Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-05-11
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 11 mai 1868 11 mai 1868
Description : 1868/05/11 (A3,N753). 1868/05/11 (A3,N753).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k47177559
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
5 MiU. le numéro JOURNAL QUOTIDIEN ' V-,'h 'cenL le iturnén
ABONNEMENTS. — Trois mois. Six mois. , on aD.
Paris 5 fr. 9 fr. t8 fr. z
Départements.. e fl 99
Administrateurh: E. DELSA HI.
* ...... 1 » 4 i )
3me annéè. —LUNDI 11 MAI 1868. - N° 753
en Birècteur-Prbpriëtaire : JAN NI-N. '
Réds&eur en chef: A. DE BAtA TH 1 ER BHAGEI,O^NE.
BUREAUX DABO*NNEI)IENT : 9, l'ue 3>s*oieei,"
ADMINISTRATION : 13, place Breda.,: 1 >• T r;
PARIS, 10 MAI 1868
ALI-BABA
ET LES QUARANTE VOLEURS
' X * ; >> , -
Dans urie ville de la Perse vÎTarprrf'deux
irères, nommés, l'unCassim, l'autre Ali-Baba.
Tous deux étaient nés pauvres; mais le pre-
mier avait épuisé une femme riche et fait
une grande fortune dans le commerce, tandis
que le second s'était marié avec une jeune fille
sans dot et en était réduit pour vivre à aller
couper du bois dans la forêt; son bois coupé,
il le chargeait sur trois ânes qui composaient
toute sa propriété.
Un jour, Ali-Baba achevait son travail,
quand un nuage de poussière lui annonça
l'arrivée d'une troupe de cavaliers. — Si
c'étaient des voleurs,... pensa-t-il ; ils pour-
raient me faire un mauvais parti. Et il monta
. sur un arbre dont le feuillage épais le cache-
rait à tous les yeux.
Arrivés au pied de l'arbre, les cavaliers
s'arrêtèrent.
Ils étaient au nombre de quarante.
Chacun d'eux prit une lourde valise sur son
cheval. Puis, leur chef s'approcha d'un ro-
cher et dit : : . ^ . ?
— S¿same, ouvrt-loi !...
Une porte cachée dans les pierres tourna
aussitôt sur sep gonds, et les quarante cava-
liers' y passèrent tour à tour.
Dès qu'ils eurent disparu, Ali-Baba eut
l'idée de descendre de sonarbreet des'enfuir;
mais il craignit d'être surpris; peut-être aussi
la curiosité le retint-elle.
..y .eja; soit* ikattendèV'eHl tR r-%ffcrï, *
car les quarante voleurs ressorUrent, retour-
nèrent à leurs chevaux et repartirent presque
aussitôt.
Quand il les eut .perdus de vue, le'bucheron
fut pris d'une ardente envie de savoir ce que
renfermait la caverne. 11 s'approcha du ro-
cher et dit comme il avait entendu dire :
— Sésame, ouvre-toi I
La porte s'ouvrit.
Ali-Baba s'attendait à trouver un lieu plein
ile ténèbres; il se trouva dans une'magnifi-
que salle, claire et spacieuse. Cette salle était
pleine de provisions de bouche, de ballots de
marchandises, et d'or amoncelé en tas ou en-
fermé dans des bourses de cuir.
Le pauvre diable n'hésita pas. Il prit d'or
la charge de ses trois ânes, et repartit pour
la ville.
Qui fut stupéfaite? Sa femme.
— Ali-Baba, lUi dit-elle, seriez-vous assez
malheureux pour avnir?...
Elle allait dire
Mais il lui raconta son histoire.
— Est-ce voler, dit-il, que voler des vo-
leurs?
Après quoi, il étala son or en recomman-
dant le plus profond secret.
La femme sortit pour aller emprunter une
mesure. L'or mesuré serait ensuite enfoui.
Mais l'emprunteuse eut le malheur de s'a-
dresser à sa belle-sœur. Celle-ci, curieuse de
savoir quel grain on mesurait, chez le bûche-
ron, appliqua une couche de suif .au-dessous
de la mesure. Quand on la lui rendit, une
pièce d'or y demeurait attachée.
— De l'or par mesures ? Où ce misérable
Baba l'a-t-il pris?
Elle raconta tout à son mari, et Cassim en
conçut une jalousie mortelle. Il courut chez
son frère.— Combien, lui dit-il, avez-vous de
pièces d'or pareilles à celle-ci ? Je pourrais
vous dénoncer à la justice, je préfère vous de-
mander la vérité.
Ali-Baba dit tout à son frère, comme il
avait tout dit à sa femme.
- Cassim, aussitôt, pris de la fièvre de l'or, se
njnd au rocher.— Sésame, ouvre-toi Il en-
tre, remplit d'or les sacs qu'il a apportés;
mais la porte s'est refermée et- il a oublié le
mot qui la fait ouvrir: — Orge, ouvre-toi !
dit-il. Il nomme successivement tous àes
grains.,. Il désespère. Les voleurs reviennent;
ils mettent en fuite les mulets que Cassim a
laissés à la porte. Ils entrent. Cassim essaye de
fuir. On le tue.
s* ■
. \ , .
Les voleurs délibèrent,
— Comment cet homme est-il entré ?
Pour effrayer quiconque serait tenté de
suivre son exemple, ils coupent son corps en
quatre morceaux ,et placent ces débris hu-
mains de chaque côté de la porte , en dedans
de la grotte.
La femme de Cassim, cependant, inquiète,
désolée, va trouver son beau-frère : — Où
peut être mon mari ? -
Ali-Baba le devine aussitôt. Il part avec
ses trois ânes, iùarrive et trouve le cadavre ]
en pièces du malheureux. Il le charge sur un j
de ses trois ânes, pose sur les autres deux j
sacs pleins d'or, recouvre le tout de fagots et '
relent; après quoi, il donne l'or à sa femme
et rapporte le cadavre à sa belle-sœur. - ^ ;> jj
La veuve de Cassim avait une esclave
nommée Morgiane, très-adroite et remplie
d 'ima*gination. Ali-Biba la prend pour confi-
dente.— Ecoute, lui dit-il, ma conversation
avec ta maîtresse.
il aborde sa belle-sœur, lui apprend l'af-
freuse vérité, la conso% et lui propo.se de la
prendre pour femme. On sait qu'en Orient il
est permis d'avoir plusieurs femmes. La
-veuve, pensant à la richesse d'Ali-Baba, ac-
cepte. Il s'agit dès lors de faire croire que
Cassim est mort naturellement. L'esclave s'en
charge. 4 ■> ; .
Elle annonce à tout le voisinage une ma-
ladie de son maître;. elle achète des drogues
chez un pharmacien; et, moyennant deux "piè-
ces d'or, elle obtient qu'un vieux savetier
vienne les yeux bandés recoudre les,morceaü x
du cadavre. BMf, on ensevelit Cassim, le ÍIHI-
riage's'accomplit, et les quatre personnes qu
sont seules dans le secret " s'établissent pour
vivre ensemble. Y :
: ' ' " ^ .
: r:r> . «■• -> ■ !
j Les* voleurs en rentrant dans la caverne,
s'aperçurent à la fois de la diminution ile leur
or et de la disparition du cadavre. •
Ils jurèrent de-sé venger.~ : >
Que fallait-il pour cela ? suivre une pister
-- Un d'entre eux s-ee dévoua. S'il faisait un:
il «W'Hii puni dé^rnrotk Çefeil
convenu, il partit.
Au jour il entrait déguisé dans la ville.
une seule boutique était ouverte : celle d'un
vieux savetier, Le voleur cause avec lui, et,
moyennant quelques pièces d'or, il apprend
que le bonhomme a cousu un cadavre. Reste
à trouver la maison.
Le savetierse fait bander les yeux ; il mar-
che en comptant ses pas ; on arrive à la porte
de Cassim. C'est ici ! Le voleur marque la
porte à la craie blanche et repart chercher ses
compagnons Mais l'esclave Morgiane sort
pour aller au -iiiai,ché, elle voit la marque, se
défie et trace des signes semblables sur deux
ou trois portes au dessus et au-dessous de
-celle de son maître. Quand les voleurs se pré-
sentent, ils ne savent laquelle choisir. Celui
... i
qui les a induits en erreur est condamné *
à mort tout d'une voix.
Un autre s'offre à le remplacer; il tente la
même aventure, achète de même le savetier,
; découvre'de même la maison et fait une petite
- marque rouge dans un endroit moins apparent.
— De la sorte,-se dit-il, il n'y aura pas à s'y
tromper!... Les voleurs reviennent. La mar-
que rouge est sur quatre ou cinq portes,
comme la blanche. Le second voleur a la tê e
coupée comme-le premier'.''• •.,, j
Le capitaine 'alors se résout à agic. ^pjluir
même. La porté reconnue, il j^.g^aye^iHS -sà
mémoire, de f,açojija ' ne'pou
Puis il fait achetçr. dix neuf^muîet8.,jg^trente-
huit grands vases!(le cuir a transporter
1 'un plein, les -autres -vides.- Ceî; préparatifs
achevés, il place chacun do sês'.hommes dans
l'un des yase's" et l'on se".met j'opte. Arrivé
a la porte et Ali-Bîiba, le c^i pft à t n ê", e iVm u 1 e—
. tier, demande la permission d'y!passer la nuit.
— Ace.ordé! dit le bourgeois .'hospitalier. On
décharge -les mulets et on place,les -vases dans
la cour. A un signal donné., les voMirs fen-
(front les vases et feront ir.ruprion 'dans la
md^on. — t f, 1
'* Mais Morgiane, ,en mettant le pot au. feu rie
soi", s'aperçoit qu'il ,n'y a plus d'huile dans
- sa.IHmpe..,11 .est tard. Au lieu de courir la
ville, mieux vaut en emprunter une cruche
au marchand. Elle-s'approche *dii 'pfemier
• cn sqrî/jiiKclit^: ■—
, ^st;il tçnîps stupéfaite,
„vitti ses .esprits,, ét^répond.^ Pas encore,
mais bientôt!.. Puis elle s'approche des autres
vases. Partout même demande et même ré-
ponse. Arrivée au dernier vase, qur contenait
de l'huile, elle 'remplit sa cruche et-rentre ^à
.la cui/sine. Elle 'en revient bientôt, avec une
.;âtâ:pd( chri ÍJ diére.» dans laquelle «lie versé et
fait touie^L'h^nle ^ .(iu.^va'se. ^Q^ij^d
1 huile bout, elle prend la cKaudière^'îa' sou-r
lève avec effort et va la verser de vase en vase.
Les voleurs furent étouffés depuis le premier
jusqu'au dernier.
Restait le capitaine. Au bout d'un instant,
il sort, s'approche des vases, voit le sort de
ses compagnons, et prend la fuite épou-
vanté.
AH-Babn, reconnaissant, donna la liberté à
Morgiane, et lui promit de la réúou penser
comme elle le méritait avant de mourir.
- Après quoi il vécut en paix.
ROCAMBOLE
N° 188 LES
PAR
PONSON DU TERRAIL
QUATRIÈME PARTIE
UN DRAME DANS LE SOUTWARK
XLV
. On l'a vu, la femme de Paddy s'était opposée
de t;o,utes :ses forces à ce qu"il sortit.
: Mafe les'femmes si puissantes s ir l'homme
en toute autre circonstance, sont battues par la
taverne. ,
L'homme .qui â soif n'écoute rien.
Voii; îé ywiërd du 22 'DoYemb.re.
Donc, Paddy était parti.
Les enfants étaient couchés sur leur grabat,
côte à côte, la sœur et le f ère, exemple tou-
chaIt de la misère anglaise qui va jusqu'à mé-
langer les deux sexes.
Lisbeth remit du cook dans le poêle, l'addi-
tionna d'une galette de fiente de vache et, mou-
chant ayec ses doigts la chandelle de suif qui
brûlait sur la table, elle se mit à lire la bible en
bonne Anglaise qu'elle était.
Les catholiques convaincus s'accommodaient
mal des - transactions de conscience de mistress
Paddy : mais, elle, partant de ce principe, que
les pauvres gens n'ayant pas le choix de la beso-
gne, appartiennent .à ceux qui les payent et
suivent ensuite leurs oniîes, ne se jugeait pas
tellement coupable qu'elle ciùt pouvoir se dis
penser de ses devoirs religieux.
Do c, elle s'était mise à lire la bible fort
dévo ornent prêtant parfois l'oreille aux bruits
du dehors, s'interrompant quel uefois pour re-
garder les deux enfants qui dormaient.,
* Les heures s'écoulèrent.
Lisbeth lisait toujours, mais son visage deve-
nait de plus en pius inquiet.
Peu à peu les rumeurs du dehors ''s'étei-
gnaient; les. portes des maisons voisines se 'fer-
maient, le silence succédait au bruit.
Paddy ne revenait pas
Alors Lisbeth se leva et, de plus en plus . in-
quiète, ouvrant sa porte, elle se mit sur le
; euil.
Un homme entrait dans le passage, elle eut
un battement de cœur, pensant que c'était
Paddy. ,
Mais l'homme passa devant elle et ne s'arrêta
point. ■
Ce n'était point celui qu'elle attendait.
Puis après celui-là, un autre, et encore un
autre ; et puis, plus rien.
Le passage était devenu Ombre et silence. -
Lisbeth entendit sonner successivement deux
et trois heures du mat'n. -
Les femmes des ouvriers de Londres sont
comme les femmes du peuple- de Paris; elles
savent où sont les cabarets-que leurs maris fré-
quentent et connaissent les habitudes de chacun
de ces établi,,sements.
Lisbeth, de plus en plus agitée par des pres-
sentiments sinistres, repassa dans sa tête cette
nomenclature de public-house et de. tavernes
que Paddy fréquentait avant son incarcération.
Où était-il? Etait-il demeuré dans'le Sout-
wark? avait-il poussé .jusqu'au Borouglï?
Tout à coup un souvenir traversa son es-
prit. : -
Elle se rappela que, lorsqu'elle allait voir
Paddy à White-cioss, le prisonnier pour dettes
quand il avait bien maudit son créancier, pleuré
sur ses enfants dont il ét iit séparé et épuisé la
kyrielle de ses lamentations, donnait un regret
à la bière brune et au gin de Qw:én'j Elisabetlt '
Tare m.
Elle se rappela encore que, pendant cette
journée qui venait de s'écouler, le nom de celte
taverne lui était venu deux ou trois fois aux
lèvres.
Or, la'taverne de la Reine-Elisabeth était ce
qu'on appelle à Londres un établissement de
nuit. "
Elle avait une licence pour demeurer ouverte
jusqu'au jour.
Lisbeth n'hésita plus..
Les enfants dormaient, et à leur âge on a
le sommeil dur. -
Elie souffla la lampe, tira la porte après elle et
donna un tour de clé, tout en laissant cette clé
dans la serrure, pour le cas où Paddy rentrerait
tandis qu'elle serait à sa recherche.
.
Les pauvres ne Se volent pas entre e 'x.
Lisbeth savait bien que sa maison était la
dernière à la quelle les voleurs son,;e aient, par
la raison toute simple qu'il n'y avait rien à
voler. '
La femme de Paddy se mit donc à errer dans
le Soutwark. Tout en ayant la conviction que
son mari était à Quees's taverne, elle ne voulu'
5 MiU. le numéro JOURNAL QUOTIDIEN ' V-,'h 'cenL le iturnén
ABONNEMENTS. — Trois mois. Six mois. , on aD.
Paris 5 fr. 9 fr. t8 fr. z
Départements.. e fl 99
Administrateurh: E. DELSA HI.
* ...... 1 » 4 i )
3me annéè. —LUNDI 11 MAI 1868. - N° 753
en Birècteur-Prbpriëtaire : JAN NI-N. '
Réds&eur en chef: A. DE BAtA TH 1 ER BHAGEI,O^NE.
BUREAUX DABO*NNEI)IENT : 9, l'ue 3>s*oieei,"
ADMINISTRATION : 13, place Breda.,: 1 >• T r;
PARIS, 10 MAI 1868
ALI-BABA
ET LES QUARANTE VOLEURS
' X * ; >> , -
Dans urie ville de la Perse vÎTarprrf'deux
irères, nommés, l'unCassim, l'autre Ali-Baba.
Tous deux étaient nés pauvres; mais le pre-
mier avait épuisé une femme riche et fait
une grande fortune dans le commerce, tandis
que le second s'était marié avec une jeune fille
sans dot et en était réduit pour vivre à aller
couper du bois dans la forêt; son bois coupé,
il le chargeait sur trois ânes qui composaient
toute sa propriété.
Un jour, Ali-Baba achevait son travail,
quand un nuage de poussière lui annonça
l'arrivée d'une troupe de cavaliers. — Si
c'étaient des voleurs,... pensa-t-il ; ils pour-
raient me faire un mauvais parti. Et il monta
. sur un arbre dont le feuillage épais le cache-
rait à tous les yeux.
Arrivés au pied de l'arbre, les cavaliers
s'arrêtèrent.
Ils étaient au nombre de quarante.
Chacun d'eux prit une lourde valise sur son
cheval. Puis, leur chef s'approcha d'un ro-
cher et dit : : . ^ . ?
— S¿same, ouvrt-loi !...
Une porte cachée dans les pierres tourna
aussitôt sur sep gonds, et les quarante cava-
liers' y passèrent tour à tour.
Dès qu'ils eurent disparu, Ali-Baba eut
l'idée de descendre de sonarbreet des'enfuir;
mais il craignit d'être surpris; peut-être aussi
la curiosité le retint-elle.
..y .eja; soit* ikattendèV'eHl tR r-%ffcrï, *
car les quarante voleurs ressorUrent, retour-
nèrent à leurs chevaux et repartirent presque
aussitôt.
Quand il les eut .perdus de vue, le'bucheron
fut pris d'une ardente envie de savoir ce que
renfermait la caverne. 11 s'approcha du ro-
cher et dit comme il avait entendu dire :
— Sésame, ouvre-toi I
La porte s'ouvrit.
Ali-Baba s'attendait à trouver un lieu plein
ile ténèbres; il se trouva dans une'magnifi-
que salle, claire et spacieuse. Cette salle était
pleine de provisions de bouche, de ballots de
marchandises, et d'or amoncelé en tas ou en-
fermé dans des bourses de cuir.
Le pauvre diable n'hésita pas. Il prit d'or
la charge de ses trois ânes, et repartit pour
la ville.
Qui fut stupéfaite? Sa femme.
— Ali-Baba, lUi dit-elle, seriez-vous assez
malheureux pour avnir?...
Elle allait dire
Mais il lui raconta son histoire.
— Est-ce voler, dit-il, que voler des vo-
leurs?
Après quoi, il étala son or en recomman-
dant le plus profond secret.
La femme sortit pour aller emprunter une
mesure. L'or mesuré serait ensuite enfoui.
Mais l'emprunteuse eut le malheur de s'a-
dresser à sa belle-sœur. Celle-ci, curieuse de
savoir quel grain on mesurait, chez le bûche-
ron, appliqua une couche de suif .au-dessous
de la mesure. Quand on la lui rendit, une
pièce d'or y demeurait attachée.
— De l'or par mesures ? Où ce misérable
Baba l'a-t-il pris?
Elle raconta tout à son mari, et Cassim en
conçut une jalousie mortelle. Il courut chez
son frère.— Combien, lui dit-il, avez-vous de
pièces d'or pareilles à celle-ci ? Je pourrais
vous dénoncer à la justice, je préfère vous de-
mander la vérité.
Ali-Baba dit tout à son frère, comme il
avait tout dit à sa femme.
- Cassim, aussitôt, pris de la fièvre de l'or, se
njnd au rocher.— Sésame, ouvre-toi Il en-
tre, remplit d'or les sacs qu'il a apportés;
mais la porte s'est refermée et- il a oublié le
mot qui la fait ouvrir: — Orge, ouvre-toi !
dit-il. Il nomme successivement tous àes
grains.,. Il désespère. Les voleurs reviennent;
ils mettent en fuite les mulets que Cassim a
laissés à la porte. Ils entrent. Cassim essaye de
fuir. On le tue.
s* ■
. \ , .
Les voleurs délibèrent,
— Comment cet homme est-il entré ?
Pour effrayer quiconque serait tenté de
suivre son exemple, ils coupent son corps en
quatre morceaux ,et placent ces débris hu-
mains de chaque côté de la porte , en dedans
de la grotte.
La femme de Cassim, cependant, inquiète,
désolée, va trouver son beau-frère : — Où
peut être mon mari ? -
Ali-Baba le devine aussitôt. Il part avec
ses trois ânes, iùarrive et trouve le cadavre ]
en pièces du malheureux. Il le charge sur un j
de ses trois ânes, pose sur les autres deux j
sacs pleins d'or, recouvre le tout de fagots et '
relent; après quoi, il donne l'or à sa femme
et rapporte le cadavre à sa belle-sœur. - ^ ;> jj
La veuve de Cassim avait une esclave
nommée Morgiane, très-adroite et remplie
d 'ima*gination. Ali-Biba la prend pour confi-
dente.— Ecoute, lui dit-il, ma conversation
avec ta maîtresse.
il aborde sa belle-sœur, lui apprend l'af-
freuse vérité, la conso% et lui propo.se de la
prendre pour femme. On sait qu'en Orient il
est permis d'avoir plusieurs femmes. La
-veuve, pensant à la richesse d'Ali-Baba, ac-
cepte. Il s'agit dès lors de faire croire que
Cassim est mort naturellement. L'esclave s'en
charge. 4 ■> ; .
Elle annonce à tout le voisinage une ma-
ladie de son maître;. elle achète des drogues
chez un pharmacien; et, moyennant deux "piè-
ces d'or, elle obtient qu'un vieux savetier
vienne les yeux bandés recoudre les,morceaü x
du cadavre. BMf, on ensevelit Cassim, le ÍIHI-
riage's'accomplit, et les quatre personnes qu
sont seules dans le secret " s'établissent pour
vivre ensemble. Y :
: ' ' " ^ .
: r:r> . «■• -> ■ !
j Les* voleurs en rentrant dans la caverne,
s'aperçurent à la fois de la diminution ile leur
or et de la disparition du cadavre. •
Ils jurèrent de-sé venger.~ : >
Que fallait-il pour cela ? suivre une pister
-- Un d'entre eux s-ee dévoua. S'il faisait un:
il «W'Hii puni dé^rnrotk Çefeil
convenu, il partit.
Au jour il entrait déguisé dans la ville.
une seule boutique était ouverte : celle d'un
vieux savetier, Le voleur cause avec lui, et,
moyennant quelques pièces d'or, il apprend
que le bonhomme a cousu un cadavre. Reste
à trouver la maison.
Le savetierse fait bander les yeux ; il mar-
che en comptant ses pas ; on arrive à la porte
de Cassim. C'est ici ! Le voleur marque la
porte à la craie blanche et repart chercher ses
compagnons Mais l'esclave Morgiane sort
pour aller au -iiiai,ché, elle voit la marque, se
défie et trace des signes semblables sur deux
ou trois portes au dessus et au-dessous de
-celle de son maître. Quand les voleurs se pré-
sentent, ils ne savent laquelle choisir. Celui
... i
qui les a induits en erreur est condamné *
à mort tout d'une voix.
Un autre s'offre à le remplacer; il tente la
même aventure, achète de même le savetier,
; découvre'de même la maison et fait une petite
- marque rouge dans un endroit moins apparent.
— De la sorte,-se dit-il, il n'y aura pas à s'y
tromper!... Les voleurs reviennent. La mar-
que rouge est sur quatre ou cinq portes,
comme la blanche. Le second voleur a la tê e
coupée comme-le premier'.''• •.,, j
Le capitaine 'alors se résout à agic. ^pjluir
même. La porté reconnue, il j^.g^aye^iHS -sà
mémoire, de f,açojija ' ne'pou
Puis il fait achetçr. dix neuf^muîet8.,jg^trente-
huit grands vases!(le cuir a transporter
1 'un plein, les -autres -vides.- Ceî; préparatifs
achevés, il place chacun do sês'.hommes dans
l'un des yase's" et l'on se".met j'opte. Arrivé
a la porte et Ali-Bîiba, le c^i pft à t n ê", e iVm u 1 e—
. tier, demande la permission d'y!passer la nuit.
— Ace.ordé! dit le bourgeois .'hospitalier. On
décharge -les mulets et on place,les -vases dans
la cour. A un signal donné., les voMirs fen-
(front les vases et feront ir.ruprion 'dans la
md^on. — t f, 1
'* Mais Morgiane, ,en mettant le pot au. feu rie
soi", s'aperçoit qu'il ,n'y a plus d'huile dans
- sa.IHmpe..,11 .est tard. Au lieu de courir la
ville, mieux vaut en emprunter une cruche
au marchand. Elle-s'approche *dii 'pfemier
• cn sqrî/jiiKclit^: ■—
, ^st;il tçnîps stupéfaite,
„vitti ses .esprits,, ét^répond.^ Pas encore,
mais bientôt!.. Puis elle s'approche des autres
vases. Partout même demande et même ré-
ponse. Arrivée au dernier vase, qur contenait
de l'huile, elle 'remplit sa cruche et-rentre ^à
.la cui/sine. Elle 'en revient bientôt, avec une
.;âtâ:pd( chri ÍJ diére.» dans laquelle «lie versé et
fait touie^L'h^nle ^ .(iu.^va'se. ^Q^ij^d
1 huile bout, elle prend la cKaudière^'îa' sou-r
lève avec effort et va la verser de vase en vase.
Les voleurs furent étouffés depuis le premier
jusqu'au dernier.
Restait le capitaine. Au bout d'un instant,
il sort, s'approche des vases, voit le sort de
ses compagnons, et prend la fuite épou-
vanté.
AH-Babn, reconnaissant, donna la liberté à
Morgiane, et lui promit de la réúou penser
comme elle le méritait avant de mourir.
- Après quoi il vécut en paix.
ROCAMBOLE
N° 188 LES
PAR
PONSON DU TERRAIL
QUATRIÈME PARTIE
UN DRAME DANS LE SOUTWARK
XLV
. On l'a vu, la femme de Paddy s'était opposée
de t;o,utes :ses forces à ce qu"il sortit.
: Mafe les'femmes si puissantes s ir l'homme
en toute autre circonstance, sont battues par la
taverne. ,
L'homme .qui â soif n'écoute rien.
Voii; îé ywiërd du 22 'DoYemb.re.
Donc, Paddy était parti.
Les enfants étaient couchés sur leur grabat,
côte à côte, la sœur et le f ère, exemple tou-
chaIt de la misère anglaise qui va jusqu'à mé-
langer les deux sexes.
Lisbeth remit du cook dans le poêle, l'addi-
tionna d'une galette de fiente de vache et, mou-
chant ayec ses doigts la chandelle de suif qui
brûlait sur la table, elle se mit à lire la bible en
bonne Anglaise qu'elle était.
Les catholiques convaincus s'accommodaient
mal des - transactions de conscience de mistress
Paddy : mais, elle, partant de ce principe, que
les pauvres gens n'ayant pas le choix de la beso-
gne, appartiennent .à ceux qui les payent et
suivent ensuite leurs oniîes, ne se jugeait pas
tellement coupable qu'elle ciùt pouvoir se dis
penser de ses devoirs religieux.
Do c, elle s'était mise à lire la bible fort
dévo ornent prêtant parfois l'oreille aux bruits
du dehors, s'interrompant quel uefois pour re-
garder les deux enfants qui dormaient.,
* Les heures s'écoulèrent.
Lisbeth lisait toujours, mais son visage deve-
nait de plus en pius inquiet.
Peu à peu les rumeurs du dehors ''s'étei-
gnaient; les. portes des maisons voisines se 'fer-
maient, le silence succédait au bruit.
Paddy ne revenait pas
Alors Lisbeth se leva et, de plus en plus . in-
quiète, ouvrant sa porte, elle se mit sur le
; euil.
Un homme entrait dans le passage, elle eut
un battement de cœur, pensant que c'était
Paddy. ,
Mais l'homme passa devant elle et ne s'arrêta
point. ■
Ce n'était point celui qu'elle attendait.
Puis après celui-là, un autre, et encore un
autre ; et puis, plus rien.
Le passage était devenu Ombre et silence. -
Lisbeth entendit sonner successivement deux
et trois heures du mat'n. -
Les femmes des ouvriers de Londres sont
comme les femmes du peuple- de Paris; elles
savent où sont les cabarets-que leurs maris fré-
quentent et connaissent les habitudes de chacun
de ces établi,,sements.
Lisbeth, de plus en plus agitée par des pres-
sentiments sinistres, repassa dans sa tête cette
nomenclature de public-house et de. tavernes
que Paddy fréquentait avant son incarcération.
Où était-il? Etait-il demeuré dans'le Sout-
wark? avait-il poussé .jusqu'au Borouglï?
Tout à coup un souvenir traversa son es-
prit. : -
Elle se rappela que, lorsqu'elle allait voir
Paddy à White-cioss, le prisonnier pour dettes
quand il avait bien maudit son créancier, pleuré
sur ses enfants dont il ét iit séparé et épuisé la
kyrielle de ses lamentations, donnait un regret
à la bière brune et au gin de Qw:én'j Elisabetlt '
Tare m.
Elle se rappela encore que, pendant cette
journée qui venait de s'écouler, le nom de celte
taverne lui était venu deux ou trois fois aux
lèvres.
Or, la'taverne de la Reine-Elisabeth était ce
qu'on appelle à Londres un établissement de
nuit. "
Elle avait une licence pour demeurer ouverte
jusqu'au jour.
Lisbeth n'hésita plus..
Les enfants dormaient, et à leur âge on a
le sommeil dur. -
Elie souffla la lampe, tira la porte après elle et
donna un tour de clé, tout en laissant cette clé
dans la serrure, pour le cas où Paddy rentrerait
tandis qu'elle serait à sa recherche.
.
Les pauvres ne Se volent pas entre e 'x.
Lisbeth savait bien que sa maison était la
dernière à la quelle les voleurs son,;e aient, par
la raison toute simple qu'il n'y avait rien à
voler. '
La femme de Paddy se mit donc à errer dans
le Soutwark. Tout en ayant la conviction que
son mari était à Quees's taverne, elle ne voulu'
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