Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1866-08-15
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 15 août 1866 15 août 1866
Description : 1866/08/15 (N119). 1866/08/15 (N119).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4719175m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/11/2017
LA PRESSE ILLUSTRÉE.
JOURNAL QUOTIDIEN
ABONNEMENTS — Trois mois. Six mois. Un an.
"Paris .... fr- Bfr. lSfr. -
Départemen^A;G ~ . 11, ':1:1 ££
& cent. le numéro.
5 cent. le numéro,
1 MERCREDI, 15 AOUT 18Gr. — N° 119. 1
BUREAUX D'ABONNEMENT : 24, boulevard des Italiens.
[ ADMINISTRATION : 15, rue Breda.
MORT
AUX
Hannetons
Je chante
le mortel in-
trépide qui
le premier
eut l'audace
de déclarer
au hanneton
une guerre
acharnée et
de mettre sa
. tète à prix.
Il S'ilppf-
lait tiennes
et il était
préfet, mais
Ion gtem p s
avant de
présider
aux destinées
d'un département , il avait été un
des farceurs les plus populaires et les
plus décriés de Paris, au temps de la
Restauration.
La bande à Romieu a laissé dans
la tradition parisienne un souvenir
presque légendaire.
Elle était la bête noire des bourgeois
et la terreur des boutiquiers et des con-
cierges (on disait alors irrévérencieu-
sement: « les portiers»)). M. Prudhom-
me ne se gênait pas pour déclarer que
ces malfaiteurs périraient un jour sur
l'ëchafaud.
P us d'une fois elle eut maille à par-
tir avec la patrouille de nuit, bien
qu'elle ne rossât pas le guet, à l'instar
des roués, ses ancêtres. A franchement
par)er, je ne crois pas que ce fût l'en-
vie qui lui manquât.
0;i composerait un poërne épique
aussi long que la Henriade, et plu;
anmsant, j'aime à le croire, rien qu'e'
rimant et el) alignant bout à bout IPF
prouesses de ces couleurs de cabari L
et d'aventures.
Ça)', il faut bien le dire, ce n'était
guère qu'entre deux vins que ces bo-
hémiens de la fantaisie se livraient à
leur humeur folâtre.
, La génération contemporaine, celle
même qui la suivit, savait par cœur
Grande halte des régiments prussiens Atcxandre no 1 et Reine Elisabeth no 3, sur la route de Brunn Ù. Vienne,
Réquisition de bestiaux dans une forme dos environs de Wilfersdort.
-
eurs équi-
)ées.L'ailo du
temps, qui a
passé sur ces
gaminerie?
d'un autre â-
ge, les a
peut-être un
peu effacées "
de la mémoi-
re des hu-
mains.
Ceux qui
ne les con-
naissent pas
ou qui les
auraient ou-
bliées me
pa rdonne-
ront de lâ-
cher la bride
à ces souve-
nirs d'ou-
tre - tombe.
Laissons à l'écart les anas vulga-
risés par les almanachs:
Comme par exemple :
L'épisode du lampion planté surl'é-
pigastre d'un collègue ivre-mort, his-
toire de signaler aux cochers la pré-
sence d'un écueil sur la voie publi-
que.
La scie infligée à ce pipelet chauve
comme un œuf àla coque, auquel tous
les affiliés de la bande viennent, à la
queue leu leu, demander une mèche
de ses cheveux : la chronique rappor-
te que le pauvre diable en mourut.
La charge de ce digne épicier, à qui tout
en jasant de !a pluie et du beau temps,
Romieu fait couper une chandelle en
deux, en quatre, en huit morceaux ;
les lui fait émécher, aligner, allumer
à la file; après quoi. contemplantsa vic-
time avec une expression de compas-
sion bien sentie:
; « Qllel bête de métier, mon brave
homme.. vous faites là pour six pau-
vres liards ! »
Et il s'esquive laissant l'industriel
tout ébaubi, face à face avec ses huit
bouts de chandelle flambant le long
de son comptoir.
Mais voici, je crois, une anecdote
moins connue.
Un matin qu'il ba.ttait le pavé quœrens
LE REVENANT
HISTOIRE DU TEMPS DE LOUIS XV
PAR
PONSON DU TERRAIL
Suite (1)
Le vieillard était un homme d'environ soixante-
dix ans, de haute taille, vert encore, portant une
magnifique chevelure blanche, sans poudre, le
visage noble et affectueux à la fois, l'œil doux,
la lèvre souriante et fière. Le baron de Roche-
Noire, c'était lui-même, était vêtu comme on
l'était alors à Versailles : il portait un habit
brodé, une veste de soie à grands ramages, une
culotte à faveurs bleues, et des bas blancs bien
tirés sur un mollet irréprochable encore.
La jeune fille pouvait avoir vingt ans; elle
était blonde et blanche comme une madone de
Raphaël; son œil était bleu comme l'azur- du
ciel italien, et ses mains, plus blanches que la
cire vierge, avaient une forme aristocratique,
mignonne et charmante.
Mlle Hermine de Roche-Noire résumait ce
type divin de la femme éclose au pâle soleil du
Nord. A voir sa taill.; frêle et ondoyante, on eût
dit une de ces fleurs délicates qui ne peuvent se
développer que dans une atmosphère tiède et
en un lieu où n'arrivent jamais les brûlantes
ardeurs du Midi.
Du reste, la mise élégante des femmes de
qualité, la poudre, les mouches et les paniers
rehaussaient encore cette beauté merveilleuse,
et le vicomte Ralph, ébloui, s'estima le gentil-
homme le plus heureux du monde, lorsqu'il s'in-
clina devant elle, en songeant qu'il s'inclinait
devant sa fiancée.
— Ah 1 vicomte, dit le baron qui se leva et alla
vivement à lui, vous êtes un gentilhomme accom-
pli, et votre exactitude est digne d'éloges. Vous
nous arrivez par un temps affreux.
Le vicomte et le baron échangèrent quelques
compliments d'usage, et le voyageur se trouva
sur-le-champ installé et à son aise au coin du
feu du salon, entre son beau-père futur et sa
future épouse.
Ralph avait l'esprit charmmt et léger qui bril-
lait alors à Marly; le baron, en dépit de ses
soixante-dix automnes, était demeuré homme
de cour; Hermine avait la grâce naïve, la dis-
tinction, la pudeur sans pruderie, l'esprit délicat,
d'une jeune fille de qualité élevée pieusement,
mais sans rigidi é aucune.
Certes, la conversation qui s'engagea entre ces
trois personnages ne pouvait avoir ce reflet de
funèbre tristesse qui eût dû résulter des pre-
mières terreurs du vicomte et des étranges récits
du braconnier. Ralph oubliait qu'il se trouvait
en Morvan, à cent lieues de Versailles, dans un
manoir féodal perdu dans les bois, en présence
d'une fiancée qui faisait fuir, épouvantés, tous
ceux qui osaient prétendre à sa main.
On éprouvait, en passant des splendeurs mi-
gnardes et coquettes du boudoir à ce luxe rigide
et sombre, une sort« de réaction morale qui
affligeait Esprit en même temps que les yeux.
Le vicomte la subit ; il eut un frisson ; il se
souvint des prédictions du braconnier, il songea
au mort couché dans sa bière.
Puis, tout à coup, ses yeux, s'étant levés sur
la tapisserie, y rencontrèrent un portrait, celui '
d'une femme, et ils s'y attachèrent avec une
obstination singulière, tandis qu'il éprouvait un
tressaillement bizarre ; c'était un portrait en
pied, dans un grand médaillon, dont la peinture
ne paraissait pas remonter à plus de deux ou
trois années, et qui contrastait ainsi, par sa
fraîcheur, avec les toiles enf m ',es accrochées à
l'entour et représentant les Roche-Noire dé-
funts.
Un lampadaire à trois branches, fiché dms
le mur tout auprès, éclairait ce portrait si par-
faitement qu'on en pouvait saisir tous les,
détails.
Il représentait une jeune fille, un être éblouis-
sant et d'une étrange beauté, — beauté qui sem-
blait éclose aux feux du ciel espagnol, une
tête de démon plus belle qu'une tête d 'aiiïe, avec
de longs cheveux noirs ruisselant'sur des épaules
aux teintes dorées, une bouche entr ouverte où
brillaient des dents blanches et menues, un œil
noir que le peintre avait rendu étincelant.
Cette peinture était si vivante, si parfaite, que
le vicomte crut voir une femme en chair et en
os, et une femme qui lui parut si belle, qu'auprès
d'elle Hermine n'avait plus qu 'un attrait vul-
gaire.
Au-dessous du portrait on avait écrit un nom:
FUI.MEN !
Fulmen, e'est-à-dire la foudre, c'est-à-dire la
i plus belle fille d'Espagne qui eût jamais dansé
le boléro dans les jardins embaumés du vieil
Alhambra.
Les yeux de Ralph s'attachaient obstinément
à cette toile; il oubliait ses hôtes et croyait que
l'image de Fulmen allait lui parler et lui sou-
rire en lui disant:
— C'est moi... moi, dont tu n'as pu voir le vi-
sage ; moi, l'Andalouse du bal masqué...
Le baron s'aperçut sans doute de cette con-
templation,'car il lui dit brusquement:
Allons, mon cher vicomte, à table!
Ces mots rompirent le charme ; les yeux du
vicomte abandonnèrent la toile et se reportèrent
sur Hermine.
Hermine lui parut laide.
— Quel est donc ce portrait? demanda-t-il au
baron.
Mais le baron ne répondit pas ; un nuage
passa sur son front, ft ses sourcils se froncèrent
avec une expression de colère et de douleur mé-
langées, qui jeta le vicomte dans le domaine des
plus bizarres conjectures.
En même temps. Mlle Hermine de Roche-
Noire devenait horriblement pâle et baissait vi-
vement les yeux.
— C'est bien étrange! murmura Ralph. Je
jurerais que c'est elle.
Le souper s'acheva silencieusement. La ques-
tion san ! doute indiscrète du vicomte semblait
avoir jeté un froid glacial entre ces trois person-
nages qui, tout à l'heure, causaient avec aban-
.don dans le joli salen rococo.
Le vicomte ne cessait de regarder le portrait
de Fulmen ; Hermine se taisait; ie baron avait,
à plusieurs reprises, marmoté entre ses dents
"
1 Voir les aumÓroi parus depuis le 12 août.
JOURNAL QUOTIDIEN
ABONNEMENTS — Trois mois. Six mois. Un an.
"Paris .... fr- Bfr. lSfr. -
Départemen^A;G ~ . 11, ':1:1 ££
& cent. le numéro.
5 cent. le numéro,
1 MERCREDI, 15 AOUT 18Gr. — N° 119. 1
BUREAUX D'ABONNEMENT : 24, boulevard des Italiens.
[ ADMINISTRATION : 15, rue Breda.
MORT
AUX
Hannetons
Je chante
le mortel in-
trépide qui
le premier
eut l'audace
de déclarer
au hanneton
une guerre
acharnée et
de mettre sa
. tète à prix.
Il S'ilppf-
lait tiennes
et il était
préfet, mais
Ion gtem p s
avant de
présider
aux destinées
d'un département , il avait été un
des farceurs les plus populaires et les
plus décriés de Paris, au temps de la
Restauration.
La bande à Romieu a laissé dans
la tradition parisienne un souvenir
presque légendaire.
Elle était la bête noire des bourgeois
et la terreur des boutiquiers et des con-
cierges (on disait alors irrévérencieu-
sement: « les portiers»)). M. Prudhom-
me ne se gênait pas pour déclarer que
ces malfaiteurs périraient un jour sur
l'ëchafaud.
P us d'une fois elle eut maille à par-
tir avec la patrouille de nuit, bien
qu'elle ne rossât pas le guet, à l'instar
des roués, ses ancêtres. A franchement
par)er, je ne crois pas que ce fût l'en-
vie qui lui manquât.
0;i composerait un poërne épique
aussi long que la Henriade, et plu;
anmsant, j'aime à le croire, rien qu'e'
rimant et el) alignant bout à bout IPF
prouesses de ces couleurs de cabari L
et d'aventures.
Ça)', il faut bien le dire, ce n'était
guère qu'entre deux vins que ces bo-
hémiens de la fantaisie se livraient à
leur humeur folâtre.
, La génération contemporaine, celle
même qui la suivit, savait par cœur
Grande halte des régiments prussiens Atcxandre no 1 et Reine Elisabeth no 3, sur la route de Brunn Ù. Vienne,
Réquisition de bestiaux dans une forme dos environs de Wilfersdort.
-
eurs équi-
)ées.L'ailo du
temps, qui a
passé sur ces
gaminerie?
d'un autre â-
ge, les a
peut-être un
peu effacées "
de la mémoi-
re des hu-
mains.
Ceux qui
ne les con-
naissent pas
ou qui les
auraient ou-
bliées me
pa rdonne-
ront de lâ-
cher la bride
à ces souve-
nirs d'ou-
tre - tombe.
Laissons à l'écart les anas vulga-
risés par les almanachs:
Comme par exemple :
L'épisode du lampion planté surl'é-
pigastre d'un collègue ivre-mort, his-
toire de signaler aux cochers la pré-
sence d'un écueil sur la voie publi-
que.
La scie infligée à ce pipelet chauve
comme un œuf àla coque, auquel tous
les affiliés de la bande viennent, à la
queue leu leu, demander une mèche
de ses cheveux : la chronique rappor-
te que le pauvre diable en mourut.
La charge de ce digne épicier, à qui tout
en jasant de !a pluie et du beau temps,
Romieu fait couper une chandelle en
deux, en quatre, en huit morceaux ;
les lui fait émécher, aligner, allumer
à la file; après quoi. contemplantsa vic-
time avec une expression de compas-
sion bien sentie:
; « Qllel bête de métier, mon brave
homme.. vous faites là pour six pau-
vres liards ! »
Et il s'esquive laissant l'industriel
tout ébaubi, face à face avec ses huit
bouts de chandelle flambant le long
de son comptoir.
Mais voici, je crois, une anecdote
moins connue.
Un matin qu'il ba.ttait le pavé quœrens
LE REVENANT
HISTOIRE DU TEMPS DE LOUIS XV
PAR
PONSON DU TERRAIL
Suite (1)
Le vieillard était un homme d'environ soixante-
dix ans, de haute taille, vert encore, portant une
magnifique chevelure blanche, sans poudre, le
visage noble et affectueux à la fois, l'œil doux,
la lèvre souriante et fière. Le baron de Roche-
Noire, c'était lui-même, était vêtu comme on
l'était alors à Versailles : il portait un habit
brodé, une veste de soie à grands ramages, une
culotte à faveurs bleues, et des bas blancs bien
tirés sur un mollet irréprochable encore.
La jeune fille pouvait avoir vingt ans; elle
était blonde et blanche comme une madone de
Raphaël; son œil était bleu comme l'azur- du
ciel italien, et ses mains, plus blanches que la
cire vierge, avaient une forme aristocratique,
mignonne et charmante.
Mlle Hermine de Roche-Noire résumait ce
type divin de la femme éclose au pâle soleil du
Nord. A voir sa taill.; frêle et ondoyante, on eût
dit une de ces fleurs délicates qui ne peuvent se
développer que dans une atmosphère tiède et
en un lieu où n'arrivent jamais les brûlantes
ardeurs du Midi.
Du reste, la mise élégante des femmes de
qualité, la poudre, les mouches et les paniers
rehaussaient encore cette beauté merveilleuse,
et le vicomte Ralph, ébloui, s'estima le gentil-
homme le plus heureux du monde, lorsqu'il s'in-
clina devant elle, en songeant qu'il s'inclinait
devant sa fiancée.
— Ah 1 vicomte, dit le baron qui se leva et alla
vivement à lui, vous êtes un gentilhomme accom-
pli, et votre exactitude est digne d'éloges. Vous
nous arrivez par un temps affreux.
Le vicomte et le baron échangèrent quelques
compliments d'usage, et le voyageur se trouva
sur-le-champ installé et à son aise au coin du
feu du salon, entre son beau-père futur et sa
future épouse.
Ralph avait l'esprit charmmt et léger qui bril-
lait alors à Marly; le baron, en dépit de ses
soixante-dix automnes, était demeuré homme
de cour; Hermine avait la grâce naïve, la dis-
tinction, la pudeur sans pruderie, l'esprit délicat,
d'une jeune fille de qualité élevée pieusement,
mais sans rigidi é aucune.
Certes, la conversation qui s'engagea entre ces
trois personnages ne pouvait avoir ce reflet de
funèbre tristesse qui eût dû résulter des pre-
mières terreurs du vicomte et des étranges récits
du braconnier. Ralph oubliait qu'il se trouvait
en Morvan, à cent lieues de Versailles, dans un
manoir féodal perdu dans les bois, en présence
d'une fiancée qui faisait fuir, épouvantés, tous
ceux qui osaient prétendre à sa main.
On éprouvait, en passant des splendeurs mi-
gnardes et coquettes du boudoir à ce luxe rigide
et sombre, une sort« de réaction morale qui
affligeait Esprit en même temps que les yeux.
Le vicomte la subit ; il eut un frisson ; il se
souvint des prédictions du braconnier, il songea
au mort couché dans sa bière.
Puis, tout à coup, ses yeux, s'étant levés sur
la tapisserie, y rencontrèrent un portrait, celui '
d'une femme, et ils s'y attachèrent avec une
obstination singulière, tandis qu'il éprouvait un
tressaillement bizarre ; c'était un portrait en
pied, dans un grand médaillon, dont la peinture
ne paraissait pas remonter à plus de deux ou
trois années, et qui contrastait ainsi, par sa
fraîcheur, avec les toiles enf m ',es accrochées à
l'entour et représentant les Roche-Noire dé-
funts.
Un lampadaire à trois branches, fiché dms
le mur tout auprès, éclairait ce portrait si par-
faitement qu'on en pouvait saisir tous les,
détails.
Il représentait une jeune fille, un être éblouis-
sant et d'une étrange beauté, — beauté qui sem-
blait éclose aux feux du ciel espagnol, une
tête de démon plus belle qu'une tête d 'aiiïe, avec
de longs cheveux noirs ruisselant'sur des épaules
aux teintes dorées, une bouche entr ouverte où
brillaient des dents blanches et menues, un œil
noir que le peintre avait rendu étincelant.
Cette peinture était si vivante, si parfaite, que
le vicomte crut voir une femme en chair et en
os, et une femme qui lui parut si belle, qu'auprès
d'elle Hermine n'avait plus qu 'un attrait vul-
gaire.
Au-dessous du portrait on avait écrit un nom:
FUI.MEN !
Fulmen, e'est-à-dire la foudre, c'est-à-dire la
i plus belle fille d'Espagne qui eût jamais dansé
le boléro dans les jardins embaumés du vieil
Alhambra.
Les yeux de Ralph s'attachaient obstinément
à cette toile; il oubliait ses hôtes et croyait que
l'image de Fulmen allait lui parler et lui sou-
rire en lui disant:
— C'est moi... moi, dont tu n'as pu voir le vi-
sage ; moi, l'Andalouse du bal masqué...
Le baron s'aperçut sans doute de cette con-
templation,'car il lui dit brusquement:
Allons, mon cher vicomte, à table!
Ces mots rompirent le charme ; les yeux du
vicomte abandonnèrent la toile et se reportèrent
sur Hermine.
Hermine lui parut laide.
— Quel est donc ce portrait? demanda-t-il au
baron.
Mais le baron ne répondit pas ; un nuage
passa sur son front, ft ses sourcils se froncèrent
avec une expression de colère et de douleur mé-
langées, qui jeta le vicomte dans le domaine des
plus bizarres conjectures.
En même temps. Mlle Hermine de Roche-
Noire devenait horriblement pâle et baissait vi-
vement les yeux.
— C'est bien étrange! murmura Ralph. Je
jurerais que c'est elle.
Le souper s'acheva silencieusement. La ques-
tion san ! doute indiscrète du vicomte semblait
avoir jeté un froid glacial entre ces trois person-
nages qui, tout à l'heure, causaient avec aban-
.don dans le joli salen rococo.
Le vicomte ne cessait de regarder le portrait
de Fulmen ; Hermine se taisait; ie baron avait,
à plusieurs reprises, marmoté entre ses dents
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