Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-09-14
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 14 septembre 1868 14 septembre 1868
Description : 1868/09/14 (A3,N879). 1868/09/14 (A3,N879).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k47178814
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/10/2017
LA PETITE PRESSE
, ; ,-, - ~, JOURNAL QUOTIDIEN ~ @, 1 Il
li crnt le numéro .
■ . ; ' jr'it i . , , " >
& cent, le numéro
Abonnements. — Trois mois. Six mois. Un an.
Paris , 5 fr. 0 fr: ILS t.
Départements.. 6 1 f 29
Administrateur i Ei DELSAUX. ' ! 1
- «" 1 «nnée. 1 —LUNDI fi SEPTEMBRE 4868. — N' 879
,
1 1 1
I)irOcteur-Propriétai-rtr : JA N ÎÎ y N.
Rédacteur , en chef: A. DE PALATAIER-BRAGELONNE. 1
1 BUREAUX D'ABONNEMENT : e. snte Drouot.
ADMINISTRATION ; 13, place Brada. 1 1. 1
PARIS, 13 SEPTEMBRE 1868
LE BAN DES VENDANGES
Mathieu (de la Nièvre) avait raison. Il^y*
a décidément que les poètes pour annoncer
l'avenir avec cette certitude : vers la fin du
mois d'août il pl-euvral. et la pluie fera gon-
fler les grains des raisins.- Septembre sera
beau, absolument beau, et la pleine lune du 2
amènera des chaleurs pareilles à celles de
juillet ...
Tout s'est passé comme Mathieu l'avait
prédit."
Il y a deux jours les vendanges parisiennes
ont conimi;ncé.
Dès l'aube, 4,300 vendangeurs se pres-
saient sur-la place d'Argenteuil, devant
l'église.
Or les vignerons n'avaient besoin que de
2,000 ouvriers. Les 2,000 Autres ont dù re-
partir, mais la municipalité, équitable et libé-
rale, leur a fait distribuer à chacun un bon de
pain et un sou pour le péage du pont...
Partout on vendango.
• •
A Rome, une longue file de voitures, char-
gées de vignerons et de vigneronnes couron-
nés de pam lires, s'avance le long des fau-
bourgs, précédée et .suivie par des bandes de
masques, qui marchent eu cadence aox sons
d'une musique champêtre.
Dans la bourgogne et le Bordelais, les
grandes tables se couvrent de platées rabe-
laisiennes de citrouilles et de riz; les jam-
bons montrent leurs flancs rouges; les gigots
fument d;uis les plats de faïence sur lesquels
sont peints des coqs et dos papillons. Puis, ce
sont les rouges-bords; la grosse gaiite, les
baisers qui retentissent sur les joues, les
chansons qu'accompagne le bruit des serpes
contre les verres, la danse dans la grange ou
sur le sol battu de l'aire, avec la vielle de Bo-
aaventure ou la musette de Denis.
Les vendanges sont la grande fête des cam-
pagnes gauloises. Déranger, le (oëte .qui,
■quoi qu'on en dise, est le plus près du peuple
par le sentiment, a fait chanter les vendanges
par les oiseaux :
Mais l'émeute est au village.
.Mille oiseau*, dans., ces tilleuls»,
.©isent. ■— L'on met au pillage
v -.;ï|e que Dieu fit pour .nous seuls. ,. .,
^Vq'yageurs privés d'étapes,
.. i). 3$$us allons de mal en pis :
aujourd'hui l'on prend les grappes;
^-. Hier, c'étaient les épis.
Des hommes, troupe assouvie,
Ont terres et revenus; '
Les autres glanent leur vie,
Le dos courbé, les pieds nus.
Pauvres gens, vous qu'on dédaigne, -
Vite, aux armes! Vengez-vous.
Nous chanterons votre régne r
Les raisins seront pour nous...
Je vous ai déjà raconté les vendanges du
Maçonnais.
Là-bas aussi, il y a une bourse bruyante et
gaie comme celle d'Argenteuil.
'Du Charolais, où il n'y a que des prés et
des bois, de la Bresse, où il n'y a que des
champs de blé et des marais, arrivent, par
bandes, de bonnes gens, désireux de louer
leurs brefs aux vignerons surchargés de be-
sogne.
Hommes, femmes, enfants, se réunissent
de trois à quatre heures du matin sur une
place de la ville, avec les seiltes et les serpes,
emblèmes de leur profession.
Surviennent les vignerons. On débat les
prix. •
Si la récolte est abondante, nos vendan-
geurs sont exigeants ; si elle est mauvaise,
ils sont bien forcés de rabattre de leurs pré-
tentions.
Enfin, le marché est conclu ; on part.
N'z allons en vendange
Pour gagner cinq sous,
Coucher sur la paiile,
Ramasser des p.ous...
Sur pions, les voix traînent. L'effet est
très-grand.
Mais c'est du ban des vendanges que je
veux vous parler aujourd'hui.
Ban est un vieux mot germain qui signifie
proclamation, publication, mandement. On
l'emploie dans le même sens en Allemagne,
en Danemark, en Angleterre et en France.
L'histoire est pleine de bans de toute sorte.
1 Le plus curieux est peut-être celui de l'au-
mônier de Saint-Loui*, s'adressant aux habi-
tants de Tunis au début de la dernière croi-
sade: -
« — Je vous dis le ban de Notre Seigneur
Jésus-Christ et de Louis, roi de France, son
sergent.-
LOJ;pque le souverain convoquait ses vas-
saux pour une expédition militaire, on disait
qu'il levait ou convoquait le ban.
Lisez Michelet:
« Le ban et l'arrière-ban est un appel fait
en cas deguerre à la totalité des vassaux, ceux
qui relèvent directement de la couronne, et les
petits qui relèvent seulement des grands.Jean
était à la tète de la grande cohue féodale du
ban et de l'arrière-ban qui faisait bien cin-
quante mille hommes. »
Les trois bans de mariage, prescrits par 1*
concile de Trente, sont demeurés en usage ;
et l'on dit encore qu'un individu est en rup- j
ture de ban, lorsqu'il essaie de se soustraire
à la surveillance de la police sous laquelle il
a été placé.
Avant 4789, il y avait des bans pour fixer
les dates de la fauchaison, de la moisson et
des vendanges.
Certes, le blé et les raisins, cueillis à point,
font de meilleure farine et de meilleur vin
que cueillis : trop tô'. Mais tel n'était pas le
but de cet ancien usage. Si l'on vent en trou-
ver la raison, il faut la chercher dans la faci-
lité de percevoir, dans un délai déterminé, la
dime et les droits seigneuriaux.
L'excellent Dictionnaire de Pierre Larousse
donne, d'après un travail de M. Guérin, tous
les détails de notre aitfien ban de ven-
danges.
En Bourgogne, ce ban était d'une extrême
importance.
« A Beaune, au jour fixé, les maires et les
échevins se rendaient de grand matin à l'é-
glise Saint-Etienne, et,.à l'issue de la messe,
le trompette de la ville proclamait le ban des
vendanges. Cette coutume fut suivie jusqu'à
la Révolution. Les mêmes pratiques s'obser..
vaient à Dijon, mais avec tout le cérémonial
dont les magistrats aimaient à entourer les
actes de la justice municipale. Chaque année,
le 10 août, jour de la Saint-Laurent, au ma-
tin, le vicomte-mayeur se rendait en grand
appareil à l'église Saint-Philibert. Après la
Blesse, il prenait place sous le portait et reoo.
vait le serment de ceux que lès jurés-vigne-
rons, ou les seigneurs ayant cette faculté lui
présentaient pour exercer les fonctions de
vigniers. Ceux-ci percevaient, au quinzième
siècle, un denrer pour chaque ouvrée confiéa V
à leur garde.
» Aux approches de la vendange, la mairie
envoyait secrètement ces mêmes jurés con-
stater la maturité du raisin, et, sur leur rap-
port, fixait le Mandes vendanges. Ce ban n'ou-
vrait jamais le dimanche, non plus qu'un
autre jour férié. Lors de la proclamation du
ban, qui était présidée partout, par le maire,
ce magistrat recevait des vigniers un pain, du
vin, une frottée d'ail et de sel, et il faisait
distribuer à l'assistance une immense tarte,
aux acclamations de la foule.
» Mais de ce que la proclamation était faite,
il ne s'ensuivait pas que tout propriétaire eût
le droit de vendanger, même en se confor-
mant au ban. Longtemps une dernière for-
malité fut indispensable'. A l'aube de chacun
des jours fixés pour la récolte, 'Je vicomte
mayeur, entouré de ses sergents portant des
torches, se rendait sur la place où étaient
rassemblés les vendangeurs et les charretiers^
Là, il procédait à Yabandonnement du-ban,
c'est-à-dire que le trompette de la viHe, après
avoir sonné trois fois, criait le point du terri- t
toire qui devait être vendangé le jour même ;
après quoi, chacun arrêtait les tràvailleurs et
partait avec eux.
.b Chaque arrêté de banétait invariablement
suivi d'une ordonnance de police, souventho»
mologuée par le parlement. Ainsi, par exem-
ple, celui qui vendangeait en dehors du ban -
risquait une forte amende, l'emprisonnement
de son closier, l'expulsion des vendangeurs
et quelquefois la confiscation de la récolte. Il
en était de même de celui qui l uait ses ven-
dangeurs avant j'abandonnement du ban. Les
travailleurs qui se rendaient coupables du
même délit, ceux qui étaient nantis de plus
d'un couteau,étaientemprisonnés et perdaient
Jeurs journées. Une punition plus grave était
infligée à ceux qui voulaient dépasser le tarif
arrêté à l'avance par les magistrats.
iD La vente du raisin en détail demeurait in-
terdite, ainsi que le grappillage, avant l'expi-
ration des quinze jours qui suivaient la ven-
dange. »
La Révolution, qui affranchissait le sol, af
LA
FEMME IMMORTELLE
mess=""88 PAR
PONSON DU TERRAIL
DEUXIÈME PARTIE
II
Tandis que le président Boisfleury se mettait
sen tête de retrouver le marquis de la Roche-
Maubert, .celui-ci ressemblait fort à ces bêtes
fauves qui tournent satis relâche dans leur cage,
> espérant toujours trouver"une issue.
Du reste, comme on a pu le voir, le marquis
était dans une cage. •
Mais comment y était. il ?
D'une façon bien simple, si on se reporte à
Voix les numéros .parus depuis le 21 juin.
UÙ —
ce moment où le marquis poursuivait Janine:
dans un étroit corridor, et ivre d'amour et de
fureur, essayait de la rejoindre.
On s'en souvient, le sol avait tout à coup
manqué sous ses pieds.
Puis il avait jeté un cri terrible ; puis le che-
valier d Esparron et Janine n'avaient plus rien
entendu.
Voici ce qui était arrivé.
A un certain endroit du corridor, le sol fai-
sait place à une dalle tournante pareille à celles
qui recouvraient les oubliettes. - ! . •
La dalle avait fui sous le pied du marquis, et
le marquis s'était senti précipité dans un abîme
inconnu. m
Cela avait été l'affaire d'un quart de seconde
pendant lequel le marquis limant dans les
ténèbres s'était cru mort. v
Mais au lieu de tomber sur des rochers ai-
gus, des piques ou- des lames de sabre, meubles
ordinaires des oubliettes^au lieu de rencontrer
dans sa chute un soldur sur lequel il se serait
brisé comme, verte, le marquise était tombé dans
l'eau. s.> it- •'
Une sensation de froid succédant à cètte an-
goisse terrible avait été accueillie par lui comme
un bienfait inexprimable....
Non-seulement, il .ne. g'étaitpas tué, mais en-
core la fraîcheur de l'eau calmait son exalta
tion.
Il s'était mis à nager. *
L'obscurité la plus profonda l'enveloppait, et
il pensa qu'il était tombé dans une citerne ou
dans un puits.
En effet, ayant voulu aller droit devant lui, il
s'était heurté à un mur; pui:!, revenant en ar-
rière, il en avait rencontré un autre, et enfin, il
avait bientôt acquis la conviction qu'il était bien
dans une citerne.
Mais comment en sortir?
Pendant une heure environ, il se soutint sur
l'eau, tantôt nageant avec vigueur, palpant les
murs et cherchant une porto, tantôt faisant la
planche et n'espérant plus son salut que du
hasard..
Puis l'épouvante et l'angoisse Pavaient repris
à la gorge. Cette eau g!acée dar)s laquelle il
était tombé était un raffinement de supplice et
il devait finir par se noyer, si o.vna venai.t pa$
àsonaide. ; '" ,
Tout à coup, il se passa une chose étrange.
Le margrave crut sentir que l'eau fuyait sous
lui et que son niveau s'abaissait.
La citerne se vidait. lentement par quelque
soupape subitement ouverte..,f
Elle se vidait lentement, il est vrai, et, cela
pouvait durer assez longtemps pour que le mar-
grave épuisé se noyât ; mais l'instinct de la co Il;
servation et peut-être la soif de delà vengeanca
lui donnèrent une vigueur nouvelle.
Il nagea encore, il nagea lon^jimps jusqu'à
ce que, épuisé, il fermât les yeux et ,,s'évanou.it.
Mais ses pieds avaient enfin trouvé le jlol de
la citerne et il ne resta pas trois minutes, sous
l'eau, car l'eau s'échappant jusqu'à la dernière
goutte, le laissa inanimé, mais vivant.
Et lorsque M. de la Roche-Maubert revint à
lui, il était dans ce cachot donnant sur un esca-
lier souterrain dont il était séparé par un treil-
lage de barreaux de fer de l'épai--setir du bras
et s'enchevètrant les uns dans les autres.
Qn lui ay^iç, mis d'autres vêtements et il n'é-
tait plus mouillé, à ce point qu'il aurait pu
croire qu'il avait fait un mauvais ,rève . r, < ,
Un homme, de l'autre côté de la cage, était
assis sur une des marches de l'esMlier i ayant un
flambeau auprès de lui.
M. de la Roche-Maubert l'avait regardé avec
effarement.....u-v
Puis il l'avâit reconnu. , ■' - - «
Et pris d'une fureur subite il s'était rué sur
les barreaux de sa prison.
Mais le chevalier s'était mis à rire. ; . ■,
Puis il lui avait dit en souriant *.
— Monsieur le marquis^ vous m'acco r derez
■ cette justice que j'ai opposé toutes sortçe 4® V&
, ; ,-, - ~, JOURNAL QUOTIDIEN ~ @, 1 Il
li crnt le numéro .
■ . ; ' jr'it i . , , " >
& cent, le numéro
Abonnements. — Trois mois. Six mois. Un an.
Paris , 5 fr. 0 fr: ILS t.
Départements.. 6 1 f 29
Administrateur i Ei DELSAUX. ' ! 1
- «" 1 «nnée. 1 —LUNDI fi SEPTEMBRE 4868. — N' 879
,
1 1 1
I)irOcteur-Propriétai-rtr : JA N ÎÎ y N.
Rédacteur , en chef: A. DE PALATAIER-BRAGELONNE. 1
1 BUREAUX D'ABONNEMENT : e. snte Drouot.
ADMINISTRATION ; 13, place Brada. 1 1. 1
PARIS, 13 SEPTEMBRE 1868
LE BAN DES VENDANGES
Mathieu (de la Nièvre) avait raison. Il^y*
a décidément que les poètes pour annoncer
l'avenir avec cette certitude : vers la fin du
mois d'août il pl-euvral. et la pluie fera gon-
fler les grains des raisins.- Septembre sera
beau, absolument beau, et la pleine lune du 2
amènera des chaleurs pareilles à celles de
juillet ...
Tout s'est passé comme Mathieu l'avait
prédit."
Il y a deux jours les vendanges parisiennes
ont conimi;ncé.
Dès l'aube, 4,300 vendangeurs se pres-
saient sur-la place d'Argenteuil, devant
l'église.
Or les vignerons n'avaient besoin que de
2,000 ouvriers. Les 2,000 Autres ont dù re-
partir, mais la municipalité, équitable et libé-
rale, leur a fait distribuer à chacun un bon de
pain et un sou pour le péage du pont...
Partout on vendango.
• •
A Rome, une longue file de voitures, char-
gées de vignerons et de vigneronnes couron-
nés de pam lires, s'avance le long des fau-
bourgs, précédée et .suivie par des bandes de
masques, qui marchent eu cadence aox sons
d'une musique champêtre.
Dans la bourgogne et le Bordelais, les
grandes tables se couvrent de platées rabe-
laisiennes de citrouilles et de riz; les jam-
bons montrent leurs flancs rouges; les gigots
fument d;uis les plats de faïence sur lesquels
sont peints des coqs et dos papillons. Puis, ce
sont les rouges-bords; la grosse gaiite, les
baisers qui retentissent sur les joues, les
chansons qu'accompagne le bruit des serpes
contre les verres, la danse dans la grange ou
sur le sol battu de l'aire, avec la vielle de Bo-
aaventure ou la musette de Denis.
Les vendanges sont la grande fête des cam-
pagnes gauloises. Déranger, le (oëte .qui,
■quoi qu'on en dise, est le plus près du peuple
par le sentiment, a fait chanter les vendanges
par les oiseaux :
Mais l'émeute est au village.
.Mille oiseau*, dans., ces tilleuls»,
.©isent. ■— L'on met au pillage
v -.;ï|e que Dieu fit pour .nous seuls. ,. .,
^Vq'yageurs privés d'étapes,
.. i). 3$$us allons de mal en pis :
aujourd'hui l'on prend les grappes;
^-. Hier, c'étaient les épis.
Des hommes, troupe assouvie,
Ont terres et revenus; '
Les autres glanent leur vie,
Le dos courbé, les pieds nus.
Pauvres gens, vous qu'on dédaigne, -
Vite, aux armes! Vengez-vous.
Nous chanterons votre régne r
Les raisins seront pour nous...
Je vous ai déjà raconté les vendanges du
Maçonnais.
Là-bas aussi, il y a une bourse bruyante et
gaie comme celle d'Argenteuil.
'Du Charolais, où il n'y a que des prés et
des bois, de la Bresse, où il n'y a que des
champs de blé et des marais, arrivent, par
bandes, de bonnes gens, désireux de louer
leurs brefs aux vignerons surchargés de be-
sogne.
Hommes, femmes, enfants, se réunissent
de trois à quatre heures du matin sur une
place de la ville, avec les seiltes et les serpes,
emblèmes de leur profession.
Surviennent les vignerons. On débat les
prix. •
Si la récolte est abondante, nos vendan-
geurs sont exigeants ; si elle est mauvaise,
ils sont bien forcés de rabattre de leurs pré-
tentions.
Enfin, le marché est conclu ; on part.
N'z allons en vendange
Pour gagner cinq sous,
Coucher sur la paiile,
Ramasser des p.ous...
Sur pions, les voix traînent. L'effet est
très-grand.
Mais c'est du ban des vendanges que je
veux vous parler aujourd'hui.
Ban est un vieux mot germain qui signifie
proclamation, publication, mandement. On
l'emploie dans le même sens en Allemagne,
en Danemark, en Angleterre et en France.
L'histoire est pleine de bans de toute sorte.
1 Le plus curieux est peut-être celui de l'au-
mônier de Saint-Loui*, s'adressant aux habi-
tants de Tunis au début de la dernière croi-
sade: -
« — Je vous dis le ban de Notre Seigneur
Jésus-Christ et de Louis, roi de France, son
sergent.-
LOJ;pque le souverain convoquait ses vas-
saux pour une expédition militaire, on disait
qu'il levait ou convoquait le ban.
Lisez Michelet:
« Le ban et l'arrière-ban est un appel fait
en cas deguerre à la totalité des vassaux, ceux
qui relèvent directement de la couronne, et les
petits qui relèvent seulement des grands.Jean
était à la tète de la grande cohue féodale du
ban et de l'arrière-ban qui faisait bien cin-
quante mille hommes. »
Les trois bans de mariage, prescrits par 1*
concile de Trente, sont demeurés en usage ;
et l'on dit encore qu'un individu est en rup- j
ture de ban, lorsqu'il essaie de se soustraire
à la surveillance de la police sous laquelle il
a été placé.
Avant 4789, il y avait des bans pour fixer
les dates de la fauchaison, de la moisson et
des vendanges.
Certes, le blé et les raisins, cueillis à point,
font de meilleure farine et de meilleur vin
que cueillis : trop tô'. Mais tel n'était pas le
but de cet ancien usage. Si l'on vent en trou-
ver la raison, il faut la chercher dans la faci-
lité de percevoir, dans un délai déterminé, la
dime et les droits seigneuriaux.
L'excellent Dictionnaire de Pierre Larousse
donne, d'après un travail de M. Guérin, tous
les détails de notre aitfien ban de ven-
danges.
En Bourgogne, ce ban était d'une extrême
importance.
« A Beaune, au jour fixé, les maires et les
échevins se rendaient de grand matin à l'é-
glise Saint-Etienne, et,.à l'issue de la messe,
le trompette de la ville proclamait le ban des
vendanges. Cette coutume fut suivie jusqu'à
la Révolution. Les mêmes pratiques s'obser..
vaient à Dijon, mais avec tout le cérémonial
dont les magistrats aimaient à entourer les
actes de la justice municipale. Chaque année,
le 10 août, jour de la Saint-Laurent, au ma-
tin, le vicomte-mayeur se rendait en grand
appareil à l'église Saint-Philibert. Après la
Blesse, il prenait place sous le portait et reoo.
vait le serment de ceux que lès jurés-vigne-
rons, ou les seigneurs ayant cette faculté lui
présentaient pour exercer les fonctions de
vigniers. Ceux-ci percevaient, au quinzième
siècle, un denrer pour chaque ouvrée confiéa V
à leur garde.
» Aux approches de la vendange, la mairie
envoyait secrètement ces mêmes jurés con-
stater la maturité du raisin, et, sur leur rap-
port, fixait le Mandes vendanges. Ce ban n'ou-
vrait jamais le dimanche, non plus qu'un
autre jour férié. Lors de la proclamation du
ban, qui était présidée partout, par le maire,
ce magistrat recevait des vigniers un pain, du
vin, une frottée d'ail et de sel, et il faisait
distribuer à l'assistance une immense tarte,
aux acclamations de la foule.
» Mais de ce que la proclamation était faite,
il ne s'ensuivait pas que tout propriétaire eût
le droit de vendanger, même en se confor-
mant au ban. Longtemps une dernière for-
malité fut indispensable'. A l'aube de chacun
des jours fixés pour la récolte, 'Je vicomte
mayeur, entouré de ses sergents portant des
torches, se rendait sur la place où étaient
rassemblés les vendangeurs et les charretiers^
Là, il procédait à Yabandonnement du-ban,
c'est-à-dire que le trompette de la viHe, après
avoir sonné trois fois, criait le point du terri- t
toire qui devait être vendangé le jour même ;
après quoi, chacun arrêtait les tràvailleurs et
partait avec eux.
.b Chaque arrêté de banétait invariablement
suivi d'une ordonnance de police, souventho»
mologuée par le parlement. Ainsi, par exem-
ple, celui qui vendangeait en dehors du ban -
risquait une forte amende, l'emprisonnement
de son closier, l'expulsion des vendangeurs
et quelquefois la confiscation de la récolte. Il
en était de même de celui qui l uait ses ven-
dangeurs avant j'abandonnement du ban. Les
travailleurs qui se rendaient coupables du
même délit, ceux qui étaient nantis de plus
d'un couteau,étaientemprisonnés et perdaient
Jeurs journées. Une punition plus grave était
infligée à ceux qui voulaient dépasser le tarif
arrêté à l'avance par les magistrats.
iD La vente du raisin en détail demeurait in-
terdite, ainsi que le grappillage, avant l'expi-
ration des quinze jours qui suivaient la ven-
dange. »
La Révolution, qui affranchissait le sol, af
LA
FEMME IMMORTELLE
mess=""88 PAR
PONSON DU TERRAIL
DEUXIÈME PARTIE
II
Tandis que le président Boisfleury se mettait
sen tête de retrouver le marquis de la Roche-
Maubert, .celui-ci ressemblait fort à ces bêtes
fauves qui tournent satis relâche dans leur cage,
> espérant toujours trouver"une issue.
Du reste, comme on a pu le voir, le marquis
était dans une cage. •
Mais comment y était. il ?
D'une façon bien simple, si on se reporte à
Voix les numéros .parus depuis le 21 juin.
UÙ —
ce moment où le marquis poursuivait Janine:
dans un étroit corridor, et ivre d'amour et de
fureur, essayait de la rejoindre.
On s'en souvient, le sol avait tout à coup
manqué sous ses pieds.
Puis il avait jeté un cri terrible ; puis le che-
valier d Esparron et Janine n'avaient plus rien
entendu.
Voici ce qui était arrivé.
A un certain endroit du corridor, le sol fai-
sait place à une dalle tournante pareille à celles
qui recouvraient les oubliettes. - ! . •
La dalle avait fui sous le pied du marquis, et
le marquis s'était senti précipité dans un abîme
inconnu. m
Cela avait été l'affaire d'un quart de seconde
pendant lequel le marquis limant dans les
ténèbres s'était cru mort. v
Mais au lieu de tomber sur des rochers ai-
gus, des piques ou- des lames de sabre, meubles
ordinaires des oubliettes^au lieu de rencontrer
dans sa chute un soldur sur lequel il se serait
brisé comme, verte, le marquise était tombé dans
l'eau. s.> it- •'
Une sensation de froid succédant à cètte an-
goisse terrible avait été accueillie par lui comme
un bienfait inexprimable....
Non-seulement, il .ne. g'étaitpas tué, mais en-
core la fraîcheur de l'eau calmait son exalta
tion.
Il s'était mis à nager. *
L'obscurité la plus profonda l'enveloppait, et
il pensa qu'il était tombé dans une citerne ou
dans un puits.
En effet, ayant voulu aller droit devant lui, il
s'était heurté à un mur; pui:!, revenant en ar-
rière, il en avait rencontré un autre, et enfin, il
avait bientôt acquis la conviction qu'il était bien
dans une citerne.
Mais comment en sortir?
Pendant une heure environ, il se soutint sur
l'eau, tantôt nageant avec vigueur, palpant les
murs et cherchant une porto, tantôt faisant la
planche et n'espérant plus son salut que du
hasard..
Puis l'épouvante et l'angoisse Pavaient repris
à la gorge. Cette eau g!acée dar)s laquelle il
était tombé était un raffinement de supplice et
il devait finir par se noyer, si o.vna venai.t pa$
àsonaide. ; '" ,
Tout à coup, il se passa une chose étrange.
Le margrave crut sentir que l'eau fuyait sous
lui et que son niveau s'abaissait.
La citerne se vidait. lentement par quelque
soupape subitement ouverte..,f
Elle se vidait lentement, il est vrai, et, cela
pouvait durer assez longtemps pour que le mar-
grave épuisé se noyât ; mais l'instinct de la co Il;
servation et peut-être la soif de delà vengeanca
lui donnèrent une vigueur nouvelle.
Il nagea encore, il nagea lon^jimps jusqu'à
ce que, épuisé, il fermât les yeux et ,,s'évanou.it.
Mais ses pieds avaient enfin trouvé le jlol de
la citerne et il ne resta pas trois minutes, sous
l'eau, car l'eau s'échappant jusqu'à la dernière
goutte, le laissa inanimé, mais vivant.
Et lorsque M. de la Roche-Maubert revint à
lui, il était dans ce cachot donnant sur un esca-
lier souterrain dont il était séparé par un treil-
lage de barreaux de fer de l'épai--setir du bras
et s'enchevètrant les uns dans les autres.
Qn lui ay^iç, mis d'autres vêtements et il n'é-
tait plus mouillé, à ce point qu'il aurait pu
croire qu'il avait fait un mauvais ,rève . r, < ,
Un homme, de l'autre côté de la cage, était
assis sur une des marches de l'esMlier i ayant un
flambeau auprès de lui.
M. de la Roche-Maubert l'avait regardé avec
effarement.....u-v
Puis il l'avâit reconnu. , ■' - - «
Et pris d'une fureur subite il s'était rué sur
les barreaux de sa prison.
Mais le chevalier s'était mis à rire. ; . ■,
Puis il lui avait dit en souriant *.
— Monsieur le marquis^ vous m'acco r derez
■ cette justice que j'ai opposé toutes sortçe 4® V&
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