Titre : Le Petit Parisien : journal quotidien du soir
Éditeur : Le Petit Parisien (Paris)
Date d'édition : 1909-05-19
Contributeur : Roujon, Jacques (1884-1971). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 19 mai 1909 19 mai 1909
Description : 1909/05/19 (Numéro 11890). 1909/05/19 (Numéro 11890).
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Source : Bibliothèque nationale de France, Gr Fol-Lc2-3850
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 08/04/2008
Trentb-Quatribmb Année. NI, ii.890.
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1O. pUoo d6 la Bouru, PAH19^21
EDITION DE. _P4gJJL,[
Quelle que soit la répugnance que l'on
ait ressentie pour un misérable assassin
comme Courtois, on ne peut imaginer
sans tristesse à la fois son agonie, sa,
mort et son enterrement. Une photogra-
phie impressionnante nous a montré le
corbillard, précédé du prêtre et des deux
enfants de chœur, suivi du gardien re-
présentant l'administration pénitentiai-
re et c'est tout. Les parents n'avaient pas
pu venir; ils s'étaient contentes de pieu-
rer dans leur coin leur enfant qui, après
avoir subi les pires déchéances, dispa-
raissait enfin de la scène du monde où il
avait tenu un rôle si tragique Aujour-
d'hui c'est le grand silence dans Ia petite
l île de Ré que la mer baigne ateniour et
c'est le définitif oubli.
Si l'on compare l'existence des forçats
̃;i d'aujourd'hui à celle des galérien^ d'au-
trefois, on constate qu'un réel change-
ment fut apporté dans leur condition.
Etre condamné aux galères n'était pas
simplement une manière de parler, c'é-
tait l'expression même du travail qu'ils
devaient produire. Les galériens étaient
les rameurs des galères royales, les na-
vires de guerre d'alors, allant soit à la
voile, soit à la rame. Manœuvres fati-
gantes qui, dans l'antiquité, étaient exé-
cutées par des esclaves. Le travail devait
être fort exténuant puisqu'on 1677, nous
apprend M. Fernand Mitton, on pres-
la peine capitale contre les galé-
riens qui 3e mutilaient un membre pour
ne pas ramer. Et ce n'étaient pas sim-
plement les assassins, les voleurs et,
comme on disait, les pirates de la mer
que l'on condamnait jadis aux galères.
A la suite de la révocation de FEdit de
Nantes, les protestants qui se mariaient
ou faisaient baptiser leurs enfants sui-
vant les rites de leur religion furent en-
voyés aux galères à perpétuité. On ne
peut croire que de pareils attentats con-
tre la liberté aient été commis en France,
il y a seulement un peu plus de deux
siècles.
Mais vint un jour, à la fin du règne de
Louis XIV, où la science, accomplissant
transforma la vie des for-
çats on n'utilisa plus les rames à bord
des galères royales et l'on parqua les
condamnés dans de vastes bâtiments, au
bord de la mer, où ils ne furent astreints
it aucun travail et l'ennui, la maladie
les décimèrent en grand nombre. On les
employa à construire, ironie du sort,
leur propre prison. Le bagne de Toulon
d'abord, puis ceux de Brest et de Roche-
fort. On peut dire qu'à \e moment,
le galérien légendaire avait vécu
sa condition se rapproche peu à peu de
celle qui' lui est faite aujourd'hui mais
il lui reste encore, pour arriver à cet état
relatif de bien-être, de dures étapes à
franchir.
Victor Hugo, dans les Misérables, nous
a dépeint, par les récits de Jean Valjean,
toutes les misères, toutes les hontes qui
attendaient au bagne les forçats, il y a
un siècle. D'abord il y a le costume, que
les gravures nous ont transmis elles re-
présentent le forçat habillé d'un pantalon
jaune foncé, d'une casaque et d'un bon-
net de laine. La casaque était rouge et
jaune pour les forçats dangereux, étroi-
tement surveillés, rouge seulement pour
les autres. Le bonnet, lui aussi, avait
deux couleurs rouge pour les condam-
nés à temps, il était vert pour les con-
damnés à perpétuité et sur le devant de
la coiffure, on cousait le numéro matri-
cule du forçat. C'était là désormais tout
son état civil.
Puisqu'on ne pouvait plus employer
les bagnards dans la marine, et les trois
bagnes de Toulon, Brest et Rochefort
étant construits, on chercha comment on
pourrait utiliser tous ces déchus. Les for-
çats furent alors répartis dans les manu-
factures des ports et employés à des tra-
vaux de fatigue. On les autorisa à fabri-
quer de menus objets qu'ils pouvaient
vendre aux visiteurs, car les visiteurs af-
nuaient et je crois bien que les galériens
étaient la curiosité de la ville dans la-
quelle ils se trouvaient ils en consti.
tuaient la principale attraction. C'était
un spectacle si pittoresque Us étaient
habillés d'une façon particulière, et les
hommes étaient seuls, avec un boulet au
pied, ou enchaînés deux à deux. Et l'ad-
ministration se faisait un malin plaisir
de lier l'un à l'autre deux hommes diffé-
rents de caractère et d'humeur, et qui
finissaient par se hair. Haine terrible qui
devait exaspérer dans chacun des forçats
son ancien goût du meurtre. Peut-on con-
cevoir, en effet, une condition plus abo-
minable ? Rester toute sa vie enchaîné
à un être que l'on exècre. C'est peut-être
dans ce compagnonnage obligatoire qu'é-
tait la vexation la plus grave des anciens
forçats.
Et l'on conçoit que la plus grande ré-
compense pour un forçat était ce qu'on
appelait le désaccouplement il était pro-
noncé par le chef de service, qui écrivait
ces mots de « chaine brisée » c'était
presque la liberté, en tout cas c'était l'in-
dépendance. Le forçat pouvait dès lors se
promener, travailler, sans traîner à côté
de soi une autre épave humaine. Ceux
qui se conduisaient tout à fait bien
étaient encore emnloyés comme infir-
miers ou servants dans les hôpitaux. C'é-
taient à peu près toutes les récompenses
que pouvaient attendre les forçats, car la
réduction de peine était extrêmement
rare.
Si les récompenses étaient peu nom-
breuses, les punitions avaient, au con-
traire, une assez grande variété; c'étaient
le retranchement temporaire de vin, les
menottes, le cachot, la bastonnade, la
chaîne double et l'atroce remise en cou-
ple, la. plus dure de toutes. L'on com-
prend que les évasions fuss-entsi fréquen-
tes autrefois dans les bagnes tout valait
mieux aux yeux de ces hommes maudits
que leur horrible réclusion. Ils ne crai-
gnaient pas la mort, qui leurapparaissait
comme la vraie libératrice. Ceux qui
étaient capturés sans effort voyaient leur
peine augmentée de plusieurs années on
les condamnait au supplice de la double
chaîne. Si l'évadé avait tué pour fuir,
c'était la peme de mort.
Telle était autrefois la condition des ga-
lériens et si on la compare a celle-des for-
çats d'aujourd'hui, on ne peut nier que
ces derniers sont moins affreusement
traités. D'abord, ils ne demeurent pas
dans ces prisons étroites, où ne viennent
jamais l'air et le bruit du dehors ils
sont expédiés par groupes dans nos colo-
nies lointaines. Ils jouissent au moins de
la liberté ils travaillent et quelques-uns
se marient là-bas et connaissent les dou-
ceurs de la vie familiale. en effet,
retranchés de la vie de la société, mais
ils en souffrent relativement peu, parce
qu'ils ne peuvent comparer leur condi-
tion à ceux qui les entourent. Sa.ns vou-
loir dire qu'ils sont devenus de petits
bourgeois tranquilles ou des gentlemen
farmers, on peut assurer qu'ils sa»t
plus heureux que ces anciens foBgaÉ;,
traînant dans les villes leur boulet ou
leur compagnon de chaîne et courant le
front sous le bonnet marqué d'un matri-
cule d'infamie.
JEAN FROLLO
Le procès Steinheil
est encore retardé
Un supplément d'information est
ordonné en raison de l'incident
Allaire-Tardivel
La chambre des mises en accusation de
la cour de Paris, réunie sous la présidence
de M. Grenier, a rendu hier son arrêt dans
l'affaire Steinheil.
Contrairement aux réquisitions de M.
Rome, substitut du procureur général, la
cour ar ordonné un complément tf "informa*
tion.
Il est vrai que cette décision est motivée
uniquement sur le tuit nouveau qui résul-
te des déclarations d'Emmanuel Allaire, le
cambrioleur arrêté à Versailles.
Le dossier a été renvoyé à M. le juge
d'instruction André, qui aura à vérilier si,
suivant ce qu'a racontE Allaire, Ange Tar-
divel serait l'un des assassins de M. Steinheil
et de Mme Japy.
Il convient de dire que le parquet de Ver-
sailles se montre plutôt sceptique au sujet
des allégations de ce repris de justice, al-
coolique invétéré, qui semble ne pas jouir
de toute sa raison.
M. Come, juge d'instruction dans cette
ville, avait projeté de lui faire subir hier
un nouvel interrogatoire. Mais Allaire n'a
pu quitter sa cellule. Dans la nuit il avait
été en proie à deux crises violentes de de-
lirium tremens, au cours desquelles il avait
prononcé des paroles incohérentes.
La femme Marie Witzer, surnommée Lrra
la Rouquine, désignée par Allaire, a été re-
trouvée et languement interrogée. Elle a
affirmé n'avoir jamais entendu parler, par
lui, ni du crime de l'impasse Ronsin, ni du
cambriolage de Chàteaufort. Ses déclara-
tions ont été à ce point précises qu'on l'a
laissée en liberté..
La formule de Lemoine, c'est une plaisanterie"
TEL EST L'AVIS DE M. CAILLETET
et il ajoute
"ttu'oa prenne ma tels si il m trompe
J'ai surpris, hier, M. Cailletet, membre de
l'Académie des sciences, dans son cabinet
de travail. L'illustre savant, à qui l'on doit
la réalisation du problème de la liquéfaction
des gaz, me reçut avec la plus obligeante
bienveillance.
Mon cher maître, lui dis-je, je viens
vous poser une question qui vous semblera
sans doute fort oiseuse
l'osez-là quand même, dit M. Cametet,
avec un sourire.
Voici, dis-je bravement est-il dans le
domaine de la possibilité de fabriquer dû
diamant avec la formule de Lemoine, for-
mule que le Petit Parisien a publié ce ma-
inll'Oui dit M. Cailletet, dont le sourire
s'accentue. J'ai vu ceta et je vous assure
que cette formule m'a bien amusé Mais,
mon cher monsieur, j'ai vu les appareils de
Lemoine. J'ai pris connaissance de son
fameux secret et je dis que non seulement
Lernoine n'a jamais fabriqué de diamant,
mais encore qu'il est à peu près impossible
de faire quoi que ce soit avec un semblable
1 outillage. Je suis même convaincs qu'il
n'a jamais tenté, à ce sujet, la moindre ex-
périence sérieuse.
lemoine est un ignorant
Il me semble bien, d'ailleurs, poursuit
M. Cailletet, que Lemoine n'a pas, en chi-
mie, de connaissances bien étendues. Et
cela, je vais vous le démontrer
Vous savez que l'eau, chauffée il une cer-
taine température, passe h l'état gazeux et
que. quelle que soit la .pression que l'on
exerce sur les gaz ainsi obtenus, il est im-
possible de les ramener à l'état liquide
«piand ils sont parvenus à une température
déterminée. C'est ce que l'on appelle Je point
critique. Tout corps liquide ou liquéfiable a
mi point critique différent. Or, nous avons
cherché à déterminer, il y a plusieurs an-
POUR AIDER' LES POSTIERS
LA C. G. T.
décrète
LA GREVE GÉNÉRALE
La C. G. T. ë. officiellement, cette fois
décidé de se ranger aux côtés des pos-
tiers elle a promis de leur venir en aide,
et c'est par la GRÈVE générale qu'elle es-
père servir le plus utilement leur cause,
c'est-à-dire obtenir du gouvernement la réin-
tégration des révoqués et le triomphe du
droit syndical des salariés de l'Etat.
La lutte a été vive réformistes et révo-
lutionnaires ont bataillé rudement avant de
prendfep cette détermination.
Les révolutionnaires ont, finalement,
triomphé Leur thèse a prévalu contre celle
que M. Niel avait exposée à lxns;, au con-
grès des mineurs, et qu'il défendait hier, une
fois encore, avec autant d'acharnement et
de conviction profonde:
Cette mobilisation des forces confédérées,
à son avis insuffisamment entraînées, lui
parait offrir de sérieux dangers et il y avait
quelque courage à dire tout haut ce que
beaucoup de militants syndicalistes disent
tout bas.
M. Nie! s'incline la ina.rin". ft'
s'est fait l'exécuteur fidèle et respccUn-n\
de la volonté manifestée par cette inajorité,
mais si ses amis et lui ne veulènt en faire
l'aveu public, ils ne paraissent nourrir au-
cune illusion sur la portée véritable du ges-
te esquissé en faveur des postiers.
LES DERNIERS GRÉVISTES
SE CONCERTENT
A ceux qui demandaient à quoi bon convo-
quer les postiers à la matinale réunion de
la rue de Sambre-et-Meuse, M. Pauron
avait répondu
Pour voir ceux qui viendront!
Le secrétaire du syndicat national des on-
vriers des P. T. T. a pu constater hier,
et non sans regret, que les a irréductibles »
avaient vu leur effectif ramené ou peu
s'en faut aux seuls révoqués.
A neuf heures du matin, cinq cents pos-
tiers, parmi lesquels un certain nombre de
dames, employées ou téléphonistes,
étaient réunis rue de Sambre-et-Meuse.
Les représentants dé la presse se virent
exclus et durent attendre l'issue du débat
pour en recueillir^ quelques échos.
Vers onze heures, ils apprirent que MM.
Pauron et Le Gléo avaient rendu compte des
démarches wir eux faites auprès de la C. G. T.
et des a cheminots ». On glissa sur les
incidents qui marquèrent ta fin du jnqf-
ting du Tivoli-Wàux-Hall pour retenir les
promesses faites par un certain nombre
d'organisations ouvrières adhérentes à la
G G. T. notamment les électriciens et la
fédération du bâtiment, dont le secrétaire
général, M. Péricat, apporta aux postiers des
paroles réconfortantes. Il leur donna lecture
d'une liste comprenant 87 syndicats ou grou-
pements décidés, d'après lui, à marcher dès
le soir même si le mot d'ordre par euà at-
tendu était enfin lancé.
Cette promesse galvanisa les énergies dé-
faillantes et les post.iers se séparèrent sans
avoir pris d'autre résolution que celle de te-
nir une nouvelle réunion dans l'après-midi.
Ils attendraient là que soit précisée l'atti-
tude à laquelle les organisations confédé-
rées allaient se trouver contraintes.
Beaucoup de conciliabule*
et de mystère»
Les délégués des deux sections de la
C» G. T. avaient, en effet, rendez-vous à
deux heures de l'après-midi, rue Grange-aux-
Belles, pour prendre, disait la convocation,
toutes tes mesures nécessaires pour un mou-
vemenl immédiat.
Bien peu ne répondirent D^e à l'appel et,
dans ces conditions, la discussion ne pou-
vait manquer d'être mouvementée.
CI. Lancelot, frayes.
M. Cailletet
nées de cela, -NI. Collardeau et moi, le point
critique du mercure. Nous avons donc en-
fermé une certaine quantité de ce métal
dans des tubes d'acier de 25 millimètres d'é-
paisseur, hermétiquement clos. Ces tubes
ont été plongés dans un bain de nitre liqué-
fié, porté à douze cents degrés, au moyen
d'un chauffage obtenu par- un groupe de
becs de Bunsen. Or, la pression des gaz
pe mercure, mesurée au galvanomètre, di-
minua tout à coup, sans cause apparente.
Nous interrompîmes donc l'expérience et
constatâmes tout d'abord que nos tubes
étaient intacts. Mais le mercure que nous
y avions placé ne s'y trouvait plus. n'avait
été transformé en gaz, et les gaz mercuriels,
parvenus à une certaine température,
avaient traversé l'acier et s'étaient évapo-
rés, ce qui prouve leur subtilité extraordi-
naire.
Or, comment procède Lemoine, selon ses
dires ? Avec un four en tôle, en terre réfrac..
L'accès de la maison des Fédérations fut
rigoureusement interdit aux journalistes,
car, eni,raison de la température, les fenêtres
de la salle de réunion étaient grandes ou-
vertes et ils auraient pu aisément suivre du
dehors tout le débat.
On les consigna donc à l'entrée de l'impas-
se, au fond de laquelle se dresse l'immeu-
ble confédéral. Jusqu'à six heures et demie
du soir, il leur fallut s'armer de patience et
attendre confirmation des bruits mis en cir-
culation et plus ou moins contradictoires.
Enfin, alors que les plus tenaces allaient
lâcher pied, on vit paraître MM. Pauron,
Le Gléo, Montbrand et plusieurs postiers
qui avaient assisté aux délibérations du co-
mité confédéral. Tous rayonnaient par con-
séquent, aucun doute n'était nlus permis. La
G G. T. avait fait des promesses formelles
aux grévistes.
Nous ne pouvons parler, dirent-ils. Une
commission de sept membres a pleins pou-
voirs pour prendre telle détermination qu'el-
le jugera utile en faveur de nos camarades.
Notre cause n'est pas perdu?. 11 s'en faut.
Peu après, MM. Niel, secrétaire général de
la C. G. T., G. Yvetot, secrétaire de !o sec-
lion des Bourses du travail Thuillier, de
l'Union des syndicats Thil, des lithogra-
phes Péricat, du èètiment et Pataud, des
électriciens, sortaient à leur tour de la mai-
son des Fédérations et remontaient du côté
à leur suite les journalistes et de nombreux'
Lse postiers firent un enthousiaste accueil
à la délégation on en put juger par la vi-
gueur des applaudissements dont l'écho par-
vint dans la rue.
Une heure plus tard. les grévistes éva-
cuaient .iL leur tour ia salle de I'Rgalitaire
et, muets par ordre, se dispersaient dans
toutes les directions^ s'jffurçanl d'échapper
aux interviewer-.
L'ordre do mobilisation est lancé
Presque en même temps, M. Niel et ses
amis reprenaient le chemin de la rue Gran-
ge-aux-Belles où ils devaient rédiger en com-
mun un manifeste aux travailleurs dn Fran-
ce.
Voici le texte de cet appel
Confédération général du travail •
POUR LES POSTIERS
Aux travailleurs de France,
Camarades, vous cottnaissez l'énergie in-
domptable avec laquelle nos camarades pos-
tiers luttent depuis quelques jours.
Faügués de réctamer en vain à leur patron,
l'Etat, des revendications toujours refusées
futigués de recevoir les insultes de leur sous-
patron Simyan fatigués d'attendre le droit de
oe syndiquer cornme tous les autre, travail-
leurs, ils se sont vaillamment sou!evbs pour
faire triompher' leurç revendications par leur
propre action directe; par la grève.
Livres il leur seule force, peut-être seraient-
ils impulsants à caincre toutes les. résistances
coalisées de l'Etat.
La Cnnfédûration gértffrftle du travail, dont.
te devoir est de secourir tous les travailleurs
engagés dans des batailles difficile;, a recher-
ché les moyens d'apporter aux courageux
grévistes des P. T. T. le concours de toutes
ses organisations.
Elle* considère que le meilleur de ces moyens
c'est
LA GREVE GENERALE
Pour répondre aux. provocations gouverne-
mentales
Pour protester contre les révocations scan-
daleuses et imposer la réintégration des nom-
breux camarades Irappés
Pour faire triompher le droit syndical de nos
amis salariés de 1 Etat,
GA GREVE GENERALE
est le moyen le pius sûr et le plus rap'de.
La -Confédération générale du travn.il invite
donc toutes ses corporations, toutes ses organi-
sations cl fuus les trauaizieurs à se joindre
IMMEDIATEMENT à lu grève des postiers par
LA GREVE GENERALE
La victoire des postiers doil élre cella de
tout le protétariat, eottmae leur délaite se.rait
la sienne.
Le prolétariat ne faillira. pas a son devoir
de solidarité, et, faisant trève iL toutes divisions,
sans s'inquiéter des questions de tactique ou
de personnalités, c'est unan'iuement qu''l ré-
sondra l'appel de la Confédération générale
du travail
Camarades! tous debout pour
L4 GREVE GENERALE
L'ILLUSTRE SAVANT DIT ENCORE,
et il preuve
One Lemoine est en chimie en ignorant
taire et en charbon comprimé ? It détermi-
ne, dans ce milieu, la température du four
électrique, voisine de degrés. Et il pré-
tend que la pression mercurielle peut agir
de la sorte ? Mais, puisque le mercure se
transforme en gaz à la température de 1100
degré, et qu'à 1200 degrés ces mêmes gaz
traversent l'acier l'acier fondu, notez le
bien comment restelmient-ils bénévole-
ment à la dispositions de l'alchimiste, alors
qu'il les traite c'est lui-même qui le dit
à une température double de celle qui est né-
cessaire pour provoquer leur disparition to-
tale, et cela dans un creuset composé de ma-
tières infusibles, mais éminemment poreu-
ses ?
Je dis que Lemoine, pour !a raison que je
vous indique, n'a pu, matériellement, mener
à bien cet.te expérience. J'ajouterai que je ne
conseille à personne de la teïrter, car elie
pourrait être dangereuse. Ainsi, en procé-
dant aux expériences de mensuration des
gaz mercuriels, je me suis fait un jour écla-
ter un tube entre les mains. Ce tube se
fendit latéralement, et le métal fut projeté
au plafond avec une telle force que le plâtre
en fut noirci et que le mercure retomba sur
le soi, sous forme de poussière .argentée.
J'aurais pu être tué.
« Qu'on prenne ma tête
si je me trompe.
Monlcher monsieur, je me résume en di-
sant que Lemoine ne peut rien obtenir dans
le sens indiqué, avec sa formule et avec ses
appareils. Si je me trompe que l'on ^Bcenne
ma téte
Et sur ces mots, M. Gailletet m'cigarette égyptienne et me montra, avec un
légitime orgueil, quelques-uns de= admira-
bles objets d'art qu'il s'est complu à réunir,
au cours de sa longue et glorieuse carrière.
LE SCANDALE DES GRACES
Au Cherche-Midi existait 0
une véritable agence.
LE CAPITAL MÂRIX Y RECEVAIT PRINCIÈREMENT LA CLIENTELE
LES BATIMENTS MILITAIRES DE LA RUE DU CHERCHE-MIDI
1. Porte de la prison. 2. Entrée du personnel des deux conseils de guerre et des officiers qui y
siègent. 3. Entrée du public venant assister aux audiences. 4, Lucarnes des cellules
de la prison.
Le capitaine Marix est un véritable héros
de roman, en même temps qu'un extraordi-
naire personnage de vaudeville; Balzac l'eût
réclamé, et Courteline reconnaîtra en lui un
de ces types à la fois sérieux et burlesques
qu'il affectionne. Le capitaine, rapporteur
près le premier conseil de guerre de Paris,
avait une façon toute particulière de com-
prendre ses fonctions avec une rondeur et
une bonne humeur qui ne se démentaient
jamais, une inlassable activité, il brassait
de multiples affaires, et son cerveau bouil-
tonnait sans cesse d'idées gigantesques pour
la réalisation desquelles il lui fallait beau-
coup d'argent. Tous les moyens lui étaient
bons pour s'en procurer. Il tapait aux bour-
ses les plus modestes comme aux plus im-
posants coffres-forts. Son ami Séres Te valait.
N'eut-il que ce seul complice ? '? Le coureur
Ruinart n'apparaît, jusqu'ici, que comme un
comparse, un inculpé de second ordre. Mais,
s'il faut du moins en croire les bruits du
Palais, des personnages d'autre importance
pourraient bien se trouver, à teur tour, im-
pliqués prochainement dans le scandale.
D'ores et déjà on murmure des noms Mais
il faut se méfier, en semblance occurrence,
des racontars. Dans un advenir prochain,
d'ailleurs, nous serons fixés sur leur valeur.
LE CAPITAINE HOiRIE D'AFFAiRES
Des déclarations que nous fit, avant d'être
arrêté, son ami Serès lai-même, il résulte
que le capitame Marix s'empjcya, fréquem-
ment, à faire obtenir des sursie, des dispen-
ses, des changements de garnison.
A ce propos, nous sommes allé demander
à M. Robert Coquelle, le directeur du vélo-
drome Buffalo, s'il avait entendu parler, par
les champians, habitués de son établisse-
ment, des agissements des deux associés.
Non seulement, nous a répondu, en
souriant, M. Coquelle, j'ai entendu, en main-
tes circonstances, prononcer le nom de ces
messieurs, %mais encore j'ai été moi-même,
à une époque peu éloignée, en affaires avec
eux.
C'est une histoire assez curieuse et qui,
j'en suis persuadé, intéressera vos lecteurs.
Marix s'intéressait aux sports
Sérès m'avait été présenté, il y a deux ans,
par son frère qui, vous le savez, est cycliste.
A diverses reprises, il m'avait demandé des
entrées de faveur pour des réunions sporti-
ves et c'est au cours de l'une de ces réu-
nions que je fis la connaissance de Marix,
qui l'avait accompagné.
Très élégant, coiffé d'un chapeau haut de
forme et soigneusement ganté, le capitaine
avait toutes les allures d'un personnage de
très grande importance.
Tout de suite, il me traita en ami et me dé-
elara qu'il s'intéressait vivement aux choses
du sport il manifesta un réel plaisir en
voyant le grand nombre d'amateurs qui sui-
vaient les courses du* vélodrome.
Un beau jour, sans que j'en connusse la
raison, Sérès et Marix cessèrent leurs visi-
tes. Cette éclipse dura deux mois, au bout
desquels Sérès reparut
j» Etant donné, me dit-il, le grand succès
de la course de six jours à New-York, ne
croyez-vous pas que l'on pourrait organiser,
à Paris, une épreuve semblable ?.
Je lui fis alors remarquer que je ne possé-
dais m le, local, m les capitaux nécessaires
pour mener à bien une telle entreprise
Qu'à cela ne tienne me répondit Sé-
rès, j'ai tout ce qu'il faut pour marcher et,
si vous voulez ;iccepter la direction de l'af-
faire, vous n'avez qu'un mot a dire.
Résolu à ne -pas m engager à la légère, je
demandai k réfléchir et déclarai qifavant
toute autre chose, j'exigeais le dépôt d'une
somme de cent mille francs, dans une ban-
que de Paris
Vous les aurez dans quarante-huit
heures s écria aussitôt Sérès.
N'ayant aucune raison pour douter de sa
parole, je me mis en rapports avec le direc-
teur de l'Hippodrome, .boulevard de Clichy,
mais, dès le début des pourparlers, je me
rendis compte que les frais trop élevés que
nous aurions à supporler rendraient l'affaire
scabreuse.
J'avisai, sur-le-champ, Sérès qui, loin de
se décourager, me donna, pour le lendemain,
rendez-vous au bureau du capitaine Marix,
rue du Cherche-Midi
De Buffaio au grand Pa'ais
Celui-ci avait été tenu au courant de la
question. Saris préambule inutile, il m'an-
nonça qu'il avait formé le projet d'obtenir,
pour nous, le grand Palais
Grâce aux relations que je compte
dans tes milieux politiques, rn'expliqua-t-il,
cela ne fera pas l'ombre d'une difficulté, La
fils d'un haut personnage s'entremettra vo-
lontiers auprès de M. Dujardin-Beaurnetz
qui, croyez-le bien, se fera, de jon côté, un
plaisir de nous être agréable. •
Seulement, ajouta immédiatement le ca-
pitaine, il y aura des concours à rémunérer
et, dans le budget que vous allez établir, ja
vous demanderai de faire figurer une somme
de dix mille francs que vous verseriez entre
les mains de mon excluent ami Sérès.
Sur ces mots je pris congé du capitaine-
homme d'affaires. Quelques semaines plus
tard, Sérès vint m'avertir que les pourpar-
lers étaient en bonne voie et que la personne
qui avait promis de mettre dans l'entreprise.
des capitaux importants devait arriver pro.
chainemen-t de rovincel.
Hélas! les deux associés n'allaient pas
tarder A déchanter Huit jours environ s'é-
laient écoulés, lorsqu'on viut me prévenir
que les pourparlers po>ir obtenir le grand
Palais avaient complètement échoué.
Depuis cette époque, nous dit en termi-
nant M. Robert Coqueile, j'ai revu une seulo
fois le capitaine Marix. C'était en avril 1908,
un mois avant les élections municipales, à
un banquet des comités radicaux socialistes.
Marix était assis à ia table d'honneur et il
semblait prendre très au sérieux, son rôle
de personnage officiel.
Tout en nous reconduisant, l'aimable di-
recteur du vélodrome Buffalo nous parla
de l'arrestation du coureur Ruinart. Jusqu'à
preuve du contraire, M. Robert Coquelle so
refuse à croire à la culpabilité de ce dernier..
L'AGENCE DU CHERCHE-MIDI
On peut dire sans être taxé d'exagéra-
tion que le capitaine Marix avait, vrai-
ment, le génie des affaires.
Lorsque le visiteur arrivait à son
cabinet de la prison du Cherche-Midi, il
avait tout de suite l'impression qu'il se trou-
vait, non dans les locaux de l'autorité mili-
taire, mais dans une sorte d'office de place-
ment ou de bureau de renseignements.
De nombreux solliciteurs de tout âge fai-
saient queue Il dans l'antichambre, tan-
dis que, de la pièce occupée par le rappor-
teur près le premier conseil de guerre, par-
taient des éclats de rire, des bruits de bou-
teilles que l'on débouche, et de verres que
l'on choque.
C'est que le capitaine Marix avait cou-
tume de recevoir royalement ses clients sà-
rieux.
Avant d'engager la conversation, il leur
offrait avec bonhomie des cigares fins et,
en leur honneur, versait d'une main exper-
te, dans des coupes de cristal, le Champa-
gne pétillant.
Au cours de ces audiences, il arrivait par-
fois qu'un factionnaire zélé se permettait de
frjbchir le seuil du cabinet d'affaires pour
rappeler à son supérieur qu'un pauvre diable
de réserviste ou de territorial, qui avait ou-
blié l'appel, devait ce jour-là subir un inter-
rogatoire. C'est alors qu'il fallait voir avec
quelle désinvolture le capitaine traitait. ces
clients d'un autre geinre.
Flûte! s'écriait- invariablement, ces
gens m'embêtent
Puis, se tournant vers le factionnaire, il
lui disait
Reconduisez le prisonnier à sa cellule,
Je n'ai pas le temps, aujourd hui, de m'oo
cuper de lui demain je déjeune chez X.
après-demain je suis attendu à Amiens (ou
ailleurs).. Bref, vous m'amènerez l'inculpé
dans cinq ou six jours. Allez.
Le truc de Sérès
Sérès avait trouvé, pour procurer des
clients à son ami Marix. le moyen suivant
Lorsqu'il apprenait qu'un coureur cycliste,
un jockey ou tout autre individu était ré-
fractaire à la loi militaire, il adressait, sous
une signature d'emprunt, une dénonciation,
à la suite de laquelle l'insoumis était invité
à rejoindre son corps sans délai,
Puis, quelque temps après, il provoquait
adroitement ies confidences de sa victime et,
feignant de s'intéresser à son sort, lui offrait
d'arranger son affaire.
Le pauvre diable était alors conduit par
Serès dans le bureau du capitaine Maria
qui, tout d'abord, manifestait la plus vive
indignation et déclarait au protégé de Sérès
qu'il se trouvait dans l'obligation de le met-
tre en état d'arrestation.
Puis, finalement, la colère de l'officier
s'apaisait et il était rare que l'on ne par*-
vint point à s'entendre.
LE GREFFIER EST MUET
Dans l'après-midi d'hier, nous franchis.
sions le seuil de la prison militaire du
Cherche-Midi, et, sous l'œil soupçonneux de.
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à l'OFFICE D'ANNONCES
1O. pUoo d6 la Bouru, PAH19^21
EDITION DE. _P4gJJL,[
Quelle que soit la répugnance que l'on
ait ressentie pour un misérable assassin
comme Courtois, on ne peut imaginer
sans tristesse à la fois son agonie, sa,
mort et son enterrement. Une photogra-
phie impressionnante nous a montré le
corbillard, précédé du prêtre et des deux
enfants de chœur, suivi du gardien re-
présentant l'administration pénitentiai-
re et c'est tout. Les parents n'avaient pas
pu venir; ils s'étaient contentes de pieu-
rer dans leur coin leur enfant qui, après
avoir subi les pires déchéances, dispa-
raissait enfin de la scène du monde où il
avait tenu un rôle si tragique Aujour-
d'hui c'est le grand silence dans Ia petite
l île de Ré que la mer baigne ateniour et
c'est le définitif oubli.
Si l'on compare l'existence des forçats
̃;i d'aujourd'hui à celle des galérien^ d'au-
trefois, on constate qu'un réel change-
ment fut apporté dans leur condition.
Etre condamné aux galères n'était pas
simplement une manière de parler, c'é-
tait l'expression même du travail qu'ils
devaient produire. Les galériens étaient
les rameurs des galères royales, les na-
vires de guerre d'alors, allant soit à la
voile, soit à la rame. Manœuvres fati-
gantes qui, dans l'antiquité, étaient exé-
cutées par des esclaves. Le travail devait
être fort exténuant puisqu'on 1677, nous
apprend M. Fernand Mitton, on pres-
la peine capitale contre les galé-
riens qui 3e mutilaient un membre pour
ne pas ramer. Et ce n'étaient pas sim-
plement les assassins, les voleurs et,
comme on disait, les pirates de la mer
que l'on condamnait jadis aux galères.
A la suite de la révocation de FEdit de
Nantes, les protestants qui se mariaient
ou faisaient baptiser leurs enfants sui-
vant les rites de leur religion furent en-
voyés aux galères à perpétuité. On ne
peut croire que de pareils attentats con-
tre la liberté aient été commis en France,
il y a seulement un peu plus de deux
siècles.
Mais vint un jour, à la fin du règne de
Louis XIV, où la science, accomplissant
transforma la vie des for-
çats on n'utilisa plus les rames à bord
des galères royales et l'on parqua les
condamnés dans de vastes bâtiments, au
bord de la mer, où ils ne furent astreints
it aucun travail et l'ennui, la maladie
les décimèrent en grand nombre. On les
employa à construire, ironie du sort,
leur propre prison. Le bagne de Toulon
d'abord, puis ceux de Brest et de Roche-
fort. On peut dire qu'à \e moment,
le galérien légendaire avait vécu
sa condition se rapproche peu à peu de
celle qui' lui est faite aujourd'hui mais
il lui reste encore, pour arriver à cet état
relatif de bien-être, de dures étapes à
franchir.
Victor Hugo, dans les Misérables, nous
a dépeint, par les récits de Jean Valjean,
toutes les misères, toutes les hontes qui
attendaient au bagne les forçats, il y a
un siècle. D'abord il y a le costume, que
les gravures nous ont transmis elles re-
présentent le forçat habillé d'un pantalon
jaune foncé, d'une casaque et d'un bon-
net de laine. La casaque était rouge et
jaune pour les forçats dangereux, étroi-
tement surveillés, rouge seulement pour
les autres. Le bonnet, lui aussi, avait
deux couleurs rouge pour les condam-
nés à temps, il était vert pour les con-
damnés à perpétuité et sur le devant de
la coiffure, on cousait le numéro matri-
cule du forçat. C'était là désormais tout
son état civil.
Puisqu'on ne pouvait plus employer
les bagnards dans la marine, et les trois
bagnes de Toulon, Brest et Rochefort
étant construits, on chercha comment on
pourrait utiliser tous ces déchus. Les for-
çats furent alors répartis dans les manu-
factures des ports et employés à des tra-
vaux de fatigue. On les autorisa à fabri-
quer de menus objets qu'ils pouvaient
vendre aux visiteurs, car les visiteurs af-
nuaient et je crois bien que les galériens
étaient la curiosité de la ville dans la-
quelle ils se trouvaient ils en consti.
tuaient la principale attraction. C'était
un spectacle si pittoresque Us étaient
habillés d'une façon particulière, et les
hommes étaient seuls, avec un boulet au
pied, ou enchaînés deux à deux. Et l'ad-
ministration se faisait un malin plaisir
de lier l'un à l'autre deux hommes diffé-
rents de caractère et d'humeur, et qui
finissaient par se hair. Haine terrible qui
devait exaspérer dans chacun des forçats
son ancien goût du meurtre. Peut-on con-
cevoir, en effet, une condition plus abo-
minable ? Rester toute sa vie enchaîné
à un être que l'on exècre. C'est peut-être
dans ce compagnonnage obligatoire qu'é-
tait la vexation la plus grave des anciens
forçats.
Et l'on conçoit que la plus grande ré-
compense pour un forçat était ce qu'on
appelait le désaccouplement il était pro-
noncé par le chef de service, qui écrivait
ces mots de « chaine brisée » c'était
presque la liberté, en tout cas c'était l'in-
dépendance. Le forçat pouvait dès lors se
promener, travailler, sans traîner à côté
de soi une autre épave humaine. Ceux
qui se conduisaient tout à fait bien
étaient encore emnloyés comme infir-
miers ou servants dans les hôpitaux. C'é-
taient à peu près toutes les récompenses
que pouvaient attendre les forçats, car la
réduction de peine était extrêmement
rare.
Si les récompenses étaient peu nom-
breuses, les punitions avaient, au con-
traire, une assez grande variété; c'étaient
le retranchement temporaire de vin, les
menottes, le cachot, la bastonnade, la
chaîne double et l'atroce remise en cou-
ple, la. plus dure de toutes. L'on com-
prend que les évasions fuss-entsi fréquen-
tes autrefois dans les bagnes tout valait
mieux aux yeux de ces hommes maudits
que leur horrible réclusion. Ils ne crai-
gnaient pas la mort, qui leurapparaissait
comme la vraie libératrice. Ceux qui
étaient capturés sans effort voyaient leur
peine augmentée de plusieurs années on
les condamnait au supplice de la double
chaîne. Si l'évadé avait tué pour fuir,
c'était la peme de mort.
Telle était autrefois la condition des ga-
lériens et si on la compare a celle-des for-
çats d'aujourd'hui, on ne peut nier que
ces derniers sont moins affreusement
traités. D'abord, ils ne demeurent pas
dans ces prisons étroites, où ne viennent
jamais l'air et le bruit du dehors ils
sont expédiés par groupes dans nos colo-
nies lointaines. Ils jouissent au moins de
la liberté ils travaillent et quelques-uns
se marient là-bas et connaissent les dou-
ceurs de la vie familiale. en effet,
retranchés de la vie de la société, mais
ils en souffrent relativement peu, parce
qu'ils ne peuvent comparer leur condi-
tion à ceux qui les entourent. Sa.ns vou-
loir dire qu'ils sont devenus de petits
bourgeois tranquilles ou des gentlemen
farmers, on peut assurer qu'ils sa»t
plus heureux que ces anciens foBgaÉ;,
traînant dans les villes leur boulet ou
leur compagnon de chaîne et courant le
front sous le bonnet marqué d'un matri-
cule d'infamie.
JEAN FROLLO
Le procès Steinheil
est encore retardé
Un supplément d'information est
ordonné en raison de l'incident
Allaire-Tardivel
La chambre des mises en accusation de
la cour de Paris, réunie sous la présidence
de M. Grenier, a rendu hier son arrêt dans
l'affaire Steinheil.
Contrairement aux réquisitions de M.
Rome, substitut du procureur général, la
cour ar ordonné un complément tf "informa*
tion.
Il est vrai que cette décision est motivée
uniquement sur le tuit nouveau qui résul-
te des déclarations d'Emmanuel Allaire, le
cambrioleur arrêté à Versailles.
Le dossier a été renvoyé à M. le juge
d'instruction André, qui aura à vérilier si,
suivant ce qu'a racontE Allaire, Ange Tar-
divel serait l'un des assassins de M. Steinheil
et de Mme Japy.
Il convient de dire que le parquet de Ver-
sailles se montre plutôt sceptique au sujet
des allégations de ce repris de justice, al-
coolique invétéré, qui semble ne pas jouir
de toute sa raison.
M. Come, juge d'instruction dans cette
ville, avait projeté de lui faire subir hier
un nouvel interrogatoire. Mais Allaire n'a
pu quitter sa cellule. Dans la nuit il avait
été en proie à deux crises violentes de de-
lirium tremens, au cours desquelles il avait
prononcé des paroles incohérentes.
La femme Marie Witzer, surnommée Lrra
la Rouquine, désignée par Allaire, a été re-
trouvée et languement interrogée. Elle a
affirmé n'avoir jamais entendu parler, par
lui, ni du crime de l'impasse Ronsin, ni du
cambriolage de Chàteaufort. Ses déclara-
tions ont été à ce point précises qu'on l'a
laissée en liberté..
La formule de Lemoine, c'est une plaisanterie"
TEL EST L'AVIS DE M. CAILLETET
et il ajoute
"ttu'oa prenne ma tels si il m trompe
J'ai surpris, hier, M. Cailletet, membre de
l'Académie des sciences, dans son cabinet
de travail. L'illustre savant, à qui l'on doit
la réalisation du problème de la liquéfaction
des gaz, me reçut avec la plus obligeante
bienveillance.
Mon cher maître, lui dis-je, je viens
vous poser une question qui vous semblera
sans doute fort oiseuse
l'osez-là quand même, dit M. Cametet,
avec un sourire.
Voici, dis-je bravement est-il dans le
domaine de la possibilité de fabriquer dû
diamant avec la formule de Lemoine, for-
mule que le Petit Parisien a publié ce ma-
inll'Oui dit M. Cailletet, dont le sourire
s'accentue. J'ai vu ceta et je vous assure
que cette formule m'a bien amusé Mais,
mon cher monsieur, j'ai vu les appareils de
Lemoine. J'ai pris connaissance de son
fameux secret et je dis que non seulement
Lernoine n'a jamais fabriqué de diamant,
mais encore qu'il est à peu près impossible
de faire quoi que ce soit avec un semblable
1 outillage. Je suis même convaincs qu'il
n'a jamais tenté, à ce sujet, la moindre ex-
périence sérieuse.
lemoine est un ignorant
Il me semble bien, d'ailleurs, poursuit
M. Cailletet, que Lemoine n'a pas, en chi-
mie, de connaissances bien étendues. Et
cela, je vais vous le démontrer
Vous savez que l'eau, chauffée il une cer-
taine température, passe h l'état gazeux et
que. quelle que soit la .pression que l'on
exerce sur les gaz ainsi obtenus, il est im-
possible de les ramener à l'état liquide
«piand ils sont parvenus à une température
déterminée. C'est ce que l'on appelle Je point
critique. Tout corps liquide ou liquéfiable a
mi point critique différent. Or, nous avons
cherché à déterminer, il y a plusieurs an-
POUR AIDER' LES POSTIERS
LA C. G. T.
décrète
LA GREVE GÉNÉRALE
La C. G. T. ë. officiellement, cette fois
décidé de se ranger aux côtés des pos-
tiers elle a promis de leur venir en aide,
et c'est par la GRÈVE générale qu'elle es-
père servir le plus utilement leur cause,
c'est-à-dire obtenir du gouvernement la réin-
tégration des révoqués et le triomphe du
droit syndical des salariés de l'Etat.
La lutte a été vive réformistes et révo-
lutionnaires ont bataillé rudement avant de
prendfep cette détermination.
Les révolutionnaires ont, finalement,
triomphé Leur thèse a prévalu contre celle
que M. Niel avait exposée à lxns;, au con-
grès des mineurs, et qu'il défendait hier, une
fois encore, avec autant d'acharnement et
de conviction profonde:
Cette mobilisation des forces confédérées,
à son avis insuffisamment entraînées, lui
parait offrir de sérieux dangers et il y avait
quelque courage à dire tout haut ce que
beaucoup de militants syndicalistes disent
tout bas.
M. Nie! s'incline la ina.rin". ft'
s'est fait l'exécuteur fidèle et respccUn-n\
de la volonté manifestée par cette inajorité,
mais si ses amis et lui ne veulènt en faire
l'aveu public, ils ne paraissent nourrir au-
cune illusion sur la portée véritable du ges-
te esquissé en faveur des postiers.
LES DERNIERS GRÉVISTES
SE CONCERTENT
A ceux qui demandaient à quoi bon convo-
quer les postiers à la matinale réunion de
la rue de Sambre-et-Meuse, M. Pauron
avait répondu
Pour voir ceux qui viendront!
Le secrétaire du syndicat national des on-
vriers des P. T. T. a pu constater hier,
et non sans regret, que les a irréductibles »
avaient vu leur effectif ramené ou peu
s'en faut aux seuls révoqués.
A neuf heures du matin, cinq cents pos-
tiers, parmi lesquels un certain nombre de
dames, employées ou téléphonistes,
étaient réunis rue de Sambre-et-Meuse.
Les représentants dé la presse se virent
exclus et durent attendre l'issue du débat
pour en recueillir^ quelques échos.
Vers onze heures, ils apprirent que MM.
Pauron et Le Gléo avaient rendu compte des
démarches wir eux faites auprès de la C. G. T.
et des a cheminots ». On glissa sur les
incidents qui marquèrent ta fin du jnqf-
ting du Tivoli-Wàux-Hall pour retenir les
promesses faites par un certain nombre
d'organisations ouvrières adhérentes à la
G G. T. notamment les électriciens et la
fédération du bâtiment, dont le secrétaire
général, M. Péricat, apporta aux postiers des
paroles réconfortantes. Il leur donna lecture
d'une liste comprenant 87 syndicats ou grou-
pements décidés, d'après lui, à marcher dès
le soir même si le mot d'ordre par euà at-
tendu était enfin lancé.
Cette promesse galvanisa les énergies dé-
faillantes et les post.iers se séparèrent sans
avoir pris d'autre résolution que celle de te-
nir une nouvelle réunion dans l'après-midi.
Ils attendraient là que soit précisée l'atti-
tude à laquelle les organisations confédé-
rées allaient se trouver contraintes.
Beaucoup de conciliabule*
et de mystère»
Les délégués des deux sections de la
C» G. T. avaient, en effet, rendez-vous à
deux heures de l'après-midi, rue Grange-aux-
Belles, pour prendre, disait la convocation,
toutes tes mesures nécessaires pour un mou-
vemenl immédiat.
Bien peu ne répondirent D^e à l'appel et,
dans ces conditions, la discussion ne pou-
vait manquer d'être mouvementée.
CI. Lancelot, frayes.
M. Cailletet
nées de cela, -NI. Collardeau et moi, le point
critique du mercure. Nous avons donc en-
fermé une certaine quantité de ce métal
dans des tubes d'acier de 25 millimètres d'é-
paisseur, hermétiquement clos. Ces tubes
ont été plongés dans un bain de nitre liqué-
fié, porté à douze cents degrés, au moyen
d'un chauffage obtenu par- un groupe de
becs de Bunsen. Or, la pression des gaz
pe mercure, mesurée au galvanomètre, di-
minua tout à coup, sans cause apparente.
Nous interrompîmes donc l'expérience et
constatâmes tout d'abord que nos tubes
étaient intacts. Mais le mercure que nous
y avions placé ne s'y trouvait plus. n'avait
été transformé en gaz, et les gaz mercuriels,
parvenus à une certaine température,
avaient traversé l'acier et s'étaient évapo-
rés, ce qui prouve leur subtilité extraordi-
naire.
Or, comment procède Lemoine, selon ses
dires ? Avec un four en tôle, en terre réfrac..
L'accès de la maison des Fédérations fut
rigoureusement interdit aux journalistes,
car, eni,raison de la température, les fenêtres
de la salle de réunion étaient grandes ou-
vertes et ils auraient pu aisément suivre du
dehors tout le débat.
On les consigna donc à l'entrée de l'impas-
se, au fond de laquelle se dresse l'immeu-
ble confédéral. Jusqu'à six heures et demie
du soir, il leur fallut s'armer de patience et
attendre confirmation des bruits mis en cir-
culation et plus ou moins contradictoires.
Enfin, alors que les plus tenaces allaient
lâcher pied, on vit paraître MM. Pauron,
Le Gléo, Montbrand et plusieurs postiers
qui avaient assisté aux délibérations du co-
mité confédéral. Tous rayonnaient par con-
séquent, aucun doute n'était nlus permis. La
G G. T. avait fait des promesses formelles
aux grévistes.
Nous ne pouvons parler, dirent-ils. Une
commission de sept membres a pleins pou-
voirs pour prendre telle détermination qu'el-
le jugera utile en faveur de nos camarades.
Notre cause n'est pas perdu?. 11 s'en faut.
Peu après, MM. Niel, secrétaire général de
la C. G. T., G. Yvetot, secrétaire de !o sec-
lion des Bourses du travail Thuillier, de
l'Union des syndicats Thil, des lithogra-
phes Péricat, du èètiment et Pataud, des
électriciens, sortaient à leur tour de la mai-
son des Fédérations et remontaient du côté
à leur suite les journalistes et de nombreux'
Lse postiers firent un enthousiaste accueil
à la délégation on en put juger par la vi-
gueur des applaudissements dont l'écho par-
vint dans la rue.
Une heure plus tard. les grévistes éva-
cuaient .iL leur tour ia salle de I'Rgalitaire
et, muets par ordre, se dispersaient dans
toutes les directions^ s'jffurçanl d'échapper
aux interviewer-.
L'ordre do mobilisation est lancé
Presque en même temps, M. Niel et ses
amis reprenaient le chemin de la rue Gran-
ge-aux-Belles où ils devaient rédiger en com-
mun un manifeste aux travailleurs dn Fran-
ce.
Voici le texte de cet appel
Confédération général du travail •
POUR LES POSTIERS
Aux travailleurs de France,
Camarades, vous cottnaissez l'énergie in-
domptable avec laquelle nos camarades pos-
tiers luttent depuis quelques jours.
Faügués de réctamer en vain à leur patron,
l'Etat, des revendications toujours refusées
futigués de recevoir les insultes de leur sous-
patron Simyan fatigués d'attendre le droit de
oe syndiquer cornme tous les autre, travail-
leurs, ils se sont vaillamment sou!evbs pour
faire triompher' leurç revendications par leur
propre action directe; par la grève.
Livres il leur seule force, peut-être seraient-
ils impulsants à caincre toutes les. résistances
coalisées de l'Etat.
La Cnnfédûration gértffrftle du travail, dont.
te devoir est de secourir tous les travailleurs
engagés dans des batailles difficile;, a recher-
ché les moyens d'apporter aux courageux
grévistes des P. T. T. le concours de toutes
ses organisations.
Elle* considère que le meilleur de ces moyens
c'est
LA GREVE GENERALE
Pour répondre aux. provocations gouverne-
mentales
Pour protester contre les révocations scan-
daleuses et imposer la réintégration des nom-
breux camarades Irappés
Pour faire triompher le droit syndical de nos
amis salariés de 1 Etat,
GA GREVE GENERALE
est le moyen le pius sûr et le plus rap'de.
La -Confédération générale du travn.il invite
donc toutes ses corporations, toutes ses organi-
sations cl fuus les trauaizieurs à se joindre
IMMEDIATEMENT à lu grève des postiers par
LA GREVE GENERALE
La victoire des postiers doil élre cella de
tout le protétariat, eottmae leur délaite se.rait
la sienne.
Le prolétariat ne faillira. pas a son devoir
de solidarité, et, faisant trève iL toutes divisions,
sans s'inquiéter des questions de tactique ou
de personnalités, c'est unan'iuement qu''l ré-
sondra l'appel de la Confédération générale
du travail
Camarades! tous debout pour
L4 GREVE GENERALE
L'ILLUSTRE SAVANT DIT ENCORE,
et il preuve
One Lemoine est en chimie en ignorant
taire et en charbon comprimé ? It détermi-
ne, dans ce milieu, la température du four
électrique, voisine de degrés. Et il pré-
tend que la pression mercurielle peut agir
de la sorte ? Mais, puisque le mercure se
transforme en gaz à la température de 1100
degré, et qu'à 1200 degrés ces mêmes gaz
traversent l'acier l'acier fondu, notez le
bien comment restelmient-ils bénévole-
ment à la dispositions de l'alchimiste, alors
qu'il les traite c'est lui-même qui le dit
à une température double de celle qui est né-
cessaire pour provoquer leur disparition to-
tale, et cela dans un creuset composé de ma-
tières infusibles, mais éminemment poreu-
ses ?
Je dis que Lemoine, pour !a raison que je
vous indique, n'a pu, matériellement, mener
à bien cet.te expérience. J'ajouterai que je ne
conseille à personne de la teïrter, car elie
pourrait être dangereuse. Ainsi, en procé-
dant aux expériences de mensuration des
gaz mercuriels, je me suis fait un jour écla-
ter un tube entre les mains. Ce tube se
fendit latéralement, et le métal fut projeté
au plafond avec une telle force que le plâtre
en fut noirci et que le mercure retomba sur
le soi, sous forme de poussière .argentée.
J'aurais pu être tué.
« Qu'on prenne ma tête
si je me trompe.
Monlcher monsieur, je me résume en di-
sant que Lemoine ne peut rien obtenir dans
le sens indiqué, avec sa formule et avec ses
appareils. Si je me trompe que l'on ^Bcenne
ma téte
Et sur ces mots, M. Gailletet m'
légitime orgueil, quelques-uns de= admira-
bles objets d'art qu'il s'est complu à réunir,
au cours de sa longue et glorieuse carrière.
LE SCANDALE DES GRACES
Au Cherche-Midi existait 0
une véritable agence.
LE CAPITAL MÂRIX Y RECEVAIT PRINCIÈREMENT LA CLIENTELE
LES BATIMENTS MILITAIRES DE LA RUE DU CHERCHE-MIDI
1. Porte de la prison. 2. Entrée du personnel des deux conseils de guerre et des officiers qui y
siègent. 3. Entrée du public venant assister aux audiences. 4, Lucarnes des cellules
de la prison.
Le capitaine Marix est un véritable héros
de roman, en même temps qu'un extraordi-
naire personnage de vaudeville; Balzac l'eût
réclamé, et Courteline reconnaîtra en lui un
de ces types à la fois sérieux et burlesques
qu'il affectionne. Le capitaine, rapporteur
près le premier conseil de guerre de Paris,
avait une façon toute particulière de com-
prendre ses fonctions avec une rondeur et
une bonne humeur qui ne se démentaient
jamais, une inlassable activité, il brassait
de multiples affaires, et son cerveau bouil-
tonnait sans cesse d'idées gigantesques pour
la réalisation desquelles il lui fallait beau-
coup d'argent. Tous les moyens lui étaient
bons pour s'en procurer. Il tapait aux bour-
ses les plus modestes comme aux plus im-
posants coffres-forts. Son ami Séres Te valait.
N'eut-il que ce seul complice ? '? Le coureur
Ruinart n'apparaît, jusqu'ici, que comme un
comparse, un inculpé de second ordre. Mais,
s'il faut du moins en croire les bruits du
Palais, des personnages d'autre importance
pourraient bien se trouver, à teur tour, im-
pliqués prochainement dans le scandale.
D'ores et déjà on murmure des noms Mais
il faut se méfier, en semblance occurrence,
des racontars. Dans un advenir prochain,
d'ailleurs, nous serons fixés sur leur valeur.
LE CAPITAINE HOiRIE D'AFFAiRES
Des déclarations que nous fit, avant d'être
arrêté, son ami Serès lai-même, il résulte
que le capitame Marix s'empjcya, fréquem-
ment, à faire obtenir des sursie, des dispen-
ses, des changements de garnison.
A ce propos, nous sommes allé demander
à M. Robert Coquelle, le directeur du vélo-
drome Buffalo, s'il avait entendu parler, par
les champians, habitués de son établisse-
ment, des agissements des deux associés.
Non seulement, nous a répondu, en
souriant, M. Coquelle, j'ai entendu, en main-
tes circonstances, prononcer le nom de ces
messieurs, %mais encore j'ai été moi-même,
à une époque peu éloignée, en affaires avec
eux.
C'est une histoire assez curieuse et qui,
j'en suis persuadé, intéressera vos lecteurs.
Marix s'intéressait aux sports
Sérès m'avait été présenté, il y a deux ans,
par son frère qui, vous le savez, est cycliste.
A diverses reprises, il m'avait demandé des
entrées de faveur pour des réunions sporti-
ves et c'est au cours de l'une de ces réu-
nions que je fis la connaissance de Marix,
qui l'avait accompagné.
Très élégant, coiffé d'un chapeau haut de
forme et soigneusement ganté, le capitaine
avait toutes les allures d'un personnage de
très grande importance.
Tout de suite, il me traita en ami et me dé-
elara qu'il s'intéressait vivement aux choses
du sport il manifesta un réel plaisir en
voyant le grand nombre d'amateurs qui sui-
vaient les courses du* vélodrome.
Un beau jour, sans que j'en connusse la
raison, Sérès et Marix cessèrent leurs visi-
tes. Cette éclipse dura deux mois, au bout
desquels Sérès reparut
j» Etant donné, me dit-il, le grand succès
de la course de six jours à New-York, ne
croyez-vous pas que l'on pourrait organiser,
à Paris, une épreuve semblable ?.
Je lui fis alors remarquer que je ne possé-
dais m le, local, m les capitaux nécessaires
pour mener à bien une telle entreprise
Qu'à cela ne tienne me répondit Sé-
rès, j'ai tout ce qu'il faut pour marcher et,
si vous voulez ;iccepter la direction de l'af-
faire, vous n'avez qu'un mot a dire.
Résolu à ne -pas m engager à la légère, je
demandai k réfléchir et déclarai qifavant
toute autre chose, j'exigeais le dépôt d'une
somme de cent mille francs, dans une ban-
que de Paris
Vous les aurez dans quarante-huit
heures s écria aussitôt Sérès.
N'ayant aucune raison pour douter de sa
parole, je me mis en rapports avec le direc-
teur de l'Hippodrome, .boulevard de Clichy,
mais, dès le début des pourparlers, je me
rendis compte que les frais trop élevés que
nous aurions à supporler rendraient l'affaire
scabreuse.
J'avisai, sur-le-champ, Sérès qui, loin de
se décourager, me donna, pour le lendemain,
rendez-vous au bureau du capitaine Marix,
rue du Cherche-Midi
De Buffaio au grand Pa'ais
Celui-ci avait été tenu au courant de la
question. Saris préambule inutile, il m'an-
nonça qu'il avait formé le projet d'obtenir,
pour nous, le grand Palais
Grâce aux relations que je compte
dans tes milieux politiques, rn'expliqua-t-il,
cela ne fera pas l'ombre d'une difficulté, La
fils d'un haut personnage s'entremettra vo-
lontiers auprès de M. Dujardin-Beaurnetz
qui, croyez-le bien, se fera, de jon côté, un
plaisir de nous être agréable. •
Seulement, ajouta immédiatement le ca-
pitaine, il y aura des concours à rémunérer
et, dans le budget que vous allez établir, ja
vous demanderai de faire figurer une somme
de dix mille francs que vous verseriez entre
les mains de mon excluent ami Sérès.
Sur ces mots je pris congé du capitaine-
homme d'affaires. Quelques semaines plus
tard, Sérès vint m'avertir que les pourpar-
lers étaient en bonne voie et que la personne
qui avait promis de mettre dans l'entreprise.
des capitaux importants devait arriver pro.
chainemen-t de rovincel.
Hélas! les deux associés n'allaient pas
tarder A déchanter Huit jours environ s'é-
laient écoulés, lorsqu'on viut me prévenir
que les pourparlers po>ir obtenir le grand
Palais avaient complètement échoué.
Depuis cette époque, nous dit en termi-
nant M. Robert Coqueile, j'ai revu une seulo
fois le capitaine Marix. C'était en avril 1908,
un mois avant les élections municipales, à
un banquet des comités radicaux socialistes.
Marix était assis à ia table d'honneur et il
semblait prendre très au sérieux, son rôle
de personnage officiel.
Tout en nous reconduisant, l'aimable di-
recteur du vélodrome Buffalo nous parla
de l'arrestation du coureur Ruinart. Jusqu'à
preuve du contraire, M. Robert Coquelle so
refuse à croire à la culpabilité de ce dernier..
L'AGENCE DU CHERCHE-MIDI
On peut dire sans être taxé d'exagéra-
tion que le capitaine Marix avait, vrai-
ment, le génie des affaires.
Lorsque le visiteur arrivait à son
cabinet de la prison du Cherche-Midi, il
avait tout de suite l'impression qu'il se trou-
vait, non dans les locaux de l'autorité mili-
taire, mais dans une sorte d'office de place-
ment ou de bureau de renseignements.
De nombreux solliciteurs de tout âge fai-
saient queue Il dans l'antichambre, tan-
dis que, de la pièce occupée par le rappor-
teur près le premier conseil de guerre, par-
taient des éclats de rire, des bruits de bou-
teilles que l'on débouche, et de verres que
l'on choque.
C'est que le capitaine Marix avait cou-
tume de recevoir royalement ses clients sà-
rieux.
Avant d'engager la conversation, il leur
offrait avec bonhomie des cigares fins et,
en leur honneur, versait d'une main exper-
te, dans des coupes de cristal, le Champa-
gne pétillant.
Au cours de ces audiences, il arrivait par-
fois qu'un factionnaire zélé se permettait de
frjbchir le seuil du cabinet d'affaires pour
rappeler à son supérieur qu'un pauvre diable
de réserviste ou de territorial, qui avait ou-
blié l'appel, devait ce jour-là subir un inter-
rogatoire. C'est alors qu'il fallait voir avec
quelle désinvolture le capitaine traitait. ces
clients d'un autre geinre.
Flûte! s'écriait- invariablement, ces
gens m'embêtent
Puis, se tournant vers le factionnaire, il
lui disait
Reconduisez le prisonnier à sa cellule,
Je n'ai pas le temps, aujourd hui, de m'oo
cuper de lui demain je déjeune chez X.
après-demain je suis attendu à Amiens (ou
ailleurs).. Bref, vous m'amènerez l'inculpé
dans cinq ou six jours. Allez.
Le truc de Sérès
Sérès avait trouvé, pour procurer des
clients à son ami Marix. le moyen suivant
Lorsqu'il apprenait qu'un coureur cycliste,
un jockey ou tout autre individu était ré-
fractaire à la loi militaire, il adressait, sous
une signature d'emprunt, une dénonciation,
à la suite de laquelle l'insoumis était invité
à rejoindre son corps sans délai,
Puis, quelque temps après, il provoquait
adroitement ies confidences de sa victime et,
feignant de s'intéresser à son sort, lui offrait
d'arranger son affaire.
Le pauvre diable était alors conduit par
Serès dans le bureau du capitaine Maria
qui, tout d'abord, manifestait la plus vive
indignation et déclarait au protégé de Sérès
qu'il se trouvait dans l'obligation de le met-
tre en état d'arrestation.
Puis, finalement, la colère de l'officier
s'apaisait et il était rare que l'on ne par*-
vint point à s'entendre.
LE GREFFIER EST MUET
Dans l'après-midi d'hier, nous franchis.
sions le seuil de la prison militaire du
Cherche-Midi, et, sous l'œil soupçonneux de.
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