Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1866-10-06
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 06 octobre 1866 06 octobre 1866
Description : 1866/10/06 (N170). 1866/10/06 (N170).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4717354h
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/10/2017
f1
Tiie Mv Guibaz a été emportée. M. Perret, cultivateur
aux Fourneaux, ce trouvant sur le bord du canal de la
jytreée des Alpes, voulut arrêter uhe épave, mais au
M"-- nidiéèiit le tèeétn'et déroba Bous lui et il fut
MBpôrte par le torrent. Son corps a ' été depuis vaine.
mfcflt recherché.
fcDaii8 le canton ' de Mo'iane on évalue approxima-
tirèïBBflt les pertes à 800,000 francs. »
las lettrés d'Angers du 3 octobre établissent de la
façon suivante la situation actuelle des dégâts causés
dtos le département de Mainu--et-Loire :
'lie-s levées de -la LoiTe ne sont rompues que sur deux
points vers Gohier, sur lalrive gauche, et vois Saint-
Martin-de-la-Place, sur la rive droite.
Vers Gohier, à distance à peu près égale entre Satimur
et Angers, le val envahi est peu important comme cul-
ture ; les dégâts y sont donc peu graves.
Vers Saint-Marlin-de-la-Placc, à quelques kilomètres
dfe Saumur, les suites de la rupture sont plus à redouter,
et il n'est pas encore possible de les prévoir avec cer":
titude. En ce point le chemin de fer forme une pre-
mière barrière que les eaux ont renversée sur une lon-
gueur d'environ 60 mètres et sur une profondeur de 7
mètres.
En arrière de ce premier obstacle, les eaux sont vé-
-nues se heurtera la levée proprement dite et l'ont éga-
lement coupée sur une longueur ég'.lle, mais sur une
profondeur moindre. Les eaux ont aussi envahi le val
' 'de l'Authion. C'est une large et riche vallée parallèle à
•]û Loire et qui s'étend jusqu'à Trelazé. Une levée, dite
-levée Napoléon, construite en 1856, protège Trelazé.
Les eaux de la brèche de Saint-Martin-de-la-Place s'a-
vancent en ce moment par cette vallée, mais très-len-
tement; elles ne causeront que peu de dommages.
Une arche du pont de la route impériale a été enle-
vée dans la traverse des Ponts-de-Cé, mais la circula-
tion a pu être rétablie au bout de quelques heures.
D'une lettre écrite de Saint-Brisscn au Journal du
Loiret, en date du 3 octobre, nous extrayons les pas-
sages suivants : 1
« L'eau recouvre encore une grande étendue de ter-
rain entre Saint-BriSson et Saint-Firmin, ee qui ne
permet pas d'apprécier toutes les pertes : mais elles sont
¡beaucoup plus grandes qu'en 18561... Saint-Firmin a
'été entièrement submergé.
» Les habitants ont pu préserver leur linge et leur
'mobilier en les entassant dans les greniers, et se sau-
rèer sur la côte, où ils ont bivouaqué quatre jours et
[quatre nuits. Ils sont maintenant rentrés dans leurs
^habitations qu'ils nettoient à grande eau. Tout le four-
irage, tout le blé resté dans les granges est perdu ; les
tlrabitants font sécher pour faire de la litière ce qui n'a
[pas été emporté par les eaux.
; » Une odeur infecte se dégage de ces fourrages à de-
nni-pourris et de la vase qui séjourne sur la terre. Les
Kaux ont fait d'affreux ravages sur cette commune.
ITout le terrain qui n'a pas été emporté est recouvert
tt'une épaisse couche de sable. Le chemin dn Bac de
-EMard est couvert de trous qui sont autant de précipi-
ces. Le "al est rempli d'épaves de toutes sortes : bois.
fourrages, chanvre, et jusqu'à deux meules de seigle
gui sont restées sur notre commune. C'est un spectacle
gui navre le coeur ! »
, A Nantes, dit le Phare de la Loire de jeudi, la crue,
après s'être élevée jusqu'à 5 mètres 60, n'atteignait plus
mâtin que 5 mètres 50 à l'échelle du pont de la
Bourse. Le niveau est ensuite resté stationnaire pen-
dant quelques heures; mais depuis midi, la Coire a
repris son mouvement ascensionnel, et ce soir, à cinq
.'heures trois quarts, elle marque 5 mètres 57. A l'ouest,
ile ciel est chargé de nuages, les éclairs brillent, et le
iimnerre gronde dans le lointain.
iDeux des arches du pont de la Bourse sont aveu-
glées; entre la voûte de l'arche du centre et les eaux,
jil n'existe plus qu'un jour de 10 à 15 centimètres au
■Jj.luS.
,La circulation est interdite sur ce pont depuis hier
matin.
iDes mesures de précaution sont prises pour rendre
£>lus facile l'accès des quartiers inondés. On consolide
:1I)t l'on élargit les ponts volants dressés à la hâte au dé-
;but de l'inondation, et l'on organise un système d'é-
"lairage , .-
Ce matin le Moniteur nous apprend, d'après un télé-
gramme envoyé de Nantes en date dh 4 octobre,
au" soif, que- la Loire commentait à décroître^ ayant
atteint pendant la nuit ! M& maximum, qui a été de
5 mètres 60 cent. Leseaui ont enlevé 60 ou 80 mètres
du chemin de fer entre Varade-et Ancenis et inondé
les vallées sur une grande étendue.
La levée de la Divatte tenait encore ce soir. ~lfe'
A Nantes même, on n'a encore aucun désastre grave
à regretter.
On mande de Draguignaû par le' télégraphe, 4 octo-
bre au soir, que la pluie abondante tombée pendant
toute la journée n'a pas causé à Draguignan de bien
sérieux dégâts. Il n'en aurait malheureusement pu été
de même à Aups, où des maisons ce seraient écroulées
et une femme se serait noyée.
Le numéro illustré de la Petite Presse
qui paraîtra dimanche prochain, contien-
dra : 1° un très-beau dessin de Thori-
gny, représentant la vue de l'inondation
à Sens, d'après une croquis pris sur les
lieux; .
2* Une des scènes les plus dramati-
ques du Dernier mot de Rocambole, le
duel de Rocambole et de George Stowe-,
dessiné par Godefroy Durand.
3° Une page de caricatures, la Der-
nière semaine des vacances, par « Darjou.
Accident survenu au Préfet de police
Mercredi, vers 7 heures du soir, M. Piétri,
préfet de police, accompagné de son secrétaire,
M. Coti, se rendait de Paris à sa maison de
campagne du bois de Boulogne: le coupé lon-
geait le quai des Tuileries, lorsque tout à coup
une violente commotion atteint les deux voya-
geurs. M. Coti s'écrie, en portant la main à sa
figure : quel coup de sabre !
En effet, le sang s'échapp-Ilit de la tempe gau-
che et inondait le visage.
En même temps 'lU: il avait poussé ce cri, il
avait vu monter aeu? chevaux sur le coupé, qui
s'était trouvé rejeté en arrière et renversé sens
dessus dessous, le cocher à quelques mètres au
loin.
Une voiture dee eaux filtrées de la ville de
Paris, attelée de deux chevaux, accourant, à
toute vitesse, du côté de Passy, s était jetée, à la
hauteur du pont de Splferino, eh travers du coupé
du préfet de police, qu'elle avait enfoncé d'un
coup de son timon, qui, évidemment, aurait tué
le préfet ou son secrétaire, M. Coti, si la se-
cQQsse, en déplaçant les voyageurs, ne les eût
rejetés dans une encoignure etmis hors d'atteinte.
La voiture du préfet était brisée, les vitres, en
volant en éclats, avaient atteint au visage le se-
crétaire et lui avaient fait le§ blessures qu'il
avait prises pour le résultat d'une sorte de coup
de sabre. /
M. Piétrij renversé sous son secrétaire, éprou-
vait de vivés douleurs, qu'il ne pouvait préciser :
la foule s'était assemblée autour des débris de la
voiture. ,
C'est alors que M. Coti put sortir en passant
par le fond, tellement défonpé que ce fut l'is -
sue par laquelle, à sôji tour, M. Piétri put se
glisser tant bien que mal. t ,
Le préfet éprouvait des contusions assez cui-
santes : on lui fit accepter un verre d'eau de
seltz, la seule boisson qui fut sous la main et
qu'on tira de la voiture même qui avait détermi-
né l'accident.
Puis, à pied, MM. Pietri et Coti se rendirent
à l'administration générale des haras, chez M. le
i général Fleur y; ce n'est qu'alors- qu'on put te.'"
! procurer une voiture dans laquelle le préfet et
i son secrétaire regagnèrent l'hôtel de la préfec-
ture.
Ce matin, M. Piétri va mieux; il garde le lit,
mais on espère que cet accident n'aura pMd'ati-
très conséquences que de lui imposer quelques
jours • de repos forcé.
La vil!e s'est vivement ê!)Mte decefait, et déjà
l'hôtel est envahi par les porteurs de cartes et
les visiteurs empressés de venir chercher des
nouvelles de là ~ santé de Mv Piétri.
FAITS DIVERS
PARIS
On avait annoncé que l'Empereur et l'Impé-
ratrice se rendraient le tO à Pampelune. Mais le
voyage est contremandé, Leurs Majestés quitte-
ront Biarritz et rentreront au palais de Saint-
CI oud xers le 10.
Le corps des sapeurs-pompiers de Paris, dont
les services sont si méritoires et si appréciés,
va recevoir une nouvelle organisation. Il sera
composé de quinze compagnies au lieu de dix,
avec adjonction des détachements de l'ancienne
banlieue. Parmi les innovations qu'il s'agit d'in-
troduire dans le matériel, on signale l'emploi
des pompes locomobiles à vapeur dont l'effi-
cacité est puissante contre les incendies consi-
dérables.
Deux albinos jumeaux viennent do naître à l'Hôtel-
Dieu. La nouvelle s'en est bientôt répandue dans les
salles, et aussitôt les élèves quittant le. service ont eu
bâte d'accourir pour voir les deux enfants.
Ils auront à vingt ans la chevelure blanche comme
la neige. C'est par la blancheur des cheveux, en effet,
que l'albinisme se caractérise principalement ; mais
d'autres traits non moins importants viennent s'ajou-
ter à celui-là, comme la couleur mate, en quelque sorte
transparente de la peau, et l'impossibilité pour les yeux
de soutenir l'éclat du grand jour.
Les voyageurs qui ont exploré les régions de l'Afri-
que habitées par des peuplades noires racontent que
les albinos sont pour les nègres une cause d'effroi su-
perstitieux. Ils restent cachés dans les cavernes aussi
longtemp jque le soleil luit, afin de n'avoir pas à
souffrir df. ses rayons si chauds et si brûlants dans ces
contrées.
Ils ne sortent que la nuit, comme des bêtes fauves,
et sont toujours en butte à de mauvais traitements.
Les deux albinos que l'Hôtel-Dieu a vus naitre, se-
ront, au contraire, environnés de tous les soins pos-
sible*. J. (Moniteur.)
DÉPARTEMENTS
On notas écrit de Brest : .....
'Le bruit court que la demande en grâce de
Liénard, Thépault, Oillic et Carbuccia a été re-
jetée.
Les assassins du Foederis-Arca seront exécu-
tés, à ce que l'on dit, cette semaine, sur la place
Fautras.
Mais on ignore le jour de cettè grande expia-
tion.
Les exécuteurs des hautes. œuvres de Quim-
per, de Rennes, de Saint-Brieuc et de Vannes
doivent se retrouver à Brest.
Il parait que les condamnés partiront de la
prison de Pontanion en voiture cellulaire et se
rendront sur la place de l'exécution sans traver-
ser la ville.
50 gendarmes et 800 hommesdetroupWïsoat
commandés pour cette triste circonstance.
La Gazette médicale, de Lyon, rapporte le fait «UÎ-
vant :
Il y a trois mois, l'un de nos- plus estimables «t*r
tittes, jusque-là en4owW de la -fa"ut publique, fai-
sait sa rentrée. Une bordée de sifflets l'accueille dit
son apparition. Immédiatément les; applaudissements
éclatent, ils couvrent sans peine l'oiftrage immérité
Mais le coup avait porté, il l'atteignait à l'improviste,
en pleine poitrine !... De ce moment et sans autre
cause, ua mal latent jusqu'alors s'est réveillé, et le
malheureux vient de succomber aux rapides progru.
aux cruelles angoisses d'uue altération des orifices car-
diaques.
On l'enterrait il y a deux jours, et la pitié publique,'
l du moins, n'a pas fait défaut à ' ces funérailles d'un ■
homme de cœur tué par le cœur.
Le fait est tristement ,vrai, ajoute le Salut public ;
cfet artiste est M. Saline, grand premier rôle.
M. Saliné avait quitté Lyon pendant une année.
Rengagé par M. d'Herblay, il revint, il y a six mois
environ, tout heureux de remonter sur cette scène des
Cétestins, que ses sùecès à Lille no lui avaiènt point
fait oublier.
Celte joie fut de courte durée ; le soir de sa ramtréa*
S::Uné qui, par le souvenir du passé, ne croyait
compter a Lyon que des amis, fut accueilli par una
bordée de sifflets, couverte du reste par une protes-
Ûltion de bravos.
Saliné rentra ati foyer pâle et défait, et, depuis cette
soirée, devint triste et sombre. On sait le reste
La ville de Saint-Girons a été ces jours derniers mise
eu émoi par une horrible tentavive do meurtre. lA
sieur B... fils, aubcrgi.-'te, a blessé très-grièvement sa
sœur, en déchargeant fur elle plusieurs coups d'un'
revolver dont il é ait firme.
Après l'acromptisycnx'Ht de son crime, B... avait pris
la fui'e, mais il put bientôt être atteint près de Saint-
Lier par la genJarrncrie el des agents qui s'étaient mis
à sa poursuite, et sur lesquels il fit encore usage de
îon arme. Un-agent a été blessé.
B... a été éeroué dans la prison de Saint-GirohsL
Confronté avec sa victime, dont l'état est très-alar-
mant, il a exprimé le regret de ne l'avoir pas tuée;
(Journal de Toulouse.) - -
ÉTRANGER
' Un ordre royal émanant de la reine Victoria
prohibe l'importation des jouets dits serpents de
Pharaon, à raison des accidents graves qu'il?
peuvent déterminer.
Ce n'estpas à son roman de Quatre-vingt-treize
que travaille actuellement Victor Hugo, ainsi
qu'on l'a partout annoncé, mais bien à une his-
toire d'Angleterre pendant la seconde moitié
du dix-huitième siècle.
Une femme d'un village de la Forêt-Noire,
voulant remplir un vœu, promit une somme de
mille florins à celui qui irait pour elle à quatre >
Êattes jusqu'au pèlerinage d'£insideln (Notre-
Dame-des-Ermites), en Suisse.
Dans l'espace de quelques jours à peine, dix
individus s'inscrivirent chez le curé pour rem-
plir cette condition. On ne dit pas si le pèleri-
| nage a eu lieu.
TRIBUNAUX
L'Echo du Poitou nous fait connaître un cuieux ju- '
gement prononcé par le tribunal de Châlellerault :
« Emile Pichereau, âgé de vingt ans, domestique 1
Clairvaux, aurait, d'après la prévention, soustrait frau-
duleusement, le 26 août, un tapis et un jeu de carte.
chez M. Aumirault, abergiste à Saint-Genest.
Mais le tribunal, attendu que s'il résulte de l'en-
LES VAUDOUX
LES CANNIBALES
DE SAINT-DOMINGUE
PAR
GUSTAVE AIMARD
Suite (4)
Xa seconde classe de noirs se composait de
jeeux nés sur les habitations, dont le sang avait
)té mélangé par des croisements de race et dont
beaucoup même avaient vu s'altérer en eux le
Èype primitif et la couleur.
s iCeux-là, vivant en relations plus étroites
atyeeles blancs, accoutumés aux exigences de la
ftiyilisation par l'exemple de leurs père et mère,
«fraient perdu peu à peu leur physionomie pre-
mière, leur énergie native, et avaient, en appa-
,nce du moins, accepté sans trop de peine le
.^pjftrd fardeau de l'esclavage qui depuis leur
Naissance pesait sur eux.
fc-îParesseux, meurtriers, gourmands, ils étaient
revenus lâches, et de lions s'étaient fait hyènes,
l'YJ-nt bassement les haines de leurs maîtres
Posant au besoin les exécuteurs de leurs veni
4U ÎÉiÏÊt W&lW part» 'tp\VI le sj
geances, et se montrant, comme à plaisir, plus
cruels que les blancs ei>v;ers les autres esclaves
placés sous leur dépendance par un caprice du
planteur auquel ils appartenaient, et en toutes
circonstances excitant les colons à redoubler de
sévérité envers les noirs récalcitrants ou insoumis.
Ces esclaves, par leur bassesse même, étaient
plus redoutables encore que les noirs des Mor-
nes auxquels ils communiquaient les secrets de
leurs maîtres et qu'ils avertissaient des mesures
prises par eux.
Lors de l'abolition de l'esclavage et la procla-
mation de l'indépendance des norrs de Saint-Do-
: mingue, une ligne tranchée fut tracée tout natu- '
rellement entre ces deux classes de nègres.
Les premiers, féroces, ignorants, superstitieux,
demeurèrent ce qu'ils avaient toujours été, des
sauvages impatients de tout frein, pour lequels
le mot liberté signifiait licence, vol et paresse;
dis que les seconds, se liguant plus intime-
ment avec les hommes de çouleur, mais inha-
b.les à fonder un ordre de choses logique et sta-
ble, suivirent le système qu'ils avaient primiti-
vement adopté, et faisant un travail de taupes, se
faufilèrent partout et parvinrent, grâce à leur ci-
vilisation bâtarde et à peine ébauchée, à s'établir
dans la plupart des positions secondaires, dont
il fut impossible de les débusquer; d'autant plus
qu'ils demeuraient toujours les alliés secrets des
autres noirs, et avaient à propos se servir d'eux
pour annuler tout ce que les hommes de cou-
leur tentaient de bien et les intimider par la 1
crainte, sans cesse suspendue sur leur tête, d'une
révolte des anciens noirs des Mornes, qui au-
jourd'hui forment la classe: la plus remuante de
la population.
Marcelin était né au Texas, son premier mai-
tre, d'origine française, homme juste et intelli-
gent, subissait l'esclavage comme une loi du
pays dans lequel il s'était fixé, et était bon et
doux pour les quelques noirs qu'il possédait. Il
ne leur imposait pas de tâche au-dessus de leurs
forces, les aimait, les instruisait lui-même et
les protégeait en toutes circonstances. Le bruit
courut même à sa mort qu'il les avait émancipés
par son testament; mais soit que ce testament
n'existât pas, soit, ce qui est plus probable, qu'il
eût été supprimé par les héritiers, il ne se re-
trouva pas, et les pauvres nègres furent mis en
vente. Ce fut au moment où ce bétail humain
était aux enchères que Monsieur Duvauchelle et
amené là par hasard saisi de pitié à la vue de
ces malheureux qui sanglottaient sous le regard
impassible du commissaire priseur et les quoli-
bets cruels de la foule, acheta Marcelin et sa
mère. Marcelin, nous l'avons dit, était un enfant
alors.
Arrivé dans l'hôtel qu'il habitait, Monsieur
Duvauchelle fit appeler deux magistrats, qui, par
ses ordres,'rédigèrent aussitôt un acte de libéra-
tion des deux nouveaux esclaves, lequel acte
ainsi que le voulait la loi, fut signé par quatre
négociants notables du pays.
Les deux magistrats aores avoir accomîl1
leur office et recu le prix de leur travail se reti-
rèrent. Monsieur Duvauchelle se tourna alors
vers les deux esclaves qui avaient assisté à
cette sccne sans y rien "'COmprendre, et s'adres-
sant à la mère qui pleurait silencieusement en
pressant étroitement son enfant contre son
sein: 1
— Tenez, bonne femme, lui dit-il avec bonté,
prenez ce papier, vous êtes libre.
— Libre, murmura-t-elle en le regardant avec
surprise, libre de quoi ?
— De faire ce que bon vous semblera, d'aller
et de venir à votre guise sans que personne
puisse s'y opposer ; en un mot je vous rends
votre liberté, vous n'êtes plus esclave.
La pauvre femme secoua la tête avec incré-
dulité.
— Ce n'est pas possible, dit-elle, vous avez du
sang noir dans les veines, mon maître.
— Eh bien que prouve cela? reprit-il.
La négresse baissa la tête sans répondre.
Monsieur Duvauchelle la considéra un instant
avec une expression de pitié extrême.
— Je vous comprends, dit-il avec tristesse, les
hommes de couleur sont plus cruels pour la
race dont ils sortent, que les blancs eux-mêmes,
n'est-ce pas ?
Elle leva les yeux sur lui.
GUSTAVE AIMARD.
(LeI suite i demain.)
Tiie Mv Guibaz a été emportée. M. Perret, cultivateur
aux Fourneaux, ce trouvant sur le bord du canal de la
jytreée des Alpes, voulut arrêter uhe épave, mais au
M"-- nidiéèiit le tèeétn'et déroba Bous lui et il fut
MBpôrte par le torrent. Son corps a ' été depuis vaine.
mfcflt recherché.
fcDaii8 le canton ' de Mo'iane on évalue approxima-
tirèïBBflt les pertes à 800,000 francs. »
las lettrés d'Angers du 3 octobre établissent de la
façon suivante la situation actuelle des dégâts causés
dtos le département de Mainu--et-Loire :
'lie-s levées de -la LoiTe ne sont rompues que sur deux
points vers Gohier, sur lalrive gauche, et vois Saint-
Martin-de-la-Place, sur la rive droite.
Vers Gohier, à distance à peu près égale entre Satimur
et Angers, le val envahi est peu important comme cul-
ture ; les dégâts y sont donc peu graves.
Vers Saint-Marlin-de-la-Placc, à quelques kilomètres
dfe Saumur, les suites de la rupture sont plus à redouter,
et il n'est pas encore possible de les prévoir avec cer":
titude. En ce point le chemin de fer forme une pre-
mière barrière que les eaux ont renversée sur une lon-
gueur d'environ 60 mètres et sur une profondeur de 7
mètres.
En arrière de ce premier obstacle, les eaux sont vé-
-nues se heurtera la levée proprement dite et l'ont éga-
lement coupée sur une longueur ég'.lle, mais sur une
profondeur moindre. Les eaux ont aussi envahi le val
' 'de l'Authion. C'est une large et riche vallée parallèle à
•]û Loire et qui s'étend jusqu'à Trelazé. Une levée, dite
-levée Napoléon, construite en 1856, protège Trelazé.
Les eaux de la brèche de Saint-Martin-de-la-Place s'a-
vancent en ce moment par cette vallée, mais très-len-
tement; elles ne causeront que peu de dommages.
Une arche du pont de la route impériale a été enle-
vée dans la traverse des Ponts-de-Cé, mais la circula-
tion a pu être rétablie au bout de quelques heures.
D'une lettre écrite de Saint-Brisscn au Journal du
Loiret, en date du 3 octobre, nous extrayons les pas-
sages suivants : 1
« L'eau recouvre encore une grande étendue de ter-
rain entre Saint-BriSson et Saint-Firmin, ee qui ne
permet pas d'apprécier toutes les pertes : mais elles sont
¡beaucoup plus grandes qu'en 18561... Saint-Firmin a
'été entièrement submergé.
» Les habitants ont pu préserver leur linge et leur
'mobilier en les entassant dans les greniers, et se sau-
rèer sur la côte, où ils ont bivouaqué quatre jours et
[quatre nuits. Ils sont maintenant rentrés dans leurs
^habitations qu'ils nettoient à grande eau. Tout le four-
irage, tout le blé resté dans les granges est perdu ; les
tlrabitants font sécher pour faire de la litière ce qui n'a
[pas été emporté par les eaux.
; » Une odeur infecte se dégage de ces fourrages à de-
nni-pourris et de la vase qui séjourne sur la terre. Les
Kaux ont fait d'affreux ravages sur cette commune.
ITout le terrain qui n'a pas été emporté est recouvert
tt'une épaisse couche de sable. Le chemin dn Bac de
-EMard est couvert de trous qui sont autant de précipi-
ces. Le "al est rempli d'épaves de toutes sortes : bois.
fourrages, chanvre, et jusqu'à deux meules de seigle
gui sont restées sur notre commune. C'est un spectacle
gui navre le coeur ! »
, A Nantes, dit le Phare de la Loire de jeudi, la crue,
après s'être élevée jusqu'à 5 mètres 60, n'atteignait plus
mâtin que 5 mètres 50 à l'échelle du pont de la
Bourse. Le niveau est ensuite resté stationnaire pen-
dant quelques heures; mais depuis midi, la Coire a
repris son mouvement ascensionnel, et ce soir, à cinq
.'heures trois quarts, elle marque 5 mètres 57. A l'ouest,
ile ciel est chargé de nuages, les éclairs brillent, et le
iimnerre gronde dans le lointain.
iDeux des arches du pont de la Bourse sont aveu-
glées; entre la voûte de l'arche du centre et les eaux,
jil n'existe plus qu'un jour de 10 à 15 centimètres au
■Jj.luS.
,La circulation est interdite sur ce pont depuis hier
matin.
iDes mesures de précaution sont prises pour rendre
£>lus facile l'accès des quartiers inondés. On consolide
:1I)t l'on élargit les ponts volants dressés à la hâte au dé-
;but de l'inondation, et l'on organise un système d'é-
"lairage , .-
Ce matin le Moniteur nous apprend, d'après un télé-
gramme envoyé de Nantes en date dh 4 octobre,
au" soif, que- la Loire commentait à décroître^ ayant
atteint pendant la nuit ! M& maximum, qui a été de
5 mètres 60 cent. Leseaui ont enlevé 60 ou 80 mètres
du chemin de fer entre Varade-et Ancenis et inondé
les vallées sur une grande étendue.
La levée de la Divatte tenait encore ce soir. ~lfe'
A Nantes même, on n'a encore aucun désastre grave
à regretter.
On mande de Draguignaû par le' télégraphe, 4 octo-
bre au soir, que la pluie abondante tombée pendant
toute la journée n'a pas causé à Draguignan de bien
sérieux dégâts. Il n'en aurait malheureusement pu été
de même à Aups, où des maisons ce seraient écroulées
et une femme se serait noyée.
Le numéro illustré de la Petite Presse
qui paraîtra dimanche prochain, contien-
dra : 1° un très-beau dessin de Thori-
gny, représentant la vue de l'inondation
à Sens, d'après une croquis pris sur les
lieux; .
2* Une des scènes les plus dramati-
ques du Dernier mot de Rocambole, le
duel de Rocambole et de George Stowe-,
dessiné par Godefroy Durand.
3° Une page de caricatures, la Der-
nière semaine des vacances, par « Darjou.
Accident survenu au Préfet de police
Mercredi, vers 7 heures du soir, M. Piétri,
préfet de police, accompagné de son secrétaire,
M. Coti, se rendait de Paris à sa maison de
campagne du bois de Boulogne: le coupé lon-
geait le quai des Tuileries, lorsque tout à coup
une violente commotion atteint les deux voya-
geurs. M. Coti s'écrie, en portant la main à sa
figure : quel coup de sabre !
En effet, le sang s'échapp-Ilit de la tempe gau-
che et inondait le visage.
En même temps 'lU: il avait poussé ce cri, il
avait vu monter aeu? chevaux sur le coupé, qui
s'était trouvé rejeté en arrière et renversé sens
dessus dessous, le cocher à quelques mètres au
loin.
Une voiture dee eaux filtrées de la ville de
Paris, attelée de deux chevaux, accourant, à
toute vitesse, du côté de Passy, s était jetée, à la
hauteur du pont de Splferino, eh travers du coupé
du préfet de police, qu'elle avait enfoncé d'un
coup de son timon, qui, évidemment, aurait tué
le préfet ou son secrétaire, M. Coti, si la se-
cQQsse, en déplaçant les voyageurs, ne les eût
rejetés dans une encoignure etmis hors d'atteinte.
La voiture du préfet était brisée, les vitres, en
volant en éclats, avaient atteint au visage le se-
crétaire et lui avaient fait le§ blessures qu'il
avait prises pour le résultat d'une sorte de coup
de sabre. /
M. Piétrij renversé sous son secrétaire, éprou-
vait de vivés douleurs, qu'il ne pouvait préciser :
la foule s'était assemblée autour des débris de la
voiture. ,
C'est alors que M. Coti put sortir en passant
par le fond, tellement défonpé que ce fut l'is -
sue par laquelle, à sôji tour, M. Piétri put se
glisser tant bien que mal. t ,
Le préfet éprouvait des contusions assez cui-
santes : on lui fit accepter un verre d'eau de
seltz, la seule boisson qui fut sous la main et
qu'on tira de la voiture même qui avait détermi-
né l'accident.
Puis, à pied, MM. Pietri et Coti se rendirent
à l'administration générale des haras, chez M. le
i général Fleur y; ce n'est qu'alors- qu'on put te.'"
! procurer une voiture dans laquelle le préfet et
i son secrétaire regagnèrent l'hôtel de la préfec-
ture.
Ce matin, M. Piétri va mieux; il garde le lit,
mais on espère que cet accident n'aura pMd'ati-
très conséquences que de lui imposer quelques
jours • de repos forcé.
La vil!e s'est vivement ê!)Mte decefait, et déjà
l'hôtel est envahi par les porteurs de cartes et
les visiteurs empressés de venir chercher des
nouvelles de là ~ santé de Mv Piétri.
FAITS DIVERS
PARIS
On avait annoncé que l'Empereur et l'Impé-
ratrice se rendraient le tO à Pampelune. Mais le
voyage est contremandé, Leurs Majestés quitte-
ront Biarritz et rentreront au palais de Saint-
CI oud xers le 10.
Le corps des sapeurs-pompiers de Paris, dont
les services sont si méritoires et si appréciés,
va recevoir une nouvelle organisation. Il sera
composé de quinze compagnies au lieu de dix,
avec adjonction des détachements de l'ancienne
banlieue. Parmi les innovations qu'il s'agit d'in-
troduire dans le matériel, on signale l'emploi
des pompes locomobiles à vapeur dont l'effi-
cacité est puissante contre les incendies consi-
dérables.
Deux albinos jumeaux viennent do naître à l'Hôtel-
Dieu. La nouvelle s'en est bientôt répandue dans les
salles, et aussitôt les élèves quittant le. service ont eu
bâte d'accourir pour voir les deux enfants.
Ils auront à vingt ans la chevelure blanche comme
la neige. C'est par la blancheur des cheveux, en effet,
que l'albinisme se caractérise principalement ; mais
d'autres traits non moins importants viennent s'ajou-
ter à celui-là, comme la couleur mate, en quelque sorte
transparente de la peau, et l'impossibilité pour les yeux
de soutenir l'éclat du grand jour.
Les voyageurs qui ont exploré les régions de l'Afri-
que habitées par des peuplades noires racontent que
les albinos sont pour les nègres une cause d'effroi su-
perstitieux. Ils restent cachés dans les cavernes aussi
longtemp jque le soleil luit, afin de n'avoir pas à
souffrir df. ses rayons si chauds et si brûlants dans ces
contrées.
Ils ne sortent que la nuit, comme des bêtes fauves,
et sont toujours en butte à de mauvais traitements.
Les deux albinos que l'Hôtel-Dieu a vus naitre, se-
ront, au contraire, environnés de tous les soins pos-
sible*. J. (Moniteur.)
DÉPARTEMENTS
On notas écrit de Brest : .....
'Le bruit court que la demande en grâce de
Liénard, Thépault, Oillic et Carbuccia a été re-
jetée.
Les assassins du Foederis-Arca seront exécu-
tés, à ce que l'on dit, cette semaine, sur la place
Fautras.
Mais on ignore le jour de cettè grande expia-
tion.
Les exécuteurs des hautes. œuvres de Quim-
per, de Rennes, de Saint-Brieuc et de Vannes
doivent se retrouver à Brest.
Il parait que les condamnés partiront de la
prison de Pontanion en voiture cellulaire et se
rendront sur la place de l'exécution sans traver-
ser la ville.
50 gendarmes et 800 hommesdetroupWïsoat
commandés pour cette triste circonstance.
La Gazette médicale, de Lyon, rapporte le fait «UÎ-
vant :
Il y a trois mois, l'un de nos- plus estimables «t*r
tittes, jusque-là en4owW de la -fa"ut publique, fai-
sait sa rentrée. Une bordée de sifflets l'accueille dit
son apparition. Immédiatément les; applaudissements
éclatent, ils couvrent sans peine l'oiftrage immérité
Mais le coup avait porté, il l'atteignait à l'improviste,
en pleine poitrine !... De ce moment et sans autre
cause, ua mal latent jusqu'alors s'est réveillé, et le
malheureux vient de succomber aux rapides progru.
aux cruelles angoisses d'uue altération des orifices car-
diaques.
On l'enterrait il y a deux jours, et la pitié publique,'
l du moins, n'a pas fait défaut à ' ces funérailles d'un ■
homme de cœur tué par le cœur.
Le fait est tristement ,vrai, ajoute le Salut public ;
cfet artiste est M. Saline, grand premier rôle.
M. Saliné avait quitté Lyon pendant une année.
Rengagé par M. d'Herblay, il revint, il y a six mois
environ, tout heureux de remonter sur cette scène des
Cétestins, que ses sùecès à Lille no lui avaiènt point
fait oublier.
Celte joie fut de courte durée ; le soir de sa ramtréa*
S::Uné qui, par le souvenir du passé, ne croyait
compter a Lyon que des amis, fut accueilli par una
bordée de sifflets, couverte du reste par une protes-
Ûltion de bravos.
Saliné rentra ati foyer pâle et défait, et, depuis cette
soirée, devint triste et sombre. On sait le reste
La ville de Saint-Girons a été ces jours derniers mise
eu émoi par une horrible tentavive do meurtre. lA
sieur B... fils, aubcrgi.-'te, a blessé très-grièvement sa
sœur, en déchargeant fur elle plusieurs coups d'un'
revolver dont il é ait firme.
Après l'acromptisycnx'Ht de son crime, B... avait pris
la fui'e, mais il put bientôt être atteint près de Saint-
Lier par la genJarrncrie el des agents qui s'étaient mis
à sa poursuite, et sur lesquels il fit encore usage de
îon arme. Un-agent a été blessé.
B... a été éeroué dans la prison de Saint-GirohsL
Confronté avec sa victime, dont l'état est très-alar-
mant, il a exprimé le regret de ne l'avoir pas tuée;
(Journal de Toulouse.) - -
ÉTRANGER
' Un ordre royal émanant de la reine Victoria
prohibe l'importation des jouets dits serpents de
Pharaon, à raison des accidents graves qu'il?
peuvent déterminer.
Ce n'estpas à son roman de Quatre-vingt-treize
que travaille actuellement Victor Hugo, ainsi
qu'on l'a partout annoncé, mais bien à une his-
toire d'Angleterre pendant la seconde moitié
du dix-huitième siècle.
Une femme d'un village de la Forêt-Noire,
voulant remplir un vœu, promit une somme de
mille florins à celui qui irait pour elle à quatre >
Êattes jusqu'au pèlerinage d'£insideln (Notre-
Dame-des-Ermites), en Suisse.
Dans l'espace de quelques jours à peine, dix
individus s'inscrivirent chez le curé pour rem-
plir cette condition. On ne dit pas si le pèleri-
| nage a eu lieu.
TRIBUNAUX
L'Echo du Poitou nous fait connaître un cuieux ju- '
gement prononcé par le tribunal de Châlellerault :
« Emile Pichereau, âgé de vingt ans, domestique 1
Clairvaux, aurait, d'après la prévention, soustrait frau-
duleusement, le 26 août, un tapis et un jeu de carte.
chez M. Aumirault, abergiste à Saint-Genest.
Mais le tribunal, attendu que s'il résulte de l'en-
LES VAUDOUX
LES CANNIBALES
DE SAINT-DOMINGUE
PAR
GUSTAVE AIMARD
Suite (4)
Xa seconde classe de noirs se composait de
jeeux nés sur les habitations, dont le sang avait
)té mélangé par des croisements de race et dont
beaucoup même avaient vu s'altérer en eux le
Èype primitif et la couleur.
s iCeux-là, vivant en relations plus étroites
atyeeles blancs, accoutumés aux exigences de la
ftiyilisation par l'exemple de leurs père et mère,
«fraient perdu peu à peu leur physionomie pre-
mière, leur énergie native, et avaient, en appa-
,nce du moins, accepté sans trop de peine le
.^pjftrd fardeau de l'esclavage qui depuis leur
Naissance pesait sur eux.
fc-îParesseux, meurtriers, gourmands, ils étaient
revenus lâches, et de lions s'étaient fait hyènes,
l'YJ-nt bassement les haines de leurs maîtres
Posant au besoin les exécuteurs de leurs veni
4U ÎÉiÏÊt W&lW part» 'tp\VI le sj
geances, et se montrant, comme à plaisir, plus
cruels que les blancs ei>v;ers les autres esclaves
placés sous leur dépendance par un caprice du
planteur auquel ils appartenaient, et en toutes
circonstances excitant les colons à redoubler de
sévérité envers les noirs récalcitrants ou insoumis.
Ces esclaves, par leur bassesse même, étaient
plus redoutables encore que les noirs des Mor-
nes auxquels ils communiquaient les secrets de
leurs maîtres et qu'ils avertissaient des mesures
prises par eux.
Lors de l'abolition de l'esclavage et la procla-
mation de l'indépendance des norrs de Saint-Do-
: mingue, une ligne tranchée fut tracée tout natu- '
rellement entre ces deux classes de nègres.
Les premiers, féroces, ignorants, superstitieux,
demeurèrent ce qu'ils avaient toujours été, des
sauvages impatients de tout frein, pour lequels
le mot liberté signifiait licence, vol et paresse;
dis que les seconds, se liguant plus intime-
ment avec les hommes de çouleur, mais inha-
b.les à fonder un ordre de choses logique et sta-
ble, suivirent le système qu'ils avaient primiti-
vement adopté, et faisant un travail de taupes, se
faufilèrent partout et parvinrent, grâce à leur ci-
vilisation bâtarde et à peine ébauchée, à s'établir
dans la plupart des positions secondaires, dont
il fut impossible de les débusquer; d'autant plus
qu'ils demeuraient toujours les alliés secrets des
autres noirs, et avaient à propos se servir d'eux
pour annuler tout ce que les hommes de cou-
leur tentaient de bien et les intimider par la 1
crainte, sans cesse suspendue sur leur tête, d'une
révolte des anciens noirs des Mornes, qui au-
jourd'hui forment la classe: la plus remuante de
la population.
Marcelin était né au Texas, son premier mai-
tre, d'origine française, homme juste et intelli-
gent, subissait l'esclavage comme une loi du
pays dans lequel il s'était fixé, et était bon et
doux pour les quelques noirs qu'il possédait. Il
ne leur imposait pas de tâche au-dessus de leurs
forces, les aimait, les instruisait lui-même et
les protégeait en toutes circonstances. Le bruit
courut même à sa mort qu'il les avait émancipés
par son testament; mais soit que ce testament
n'existât pas, soit, ce qui est plus probable, qu'il
eût été supprimé par les héritiers, il ne se re-
trouva pas, et les pauvres nègres furent mis en
vente. Ce fut au moment où ce bétail humain
était aux enchères que Monsieur Duvauchelle et
amené là par hasard saisi de pitié à la vue de
ces malheureux qui sanglottaient sous le regard
impassible du commissaire priseur et les quoli-
bets cruels de la foule, acheta Marcelin et sa
mère. Marcelin, nous l'avons dit, était un enfant
alors.
Arrivé dans l'hôtel qu'il habitait, Monsieur
Duvauchelle fit appeler deux magistrats, qui, par
ses ordres,'rédigèrent aussitôt un acte de libéra-
tion des deux nouveaux esclaves, lequel acte
ainsi que le voulait la loi, fut signé par quatre
négociants notables du pays.
Les deux magistrats aores avoir accomîl1
leur office et recu le prix de leur travail se reti-
rèrent. Monsieur Duvauchelle se tourna alors
vers les deux esclaves qui avaient assisté à
cette sccne sans y rien "'COmprendre, et s'adres-
sant à la mère qui pleurait silencieusement en
pressant étroitement son enfant contre son
sein: 1
— Tenez, bonne femme, lui dit-il avec bonté,
prenez ce papier, vous êtes libre.
— Libre, murmura-t-elle en le regardant avec
surprise, libre de quoi ?
— De faire ce que bon vous semblera, d'aller
et de venir à votre guise sans que personne
puisse s'y opposer ; en un mot je vous rends
votre liberté, vous n'êtes plus esclave.
La pauvre femme secoua la tête avec incré-
dulité.
— Ce n'est pas possible, dit-elle, vous avez du
sang noir dans les veines, mon maître.
— Eh bien que prouve cela? reprit-il.
La négresse baissa la tête sans répondre.
Monsieur Duvauchelle la considéra un instant
avec une expression de pitié extrême.
— Je vous comprends, dit-il avec tristesse, les
hommes de couleur sont plus cruels pour la
race dont ils sortent, que les blancs eux-mêmes,
n'est-ce pas ?
Elle leva les yeux sur lui.
GUSTAVE AIMARD.
(LeI suite i demain.)
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