Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-07-12
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 12 juillet 1868 12 juillet 1868
Description : 1868/07/12 (A3,N815). 1868/07/12 (A3,N815).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717817z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/10/2017
LA PETITE PRESSE
5 CUit. le numéro JOURNAL QÏ70TJDTEN S c:luL le mimer»
ï
ABONNEMENTS. — Trois mois. Sii-mois. Un an.
Paris 5 fr. 9 fr. 19 fr.
Départements.. 6-11 99
Administrateur : E. Delsàux. ~
I
v™ année. — DIMANCHE 12 JUJJEXET 18G8. — N* 815
I
Dircctew - r'l'"prirtai rc : J :\ N N 1 N.
Rédacteur en chef : A. DE B.v lattu ïr-Bragelom ne.
~ BUREAUX d'abonnement : 9. rue Orouol.
Administration '. 13. place Breda.
PARIS, 11 JUILLET 1868
LES ABEILLES
Le verger est en pente, surleversant d'ùne^
tolline qui regarde le Rhône. Krf^sv%û^pe-
tit. ruisseau entretient la fraîchetu^de
Un mur, au nord, protége contre le tsntTes
niches alignées; et le -poète, à l'ombre des
arbres fruitiers, — le regard fixé sur les
grands horizons pleins de lumière, — entend
dans le silence de la campagne le bourdonne-
ment familier des abeilles. qui lui rappelle
Virgile et le pasteur Aristée. Il invoqué la
muse latine, et cette dernière se présente,
vêtue d'une robe de laine aux plis droits, le
front couronné d'épis, un bouquet de fleurs
des champs dans la main, simple et belle
comme la nature.
— Chante, lui dit-elle, le fleuve retentis-
:-:ant,les coteaux aux lignes harmonieuses, les
frissons éclatants du soleil sur la campagne
et les ombres mystérieuses du soir. Chante
aussi le laboureur au travail fécond et les
animaux domestiques qui forment son cor-
tège, le bœuf* lourd, l'âne patient, l'abeille
industrieuse!..
La saison de la moisson est aussi la saison
des abeilles. Quand l'homme abat les blés,
elles se posent sur les fleurs. Armées d'un
aiguillon pour se défendre, pourvues d'une
trompe pour recueillir le miel.
deux estomacs qui, non-seulement digèrent,
mais encore préparent, elles partent de la
ruche pour se livrer au travail de l'été. Avec
les brosses qui garnissent leurs longues
pattes postérieures, elles ramassent la pous-
sière des fleurs en deux petites boules qu'elles
font entrer de force dans les palettes trans-
versales ou cuillerons dont sont extérieure-
ment creusés la jambe et le premier article
des tarses de derrière. Les pattes chargées de
ces poussières rouges, jaunes, vertes ou
, blanches, suivant la nature des plantes, elles
:,'envolent vers la ruche. Là, elles composent
avec leur récolte la bouillie dont elles nour-
rissent les larves. '
Il faut lire dans l'Encyclopédie de Famille,
publiée par la maison Didot, le chapitre des
Abeilles :
j « Elles se nourrissent de nqu!des végétaux, ]
et principalement de liqueurs sucrées. C'est
du nectar des plantes qu'elles retirent, au
i moyen de leur trompe, un suc qui sera bien-
tôt converti en miel ; et c'est principalement
celui qui est contenu dans certaines glan-
as de fleurs désignées par les botanistes sous
nom général de nectaire, qu'elles retirent
\ humeur sucrée. Elles avalent d'abord ce li-
quide, qui transformé dans leur estomac,
devient, lorsque j'abeille dégorge ce suc, un
véritable miel, dont elles se nourrissent sui-
vant leurs besoins. L'excédant est déposé
dans les alvéoles vides,dont les parois ne per- !
mettent pas la transudation, et qui sont for-
mées d'un opercule ou petite porte de cire
fermée hermétiquement, — pour n'être ou- i
verte que lorsque les besoins impérieux et j
l'impossibilité de trouver de la nourriture ail-
leurs forceront d'avoir recours à ces provi-
sions.... La cire n'est autre chose que la ma-
tière sucrée, altérée par la digestion dans le
second estomac et expulsée, soit par les an-
neaux, soit par la bouche des abeilles.... »
Je vous l'ai déjà dit plusieurs fois, chers
lecteurs, ce qu'on est convenu d'appeler l'état 1
de nature est un état contre nature. Et la
raison en est bien simple, c'est que l'instinct
i de l'homme le-pousse à vivre en société. S'il
en fallait une preuve tirée de l'histoire natu- î
relie, on la trouverait dans les divers, gou- I
vernements organisés par les animaux.
Ainsi, les fourmis sont constituées en, répu-
blique, avec un conseil supérieur permanent
-®t-uoe>assemblèe repcàsentative,qui atul1éimit
dans les grandes occasions, à peu près comme
cela se passe en Suisse.
Les termites, qu'un discours de M. Eugène
Pelletan a rendus célèbres, se gouvernent à
peu près comme les anciens Spartiates: en
haut, liberté et égalité pour tous les citoyens;
en bas, esclavage pour les vaincus.
Les abeilles sont monarchistes. Chez elles,
le pouvoir royal est absolu. Pas de grand
vizir (M. Emile Ollivier serait content). Pas de
ministres , pas de chambre législative , pas
d'avocats.
Seulement la loi salique est renversée et
les mâles sont exclus du trône. Les savants
disent la Reine, mais ils disent aussi la Mère.
Ce qu'il y a de certain, c'est que la souve-
raine est bonne pour ses sujets, et cela justi-
fie sa souveraineté.
Un de mes confrères de la province, M. An-
toinféBoudin, a décrit, ces jours-ci, le royaume
des Abeilles, dans le feuilleton du Mémorial
de là Loire :
«Sitôt la reine trépassée ou partie, le peu-
ple ae met en quête d'une nouvelle souve-
raine. Il la choisit encore dans l'embryon, au
fond son humble cellule, dont il agrandit
les Proportions pour lui donner un berceau
digaè d'elle.
En moins de trois semaines, la future Ma-
jest,.passe successivement de l'état d'oeuf im-
per&ptible, à celui de nymphe et enfin d'a-
beillè parfaite.
Labour qu'elle rompt sa prison de cire, elle
apparaît dans tout l'éclat de sa force et de sa
triomphante beauté.
Aussitôt le peuple ravi se groupe autour
d'elle avec des trépignements de pieds et des
bruissements d'ailes sonores. C'est la céré-
monie de la proclamation officielle. La Reine
est morte, vive la Reine!...
Pendant plus de quatre heures, c'est un va
et vîMt incessant dans la ruche; tout y est
bouifijoanement et joyeux murmures. Le tra-
vail îpfme; la nation est en liesse.
LÍ Nouvelle reine, après avoir reçu les hom-
ma maite - e tous, commence à parcourir ses dô-
malt, suivie d'une escorte de courtisans
qui a^pipressent à la servir. Ceux-ci lui ap-
port ent le meilleur miel qu'on a mis en ré-
serve pour sa table; ceux-là brossent sa taille;
d'autres sèchent et lustrent ses ailes, tous
S'inclinent respectueusement sur son pas-
sagè. :iî
La Heine des abeilles a un aspect particulier
et des allures à elle qui la font immédiate-
menfaaeconnaître. Elle est un tiers plus lon-
gue que ses sujettes, son corsage est plus élé-
gant, ses mouvements plus nobles, sa dé-
marche plus grave. Les couleurs de ses an-
neaux sont d'un jaune clair et ses ailes
effilées, ont une transparence spéciale. Du
reste, où qu'elle aille; elle est toujours suivie
d'un flot de peuple qui signale aux yeux les
moins exercés, la partie de ses états qu'elle
honore de sa présence... »
M. Boudin voit poétique, et les choses, si
j'en crois l'histoire impartiale, ne se passent
tout à fait ainsi.
Chaque essaim, composé de vingt mille
abeilles, communes ou ouvrières, et de seize
cent mâk'à ou faux bourdons, a bien, en effet,
une reine. Mais cette reine, qui est une bonne
mère, est aussi une mauvaise sœur. Elle hé-
rite du trône, parce qu'elle est née la première
Or, son premier soin, aussitôt qu'elle est
née, est de tuer dans leurs larves toutes les
sœurs qui pourraient lui disputer le pouvoir.
Deux reines jumelles sortent-elles en même
temps de l'alvéole, elles se livrent aussitôt un
combat à outrance, dans lequel l'une des deux
doit succomber. Le meurtre et la guerre ci-
vile président donc là, comme chez les nations
barbares, à l'avénement des dynasties.
La reine des abeilles, suivant l'usage des
familles souveraines, choisit son prince con-
joint à l'étranger. Mais ce jeune seigneur
reste banni des états de sa femme. Quant aux
mâles de la ruche, icoglans fainéants et stu-
pides, ils vivent à l'orientale, laissant tra-
vailler les abeilles, pillant les rayons en leur
absence, et digérant au soleil avec un bour-
donnement rêveur. Seulement, quand vient
l'hiver, justice est faite. Les abeilles, qui
s'aperçoivent que la ruche n'est pas assez
riche pour nourrir les bouches inutiles, ies
saisissent,les garrottent et les tuent.
Ce petit peuple primitif est, du reste, sans
pitié pour ses ennemis. Qu'une souris ou
qu'un papillon de nuit pénètrent dans la
ruche, ils feront sans doute des victimes ;
mais ils finiront par succomber, et les natura-
listes les trouveront enterrés et mastiqués au
fond de la ruche, dans un tombeau de cire.
La piqûre des abeilles est extrêmement dou-
loureuse. Si elle ne tue pas toujours, du moins
donne-t-elle la fièvre. A la campagne, les en-
fants piqués lavent leur blessure avec du lait.
Le docteur Robert-Latour recommande l'ap-
plication d'une couche de collodion, rendue
élastique par l'addition d'un dixième d'huile
de ricin.....
Je voudrais qu'il me restât plus de place,
afin de vous raconter le départ et le voyage
des essaims. Aussitôt la nouvelle reine instal-
lée, la vieille reine, à la tête d'un certain
nombre des sujets de la ruche devenus trop
nombreux,part pour chercher un nouvel asik.
La colonie errante, lorsqu'elle est fatiguée,
s'arrête' sur une branche d'arbre, sur laquelle
les insectes forment une espèce de grappe, en
se cramponnant les uns aux autres au moyen
de leurs pattes.
LA
FEMME IMMORTELLE
mess=""22 PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA MAISON ENCHANTÉE
XXIII
; Conrad reprit :
— Mon père était dévoué au prince, malgré
ses crimes et son mauvais naturel.
D'ailleurs il était devenu son complice dans la
mystérieuse existence qu'ils menaient depuis
près de deux ans. il - - / . -
Par conséquent, il ne repoussa point l'idée
Voir les numéros parus depuis le 21 juin.
qu'émettait son maître de retourner en Alle-
magne, de racheter la principauté de Lansbourg-
Nassau et de se voir élevé à la dignité de pre-
mier ministre.
Seulement il se permit des objections.
La première était celle-ci :
Le coffre d'acier était scellé dans le mur, et il
eût. fallu plusieurs personnes et des instruments
pour l'en arracher.
La seconde n'avait pas non plus une médiocre
importance :
La triple serrure du coffre avait été forgée à
Milan au commencement du siècle dernier et il
était non-seulement impossible de la forcer,
mais encore de l'ouvrir méme avec la clé, car
I elle était pourvue d'un secret que Janine seule
[ connaissait.
j Mais le prince n'était pas embarrassé pour si
peu.
— Ne crains rien, dit-il à mon père, je saurai
bien forcer Janine à me livrer son secret.
Moi père secoua la tête.
— Vous a-t-elle jamais livré celui de la pou-
dre mystérieuse ? fit-il.
Le prince entra en fureur.
— Nous verrons bien, dit-il; je les aurai tous
les deux. C'est une affaire de patience, -voilà
tout.
*
Et, en parlant ainsi, le prince avait son idée,
commo vous allez voir.
Janine était Italienne d'origine; elle avait un
sang brùlant dans les veines, et la pa.ssi(tfi fré-
I nétique, que le margrave lui avait inspirée, en
était la preuve.
Cependant Janine n'aimait plus cet homme,
qui l'avait forcée à commettre des crimes.
Seulement elle subissait sa terrible et fatale
influence, lui donnant autant d'or qu'il en dési-
rait, et se soumettant comme une esclave à ses
volontés les plus étranges.
Il avait exigé qu'elle se servit de sa beauté
pour attirer des victimes chez elle, et elle avait
obéi encore.
j Là, peut-être, était le secret de cette lassitude
( pleine de dégoùt qui avait remplacé, dans son
ccéur, l'ardent amour qu'elle avait éprouvé
d'abord.
Pourtant elle avait résisté à ses prières, à ses
menaces, à tous les moyens de violence ou de
séduction qu'il avait employés pour avoir son
double secret.
— Non, répondait-elle toujours, ces deux se-
crets ne sont pas à moi. Tuez-moi, si vous vou-
lez, mais vous ne saurez rien.
Il y avait plusieurs mois déjà que le margrave
avait confié ses espérances à mon père, et il n'é-
tait pas plus avancé çue le premier jour.
Mais il ¡e se décourageait point.
Pareil au tigre qui guette sa. proie, il atten-
dait.
Qu'attendait-il donc?
Vous allez le voir. Janine attirait donc chez
elle j de temps' en temps, quand i!s avaient be-
soin de sang humain pour leur infernal creuset,
tantôt un petit gentilhomme de province, ncu- i
vellement arrivé et inconnu encore à t'aris ;
tantôt un page, un soldat ou un clerc du pays
latin.
Le malheureux s'endormait, ivre de toutes Jes
ivresses, et np se réveillait pas.
Son sang recueilli, le cadavre allait rejoindre
d'autres cadavres dans la Seine.
Mais, un jour, il arriva que Janine se ré-
volta.
Son cœur, muet depuis quelle n'aimait plus
le margrave, parla tout à coup, battit à ou-
trance, et elle se prit à aimer un jeune et bean
gentilhomme, qu'elle avait, comme les autres,
traîtreusement attiré chez elle.
Quand, à la fin d'une nuit d'orgie, le malheu-
reux se fut endormi, mon père et le prince en-
trèrent, comme de coutume, armés, l'un, du
coutelas avec lequel ils égorgeaient leurs vie-
times, l'autre de l'aiguiëre d'argent destinée à
recueillir soN sanig.
f
5 CUit. le numéro JOURNAL QÏ70TJDTEN S c:luL le mimer»
ï
ABONNEMENTS. — Trois mois. Sii-mois. Un an.
Paris 5 fr. 9 fr. 19 fr.
Départements.. 6-11 99
Administrateur : E. Delsàux. ~
I
v™ année. — DIMANCHE 12 JUJJEXET 18G8. — N* 815
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Administration '. 13. place Breda.
PARIS, 11 JUILLET 1868
LES ABEILLES
Le verger est en pente, surleversant d'ùne^
tolline qui regarde le Rhône. Krf^sv%û^pe-
tit. ruisseau entretient la fraîchetu^de
Un mur, au nord, protége contre le tsntTes
niches alignées; et le -poète, à l'ombre des
arbres fruitiers, — le regard fixé sur les
grands horizons pleins de lumière, — entend
dans le silence de la campagne le bourdonne-
ment familier des abeilles. qui lui rappelle
Virgile et le pasteur Aristée. Il invoqué la
muse latine, et cette dernière se présente,
vêtue d'une robe de laine aux plis droits, le
front couronné d'épis, un bouquet de fleurs
des champs dans la main, simple et belle
comme la nature.
— Chante, lui dit-elle, le fleuve retentis-
:-:ant,les coteaux aux lignes harmonieuses, les
frissons éclatants du soleil sur la campagne
et les ombres mystérieuses du soir. Chante
aussi le laboureur au travail fécond et les
animaux domestiques qui forment son cor-
tège, le bœuf* lourd, l'âne patient, l'abeille
industrieuse!..
La saison de la moisson est aussi la saison
des abeilles. Quand l'homme abat les blés,
elles se posent sur les fleurs. Armées d'un
aiguillon pour se défendre, pourvues d'une
trompe pour recueillir le miel.
deux estomacs qui, non-seulement digèrent,
mais encore préparent, elles partent de la
ruche pour se livrer au travail de l'été. Avec
les brosses qui garnissent leurs longues
pattes postérieures, elles ramassent la pous-
sière des fleurs en deux petites boules qu'elles
font entrer de force dans les palettes trans-
versales ou cuillerons dont sont extérieure-
ment creusés la jambe et le premier article
des tarses de derrière. Les pattes chargées de
ces poussières rouges, jaunes, vertes ou
, blanches, suivant la nature des plantes, elles
:,'envolent vers la ruche. Là, elles composent
avec leur récolte la bouillie dont elles nour-
rissent les larves. '
Il faut lire dans l'Encyclopédie de Famille,
publiée par la maison Didot, le chapitre des
Abeilles :
j « Elles se nourrissent de nqu!des végétaux, ]
et principalement de liqueurs sucrées. C'est
du nectar des plantes qu'elles retirent, au
i moyen de leur trompe, un suc qui sera bien-
tôt converti en miel ; et c'est principalement
celui qui est contenu dans certaines glan-
as de fleurs désignées par les botanistes sous
nom général de nectaire, qu'elles retirent
\ humeur sucrée. Elles avalent d'abord ce li-
quide, qui transformé dans leur estomac,
devient, lorsque j'abeille dégorge ce suc, un
véritable miel, dont elles se nourrissent sui-
vant leurs besoins. L'excédant est déposé
dans les alvéoles vides,dont les parois ne per- !
mettent pas la transudation, et qui sont for-
mées d'un opercule ou petite porte de cire
fermée hermétiquement, — pour n'être ou- i
verte que lorsque les besoins impérieux et j
l'impossibilité de trouver de la nourriture ail-
leurs forceront d'avoir recours à ces provi-
sions.... La cire n'est autre chose que la ma-
tière sucrée, altérée par la digestion dans le
second estomac et expulsée, soit par les an-
neaux, soit par la bouche des abeilles.... »
Je vous l'ai déjà dit plusieurs fois, chers
lecteurs, ce qu'on est convenu d'appeler l'état 1
de nature est un état contre nature. Et la
raison en est bien simple, c'est que l'instinct
i de l'homme le-pousse à vivre en société. S'il
en fallait une preuve tirée de l'histoire natu- î
relie, on la trouverait dans les divers, gou- I
vernements organisés par les animaux.
Ainsi, les fourmis sont constituées en, répu-
blique, avec un conseil supérieur permanent
-®t-uoe>assemblèe repcàsentative,qui atul1éimit
dans les grandes occasions, à peu près comme
cela se passe en Suisse.
Les termites, qu'un discours de M. Eugène
Pelletan a rendus célèbres, se gouvernent à
peu près comme les anciens Spartiates: en
haut, liberté et égalité pour tous les citoyens;
en bas, esclavage pour les vaincus.
Les abeilles sont monarchistes. Chez elles,
le pouvoir royal est absolu. Pas de grand
vizir (M. Emile Ollivier serait content). Pas de
ministres , pas de chambre législative , pas
d'avocats.
Seulement la loi salique est renversée et
les mâles sont exclus du trône. Les savants
disent la Reine, mais ils disent aussi la Mère.
Ce qu'il y a de certain, c'est que la souve-
raine est bonne pour ses sujets, et cela justi-
fie sa souveraineté.
Un de mes confrères de la province, M. An-
toinféBoudin, a décrit, ces jours-ci, le royaume
des Abeilles, dans le feuilleton du Mémorial
de là Loire :
«Sitôt la reine trépassée ou partie, le peu-
ple ae met en quête d'une nouvelle souve-
raine. Il la choisit encore dans l'embryon, au
fond son humble cellule, dont il agrandit
les Proportions pour lui donner un berceau
digaè d'elle.
En moins de trois semaines, la future Ma-
jest,.passe successivement de l'état d'oeuf im-
per&ptible, à celui de nymphe et enfin d'a-
beillè parfaite.
Labour qu'elle rompt sa prison de cire, elle
apparaît dans tout l'éclat de sa force et de sa
triomphante beauté.
Aussitôt le peuple ravi se groupe autour
d'elle avec des trépignements de pieds et des
bruissements d'ailes sonores. C'est la céré-
monie de la proclamation officielle. La Reine
est morte, vive la Reine!...
Pendant plus de quatre heures, c'est un va
et vîMt incessant dans la ruche; tout y est
bouifijoanement et joyeux murmures. Le tra-
vail îpfme; la nation est en liesse.
LÍ Nouvelle reine, après avoir reçu les hom-
ma maite - e tous, commence à parcourir ses dô-
malt, suivie d'une escorte de courtisans
qui a^pipressent à la servir. Ceux-ci lui ap-
port ent le meilleur miel qu'on a mis en ré-
serve pour sa table; ceux-là brossent sa taille;
d'autres sèchent et lustrent ses ailes, tous
S'inclinent respectueusement sur son pas-
sagè. :iî
La Heine des abeilles a un aspect particulier
et des allures à elle qui la font immédiate-
menfaaeconnaître. Elle est un tiers plus lon-
gue que ses sujettes, son corsage est plus élé-
gant, ses mouvements plus nobles, sa dé-
marche plus grave. Les couleurs de ses an-
neaux sont d'un jaune clair et ses ailes
effilées, ont une transparence spéciale. Du
reste, où qu'elle aille; elle est toujours suivie
d'un flot de peuple qui signale aux yeux les
moins exercés, la partie de ses états qu'elle
honore de sa présence... »
M. Boudin voit poétique, et les choses, si
j'en crois l'histoire impartiale, ne se passent
tout à fait ainsi.
Chaque essaim, composé de vingt mille
abeilles, communes ou ouvrières, et de seize
cent mâk'à ou faux bourdons, a bien, en effet,
une reine. Mais cette reine, qui est une bonne
mère, est aussi une mauvaise sœur. Elle hé-
rite du trône, parce qu'elle est née la première
Or, son premier soin, aussitôt qu'elle est
née, est de tuer dans leurs larves toutes les
sœurs qui pourraient lui disputer le pouvoir.
Deux reines jumelles sortent-elles en même
temps de l'alvéole, elles se livrent aussitôt un
combat à outrance, dans lequel l'une des deux
doit succomber. Le meurtre et la guerre ci-
vile président donc là, comme chez les nations
barbares, à l'avénement des dynasties.
La reine des abeilles, suivant l'usage des
familles souveraines, choisit son prince con-
joint à l'étranger. Mais ce jeune seigneur
reste banni des états de sa femme. Quant aux
mâles de la ruche, icoglans fainéants et stu-
pides, ils vivent à l'orientale, laissant tra-
vailler les abeilles, pillant les rayons en leur
absence, et digérant au soleil avec un bour-
donnement rêveur. Seulement, quand vient
l'hiver, justice est faite. Les abeilles, qui
s'aperçoivent que la ruche n'est pas assez
riche pour nourrir les bouches inutiles, ies
saisissent,les garrottent et les tuent.
Ce petit peuple primitif est, du reste, sans
pitié pour ses ennemis. Qu'une souris ou
qu'un papillon de nuit pénètrent dans la
ruche, ils feront sans doute des victimes ;
mais ils finiront par succomber, et les natura-
listes les trouveront enterrés et mastiqués au
fond de la ruche, dans un tombeau de cire.
La piqûre des abeilles est extrêmement dou-
loureuse. Si elle ne tue pas toujours, du moins
donne-t-elle la fièvre. A la campagne, les en-
fants piqués lavent leur blessure avec du lait.
Le docteur Robert-Latour recommande l'ap-
plication d'une couche de collodion, rendue
élastique par l'addition d'un dixième d'huile
de ricin.....
Je voudrais qu'il me restât plus de place,
afin de vous raconter le départ et le voyage
des essaims. Aussitôt la nouvelle reine instal-
lée, la vieille reine, à la tête d'un certain
nombre des sujets de la ruche devenus trop
nombreux,part pour chercher un nouvel asik.
La colonie errante, lorsqu'elle est fatiguée,
s'arrête' sur une branche d'arbre, sur laquelle
les insectes forment une espèce de grappe, en
se cramponnant les uns aux autres au moyen
de leurs pattes.
LA
FEMME IMMORTELLE
mess=""22 PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA MAISON ENCHANTÉE
XXIII
; Conrad reprit :
— Mon père était dévoué au prince, malgré
ses crimes et son mauvais naturel.
D'ailleurs il était devenu son complice dans la
mystérieuse existence qu'ils menaient depuis
près de deux ans. il - - / . -
Par conséquent, il ne repoussa point l'idée
Voir les numéros parus depuis le 21 juin.
qu'émettait son maître de retourner en Alle-
magne, de racheter la principauté de Lansbourg-
Nassau et de se voir élevé à la dignité de pre-
mier ministre.
Seulement il se permit des objections.
La première était celle-ci :
Le coffre d'acier était scellé dans le mur, et il
eût. fallu plusieurs personnes et des instruments
pour l'en arracher.
La seconde n'avait pas non plus une médiocre
importance :
La triple serrure du coffre avait été forgée à
Milan au commencement du siècle dernier et il
était non-seulement impossible de la forcer,
mais encore de l'ouvrir méme avec la clé, car
I elle était pourvue d'un secret que Janine seule
[ connaissait.
j Mais le prince n'était pas embarrassé pour si
peu.
— Ne crains rien, dit-il à mon père, je saurai
bien forcer Janine à me livrer son secret.
Moi père secoua la tête.
— Vous a-t-elle jamais livré celui de la pou-
dre mystérieuse ? fit-il.
Le prince entra en fureur.
— Nous verrons bien, dit-il; je les aurai tous
les deux. C'est une affaire de patience, -voilà
tout.
*
Et, en parlant ainsi, le prince avait son idée,
commo vous allez voir.
Janine était Italienne d'origine; elle avait un
sang brùlant dans les veines, et la pa.ssi(tfi fré-
I nétique, que le margrave lui avait inspirée, en
était la preuve.
Cependant Janine n'aimait plus cet homme,
qui l'avait forcée à commettre des crimes.
Seulement elle subissait sa terrible et fatale
influence, lui donnant autant d'or qu'il en dési-
rait, et se soumettant comme une esclave à ses
volontés les plus étranges.
Il avait exigé qu'elle se servit de sa beauté
pour attirer des victimes chez elle, et elle avait
obéi encore.
j Là, peut-être, était le secret de cette lassitude
( pleine de dégoùt qui avait remplacé, dans son
ccéur, l'ardent amour qu'elle avait éprouvé
d'abord.
Pourtant elle avait résisté à ses prières, à ses
menaces, à tous les moyens de violence ou de
séduction qu'il avait employés pour avoir son
double secret.
— Non, répondait-elle toujours, ces deux se-
crets ne sont pas à moi. Tuez-moi, si vous vou-
lez, mais vous ne saurez rien.
Il y avait plusieurs mois déjà que le margrave
avait confié ses espérances à mon père, et il n'é-
tait pas plus avancé çue le premier jour.
Mais il ¡e se décourageait point.
Pareil au tigre qui guette sa. proie, il atten-
dait.
Qu'attendait-il donc?
Vous allez le voir. Janine attirait donc chez
elle j de temps' en temps, quand i!s avaient be-
soin de sang humain pour leur infernal creuset,
tantôt un petit gentilhomme de province, ncu- i
vellement arrivé et inconnu encore à t'aris ;
tantôt un page, un soldat ou un clerc du pays
latin.
Le malheureux s'endormait, ivre de toutes Jes
ivresses, et np se réveillait pas.
Son sang recueilli, le cadavre allait rejoindre
d'autres cadavres dans la Seine.
Mais, un jour, il arriva que Janine se ré-
volta.
Son cœur, muet depuis quelle n'aimait plus
le margrave, parla tout à coup, battit à ou-
trance, et elle se prit à aimer un jeune et bean
gentilhomme, qu'elle avait, comme les autres,
traîtreusement attiré chez elle.
Quand, à la fin d'une nuit d'orgie, le malheu-
reux se fut endormi, mon père et le prince en-
trèrent, comme de coutume, armés, l'un, du
coutelas avec lequel ils égorgeaient leurs vie-
times, l'autre de l'aiguiëre d'argent destinée à
recueillir soN sanig.
f
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