Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1868-04-30
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 30 avril 1868 30 avril 1868
Description : 1868/04/30 (A3,N742). 1868/04/30 (A3,N742).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717744h
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
JOURNAL QUOTIDIEN
& cent. le numéro '
Ii cent. le numéro -
ABONNEMENTS. — Trois mois. Six mois. Un an.
Paris & fr. 9 fr. 18 fr.
Départements.. 8 11
Administrateur : E. DELSAUX. e e
3me année. — JEUDI 30 AVRIL ,1 tiG8. — N° 742
i
Directeur- Proprié7taire : J*anntn.
Bédacteur en chef: A. DE BALATHtEIt BRAGELONNE.
Bureaux d'abonnement : rue Ih"OiJot.
Administration : 13, place Breda.
Les tirages des premiers numér^de-f--^
L'HOMME AUX 4 FEMMES E fy
ont été vite épuisés. / -x '
Nous avons réimprimé les «numéros man-
quants, et l'on peut se proci^^5jau}on"rd'biùi
tous les exemplaires parus dV'î^rervSMIBse
judiciaire: •
A Paris, chez les libraires, les mctréfefttTfTs'
de journaux, et dans nos bureaux de la rue
du Croissant, de la rue Drouot et de la rue
Breda.
En province, chez nos correspondants, et
chez tous les marchands de journaux.
Si le public ne les trouve pas chez nn mar-
chand, il les trouvera facilement chez un
autre.
PARIS, 29 AVRIL 1868.
LE TRAVAIL DES ENFANTS
2me LETTRE A UN APPRENTI
J',conte cette histoire, mon bonhomme.
Elle se passe dans la rue.
Un homme et une femme se disputent. De
la dispute, on en vient aux coups. L'homme
levé la main.
Passe un enfant, un apprenti, haut comme
ma canne, qui s'arrête et montre le poing.
— Oh! le lâche, 'qui bat les femmes! Le-
lâche et le fainéant!..* _"d' » .
L'autre s'arrête...... ;
— Eh bien! oui, je les bats. Après? De
quoi te mêles-tu ?
— Je me mêle de ce qui me plaît.
— Et moi,je te dis que tu vas te taire!
— Je me tairai si je veux !...
L'homme se sent intimidé. La femme, se
voyant soutenue, reprend courage.
On se remet à causer. - — {, • •
— Je vas te conter l'affaire, petiot.
— Mon petit ami, je vas vous dire la vé-,
rite.
Le gamin se campe, les jambes' écartées,
les poings sur les hanches, immobile état-'
tentif.
L'homme commence. La femme l'inter-
rompt. Il reprend. Elle l'interrompt encore.
Cela dure une demi-heure.
I Enfin, ils ont fini, ils attendent le mot de
■^l'arbitre.
4 Lui, les regarde tour à tour pendant une
' minute ; puis :
£ J— Tout ça m'est bien égal ! dit-il avec
if' nquiJlité.
/Et il prend ses jambes à son cou.
Ce gamin, mon bonhomme, avait de l'es-
prit, mais il aurait mieux fait d'aller à l'école
qu-e d'arbitrer les différends des ménages dans
la rue.
Aller à l'école, voilà l'idéal pour un enfant ;
aujourd'hui que tout homme est appelé à de-
venir citoyen et à prendre sa part de là' chose
publique, la question de l'éducation est-.de-
venue là première et la plus importante des
questions. -• ■ ■ 11
Il fut un temps où l'on se faisait maçon ou
chaudronnier, parce qu'on voyait son père
empiler des pierres ou marteler du cuivre.
Mais ce temps-là n'est plus, et la coutume
ne régit pas seule le choix d'un état. : ; 1 ■
Toutes les professions sont ouvertes à tou-,
tes les aptitudes.
Reste à diriger la nature dans là voie qui
lui convient. - ■ ...
Cette double tâche revient à la mère d'abord,
à l'instituteur ensuite.
La mère dit à l'enfant : — Ceci est bien,
fais-le ! ceci est mal, ne le fais pas !
L'instituteur lui apprend à lire, à écrire, à
compter, l'histoire et la géographie. Il serait à
désirerapprît encore la gymnastique:
des.e"xer.cices qui sont un plaisir forlifient;,le
travail de l'atelier, au contraire, fatigue parce
qu'il est une tâche.
* * t
Malheureusement cette tâclw est néces-
saire. On a établi le budget d'une famille
d'ouvriers composée de quatre personnes :
Loyer. Fr. 250
■ Entretien (62 fr. 50 c. par per-
sonne) ... 250
• Chaufrage et éclairage ... 50
.' Blanchissage 50*
. Nourriture (à75 c. par jour, par 1
personne) l,f bO
Total... 1,700
Telle est la dépense. Reste à connaître la I
recette.
La Chambre de commerce de Paris évalue
le salaire des ouvriers à 4 fr. 41 c. par jour en
movenne.
Maps quel est le nombre juste des journées
de travail?
Il faut d'abord retrancher au moins un
jour jrar semaine, qui est donné au repos,
soit :*i 52 jours
Oni ne saurait fixer à moins les
jours'perdus pour cause de morte
saisop, de maladie, de change-
mentjs d'atelier, de changements
d'outrage, etc., etc., soit encere.. 52
i
l Ensemble.... 104 jours
-
EnCjdéduisant ces 104 jours des 365, nous
aurons 261 jours utiles dans l'année : met-
tons 280 pour ceux qui voient en beau.
280 journées, à 4 fr. 41 c., donnent un
total jde 1,234 fr. 80 c. '
J'ai dit que la dépense s'élevait à 1700 fr.
Le déficit est donc de 500 fr., ou à peu
près., •
Comment faire face à ce déficit?
pas de théorie, mais le fait brutaL
La femme travaillera. > ;
Si elle devient mèrë, elle ne pourra nourrir
son enfant. Si l'enfant revient bien portant de
chezsa nourrice, elle ne pourra le surveiller,
et il , vivra abandonné comme 'un sauvage,
jusqu'à l'âge de huit ans...
.A Tiuit ans, il deviendra ouvrier à son
tour.. •
. ■ ' i J :
L'atelier, à huit ans! L'atelier, avec ses qua-
tre murs, son air malsain, sa besogne régu-
lière, et ses propos... L'atelier, où l'on reste.
dix heures par jour, où les membres, se bri-
sent, où l'esprit se 'déprave, où l'heure de
l'école, lorsqu'elle soiir,'Ie,, épouvante l'enfant,
— car elle est pour lui le glas d'un nouveau •
travail
Eh bien ! oui, tout cela est vrai ; mais ce qui '
èsf yrllf de ernê'nile,, c'est que l'atelier repré-
sente l'abri, la surveillance, un salaire, c'est- !
à-dire un progrès sur l'abandon du logis ' et ]
les hasards de la rue. j
. j Entre le travail prématuré et le vagabon-
dage, il faut choisir.
Des deux maux, le travail paraît le
moindre.
A une condition pourtant : c'est qu'il soit
proportionné à l'âge et aux forces de l'en-
fant.
Las ministres d'e toutes les religions, les
philosophes de toutes les écoles, les hommes
d'Etat de tous les partis ont uni leurs efforts
dans le sens de cette double réforme :
Elever le chiffre de. l'âge auquel il sera
permis de faire travailler les enfants;
Abaisser la durée de la journée de tra-
vail.
La Prusse et la Bavière fixent à neuf ans
l'admission dans les fabriques; l'Autriche et
la Saxe la fixent à dix ans ; la Suède, à douze.
En Angleterre, le travail des enfants de neuf
à treize ans est limité à six heures et demie
par jour; l'école est obligatoire pendant trois
heures.
Je voudrais, disais-je il y a quelques mois,
qu'il en fut en France comme en Angleterre.
Chez nous, les législateurs s'en rapportent à
la douceur des mœurs..En général, les patrons
français sont humains, et le désir de soutenir
la concurrence ne les aveugle pas au point de
sacrifier la santé et 1e bien-être des enfants
qu'on leur confie. Je suis convaincu que, fIli-
nôtres, industriels, sociétés protectrices de
l'enfance dan's'les manufactures, feront tant
qu'on réduira les heures de l'atelier au
bénéfice de celles de la famille et de l'é-
Lorsque je disais cela, je savais les noms
de tes protMtiBOTB, irron -pe.tit tsotibomme,
MIVÇ Migneret et,
M. Guizot, M. Michel Chevalière^ M. Jules
Simon, bien d;agirpsL-encore, des poésies-,• des
économistes, desjn&nu facturiers, desavocate,
tous illustres ou connus; et jie. savais aussi
cômbien tu pouvais compter sur eux.
Je ne me trompais pas. Je lis en eflet dans
les journaux de ce matin qu'une Réforme se
prépare dont l'initiative appartient au gou-
vernement lui-même.
Ce qu'e tu gagnerais, mon ami, à ces, dispo-
sitions, nouvelles, je vais te l'apprendre, à toi
qui. na connais que ta Petite Presse, et ne lis
pas les autres journaux.
, Au lieu de huit à douze ans, ce serait de
huit à treize ans que les enfants ne pour,
'raient'être astreints'au travail plus de six
heures sur vingt-quatre. De dix à quatorze
ROCAMBOLE
mess=""N° 178 LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
QUATRIÈME PARTIE
UN DRAME DANS LE SOUTWARK
XXXIV.
•
Miss Ellen avait parfaitement deviné le moyen
employé par l'homme gris pour quitter le sou-
terrain et retourner dans le Soutwark.
A Londres, où la Tamise est cinq ou six fois
plus large que la Seine, il y a des milliers de
barques sur le fleuve.
L'absence de quais force les négociants à avoir
Voir le numéro du 22 novembre.
leurs magasins ouverts sur le fleuve : de là'pour
pour eux, la nécessité d'avoir une barque.
Der distance en distance une rue étroite-des-
cend jusqu'à la rivière.. •
C'est presque toujours en face de cette rue
qu'on amarre les bateaux. '
La nuit, le premier venu est libre de déta-
cher un bateau, et de s'aller promener sur la Ta-
mise, à ses risques et 'périls, par exemple, car il
peut manœuvrer maladroitement son embarca-
tion et chavirer; ou bien encore rencontrer les
gens de police du Royalist et ne pas leur don-
ner des explications suffisantes pour qu'ils lui
laissent continuer sa promenade.
Ces deux chances à courir n'avaient proba-
blement pas beaucoup ému l'homme gris, car il
avait traversé la première fois la Tamise dans
un étroit bateau, et avait ensuite amarré cette
petite embarcation à l'anneau de fer remarqué
par miss Ellen. ■
Le bateau, solidement attaché, n'avait été vu
par personne sans doute, car l'homme gris,
après sa brusque et mystérieuse sortie du cabinet
de lord Palmure, regagnant la Tamise par le
souterrain, le trouva à la place où il l'avait
laissé.
Il remonta dedans, prit l'unique aviron qui
s'embossait à la poupe dans une entaille et se
mit à godiller, pour nous servir du terme con-
sacré. ■ ;
En moins d'un quart d'heure, l'homme gris
eut traversé la Tamise. Il atteignit le Soutwark,
laissa la barque où il'l'avait prise et s'enfonça
dans le dédale de petites rues noires qui envi-
ronnent Saint-George.
Les abords de 'l'église étaient plongés dans le
brouillard et le silence.
La latnpe s'était éteinte en haut du clocher,
et il ne .passait personne' au long du cimetière
dont la grille, au lieu d'être fermée, avait été
poussée tout contre, de façon que l'homme gris
pût rentrer quand bon lui semblerait.
Cependant, tomme il arrivait à cette grille, il
lui sembla qu'il entendait une sorte de gémisse-
ment.
L'homme gris entra dans le cimetière et prit,
à travers les tombes, le sentier qui conduisait à
la petite porte du chœur.
.. Alors il entendit plus distinctement les gé-
missements, et, ayant fait quelques pas encore,
il vit une forme noire accroupie sur le seuil de
la porte. ' '
Cette forme noire était un homme, et cet
homme tenait son front,dans ses mains.
Comme la nuit était sombre et le brouillard
épais, il eût été difficile à l'homme gris de voir
l3 visage de cet homme.
. Aussi s'ar:rêta-t-il brusquement et s'écria-t-il:
. — Ql1i est là ?
^ La forme noire se'dressa et,utie voix lamen-
table -répondit ' ''
. —t C'est moi,.. moi, Shoking.... Il
"— Ah! c'est toi, dit l'homme grisj^lont, ho-
, king avait pareillement reconnu la. yùrx:, "
— Oui, maître.',
— Qu'est-ce que tu'as "(loue'? on dirait que tu
pleures. r .
— A chaudes larmes, maître, teignit. Sho-
king.
— Que'l'est-H donc arrivé?
— Un grand malheur.
— Un malheur personnel ?..
— Tout à fait personnel, maître; cela ne re-
garde que moi. •
L'homme gris prit Shoking par le bras.
— Chut 1 dit-il, nç faisons pas de bruit, ici; tu
me conteras tout cela là-haut, et il est probable
que je trouverai le moyen de remédier au mal-
heur dont tu parles. #
- Vrai? fit Shoking.
— Je l'espère, pu moins.
L'homme gris tira une petite clé de sa poche,
ouvrit la porte du chœur, et introduisit Shoking
dans l'église.
L'obscurité était plus grande encore à l'inté-
rieur qu'au dehors.'
Ne fais pas de bruit, dit l'homme gris en
prenant Shoking par là main et en l'entrainant
vers l'escalier du clocher, il ne faut pas réveiller
le vieux sacristain.
Shoking monta, sans souffler mot de son mal.
heur; mais il poussa des soupirs à fendre l'âme,
t l'homme gris dirait :
— Qu'est-ce qu'il peut donç bifn avoiï. l'ami
. Shoking j
JOURNAL QUOTIDIEN
& cent. le numéro '
Ii cent. le numéro -
ABONNEMENTS. — Trois mois. Six mois. Un an.
Paris & fr. 9 fr. 18 fr.
Départements.. 8 11
Administrateur : E. DELSAUX. e e
3me année. — JEUDI 30 AVRIL ,1 tiG8. — N° 742
i
Directeur- Proprié7taire : J*anntn.
Bédacteur en chef: A. DE BALATHtEIt BRAGELONNE.
Bureaux d'abonnement : rue Ih"OiJot.
Administration : 13, place Breda.
Les tirages des premiers numér^de-f--^
L'HOMME AUX 4 FEMMES E fy
ont été vite épuisés. / -x '
Nous avons réimprimé les «numéros man-
quants, et l'on peut se proci^^5jau}on"rd'biùi
tous les exemplaires parus dV'î^rervSMIBse
judiciaire: •
A Paris, chez les libraires, les mctréfefttTfTs'
de journaux, et dans nos bureaux de la rue
du Croissant, de la rue Drouot et de la rue
Breda.
En province, chez nos correspondants, et
chez tous les marchands de journaux.
Si le public ne les trouve pas chez nn mar-
chand, il les trouvera facilement chez un
autre.
PARIS, 29 AVRIL 1868.
LE TRAVAIL DES ENFANTS
2me LETTRE A UN APPRENTI
J',conte cette histoire, mon bonhomme.
Elle se passe dans la rue.
Un homme et une femme se disputent. De
la dispute, on en vient aux coups. L'homme
levé la main.
Passe un enfant, un apprenti, haut comme
ma canne, qui s'arrête et montre le poing.
— Oh! le lâche, 'qui bat les femmes! Le-
lâche et le fainéant!..* _"d' » .
L'autre s'arrête...... ;
— Eh bien! oui, je les bats. Après? De
quoi te mêles-tu ?
— Je me mêle de ce qui me plaît.
— Et moi,je te dis que tu vas te taire!
— Je me tairai si je veux !...
L'homme se sent intimidé. La femme, se
voyant soutenue, reprend courage.
On se remet à causer. - — {, • •
— Je vas te conter l'affaire, petiot.
— Mon petit ami, je vas vous dire la vé-,
rite.
Le gamin se campe, les jambes' écartées,
les poings sur les hanches, immobile état-'
tentif.
L'homme commence. La femme l'inter-
rompt. Il reprend. Elle l'interrompt encore.
Cela dure une demi-heure.
I Enfin, ils ont fini, ils attendent le mot de
■^l'arbitre.
4 Lui, les regarde tour à tour pendant une
' minute ; puis :
£ J— Tout ça m'est bien égal ! dit-il avec
if' nquiJlité.
/Et il prend ses jambes à son cou.
Ce gamin, mon bonhomme, avait de l'es-
prit, mais il aurait mieux fait d'aller à l'école
qu-e d'arbitrer les différends des ménages dans
la rue.
Aller à l'école, voilà l'idéal pour un enfant ;
aujourd'hui que tout homme est appelé à de-
venir citoyen et à prendre sa part de là' chose
publique, la question de l'éducation est-.de-
venue là première et la plus importante des
questions. -• ■ ■ 11
Il fut un temps où l'on se faisait maçon ou
chaudronnier, parce qu'on voyait son père
empiler des pierres ou marteler du cuivre.
Mais ce temps-là n'est plus, et la coutume
ne régit pas seule le choix d'un état. : ; 1 ■
Toutes les professions sont ouvertes à tou-,
tes les aptitudes.
Reste à diriger la nature dans là voie qui
lui convient. - ■ ...
Cette double tâche revient à la mère d'abord,
à l'instituteur ensuite.
La mère dit à l'enfant : — Ceci est bien,
fais-le ! ceci est mal, ne le fais pas !
L'instituteur lui apprend à lire, à écrire, à
compter, l'histoire et la géographie. Il serait à
désirerapprît encore la gymnastique:
des.e"xer.cices qui sont un plaisir forlifient;,le
travail de l'atelier, au contraire, fatigue parce
qu'il est une tâche.
* * t
Malheureusement cette tâclw est néces-
saire. On a établi le budget d'une famille
d'ouvriers composée de quatre personnes :
Loyer. Fr. 250
■ Entretien (62 fr. 50 c. par per-
sonne) ... 250
• Chaufrage et éclairage ... 50
.' Blanchissage 50*
. Nourriture (à75 c. par jour, par 1
personne) l,f bO
Total... 1,700
Telle est la dépense. Reste à connaître la I
recette.
La Chambre de commerce de Paris évalue
le salaire des ouvriers à 4 fr. 41 c. par jour en
movenne.
Maps quel est le nombre juste des journées
de travail?
Il faut d'abord retrancher au moins un
jour jrar semaine, qui est donné au repos,
soit :*i 52 jours
Oni ne saurait fixer à moins les
jours'perdus pour cause de morte
saisop, de maladie, de change-
mentjs d'atelier, de changements
d'outrage, etc., etc., soit encere.. 52
i
l Ensemble.... 104 jours
-
EnCjdéduisant ces 104 jours des 365, nous
aurons 261 jours utiles dans l'année : met-
tons 280 pour ceux qui voient en beau.
280 journées, à 4 fr. 41 c., donnent un
total jde 1,234 fr. 80 c. '
J'ai dit que la dépense s'élevait à 1700 fr.
Le déficit est donc de 500 fr., ou à peu
près., •
Comment faire face à ce déficit?
pas de théorie, mais le fait brutaL
La femme travaillera. > ;
Si elle devient mèrë, elle ne pourra nourrir
son enfant. Si l'enfant revient bien portant de
chezsa nourrice, elle ne pourra le surveiller,
et il , vivra abandonné comme 'un sauvage,
jusqu'à l'âge de huit ans...
.A Tiuit ans, il deviendra ouvrier à son
tour.. •
. ■ ' i J :
L'atelier, à huit ans! L'atelier, avec ses qua-
tre murs, son air malsain, sa besogne régu-
lière, et ses propos... L'atelier, où l'on reste.
dix heures par jour, où les membres, se bri-
sent, où l'esprit se 'déprave, où l'heure de
l'école, lorsqu'elle soiir,'Ie,, épouvante l'enfant,
— car elle est pour lui le glas d'un nouveau •
travail
Eh bien ! oui, tout cela est vrai ; mais ce qui '
èsf yrllf de ernê'nile,, c'est que l'atelier repré-
sente l'abri, la surveillance, un salaire, c'est- !
à-dire un progrès sur l'abandon du logis ' et ]
les hasards de la rue. j
. j Entre le travail prématuré et le vagabon-
dage, il faut choisir.
Des deux maux, le travail paraît le
moindre.
A une condition pourtant : c'est qu'il soit
proportionné à l'âge et aux forces de l'en-
fant.
Las ministres d'e toutes les religions, les
philosophes de toutes les écoles, les hommes
d'Etat de tous les partis ont uni leurs efforts
dans le sens de cette double réforme :
Elever le chiffre de. l'âge auquel il sera
permis de faire travailler les enfants;
Abaisser la durée de la journée de tra-
vail.
La Prusse et la Bavière fixent à neuf ans
l'admission dans les fabriques; l'Autriche et
la Saxe la fixent à dix ans ; la Suède, à douze.
En Angleterre, le travail des enfants de neuf
à treize ans est limité à six heures et demie
par jour; l'école est obligatoire pendant trois
heures.
Je voudrais, disais-je il y a quelques mois,
qu'il en fut en France comme en Angleterre.
Chez nous, les législateurs s'en rapportent à
la douceur des mœurs..En général, les patrons
français sont humains, et le désir de soutenir
la concurrence ne les aveugle pas au point de
sacrifier la santé et 1e bien-être des enfants
qu'on leur confie. Je suis convaincu que, fIli-
nôtres, industriels, sociétés protectrices de
l'enfance dan's'les manufactures, feront tant
qu'on réduira les heures de l'atelier au
bénéfice de celles de la famille et de l'é-
Lorsque je disais cela, je savais les noms
de tes protMtiBOTB, irron -pe.tit tsotibomme,
MIVÇ Migneret et,
M. Guizot, M. Michel Chevalière^ M. Jules
Simon, bien d;agirpsL-encore, des poésies-,• des
économistes, desjn&nu facturiers, desavocate,
tous illustres ou connus; et jie. savais aussi
cômbien tu pouvais compter sur eux.
Je ne me trompais pas. Je lis en eflet dans
les journaux de ce matin qu'une Réforme se
prépare dont l'initiative appartient au gou-
vernement lui-même.
Ce qu'e tu gagnerais, mon ami, à ces, dispo-
sitions, nouvelles, je vais te l'apprendre, à toi
qui. na connais que ta Petite Presse, et ne lis
pas les autres journaux.
, Au lieu de huit à douze ans, ce serait de
huit à treize ans que les enfants ne pour,
'raient'être astreints'au travail plus de six
heures sur vingt-quatre. De dix à quatorze
ROCAMBOLE
mess=""N° 178 LES
MISÈRES DE LONDRES
PAR
PONSON DU TERRAIL
QUATRIÈME PARTIE
UN DRAME DANS LE SOUTWARK
XXXIV.
•
Miss Ellen avait parfaitement deviné le moyen
employé par l'homme gris pour quitter le sou-
terrain et retourner dans le Soutwark.
A Londres, où la Tamise est cinq ou six fois
plus large que la Seine, il y a des milliers de
barques sur le fleuve.
L'absence de quais force les négociants à avoir
Voir le numéro du 22 novembre.
leurs magasins ouverts sur le fleuve : de là'pour
pour eux, la nécessité d'avoir une barque.
Der distance en distance une rue étroite-des-
cend jusqu'à la rivière.. •
C'est presque toujours en face de cette rue
qu'on amarre les bateaux. '
La nuit, le premier venu est libre de déta-
cher un bateau, et de s'aller promener sur la Ta-
mise, à ses risques et 'périls, par exemple, car il
peut manœuvrer maladroitement son embarca-
tion et chavirer; ou bien encore rencontrer les
gens de police du Royalist et ne pas leur don-
ner des explications suffisantes pour qu'ils lui
laissent continuer sa promenade.
Ces deux chances à courir n'avaient proba-
blement pas beaucoup ému l'homme gris, car il
avait traversé la première fois la Tamise dans
un étroit bateau, et avait ensuite amarré cette
petite embarcation à l'anneau de fer remarqué
par miss Ellen. ■
Le bateau, solidement attaché, n'avait été vu
par personne sans doute, car l'homme gris,
après sa brusque et mystérieuse sortie du cabinet
de lord Palmure, regagnant la Tamise par le
souterrain, le trouva à la place où il l'avait
laissé.
Il remonta dedans, prit l'unique aviron qui
s'embossait à la poupe dans une entaille et se
mit à godiller, pour nous servir du terme con-
sacré. ■ ;
En moins d'un quart d'heure, l'homme gris
eut traversé la Tamise. Il atteignit le Soutwark,
laissa la barque où il'l'avait prise et s'enfonça
dans le dédale de petites rues noires qui envi-
ronnent Saint-George.
Les abords de 'l'église étaient plongés dans le
brouillard et le silence.
La latnpe s'était éteinte en haut du clocher,
et il ne .passait personne' au long du cimetière
dont la grille, au lieu d'être fermée, avait été
poussée tout contre, de façon que l'homme gris
pût rentrer quand bon lui semblerait.
Cependant, tomme il arrivait à cette grille, il
lui sembla qu'il entendait une sorte de gémisse-
ment.
L'homme gris entra dans le cimetière et prit,
à travers les tombes, le sentier qui conduisait à
la petite porte du chœur.
.. Alors il entendit plus distinctement les gé-
missements, et, ayant fait quelques pas encore,
il vit une forme noire accroupie sur le seuil de
la porte. ' '
Cette forme noire était un homme, et cet
homme tenait son front,dans ses mains.
Comme la nuit était sombre et le brouillard
épais, il eût été difficile à l'homme gris de voir
l3 visage de cet homme.
. Aussi s'ar:rêta-t-il brusquement et s'écria-t-il:
. — Ql1i est là ?
^ La forme noire se'dressa et,utie voix lamen-
table -répondit ' ''
. —t C'est moi,.. moi, Shoking.... Il
"— Ah! c'est toi, dit l'homme grisj^lont, ho-
, king avait pareillement reconnu la. yùrx:, "
— Oui, maître.',
— Qu'est-ce que tu'as "(loue'? on dirait que tu
pleures. r .
— A chaudes larmes, maître, teignit. Sho-
king.
— Que'l'est-H donc arrivé?
— Un grand malheur.
— Un malheur personnel ?..
— Tout à fait personnel, maître; cela ne re-
garde que moi. •
L'homme gris prit Shoking par le bras.
— Chut 1 dit-il, nç faisons pas de bruit, ici; tu
me conteras tout cela là-haut, et il est probable
que je trouverai le moyen de remédier au mal-
heur dont tu parles. #
- Vrai? fit Shoking.
— Je l'espère, pu moins.
L'homme gris tira une petite clé de sa poche,
ouvrit la porte du chœur, et introduisit Shoking
dans l'église.
L'obscurité était plus grande encore à l'inté-
rieur qu'au dehors.'
Ne fais pas de bruit, dit l'homme gris en
prenant Shoking par là main et en l'entrainant
vers l'escalier du clocher, il ne faut pas réveiller
le vieux sacristain.
Shoking monta, sans souffler mot de son mal.
heur; mais il poussa des soupirs à fendre l'âme,
t l'homme gris dirait :
— Qu'est-ce qu'il peut donç bifn avoiï. l'ami
. Shoking j
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