Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-05-15
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 15 mai 1868 15 mai 1868
Description : 1868/05/15 (A3,N757). 1868/05/15 (A3,N757).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717759z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/10/2017
LA PETITE PRESSE
JOURNAL QUOTIDIEN
5 cent. le numéro
5 cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mois. six mois. un an.
Paris 5 fr. 9 fr. 48 fr.
Départements.. Et 11 99
Administrateur : E. DELSAUX.
3me année. — VENDREDI 15 MAI 1868. — NQ 757
Directeur-Propriétaire : JAN NIN.
Rédacteur en chef : A. DE BALATHIER BRAGELONNB.
BUREAUX D'ABONNEMENT : D,-rue Drouot.
ADMINISTRATION : 13. place Breda.
PARIS, 14 MAI 1868
LES JARDINS DE PARIS
La campagne ! — C'est bî$|t l?i çamy
pagne !... X
— Je pars pour la campagne,,- (ïïsëht les
riches.
Les pauvres ont la Marne et la Seine, il est
vrai ; mais seulement le dimanche. Encore
faut-il qu'il ne pleuve pas !...
Plus la ville est grande, plus les rues sont
longues, plus les maisons sont hautes, plus
on aime le soleil, la verdure et les fleurs.
Il y a des gens qui sourient en voyant un
pot de basilic sur la fenêtre d'un savetier.
Moi, je ne ris pas. - Ce basilic représente la
part de la poésie dans une existence. Il est à
lui seul la plaine et la montagne, le champ et
le verger, les Alpes et l'Océan... A le contem-
pler, l'homme communie avec la nature. Son
âme s'agrandit, son esprit s'apaise...
Allez du grand au petit. Une fleur, c'est la
nature en pot, mais c'est toujours la na-
ture...
Je te salue, basilic du savetier 1...
« *
- Ouvrez la fenêtre pour donner de l'air à
votre jardin !...
Ainsi parlent les blagueurs.
Mais le petit bourgeois, l'employé, l'ou-
vrier, tout à leur rosier ou à leur lilas, se
soucient peu du qu'en dira-t-on.
Un jardin, quelque petit qu'il soit, est tQu-
jours un jardin.
Il commence à la giroflée qui jaunit dans
la fente d'un mur, pour finir aux magnolias
et aux plantes rares des Champs-Elysées.
Partout il témoigne du soleil, de l'été, de
l'eau claire, de la végétation, de tout ce qu'il
y a de bon et de consolant au monde.
Les partis pris sont une chose terrible.
Il faut louer ce qui est louable.
La mairie qui fait pendant à Saint-Germain-
l'Auxerrois est hideuse.-Mais le jardin de la
tour Saint-Jacques et le jardin du Temple
sont charmants.
- Là-bas, à Londres, on a depuis longtemps
des places plantées d'arbres. Les Anglais
avaient nommé ces places squares en souvenir
de notre vieux mot français quarrés. Nous
leur avons pris leur idée et repris notre mot.
Chaque quartier de Paris a son square au-
jourd'hui.
Seulement, à Londres, les squares sont
^fermés au public; les enfants n'en voient les
sieurs qu'à travers les grilles, et les proprié-
aires des maisons voisines ont seuls le droit
'de se promener autour de leurs gazons.
Chez nous au contraire, ils sont à tous, et
les pauvres gens peuvent dire, en parlant
d'eux : — Notre jardin ! comme ils peuvent
dire : — Notre galerie ! en parlant des mu-
sées.
Cela est mieux.
Il fait un temps admirable aujourcThui.
Partons.
Cherchons la campagne à travers la
ville. é, -
Voici le jardin de la tour Saint-Jacques, au
milieu duquel se dresse le vieux monument
gothique « aux quatre angles tout émoussés
de sculptures », comme disait Victor Hugo.
Voici le jardin du Temple. Où s'élevait la
plus sombre des prisons, florissent des pelar-
goniums, des fuschias, des œillets, des gly-
cines, des pivoines et des roses, les plus écla-
tantes des fleurs.
Passons sous les marronniers des Arts-
et-Métiers. Ils nous rappelleront ceux des
Tuileries.
Les plantations du canal Saint-Martin Je-
ront'de mêrr,e un pendant loin tain à celles de--.
Champs-Elysées.
Voulons-nous rêver une heure en paix : al-
lons au Jardin des Plantes, le jardin des sa-
vants; a irrm n s - nnus. au. fiaakairu le tapage et
la vie : entrons dans le Luxembourg, ce parc
du quartier Latin...
Partout chantent les oiseaux par volées.
Partout jouent les enfants par bandes.
C'est un député de Paris, M. Eugène Pel-
letan, qui a appelé les enfants « des fleurs vi-
vantes. »
Un bon point à M. Pelletan !...
Le square de la place Vintimille appartient
à un particulier. On l'a appelé pendant long-
temps le jardin de Sainte-Hélène.
Son propriétaire y avait planté un scion
provenant de l'un des saules du tombeau de
Napoléon.
Non loin du saule s'élevait une statue du
vieil Empereur, vêtue d'une couronne de
lauriers.
N'e fallait-il pas avoir tous les diables de la
Grèèe et de Rome dans le corps pour repré-
senter en César d'r.cadémie l'homme à la re-
dingote. grise et au petit chapeau?...
On a fait cela, je le sais, sur la colonne de
la-place Vendôme, et les soldats de la Répu-
blique et de l'Empire, en habit à queue et
en buffleteries croisées, gagnent des batailles
sous les pieds d'un général en chemise ro-
maine...
(gloire aux académies qui perpétuent les
traditions, qui habillent Louis XIV en Alexan-
dre et Napoléon en César !...
Heureusement, la statue de la place Vinti-
mille a disparu.
J'espère que ce n'est pas sur elle que le
saule pleure...
Un admirable jardin public, c'est le parc
de Monceaux.
M. Edouard André, jardinier principal de
la ville de Paris, un savant qui tient à la fois
la serpe et la plume, en a écrit la monogra-
phie.
Ce jardin était un parc autrefois, et ce parc
avait les aspects mystérieux d'un bois sacré.
Les grottes, les rochers, les colonnades et
les ponts s'y perdaient sous les feuilles.
On a dégagé tout cela, et la légende, en
pleine lumière, est devenue de l'histoire.
Lisez, dans le Paris-Guide, les Jardins de
Paris :
'" (fEn 1778, Philippe.^L'.ôr ! é a n s avajJL des-
Biné et planté le parc de Monceaux d'après
les indications de Carmontelle, écrivain sou-
vent agréable, architecte paysagiste à tes
heures. On dit qu'en ce temps-là ce jardin
était fort joli, et la petite chronique de l'en-
droit raconte une suite d'histoires « qui ap-
prennent à pécher. » Madame de Genlis s'y
promenait souvent avec ses élèves, croyant
herboriser. On raconte qu'un jour où elle
expliquait un chapitre de Linnée à ses élèves,
ils virent se glisser dans un coin du jardin
une sorte de botaniste que la jeune troupe
avait surpris, et qui -s'enfuit tout effarouché
avec les herbes qu'il' avait cueillies.
» Si prompte qu'eût été sa fuite, on l'avait
reconnu.
[ » Le lendemain matin, à la place de la
brèche du vieux parc par où s'était enfui l'in-
1 discret, une petite porte était placée et la clé :
envoyée au visiteur avec permission de se
promener sans craindre les surprises. Or,
savez-vous le nom du privilégié ? C'était un
philosophe doux et persécuté, botaniste à ses
moments perdus, toujours grand écrivain, un
ami de la nature, qui pleurait de joie à la vue
d'une pervenche; c'était Jean-Jacques Rous-
seau.
D Monceaux changea plusieurs fois de maî-
tre, et revint enfin à ses anciens propriétai-
res, à la famille d'Orléans. Un instant, l'an-
tique parc vit renaître les splendeurs de ses
beaux jours. Le roi Louis-Philippe en avait
fait son jardin favori. Il avait placé là un de
ces jardiniers comme on n'en voit plus, un
de ces vieux grognards de l'horticulture pour
qui tout disparaît en dehors de leurs plantes.
Le père Schoëne (c'était son nom), avait au-
près du roi son franc-parler, comme autre-
fois les esclaves romains aux ides de mars, et
souvent il fallait que Sa Majesté cédât à la
vieille moustache grise du jardinier.. Schoëne
avait concentré toute son affection sur trois
points : le roi, son brûle-gueule et ses plan-
tes. — Devant moi, passe encore, disait Louis-
Philippe, mais fumer ainsi devant la reine et
les princesses!... — Sire, répondait Schoëne,
c'est plus fort que moi. Si Votre Majesté est
mécontente de mon service, qu'elle me fasse
donner mon compte. J'en mourrai peut-être
de chagrin ; mais ce sera 111a pipe entre les
dents.
» Le roi sounait... et pardonnait... »
*
Le parc des buttes Chaumont est très-bien.
Mais il faut faire une provision de biscuits
avant d'entreprendre le voyage dont il est le
buf. Quand on est arrivé, on trouve les plus
billes fleurs et les plus belles eaux-, un iac.de
d ux hectares et des plantations de ci.a's-
dents.
Aussi va-t-on plus volontiers au bois do
Vincennes et au bois de Boulogne.
— Nature artificielle ! disent les difficiles.'
Mon Dieu, c'est peut-être vrai, si l'on ne
songe qu'aux aménagements.
Cependant des pierres rapportées sont tou-
jours des pierres, et des arbres transplantés
sont toujours des arbres. Les cygnes et" les
canards vivent dans l'eau du lac, comme
les promeneuses aux cheveux rouges dans les
allées du bois.
ROCAMBOLE
mess=""N° 192 LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
QUATRIÈME PARTIE
UN DRAME DANS LE SOUTWARK
XLIX
Les pas continuaient à monter, et il y eut un
moment d'anxiété et de silence entre Shoking,
l'homme gris et l'abbé Samuel.
— On n'arrivera jusqu'à vous qu'en passant
sur mon corps, dit l'homme gris.
— Remettez votre poignard dans sa gaine, dit
Voir le numéro du 22 novembre.
le prêtre. A Dieu ne plaise que, pour moi, une
goutte de sang soit jamais versée!
Il n'eut pas le temps d'en dire davantage. <
Les pas s'étaient arrêtés sur l'étroit palier de
l'escalier et on venait de frapper à la porte.
— Qui est là? demanda l'abhé Samuel.
Une voix répondit en patois irlandais:
— Deux hommes qui ont besoin du prêtre qui
répand la charité autour de lui.
Le visage de Shoking se dérida.
'Seul, l'homme gris demeura le source fronsé.
Mais l'abbé Samuel ouvrit.
Ils se trouvèrent alors en présence de deux
hommes misérablement vêtus et qu'ii était fa-
cile de reconnaître pour deux de ces Irlandais
qui logent aux environs de Dreury-lane, et qui
ont pour profession de porter des bagages et
des colis, dans les gares de chemins de fer.
L'a.bbe Samuel connaissnit l'un d'eux.
— Ah! c'e, t loi, Tom? dit-il.
— Oui, mon père, répondit l'Irlandais, em-
ployant la formule de respect en usage dans son
pays, quand on^narle à un prêtre.
— Que me veux tu ?
Ma femme osi acceuc'uée voici huit .'uurs,
répondit l'Irlandais en pleurant. Nous n'avions
pas d'argent pour avoir du c\j;trhon. D'ailleurs
ça ne nous eu'. - a- avancés b'.':''ucoup ; car, i! y
i a deux moi.:!, iCayaus ;dus do pain, ricus avons
vendu le poêle. Mon enfant est mort en naissant.
ma pauvre femme a eu froid, et 'la fièvre l'a
pris.
Moi je ne suis pas médecin, et nous sommes
trop pauvres pour que j'ose aller en chercher
un, mais mon camarade que voilà dit qu'elle
est au plus mal.
Alors, j'ai pensé à vous, mon père. Je ne
veux pas que ma pauvre .femme meure sans
confession.
— Je vous suis, dit l'abbé Samuel, attendez-
moi.
Et 11 passa dans la deuxième chambre de son
humble logis, ouvrit un tiroir et dans ce tiroir
il prit..quelques pièces de menue monnaie, afin
de secourir sur-le-champ, celte détresse dont
on lui faisait un si navrant tc-bl8;iU.
Mais l'homme gri^ l'avait suivi.
— Monsieur l'ab);, dit.iL avec ..éinoLîoii, au
nom du cieiécouez-moi.
— Parlez. fit ,1.; jouLe prô:re étonne.
— Je vais aller avec cet homme, ja verrai sa
f'mme; vous le savez, je .suis un peu mÓdecin ;
si réellement olb est en danger do mort., eh
bien! je viendrai Vu ilS cuerciuu^ec alors arrivera
que i ourra.
— Mais pourquoi .wn .proposez-vous cela? de-
mavuV- l'abbô Samuel.
- Jr> î-o. s.-ù-.. , v -e-.'-.t ,
— Il faut que j'aille où mon devoir m'appelle,
dit le prêtre.
— Et si c'est un piége?..
— Un piege?
— Oui. Si nos ennemis ont gagné ees deux
misérables?
— Non, cela est impossible. Tom est un hon-
nête homme. Mais cela fùt-il vrai, je ne dois
pas hésiter..
Et le prêtre rejoignit Tom et son compagnon
et leur dit :
— Allez, je vous accompagne.
. — Nous aussi, dit 1 homme gris.
Il fit, un signe à Shoking el. tous deux descen-
dirent les premiers, de façon que le prêtre et
les Irlandais étaient encore dans i'escalier qu'ils
étaient, eux, dans la rue. -
La place des Sept-Quadrants était déserte-
Londres n'est pas une ville matinale; les
boutiques ne s'ouvrent guère avant huit iieurea
du matin, et les La,J.ycurs n'arrivent qu'à bix.
L'homme gris se sentit un peu rassuré.
— Où demeures lu ? demanda l'abbé Samuel
à Tom.
i — A deux pas d'ici,au coin d'Henriette s'reot
dariS Cuvent-Garden.
— Allais, dit le prêtre.
L'homme gris et S moking suivirent.
— Aiji\;s cul¡i, dit le PJô^ùer à rouilla ila
JOURNAL QUOTIDIEN
5 cent. le numéro
5 cent. le numéro
ABONNEMENTS. — Trois mois. six mois. un an.
Paris 5 fr. 9 fr. 48 fr.
Départements.. Et 11 99
Administrateur : E. DELSAUX.
3me année. — VENDREDI 15 MAI 1868. — NQ 757
Directeur-Propriétaire : JAN NIN.
Rédacteur en chef : A. DE BALATHIER BRAGELONNB.
BUREAUX D'ABONNEMENT : D,-rue Drouot.
ADMINISTRATION : 13. place Breda.
PARIS, 14 MAI 1868
LES JARDINS DE PARIS
La campagne ! — C'est bî$|t l?i çamy
pagne !... X
— Je pars pour la campagne,,- (ïïsëht les
riches.
Les pauvres ont la Marne et la Seine, il est
vrai ; mais seulement le dimanche. Encore
faut-il qu'il ne pleuve pas !...
Plus la ville est grande, plus les rues sont
longues, plus les maisons sont hautes, plus
on aime le soleil, la verdure et les fleurs.
Il y a des gens qui sourient en voyant un
pot de basilic sur la fenêtre d'un savetier.
Moi, je ne ris pas. - Ce basilic représente la
part de la poésie dans une existence. Il est à
lui seul la plaine et la montagne, le champ et
le verger, les Alpes et l'Océan... A le contem-
pler, l'homme communie avec la nature. Son
âme s'agrandit, son esprit s'apaise...
Allez du grand au petit. Une fleur, c'est la
nature en pot, mais c'est toujours la na-
ture...
Je te salue, basilic du savetier 1...
« *
- Ouvrez la fenêtre pour donner de l'air à
votre jardin !...
Ainsi parlent les blagueurs.
Mais le petit bourgeois, l'employé, l'ou-
vrier, tout à leur rosier ou à leur lilas, se
soucient peu du qu'en dira-t-on.
Un jardin, quelque petit qu'il soit, est tQu-
jours un jardin.
Il commence à la giroflée qui jaunit dans
la fente d'un mur, pour finir aux magnolias
et aux plantes rares des Champs-Elysées.
Partout il témoigne du soleil, de l'été, de
l'eau claire, de la végétation, de tout ce qu'il
y a de bon et de consolant au monde.
Les partis pris sont une chose terrible.
Il faut louer ce qui est louable.
La mairie qui fait pendant à Saint-Germain-
l'Auxerrois est hideuse.-Mais le jardin de la
tour Saint-Jacques et le jardin du Temple
sont charmants.
- Là-bas, à Londres, on a depuis longtemps
des places plantées d'arbres. Les Anglais
avaient nommé ces places squares en souvenir
de notre vieux mot français quarrés. Nous
leur avons pris leur idée et repris notre mot.
Chaque quartier de Paris a son square au-
jourd'hui.
Seulement, à Londres, les squares sont
^fermés au public; les enfants n'en voient les
sieurs qu'à travers les grilles, et les proprié-
aires des maisons voisines ont seuls le droit
'de se promener autour de leurs gazons.
Chez nous au contraire, ils sont à tous, et
les pauvres gens peuvent dire, en parlant
d'eux : — Notre jardin ! comme ils peuvent
dire : — Notre galerie ! en parlant des mu-
sées.
Cela est mieux.
Il fait un temps admirable aujourcThui.
Partons.
Cherchons la campagne à travers la
ville. é, -
Voici le jardin de la tour Saint-Jacques, au
milieu duquel se dresse le vieux monument
gothique « aux quatre angles tout émoussés
de sculptures », comme disait Victor Hugo.
Voici le jardin du Temple. Où s'élevait la
plus sombre des prisons, florissent des pelar-
goniums, des fuschias, des œillets, des gly-
cines, des pivoines et des roses, les plus écla-
tantes des fleurs.
Passons sous les marronniers des Arts-
et-Métiers. Ils nous rappelleront ceux des
Tuileries.
Les plantations du canal Saint-Martin Je-
ront'de mêrr,e un pendant loin tain à celles de--.
Champs-Elysées.
Voulons-nous rêver une heure en paix : al-
lons au Jardin des Plantes, le jardin des sa-
vants; a irrm n s - nnus. au. fiaakairu le tapage et
la vie : entrons dans le Luxembourg, ce parc
du quartier Latin...
Partout chantent les oiseaux par volées.
Partout jouent les enfants par bandes.
C'est un député de Paris, M. Eugène Pel-
letan, qui a appelé les enfants « des fleurs vi-
vantes. »
Un bon point à M. Pelletan !...
Le square de la place Vintimille appartient
à un particulier. On l'a appelé pendant long-
temps le jardin de Sainte-Hélène.
Son propriétaire y avait planté un scion
provenant de l'un des saules du tombeau de
Napoléon.
Non loin du saule s'élevait une statue du
vieil Empereur, vêtue d'une couronne de
lauriers.
N'e fallait-il pas avoir tous les diables de la
Grèèe et de Rome dans le corps pour repré-
senter en César d'r.cadémie l'homme à la re-
dingote. grise et au petit chapeau?...
On a fait cela, je le sais, sur la colonne de
la-place Vendôme, et les soldats de la Répu-
blique et de l'Empire, en habit à queue et
en buffleteries croisées, gagnent des batailles
sous les pieds d'un général en chemise ro-
maine...
(gloire aux académies qui perpétuent les
traditions, qui habillent Louis XIV en Alexan-
dre et Napoléon en César !...
Heureusement, la statue de la place Vinti-
mille a disparu.
J'espère que ce n'est pas sur elle que le
saule pleure...
Un admirable jardin public, c'est le parc
de Monceaux.
M. Edouard André, jardinier principal de
la ville de Paris, un savant qui tient à la fois
la serpe et la plume, en a écrit la monogra-
phie.
Ce jardin était un parc autrefois, et ce parc
avait les aspects mystérieux d'un bois sacré.
Les grottes, les rochers, les colonnades et
les ponts s'y perdaient sous les feuilles.
On a dégagé tout cela, et la légende, en
pleine lumière, est devenue de l'histoire.
Lisez, dans le Paris-Guide, les Jardins de
Paris :
'" (fEn 1778, Philippe.^L'.ôr ! é a n s avajJL des-
Biné et planté le parc de Monceaux d'après
les indications de Carmontelle, écrivain sou-
vent agréable, architecte paysagiste à tes
heures. On dit qu'en ce temps-là ce jardin
était fort joli, et la petite chronique de l'en-
droit raconte une suite d'histoires « qui ap-
prennent à pécher. » Madame de Genlis s'y
promenait souvent avec ses élèves, croyant
herboriser. On raconte qu'un jour où elle
expliquait un chapitre de Linnée à ses élèves,
ils virent se glisser dans un coin du jardin
une sorte de botaniste que la jeune troupe
avait surpris, et qui -s'enfuit tout effarouché
avec les herbes qu'il' avait cueillies.
» Si prompte qu'eût été sa fuite, on l'avait
reconnu.
[ » Le lendemain matin, à la place de la
brèche du vieux parc par où s'était enfui l'in-
1 discret, une petite porte était placée et la clé :
envoyée au visiteur avec permission de se
promener sans craindre les surprises. Or,
savez-vous le nom du privilégié ? C'était un
philosophe doux et persécuté, botaniste à ses
moments perdus, toujours grand écrivain, un
ami de la nature, qui pleurait de joie à la vue
d'une pervenche; c'était Jean-Jacques Rous-
seau.
D Monceaux changea plusieurs fois de maî-
tre, et revint enfin à ses anciens propriétai-
res, à la famille d'Orléans. Un instant, l'an-
tique parc vit renaître les splendeurs de ses
beaux jours. Le roi Louis-Philippe en avait
fait son jardin favori. Il avait placé là un de
ces jardiniers comme on n'en voit plus, un
de ces vieux grognards de l'horticulture pour
qui tout disparaît en dehors de leurs plantes.
Le père Schoëne (c'était son nom), avait au-
près du roi son franc-parler, comme autre-
fois les esclaves romains aux ides de mars, et
souvent il fallait que Sa Majesté cédât à la
vieille moustache grise du jardinier.. Schoëne
avait concentré toute son affection sur trois
points : le roi, son brûle-gueule et ses plan-
tes. — Devant moi, passe encore, disait Louis-
Philippe, mais fumer ainsi devant la reine et
les princesses!... — Sire, répondait Schoëne,
c'est plus fort que moi. Si Votre Majesté est
mécontente de mon service, qu'elle me fasse
donner mon compte. J'en mourrai peut-être
de chagrin ; mais ce sera 111a pipe entre les
dents.
» Le roi sounait... et pardonnait... »
*
Le parc des buttes Chaumont est très-bien.
Mais il faut faire une provision de biscuits
avant d'entreprendre le voyage dont il est le
buf. Quand on est arrivé, on trouve les plus
billes fleurs et les plus belles eaux-, un iac.de
d ux hectares et des plantations de ci.a's-
dents.
Aussi va-t-on plus volontiers au bois do
Vincennes et au bois de Boulogne.
— Nature artificielle ! disent les difficiles.'
Mon Dieu, c'est peut-être vrai, si l'on ne
songe qu'aux aménagements.
Cependant des pierres rapportées sont tou-
jours des pierres, et des arbres transplantés
sont toujours des arbres. Les cygnes et" les
canards vivent dans l'eau du lac, comme
les promeneuses aux cheveux rouges dans les
allées du bois.
ROCAMBOLE
mess=""N° 192 LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
QUATRIÈME PARTIE
UN DRAME DANS LE SOUTWARK
XLIX
Les pas continuaient à monter, et il y eut un
moment d'anxiété et de silence entre Shoking,
l'homme gris et l'abbé Samuel.
— On n'arrivera jusqu'à vous qu'en passant
sur mon corps, dit l'homme gris.
— Remettez votre poignard dans sa gaine, dit
Voir le numéro du 22 novembre.
le prêtre. A Dieu ne plaise que, pour moi, une
goutte de sang soit jamais versée!
Il n'eut pas le temps d'en dire davantage. <
Les pas s'étaient arrêtés sur l'étroit palier de
l'escalier et on venait de frapper à la porte.
— Qui est là? demanda l'abhé Samuel.
Une voix répondit en patois irlandais:
— Deux hommes qui ont besoin du prêtre qui
répand la charité autour de lui.
Le visage de Shoking se dérida.
'Seul, l'homme gris demeura le source fronsé.
Mais l'abbé Samuel ouvrit.
Ils se trouvèrent alors en présence de deux
hommes misérablement vêtus et qu'ii était fa-
cile de reconnaître pour deux de ces Irlandais
qui logent aux environs de Dreury-lane, et qui
ont pour profession de porter des bagages et
des colis, dans les gares de chemins de fer.
L'a.bbe Samuel connaissnit l'un d'eux.
— Ah! c'e, t loi, Tom? dit-il.
— Oui, mon père, répondit l'Irlandais, em-
ployant la formule de respect en usage dans son
pays, quand on^narle à un prêtre.
— Que me veux tu ?
Ma femme osi acceuc'uée voici huit .'uurs,
répondit l'Irlandais en pleurant. Nous n'avions
pas d'argent pour avoir du c\j;trhon. D'ailleurs
ça ne nous eu'. - a- avancés b'.':''ucoup ; car, i! y
i a deux moi.:!, iCayaus ;dus do pain, ricus avons
vendu le poêle. Mon enfant est mort en naissant.
ma pauvre femme a eu froid, et 'la fièvre l'a
pris.
Moi je ne suis pas médecin, et nous sommes
trop pauvres pour que j'ose aller en chercher
un, mais mon camarade que voilà dit qu'elle
est au plus mal.
Alors, j'ai pensé à vous, mon père. Je ne
veux pas que ma pauvre .femme meure sans
confession.
— Je vous suis, dit l'abbé Samuel, attendez-
moi.
Et 11 passa dans la deuxième chambre de son
humble logis, ouvrit un tiroir et dans ce tiroir
il prit..quelques pièces de menue monnaie, afin
de secourir sur-le-champ, celte détresse dont
on lui faisait un si navrant tc-bl8;iU.
Mais l'homme gri^ l'avait suivi.
— Monsieur l'ab);, dit.iL avec ..éinoLîoii, au
nom du cieiécouez-moi.
— Parlez. fit ,1.; jouLe prô:re étonne.
— Je vais aller avec cet homme, ja verrai sa
f'mme; vous le savez, je .suis un peu mÓdecin ;
si réellement olb est en danger do mort., eh
bien! je viendrai Vu ilS cuerciuu^ec alors arrivera
que i ourra.
— Mais pourquoi .wn .proposez-vous cela? de-
mavuV- l'abbô Samuel.
- Jr> î-o. s.-ù-.. , v -e-.'-.t ,
— Il faut que j'aille où mon devoir m'appelle,
dit le prêtre.
— Et si c'est un piége?..
— Un piege?
— Oui. Si nos ennemis ont gagné ees deux
misérables?
— Non, cela est impossible. Tom est un hon-
nête homme. Mais cela fùt-il vrai, je ne dois
pas hésiter..
Et le prêtre rejoignit Tom et son compagnon
et leur dit :
— Allez, je vous accompagne.
. — Nous aussi, dit 1 homme gris.
Il fit, un signe à Shoking el. tous deux descen-
dirent les premiers, de façon que le prêtre et
les Irlandais étaient encore dans i'escalier qu'ils
étaient, eux, dans la rue. -
La place des Sept-Quadrants était déserte-
Londres n'est pas une ville matinale; les
boutiques ne s'ouvrent guère avant huit iieurea
du matin, et les La,J.ycurs n'arrivent qu'à bix.
L'homme gris se sentit un peu rassuré.
— Où demeures lu ? demanda l'abbé Samuel
à Tom.
i — A deux pas d'ici,au coin d'Henriette s'reot
dariS Cuvent-Garden.
— Allais, dit le prêtre.
L'homme gris et S moking suivirent.
— Aiji\;s cul¡i, dit le PJô^ùer à rouilla ila
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