Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-06-24
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 24 juin 1868 24 juin 1868
Description : 1868/06/24 (A3,N797). 1868/06/24 (A3,N797).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717799g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
5 cent- le numéro
JOURNAL QUOTIDIEN
3 cent. le numéro
ÂBOKKEMEKTS. — Trois mois. Six mois, en ID.
Paris 5 fr. 9 fr. 1 s fr. ,
. - Départements.. a Ili ne
. Administrateur : E. DELSACx. '
¡mt année. — MERCREDI 21 JUIN f868."^-N* T9Tf
Directeur-Proprie taire : J À N N I N.
Rédacteur en chef: A. bE BALATHIER BRAGELONNE,,.
BUREAUX D'ABONNEMENT : 9, rue nrotuJt.
ADmiNISTRATION : 13, place Breda. <
PARIS, 23 JUIN 1868
LA FÊTE DE VERSAILLES
HOCHE
A monsieur Oscar Commettant
Demain, mon cher ami, la commune de
Versailles célébrera le centième anniversaire
Ho la naissance du plus glorieux de ses en-
fants.
Le premier vous m'avez annoncé cette fête,
vous m'avez parlé de l'enthousiasme des ci-
toyens, des démarches de la Commission, de
l'empressement de tous.
C'est donc avec un sentiment de reconnais-
sance que je vous adresse cette causerie con-
sacrée au soldat de Weissembourg, au paci-
ficateur de la Vendée.
Le 4 avril 1793, le camp de Maulde était
en désarroi La trahison de Du mouriez était
désormais un fait avéré. La veille, il avait
traité avec l'ennemi et lui avait jeté en otages
quatre représentants du peuple. Qu'allait-il
faire ? Marcher sur Paris. Serait-ce pour déli-
vrer la veuve et les enfants de LouisXVlpri-
sonniers, ainsi qu'il l'avait promis au général
prussien Brunswick? Serait-ce pour y établir
une monarchie constitutionnelle à la tête de
laquelle il placerait l'aîné des fils du duc
j'Orléans qui servait dans son" état-major ?
Serait-ce pour y installer une'dictature répu-
blicaine à la tête de laquelle il se placerait
lui-même?... r
Telles étaient les questions que se posaient
les officiers et les soldats. L'armée était divi-
fiée. D'un côté, la cavalerie inclinait vers son
^général, et déjà leshouzards de Bercheny, ti-
rant leur sabre du fourreau, s'étaient rangés
autour de la maisonnette qu'il occupait à
l'une des extrémités du camp. De l'autre, les
fantassins, les volontaires, groupés en désor-
dre, s'interrogeaient entre eux, se demandant
lequel ils préféreraient de leur chef ou de la
patrie.
Tout à coup une lettre circula parmi les
soldats. Cette lettre était d'un aide de camp
de Dumouriez ; elle était adressée au général
• ennemi, et elle contenait cette phrase :
a Les volontaires désertent et fuient de
toutes parts. Si la Convention croit qu'avec de
^tels soldats elle peut faire la guerre à FEu-
îwe'je vous assure qu'elle sera bientôt dé-
trempée....»
)Un murmure d'indignation courut parmi
la/foule. Un jeune officier prit la plume et
rédigea cette réponse, qui fut affichée à toutes
'les portes du camp :
« Eh bien 1 vous l'avez lu. On vous aban-
donne et l'on vous livre, parce que l'on craint
de succomber avec vous.
» Ainsi la trahison cherche son excuse dans-
la lâcheté. Le crime veut s'absoudre par la
honte ! S'il en est parmi vous qui se" trou-
blent aussi devant un danger qu'on exagère,
qu'ils répondent à l'appel de ces traîtres et
portent loin de nous la contagion-de la péur,
Le brave veut près de lui un brave qui le
venge ou le suive. Hors des rangs ceux qui
tremblent. La force de l'armée est dans le
courage et non dans le nombre de ceux qui
se pressent autour du drapeau. »
Le lendemain, l'armée s'était prononcée;
Dumouriez, suivi de quelques serviteurs
demeurés fidèles, avait passé à l'ennemi, et
la Convention, désireuse d'être instruite
des événements du camp de Maulde, mandait
à sa barre l'officier qui avait écrit la procla-
mation.
*
Celui-ci monta à cheval et partit à franc
étrier pour Paris.
Le Comité de Salut public était en séance
TtflfX'Tuiieries*. ---, 1
Là se trouvaient ces hommes dont l'histoire
a retenu les noms : Danton, dont la grande
face troublée reflétait toutes les passions de
la Révolution ; Delacroix, son ami; Barrère,
dont la plume éloquente rédigeait les rapports
de la Convention; Robert Lindet et Treilhard,
des jurisconsultes; Cambon, un financier;
Bréard, un Girondin; Delmas, un soldat;
Guiton-Morvaud, l'une, des figures les plus
accentuées de la Montagne.
Robespierre ne faisait pas encore partie du
Comité. Saint-Just venait cliy être adjoint. ,•
Tous, législateurs et tribuns, hommes de
loi et hommes d'épée, se demandaient avec
inquiétude ce qui allait résulter de la défec-
tion de Dumouriez. Cette défection entraîne-
rait-elle celle de l'armée? Les soldats déban-
dés laisseraient-ils la frontière ouverte? Est-ce
qu'en face du péril inférieur, sans cesse gran-
dissant, le péril extérieur allait se dresser de
nouveau, comme il l'avait fait quelques mois
auparavant? '
Ces. hommes étaient anxieux.
On annonça l'envoyé du camp de Maulde.
Alors, sur le seuil du Comité de Salut
public, parut un jeune homme de vingt-quatre
ans. j.
Il portait l'uniforme des officiers républi-
cains, gris de la poussière des batailles èt- de
la route. Ses longs cheveux f$ déroulaient
sur le collet de son habit. Son visage resplen-
dissait d'enthousiasme. Ses yeux noirs avaient
des regards rayonnants et doux.
A sa vue, toutes les têtes courbées se rele-
vèrent, tous les fronts plissés s'éclaircirent...
Ah! c'est que ce jeune homme n'était pas
seulement un soldat : c'était la jeune armée
tout entière, lq jeune France, la jeune Répu-
blique, allant porter l'idée nouvelle à travers
t'Europe ébranlée.
C'était Lazare Hoche.
D'où venait-il? Nous l'avons vu; du camp.
Son grade? Officier d'ordonnance du général
.Leveneur. Son enfance? Comme celle de tous
les grands hommes, elle est couverte d'un'
nuage. Hégésippe Moreau nous en a conservé
la légende poétique. C'est, dans une grande
cuisine de Versailles, un enfant il cheval sur
un manche àba'ai. Il joue au soldat, tandis
que,dans un coin,son père — un maître d'hô-
tel de la vieille roche — lève les bras au ciel,
en s'^eriant; — Le malheureux ! A six ans, il
ne. sait encore ni tourner la broche ni écumer
le pot!...
Suivant d'atitres, le père de Hoche était
employé aux écuries royales. Du reste qu'im-
porte l'origine ? Plus elle serait humble, plus
le héros serait grand...
C'est ensuite, dans une maisonnette de
Montreuil, le même enfant qui a grandi chez
sa tante, la jardinière. Parfois, au foyer de la
bonne femme, vient s'asseoir un vieux soldat
de Fontenoy qui raconte ses campagnes au
bambin. Ce dernier, pressé de mettre en ac-
tion les récits de la veille, rassemble les po-
lissons du village. Des mouchoirs déchirés
jouent les drapeaux, et l'on se fait bravement
la guerre: -''tircz'les premiers, messieurs
tes Anglais L ..
Ouvrez le registre Matricule des gardes
françaises, à la date du 19 octobre 1784. Vous
y trouverez cette mention :
« Hoche (Louis-Lazare), âgé de seize ans..
taille de 5 pieds 6 pouces, cheveux et sour-
cils bruns, visage petit, rond, en couleur, un
peu taché de rousseurs. Le nez petit, les yeux
noirs. Journalier. —.A dit n'avoir jamai&
servi. Enrôlé pour 8- ans. A reçu 100 liv-res. à
Cinq ans plus tard, le 14 juillet 1789, un
jeune sergent, le visage traversé par une ba-
lafre reçue en duel, regardait de la caserne
de la rue Verte la prise de la Bastille.
Trois ans encore et le sergent était devenu
lieutenant.
Un curé du faubourg Saint-Antoine lui
.avait appris à lire. Un capitaine et un tambour
des gardes françaises lui appris avaient à écri-
re. Le général comte Leveneur le prit pour
aide de camp et lui mit Plutarque dans les -
mains. Nommé par le comité de Salut Public
adjudant général chef de bataillon, il refusa,
voulant demeurer avec Leveneur. Il avait déjà
les idées qu'il devait appliquer plustard en
Vendée :
« Ce qîh fait la force des insurgés, c'est le
choc, le choc, telle est la tactique française.
Pour résister aux Vendéens, il faut des camps
retranchés; pour les attaquer, des colonnes-
mobiles... »
1
Un peu plus loin, il se rencontre avec Bo-
naparte :
|l'ennemi divisé, et marcher en avant... Etre
toujours plus fort que chacun d-es corps enne-
mis pris à part... »
Malade, Roche fut envoyé par les médecins -
aux boues de Saint-Amand. Il y rencontra
Couthon, qui espérait y guérir de sa paralysie.
Tous deux s'épinchèrcut dans de longues
causeries. De retour à l'armée, le jeune offi-
cier fut arrêté. On lui faisait ainsi payer son
amitié pour Levenetir, devenu suspect. Sa
défense fut éclatante. De sa prison il énvova
au Comité do la guerre un plan de défense de
la frontière du Nord. Couthon se fit porter au
Comité. Fiévreux, n'ayant qu'un souffle, il
enleva la nomination de Hoche au grade
d'adjudant général et lui fit confier la défense
de Dunkerque.
A la fois général et tribun, le jeune homme
releva les so'dits et ranima les citoyens. v
Dès cette époque, il rêvait une descente en
Irlande. — C'est chez elle qu'il faut combat- -
LA
FEMME IMMORTELLE
PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA MAISON ENCHANTÉE
IV
L'accent d'autorité avec lequel parlait le mar-
quis de la Roche-Lambert, a\ait fini par domi-
ner les convives ; et les plus sceptiques d'entre
eux commençaient à t'ecoutcr avec une reli--
gieuse attention.
Il reprit : -
— La haine n'est que la conséquence de l'a-
mour, quand elle n'est pas l'amour encore.
.Voir les numéros parus depuis le 21 juin. '
Je haïssais le vampire!
Mais pourquoi ?
Etait-ce pour ces quelques gouttes de sang,
provoquées à l'aide d'une épingle d'or et dont ses
lèvres s'étaient abreuvées ?
Non.
Je le haïssais parce qu'il avait mis lui-
même un terme à cette âpre et délirante vo-
lupté dont il m'avait abreuvé.
Je le haïssais, p£rce qu'il m'avait expulsé de
cette demeure mystérieuse 0\:1 l'on m'avait con-
duit et où j'avais con-nu des délices inénar-
rables.
Je m'étais endormi dans ses bras et je me
réveillais dans une hutte de pêcheur.
Je quittai donc cette dernière demeure,la rage
au cœur, ayant fait le serment de me venger à
tout prix.
Mais comment ? j'ignorais non-seulement le
vrai nom de cette femme, mais encore celui de
la rue où l'on m'avait conduit les yeux bandés.
Cependant, rentré au Palais-Royal après une
absence de plusieurs jours, j'allai trouver le ca-
pitaine des pages et je lui contai mon aven-
ture.
Il m'écouta le sourcil froncé.
— Ce que vous me dites là, me répondit-il, est
fort extraordinaire. Cependant, je suis tante de
YJEIS croire..-
1 Et comme je le regardais, cherchant à devi-
ner sur quoi il pouvait baser sa confiance, il
poursuivit :
— Connaissez-vous Raoul de Berny?
-— Mon camarade aux pages ?
— Oui.
— Mais sans doute, puisqu'il est mon intime
ami.
— Eh bien.! Raoul a disparu comme vous.
— Depuis quand?
— Depuis dix jours, et moins discret que
vous, il a raconté son aventure avant d'aller au
rendez-vous, et il a dû être enlevé de la même
manière que vous.
— Ah! fis-je avec une âpre curiosité.
— Ce!a étant, poursuivit le capitaine des
pages, je vais faire *mon rapport aLb roi, Donnez-
moi les phis minutieux détails par écrit.
J'obéis, et j'écrivis quatre longues pages dans
lesquelles je racontai tout ce qui m'était ar-
rivé.
v La police fut prévenue et se mit en cam-
pagne.
Mais la police ne trouva rien.
Huit jours s'écoulèrent.
Tout à coup Raoul reparut.
Comme moi, il s'était éveil'é loin de la dame
au masque, car, comme moi, il avait eu les
preuves de son amour: comme moi, il avait une
piqûre afncou, preuve évidente que le vampire
s'était pareillement abreuvé de son sang.
Mais, de plus que moi, ii était complètement
fou.
Alors un accès de jalousie forcenée s'empara
de moi.
Ma haine n 'était, au fond, que de t'amour,.
et cette femme était d'autant plus coupable, à
mes yeux, qu'elle m'ava'c trompe!
J'aurais voulu tuer Haoul.
La police se livrait à de nouye1ic,' rechercheit,
auxquelles _je m'intéressais avec acharnement,
et elle ne trouvait absolument rira , lorsque le
hasar i me servi t.
Il y avait bien un mois que j'avais quitta II\,
maison du pêcheur, -et j'avais retrouvé toutes
mes forces et toute mon énergie.
Un soir, je quittais le Palais Royal et je me
dirigeais vers la place c'ei Victoires où M. le
; duc de la Feuillade luisait construire un hôtel
magnifique, lorsque je croisai un homme qui
cheminait à grands pas.
Cet homme, en me voyant, voulut pl'end:-e' la
fuite ; mais je courus âpres lui, je le saisie au
collet et j'appelai à mon aide deux soldats aux
gardes qui passaient par là. '
Or, cet homme n'était autre que l'un des deux
porteurs de litière, celui-là même qui m'avait-
ratais'le billet sans signature dans lequel on xa
5 cent- le numéro
JOURNAL QUOTIDIEN
3 cent. le numéro
ÂBOKKEMEKTS. — Trois mois. Six mois, en ID.
Paris 5 fr. 9 fr. 1 s fr. ,
. - Départements.. a Ili ne
. Administrateur : E. DELSACx. '
¡mt année. — MERCREDI 21 JUIN f868."^-N* T9Tf
Directeur-Proprie taire : J À N N I N.
Rédacteur en chef: A. bE BALATHIER BRAGELONNE,,.
BUREAUX D'ABONNEMENT : 9, rue nrotuJt.
ADmiNISTRATION : 13, place Breda. <
PARIS, 23 JUIN 1868
LA FÊTE DE VERSAILLES
HOCHE
A monsieur Oscar Commettant
Demain, mon cher ami, la commune de
Versailles célébrera le centième anniversaire
Ho la naissance du plus glorieux de ses en-
fants.
Le premier vous m'avez annoncé cette fête,
vous m'avez parlé de l'enthousiasme des ci-
toyens, des démarches de la Commission, de
l'empressement de tous.
C'est donc avec un sentiment de reconnais-
sance que je vous adresse cette causerie con-
sacrée au soldat de Weissembourg, au paci-
ficateur de la Vendée.
Le 4 avril 1793, le camp de Maulde était
en désarroi La trahison de Du mouriez était
désormais un fait avéré. La veille, il avait
traité avec l'ennemi et lui avait jeté en otages
quatre représentants du peuple. Qu'allait-il
faire ? Marcher sur Paris. Serait-ce pour déli-
vrer la veuve et les enfants de LouisXVlpri-
sonniers, ainsi qu'il l'avait promis au général
prussien Brunswick? Serait-ce pour y établir
une monarchie constitutionnelle à la tête de
laquelle il placerait l'aîné des fils du duc
j'Orléans qui servait dans son" état-major ?
Serait-ce pour y installer une'dictature répu-
blicaine à la tête de laquelle il se placerait
lui-même?... r
Telles étaient les questions que se posaient
les officiers et les soldats. L'armée était divi-
fiée. D'un côté, la cavalerie inclinait vers son
^général, et déjà leshouzards de Bercheny, ti-
rant leur sabre du fourreau, s'étaient rangés
autour de la maisonnette qu'il occupait à
l'une des extrémités du camp. De l'autre, les
fantassins, les volontaires, groupés en désor-
dre, s'interrogeaient entre eux, se demandant
lequel ils préféreraient de leur chef ou de la
patrie.
Tout à coup une lettre circula parmi les
soldats. Cette lettre était d'un aide de camp
de Dumouriez ; elle était adressée au général
• ennemi, et elle contenait cette phrase :
a Les volontaires désertent et fuient de
toutes parts. Si la Convention croit qu'avec de
^tels soldats elle peut faire la guerre à FEu-
îwe'je vous assure qu'elle sera bientôt dé-
trempée....»
)Un murmure d'indignation courut parmi
la/foule. Un jeune officier prit la plume et
rédigea cette réponse, qui fut affichée à toutes
'les portes du camp :
« Eh bien 1 vous l'avez lu. On vous aban-
donne et l'on vous livre, parce que l'on craint
de succomber avec vous.
» Ainsi la trahison cherche son excuse dans-
la lâcheté. Le crime veut s'absoudre par la
honte ! S'il en est parmi vous qui se" trou-
blent aussi devant un danger qu'on exagère,
qu'ils répondent à l'appel de ces traîtres et
portent loin de nous la contagion-de la péur,
Le brave veut près de lui un brave qui le
venge ou le suive. Hors des rangs ceux qui
tremblent. La force de l'armée est dans le
courage et non dans le nombre de ceux qui
se pressent autour du drapeau. »
Le lendemain, l'armée s'était prononcée;
Dumouriez, suivi de quelques serviteurs
demeurés fidèles, avait passé à l'ennemi, et
la Convention, désireuse d'être instruite
des événements du camp de Maulde, mandait
à sa barre l'officier qui avait écrit la procla-
mation.
*
Celui-ci monta à cheval et partit à franc
étrier pour Paris.
Le Comité de Salut public était en séance
TtflfX'Tuiieries*. ---, 1
Là se trouvaient ces hommes dont l'histoire
a retenu les noms : Danton, dont la grande
face troublée reflétait toutes les passions de
la Révolution ; Delacroix, son ami; Barrère,
dont la plume éloquente rédigeait les rapports
de la Convention; Robert Lindet et Treilhard,
des jurisconsultes; Cambon, un financier;
Bréard, un Girondin; Delmas, un soldat;
Guiton-Morvaud, l'une, des figures les plus
accentuées de la Montagne.
Robespierre ne faisait pas encore partie du
Comité. Saint-Just venait cliy être adjoint. ,•
Tous, législateurs et tribuns, hommes de
loi et hommes d'épée, se demandaient avec
inquiétude ce qui allait résulter de la défec-
tion de Dumouriez. Cette défection entraîne-
rait-elle celle de l'armée? Les soldats déban-
dés laisseraient-ils la frontière ouverte? Est-ce
qu'en face du péril inférieur, sans cesse gran-
dissant, le péril extérieur allait se dresser de
nouveau, comme il l'avait fait quelques mois
auparavant? '
Ces. hommes étaient anxieux.
On annonça l'envoyé du camp de Maulde.
Alors, sur le seuil du Comité de Salut
public, parut un jeune homme de vingt-quatre
ans. j.
Il portait l'uniforme des officiers républi-
cains, gris de la poussière des batailles èt- de
la route. Ses longs cheveux f$ déroulaient
sur le collet de son habit. Son visage resplen-
dissait d'enthousiasme. Ses yeux noirs avaient
des regards rayonnants et doux.
A sa vue, toutes les têtes courbées se rele-
vèrent, tous les fronts plissés s'éclaircirent...
Ah! c'est que ce jeune homme n'était pas
seulement un soldat : c'était la jeune armée
tout entière, lq jeune France, la jeune Répu-
blique, allant porter l'idée nouvelle à travers
t'Europe ébranlée.
C'était Lazare Hoche.
D'où venait-il? Nous l'avons vu; du camp.
Son grade? Officier d'ordonnance du général
.Leveneur. Son enfance? Comme celle de tous
les grands hommes, elle est couverte d'un'
nuage. Hégésippe Moreau nous en a conservé
la légende poétique. C'est, dans une grande
cuisine de Versailles, un enfant il cheval sur
un manche àba'ai. Il joue au soldat, tandis
que,dans un coin,son père — un maître d'hô-
tel de la vieille roche — lève les bras au ciel,
en s'^eriant; — Le malheureux ! A six ans, il
ne. sait encore ni tourner la broche ni écumer
le pot!...
Suivant d'atitres, le père de Hoche était
employé aux écuries royales. Du reste qu'im-
porte l'origine ? Plus elle serait humble, plus
le héros serait grand...
C'est ensuite, dans une maisonnette de
Montreuil, le même enfant qui a grandi chez
sa tante, la jardinière. Parfois, au foyer de la
bonne femme, vient s'asseoir un vieux soldat
de Fontenoy qui raconte ses campagnes au
bambin. Ce dernier, pressé de mettre en ac-
tion les récits de la veille, rassemble les po-
lissons du village. Des mouchoirs déchirés
jouent les drapeaux, et l'on se fait bravement
la guerre: -''tircz'les premiers, messieurs
tes Anglais L ..
Ouvrez le registre Matricule des gardes
françaises, à la date du 19 octobre 1784. Vous
y trouverez cette mention :
« Hoche (Louis-Lazare), âgé de seize ans..
taille de 5 pieds 6 pouces, cheveux et sour-
cils bruns, visage petit, rond, en couleur, un
peu taché de rousseurs. Le nez petit, les yeux
noirs. Journalier. —.A dit n'avoir jamai&
servi. Enrôlé pour 8- ans. A reçu 100 liv-res. à
Cinq ans plus tard, le 14 juillet 1789, un
jeune sergent, le visage traversé par une ba-
lafre reçue en duel, regardait de la caserne
de la rue Verte la prise de la Bastille.
Trois ans encore et le sergent était devenu
lieutenant.
Un curé du faubourg Saint-Antoine lui
.avait appris à lire. Un capitaine et un tambour
des gardes françaises lui appris avaient à écri-
re. Le général comte Leveneur le prit pour
aide de camp et lui mit Plutarque dans les -
mains. Nommé par le comité de Salut Public
adjudant général chef de bataillon, il refusa,
voulant demeurer avec Leveneur. Il avait déjà
les idées qu'il devait appliquer plustard en
Vendée :
« Ce qîh fait la force des insurgés, c'est le
choc, le choc, telle est la tactique française.
Pour résister aux Vendéens, il faut des camps
retranchés; pour les attaquer, des colonnes-
mobiles... »
1
Un peu plus loin, il se rencontre avec Bo-
naparte :
|
toujours plus fort que chacun d-es corps enne-
mis pris à part... »
Malade, Roche fut envoyé par les médecins -
aux boues de Saint-Amand. Il y rencontra
Couthon, qui espérait y guérir de sa paralysie.
Tous deux s'épinchèrcut dans de longues
causeries. De retour à l'armée, le jeune offi-
cier fut arrêté. On lui faisait ainsi payer son
amitié pour Levenetir, devenu suspect. Sa
défense fut éclatante. De sa prison il énvova
au Comité do la guerre un plan de défense de
la frontière du Nord. Couthon se fit porter au
Comité. Fiévreux, n'ayant qu'un souffle, il
enleva la nomination de Hoche au grade
d'adjudant général et lui fit confier la défense
de Dunkerque.
A la fois général et tribun, le jeune homme
releva les so'dits et ranima les citoyens. v
Dès cette époque, il rêvait une descente en
Irlande. — C'est chez elle qu'il faut combat- -
LA
FEMME IMMORTELLE
PAR
PONSON DU TERRAIL
PROLOGUE
LA MAISON ENCHANTÉE
IV
L'accent d'autorité avec lequel parlait le mar-
quis de la Roche-Lambert, a\ait fini par domi-
ner les convives ; et les plus sceptiques d'entre
eux commençaient à t'ecoutcr avec une reli--
gieuse attention.
Il reprit : -
— La haine n'est que la conséquence de l'a-
mour, quand elle n'est pas l'amour encore.
.Voir les numéros parus depuis le 21 juin. '
Je haïssais le vampire!
Mais pourquoi ?
Etait-ce pour ces quelques gouttes de sang,
provoquées à l'aide d'une épingle d'or et dont ses
lèvres s'étaient abreuvées ?
Non.
Je le haïssais parce qu'il avait mis lui-
même un terme à cette âpre et délirante vo-
lupté dont il m'avait abreuvé.
Je le haïssais, p£rce qu'il m'avait expulsé de
cette demeure mystérieuse 0\:1 l'on m'avait con-
duit et où j'avais con-nu des délices inénar-
rables.
Je m'étais endormi dans ses bras et je me
réveillais dans une hutte de pêcheur.
Je quittai donc cette dernière demeure,la rage
au cœur, ayant fait le serment de me venger à
tout prix.
Mais comment ? j'ignorais non-seulement le
vrai nom de cette femme, mais encore celui de
la rue où l'on m'avait conduit les yeux bandés.
Cependant, rentré au Palais-Royal après une
absence de plusieurs jours, j'allai trouver le ca-
pitaine des pages et je lui contai mon aven-
ture.
Il m'écouta le sourcil froncé.
— Ce que vous me dites là, me répondit-il, est
fort extraordinaire. Cependant, je suis tante de
YJEIS croire..-
1 Et comme je le regardais, cherchant à devi-
ner sur quoi il pouvait baser sa confiance, il
poursuivit :
— Connaissez-vous Raoul de Berny?
-— Mon camarade aux pages ?
— Oui.
— Mais sans doute, puisqu'il est mon intime
ami.
— Eh bien.! Raoul a disparu comme vous.
— Depuis quand?
— Depuis dix jours, et moins discret que
vous, il a raconté son aventure avant d'aller au
rendez-vous, et il a dû être enlevé de la même
manière que vous.
— Ah! fis-je avec une âpre curiosité.
— Ce!a étant, poursuivit le capitaine des
pages, je vais faire *mon rapport aLb roi, Donnez-
moi les phis minutieux détails par écrit.
J'obéis, et j'écrivis quatre longues pages dans
lesquelles je racontai tout ce qui m'était ar-
rivé.
v La police fut prévenue et se mit en cam-
pagne.
Mais la police ne trouva rien.
Huit jours s'écoulèrent.
Tout à coup Raoul reparut.
Comme moi, il s'était éveil'é loin de la dame
au masque, car, comme moi, il avait eu les
preuves de son amour: comme moi, il avait une
piqûre afncou, preuve évidente que le vampire
s'était pareillement abreuvé de son sang.
Mais, de plus que moi, ii était complètement
fou.
Alors un accès de jalousie forcenée s'empara
de moi.
Ma haine n 'était, au fond, que de t'amour,.
et cette femme était d'autant plus coupable, à
mes yeux, qu'elle m'ava'c trompe!
J'aurais voulu tuer Haoul.
La police se livrait à de nouye1ic,' rechercheit,
auxquelles _je m'intéressais avec acharnement,
et elle ne trouvait absolument rira , lorsque le
hasar i me servi t.
Il y avait bien un mois que j'avais quitta II\,
maison du pêcheur, -et j'avais retrouvé toutes
mes forces et toute mon énergie.
Un soir, je quittais le Palais Royal et je me
dirigeais vers la place c'ei Victoires où M. le
; duc de la Feuillade luisait construire un hôtel
magnifique, lorsque je croisai un homme qui
cheminait à grands pas.
Cet homme, en me voyant, voulut pl'end:-e' la
fuite ; mais je courus âpres lui, je le saisie au
collet et j'appelai à mon aide deux soldats aux
gardes qui passaient par là. '
Or, cet homme n'était autre que l'un des deux
porteurs de litière, celui-là même qui m'avait-
ratais'le billet sans signature dans lequel on xa
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