Titre : Le Petit journal
Auteur : Parti social français. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Clermont-Ferrand)
Éditeur : [s.n.][s.n.] (Pau)
Date d'édition : 1903-03-20
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 20 mars 1903 20 mars 1903
Description : 1903/03/20 (Numéro 14693). 1903/03/20 (Numéro 14693).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : La Commune de Paris Collection numérique : La Commune de Paris
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k616379v
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/10/2008
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VENDREDI 20 MARS 4903
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"saint joachim
286
QUARANTE ET'UNIÈME
(Numéro 14,693)
Dernière Edition
LE BUDGET
'La Chambre des députés a terminé la
discussion du budget de l'exercice 1903, à
laquelle elle a consacré plus de deux
mois ; le Sénat va, à son tour, examiner
ce budget.
, Le budget est, on le sait, l'acte légis
latif qui fixé chaquè année les dépenses
de l'Etat et les recettes destinées à les
acquitter. La nation, par l'intermédiaire
de ses représentants, ouvre au gouver
nement un ensemble de crédits, pour les
diverses, parties de l'administration, et
elle lui donne en même temps le droit de
percevoir, par des moyens bien définis,
les ressources c' Dans un budget normal, les recettes et
les dépenses doivent au moins se balan-
çer. Il est même prudent de s'arranger
de' façon'que les recettes soient supé
rieures aux dépenses, car un budget pré
senté simplement, en équilibre court le
risque de se régler en déficit, attendu
qu'il surgit toujours dans le cours de
l'année, des dépenses qui n'avaient pu
être prévues?
, Ne cker fut le premier ministre qui ré
véla publiquement les besoins et les res
sources du royaume ; mais le mot budget,
emprunté à la langue anglaise, ne fut
employé "pour la première fois que dans
la loi de finances du 25 avril 1806. De
1819 à 1835, le budget des dépenses os
cilla entre 700 et 900 millions ; vers 1837
il dépassait le milliard ; et depuis lors, il
n 'a cessé dp s'accroître.La guerre de 1870,
les efforts prodigieux que la, France a dû
faire pour reprendre son rang dans le
monde "ont largement contribué à cet
accroissement.
•***.
M. Rouvier, ministre des finances,
avait proposé d'arrêter ainsi qu'il suit le
le budget dé 1903 :
.Recettes 1... 3.574.876.812 fr.
Dépenses 3 .574.398.930 fr.
Il y aurait eu ainsi un
maigre excédent de.. 477.882 fr.
.Voici quelles sont nos plus grosses dé
penses budgétaires :
.• , Millions
Dette publique..;.. :.. ...■ i. {91 j>
J ^UTOirs pubiics: Sénat, Chambré, etc. 13.5
Ministère de la guerre et de. la marine, i .017 »
Instruction publique et beaux -arts ... .* 230.5
Travaux publics..... 245.2
Colonies.. 112.5
Le ministère de l'intérieur coûte 80 mil
lions; celui de l'agriculture, 31 seule
ment. Les frais de régie et de perception
des impôts s'élèvent au chiffre de 442 mil
lions et demi, qu'il est perdais de trouver
quelque peu exagéré. .
Quant aux charges nombreuses et di
verses qui pèsent sur les contribuables et
qui, chaque année, s'alourdissent au lieu
de s'alléger, nos lecteurs les connaissent
toutes, sans qu'il soit besoin de les leur
rappeler. Il n'est pas un seul acte de la
vie .qui ne tombe sous l'application d'une
redevance à payer, soit à l'Etat, soit aux
départements^ soit aux communes,' et,
trop souvent, à tous les trois. En somme,
le prélèvement opéré, au moyen de 1'im-
ÇÔt, sur le revenu net de la nation dé
passe, en France, le tiers de ce revenu !
*** '
Une pareille situation commande aux
représentants du pays d'apporter la plus
- grande sagesse dans l'établissement du
biidg'et; C'est à réduire les dépenses,
c'est-à-dire les charges des contribuables
qui les ont élus, que devraient tendre
tous leurs efforts. Ce n'est pas, malheu
reusement, par cette pensée salutaire
que la majorité de la Cliambre s'est lais
sée guider. Comme si le chiffre des dé
penses n'était pas encore assez transcen
dant, elle y a, de gaîté de cœur, ajouté
4 millions 500,000 francs de dépenses
nouvelles, inspirées par des préoccupa
tions purement électorales.
"D'autre part, le projet de réglementa
tion du privilège des bouilleurs de cru, 1
que M. Rouvier avait préparé, sans s'être
suffisamment renseigné sur les. disposé
tions du pays, a été complètement dislo
qué ; l'écart entre les recettes et les dé
penses s'en est trouvé accru de 10 mil
lions. La Chambre, poursuivant son
œuvre de démolition des projets de M.
Rouvier, a également bouleversé le ré
gime proposé pour les tabacs de zonè et
pour les rentes viagères. Bref, on est
venu, en fin de compte, se heurter a un
déficit de 29'millions.
La Chambre, la commission du budget,
M. Rouvier, se sont mis alors à la recher
che de nouvelles ressources ; il fallait, à
tout prix, joindre, comme on dit, les
deux bouts. C'était à qui apporterait sa
petite combinaison plus ou moins ingé
nieuse : impôt supplémentaire sur les
liqueurs d ? après leur degré alcoolique,
aggravation des droits de douane, taxe
sur les maïs de distillerie, etc. Nous
n'aurions pas été surpris de voir renaître
le projet d'impôt sur les chapeaux à
haute forme, dont» s'égaya si fort l'As
semblée nationale, en 1872. De tous ces
projets,presque tous mal conçus et d'une
application difficile, la Chambre n'a re
tenu que la surtaxe de 1 fr.,2o sur le pé
trole, qui doit, suivant elle produire
5 millions, mais dont le ministre n'espère
pas tirer plus de 3 .millions.
Quoi qu'il en soit, après tout ce travail
fait à la diable, il manquait encore 25
millions environ pour l'équilibre officiel
du budget de 1903. On y a pourvu en au
torisant le ministre des finances à émet
tre, au mieux des intérêts du Trésor,
pour le paiement des garanties d'intérêts
aux Compagnies de chemins de fer, des
obligations à court terme dont le capital
ne pourra excéder 25 millions de francs
et dont l'échéance ne pourra pas dépasser
l'année 1909. En d'autres termes^ on a
enlevé du budget, pour en faire un
compte à part, le service de la garantie
d'intérêts des chemins de fer.
Le budget se trouve ainsi sensiblement
allégé ; peut-être même y aura-t-il un
excédent,
L'expédient n'est pas nouveau ; il n'en
est pas moins déplorable. De quelque
nom que l'on décore cette belle opéra
tion, c'est de l'emprunt et pas autre
chose ! Le budget voté par la Chambre,
pour 1903, ne se solde donc pas avec ses
propres ressources, ayec les moyens ré
guliers et habituels des budgets réelle
ment équilibrés. : k 4
***'
Il en a, malheureusement, été de même
pour les budgets de 1901 et de 1902.
Après avoir soutenu que notre situation
financière était des plus satisfaisantes, il
a bien fallu faire connaître la vérité. M.
Rouvier n'a pas hésité à déclarer que le
déficit du budget de - 1901 s'élevait à
125 millions et celui du budget de 1902 à
129,712,000 francs, soit, en tout, un dé
couvert de 250 millions environ. C'est
aussi par des obligations à court terme
que ce trou sera bouché. Un député avait
fait observer que l'émission de ces obli
gations équivaut à un emprunt. « C'est
un emprunt ; personne ne l'a nié, a dit
M. Rouvier; mais c'est un emprunt tem
poraire, du moins nous l'espérons. »
Quelle que soit la bonne vol nté du
ministre, quels que soient ses efforts
pour 'ramener le bon ordre dans nos fi
nances, nous craignons, tout en souhai
tant vivement de nous tromper, que ces
obligations ne puissent être remboursées
à leur échéance. N'en a-t-il pas déjà été
ainsi pour des obligations sexennaires
échues en 1893, qu'il a fallu, faute de
ressources, renouveler successivement
jusqu'en 1897, époque à laquelle on a pu
en rembourser une partie ? La dette flot
tante du Trésor, c'est-à-dire la dette exi
gible, monte sans cesse ; certains affir
ment qu'elle dépassera le milliard l'an
née prochaine. Et nous redoutons que M.
Rouvier, entraîné par une situation dont
il n'est aucunement responsable, ne se
voie contraint de rouvrir le. Grand-Livre
qu'on pouvait croire à jamais fermé. Le
Grand-Livre, c'est le registre où s'inscri
vent les dettes perpétuelles du Trésor,
les dettes que nous léguons à nos arrière-
neveux, sans nous soucier des besoins de
toutes sortes auxquels ils auront à pour
voir par 'suite des modifications inces
santes des sciences, de l'industrie et des
conditions de là vie sociale.
Il n'est pas sérieux de vous dire, afin
de vous consoler, que tous les budgets
européens souffrent également du déficit.
Ce fait fût-il vrai, qu'il ne prouverait
rien : onn'est jamais obligé de suivre des
mauvais exemples. Mais ce fait n'est
même pas exact. Les budgets de la Russie
et de l'Italie se règlent par des excédents
et on va procéder, en Italie, à des dégrè
vements d'impôts sans compromettre
l'équilibre du budget. Quant à l'Angle
terre, elle doit ses embarras actuels à la
guerre du Transvaal, qui lui a coûté plus
de 6 milliards. L'Allemagnè aussi a des
difficultés financières, mais elle trouve
des compensations dans le développement
considérable de son industrie, de son
commerce et de sa marine marchande.
Dans notre beau pays de France, le
mal financier,. si grave qu'il soit, serait
encore guérissable. La France est riche,
car c'est par excellence le pays de l'épar
gne. Les cent millions d'obligations à
court terme, offertes récemment au pu
blic, ont été enlevées du jour au lende
main ; R en sera de même pour celles qui
seront émises prochainement. Le rende
ment des impôts, en janvier 1903, a été
de 4,800,000 francs supérieur aux évalua
tions budgétaires, et les retraits des
fonds placés dans les caisses d'épar
gne ont diminué dans des proportions
qui démontrent que ces utiles institutions
n'ont en rien perdu la confiance dont
elles ont toujours été dignes' En réalité,
la France est une milliardaire, mais
son immense fortune est si maladroite
ment administrée qu'elle est obligée
d'emprunter !
Nous reviendrions à une situation nor
male si la Chambre prenait la ferrpe ré
solution de réduire les dépenses, ou
même — ne soyons pas trop exigeants —
de ne plus en créer de nouvelles. Mais le
voudra-t-elle ? Ecoutera-t-elle les sages
avertissements que M. Rouvier n'a cessé
de lui donner durant la discussion du
budget et comprendra-t-elle, enfin, que,
selonl'expressiond'unéminentinspecteur
général des finances, M. Dubois de l'Es-
tang, «une Chambre dépensière n'accom
plit pas sa mission » !
Il n'est que temps qu'elle fasse machine
en arrière pour sortir de la voie péril
leuse où elle est entrée. :
Thomas Gfiaaia.
■ ' —■ . i ■' '
CAMBRIOLEURS SURPRIS
Il faut taire des patrouilles. — Cam
brioleurs en expédition. — Deux contre
cinq. — Une lutte émouran te. — Un
mort, un blessé.
' (Dépêche de noirs correspondant}
Bruxelles, 19 mars.
Des vols nombreux étaient commis depuis
quelque temps, dansles fauhourgs de Koekelberg
et en vain la police y exerçait la surveillance Ta
plus étroite. Aussi, en présence d'une pareille
situation, l'administration communale avait-elle
décidé que, toutes les nuits, des patrouilles
mixtes, C'est-à-dire composées d'un agent et
d'un pompier, auraient à charge d'assurer la
tranquillité des quartiers visités par les cam
brioleurs.
C'est ainsi que, la nuit dernière, l'agent
Bernard et le pompier Dégraissé rencontraient
une bande de cinq individus aux allures telle
ment suspectes qu'ils les suivirent jusqu'à
l'angle de la rue Deneck et delà Fossée-de-
.lette.
A cet endroit la bande s'arrêta devant le
cabaret tenu par M. Dierickx.
L'un des individus fit la courte échelle à deux
de ses complices et ceux-ci pénétrèrent dans la
boutique par un vasistas; un moment après ils
ouvraient' la porte à leurs amis, et aussitôt
toute la bandé se préparait de fracturer les
meublés. 1
L'agent et le -pompier survinrent alors. La
vue des uniformes suffit à deux des cambrio
leurs ; ils s'enfuirent à toutes jambes. Pour les
trois autres, ce fut une autre affaire.
— Ah! vous voulez nous arrêter, dit l'un des
volours; eh bien, nous allons vous en Oter
l'envie.
Les cambrioleurs, armés de pinces-monsei
gneur et de ciseaux, se Tuèrent en effet sur
l 'agent et lo pompier, qui durent entamer avec
eux une lutte des plus dangereuses.
Bientôt même il fut évident, pour eux que
leur vie était en danger. L'agent Bernard, pour
donner l'éveil, tira deux coups de revolver en
l'air; puis, ayant reçu un coup de barre de fer
sur l'êpaifle, il fit feu deux fois sur les mal
faiteurs.
L'un d'eux tomba comme une masse. Pen-,
dant ce temps, le pompier Dégraissé était aux
prises avec un bandit qui finit par lui asséner
sur la tête un terrible coup de pincé. Dégraissé
chancela.
Bernard accourut à son secours, tirant au
jugé les deux derniers coups de son arme.
Un des deux malfaiteurs restés debout prit la
fuite ; mais le dernier brandissait à nouveau
sa terrible pince au-dessus de la tête du pom
pier à demi assommé.; l'agent Benjard n'hésita
pas; se servant de son revolver comme d'un
casse-tête, il bondit sur le cambrioleur et le
frappa avec force sur le crâne.
L'homme tomba.
Un instant après arrivaient le cabaretier et
des voisins attirés par le bruit de la lutte et les
deux bandits furent transportés au poste
voisin.
L'un était mort : il avait reçu une balle qui
lui avait traversé le crâne de part en part ; on
ne connaît que son surnom: « la Bête, » par le
quel on le désigne aux abattoirs où il a travaillé.
L'autre malfaiteur, qui est assez grièvement
blessé à la tête par le coup de crosse de revol
ver que lui a porté l'agent Bernard, se nomme
Vanebraban, âgé de vingt-deux ans ; jl a éner-
giqueHient refusé de dénoncer ses complices.
Ceux-ci, pourtant, ne tarderont pas à être
arrêtés ; des agents sont sur leurs traces.
ÉCHOS DE PARTOUT
Un dernier hommage a été rendu, hier,
par l'Académie française à son doyen,
M. Ernest Legouvé, dont les obsèques
ont eu lieu lundi.
M. Brunetière, directeur, dans un dis
cours ému, a, selon l'usage, exprimé les
vifs regrets de l'Académie et fait l'éloge
du défunt qui avait appartenu pendant
quarante r huit ans à l'illustre compagnie.
Il a, ensuite, levé la séance en signe.de
deuil.
Ajoutons que M. Brunetière a deux
autres discours à préparer. C'est, en
effet, d'après le règlement, le directeur
en exercice lors de la mort d'un membre
de l'Académie française qui doit pro
noncer le discours de réception de son
successeur.
M. Brunetière aura donc à recevoir les
successeurs de MM. Gaston Paris et
Ernest Legouvé, mais il se peut qu'il prie
M. Faguet, chancelier, de répondre à l'un
des deux futurs récipiendaires.
L'état de Mme Waldeck-Rousseau
continue à être satisfaisant et si aucune
complication ne survient la femme de
l'ancien président du conseil sera tout à
fait hors de danger dans deux ou trois
jours.
Voici le bulletin médical qui a été ré
digé hier matin :
La 2> journée a été bonne. La température
est de 37,2,1e pouls de 84. L'état général est bon
P oirrier.
M. Waldeck-Rousseau reste en perma
nence auprès de la malade.
♦*+
Le Métropolitain en marche.
De la rive droite, il va bondir sur la
rive gauche. Demain, samedi, doit avoir
lieu l'adjudication des fondations du pont
qui lui fera franchir la Seine à Passy, et
celle des travaux de la ligne numéro 8,
entre le boulevard Saint-Marcel et le
fleuve. Cette partie du tracé comprend la
traversée de la gare d'Orléans, près de la
place Valhubert, avec escaliers d'accès
pour unir la ligne métropolitaine aux
quais des grandes lignes.
, C'est aussi ia section qui desservira le
marché aux chevaux, quadrupèdes dont
le Métropolitain va faire le bonheur en
les rejetant peu à peu hors de leur enfer
parisien.
On vient de vendre, à Londres, une
bouteille de soda, qui provenait du vais
seau de ligne le Royal-George, lequel fit
naufrage près de Spithead, le 29 août 1782.
Le. Royal-George avait été, ce jour-là,
aménagé pour un grand bal, et, çour
avoir plus de place, on avait détaché les
canons. Survint subitement un coup^ de
vent qui fit pencher le navire d'un côté ;
les canons roulèrent de ce côté et le na
vire coula avec l'équipage.
Il reste'encore les deux tiers du liquide
dans la bouteille, qui ressemble beaucoup
à celles qu'on fabrique aujourd'hui.
Cette bouteille a été vendue 670 francs.
H*
La cérémonie de la célébration du cen
tenaire de l'installation de l'Académie de
France à la villa Jlédicis, à Rome, qui
devait avoir lieu le 16 avril est, par suite
d'un empêchement du roi d'Italie, re
portée au surlendemain 18.
La Mi-Carême
Après bien des inquiétudes justifiées parles
giboulées de ces derniers jours, tous ceux qui
s'intéressent à la journée populaire de la Mi-
Carême — tous les Parisiens, — ont eu, hier
matin, la surprise agréable de se trouver ré
veillés par un chaud rayon de soleil.
Aussi nous laissons à penser si cette bienveil
lance atmosphérique a causé une joie bruyante
M" 6 Missiou
reine des reines •
dans les marchés et dans les lavoirs restés
fidèles à la tradition, où l'on se disposait à par
courir Paris.
La Mi-Carême a donc été favorisée une fois
de plus par le temps et les cavalcades ont ainsi
pu déployer le long des rues et des boulevards
le luxe de leurs costumes étincelanls et l'origi
nalité de leurs chars pavoisés.
Aux Halles
Les cris, les chants, les jeux, les rires,
Les coups d'oeil viîs comme l'éclair, \
Tout ce que Dieu de joie inspire ,.
Se mêlent et se croisent dans l'air.
Ce refrain d'une vieille chanson peutVappli-
quer à la physionomie que présentaient les
abords des Halles, hier matin.
C'était, en effet, dan^ la rue Berger, derrière^
les pavillons'4 et G des Hallés, vdlailles et fruits,
que devait se former, à onze heures quarante-
Lorsque les commissaires veulent enfin for
mer définitivement le cûrtège pour le départ, il
y a des manquants, des retardataires, l'hàr-
monie des toilettes est un peu compromise, les
perruques suivent l'inclinaison du tricorne et
î'obéissance est difficile à obtenir.
D'après le programme primitivement arrêté,
Personnages
tous les marchés devaient se grouper aux
Halles et se rendre en groupe, au point de
concentration, la place de la Concorde, en pas
sant, suivant la coutume, à l'hôtel dù Petit
Journal-, hier, la Renaissance des Halles s'est
seule trouvée au rendez-vous, par la raison
probable qu'elle se trouvait chez elle, et a vai
nement attendu la venue du Marché Saint-
Germain avec la Reine des reines et du marché
Lenoir qui avaient oublié l'heure.
A midi et demi, le signal du départ a été
donné et le cortège s'est lentement mis en
marche par la rue de Bambuteau, pour arriver
devant le Petit Journal à une heure quinze.
au « petit journal »
Comme tous les ans, une foule considérable
se trouvait rassemblée aux abords du Petit
Journal pour bénéficier du coup d'oeil que pré
sente le rassemblement des principaux groupés
de la cavalcade. La coutume, à laquelle on
reste fidèle, est, en effet, pour le comité des
Marchés, de venir recevoir nos compliments
avant d'entreprendre la grande promenade à
travers Paris.
Hier,le spectacle a été aussi attrayant quë les
années précédentes, et à l'intersection desrues
Cadet et Lafayette, de nombreuses personnes
stationnaient de bonne heure, égayées par les
airs entraînants que jouaient sans interruption
les musiciens des cortèges qui se sont succédé
sans cesse devant l'hôtel du Petit Journal
durant cette journée de fête populaire.
L'important service d'ordre était-placé sous
lé commandement de MM. Remongin et
Godquin, officiers de paix, et il convient de dire
que ces excellents fonctionnaires ont eu quel
que peine pour assurer la circulation. •
Les chars des lavoirs se suivaient et, tou
jours, on .attendait le cortège de la reine'des
reines. Midi, midi et demi, une ' Eeùrè.i". rien 5
Que se passait-il?.,. Enfin on le signalait ru#
Le clxar de la Reine des Reines
cinq, le cortège de la cavalcade de la rive
droite.
Mais, comme toujours, on a eu du retard et
le départ n'a eu lieu qu'à midi et demi, retard
traditionnel causé par les usages de cette jour
née. .
La reine et ses suivantes, les figurants, piétons
et cavaliers, coiffés et habillés dès neuf heures,
ont l'habitude d'aller se faire voir chez tous les
marchands de vins qui avoisinent les Halles, et
ils sont nombreux ; on trinque, on boit, on
cause, on rit et on oublie l'heure.
Bleue, mais on annonçait en même temps que
le propre char de la reine des reines—-«auto
mobile, s'il vous plaît 1 — subissait la fâcheuse
panne ! Heureusement, il y avait là d'autres
automobiles qui prêtaient sans tarder leurs che
vaux-moteurs à l'infortuné véhicule royal.
La reine des reines,- Mlle Marie Missiou
-r dont nous donnons le portrait d'après une
photographie de la maison Moraux qui a eu
cette année la spécialité de photographier toutes
les reines de la Mi-Carême— descend donc
de son char — représentant une jolie. conque
"FEUILLETON du Petit Journal du 20 Mars 1903
^62—
(i)
LES DIS MINES
deuxieme partie
Un danger
■ XII {Suite)
'f-» Ah 1 bah?...
'-r Oui, reprit Brunemont, je vais me
taarier, et elle peut me gêner.
i —^ Dis donc, Jacquot, fit Laverdac d'un
tonironique, est-ce que tu te serais laissé
aller à des. bêtises avec la protégée de
ton papa?
v— Non, non, rien de pareil à celai dit
le jeune homme.
<*-'■ Alors, ce sont des indiscrétions que
tu redoutes?
— Justement, poursuivit le faussaire,
s^iut^nt avec empressement sur cette
explication. J'ai donc besoin que cette
fille soit dans l'impossibilité absolue de
me nuire.
— Bon.
—' Tu comprends maintenant pourquoi
j 'ai pensé à te la confier Si tu la prends
ici, sous ta coupe, je ne craindrai plus
rien d'elle. ^
.— Le fait est que si je me décide, elle
sera bien gardée... Je me suis laissé en
lever Rolande; je ne me laisserais pas
prendre cette nouvelle fille que la Provi
dence m'enverrait pour, me faire oublier
celle que j'ai perdue.
G) VpTitàrg^^Tl
— Songe bien, pourtant, que je n'en
tends pas qu'on la maltraite.
— Non, non! Sois tranquille... Elle
aurait ici une existence très calme, un
peu surveillée peut-être, mais que plus
d'une lui envierait.
— Si, par exemple, elle se révoltait?...
— Oh, oh! grinça Laverdac, fie-toi à
moi ; je saurais rétablir l'ordre... Il reste
maintenant à nous mettre d'accord sur
les conditions—Il est probable, puisque
tu vas te marier, que la dot de ta femme
te permet un léger sacrifice.. . De com
bien?
— Il y aura cent mille francs pour toi
le lendemain de mon mariage.
Laverdac eut un geste signifiant qu'il
trouvait la somme respectable.
— On peut s'entendre à ce prix-là, fit-
il... Mais, dis-moi, j'ai déjà la Poivrote
qui reste toute la journée dans sa
chambre ; ça me gênerait d'avoir ici une
autre captive. Est-ce que je ne pourrai
pas sortir de temps en temps avec la
petite ?
Jacques réfléchit un instant.
— Je n'y vois pas d'inconvénient, à la
condition que tu ne la quittes pas d'une
semelle.
— Tu peux te fier à moi... Les aveugles
y voient clair quand ils le veulent ; mais
j'ai besoin quelquefois de prendre l'air. ..
Elle sera mon Antigone !
— Encore une fois, surveille-la étroi
tement.
— Sois tranquille ; ma griffe n'est pas
de celles auxquelles on échappe... Seu
lement, dis-moi, mon petit Brunemont,
que Ja mignonne entre ici librement si
elle ne doit pas en sortir de même...
Quel truc vas-tu employer pour cela ?
Jacques réfléchit un moment.
— Oui, c'est là qu'est le cheveu. Avec
ton habileté ordinaire, tu l'as deviné. Mais
tu es trop roué pour ne pas surmonter
cet obstacle.
— N'effarouche pas ma modestie ! in
terrompit l'aveugle, et examinons froide
ment la question. Il est nécessaire, pour
que je trouve le moyen, que tu cherches,
ae me fixer exactement sur ce qui
concerne la péronnelle... Reprenons les
choses d'un peu plus haut, veux-tu ?
— Soit! /,
— Tu me dis que ton père a adopté ou
recueilli la jeune personne quand elle
était gamine ?
— Oui.
; —D'où venait-elle? Etait-ce une enfant
trouvée, une orpheline ?
— C'est la fille d'un homme avec lequel
mon père avait eu autrefois des rela
tions et qui a eu des malheurs.
— Lesquels?
— 11 a été condamné.
— Tiens, tiens ! Et qu'avait-il donc fait ?
l'ami de ton papa?
— Il avait volé.
— En Belgique?
— A Paris.
— Il est en prison?
— Non. Il s'est enfui.
— Et comment s'appelle-t-il?
— Georges Davenesle.
On eût dit qu'une décharge électrique
venait de frapper Laverdac.
—r Qu'as-tu donc? demanda Jacques.
— Moi ? répondit l'aveugle qui j^vait eu
le temps de se remettre... Pas du tout !
Il poursuivit, portant la main à son
visage balafré :
— C'est cette maudite blessure qui vient
de me causer un élancement terrible...
Où, diable, aurais-je jamais rencontré ton
Davenay?
— Davenesle. C'était un caissier. Il avait
filouté une vieille rentière... Tu n'as
pas entendu "parler de cette affaire-là
autrefois?
En quelques mots, Brunemont dit ce
que son père lui avait conté du vol pour
lequel Georges avait été condamné.
Mais Laverdac ne l'écoutait guère.
Le bandit, malgré l'empire qu ; il avait
sur soi-même, était en proie à une poi
gnante émotion.
C'était defla fille de Georges et de Cla
risse qu'il S'agissait !
C'était Denise que le hasard allait faire
tomber entre ses mains 1
Denise, l'amie de Rolande au temps où
les fillettes grandissaient côte à côte chez
lamèreChambly!
Denise et "Rolande... Les deux fran
gines ! »
De quelles saisissantes surprises la vie
n'est-elle pas féconde ! . -
Le récit de Jacques terminé, Laverdac
sortant de sa songerie, posa cette ques
tion quL lui brûlait les lèvres :
— Sait-on ce qu'il est devenu, ce Geor
ges Davenesle ?
— Il est mort, répondit Jacquçs.
« — Il y a longtemps ?
— Dix-huit mois environ à ce qu'il me
seij$?j0.
— Et sa fiile, naturellement, est au cou
rant de cette mort ?
— Non.
Un tressaillement convulsa la face hor
rible de Laverdac.
Il saisit Jacques par le bras :
— Tu en es sûr? questionna-t-il.
—Absolument ! Elle continue à espé
rer que l'exilé reviendra un jour ou
l'autre. /
-r Eh bien, mon cher Jacques, il est
revenu !
A son tour, le visage du jeune homme
exprima une surprise profonde.
— Je ne comprends pas,balbutia-t-il...
Que comptes-tu donc faire ?
— Tu ne tarderas pas à être fixé et tu
m'approuveras, j'en suis sûr... Pour le
moment, laisse-moi rêver seul aux dé
tails de la combinaison que je prépare,
et reviens ce soir... Je te dirai mon
plan.
— Soit 1 répliquaJacques, j'ai'confiance!
Les deux complices se serrèrent la main
et se séparèrent.
L'embûche
XIII
Le plan de Laverdac devait avoir donné
toute satisfaction à Jacques Brunemont,
car il paraissait complètement rasséréné
lorsque tard dans la nuit, il quitta l'hôtel
de la rue Blanche après une longue
conversation avec le maître delà maison.
Selon son habitude, il fit m grasse ma
tinée, déjeuna lentement et, enveloppé
dans sa robe de chambre, savoura -son
café à petites gorgées en dégustant un
excellent cigare.
L'avéàturipr réfléchisse toyt es sui
vant du regard les volutes de fumée
bleuâtre de son havane.
Il méditait sur la marche future des
événements.
Sans doute, les éventualités qu'il pré
voyait lui parurent favorables à ses des
seins, car un sourire de contentement
éclaira son visage.
— Oui, murmura-t-il, je crois que tout
est bien combiné ainsi. Décidément, La
verdac est un maître !
11 y avait bien un point noir à l'horizon :
l'ascendant que la réussite du plan ourdi
par le père de Rolande lui donnerait for
cément sur son complice.
« -N'allait-il pas mettre ce dernier à la
discrétion de Laverdac ?
Le chef des Requins de Paris n'en
profiterait-il pas pour faire, plus tard,
chanter son associé jusqu'à extinction de
voix ?
Le faussaire eut un geste d'insou
ciance. :
Que pourrait-il redouter quand Use
rait en possession de la dot fabuleuse de
Rolande?
Le père de la jeune femme hésiterait à
frapper le mari de sa fille...
D'ailleurs, Laverdac devait bien avoir
quelque défaut à sa cuirasse que Jacques
finirait, à son tour, par découvrir. Il
pourrait alors, lui aussi, avoir barre sur
le baron. ■
A chanteur, chanteur et demi I
Ces diverses réflexions réconfortèrent
tout à fait l'ancien propriétaire du char-'
bonnage de Ruuninvercke qui se mit en
devoir de procéder à sa toilette. .
fy ne tarda pas à sortir, vaqua à diffé*'
rentes affaires sans importance, et goand
,ir"t
A°A
«M BrJfl
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VENDREDI 20 MARS 4903
79
"saint joachim
286
QUARANTE ET'UNIÈME
(Numéro 14,693)
Dernière Edition
LE BUDGET
'La Chambre des députés a terminé la
discussion du budget de l'exercice 1903, à
laquelle elle a consacré plus de deux
mois ; le Sénat va, à son tour, examiner
ce budget.
, Le budget est, on le sait, l'acte légis
latif qui fixé chaquè année les dépenses
de l'Etat et les recettes destinées à les
acquitter. La nation, par l'intermédiaire
de ses représentants, ouvre au gouver
nement un ensemble de crédits, pour les
diverses, parties de l'administration, et
elle lui donne en même temps le droit de
percevoir, par des moyens bien définis,
les ressources c' Dans un budget normal, les recettes et
les dépenses doivent au moins se balan-
çer. Il est même prudent de s'arranger
de' façon'que les recettes soient supé
rieures aux dépenses, car un budget pré
senté simplement, en équilibre court le
risque de se régler en déficit, attendu
qu'il surgit toujours dans le cours de
l'année, des dépenses qui n'avaient pu
être prévues?
, Ne cker fut le premier ministre qui ré
véla publiquement les besoins et les res
sources du royaume ; mais le mot budget,
emprunté à la langue anglaise, ne fut
employé "pour la première fois que dans
la loi de finances du 25 avril 1806. De
1819 à 1835, le budget des dépenses os
cilla entre 700 et 900 millions ; vers 1837
il dépassait le milliard ; et depuis lors, il
n 'a cessé dp s'accroître.La guerre de 1870,
les efforts prodigieux que la, France a dû
faire pour reprendre son rang dans le
monde "ont largement contribué à cet
accroissement.
•***.
M. Rouvier, ministre des finances,
avait proposé d'arrêter ainsi qu'il suit le
le budget dé 1903 :
.Recettes 1... 3.574.876.812 fr.
Dépenses 3 .574.398.930 fr.
Il y aurait eu ainsi un
maigre excédent de.. 477.882 fr.
.Voici quelles sont nos plus grosses dé
penses budgétaires :
.• , Millions
Dette publique..;.. :.. ...■ i. {91 j>
J ^UTOirs pubiics: Sénat, Chambré, etc. 13.5
Ministère de la guerre et de. la marine, i .017 »
Instruction publique et beaux -arts ... .* 230.5
Travaux publics..... 245.2
Colonies.. 112.5
Le ministère de l'intérieur coûte 80 mil
lions; celui de l'agriculture, 31 seule
ment. Les frais de régie et de perception
des impôts s'élèvent au chiffre de 442 mil
lions et demi, qu'il est perdais de trouver
quelque peu exagéré. .
Quant aux charges nombreuses et di
verses qui pèsent sur les contribuables et
qui, chaque année, s'alourdissent au lieu
de s'alléger, nos lecteurs les connaissent
toutes, sans qu'il soit besoin de les leur
rappeler. Il n'est pas un seul acte de la
vie .qui ne tombe sous l'application d'une
redevance à payer, soit à l'Etat, soit aux
départements^ soit aux communes,' et,
trop souvent, à tous les trois. En somme,
le prélèvement opéré, au moyen de 1'im-
ÇÔt, sur le revenu net de la nation dé
passe, en France, le tiers de ce revenu !
*** '
Une pareille situation commande aux
représentants du pays d'apporter la plus
- grande sagesse dans l'établissement du
biidg'et; C'est à réduire les dépenses,
c'est-à-dire les charges des contribuables
qui les ont élus, que devraient tendre
tous leurs efforts. Ce n'est pas, malheu
reusement, par cette pensée salutaire
que la majorité de la Cliambre s'est lais
sée guider. Comme si le chiffre des dé
penses n'était pas encore assez transcen
dant, elle y a, de gaîté de cœur, ajouté
4 millions 500,000 francs de dépenses
nouvelles, inspirées par des préoccupa
tions purement électorales.
"D'autre part, le projet de réglementa
tion du privilège des bouilleurs de cru, 1
que M. Rouvier avait préparé, sans s'être
suffisamment renseigné sur les. disposé
tions du pays, a été complètement dislo
qué ; l'écart entre les recettes et les dé
penses s'en est trouvé accru de 10 mil
lions. La Chambre, poursuivant son
œuvre de démolition des projets de M.
Rouvier, a également bouleversé le ré
gime proposé pour les tabacs de zonè et
pour les rentes viagères. Bref, on est
venu, en fin de compte, se heurter a un
déficit de 29'millions.
La Chambre, la commission du budget,
M. Rouvier, se sont mis alors à la recher
che de nouvelles ressources ; il fallait, à
tout prix, joindre, comme on dit, les
deux bouts. C'était à qui apporterait sa
petite combinaison plus ou moins ingé
nieuse : impôt supplémentaire sur les
liqueurs d ? après leur degré alcoolique,
aggravation des droits de douane, taxe
sur les maïs de distillerie, etc. Nous
n'aurions pas été surpris de voir renaître
le projet d'impôt sur les chapeaux à
haute forme, dont» s'égaya si fort l'As
semblée nationale, en 1872. De tous ces
projets,presque tous mal conçus et d'une
application difficile, la Chambre n'a re
tenu que la surtaxe de 1 fr.,2o sur le pé
trole, qui doit, suivant elle produire
5 millions, mais dont le ministre n'espère
pas tirer plus de 3 .millions.
Quoi qu'il en soit, après tout ce travail
fait à la diable, il manquait encore 25
millions environ pour l'équilibre officiel
du budget de 1903. On y a pourvu en au
torisant le ministre des finances à émet
tre, au mieux des intérêts du Trésor,
pour le paiement des garanties d'intérêts
aux Compagnies de chemins de fer, des
obligations à court terme dont le capital
ne pourra excéder 25 millions de francs
et dont l'échéance ne pourra pas dépasser
l'année 1909. En d'autres termes^ on a
enlevé du budget, pour en faire un
compte à part, le service de la garantie
d'intérêts des chemins de fer.
Le budget se trouve ainsi sensiblement
allégé ; peut-être même y aura-t-il un
excédent,
L'expédient n'est pas nouveau ; il n'en
est pas moins déplorable. De quelque
nom que l'on décore cette belle opéra
tion, c'est de l'emprunt et pas autre
chose ! Le budget voté par la Chambre,
pour 1903, ne se solde donc pas avec ses
propres ressources, ayec les moyens ré
guliers et habituels des budgets réelle
ment équilibrés. : k 4
***'
Il en a, malheureusement, été de même
pour les budgets de 1901 et de 1902.
Après avoir soutenu que notre situation
financière était des plus satisfaisantes, il
a bien fallu faire connaître la vérité. M.
Rouvier n'a pas hésité à déclarer que le
déficit du budget de - 1901 s'élevait à
125 millions et celui du budget de 1902 à
129,712,000 francs, soit, en tout, un dé
couvert de 250 millions environ. C'est
aussi par des obligations à court terme
que ce trou sera bouché. Un député avait
fait observer que l'émission de ces obli
gations équivaut à un emprunt. « C'est
un emprunt ; personne ne l'a nié, a dit
M. Rouvier; mais c'est un emprunt tem
poraire, du moins nous l'espérons. »
Quelle que soit la bonne vol nté du
ministre, quels que soient ses efforts
pour 'ramener le bon ordre dans nos fi
nances, nous craignons, tout en souhai
tant vivement de nous tromper, que ces
obligations ne puissent être remboursées
à leur échéance. N'en a-t-il pas déjà été
ainsi pour des obligations sexennaires
échues en 1893, qu'il a fallu, faute de
ressources, renouveler successivement
jusqu'en 1897, époque à laquelle on a pu
en rembourser une partie ? La dette flot
tante du Trésor, c'est-à-dire la dette exi
gible, monte sans cesse ; certains affir
ment qu'elle dépassera le milliard l'an
née prochaine. Et nous redoutons que M.
Rouvier, entraîné par une situation dont
il n'est aucunement responsable, ne se
voie contraint de rouvrir le. Grand-Livre
qu'on pouvait croire à jamais fermé. Le
Grand-Livre, c'est le registre où s'inscri
vent les dettes perpétuelles du Trésor,
les dettes que nous léguons à nos arrière-
neveux, sans nous soucier des besoins de
toutes sortes auxquels ils auront à pour
voir par 'suite des modifications inces
santes des sciences, de l'industrie et des
conditions de là vie sociale.
Il n'est pas sérieux de vous dire, afin
de vous consoler, que tous les budgets
européens souffrent également du déficit.
Ce fait fût-il vrai, qu'il ne prouverait
rien : onn'est jamais obligé de suivre des
mauvais exemples. Mais ce fait n'est
même pas exact. Les budgets de la Russie
et de l'Italie se règlent par des excédents
et on va procéder, en Italie, à des dégrè
vements d'impôts sans compromettre
l'équilibre du budget. Quant à l'Angle
terre, elle doit ses embarras actuels à la
guerre du Transvaal, qui lui a coûté plus
de 6 milliards. L'Allemagnè aussi a des
difficultés financières, mais elle trouve
des compensations dans le développement
considérable de son industrie, de son
commerce et de sa marine marchande.
Dans notre beau pays de France, le
mal financier,. si grave qu'il soit, serait
encore guérissable. La France est riche,
car c'est par excellence le pays de l'épar
gne. Les cent millions d'obligations à
court terme, offertes récemment au pu
blic, ont été enlevées du jour au lende
main ; R en sera de même pour celles qui
seront émises prochainement. Le rende
ment des impôts, en janvier 1903, a été
de 4,800,000 francs supérieur aux évalua
tions budgétaires, et les retraits des
fonds placés dans les caisses d'épar
gne ont diminué dans des proportions
qui démontrent que ces utiles institutions
n'ont en rien perdu la confiance dont
elles ont toujours été dignes' En réalité,
la France est une milliardaire, mais
son immense fortune est si maladroite
ment administrée qu'elle est obligée
d'emprunter !
Nous reviendrions à une situation nor
male si la Chambre prenait la ferrpe ré
solution de réduire les dépenses, ou
même — ne soyons pas trop exigeants —
de ne plus en créer de nouvelles. Mais le
voudra-t-elle ? Ecoutera-t-elle les sages
avertissements que M. Rouvier n'a cessé
de lui donner durant la discussion du
budget et comprendra-t-elle, enfin, que,
selonl'expressiond'unéminentinspecteur
général des finances, M. Dubois de l'Es-
tang, «une Chambre dépensière n'accom
plit pas sa mission » !
Il n'est que temps qu'elle fasse machine
en arrière pour sortir de la voie péril
leuse où elle est entrée. :
Thomas Gfiaaia.
■ ' —■ . i ■' '
CAMBRIOLEURS SURPRIS
Il faut taire des patrouilles. — Cam
brioleurs en expédition. — Deux contre
cinq. — Une lutte émouran te. — Un
mort, un blessé.
' (Dépêche de noirs correspondant}
Bruxelles, 19 mars.
Des vols nombreux étaient commis depuis
quelque temps, dansles fauhourgs de Koekelberg
et en vain la police y exerçait la surveillance Ta
plus étroite. Aussi, en présence d'une pareille
situation, l'administration communale avait-elle
décidé que, toutes les nuits, des patrouilles
mixtes, C'est-à-dire composées d'un agent et
d'un pompier, auraient à charge d'assurer la
tranquillité des quartiers visités par les cam
brioleurs.
C'est ainsi que, la nuit dernière, l'agent
Bernard et le pompier Dégraissé rencontraient
une bande de cinq individus aux allures telle
ment suspectes qu'ils les suivirent jusqu'à
l'angle de la rue Deneck et delà Fossée-de-
.lette.
A cet endroit la bande s'arrêta devant le
cabaret tenu par M. Dierickx.
L'un des individus fit la courte échelle à deux
de ses complices et ceux-ci pénétrèrent dans la
boutique par un vasistas; un moment après ils
ouvraient' la porte à leurs amis, et aussitôt
toute la bandé se préparait de fracturer les
meublés. 1
L'agent et le -pompier survinrent alors. La
vue des uniformes suffit à deux des cambrio
leurs ; ils s'enfuirent à toutes jambes. Pour les
trois autres, ce fut une autre affaire.
— Ah! vous voulez nous arrêter, dit l'un des
volours; eh bien, nous allons vous en Oter
l'envie.
Les cambrioleurs, armés de pinces-monsei
gneur et de ciseaux, se Tuèrent en effet sur
l 'agent et lo pompier, qui durent entamer avec
eux une lutte des plus dangereuses.
Bientôt même il fut évident, pour eux que
leur vie était en danger. L'agent Bernard, pour
donner l'éveil, tira deux coups de revolver en
l'air; puis, ayant reçu un coup de barre de fer
sur l'êpaifle, il fit feu deux fois sur les mal
faiteurs.
L'un d'eux tomba comme une masse. Pen-,
dant ce temps, le pompier Dégraissé était aux
prises avec un bandit qui finit par lui asséner
sur la tête un terrible coup de pincé. Dégraissé
chancela.
Bernard accourut à son secours, tirant au
jugé les deux derniers coups de son arme.
Un des deux malfaiteurs restés debout prit la
fuite ; mais le dernier brandissait à nouveau
sa terrible pince au-dessus de la tête du pom
pier à demi assommé.; l'agent Benjard n'hésita
pas; se servant de son revolver comme d'un
casse-tête, il bondit sur le cambrioleur et le
frappa avec force sur le crâne.
L'homme tomba.
Un instant après arrivaient le cabaretier et
des voisins attirés par le bruit de la lutte et les
deux bandits furent transportés au poste
voisin.
L'un était mort : il avait reçu une balle qui
lui avait traversé le crâne de part en part ; on
ne connaît que son surnom: « la Bête, » par le
quel on le désigne aux abattoirs où il a travaillé.
L'autre malfaiteur, qui est assez grièvement
blessé à la tête par le coup de crosse de revol
ver que lui a porté l'agent Bernard, se nomme
Vanebraban, âgé de vingt-deux ans ; jl a éner-
giqueHient refusé de dénoncer ses complices.
Ceux-ci, pourtant, ne tarderont pas à être
arrêtés ; des agents sont sur leurs traces.
ÉCHOS DE PARTOUT
Un dernier hommage a été rendu, hier,
par l'Académie française à son doyen,
M. Ernest Legouvé, dont les obsèques
ont eu lieu lundi.
M. Brunetière, directeur, dans un dis
cours ému, a, selon l'usage, exprimé les
vifs regrets de l'Académie et fait l'éloge
du défunt qui avait appartenu pendant
quarante r huit ans à l'illustre compagnie.
Il a, ensuite, levé la séance en signe.de
deuil.
Ajoutons que M. Brunetière a deux
autres discours à préparer. C'est, en
effet, d'après le règlement, le directeur
en exercice lors de la mort d'un membre
de l'Académie française qui doit pro
noncer le discours de réception de son
successeur.
M. Brunetière aura donc à recevoir les
successeurs de MM. Gaston Paris et
Ernest Legouvé, mais il se peut qu'il prie
M. Faguet, chancelier, de répondre à l'un
des deux futurs récipiendaires.
L'état de Mme Waldeck-Rousseau
continue à être satisfaisant et si aucune
complication ne survient la femme de
l'ancien président du conseil sera tout à
fait hors de danger dans deux ou trois
jours.
Voici le bulletin médical qui a été ré
digé hier matin :
La 2> journée a été bonne. La température
est de 37,2,1e pouls de 84. L'état général est bon
P oirrier.
M. Waldeck-Rousseau reste en perma
nence auprès de la malade.
♦*+
Le Métropolitain en marche.
De la rive droite, il va bondir sur la
rive gauche. Demain, samedi, doit avoir
lieu l'adjudication des fondations du pont
qui lui fera franchir la Seine à Passy, et
celle des travaux de la ligne numéro 8,
entre le boulevard Saint-Marcel et le
fleuve. Cette partie du tracé comprend la
traversée de la gare d'Orléans, près de la
place Valhubert, avec escaliers d'accès
pour unir la ligne métropolitaine aux
quais des grandes lignes.
, C'est aussi ia section qui desservira le
marché aux chevaux, quadrupèdes dont
le Métropolitain va faire le bonheur en
les rejetant peu à peu hors de leur enfer
parisien.
On vient de vendre, à Londres, une
bouteille de soda, qui provenait du vais
seau de ligne le Royal-George, lequel fit
naufrage près de Spithead, le 29 août 1782.
Le. Royal-George avait été, ce jour-là,
aménagé pour un grand bal, et, çour
avoir plus de place, on avait détaché les
canons. Survint subitement un coup^ de
vent qui fit pencher le navire d'un côté ;
les canons roulèrent de ce côté et le na
vire coula avec l'équipage.
Il reste'encore les deux tiers du liquide
dans la bouteille, qui ressemble beaucoup
à celles qu'on fabrique aujourd'hui.
Cette bouteille a été vendue 670 francs.
H*
La cérémonie de la célébration du cen
tenaire de l'installation de l'Académie de
France à la villa Jlédicis, à Rome, qui
devait avoir lieu le 16 avril est, par suite
d'un empêchement du roi d'Italie, re
portée au surlendemain 18.
La Mi-Carême
Après bien des inquiétudes justifiées parles
giboulées de ces derniers jours, tous ceux qui
s'intéressent à la journée populaire de la Mi-
Carême — tous les Parisiens, — ont eu, hier
matin, la surprise agréable de se trouver ré
veillés par un chaud rayon de soleil.
Aussi nous laissons à penser si cette bienveil
lance atmosphérique a causé une joie bruyante
M" 6 Missiou
reine des reines •
dans les marchés et dans les lavoirs restés
fidèles à la tradition, où l'on se disposait à par
courir Paris.
La Mi-Carême a donc été favorisée une fois
de plus par le temps et les cavalcades ont ainsi
pu déployer le long des rues et des boulevards
le luxe de leurs costumes étincelanls et l'origi
nalité de leurs chars pavoisés.
Aux Halles
Les cris, les chants, les jeux, les rires,
Les coups d'oeil viîs comme l'éclair, \
Tout ce que Dieu de joie inspire ,.
Se mêlent et se croisent dans l'air.
Ce refrain d'une vieille chanson peutVappli-
quer à la physionomie que présentaient les
abords des Halles, hier matin.
C'était, en effet, dan^ la rue Berger, derrière^
les pavillons'4 et G des Hallés, vdlailles et fruits,
que devait se former, à onze heures quarante-
Lorsque les commissaires veulent enfin for
mer définitivement le cûrtège pour le départ, il
y a des manquants, des retardataires, l'hàr-
monie des toilettes est un peu compromise, les
perruques suivent l'inclinaison du tricorne et
î'obéissance est difficile à obtenir.
D'après le programme primitivement arrêté,
Personnages
tous les marchés devaient se grouper aux
Halles et se rendre en groupe, au point de
concentration, la place de la Concorde, en pas
sant, suivant la coutume, à l'hôtel dù Petit
Journal-, hier, la Renaissance des Halles s'est
seule trouvée au rendez-vous, par la raison
probable qu'elle se trouvait chez elle, et a vai
nement attendu la venue du Marché Saint-
Germain avec la Reine des reines et du marché
Lenoir qui avaient oublié l'heure.
A midi et demi, le signal du départ a été
donné et le cortège s'est lentement mis en
marche par la rue de Bambuteau, pour arriver
devant le Petit Journal à une heure quinze.
au « petit journal »
Comme tous les ans, une foule considérable
se trouvait rassemblée aux abords du Petit
Journal pour bénéficier du coup d'oeil que pré
sente le rassemblement des principaux groupés
de la cavalcade. La coutume, à laquelle on
reste fidèle, est, en effet, pour le comité des
Marchés, de venir recevoir nos compliments
avant d'entreprendre la grande promenade à
travers Paris.
Hier,le spectacle a été aussi attrayant quë les
années précédentes, et à l'intersection desrues
Cadet et Lafayette, de nombreuses personnes
stationnaient de bonne heure, égayées par les
airs entraînants que jouaient sans interruption
les musiciens des cortèges qui se sont succédé
sans cesse devant l'hôtel du Petit Journal
durant cette journée de fête populaire.
L'important service d'ordre était-placé sous
lé commandement de MM. Remongin et
Godquin, officiers de paix, et il convient de dire
que ces excellents fonctionnaires ont eu quel
que peine pour assurer la circulation. •
Les chars des lavoirs se suivaient et, tou
jours, on .attendait le cortège de la reine'des
reines. Midi, midi et demi, une ' Eeùrè.i". rien 5
Que se passait-il?.,. Enfin on le signalait ru#
Le clxar de la Reine des Reines
cinq, le cortège de la cavalcade de la rive
droite.
Mais, comme toujours, on a eu du retard et
le départ n'a eu lieu qu'à midi et demi, retard
traditionnel causé par les usages de cette jour
née. .
La reine et ses suivantes, les figurants, piétons
et cavaliers, coiffés et habillés dès neuf heures,
ont l'habitude d'aller se faire voir chez tous les
marchands de vins qui avoisinent les Halles, et
ils sont nombreux ; on trinque, on boit, on
cause, on rit et on oublie l'heure.
Bleue, mais on annonçait en même temps que
le propre char de la reine des reines—-«auto
mobile, s'il vous plaît 1 — subissait la fâcheuse
panne ! Heureusement, il y avait là d'autres
automobiles qui prêtaient sans tarder leurs che
vaux-moteurs à l'infortuné véhicule royal.
La reine des reines,- Mlle Marie Missiou
-r dont nous donnons le portrait d'après une
photographie de la maison Moraux qui a eu
cette année la spécialité de photographier toutes
les reines de la Mi-Carême— descend donc
de son char — représentant une jolie. conque
"FEUILLETON du Petit Journal du 20 Mars 1903
^62—
(i)
LES DIS MINES
deuxieme partie
Un danger
■ XII {Suite)
'f-» Ah 1 bah?...
'-r Oui, reprit Brunemont, je vais me
taarier, et elle peut me gêner.
i —^ Dis donc, Jacquot, fit Laverdac d'un
tonironique, est-ce que tu te serais laissé
aller à des. bêtises avec la protégée de
ton papa?
v— Non, non, rien de pareil à celai dit
le jeune homme.
<*-'■ Alors, ce sont des indiscrétions que
tu redoutes?
— Justement, poursuivit le faussaire,
s^iut^nt avec empressement sur cette
explication. J'ai donc besoin que cette
fille soit dans l'impossibilité absolue de
me nuire.
— Bon.
—' Tu comprends maintenant pourquoi
j 'ai pensé à te la confier Si tu la prends
ici, sous ta coupe, je ne craindrai plus
rien d'elle. ^
.— Le fait est que si je me décide, elle
sera bien gardée... Je me suis laissé en
lever Rolande; je ne me laisserais pas
prendre cette nouvelle fille que la Provi
dence m'enverrait pour, me faire oublier
celle que j'ai perdue.
G) VpTitàrg^^Tl
— Songe bien, pourtant, que je n'en
tends pas qu'on la maltraite.
— Non, non! Sois tranquille... Elle
aurait ici une existence très calme, un
peu surveillée peut-être, mais que plus
d'une lui envierait.
— Si, par exemple, elle se révoltait?...
— Oh, oh! grinça Laverdac, fie-toi à
moi ; je saurais rétablir l'ordre... Il reste
maintenant à nous mettre d'accord sur
les conditions—Il est probable, puisque
tu vas te marier, que la dot de ta femme
te permet un léger sacrifice.. . De com
bien?
— Il y aura cent mille francs pour toi
le lendemain de mon mariage.
Laverdac eut un geste signifiant qu'il
trouvait la somme respectable.
— On peut s'entendre à ce prix-là, fit-
il... Mais, dis-moi, j'ai déjà la Poivrote
qui reste toute la journée dans sa
chambre ; ça me gênerait d'avoir ici une
autre captive. Est-ce que je ne pourrai
pas sortir de temps en temps avec la
petite ?
Jacques réfléchit un instant.
— Je n'y vois pas d'inconvénient, à la
condition que tu ne la quittes pas d'une
semelle.
— Tu peux te fier à moi... Les aveugles
y voient clair quand ils le veulent ; mais
j'ai besoin quelquefois de prendre l'air. ..
Elle sera mon Antigone !
— Encore une fois, surveille-la étroi
tement.
— Sois tranquille ; ma griffe n'est pas
de celles auxquelles on échappe... Seu
lement, dis-moi, mon petit Brunemont,
que Ja mignonne entre ici librement si
elle ne doit pas en sortir de même...
Quel truc vas-tu employer pour cela ?
Jacques réfléchit un moment.
— Oui, c'est là qu'est le cheveu. Avec
ton habileté ordinaire, tu l'as deviné. Mais
tu es trop roué pour ne pas surmonter
cet obstacle.
— N'effarouche pas ma modestie ! in
terrompit l'aveugle, et examinons froide
ment la question. Il est nécessaire, pour
que je trouve le moyen, que tu cherches,
ae me fixer exactement sur ce qui
concerne la péronnelle... Reprenons les
choses d'un peu plus haut, veux-tu ?
— Soit! /,
— Tu me dis que ton père a adopté ou
recueilli la jeune personne quand elle
était gamine ?
— Oui.
; —D'où venait-elle? Etait-ce une enfant
trouvée, une orpheline ?
— C'est la fille d'un homme avec lequel
mon père avait eu autrefois des rela
tions et qui a eu des malheurs.
— Lesquels?
— 11 a été condamné.
— Tiens, tiens ! Et qu'avait-il donc fait ?
l'ami de ton papa?
— Il avait volé.
— En Belgique?
— A Paris.
— Il est en prison?
— Non. Il s'est enfui.
— Et comment s'appelle-t-il?
— Georges Davenesle.
On eût dit qu'une décharge électrique
venait de frapper Laverdac.
—r Qu'as-tu donc? demanda Jacques.
— Moi ? répondit l'aveugle qui j^vait eu
le temps de se remettre... Pas du tout !
Il poursuivit, portant la main à son
visage balafré :
— C'est cette maudite blessure qui vient
de me causer un élancement terrible...
Où, diable, aurais-je jamais rencontré ton
Davenay?
— Davenesle. C'était un caissier. Il avait
filouté une vieille rentière... Tu n'as
pas entendu "parler de cette affaire-là
autrefois?
En quelques mots, Brunemont dit ce
que son père lui avait conté du vol pour
lequel Georges avait été condamné.
Mais Laverdac ne l'écoutait guère.
Le bandit, malgré l'empire qu ; il avait
sur soi-même, était en proie à une poi
gnante émotion.
C'était defla fille de Georges et de Cla
risse qu'il S'agissait !
C'était Denise que le hasard allait faire
tomber entre ses mains 1
Denise, l'amie de Rolande au temps où
les fillettes grandissaient côte à côte chez
lamèreChambly!
Denise et "Rolande... Les deux fran
gines ! »
De quelles saisissantes surprises la vie
n'est-elle pas féconde ! . -
Le récit de Jacques terminé, Laverdac
sortant de sa songerie, posa cette ques
tion quL lui brûlait les lèvres :
— Sait-on ce qu'il est devenu, ce Geor
ges Davenesle ?
— Il est mort, répondit Jacquçs.
« — Il y a longtemps ?
— Dix-huit mois environ à ce qu'il me
seij$?j0.
— Et sa fiile, naturellement, est au cou
rant de cette mort ?
— Non.
Un tressaillement convulsa la face hor
rible de Laverdac.
Il saisit Jacques par le bras :
— Tu en es sûr? questionna-t-il.
—Absolument ! Elle continue à espé
rer que l'exilé reviendra un jour ou
l'autre. /
-r Eh bien, mon cher Jacques, il est
revenu !
A son tour, le visage du jeune homme
exprima une surprise profonde.
— Je ne comprends pas,balbutia-t-il...
Que comptes-tu donc faire ?
— Tu ne tarderas pas à être fixé et tu
m'approuveras, j'en suis sûr... Pour le
moment, laisse-moi rêver seul aux dé
tails de la combinaison que je prépare,
et reviens ce soir... Je te dirai mon
plan.
— Soit 1 répliquaJacques, j'ai'confiance!
Les deux complices se serrèrent la main
et se séparèrent.
L'embûche
XIII
Le plan de Laverdac devait avoir donné
toute satisfaction à Jacques Brunemont,
car il paraissait complètement rasséréné
lorsque tard dans la nuit, il quitta l'hôtel
de la rue Blanche après une longue
conversation avec le maître delà maison.
Selon son habitude, il fit m grasse ma
tinée, déjeuna lentement et, enveloppé
dans sa robe de chambre, savoura -son
café à petites gorgées en dégustant un
excellent cigare.
L'avéàturipr réfléchisse toyt es sui
vant du regard les volutes de fumée
bleuâtre de son havane.
Il méditait sur la marche future des
événements.
Sans doute, les éventualités qu'il pré
voyait lui parurent favorables à ses des
seins, car un sourire de contentement
éclaira son visage.
— Oui, murmura-t-il, je crois que tout
est bien combiné ainsi. Décidément, La
verdac est un maître !
11 y avait bien un point noir à l'horizon :
l'ascendant que la réussite du plan ourdi
par le père de Rolande lui donnerait for
cément sur son complice.
« -N'allait-il pas mettre ce dernier à la
discrétion de Laverdac ?
Le chef des Requins de Paris n'en
profiterait-il pas pour faire, plus tard,
chanter son associé jusqu'à extinction de
voix ?
Le faussaire eut un geste d'insou
ciance. :
Que pourrait-il redouter quand Use
rait en possession de la dot fabuleuse de
Rolande?
Le père de la jeune femme hésiterait à
frapper le mari de sa fille...
D'ailleurs, Laverdac devait bien avoir
quelque défaut à sa cuirasse que Jacques
finirait, à son tour, par découvrir. Il
pourrait alors, lui aussi, avoir barre sur
le baron. ■
A chanteur, chanteur et demi I
Ces diverses réflexions réconfortèrent
tout à fait l'ancien propriétaire du char-'
bonnage de Ruuninvercke qui se mit en
devoir de procéder à sa toilette. .
fy ne tarda pas à sortir, vaqua à diffé*'
rentes affaires sans importance, et goand
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