Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-07-02
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 02 juillet 1868 02 juillet 1868
Description : 1868/07/02 (A3,N805). 1868/07/02 (A3,N805).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717807k
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/10/2017
LA PETITE PRESSE
% ecirt. le numéro '- ... ;
11, JOURNAl. QUOTIDIEN
5 cent. le numéro ' 1
ABONNEMENTS. — Trois mois. six mois. Un M.
Paris & fr. 9 fr. i8 fr" :
Départements.. a 11 le 1
Administrateur : E. DELSAUX.
S- année. — JEUDI 2 JUILLET 1868. — N" 805
1
1
rtirveteitr-Propriétaire : J A N N 1 N.
Rédacteur en chef: A. DE BALAT H 1ER BRAGELONNE.
BUREAUX D'ABONNEMENT : 9. rne Drouot.
ADMITISTRATIC* : fJ, place Breda.
PARIS, 1er JUILLET 1868
JUILLET
Les événements du passé
2 juillet 1566. — Mort de Nostradamus. —
rononcez le nom de « Salon », une des pe-
tes villes de la Provence, ceux qui vous en-
ndront ajouteront aussitôt : « patrie de
ostradamus. > Cependant le sorcier de la
gende n'est pas né là. Une petite danseuse
e l'Opéra parlait français avec un accent al-
acien:— Vous êtes Allemande, mademoi-
selle? demanda un habitué... Elle répondit:
- Non, mossié, che suis chuive... La famille
3 Nostradamus était juive aussi ; elle habi-
it la petite ville de Saint-Rémy. Le jeune
3mme étudia la médecine et vint ensuite
s'établir à Salon. D'abord, il ne se posa en
iropbète que pour ses amis et ses clients.
lais le cercle de ces derniers attendit
bientôt...
En 1555, à Lyon, parut la première édition
l'un ouvrage plein de prédictions et de qua-
trains. L'auteur y parlait avec assurance dans
m langage à double et à triple sens, où cha-
cun pouvait chercher sa propre pensée sous
'es mots. 'Le succès fut immense. Le premier
olume fut suivi d'un second, que le docteur
,édia au roi Henri Il. C'était le moment des
uerres de religion. C&ux du yumple, «atho- -
ques ou protestants, se battaient pour leur
,i. Mais ceux d'en haut, princes ou simples
entilshommes, ne voulaient que vider la
ieille querelle entre le pouvoir royal et la
, odalité. Ce qui prouve le peu de vraie reli-
0D. qu'on avait à la cour, c'est le triomphe
. la sorcellerie, de la magie, de l'astrologie,
toutes les fausses sciences à tournure mys-
ieuse. Henri 11 et sa femme Catherine de
_.Iédicis, envoyèrent Nostradamus à Blois,
pour tirer l'horoscope de leurs fils, et ils le ré-
compensèrent. magnifiquement. Le roi étant
mort l'année suivante, d'une blessure reçue à
vœil dans un tournoi, on appliqua à cet acci-
;nt le trente-cinquième quatrain de la pre-
èré centurie de Nostradamus :
Le lion jeune le vieux surmontera
',Sn champ bellique, par singulier duel ;
Dans cage d'or les yeux lui crèvera.
Deux plaies une, puis mourir : mort cruelle !...
On trouverait peut-être ces vers faibles
,aujourd'hui, mais alors on s'en contentait.
On faisait plus. On allait en pèlerinage visiter
m poëte qui les avait rimés. Le duc de Savoie
Emmanuel, la princesse Marguerite sa femme,
'Charles IX, roi de France, vinrent tour à tour
du vieux médecin au soulier de Théramène.
T Elles vont, disait-il, à tous les événements,
comme ce soulier va à tous les pieds.
Mais tel n'était point l'avis des contempo-
rains, et Nostradamus, lorsqu'il mourut à
soixante-trois ans, était aussi riche que con-
sidéré.
3 juillet 1684. — Réception de Boileau à
l'Académie Française. — Lorsque Boileau
fut reçu à l'Académie de par la volonté du
roi, il se trouva fort embarrassé, ayant mal- j
traité dans ses œuvres la plupart des acadé-
miciens. Comment les louer maintenant ? Il
ne les loua pas ; et, comme il prononçait un
éloge , son discours fut absolument insigni-
fiant. Aussi ses anciennes victimes, devenues
ses collègues, s'en donnèrent à cœur joie sur
son compte. L'un d'eux fit cette jolie épi-
gramme :
Boileau nous dit, dans son écrit,
Qu'il n'est pas né pour l'éloquence
Il ne dit pas ce qu'il en pense.
Moi, je pense ce qu'il en dit.
Ce quatrain vaut mieux que ceux de Nos-
-tradaiuus. „, s
5 juillet tif8. —Le czar Pierre-le-Grand
fait condamner son fils à mort. — Pierre-
le-Grand avait changé la face de la Russie. Il
avait créé des routes, des flottes et des villes.
Son tils aîné, Alexis Pétrowitz, affectait de
mépriser l'ensemble de ces progrès. C'était
une sorte de sauvage qui n'aimait que la
chasse, la table, les plaisirs les plus grossiers.
Pierre, craignant qu'il défît son œuvre, le
prévint qu'il allait le déshériter. Alexis eut
l'air de consentir à ce désir, et prit la fuite
avec sa maîtresse.
Il habita tour à tour les environs de
Vienne, le Tyrol et Naples. L'Empereur,
lorsqu'il eut découvert sa retraite, l'invita à
revenir à Moscou. Dès qu'il fut arrivé, il le
fit arrêter et le mit en jugement comme cou-
pable devoir conspiré. Un tribunal complai-
sant, composé des principaux de l'empire,
rendit |ontre le prince un arrêt de mort. En
t entendant la lecture de cet arrêt, le jeune
sauvage entra en fureur il fut pris de con-
vulsions violentes, P-t, le lendemain, il expira
en se r«Mlant dans son cachot. Seul, le clergé.
russe — et c'est son honneur dans l'histoire
— avait protesté :
— St Votre Majesté, dirent lés évêques en
s'adressant au czar, veut punir celui qui est
tombé, il a devant lui des exemples de l'An-
cien Testament; mais s'il veut faire misé.
ricorde, il a l'exemple de Jésiis-Christ lui-
même, qui reçoit le fils égaré qui revient à
repentance, qui renvoie libre la femme sur-
prise en adultère, laquelle a mérité la lapida-
tion selon la loi ; il a l'exemple de David, qui
veut épargner Absalon, son fils et son persé-
cuteur ; car il a dit à ses capitaiaes,'lorsqu'ils
allaient le combattre : — Epargnez mon fils
Absalen...
Pierre-le-Grand fut inflexible. Selon les
uns, il agissait dans l'intérêt de l'Etat, et,
selon d'autres, dans l'intérêt des enfants issus
de son second mariage.
6 juillet 1535. — Henri VIII fait décapiter
Thomas Morus. — Le roi (ftAnglelerre venait
de rompre avec le Saint-Siège et de se faire
pape dans ses états. Il exigea de tous ses su-
jets un serment par lequel ils reconnaîtraient
sa Suprématie religieuse. Il s'agissait de la
fortune et de la vie : les Anglais obéirent. Un
seul, un homme de lettres, un philosophe,
Morus, qui avait été grand chancelier, refusa
de prêter le serment. Cette résistance pou-
vait en entraîner d'autres. Henri VIII mit
tout en œuvre pour la vaincre. Promesses et
menaces furent inutiles. Après les amis de
Morus, vinrent sa femme et ses enfants, qui
ie supplièrent à genoux de se conserver pour
eux. Le philosophe avait soixante-deux ans.
Il secoua doucement sa tête blanche : — Com-
bien d'années, dit-il à sa femme, croyez-vous
que je puisse vivre encore? — Au moins
vingt ans, répondit-elle. — Et c'est contre
vingt ans de vie, répartit Morus, que je chan-
gerais l'éternité ! j
Le mot était d'un martyr. Morus eut la
tête coupée.
22 juillet 1461. — Mort du roi Charles VIl.
— Le règne est grand, l'homme est petit.
Lorsqu'il monta sur le trône, les cinq sixiè-
mes de la, France étaient occupés par les An-
glais. Aidé de Jeanne d'Arc et d'un groupe
de bons généraux, Charles parvint à chasser
,rétranger du sol national. .Lorsque la,Zu-ern-
fut terminée, la paix qui suivit produisit des ..
merveilles. Les premiers imprimeurs nous '
arrivèrent d'Allemagne et les premiers gra-
veurs d'Italie; la reine eut des chemises de
toile, (jusqu'alors on en portait de serge)...
Charles, dit la légende, se laissa mourir de,
faim, de crainte d'être empoisonné par son
i fils — depuis Louis XI. Le bruit sans doute
[ était faux; mais le vieux roi y croyait, et cela
I donne la mesure de la faiblesse de son carac- .
! tère.
« Il ne fut en quelque sorte, — dit le pré-
sident Hénaut, — que le témoin des mer-
veilles de son regne ; on eût dit que la fortune.
' en dépit de l'indifférence du monarque, et
pour faire quelque chose de singulier, s'était
pl.u à lui donner à la fois des ennemis puis-
sants et de vaillants défenseurs, sans qu'il
semblât avoir part aux événements : ce n'est
pas que ce prince n'eût beaucoup de courage ;
mais s'il paraissait à la tête de ses armées,
c'était comme guerrier, et non comme chef. <
Sa vie était employée en galanteries, en jeux
et en fêtes. Un jour "La Hire, étant venu lui
rendre compte d'une affaire importante, le
roi, tout occupé d'une fête qu'il voulait donner,
lui en fit voir les apprêts, et lui demanda ce
qu'il en pensait : — je pense, dit La flire,
que l'on ne saurait perdre son royaume plus"'
gaiement... Cependant quelques historiens,
trompés aux prodiges de son règne, n'ont pu
imaginer qu'il n'y ait point eu quelque part, et.
lui ont donné le titre de Victorieux. »
30 juillet 1652. — Duel du duc de Beau-
fort et du duc de Nemours, — Les deux adver-
saires étaient beaux-frères; ils avaient chacun
quatre seconds, et la rencontre eut lieu à
sept heures du soir, dans la rue Neuve-des-
Petits-Champs. Les armes étaient l'épée et le -
pistolet : une vraie bataille en pleine rue.
Lorsqu'on fut en présence, M. de Beaufort
prit la parole :
— Eh ! beau-frère ! dit-il, quelle honte!
oublions le passé et soyons bons amis.
LA
FEMME IMMORTELLE
PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA MAISON ENCHANTÉE
XIII
12
La barque continuait à tourbillonner et était
aportée avec une vitesse vertigineuse.
[ L'obscurité enveloppait le Régent, et tout
rave qu'il était, il aurait pu être réellement ef-
ayé, si le chevalier d'Esparron n'avait pris soin
g- lui expliquer comment s'effectuait ce fantas-
,úe voyage.
— Monseigneur, disait-il en tenant le Régent
.'Qir les numéros parus depuis le 21 juin.
i .
par la main, ne craignez rien. Nous sommes
dans un canal creusé au-dessous de la rivière et
qui aboutit à la maison où nous allons.
Tout à l'heure nous allons nous arrêter, car le
canal fera un angle brusque et relournera en-
suite à la rivière.
— Mais, dit le Régent, y verrons-nous, au
moins ?
— Tout à l'heure.
— Pourquoi a-t-on éteint lé fanal ?
— C'est le courant d'air qui l'a éteint, mon-
seigneur.
Es comme il disait cela, la barque reçut un
choc et s'arrêta brusquement.
— Tenez toujours bien ma main, monsei-
gneur, poursuivit le chevalier.
Le choc avait été si violent que le Régent,
quoique assis, avait failli être précipité hors de
la barque.
Mais, l'équilibre rétabli, le chevalier ajouta :
— Levez un peu la jambe, monseigneur,
nous voici sur la première marche d'un esca-
lier.
En effet, le Régent, enjambant le bordage,
sentit tout à coup, sous son pied, un sol
ferme.
D'Esparron le tenait toujours par la main.
Le Régent gravit une trentaine de marches,
, toujours entraîné par le chevalier.
Puis, ce dernier s'arrêta.
Alors le prince entendit le bruit d'une clé
dan1, une serrure, puis, -une porte s'étant ou-
verte subitement, aux ténèbres qui l'envelop-
pa:ent succéda soudain une clarté assez vive, et
monseigneur Philippe d'Orléans se trouva au
seuil d'une longue galerie, à l'extrémité de la-
quelle brillait une lampe.
— Monseigneur, dit le chevalier, nous som-
mes au seuil de la maison enchantée.
— Enchantée est bien le mot, répondit le
Régent, car on y pénètre d'une facon singu-
lière.
Un sourire vint aux lèvres de d'Esparron.
— Votre Altesse n'a rien vu encore, dit-il.
Au bout du corridor, il y avait une seconde
porte.
Le chevalier ne l'ouvrit point comme la pre-
mière, mais il frappa dessus avec le pommeau
de son épée.
Alors cette porte s'ouvrit, et, cette fois, le
Régent recula ébloui, tant fut étincelante la
gerbe de lumière qui le frappa au visage.
Les contes orientaux ne donneraient qu'une
idée imparfaite du lieu où se trouva alors mon-
seigneur Philippe d'Orléans, régent de France.
Il n'y avait pas un salon au Palais Royal, pas
un salon à Versailles qui, un jour de gala, pût
rivaliser de luxe, de coquetterie et d'originalité
avec ce boudoir dans lequelaIa chevalier intro-
dui-zil le prince.
Au premier regard, on eût pu croire à une
forêt vierge du nouveau monde.
Les murs disparaissaient sous les fleurs et
le feuiilage,et des lampes à globe d'albâtre, sus-
pendues au plafond de distance en dis'ance, :
imitaient, à s'y méprendre, la clarté du soleil
tamisée^par les grands arbres, en un carrefour '
de bois.
Des parfums mystérieux chargeaient l'air, des
fleurs inconnues s'échappaient de vastes jardi-
nières ; le pied foulait un sable fin et moelleux
en guise de tapis.
Au lieu de siéges, on voyait des hamacs sus-
pendus à cette forêt artificielle dont chaque ar...
bre portait des fruits merveilleux.
— Monseigneur, dit le chevalier en souriant,
nous ne sommés plus à Paris, nous sommes
dans l'Inde. ]
— Es-tu bien sûr que nous ne fassions pas un
rêve et que nous n'ayions pas roulé sous la
table, après boire? dit Philippe d'Orléans.
— Votre Altesse est bien éveillée, dit le che-
valier.
— Et comment appelles-tu cette salle?
— C'est la grotte des Nymphes, caonsel^
gneur.
— Où sont les nymphes?
% ecirt. le numéro '- ... ;
11, JOURNAl. QUOTIDIEN
5 cent. le numéro ' 1
ABONNEMENTS. — Trois mois. six mois. Un M.
Paris & fr. 9 fr. i8 fr" :
Départements.. a 11 le 1
Administrateur : E. DELSAUX.
S- année. — JEUDI 2 JUILLET 1868. — N" 805
1
1
rtirveteitr-Propriétaire : J A N N 1 N.
Rédacteur en chef: A. DE BALAT H 1ER BRAGELONNE.
BUREAUX D'ABONNEMENT : 9. rne Drouot.
ADMITISTRATIC* : fJ, place Breda.
PARIS, 1er JUILLET 1868
JUILLET
Les événements du passé
2 juillet 1566. — Mort de Nostradamus. —
rononcez le nom de « Salon », une des pe-
tes villes de la Provence, ceux qui vous en-
ndront ajouteront aussitôt : « patrie de
ostradamus. > Cependant le sorcier de la
gende n'est pas né là. Une petite danseuse
e l'Opéra parlait français avec un accent al-
acien:— Vous êtes Allemande, mademoi-
selle? demanda un habitué... Elle répondit:
- Non, mossié, che suis chuive... La famille
3 Nostradamus était juive aussi ; elle habi-
it la petite ville de Saint-Rémy. Le jeune
3mme étudia la médecine et vint ensuite
s'établir à Salon. D'abord, il ne se posa en
iropbète que pour ses amis et ses clients.
lais le cercle de ces derniers attendit
bientôt...
En 1555, à Lyon, parut la première édition
l'un ouvrage plein de prédictions et de qua-
trains. L'auteur y parlait avec assurance dans
m langage à double et à triple sens, où cha-
cun pouvait chercher sa propre pensée sous
'es mots. 'Le succès fut immense. Le premier
olume fut suivi d'un second, que le docteur
,édia au roi Henri Il. C'était le moment des
uerres de religion. C&ux du yumple, «atho- -
ques ou protestants, se battaient pour leur
,i. Mais ceux d'en haut, princes ou simples
entilshommes, ne voulaient que vider la
ieille querelle entre le pouvoir royal et la
, odalité. Ce qui prouve le peu de vraie reli-
0D. qu'on avait à la cour, c'est le triomphe
. la sorcellerie, de la magie, de l'astrologie,
toutes les fausses sciences à tournure mys-
ieuse. Henri 11 et sa femme Catherine de
_.Iédicis, envoyèrent Nostradamus à Blois,
pour tirer l'horoscope de leurs fils, et ils le ré-
compensèrent. magnifiquement. Le roi étant
mort l'année suivante, d'une blessure reçue à
vœil dans un tournoi, on appliqua à cet acci-
;nt le trente-cinquième quatrain de la pre-
èré centurie de Nostradamus :
Le lion jeune le vieux surmontera
',Sn champ bellique, par singulier duel ;
Dans cage d'or les yeux lui crèvera.
Deux plaies une, puis mourir : mort cruelle !...
On trouverait peut-être ces vers faibles
,aujourd'hui, mais alors on s'en contentait.
On faisait plus. On allait en pèlerinage visiter
m poëte qui les avait rimés. Le duc de Savoie
Emmanuel, la princesse Marguerite sa femme,
'Charles IX, roi de France, vinrent tour à tour
du vieux médecin au soulier de Théramène.
T Elles vont, disait-il, à tous les événements,
comme ce soulier va à tous les pieds.
Mais tel n'était point l'avis des contempo-
rains, et Nostradamus, lorsqu'il mourut à
soixante-trois ans, était aussi riche que con-
sidéré.
3 juillet 1684. — Réception de Boileau à
l'Académie Française. — Lorsque Boileau
fut reçu à l'Académie de par la volonté du
roi, il se trouva fort embarrassé, ayant mal- j
traité dans ses œuvres la plupart des acadé-
miciens. Comment les louer maintenant ? Il
ne les loua pas ; et, comme il prononçait un
éloge , son discours fut absolument insigni-
fiant. Aussi ses anciennes victimes, devenues
ses collègues, s'en donnèrent à cœur joie sur
son compte. L'un d'eux fit cette jolie épi-
gramme :
Boileau nous dit, dans son écrit,
Qu'il n'est pas né pour l'éloquence
Il ne dit pas ce qu'il en pense.
Moi, je pense ce qu'il en dit.
Ce quatrain vaut mieux que ceux de Nos-
-tradaiuus. „, s
5 juillet tif8. —Le czar Pierre-le-Grand
fait condamner son fils à mort. — Pierre-
le-Grand avait changé la face de la Russie. Il
avait créé des routes, des flottes et des villes.
Son tils aîné, Alexis Pétrowitz, affectait de
mépriser l'ensemble de ces progrès. C'était
une sorte de sauvage qui n'aimait que la
chasse, la table, les plaisirs les plus grossiers.
Pierre, craignant qu'il défît son œuvre, le
prévint qu'il allait le déshériter. Alexis eut
l'air de consentir à ce désir, et prit la fuite
avec sa maîtresse.
Il habita tour à tour les environs de
Vienne, le Tyrol et Naples. L'Empereur,
lorsqu'il eut découvert sa retraite, l'invita à
revenir à Moscou. Dès qu'il fut arrivé, il le
fit arrêter et le mit en jugement comme cou-
pable devoir conspiré. Un tribunal complai-
sant, composé des principaux de l'empire,
rendit |ontre le prince un arrêt de mort. En
t entendant la lecture de cet arrêt, le jeune
sauvage entra en fureur il fut pris de con-
vulsions violentes, P-t, le lendemain, il expira
en se r«Mlant dans son cachot. Seul, le clergé.
russe — et c'est son honneur dans l'histoire
— avait protesté :
— St Votre Majesté, dirent lés évêques en
s'adressant au czar, veut punir celui qui est
tombé, il a devant lui des exemples de l'An-
cien Testament; mais s'il veut faire misé.
ricorde, il a l'exemple de Jésiis-Christ lui-
même, qui reçoit le fils égaré qui revient à
repentance, qui renvoie libre la femme sur-
prise en adultère, laquelle a mérité la lapida-
tion selon la loi ; il a l'exemple de David, qui
veut épargner Absalon, son fils et son persé-
cuteur ; car il a dit à ses capitaiaes,'lorsqu'ils
allaient le combattre : — Epargnez mon fils
Absalen...
Pierre-le-Grand fut inflexible. Selon les
uns, il agissait dans l'intérêt de l'Etat, et,
selon d'autres, dans l'intérêt des enfants issus
de son second mariage.
6 juillet 1535. — Henri VIII fait décapiter
Thomas Morus. — Le roi (ftAnglelerre venait
de rompre avec le Saint-Siège et de se faire
pape dans ses états. Il exigea de tous ses su-
jets un serment par lequel ils reconnaîtraient
sa Suprématie religieuse. Il s'agissait de la
fortune et de la vie : les Anglais obéirent. Un
seul, un homme de lettres, un philosophe,
Morus, qui avait été grand chancelier, refusa
de prêter le serment. Cette résistance pou-
vait en entraîner d'autres. Henri VIII mit
tout en œuvre pour la vaincre. Promesses et
menaces furent inutiles. Après les amis de
Morus, vinrent sa femme et ses enfants, qui
ie supplièrent à genoux de se conserver pour
eux. Le philosophe avait soixante-deux ans.
Il secoua doucement sa tête blanche : — Com-
bien d'années, dit-il à sa femme, croyez-vous
que je puisse vivre encore? — Au moins
vingt ans, répondit-elle. — Et c'est contre
vingt ans de vie, répartit Morus, que je chan-
gerais l'éternité ! j
Le mot était d'un martyr. Morus eut la
tête coupée.
22 juillet 1461. — Mort du roi Charles VIl.
— Le règne est grand, l'homme est petit.
Lorsqu'il monta sur le trône, les cinq sixiè-
mes de la, France étaient occupés par les An-
glais. Aidé de Jeanne d'Arc et d'un groupe
de bons généraux, Charles parvint à chasser
,rétranger du sol national. .Lorsque la,Zu-ern-
fut terminée, la paix qui suivit produisit des ..
merveilles. Les premiers imprimeurs nous '
arrivèrent d'Allemagne et les premiers gra-
veurs d'Italie; la reine eut des chemises de
toile, (jusqu'alors on en portait de serge)...
Charles, dit la légende, se laissa mourir de,
faim, de crainte d'être empoisonné par son
i fils — depuis Louis XI. Le bruit sans doute
[ était faux; mais le vieux roi y croyait, et cela
I donne la mesure de la faiblesse de son carac- .
! tère.
« Il ne fut en quelque sorte, — dit le pré-
sident Hénaut, — que le témoin des mer-
veilles de son regne ; on eût dit que la fortune.
' en dépit de l'indifférence du monarque, et
pour faire quelque chose de singulier, s'était
pl.u à lui donner à la fois des ennemis puis-
sants et de vaillants défenseurs, sans qu'il
semblât avoir part aux événements : ce n'est
pas que ce prince n'eût beaucoup de courage ;
mais s'il paraissait à la tête de ses armées,
c'était comme guerrier, et non comme chef. <
Sa vie était employée en galanteries, en jeux
et en fêtes. Un jour "La Hire, étant venu lui
rendre compte d'une affaire importante, le
roi, tout occupé d'une fête qu'il voulait donner,
lui en fit voir les apprêts, et lui demanda ce
qu'il en pensait : — je pense, dit La flire,
que l'on ne saurait perdre son royaume plus"'
gaiement... Cependant quelques historiens,
trompés aux prodiges de son règne, n'ont pu
imaginer qu'il n'y ait point eu quelque part, et.
lui ont donné le titre de Victorieux. »
30 juillet 1652. — Duel du duc de Beau-
fort et du duc de Nemours, — Les deux adver-
saires étaient beaux-frères; ils avaient chacun
quatre seconds, et la rencontre eut lieu à
sept heures du soir, dans la rue Neuve-des-
Petits-Champs. Les armes étaient l'épée et le -
pistolet : une vraie bataille en pleine rue.
Lorsqu'on fut en présence, M. de Beaufort
prit la parole :
— Eh ! beau-frère ! dit-il, quelle honte!
oublions le passé et soyons bons amis.
LA
FEMME IMMORTELLE
PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA MAISON ENCHANTÉE
XIII
12
La barque continuait à tourbillonner et était
aportée avec une vitesse vertigineuse.
[ L'obscurité enveloppait le Régent, et tout
rave qu'il était, il aurait pu être réellement ef-
ayé, si le chevalier d'Esparron n'avait pris soin
g- lui expliquer comment s'effectuait ce fantas-
,úe voyage.
— Monseigneur, disait-il en tenant le Régent
.'Qir les numéros parus depuis le 21 juin.
i .
par la main, ne craignez rien. Nous sommes
dans un canal creusé au-dessous de la rivière et
qui aboutit à la maison où nous allons.
Tout à l'heure nous allons nous arrêter, car le
canal fera un angle brusque et relournera en-
suite à la rivière.
— Mais, dit le Régent, y verrons-nous, au
moins ?
— Tout à l'heure.
— Pourquoi a-t-on éteint lé fanal ?
— C'est le courant d'air qui l'a éteint, mon-
seigneur.
Es comme il disait cela, la barque reçut un
choc et s'arrêta brusquement.
— Tenez toujours bien ma main, monsei-
gneur, poursuivit le chevalier.
Le choc avait été si violent que le Régent,
quoique assis, avait failli être précipité hors de
la barque.
Mais, l'équilibre rétabli, le chevalier ajouta :
— Levez un peu la jambe, monseigneur,
nous voici sur la première marche d'un esca-
lier.
En effet, le Régent, enjambant le bordage,
sentit tout à coup, sous son pied, un sol
ferme.
D'Esparron le tenait toujours par la main.
Le Régent gravit une trentaine de marches,
, toujours entraîné par le chevalier.
Puis, ce dernier s'arrêta.
Alors le prince entendit le bruit d'une clé
dan1, une serrure, puis, -une porte s'étant ou-
verte subitement, aux ténèbres qui l'envelop-
pa:ent succéda soudain une clarté assez vive, et
monseigneur Philippe d'Orléans se trouva au
seuil d'une longue galerie, à l'extrémité de la-
quelle brillait une lampe.
— Monseigneur, dit le chevalier, nous som-
mes au seuil de la maison enchantée.
— Enchantée est bien le mot, répondit le
Régent, car on y pénètre d'une facon singu-
lière.
Un sourire vint aux lèvres de d'Esparron.
— Votre Altesse n'a rien vu encore, dit-il.
Au bout du corridor, il y avait une seconde
porte.
Le chevalier ne l'ouvrit point comme la pre-
mière, mais il frappa dessus avec le pommeau
de son épée.
Alors cette porte s'ouvrit, et, cette fois, le
Régent recula ébloui, tant fut étincelante la
gerbe de lumière qui le frappa au visage.
Les contes orientaux ne donneraient qu'une
idée imparfaite du lieu où se trouva alors mon-
seigneur Philippe d'Orléans, régent de France.
Il n'y avait pas un salon au Palais Royal, pas
un salon à Versailles qui, un jour de gala, pût
rivaliser de luxe, de coquetterie et d'originalité
avec ce boudoir dans lequelaIa chevalier intro-
dui-zil le prince.
Au premier regard, on eût pu croire à une
forêt vierge du nouveau monde.
Les murs disparaissaient sous les fleurs et
le feuiilage,et des lampes à globe d'albâtre, sus-
pendues au plafond de distance en dis'ance, :
imitaient, à s'y méprendre, la clarté du soleil
tamisée^par les grands arbres, en un carrefour '
de bois.
Des parfums mystérieux chargeaient l'air, des
fleurs inconnues s'échappaient de vastes jardi-
nières ; le pied foulait un sable fin et moelleux
en guise de tapis.
Au lieu de siéges, on voyait des hamacs sus-
pendus à cette forêt artificielle dont chaque ar...
bre portait des fruits merveilleux.
— Monseigneur, dit le chevalier en souriant,
nous ne sommés plus à Paris, nous sommes
dans l'Inde. ]
— Es-tu bien sûr que nous ne fassions pas un
rêve et que nous n'ayions pas roulé sous la
table, après boire? dit Philippe d'Orléans.
— Votre Altesse est bien éveillée, dit le che-
valier.
— Et comment appelles-tu cette salle?
— C'est la grotte des Nymphes, caonsel^
gneur.
— Où sont les nymphes?
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