il
s c.it fait une sorte de profession de son bruyant
patriotisme : c'est dans c-^ rôle que le Parid des
premières est habitué à le voir. et il ne peut
plu5 la dépouiller ce personnage. Il est patriote à
i ville, à la campagne, le matin, le soir, aux
Viriétés et aux Bounes. à la Pc!» € Variée et à la
Mascotte. Au SaJou. à côté de vieux soldats qui
ont vingt campagnes, dix blessures, il se fait
peindre par Nenville, la capote enroulée autour
du corps, portant dans des étuis lIe cuir toutes
sortes d'ihf-utn''nts, des c-trtouchL's, des lor-
gnettes, un revolver.
• m
... Sans doute, si l'on pouvait enfermer deux
on trois heures ce vaniteux dangereux, s'il pou
voit se recueillir dans cet isolement (lui pesé à
ces natures comme te silence du tombeau, ii se-
rait effrayé lui-même du danger qu'il a fait cou-
rir à son pays...
Celte équipée, qui ne fut que ridicule, aurait
pu être dangereuse si l'Allemagne, pour des rai-
sons que nous avons déduites, n'avait pas été
résolue A la paix; si Paris, devinant d'instinct,
sans savoir au juste la vérité, les spéculations
cachées là-dessus, ne fut resté profondément
indifférent.
• 9
Ajoutons que le président de la Ligue des
Patriotes n'est pas toujours scrupuleux dans les
M. procédés qu'il emploie. Sous prétexte que
l. Rothan a prodigué au gouvernement impé-
rial les avertissements .les plus clairvoyants et
les plus prophétiques sur les desseins de l'Alle-
magne, Dérculède fait figurer sur ces listes, en
««alité de vleejprMéMt. l'amlcn ntaisire A
Hambourg. L* dljp6H|, «raljp Ifept m
trouver en vedetfc
qui ont déclaré «M W4M|Éh1mMV hdroî-
quement à OraveÇRjS ê lf<«t-E^Mtatwit
des lâches ou des tnB— jirniMtf awasjtaergie.
Déroulède promet de ray« a en lait
«fc* Hniftpat, en août fi,T Hethiii est
tuinluf 4s as propriété .. baeb. en AI-
jjNe. oè H «ômpowt tranwtfSit des livres
SSTauf»j«j§iHi QMS âSsuSBeSSdis que Dérou.
wde as fptfnéne wonuMcpent sur le boule-
Yard. «jaifcinté d%eoir UH encore une fols du
bruit sur is dos des wtiye.
\ •
Partout le sauteur spMuraftt. A* mois d'octo-
bra 'Mf, roulède éqjft: •ùwljm que soient
mes opinions personne tel. j al Mlusé de laisser
inscrite mon nom sur aucune liste, parce que
te cause que je sers et que je ne veux pas aban-
donner m défend 4'44i» ^ «Mdidtfd'awgp
parti. • Six semaines après, Il demande à être
porté sur la liste opportuniste...
•
... Supposes que Déroulède, au lieu d'être un
poseur et un fanfaron de patriotisme, dit eu
irMmsnt les )teotM)M)tt$ 4'»11 psîèojte, t'aflMWir :
profond et sincère de son pays...
#•
En aucune circonstance, d'ailleurs, vous ne
trouverai le fondateur de la Ligue des patriotes
réclamant une masure sage et pratiquement
utile ft 1* détenu du pays.
Fronce Ji*e. tome, 1, pages 151, 40, 483, iêi,
485o 486s ?7.
Et, après cela, h eux les accolades, les
« cher maître » et les cordiales poignées
de main l
Messieurs les agents
Un fait ignoble s'est pusé vendredi der-
nier, en plein boulevard Voltaire.
Une femme d'une conduite irréprochable
lime Haring, dont le mari occupe depuis
dix-huit ans la môme situation dans une
maison de oommeroe,a été arrêtée pour ra-
colage. par quatre agents, trois en oivil et,
un en uniforme, alors qu'elle sortait de
chez son docteur.
Comme réponse à cette honnête femme
qui se défendait il l'accusèrent d'avoir ar-
rêté UI1 vieux monsieur dans la rue et d'être
entrée ensuite avec lui dans ua hôtel meu-
blé.
Mme Haring, protesta, et indiqua la
maison d'où elle sortait, maison voisine
d'un hôtel, mais seulement maison de rap-
port. Puis, comme elle se défendait, ne
voulant pas qu'on l'emmenât, ils la con-
duisirent au bureau de l'hôtel et là interro-
gèrent la maîtresse de l'établissement.
On suppose quelle dût être la réponse de
cette personne qui voyait Mme Haring pour
la première fois.
Un des agents furieux, grommela :
— Ça lui coûtera cherde mentir ainsi.
Mme Haring, pria qu'on envoyât cher-
cher son mari. On n'écouta pas sa demande,
et on la conduisit au commissariat de la
rue des Trois-Bornes.
Là, on lui posa quelques questions dans
le goût suivant :
— Votre enfant est-il de votre mari ?
— Etes-vous mariée ou cc collée? »»
Et la pauvre femme, effrayée devant ces
brutes, répondait :
— Oui, je suis mariée.
A ces mots, tous levèrent les épaules en
ricanant :
— Ah! nous connaissons cela! Le ma-
riage de la main gauche.
L'interrogatoire continua dans le même
esprit, s'adressant à une femme d'une ho-
norabilité parfaite et au-dessus de tout
soupçon.
Donc, nous avons celte perspective, nous
les femmes, si la police ne veut pas une
fois pour toutes se débarrasser des butors
et des ivrognes qu'elle affuble d'un sabre et
d'un uniforme, de ne pouvoir attendre un
omnibus sans qu'immédiatement les agents
nous arrêtent pour racolage.
Le père ne pourra plus quitter sa fille
pour acheter un journal, le mari sa femme
pour entrer à un bureau de tabac quelcon-
que prendre une boite d'allumettes, sans
1 qu'à son retour, à la place où ils avaient
laissé, l'un sa femme, 1 autre sa fille, femme
et fille aient disparu.
Los petites arrestations du genre de celle
de vendredi arrivent vraiment trop souvent, !
et, tout en comprenant les plaisanteries,
nous avouons à la police que celles que cer-
tains de ses agents nous servent ne nous
conviennent pas et que nous les prions de
bien vouloir les cesser.
JEANNE LANDRE.
Lettre d'Egypte
Pour commencer la semaine un déraille-
ment....
Les chemins de fer égyptiens ne veulent
pas se laisser distancer par ceux d Europe
et s'offrent, eux aussi, de loin en loin, le
luxe d'une petite collision. Cette fois, c'est
à la station de Chin (ligne de Dessouk) que
l'accident s'est produit. Le train de voya-
geurs se rendant de nuit du Caire à Alexan-
drie a tamponné un train de marchandises.
Trois voyageurs ont été tués,le nombre des
blessés n'est pas connu. La. responsabilité
de cette catastrophe incombe, paraît-il, à
l'aiguilleur.
La fête du Kalig au Caire est heureuse-
ment venue effacer la mauvaise impres-
sion causée dans la capitale, par le dcrail-
lefuent de la veille. Mon curHaM et tMea
locale, cette fête... vieux
quité pharaonique. Autr^faE^IMAp
Mdote, il était d'lI8&ge, mMmlSMb"
vorable le dieu Nil, grani JHMnisiMC^jfe
toutes grftoes. sur la terrt4Vf|pte,-m aii
sacrifier dogue Muée, an #pne# «Ma
bri leéa vmftm choisie parai M jfua
bettes 4$ Aft» jffSs nobles de la La
vietî qoe roses et 69 #»u en-
roirtf5ar de iÉMglet de Jkm» de sa-
fran jpt#e gf*aadiar#tait amquéi au fleuve
riehs«|ttt M*+e voile «»s liaiuéte» au son des pjfflftaj»*
k des $tléor"8, - ')es pieds et S. mains
était préoipiiée4ans les eau- disparais-
sait sous leur nappe grise fleurie de lotus
et de nénuphars, tandis que la foule hur-
lante et joyfpse célébrait les noces mysti-
ques par des danses et des festins pipa que
terrestres, j^e ebrwUsaiSTOf, à pp m à,
grand peine^eUe coutume parbare. Epeere
-il une oétémo qui remplaçât pour
Je peuple l'habitude vieille de tant de siè-
etes; un mannequin brillamment paré Mt,
donc la place de la vierge antique, et le
MM n'en parut pas autrement :Fr±
Au*oue,b(ù ORQR, le simulacre même a
disparu et le canal sur les bords duquel
avait lieu la fôte, a été desséché pour raire
place aux bâtisses toujours plus nombreu-
ses, qui chaque jour transforment le Caire.
N'importe! le souvenir se perpétue des ré-
jouissances d'autrefois, et, Von S'amuse
d'autant plus, que l'on a moins à faire.
Donc, fimancibe, à deux heures de l'après
midi, de nombreux invités s'embarquaient
à Boulac sur le bateau Akaba joliment pa-
voisé pour la circonstance. Ce bateau en
remorquait un autre où avaient pris place
une batterie d'artillerie, la musique mili-
taire et un orchestre arabe. A trois heures,
le bateau s'est mis en marche au son de
l'hymne khédivial, salué par une salve de
coups de canon. Trois heures plus tard, on
débarquait au Foum-el-ttalig, seconde salve,
seconde audition de l'air national.
Des tontes superbes avaient été dressées.
Le gouverneur du Caire, représentant le
Khédive, escorté do sa garde d'honneur,
s'est rendu dans tef tente de gala où il a
reçu les notabilités indigènes et euro-
péennes. Puis la fête a commencé, musi-
que, chants, jeux de toutes sortes ont fait
la joie des spectateurs jusque très avant
dans la nuit. Un très beau feu d'artifice a
clôturé la cérémonie qui avait attiré,comme
chaque année,une foule immense.
A 'rantah,les préparatifs de la grande foire
s'activent. Demain, aura lieu l'ouverture so-
lenuelle do cette mie, d'un genre tout par-
ticulier. En voici l'origine :
En tous pays musulmans les foires furent
instituées en mémoire d'un saint ou d'un
prophète quelconque. Le mot foire (Mou-
led) signitle naissance et c'est cet anni-
versaire sacré qui donne à chaque ville
l'extension commerciale qu'elle prend cha-
que année au moment où les pèlerins arri-
vent en foule de tous les points de l'Egypte
pour fêter le saint.
Tantah est, sous ce rapport.agréabtement
favorisée. Le Saint de la ville, Saïd-el-Ba-
davooni est en effet un des plus vénérés
dans le calendrier égyptien. La grande
mosquée locale qui porte son nom est le
second lieu de pèlerinage après la Mecque,
et tous ceux qui ne peuvent se rendre dans
le Hedjaz viennent à Tantah une fois au
moins dans leur vie. Dans la grande salle,
sous la principale coupole, le tombeau du
Saint reluit sous son grillage d'or, et des
milliers de lampes, remplies d'une huile I
précieuse, brûlent nuit et jour, au-dessus
du sarcophage recouvert d'étoffes rares.
Des femmes, des enfants, des malades
entourent le monument et demeurent
durant des heures, prostrés dans leur pose
adoratrice et suppliante. Des cris, des
pleurs mômes leur échappent,écrasés qu'ils
sont par la majesté du lieu. Mais à la
grande foire qui ouvre demain, l'adoration
tourne au délire et les écrasements ne sont
point rares aux abords de la mosquée trop
petitepourlafouledespélerinsquiaccourent j
de toutes parts.
La ville, qui compte en temps ordinaire
une moyenne de 60,000 habitants, arrive à
recevoir alors plus de 300,000 étrangers.
Les tentes que chaque nouveau venu ap-
porte avec lui se montent parfois à trente
et quarante mille. C'est là-bas, hors la ville,
à quelques mèt.res du chemin de fer, dans
une immense plaine à laquelle on accède
par un petit pont, que ces demeures de
toile dressent leurs mâts. il y en a
de toutes formes, de toutes étoffes, de
toutes nations. L'intérieur, doublé de co-
tonnade ou même de soie à dessins
multicolores, est orné de poutres d'où re-
tombentdeslustresbyzarrcsehargésde bou-
gies et de lampes à verres de couleurs. Des
tapis couvrent le sol,eL de larges divans at-
tendent les visiteurs. La tente du gouver-
neur est au milieu, et tout le temps que
dure la fête il reçoit les étrangers qui se
présentent avec cette courtoisie orientale
qui l'ait l'hôte, quel qu'il soit, toujours
sacré. Les tasses de café, les sirops de
roses et de violettes, les cigarettes cir-
culent; cl c'est. ainsi pendant dix grands
jours une ville nouvelle dans l'autre
ville. De loin en loin, de grands mâts anti-
ques supportent des lampions et des ban-
deroles flottanles, Le soir tout cela s'illu-
mine et offre un coup d'œil absolument
particulier.
Mais que dire du mouvement extraordi-
naire qui se produit dans l'intérieur môme
de la cité 1 La circulation devient, de dix
heures du matin à minuit, absolument
impossible. 1* feitalisa» Wffasnt ahu-
ris et charmés ea se tenant par la main
comme des enkat& Les jeunes filles, ve-
nues du foot «Ulicas Utatains, vê -
tues du long pantalon de velours violet, et
de la courte chemisette de fIZ8 noire, la
gorge découle soutenue par un mince
gilet de velours galonné d'or, très ouvert
sur le devant, la tête ceinte du léger voile
noir, vont, rift¥*s et surprises, arrê-
tées et perdues à chaque pas, emplissant
leurs jolis yeux de bêtes timides, de toutes
ces chasot, 411,01106 41e «warwtf. sim ja.
mais.
1 L'arrivée des vUlAgeqif eU Jûen curieuse,
bien typique aussi. C'est d abord hissés sut
des ânes, les musiciens, haut bois et clari.
nettes, jouant le môme air mvamhleipent
depuis des siècles avec l'accompagnement
effroyable de la gvesse-caisse; puis d'autres
thofpmes suivent portant les drapeaux m-
tigieux. Vient ensuite l, chef du village,^
cheik le plus ancien du hameau et cet M*
eétre a.u paisible trot de son baudet, repré-
sente bien le patriarche, avec sa barbe
blanche, son vaste turban et sa longue
robe..
4AO femmes ferment la ....-obe. ae&
sur les chameaux, couvertes de bijoux de
cuivre et de sequins qui à -chaque :e.èH1&-
tion de la bête font entendre un joli Cli-
q"g,s.qiû les amuse, accompagne drôle-
ment la mélopée d'arrivée qu'elles chan-
tent de toute leur voix.
. Les enfants pullulent, petits et grands,
. blancs ou bruns, vêtus ou JUIS, en t&s, dan2
les bras, sur $ou éjiauies, sur !e dos, ou
sur . les genpux maternels. Les mon-
treurs de bêtes curieuses, les marchands
de limonade, les estropiés, les fous,
lée saints, parcourent la ville ea enant
un boniment, ou marmottant des priè-
res. Les baraques de #altimba»qmes,
: les cirques, les monstres, garnissent la
ville. Et le Saint est un peu utatiiiie, jusqu'au
grand vendredi, le jour fameux où sort le
Khalife dans une procession , solennelle
dont je vous entretiendrai jeudi prochain.
Cette ana4ç, par exception, le Myuled est
favorisé d'uno température presque euro-
péenne; les soirées sont eKquisctS,oL la fête
n'est que plus séduisante pour tous les
déshérités qui viennent t'aire provision-de
i joie et de courage, emportant de cette foire
une quantité de souvenirs suflisantc à ati-
menter les conversations de foulas leur?
nuits jusqu'à la mort.
JEHAN D'IVRAY.
-
~~
Lire à la quatrième page sein
aeareaa feaJUIetea.
< Xilt«V£BlTË UVBT4Y »
1 par Hâte A. lg"rot-
JUSTE RÉCLAMATION
Saint-Maurice, le 24 août 1898.
On nous signale le fait suivant :
Tous les jours, à l'asile des convalescents, on
jette aux eaux grasses une grande quantité )c
bouillon, de viande, de pain qui n'ont pu être
utilisés dans la maison.
L'adjudicataire de ces débris en retire le*
morceaux lus mieux conservés, et après les avoii
lavés à l'eau bouillante, les perte aux Halles où
pour quelques sous il les vend aux miséreux.
Beaucoup de personnes déplorent qu'on nt
fasse pas profiter de ces aliments les familles
du pays qui. souvent, ont tant de peine à vivre,
et qu'on ne leur fasse pas tous les jours, une db.
tribution de viande el de légume, laquelle n'
coûterait rien à la maison et rendrait de si
grands services à tant de pauvres gens !
Ce même établissement qui consomme plu-
sieurs milliers d'hectolitres de vin par an ue
pourrait il donner un vin naturel et de bonne
qualité au prix de Ofr. 30 le litre, au lieu du vin
frelaté qu'il distribue à ses malades?
De quel pays pourrait-on faire venir c
vin ?
LES REVUES
Revue de» Deux-Mondes (.15 août).
1. — Les réactionnaires ressemblent atr
vieillards : ils se tournent adoralifs vers 1
passé.
Mais les vieillards ont une excuse : leui
vue baisse, les formes connues leur inspi-
rent seules confiance; tout effort les fati-
gue; bâtir les épouvante. Ils conservent.
De là, leur haine des démolisseurs et de*
architectes des Cités futures.
Par contre, il faut demander aux réac-
tionnaires quel furieux dépit, quelle aber-
ration, quel violent égoïsme les poussent à
proclamer sans cesse que dam le temps tout
allait pour le mieux sous le meilleur de.<-
gouvernements.
Certes, M. Maurice Talmeyr n'a pas même
le minimum d'âge où les refrains d'aïeul
sont excusables. Alors, il doit avoir s.;?
raisons pour préférer si ûprement le temps
passé iL celui-ci. Il est dommage qu'il ne
nous lis donne pas dans son article sur les
Minus rlecto, ale$. Nous voudrions savoir cc
qu'il appelle le Il beau temps ", quelle est,
selon lui, l'époque idéale.
Il nous fournit sur ce point d'insuffisan-
tes indications. On peut en déduire, toute-
fois, que le « ciel noir è, redeviendra bleu,
— du bleu sans doute adopté pour le man-
teau des rois et la ceinture des N. D. de
Lourdes — quand tous les chefs de ra\"an'.
(3)
LA TRIBUNE
26 AOUT 1898
ENCORE L'INTERNAT
III
Supprimons l'Internat, mais créons
des internats
etm n&rùme /ferme m ftuUWm vo&«t I
. §mt k #rwub change $om la tnm Jourt. I
1 Les enfants qui habitent les mansardes
dont j'ai parlé au début du chapitre
précédent fréquentent irrégulièrement
*6wle ; mille causes — quelquefois la
nudité, indéniable malgré les efforts des
municipalités — entravent la stricte
jobservation de la loi. La maladie de la
paère « dont il faut faire les commis-
sions » est presque aussi souvent une
la raison » qu'un prétexte. C'est fatal;
mais c'est très acceptable aussi, car en
faisant son devoir fUial, l'enfant — fille
ou garçon — travaille sans s'en douter à
non éducation morale, et s'initie à la vie
réelle.
, Nous n'aurions donc pas trop lieu de
nous inquiéter de ces accrocs faits à la
loi sooiatre. si la boane volonté et l'iaté-
rêt biea entendu des parents savaient les
réduire au minimum, et ai, par compen-
nation, l'enfant fréquentait récole jus-
qu'à font 13 ans comme les auteurs 4e la loi
ot décidé.
Même si les commissions scolaires
étaient composées selon la raison ; même
m elles avaient vraiment le sentiment de
'leur responsabilité, ces absences tempo-
Mires ae sauraient être considérées
comme un délit de quelque gravité.
Mais une complication se produit trop
fréquemment : lamSade estemmenS
largowa 4 rifeiftait et .1'..,....
mentanée ou définitive du père, les en-
fants sont en réelle détresse.
En ce cas, à défaut de la charité parti-
culière, l'Assistance publique intervient;
les enfants sont hospitalisés rue Denfert-
Rochereau, et, mêlés aux petits aban- |
donnés qui attendent leur départ pour
la campagne, ils sont reçus à l'êcole ins-
tallée dans la maison même, ou bien, en
cas d'amuence, envoyés dans les écoles 1
voisines de rétablissement. Cela dure
autant que la maladie de la mère.
Rentrée chez elle, la convalescente re-
prend ses enfants qui reviennent à leur
ancienne école, ou bien se font admettre
dans une autre, si un déménagement est
venu compliquer encore la situation. <
L'instruction ne gagne pas à ces chan- ,
gements ; cependant grâce à l'unité du
programme temps, et même des emplois du
mips, on s'en tire; mais la direction
morale ne gagne rien à être ainsi cabo-
tée.
Figurez-vous qu'il y ett à l'école pri-
maire, ou attenant à l'école, quelques
chambres pour y hospitaliser temporai-
rement les enfants appartenant à la ca-
tégorie que je viens de citer. Mais n'on-
ticipons pas sur nos conclusions.
Il faut cependant remarquer en pas-
sant — et la remarque nous aidera pour
conclure —que les enfants de cette caté-
gorie sont, Te plus souvent, des enfants
non vicieux ou non viciés, de parents
honnêtes ou du moins ne causant aucun
scandale — la preuve c'est qu'on les a
acceptés et gardés dans des maisons de
bourgeois — tandis que la population de
l'école de la rue Denfert-Rochereau est,
par la force des choses, tout ce qu'il y a
de plus mêlé. On y voit des têtes sur les-
quelles le vice originel est marqué en
signes qui ne permettent aucun doute.
La question se complique encore tors-
qu'il s'agit d'enfants non tanes, apparte-
nant à des indigents et vivant dans des
bouges où l'on paie à la semaine et
même à la nuH.Ortoe aux expulsions,ils
sont comparables MM nomades du d6-
—f*- 1
Rappelez-vous ce que me disait un des
gardiens concierges de la cité Jeanne-
d'Arc :
« Quel dommage que vous ne soyez
pas venue hier, vous auriez trouvé cent
cinquante enfants de plus ; ce matin,
nousavons expulsé cinquante familles 1 »
(ce jour-là, soit dit en passant,je comptai,
dans la seule cité, plus de cent trente en-
fants n'allant pas à l'écolo, alors que
l'enquête de la préfecture de police en
accusait seulement vingt-cinq !)
Admettons, ce qui est improbable,que
les cinquante parents expulsas aient eu
le vif désir d'obéir à la loi scolaire :
Avant de faire incorporer leurs enfants
dans une autre école, il leur a fallu d'a-
bord louer une chambre ici ou là,et c'est
loin d'être facile,car,en l'absence de bons
renseignements, il faudrait des meubles,
et les expulsés n'en ont pas. Le proprié-
taire garde tout, sauf le lit — or le lit,
c'est un luxe — et les instruments de
travai l •
L'an dernier, pendant l'hiver, j'ai vu
trois jours durant devant une des grilles
de la cité Jeanne d'Arc,un homme et son
enfant, sous la pluie, à côté de leur gra-
bat que l'on refusait partout.
En admettant qu'il y eût de la mise en
scène dans le butd'apitoyer les passants,
il est fort probable que, sans argent,
sans meubles, sans linge, sans rien pour
répondre d'une location, ayant de plus
contre eux la tare de l'expulsion ces mal-
heureux ne trouvaient d abri nulle part.
Il est donc difficile de se loger dans les
cas analogues à celui dont je parle, et,
pour en revenir à mes cinquante parents
expulsés, je répète que, même avec le
désir, très problématique, d'empêcher
tout arrêt dans l'éducation de leurs en-
fants, il a fallu se résigner à attendre
d'être logés et que les formalités indis-
pensables fussent remplies : Course à la
mairie afin de faire inscrire les en-
fants ; à l'école pour présenter le
bulletin de la mairie, le certificat de
vaccination, etc. Or, comme en ....".
L teJÔtoieaftatioii scolaire est le moindre
des soucis de la plupart de ces nomades,
on laisse passer des jours et des semai-
nes sans se mettre en règle.
Supposez seulement deux expulsions
par an, et vous conclurez que si, pour
porter ses fruits, l'éducation doit se faire
sans secousse, et si l'éducateur a besoin
de bien connaître ses élèves pour avoir
de l'action sur eux, la Culture morale
des enfants indigents est vraiment bien
compromise.
Sans contredit, en ces circonstances,
l'hospitalisation par l'école ou une an-
nexe de l'école devrait être immédiate,
et le transfert se ferait en son temps.
Mais l'énumération des difficultés
n'est pas encore terminée, et les com-
plications paraissent inextricables (j'ai
dit « paraissent ») lorsqu'il s'agit de pau-
vres petits qui, vivant en promiscuité
comme des animaux, connaissent tout
excepté le bien et ont tout vu excepté
le beau. Les uns ont été systématique-
ment dressés aux pires choses et les
font comme ils feraient les bonnes s ils
étaient autrement entourés. Parmi eux,
y en a beaucoup de facilemont éduca-
bles.
Les instituteurs, qui savent ce que
vaut l'exemple, le mauvais, surtout,
hélas l accueillent, ne pouvant faire au-
trement les élèves inquiétants, lorsqu'ils
se présentent; mais éprouvent un réel
soulagement lorsqu'ils manquent à l'ap-
pel....
Peut-être quelques-uns se sont-ils
posé la question que nous nous posions
nous-mêmes naguère : « Sous prétexte
d'obligation scolaire l'Etat a-t-i! le droit
d'imposer à des enfants que leurs pa-
rents ont sauvegardés un voisinage mal-
sain, une camaraderie douteuse? »
Leurs scrupules, que nul n'oserait
blâmer, permettent encore à beaucoup
d'enfants d'échapper à l'obligation sco-
laire; il y a aussi des maires et des ins-
pecteurs qui jugent, à bon droit, qu'il
vaut mieux qu'une telle population eoit
dans la rue que dans l'école.-
Pour les enfants sains évidemment,
mais... pour eux-mêmes !
Il y aurait un moyen, sinon de remé-
dier au mal, du moins de l'atténuer sé-
rieusement. Ce serait de créer des écoles
d'observation, recevant très peu d'en-
fants que l'on garderait la nuit, selon
les besoins de la cause, ctquct'on incor-
porerait dans les écoles publiques dès
que ce serait moralement possible.
Ces écoles d'observation 1 j'ai cru en
tenir au moins une, dont j'avais rêvé de
faire un type,et vu les collaborateurs qui i
m'entouraient, nous aurions réussi cer-
tainement; mais elle m'a glissé dans
les doigts, et je n'en suis pas consolée.
Personne n'en niait la nécessité, certes,
mais... « c'était bien difficile » et puis
c'était « bien nouveau ", bien délicat
aussi, car c'était imprimer sur les en-
fants qui la fréquentaient une marque
peu honorable (or il est à remarquer
qu'une quantité notable de ces enfants
passent par les « écoles d'éducation cor-
rectionnelle, lesquelles dépendent du
ministère de l'Intérieur, ce qui n'a pas
besoin de commontaire quant aux « mar-
ques » peu honorables), enfin « créer
une école d'observation dans toi quar-
tier plutôt que dans tel autre, c'était ré-
véler une chose qu'il est bon de laisser
ignorer », c'est qu'il y a, dans certains
quartiers, des misères à faire dresser les
cheveux sur la tète.
Il est temps de conclure :
L'internat, pour tous les enfants nor-
maux de familles normales, est un mal
qu'il faut dénoncer jusqu'à sa suppres-
sion complète.
Malheureusement les adversaires de
la pensée et de la conscience libres s'en
servent pour entretenir dans les esprits
les préjugés et les routines des siècles
passés. C est leur arme la plus sdrc,dono
la plus redoutable. Ils encouragent l'é-
olsme, la paresse, la vanité des f*rali-
ges, et il nous faudra,à nous autMs,heau-
lcoup de courage moral et. beaucoup de
. oersévéraaoe dans aotre lmNUiI.Ddo
pour que la raison finisse par avoir ra;
son.
L'internat temporaire comportant dez
périodes plus ou moins longues est i
encourager :
i° Pour les enfants anormaux de fa
milles normales (je veux surtout parlei
ici des enfants indisciplinés sur lesquels
pour une raison ou pour une autre s'es.
usée l'action de la famille).
2* Pour les enfants notoirement troj
éloignés d'un centre d'instruction
(il faudra, pour ceux-ci importer,enfi n
dans notre pays le régime tutoria! qui
rappelle d'assez près la famille).
3° Pour les enfants qui se trouvent
momentanément dans l'abandon, par
suite de la maladie ou de la mort du père
ou de la mère.
4° Pour les enfants d'indigents que la
rapacité des propriétaires, doublée de la
défectuosité de 1 Assistance publique, de
l'égoïsme et du manque d'initiative des
particuliers, jettent sur le pavé.
5" Pour un certain nombre d'élèves dei
futures écoles d'observation.
Je termine sur cette formule :
« Suppression de l'internat partout où
existe la famille normale.
Création d'internats pour les enfants
victimes du vice et de la misère.
PAULINE KERGOMARD.
FIl!
&1" "Mm* à la c ®jrlb«ut© de la
CROXJIIM
c IP&MIIME Bell&" J4
Ime iMMlat Vlor. ,"""."r
pouvait et devait lei OQMtdérer comme
connexes et en faire M tort Indivisible,
ee qui permettait, en raison de la con-
nexitéetde l'indiviiibUi#,4erenvoyer
les deux inculpés devant la même Juri-
diction, le tribunal correctionnel.
Y. Judet s'est rendu hier avec son
léroueur chez M. Plocy, juge d'instruc-
lion, chez lequel il a pris connaissance
je la commission rogatoire envoyée à
Toulouse.
_____
Il paraîtrait que le Conseil d'enquête
n'a pris encore aucune décision en ee
qui concerne le conoaandant Esterhasy.
1511e serait ajournée à tantôt, affirmai»
le Sêir d'laier.
YVONNE LECLAIRE.
Bourse du Travail de Lyon
• Le 13 août un avait tien à la Bourse êu Tn-
vail use réunion privé* importante organisée
fil! llfaioB syndicale des fiâmes itéuaies.
La ettoyftane Bonaevial. délfenie 6m Syndicat
de rwn»M|iioniost dePMHdeuLkM **SI"
■mt le *roét des fMBnMMt fédmmm as iow,-
ait 40 fnmek, était changée delà conférence.
Noua devons, tout d'abord, dire que la con-
férencière a aimpiement., aats phraseolagie
inutile, mais avec l'éloquence raello qui mon-
tre la conviction, développé son sujet fort inté-
ressant et qui comprenait, nen seutement les re-
vendications féministes, mais encore les re-
vumUeatione sorialw» auxquelles elle* sont inti-
■nessent Ufte8. Dopuis éc longues années sur la
brèche. niMé* à tous les grands mouvements
uvvrters, ancien membre du Conseil d'adminis-
tration à la Bourse du Travail de P.iri», la
ritoyenne Bonnevial était naturellement dési-
gnée pour cette iléraonstaralion.
Nous sommes heureuses de saluer en elle le
noyau de vaillantes propagantistes lowalistes
qu!, sans trovr, apporte toute leur activité à la
noltition dett grands problèmes sociaux.
La citoyenne Bonaevial démontre qu'il est
nécessaire que la femme prenne part aux rc-
vendicaUout» générale» du prolétariat; qu'il est
néceesaire qu elle ne reste pu en detiors des
cJiaJoas8iow; mlércdant ces diverses questions;
que la question des revendications purement
féminine» est étroitement liée à l'avancement
social et à l'avènement d'une meilleure organi-
sation.
.A.Jrès avoir parlé des organisations féministes
de Paris, moMtn' que la plupart de celles-ci
n'avaient pas peur d'aborder les questions poli-
tiques sociales et que sur ce sujet elles étaient
«m» avancées que les groupes socialistes, elle
fait appel aux citoyennes et Citoyens présents et
les enKUffe à faire tous, leurs efforts wour la
flOBStilutioo des syndicats d'ouvriers des pro-
fession* de femmes.
Fort à propos. elle fait ressortir les consé-
quences de la mauvaise éducation donnée dès
le début de la vie aux femmes et aux hommes
qnr l'on sàt>are dès les premières années de l'é-
cole, leur donnant une éducation séparée, lais-
sant germer ainsi dans la conscience des uns-et
des autres un s' ntunent de défiance préjudicia-
ble à la bonne harmonie sociale et a l'entente
tntolligenle des droits et des devoirs de l'un et
de l'autre sexe.Elle préconise lacoéducation inté-
grale affirmant que seul ce système d'éducation
»eut donner à la remmeett. l'homme,le sentiment
exact du devoir et à la première, la force inorale
nécessaire pour éviter les vicissitudes dont elle
est victime dans la société actuelle.
Après la citoyenne Bonnevial, tes citoyens
.narouueL et Bessct prennent la parole et ren-
trant dans les vues de l'oratrice, engagent les
camarades à faire leurs efforts pour que 4a
'bonne impression produite par cette reunion
avorte ses fruits. Il faut, disent-ils, que les ci-
toyennes se mettent résolument à l'œnvre pour
^ constitution de nouveaux syndicats féminins,
citoyen Bessel fait ressortir les avantages de
la coéducation intégrale.
La réunion est levée à 11 heures.
E serait à désirer que de pareilles réunions se
renouvelassent souvent, à désirer égalemcntque
les citoyennes et citoyens se lissent un devoir d'y
assister et d'apporter sur les questions leur opi-
tuon et leurs idées, de semblables discutions
jae pouvant être que profitables à l'avancement
ides idées socialistes.
La citoyenne Bonnevial est encore pour quel-
ques joun;,croyons-nous,t Lyon, nous espérons
,d'aller que l'an (ntigab le propagandiste voudra bien avant
'aller reprenudrc ses occupations,! cvenir parmi
nous traiter un flcs sujets qu'elle connaît si bien;
quelques-uns de nos camarades {prendraient
«gaiement la parole et l'on pourrait a cette fu-
ture réunion, jeter sérieusement les hases de la
fwopagande à faire pour la constitution de syn-
dicats féminins et I organisation de conférences
mixtes uui auraient lieu le ulus souvent possible.
JUDITH GARNIER.
Secrétaire de ('Union syndicale des Dames I
Réunies de Lyon.
LE CRIME DE LA RUE D'ENGHIEN
Ainsi que nous l'avions annoncé, M.
remercier, juge d'instruction a essayé
hier matin de reconstituer rue d'Rnghien, |
la scène de la mort de la petite Lucie
Ouyon.
A cet effet, les époux Guyon ont été
extraits il cinq heures du matin, le mari
de la prison de la Santé, la femme de
Saint-Lazare et ont été amenés, en voi-
ture couverte, rue d'Enghien où ils
étaient placés dans deux pièces différen-
.tes de leur appartement.
Leur arrivée avait passé inaperçue,
mais dès que le bruit se fût répandu
que la reconstitution allait avoir lieu,
les fenêtres se sont garniç» de furieux
et peu à peu la foule s'eet mmir jus-
qu à nécessiter l'interrupftiMI do la circu-
lation des voitures.
Quekmef minutes aprèi,»rri¥éent M.
Lemenaec, ju®§ d'instmetioo al M. Jla-
m ar'l' aous-chef de la Sftulé, bientôt tes
avocaW. des Inculpés, ne Monteux et
Milliard.
Tout d'abord, le juge d'instruction ft
le ipus-chef de lit. Sûreté s# sont rendus
chez toutes les perasoues qui, de leurs
fenêtres, pouvaient apereevolrcelie# des
époux Guyon. Partout, les mêmes ré-
ponses leur ont été faites : la petite fil-
lette n'a jamais été vue à la fenêtre. On
ignorait son existence.
Deux voisins seulement savaient
qu'elle existait pour l'avoir rencontrée
autrefois avec la mère mais ils la
croyaient à la campagne et tous ont été
d'accord sur ce fait très important que
la fenêtre après Ja chute de l'enfant et
avant que son cadavre ne fat découvert,
était fermée.
Ces interrogatoires terminés, les ma-
gistrats montent dans 14 chambre de Lu-
cie Guyon et on amène la mère de l'en.
fant.
— Expliquez-nous, lui dit M. Le mer-
cier comment votre enfant a au se sui-
cider,et d'abord placez les battants de la
fenêtre et attacbez les rideaux comme
vous l'aviez fait la veille de sa mort.
Mme Guyon, très calme, très maîtresse
d*eUe-méine,ayant toujours son air arro-
gant arrange les rideaux de la fenêtre et
montre que sa fille a dû passer entre les
battants, la barre d'appui et le bas de la
fenêtre en se glissant comme une couleu-
vre sans rien déranger et se laisser tom-
ber dans le vide.
M. Lemercier fait alors amener un
enfant de douze ans, le petit Antoine
Jacquot, à peu près de la taille de la pe-
tite Lucie Guyon et la marâtre se place
près de la fenêtre coin me elle suppose
que sa fille elle-même a dû se placer
pour sauter.
M. Lemercier lui fait remarquer com-
bien sa version est inadmissible car la
fenêtre après la chute de l'enfant serait
restée plus largement ouverte et les
rideaux attachés par des épingles se se-
raient déchirés, ou les épingles se se-
raient détachées.
— Votre fille, vous le voyez, n'a pu se
suicider, comme vous le dites. C'est donc
vous qui l'avez jetée par la fenêtre !
A cette accusation directe la marâtre
se borne à répondre : La petite malheu-
reuse, comme elle nous fait avoir des
misères !
Et cette phrase revient ensuite à cha-
que instant dans sa bouche.
M. Lemercier l'interroge sur son man-
que de soins pour l'enfant.
— C'est faux, s'écrie-t-ellc, je lui ache-
tais au contraire toutes sortes de recons-
tituants : des phosphates, de la peptone,
du kola. du quinquina, du fer, etc.
— C'est facile de s'en assurer, fait le
juge d'instruction. Vous devez avoir
quelques-unes des fioles et des boites
ayant contenu ces médicaments. Veuil-
lez les faire voir.
Malheureusement pour Mme Guyon
les recherches qu'on fait en sa présence
dans la cuisine, dans le buffet, les pla-
cards, les armoires, ies tiroirs des meu-
bles restent infructueuses.
Aucune fiole, aucune boîte de phar-
macie..
— Vous avez encore menti lui dit le
juge :
— La petite misérable ! la petite misé-
rable! répondMmeOuyondont les poings
se sont serrés et qui la figure contrac-
tée semble vouloir se jeter sur le juge.
M. Lemercier en a terminé avec la
marâtre Il donne l'ordro qii*elle soit con-
duite iL sa voiture et ramenée à la
Sûreté.
Son départ donne lieu à de gros inci-
dents.
La foule s'était amassée devant le 29
de la rue d'Enghien et plus de deux mille
personnes étaient là, commentant la
mort de la petite Lucie. Les esprits s'é-
taient surexcités et quand on vit sortir
Mme Guyon, une poussée énorme se
produisit Les cris : à mort: à l'écbafaud !
uez-la ! se font entendre.
Une main s'abat sur la tête de la ma-
râtre, lui arrache son chapeau qu'un
agent ramasse et lui rend. Elle s'en sert
pour cacher son visage. On la jette en
quelque sorte dans la voiture et le cocher
veut partir au galop, mais des mains vi-
goureuses se sont attachées aux brides,
et l'officier de paix, M. Jean, est obligé
de faire charger les agents pour dégager
la voiture, qui part à toute vitesse dans
la direction du faubourg Saint-Denis.
Là, un nouvel incident se produit. Le
cheval est à nouveau arrêté et la voi-
ture est entourée par une foule mi1—
çante, hurlant les cris : * A mort! A la
lanterne ! Mme Guyon a perdu toute aftn
arrogance.Blle se serre contre les agent».
Un ouvrier armé d'une bouteille passe
son ta» par lAOftftière et wiUafrtp.
per. thieeeni iKowine le eoop, M. Jean
accourt au pas de charge avec mm sow
cowadt et dégage à noavwu la ToUjro
qui arrive à la fûreté ma nouveau* ta.
cidenl».
Pendant ce temps M, IAmercier fc#r-
roge bi. Guye». Autant ea femme mail
hautaine, arrogante, autant H ettafra&ta,
afrmssé. Il ne répond que par monosyl-
labe et on lui arrache en quelque sorte
les paroles.
Il nie du reste comme sa femme tous '
les faits qui lui sont reprochés et soutient
qu'il dooîwt4 sa fille tous lai Miof... .
nécessaires.
M. Lemercier, après quelques ques-
tions peu importantes, le fait descendue
dans râtelier vitré de l'emballeur où est
tombé le corps de l'enfant.
Là, de nouvelles constatations sont
faites.On place le petit Jacquot sur l'éta-
bli à l'endroit où la petite Lucie a été
trouvée ; de l'eau est jeté à la place où se
trouvaient les traces de sang et qui marque
l'endroit où le corps était tombé et il est
démontré que le corps jeté par quelqu'un
devait tomber comme il Tétait. Tandis
que l'enfant se jetant lui-même par la fe-
nêtre serait tombé à un autre endroit.
Le corps, en effet, est à peinera un mo-
tre 20 du mur de la fenêtre.
Un architecte relève alors le plan des
lieux, puis Guyon est emmenè à son
tour pour être conduit à la Sûreté.
Son départ donne lieu comme celui de
sa femme, à des scènes de sauvagerie,
mais les dispositions sont mieux prises
par la police, et le fiacre qui l'emmène
disparaît par la rue d'Hauteville sans in-
cident.
A la Sûreté, on sert à déjeuner aux
époux Guyon, qui sont chacun dans une
cellule différente et Mme Guyon a été
conduite ensuite dans le cabinet de M.
Lemercier, qui l'a confrontée avec plu-
sieurs de ses voisins.
DÉROULÈDE
d'après Drumont
C'est toujours amusant de s'apercevoir
de la fausseté, du creux des théories de
certains leaders de la politique actuelle.
Ces bons messieurs sont peut-être très
sincùres quand ils écrivent, mais il faut
avouer que leur esprit n'est pas long-
temps homogène, et que leur conscience
n'est qu'une conscience-girouette.
M. Drumont ouvre largement ses bras
à M. Déroulède. Le refuge est charmant...
Cette admiration présente nous laisse
pensives quand nous la comparons à ce
que ce même M. Drumont écrivait dans
la France Juive.
Voici des extraits de l'opinion d'alors,
du directeur de la Libre Parole sur le
poète des Chants du soldat :
Figurez-vous un Dérouléde vraiment p&*
triote...
V 9
* •
Au moment où Déro ,.ilèfle et la Ligue des
Patriotes provoquaient niaisement l'Allemagne,
nous n'avions même pas de munitions.
•
... Pour faire réussir le coup il faut trouver
un imbécile de bonne foi ; Déroulède est ' là. Il
est absolument incapable, j'en suis convaincu,
d'avoir reçu quoi que ce soit pour jouer le rôle
de l'agent provocateur. C'est simplement un
typ.î bien actuel, l'homme affolé de réclame,
ayant le besoin d'être toujours en scène. Il
s c.it fait une sorte de profession de son bruyant
patriotisme : c'est dans c-^ rôle que le Parid des
premières est habitué à le voir. et il ne peut
plu5 la dépouiller ce personnage. Il est patriote à
i ville, à la campagne, le matin, le soir, aux
Viriétés et aux Bounes. à la Pc!» € Variée et à la
Mascotte. Au SaJou. à côté de vieux soldats qui
ont vingt campagnes, dix blessures, il se fait
peindre par Nenville, la capote enroulée autour
du corps, portant dans des étuis lIe cuir toutes
sortes d'ihf-utn''nts, des c-trtouchL's, des lor-
gnettes, un revolver.
• m
... Sans doute, si l'on pouvait enfermer deux
on trois heures ce vaniteux dangereux, s'il pou
voit se recueillir dans cet isolement (lui pesé à
ces natures comme te silence du tombeau, ii se-
rait effrayé lui-même du danger qu'il a fait cou-
rir à son pays...
Celte équipée, qui ne fut que ridicule, aurait
pu être dangereuse si l'Allemagne, pour des rai-
sons que nous avons déduites, n'avait pas été
résolue A la paix; si Paris, devinant d'instinct,
sans savoir au juste la vérité, les spéculations
cachées là-dessus, ne fut resté profondément
indifférent.
• 9
Ajoutons que le président de la Ligue des
Patriotes n'est pas toujours scrupuleux dans les
M. procédés qu'il emploie. Sous prétexte que
l. Rothan a prodigué au gouvernement impé-
rial les avertissements .les plus clairvoyants et
les plus prophétiques sur les desseins de l'Alle-
magne, Dérculède fait figurer sur ces listes, en
««alité de vleejprMéMt. l'amlcn ntaisire A
Hambourg. L* dljp6H|, «raljp Ifept m
trouver en vedetfc
qui ont déclaré «M W4M|Éh1mMV hdroî-
quement à OraveÇRjS ê lf<«t-E^Mtatwit
des lâches ou des tnB— jirniMtf awasjtaergie.
Déroulède promet de ray« a en lait
«fc* Hniftpat, en août fi,T Hethiii est
tuinluf 4s as propriété .. baeb. en AI-
jjNe. oè H «ômpowt tranwtfSit des livres
SSTauf»j«j§iHi QMS âSsuSBeSSdis que Dérou.
wde as fptfnéne wonuMcpent sur le boule-
Yard. «jaifcinté d%eoir UH encore une fols du
bruit sur is dos des wtiye.
\ •
Partout le sauteur spMuraftt. A* mois d'octo-
bra 'Mf, roulède éqjft: •ùwljm que soient
mes opinions personne tel. j al Mlusé de laisser
inscrite mon nom sur aucune liste, parce que
te cause que je sers et que je ne veux pas aban-
donner m défend 4'44i» ^ «Mdidtfd'awgp
parti. • Six semaines après, Il demande à être
porté sur la liste opportuniste...
•
... Supposes que Déroulède, au lieu d'être un
poseur et un fanfaron de patriotisme, dit eu
irMmsnt les )teotM)M)tt$ 4'»11 psîèojte, t'aflMWir :
profond et sincère de son pays...
#•
En aucune circonstance, d'ailleurs, vous ne
trouverai le fondateur de la Ligue des patriotes
réclamant une masure sage et pratiquement
utile ft 1* détenu du pays.
Fronce Ji*e. tome, 1, pages 151, 40, 483, iêi,
485o 486s ?7.
Et, après cela, h eux les accolades, les
« cher maître » et les cordiales poignées
de main l
Messieurs les agents
Un fait ignoble s'est pusé vendredi der-
nier, en plein boulevard Voltaire.
Une femme d'une conduite irréprochable
lime Haring, dont le mari occupe depuis
dix-huit ans la môme situation dans une
maison de oommeroe,a été arrêtée pour ra-
colage. par quatre agents, trois en oivil et,
un en uniforme, alors qu'elle sortait de
chez son docteur.
Comme réponse à cette honnête femme
qui se défendait il l'accusèrent d'avoir ar-
rêté UI1 vieux monsieur dans la rue et d'être
entrée ensuite avec lui dans ua hôtel meu-
blé.
Mme Haring, protesta, et indiqua la
maison d'où elle sortait, maison voisine
d'un hôtel, mais seulement maison de rap-
port. Puis, comme elle se défendait, ne
voulant pas qu'on l'emmenât, ils la con-
duisirent au bureau de l'hôtel et là interro-
gèrent la maîtresse de l'établissement.
On suppose quelle dût être la réponse de
cette personne qui voyait Mme Haring pour
la première fois.
Un des agents furieux, grommela :
— Ça lui coûtera cherde mentir ainsi.
Mme Haring, pria qu'on envoyât cher-
cher son mari. On n'écouta pas sa demande,
et on la conduisit au commissariat de la
rue des Trois-Bornes.
Là, on lui posa quelques questions dans
le goût suivant :
— Votre enfant est-il de votre mari ?
— Etes-vous mariée ou cc collée? »»
Et la pauvre femme, effrayée devant ces
brutes, répondait :
— Oui, je suis mariée.
A ces mots, tous levèrent les épaules en
ricanant :
— Ah! nous connaissons cela! Le ma-
riage de la main gauche.
L'interrogatoire continua dans le même
esprit, s'adressant à une femme d'une ho-
norabilité parfaite et au-dessus de tout
soupçon.
Donc, nous avons celte perspective, nous
les femmes, si la police ne veut pas une
fois pour toutes se débarrasser des butors
et des ivrognes qu'elle affuble d'un sabre et
d'un uniforme, de ne pouvoir attendre un
omnibus sans qu'immédiatement les agents
nous arrêtent pour racolage.
Le père ne pourra plus quitter sa fille
pour acheter un journal, le mari sa femme
pour entrer à un bureau de tabac quelcon-
que prendre une boite d'allumettes, sans
1 qu'à son retour, à la place où ils avaient
laissé, l'un sa femme, 1 autre sa fille, femme
et fille aient disparu.
Los petites arrestations du genre de celle
de vendredi arrivent vraiment trop souvent, !
et, tout en comprenant les plaisanteries,
nous avouons à la police que celles que cer-
tains de ses agents nous servent ne nous
conviennent pas et que nous les prions de
bien vouloir les cesser.
JEANNE LANDRE.
Lettre d'Egypte
Pour commencer la semaine un déraille-
ment....
Les chemins de fer égyptiens ne veulent
pas se laisser distancer par ceux d Europe
et s'offrent, eux aussi, de loin en loin, le
luxe d'une petite collision. Cette fois, c'est
à la station de Chin (ligne de Dessouk) que
l'accident s'est produit. Le train de voya-
geurs se rendant de nuit du Caire à Alexan-
drie a tamponné un train de marchandises.
Trois voyageurs ont été tués,le nombre des
blessés n'est pas connu. La. responsabilité
de cette catastrophe incombe, paraît-il, à
l'aiguilleur.
La fête du Kalig au Caire est heureuse-
ment venue effacer la mauvaise impres-
sion causée dans la capitale, par le dcrail-
lefuent de la veille. Mon curHaM et tMea
locale, cette fête... vieux
quité pharaonique. Autr^faE^IMAp
Mdote, il était d'lI8&ge, mMmlSMb"
vorable le dieu Nil, grani JHMnisiMC^jfe
toutes grftoes. sur la terrt4Vf|pte,-m aii
sacrifier dogue Muée, an #pne# «Ma
bri leéa vmftm choisie parai M jfua
bettes 4$ Aft» jffSs nobles de la La
vietî qoe roses et 69 #»u en-
roirtf5ar de iÉMglet de Jkm» de sa-
fran jpt#e gf*aadiar#tait amquéi au fleuve
riehs«|ttt M*+e
k des $tléor"8, - ')es pieds et S. mains
était préoipiiée4ans les eau- disparais-
sait sous leur nappe grise fleurie de lotus
et de nénuphars, tandis que la foule hur-
lante et joyfpse célébrait les noces mysti-
ques par des danses et des festins pipa que
terrestres, j^e ebrwUsaiSTOf, à pp m à,
grand peine^eUe coutume parbare. Epeere
-il une oétémo qui remplaçât pour
Je peuple l'habitude vieille de tant de siè-
etes; un mannequin brillamment paré Mt,
donc la place de la vierge antique, et le
MM n'en parut pas autrement :Fr±
Au*oue,b(ù ORQR, le simulacre même a
disparu et le canal sur les bords duquel
avait lieu la fôte, a été desséché pour raire
place aux bâtisses toujours plus nombreu-
ses, qui chaque jour transforment le Caire.
N'importe! le souvenir se perpétue des ré-
jouissances d'autrefois, et, Von S'amuse
d'autant plus, que l'on a moins à faire.
Donc, fimancibe, à deux heures de l'après
midi, de nombreux invités s'embarquaient
à Boulac sur le bateau Akaba joliment pa-
voisé pour la circonstance. Ce bateau en
remorquait un autre où avaient pris place
une batterie d'artillerie, la musique mili-
taire et un orchestre arabe. A trois heures,
le bateau s'est mis en marche au son de
l'hymne khédivial, salué par une salve de
coups de canon. Trois heures plus tard, on
débarquait au Foum-el-ttalig, seconde salve,
seconde audition de l'air national.
Des tontes superbes avaient été dressées.
Le gouverneur du Caire, représentant le
Khédive, escorté do sa garde d'honneur,
s'est rendu dans tef tente de gala où il a
reçu les notabilités indigènes et euro-
péennes. Puis la fête a commencé, musi-
que, chants, jeux de toutes sortes ont fait
la joie des spectateurs jusque très avant
dans la nuit. Un très beau feu d'artifice a
clôturé la cérémonie qui avait attiré,comme
chaque année,une foule immense.
A 'rantah,les préparatifs de la grande foire
s'activent. Demain, aura lieu l'ouverture so-
lenuelle do cette mie, d'un genre tout par-
ticulier. En voici l'origine :
En tous pays musulmans les foires furent
instituées en mémoire d'un saint ou d'un
prophète quelconque. Le mot foire (Mou-
led) signitle naissance et c'est cet anni-
versaire sacré qui donne à chaque ville
l'extension commerciale qu'elle prend cha-
que année au moment où les pèlerins arri-
vent en foule de tous les points de l'Egypte
pour fêter le saint.
Tantah est, sous ce rapport.agréabtement
favorisée. Le Saint de la ville, Saïd-el-Ba-
davooni est en effet un des plus vénérés
dans le calendrier égyptien. La grande
mosquée locale qui porte son nom est le
second lieu de pèlerinage après la Mecque,
et tous ceux qui ne peuvent se rendre dans
le Hedjaz viennent à Tantah une fois au
moins dans leur vie. Dans la grande salle,
sous la principale coupole, le tombeau du
Saint reluit sous son grillage d'or, et des
milliers de lampes, remplies d'une huile I
précieuse, brûlent nuit et jour, au-dessus
du sarcophage recouvert d'étoffes rares.
Des femmes, des enfants, des malades
entourent le monument et demeurent
durant des heures, prostrés dans leur pose
adoratrice et suppliante. Des cris, des
pleurs mômes leur échappent,écrasés qu'ils
sont par la majesté du lieu. Mais à la
grande foire qui ouvre demain, l'adoration
tourne au délire et les écrasements ne sont
point rares aux abords de la mosquée trop
petitepourlafouledespélerinsquiaccourent j
de toutes parts.
La ville, qui compte en temps ordinaire
une moyenne de 60,000 habitants, arrive à
recevoir alors plus de 300,000 étrangers.
Les tentes que chaque nouveau venu ap-
porte avec lui se montent parfois à trente
et quarante mille. C'est là-bas, hors la ville,
à quelques mèt.res du chemin de fer, dans
une immense plaine à laquelle on accède
par un petit pont, que ces demeures de
toile dressent leurs mâts. il y en a
de toutes formes, de toutes étoffes, de
toutes nations. L'intérieur, doublé de co-
tonnade ou même de soie à dessins
multicolores, est orné de poutres d'où re-
tombentdeslustresbyzarrcsehargésde bou-
gies et de lampes à verres de couleurs. Des
tapis couvrent le sol,eL de larges divans at-
tendent les visiteurs. La tente du gouver-
neur est au milieu, et tout le temps que
dure la fête il reçoit les étrangers qui se
présentent avec cette courtoisie orientale
qui l'ait l'hôte, quel qu'il soit, toujours
sacré. Les tasses de café, les sirops de
roses et de violettes, les cigarettes cir-
culent; cl c'est. ainsi pendant dix grands
jours une ville nouvelle dans l'autre
ville. De loin en loin, de grands mâts anti-
ques supportent des lampions et des ban-
deroles flottanles, Le soir tout cela s'illu-
mine et offre un coup d'œil absolument
particulier.
Mais que dire du mouvement extraordi-
naire qui se produit dans l'intérieur môme
de la cité 1 La circulation devient, de dix
heures du matin à minuit, absolument
impossible. 1* feitalisa» Wffasnt ahu-
ris et charmés ea se tenant par la main
comme des enkat& Les jeunes filles, ve-
nues du foot «Ulicas Utatains, vê -
tues du long pantalon de velours violet, et
de la courte chemisette de fIZ8 noire, la
gorge découle soutenue par un mince
gilet de velours galonné d'or, très ouvert
sur le devant, la tête ceinte du léger voile
noir, vont, rift¥*s et surprises, arrê-
tées et perdues à chaque pas, emplissant
leurs jolis yeux de bêtes timides, de toutes
ces chasot, 411,01106 41e «warwtf. sim ja.
mais.
1 L'arrivée des vUlAgeqif eU Jûen curieuse,
bien typique aussi. C'est d abord hissés sut
des ânes, les musiciens, haut bois et clari.
nettes, jouant le môme air mvamhleipent
depuis des siècles avec l'accompagnement
effroyable de la gvesse-caisse; puis d'autres
thofpmes suivent portant les drapeaux m-
tigieux. Vient ensuite l, chef du village,^
cheik le plus ancien du hameau et cet M*
eétre a.u paisible trot de son baudet, repré-
sente bien le patriarche, avec sa barbe
blanche, son vaste turban et sa longue
robe..
4AO femmes ferment la ....-obe. ae&
sur les chameaux, couvertes de bijoux de
cuivre et de sequins qui à -chaque :e.èH1&-
tion de la bête font entendre un joli Cli-
q"g,s.qiû les amuse, accompagne drôle-
ment la mélopée d'arrivée qu'elles chan-
tent de toute leur voix.
. Les enfants pullulent, petits et grands,
. blancs ou bruns, vêtus ou JUIS, en t&s, dan2
les bras, sur $ou éjiauies, sur !e dos, ou
sur . les genpux maternels. Les mon-
treurs de bêtes curieuses, les marchands
de limonade, les estropiés, les fous,
lée saints, parcourent la ville ea enant
un boniment, ou marmottant des priè-
res. Les baraques de #altimba»qmes,
: les cirques, les monstres, garnissent la
ville. Et le Saint est un peu utatiiiie, jusqu'au
grand vendredi, le jour fameux où sort le
Khalife dans une procession , solennelle
dont je vous entretiendrai jeudi prochain.
Cette ana4ç, par exception, le Myuled est
favorisé d'uno température presque euro-
péenne; les soirées sont eKquisctS,oL la fête
n'est que plus séduisante pour tous les
déshérités qui viennent t'aire provision-de
i joie et de courage, emportant de cette foire
une quantité de souvenirs suflisantc à ati-
menter les conversations de foulas leur?
nuits jusqu'à la mort.
JEHAN D'IVRAY.
-
~~
Lire à la quatrième page sein
aeareaa feaJUIetea.
< Xilt«V£BlTË UVBT4Y »
1 par Hâte A. lg"rot-
JUSTE RÉCLAMATION
Saint-Maurice, le 24 août 1898.
On nous signale le fait suivant :
Tous les jours, à l'asile des convalescents, on
jette aux eaux grasses une grande quantité )c
bouillon, de viande, de pain qui n'ont pu être
utilisés dans la maison.
L'adjudicataire de ces débris en retire le*
morceaux lus mieux conservés, et après les avoii
lavés à l'eau bouillante, les perte aux Halles où
pour quelques sous il les vend aux miséreux.
Beaucoup de personnes déplorent qu'on nt
fasse pas profiter de ces aliments les familles
du pays qui. souvent, ont tant de peine à vivre,
et qu'on ne leur fasse pas tous les jours, une db.
tribution de viande el de légume, laquelle n'
coûterait rien à la maison et rendrait de si
grands services à tant de pauvres gens !
Ce même établissement qui consomme plu-
sieurs milliers d'hectolitres de vin par an ue
pourrait il donner un vin naturel et de bonne
qualité au prix de Ofr. 30 le litre, au lieu du vin
frelaté qu'il distribue à ses malades?
De quel pays pourrait-on faire venir c
vin ?
LES REVUES
Revue de» Deux-Mondes (.15 août).
1. — Les réactionnaires ressemblent atr
vieillards : ils se tournent adoralifs vers 1
passé.
Mais les vieillards ont une excuse : leui
vue baisse, les formes connues leur inspi-
rent seules confiance; tout effort les fati-
gue; bâtir les épouvante. Ils conservent.
De là, leur haine des démolisseurs et de*
architectes des Cités futures.
Par contre, il faut demander aux réac-
tionnaires quel furieux dépit, quelle aber-
ration, quel violent égoïsme les poussent à
proclamer sans cesse que dam le temps tout
allait pour le mieux sous le meilleur de.<-
gouvernements.
Certes, M. Maurice Talmeyr n'a pas même
le minimum d'âge où les refrains d'aïeul
sont excusables. Alors, il doit avoir s.;?
raisons pour préférer si ûprement le temps
passé iL celui-ci. Il est dommage qu'il ne
nous lis donne pas dans son article sur les
Minus rlecto, ale$. Nous voudrions savoir cc
qu'il appelle le Il beau temps ", quelle est,
selon lui, l'époque idéale.
Il nous fournit sur ce point d'insuffisan-
tes indications. On peut en déduire, toute-
fois, que le « ciel noir è, redeviendra bleu,
— du bleu sans doute adopté pour le man-
teau des rois et la ceinture des N. D. de
Lourdes — quand tous les chefs de ra\"an'.
(3)
LA TRIBUNE
26 AOUT 1898
ENCORE L'INTERNAT
III
Supprimons l'Internat, mais créons
des internats
etm n&rùme /ferme m ftuUWm vo&«t I
. §mt k #rwub change $om la tnm Jourt. I
1 Les enfants qui habitent les mansardes
dont j'ai parlé au début du chapitre
précédent fréquentent irrégulièrement
*6wle ; mille causes — quelquefois la
nudité, indéniable malgré les efforts des
municipalités — entravent la stricte
jobservation de la loi. La maladie de la
paère « dont il faut faire les commis-
sions » est presque aussi souvent une
la raison » qu'un prétexte. C'est fatal;
mais c'est très acceptable aussi, car en
faisant son devoir fUial, l'enfant — fille
ou garçon — travaille sans s'en douter à
non éducation morale, et s'initie à la vie
réelle.
, Nous n'aurions donc pas trop lieu de
nous inquiéter de ces accrocs faits à la
loi sooiatre. si la boane volonté et l'iaté-
rêt biea entendu des parents savaient les
réduire au minimum, et ai, par compen-
nation, l'enfant fréquentait récole jus-
qu'à font 13 ans comme les auteurs 4e la loi
ot décidé.
Même si les commissions scolaires
étaient composées selon la raison ; même
m elles avaient vraiment le sentiment de
'leur responsabilité, ces absences tempo-
Mires ae sauraient être considérées
comme un délit de quelque gravité.
Mais une complication se produit trop
fréquemment : lamSade estemmenS
largowa 4 rifeiftait et .1'..,....
mentanée ou définitive du père, les en-
fants sont en réelle détresse.
En ce cas, à défaut de la charité parti-
culière, l'Assistance publique intervient;
les enfants sont hospitalisés rue Denfert-
Rochereau, et, mêlés aux petits aban- |
donnés qui attendent leur départ pour
la campagne, ils sont reçus à l'êcole ins-
tallée dans la maison même, ou bien, en
cas d'amuence, envoyés dans les écoles 1
voisines de rétablissement. Cela dure
autant que la maladie de la mère.
Rentrée chez elle, la convalescente re-
prend ses enfants qui reviennent à leur
ancienne école, ou bien se font admettre
dans une autre, si un déménagement est
venu compliquer encore la situation. <
L'instruction ne gagne pas à ces chan- ,
gements ; cependant grâce à l'unité du
programme temps, et même des emplois du
mips, on s'en tire; mais la direction
morale ne gagne rien à être ainsi cabo-
tée.
Figurez-vous qu'il y ett à l'école pri-
maire, ou attenant à l'école, quelques
chambres pour y hospitaliser temporai-
rement les enfants appartenant à la ca-
tégorie que je viens de citer. Mais n'on-
ticipons pas sur nos conclusions.
Il faut cependant remarquer en pas-
sant — et la remarque nous aidera pour
conclure —que les enfants de cette caté-
gorie sont, Te plus souvent, des enfants
non vicieux ou non viciés, de parents
honnêtes ou du moins ne causant aucun
scandale — la preuve c'est qu'on les a
acceptés et gardés dans des maisons de
bourgeois — tandis que la population de
l'école de la rue Denfert-Rochereau est,
par la force des choses, tout ce qu'il y a
de plus mêlé. On y voit des têtes sur les-
quelles le vice originel est marqué en
signes qui ne permettent aucun doute.
La question se complique encore tors-
qu'il s'agit d'enfants non tanes, apparte-
nant à des indigents et vivant dans des
bouges où l'on paie à la semaine et
même à la nuH.Ortoe aux expulsions,ils
sont comparables MM nomades du d6-
—f*- 1
Rappelez-vous ce que me disait un des
gardiens concierges de la cité Jeanne-
d'Arc :
« Quel dommage que vous ne soyez
pas venue hier, vous auriez trouvé cent
cinquante enfants de plus ; ce matin,
nousavons expulsé cinquante familles 1 »
(ce jour-là, soit dit en passant,je comptai,
dans la seule cité, plus de cent trente en-
fants n'allant pas à l'écolo, alors que
l'enquête de la préfecture de police en
accusait seulement vingt-cinq !)
Admettons, ce qui est improbable,que
les cinquante parents expulsas aient eu
le vif désir d'obéir à la loi scolaire :
Avant de faire incorporer leurs enfants
dans une autre école, il leur a fallu d'a-
bord louer une chambre ici ou là,et c'est
loin d'être facile,car,en l'absence de bons
renseignements, il faudrait des meubles,
et les expulsés n'en ont pas. Le proprié-
taire garde tout, sauf le lit — or le lit,
c'est un luxe — et les instruments de
travai l •
L'an dernier, pendant l'hiver, j'ai vu
trois jours durant devant une des grilles
de la cité Jeanne d'Arc,un homme et son
enfant, sous la pluie, à côté de leur gra-
bat que l'on refusait partout.
En admettant qu'il y eût de la mise en
scène dans le butd'apitoyer les passants,
il est fort probable que, sans argent,
sans meubles, sans linge, sans rien pour
répondre d'une location, ayant de plus
contre eux la tare de l'expulsion ces mal-
heureux ne trouvaient d abri nulle part.
Il est donc difficile de se loger dans les
cas analogues à celui dont je parle, et,
pour en revenir à mes cinquante parents
expulsés, je répète que, même avec le
désir, très problématique, d'empêcher
tout arrêt dans l'éducation de leurs en-
fants, il a fallu se résigner à attendre
d'être logés et que les formalités indis-
pensables fussent remplies : Course à la
mairie afin de faire inscrire les en-
fants ; à l'école pour présenter le
bulletin de la mairie, le certificat de
vaccination, etc. Or, comme en ....".
L teJÔtoieaftatioii scolaire est le moindre
des soucis de la plupart de ces nomades,
on laisse passer des jours et des semai-
nes sans se mettre en règle.
Supposez seulement deux expulsions
par an, et vous conclurez que si, pour
porter ses fruits, l'éducation doit se faire
sans secousse, et si l'éducateur a besoin
de bien connaître ses élèves pour avoir
de l'action sur eux, la Culture morale
des enfants indigents est vraiment bien
compromise.
Sans contredit, en ces circonstances,
l'hospitalisation par l'école ou une an-
nexe de l'école devrait être immédiate,
et le transfert se ferait en son temps.
Mais l'énumération des difficultés
n'est pas encore terminée, et les com-
plications paraissent inextricables (j'ai
dit « paraissent ») lorsqu'il s'agit de pau-
vres petits qui, vivant en promiscuité
comme des animaux, connaissent tout
excepté le bien et ont tout vu excepté
le beau. Les uns ont été systématique-
ment dressés aux pires choses et les
font comme ils feraient les bonnes s ils
étaient autrement entourés. Parmi eux,
y en a beaucoup de facilemont éduca-
bles.
Les instituteurs, qui savent ce que
vaut l'exemple, le mauvais, surtout,
hélas l accueillent, ne pouvant faire au-
trement les élèves inquiétants, lorsqu'ils
se présentent; mais éprouvent un réel
soulagement lorsqu'ils manquent à l'ap-
pel....
Peut-être quelques-uns se sont-ils
posé la question que nous nous posions
nous-mêmes naguère : « Sous prétexte
d'obligation scolaire l'Etat a-t-i! le droit
d'imposer à des enfants que leurs pa-
rents ont sauvegardés un voisinage mal-
sain, une camaraderie douteuse? »
Leurs scrupules, que nul n'oserait
blâmer, permettent encore à beaucoup
d'enfants d'échapper à l'obligation sco-
laire; il y a aussi des maires et des ins-
pecteurs qui jugent, à bon droit, qu'il
vaut mieux qu'une telle population eoit
dans la rue que dans l'école.-
Pour les enfants sains évidemment,
mais... pour eux-mêmes !
Il y aurait un moyen, sinon de remé-
dier au mal, du moins de l'atténuer sé-
rieusement. Ce serait de créer des écoles
d'observation, recevant très peu d'en-
fants que l'on garderait la nuit, selon
les besoins de la cause, ctquct'on incor-
porerait dans les écoles publiques dès
que ce serait moralement possible.
Ces écoles d'observation 1 j'ai cru en
tenir au moins une, dont j'avais rêvé de
faire un type,et vu les collaborateurs qui i
m'entouraient, nous aurions réussi cer-
tainement; mais elle m'a glissé dans
les doigts, et je n'en suis pas consolée.
Personne n'en niait la nécessité, certes,
mais... « c'était bien difficile » et puis
c'était « bien nouveau ", bien délicat
aussi, car c'était imprimer sur les en-
fants qui la fréquentaient une marque
peu honorable (or il est à remarquer
qu'une quantité notable de ces enfants
passent par les « écoles d'éducation cor-
rectionnelle, lesquelles dépendent du
ministère de l'Intérieur, ce qui n'a pas
besoin de commontaire quant aux « mar-
ques » peu honorables), enfin « créer
une école d'observation dans toi quar-
tier plutôt que dans tel autre, c'était ré-
véler une chose qu'il est bon de laisser
ignorer », c'est qu'il y a, dans certains
quartiers, des misères à faire dresser les
cheveux sur la tète.
Il est temps de conclure :
L'internat, pour tous les enfants nor-
maux de familles normales, est un mal
qu'il faut dénoncer jusqu'à sa suppres-
sion complète.
Malheureusement les adversaires de
la pensée et de la conscience libres s'en
servent pour entretenir dans les esprits
les préjugés et les routines des siècles
passés. C est leur arme la plus sdrc,dono
la plus redoutable. Ils encouragent l'é-
olsme, la paresse, la vanité des f*rali-
ges, et il nous faudra,à nous autMs,heau-
lcoup de courage moral et. beaucoup de
. oersévéraaoe dans aotre lmNUiI.Ddo
pour que la raison finisse par avoir ra;
son.
L'internat temporaire comportant dez
périodes plus ou moins longues est i
encourager :
i° Pour les enfants anormaux de fa
milles normales (je veux surtout parlei
ici des enfants indisciplinés sur lesquels
pour une raison ou pour une autre s'es.
usée l'action de la famille).
2* Pour les enfants notoirement troj
éloignés d'un centre d'instruction
(il faudra, pour ceux-ci importer,enfi n
dans notre pays le régime tutoria! qui
rappelle d'assez près la famille).
3° Pour les enfants qui se trouvent
momentanément dans l'abandon, par
suite de la maladie ou de la mort du père
ou de la mère.
4° Pour les enfants d'indigents que la
rapacité des propriétaires, doublée de la
défectuosité de 1 Assistance publique, de
l'égoïsme et du manque d'initiative des
particuliers, jettent sur le pavé.
5" Pour un certain nombre d'élèves dei
futures écoles d'observation.
Je termine sur cette formule :
« Suppression de l'internat partout où
existe la famille normale.
Création d'internats pour les enfants
victimes du vice et de la misère.
PAULINE KERGOMARD.
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