Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1870-06-06
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 06 juin 1870 06 juin 1870
Description : 1870/06/06 (A5,N1509). 1870/06/06 (A5,N1509).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k4716937r
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
LA PETITE PRESSE
5 cent. le numéro. ' 1 - I journal ~ QiKmDi|N®M^ \ 5 cent. le niiméro
'Abonnements. — reigmelg Six mois un an
Parla 5 rra 8 fr. ISfr»
Départements a 11 ne
Administrateur: Bourdilliat.
t>ms année — LUNDI 6 JUIN -- 1870 — N" 1Õ09
i Il ..; ' 1
~, IMàaetewm.eihef! A. DR B AL ATH I E R-BR A GBZON)j TÎ
~ Bureaux D'ABONNEMENT: 8, rneDroiiot
1 ADMINISTRATION : 13, quai Voitàire. 1
PARIS, 5 JUIN 1870
SALON DE 1870
I
LES GAULOIS DEVANT ROME
I
MM. les jurés, lorsqu'il s'est agi de don-
ner la médaille d'honneur, ont choisi d'un
commun accord une grande toile, couverle j
d'un sujet grec. Le Dernier jour de Corinihe, !
de M. Tony Robert-Fleury, est une vaste
" composition étudiée avec soin, où le peintre
a prouvé que le talent pouvait être le résul-
tat de la volonté et de l'application plus encore
qu'un don naturel, où l'on chercherait vai-
nement l'émotion, le sentiment, la vie, mais
où l'on trouve des nus corrects, des drapc-
ries bien ajustées, une couleur claire qui ne
choque pas, surtout une horreur de l'origi-
nalilé digne de tous les prix d'excellence de
toutes les Académies réunies.
Combien à cette honorable banalité est
préférable le beau tableau de M. Evariste
Luminais: En vue de Rome! Le peintre de
la Brelagne" même dans la grandeur du su-
jet qu'il a traité cette année, a gardé son ori-
ginalité un. peu triste, son amour des choses
humbles et fortes. Te ciel qui éclaire sa
campagne et s'abaisse derrière les aqueducs
à l'horizon, ressemble plutôt à un ciel du
Nord qu'à im ciel d'Italie. Mais c'est Rome
qui blanchit là-bas, et ces barbares dont les
uns se perdent dans l'éloignement, dont les
autres disparaissent à demi dans un pli de
terrain, tandis qu'au premier plan un groupe
colossal se détache en pleine vigueur, — ces
barbares sont bien des Gaulois. Le chef qui
montre la ville à ses hommes a dû vieillir
sur les plateaux des Arvernes défendus par
des pentes abruptes et des ravins profonds.
. Les chevaux, dont les sabots mordent le sol,
dont la tête se courbe sous l'effort, dont les
larges croupes s'étalent, ont dû grandir en
liberté dans les clairières des bois, au milieu
des chênes.»
Quiconque est fidèle aux idées s'arrêtera
devant la toile de.M. Luminais, et retrou
vera dans une vision rapide la France des
premiers jours, celle qui s'appelait les
QJrules...
Les peuples qui l'habitaient formaient une
série de tribus, subdivisées elles-mêmes
sen nations, qui tiraient leur nom de la
fbrme-du pays qu'elles habitaient, côtes,
.pleine, vallée, forêt, montagne. Qu'un péril
f' mun se présentât, ces nations se réunis-
nt en grandes lignes pour le repousser.
temps ordinaire, elles n'avaient d'autre
stien commun que la langue. (
Les Gaulois, chasseurs et pasteurs, étaient
une race active par excellence. Hau ts de six
pieds, vêtus d'une toge, espèce de blouse
rayée de couleurs éclatantes, ils adoraient
dans le costume tout ce qui brille et tout ce
qui reluit : Jes grands châles à carreaux, les
manteaux rouges avec des agrafes de métal,
les chaînes d'or... Quelques-uns se teignaient
la peau d'une substance bleuâtre, d'autres se
tatouaient. Tous peignaient avec soin leurs
longs cheveux blonds et leurs moustaches
fauves. Pour aller en guerre, ils ajoutaient
à leur costume un bouclier de bois et quelf
quefois une cuirasse de fer. Beaux et gloT
rieux, ils aimaient la fanfaronnade devant le'
danger et'le défi devant l'ennemi. Se battre
à tout propos, pour repousser l'étranger,
pour prendre un camp, pour piller une ville,
pour montrer leur bravoure, pour le plaisir;
telle était leur passion.
Quand ils n'avaient rien à faire, ils cher-
chaient querelle à leurs voisins ; quand ils
avaient dîné, ils échangeaient des coups a«H
dessert. Ils lançaient des flèches contre le:
ciel lorsqu'il tonnait. Ils mettaient l'épée à:
la main contre POcean, lorsqu'il éclatait une
tempête. Dans un combat, à Bourges, un
Gaulois, — placé en face d'une des portes
pour alimenter l'incendie d'une tour romai-
ne, — y jetait des foules de suif et de bois
qu'on lui-faisait passer de main en main.
Frappé d'une flèche, il tomba. Son voisin
prit sa place et fut frappé de même. Un troi-
sième se présenta. Puis un quatrième. Puis
un cinquième. On se disputait la place. Et
la porte fut occupée pendant toute la durée
du combat.
De tels hommes devaient aimer les aven-
tures. Aussi retrouve-t-on leurs traces sur
tous les points du monde antique. Une de
leurs tribus allait en Espagne, une autre sur
le Danube, une autre en Grèce, une autre
en Asie. Rome était déjà puissante quand
ii muMli-'inMiiMM'n.im"11 .WMWWMW—«MmMiMnniiiiLiiiiniiiimjj
les Gaulois en: forcèrent l'entrée par sur-
prise. Rien ne pouvait arrêter leur force
d'expansion et de premier mouvement.
A l'intérieur, la propriété s'alliait au COlr-
munisme. Il y avait de grandes terres ap-
partenant à l'aristocratie, et'des biens com-
munaux appartenant à tous. Le partage des
successions faisait une part égale à chi'q'.e.
enfant. Dans le mariage, le divorce était ad-
mis. Mais le mari seul avait le droit de le
provoquer, sauf de rares cas d'exception. Il
devait une pension à la femme répudiée. Dju
reste, le sort de la femme n'était pas heu-
reux. Car. les hommes rapportaient de la
guerre des habitudes jalouses et brutales
dont elles étaient les victimes. Elles étaient
belles et coquettes, un peu légères peut-être.
Les lois faites contre les filles séduites et les
femmes infidèles restent là pour le prouver.
La vierge était sai'nto. Elle symbolisait la
patrie. En elle résidait l'âme de la nation.
On lui attribuait le don de divination.
La première croyance des Gaulois, comi-
me celle de tous les sauvages, fut le poly-
théisme. ' -
Ils adoraient le scMeil, la lune, le tonnerre
elles différents vents, dont le plus vénéré,
nommé le Kirk, était la bise.
A cette adoration dès forces de la nature
succéda celle des dieux personnels, dont le
principal, Hésus, ressemble fort au Jupiter
de là mythologie grecque.
Vint enfin le druidisme, doctrine em-
preinto de mystère et de terreur, mais spi-
ritualiste par excellence, reconnaissant J'u-
nité de Dieu et l'immortalité de l'âme...
* *
• Donc les Gaulois prirent Rome un jour.
Déjà depuis longtemps, l'Italie leur était fa-
milière. Ils étaient venus par bandes, armés
et équipés, s'enrôler au service des Etrus-
ques. Ils avaient occupé les rives du Pô, et
y avaient établi des camps retranchés qui
plus tard devinrent des villes, comme Mi-
lan, Vérone, Bologne et- Brescia..D'ordi-
naire, ils erraient dans les campagnes, dor-
mant sur l'herbe ou sur la paille, ne se nour-
rissant que de viandes, ne s'occupant que de
la guerre et d'urf peu de culture, et n'esti-
mant comme richesse que les troupeaux et
l'or, seuls biens qu'on puisse emporler à son j
gré et à tout événement. J
L'an 391 avant Jésus-Christ, une de ces ;
bandes, nombreuse comme une armée, vint J
demander aux Etrusques < e Clusium de leur
céder des terres. Clusium ferma ses portes
et demanda du secours aux Romains; Telle
fut l'origine d'une guerre qui devait durer
40C ans et ne se terminer que par la eon-
quête des Gaules. :
Les Gaulois réunis devant Clugjum,) lors-
qu'ils virent les Romains sortir de la-neu-
tralité', laissèrent là le siège commencé,1 et
se remirent en marche, ne s'arrêtant: point
pour piller, et proclamant partout sur leur
route : -r- Nous allons à Rome, nous ne fai-
sons la-guerre qu'aux Romains!
. A une dcjjavrjpurnéei. ,de : la ville, rencon-
trant l'armée ennemie, ils entonnèrent brus-
quement leur chant idc guerre et se ruèrent
sur elle.
M. G uiijot, - dans l' Histoire de Franc& l'a-
contée à r ses petits-enfants, qui paraît en ce
moment'par livraisons, - donne des .détails
précis sur ce grand événement :
« Quand les Gaulois vainqueurs entuèrent
dans Rome, ils n'y trouvèrent que quelques -
: vieillards, assis dans le vestibule de leurs
maisons, sur leur siège orné d'ivoire, un
; bâton d'ivoire à la main, et parés des insi-
gnes des charges publiques qu'ils avaient
remplies. Tout le peuple romain avait fui et
errait dans les campagnes ou cherchait un
refuge chez les peuples voisins. Le sénat
seulement et mille guerriers s'étaient ren-
fermés dans le Capitole, citadelle qui 'domi-
nait la ville. Les Gaulois les y tinrent assié-
gés pendant sept mois. Les aventures de ce
siége célèbre sont connues. Les histo-
riens rornai n s les ont un peu embellies. Non
qu'ils aient trop bien parlé des Romains
eux-mêmes, qui montrèrent, dans ce désas-
tre de leur patrie, un courage, une persévé-
rance et une espérance admirables. Pontius
Cominius, qui traversa le camp gaulois,
passa le Tibre à la nage et escalada pendant
la nuit les rochers du Capitole, pour aller
porter au sénat des nouvelles ; M. Manlius
qui, le premier et quelques moments- seul,
repoussa, du haut des murs de la citadelle,
les Gaulois près d'y pénétrer; M. Fucius
Camillus, banni de Rome l'année précédente
et vivant réfugié dans la ville d'Ardée, qui
se remit soudain en campagne pour sa pa-
trie, rallia les Romains fugitifs et harcela
incessamment les Gaulois, — ce sont là de
: vrais héros, qui ont mérité leur gloire. Mais
leur mémoire n'aurait rien perdu à ce qué
toute vérité fût connue, et les prétentions < 'e
la vanité nationale n'ont pas droit aux mê-
ROCAMBOLE
(NOUVEL ÉPISODE)
LA CORDE DU PENDU
LXX
70
A sept heures ce soir-là, un cab à quatre
places stationnait devant la principale -porte
de Bedlam.
Les domestiques avaient déjà chargé dessus
, une demi-douzaine de colis.
7 C'étaient les bagages de M. John Bell.
Son valet de chambre, qui était du voyage,
- causait familièrement avec le cocher.
—• Nous sommes de vieilles connaissances,
Tobby, disait-il.
— En effet, monsieur Jack, répondit le co-
cher. Voici bien près de dix ans que nous
nous connaissons.
— Oui, Tobby, il y a bien dix ans, en effet.
— Dame! reprit Tobby le cabman, voici
plus de trente fous que je vous amène.
— C'est comme une fatalité, monsieur Jack,
et toutes les fois que les policemen amènent
un fou à l'hospice; c'est moi qui passe en ce
moment dans la rue et à qui ils font signe de
s'arrêter pour le prendre.
— Et les pourboire, dans ces cas-là, sont
maigres, n'est-ce pas, Tobby ?
— Oh! il y a quelquefois des fous généreux.
— Eh bien ! cette fois, vous ne vous plain-
drez pas, Tobby.
— Mais, monsieur Jack, il me semble que je
ne vais pas voiturer des fous aujourd'hui.
— Mais si...
— On m'a dit cependant que j'allais con-
duire M. Eell, un de vos directeurs, au che-
min de fer.
— On vous a dit la vérité, Tobby.
— Et M. Bell n'est pas fou, que je sache,
monsieur Jack.
Jack se prit à sourire :
— M. Bell n'est pas seul, dit-il.
— Ali !
— Il emmène avec lui trois pensionnaires
de Bedlam.
— Qui sont guéris sans doute?
— Oui et non.
— Je iie vous comprends pas, dit Jack.
— Ecoutez-moi, Tobby, je vais vous dire la
vérité tout entière.
— Parlez, monsieur Jack.
— Vous allez conduire quatre personnes à
l'intérieur et moi sur le siége.
— Ce qui fait cinq, monsieur Jack.
— Eh bien ! sur les cinq personnes, il n'y a
véritablement qu'un fou.
— En vérité ?
— Et, ce fou, je vous le montrerai quand
nous arriverons à Charring Cross.
— Pourquoi pas tout de suite, monsieur
Jack ?
— Non, j'ai mes raisons pour cela.
Comme il vous plaira, monsieur Jack.
— Qu'il vous suffise de savoir, Tobby, que
l'homme le J1us heureux de Bedlam, en ce
moment, ce n'est pas une d'a ces cinq per-
sonnes, comme vous pourriez le croire»
— Qui donc est-ce?
— C'est M. Blount, le second directeur.
— Et pourquoi est-il si joyeux, monsieur
Jack?
— Parce que M. Bell s'en va.
— Question de jalousie, peut être...
— Chut! dit Jack, voici nos voyage T».
En effet, fa porte s'ouvrit et M. John Bell
parut,, coiffé d'mie casquette à double visière,
une lorgnette et une gibecière en bandou-
lière et un plaid sur l'épaule.
Derrière lui venait lord William à qui Mar-
mouset donnait le bras.
Edward Cokeries fermait la marche;
M. John Bell était toujours dans le même
état d'exaltation.
Il interpella Tobby.
— Hé! cabman, lui dit-il, votre cheval
m,irche-t-il bien au moins?
— Ah t pour ça, oui, Votre Honneur...
— C'est que je ne veux pas manquer le'che-
min. Songez donc', Colcram, il y va pour
moi de Eept ou huit cent mille livres, peut-
être... ^ j
— Juste ciel ! dit M. Colcram; mais il !
Voir le numéro du 12 juin.
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i Il ..; ' 1
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1 ADMINISTRATION : 13, quai Voitàire. 1
PARIS, 5 JUIN 1870
SALON DE 1870
I
LES GAULOIS DEVANT ROME
I
MM. les jurés, lorsqu'il s'est agi de don-
ner la médaille d'honneur, ont choisi d'un
commun accord une grande toile, couverle j
d'un sujet grec. Le Dernier jour de Corinihe, !
de M. Tony Robert-Fleury, est une vaste
" composition étudiée avec soin, où le peintre
a prouvé que le talent pouvait être le résul-
tat de la volonté et de l'application plus encore
qu'un don naturel, où l'on chercherait vai-
nement l'émotion, le sentiment, la vie, mais
où l'on trouve des nus corrects, des drapc-
ries bien ajustées, une couleur claire qui ne
choque pas, surtout une horreur de l'origi-
nalilé digne de tous les prix d'excellence de
toutes les Académies réunies.
Combien à cette honorable banalité est
préférable le beau tableau de M. Evariste
Luminais: En vue de Rome! Le peintre de
la Brelagne" même dans la grandeur du su-
jet qu'il a traité cette année, a gardé son ori-
ginalité un. peu triste, son amour des choses
humbles et fortes. Te ciel qui éclaire sa
campagne et s'abaisse derrière les aqueducs
à l'horizon, ressemble plutôt à un ciel du
Nord qu'à im ciel d'Italie. Mais c'est Rome
qui blanchit là-bas, et ces barbares dont les
uns se perdent dans l'éloignement, dont les
autres disparaissent à demi dans un pli de
terrain, tandis qu'au premier plan un groupe
colossal se détache en pleine vigueur, — ces
barbares sont bien des Gaulois. Le chef qui
montre la ville à ses hommes a dû vieillir
sur les plateaux des Arvernes défendus par
des pentes abruptes et des ravins profonds.
. Les chevaux, dont les sabots mordent le sol,
dont la tête se courbe sous l'effort, dont les
larges croupes s'étalent, ont dû grandir en
liberté dans les clairières des bois, au milieu
des chênes.»
Quiconque est fidèle aux idées s'arrêtera
devant la toile de.M. Luminais, et retrou
vera dans une vision rapide la France des
premiers jours, celle qui s'appelait les
QJrules...
Les peuples qui l'habitaient formaient une
série de tribus, subdivisées elles-mêmes
sen nations, qui tiraient leur nom de la
fbrme-du pays qu'elles habitaient, côtes,
.pleine, vallée, forêt, montagne. Qu'un péril
f' mun se présentât, ces nations se réunis-
nt en grandes lignes pour le repousser.
temps ordinaire, elles n'avaient d'autre
stien commun que la langue. (
Les Gaulois, chasseurs et pasteurs, étaient
une race active par excellence. Hau ts de six
pieds, vêtus d'une toge, espèce de blouse
rayée de couleurs éclatantes, ils adoraient
dans le costume tout ce qui brille et tout ce
qui reluit : Jes grands châles à carreaux, les
manteaux rouges avec des agrafes de métal,
les chaînes d'or... Quelques-uns se teignaient
la peau d'une substance bleuâtre, d'autres se
tatouaient. Tous peignaient avec soin leurs
longs cheveux blonds et leurs moustaches
fauves. Pour aller en guerre, ils ajoutaient
à leur costume un bouclier de bois et quelf
quefois une cuirasse de fer. Beaux et gloT
rieux, ils aimaient la fanfaronnade devant le'
danger et'le défi devant l'ennemi. Se battre
à tout propos, pour repousser l'étranger,
pour prendre un camp, pour piller une ville,
pour montrer leur bravoure, pour le plaisir;
telle était leur passion.
Quand ils n'avaient rien à faire, ils cher-
chaient querelle à leurs voisins ; quand ils
avaient dîné, ils échangeaient des coups a«H
dessert. Ils lançaient des flèches contre le:
ciel lorsqu'il tonnait. Ils mettaient l'épée à:
la main contre POcean, lorsqu'il éclatait une
tempête. Dans un combat, à Bourges, un
Gaulois, — placé en face d'une des portes
pour alimenter l'incendie d'une tour romai-
ne, — y jetait des foules de suif et de bois
qu'on lui-faisait passer de main en main.
Frappé d'une flèche, il tomba. Son voisin
prit sa place et fut frappé de même. Un troi-
sième se présenta. Puis un quatrième. Puis
un cinquième. On se disputait la place. Et
la porte fut occupée pendant toute la durée
du combat.
De tels hommes devaient aimer les aven-
tures. Aussi retrouve-t-on leurs traces sur
tous les points du monde antique. Une de
leurs tribus allait en Espagne, une autre sur
le Danube, une autre en Grèce, une autre
en Asie. Rome était déjà puissante quand
ii muMli-'inMiiMM'n.im"11 .WMWWMW—«MmMiMnniiiiLiiiiniiiimjj
les Gaulois en: forcèrent l'entrée par sur-
prise. Rien ne pouvait arrêter leur force
d'expansion et de premier mouvement.
A l'intérieur, la propriété s'alliait au COlr-
munisme. Il y avait de grandes terres ap-
partenant à l'aristocratie, et'des biens com-
munaux appartenant à tous. Le partage des
successions faisait une part égale à chi'q'.e.
enfant. Dans le mariage, le divorce était ad-
mis. Mais le mari seul avait le droit de le
provoquer, sauf de rares cas d'exception. Il
devait une pension à la femme répudiée. Dju
reste, le sort de la femme n'était pas heu-
reux. Car. les hommes rapportaient de la
guerre des habitudes jalouses et brutales
dont elles étaient les victimes. Elles étaient
belles et coquettes, un peu légères peut-être.
Les lois faites contre les filles séduites et les
femmes infidèles restent là pour le prouver.
La vierge était sai'nto. Elle symbolisait la
patrie. En elle résidait l'âme de la nation.
On lui attribuait le don de divination.
La première croyance des Gaulois, comi-
me celle de tous les sauvages, fut le poly-
théisme. ' -
Ils adoraient le scMeil, la lune, le tonnerre
elles différents vents, dont le plus vénéré,
nommé le Kirk, était la bise.
A cette adoration dès forces de la nature
succéda celle des dieux personnels, dont le
principal, Hésus, ressemble fort au Jupiter
de là mythologie grecque.
Vint enfin le druidisme, doctrine em-
preinto de mystère et de terreur, mais spi-
ritualiste par excellence, reconnaissant J'u-
nité de Dieu et l'immortalité de l'âme...
* *
• Donc les Gaulois prirent Rome un jour.
Déjà depuis longtemps, l'Italie leur était fa-
milière. Ils étaient venus par bandes, armés
et équipés, s'enrôler au service des Etrus-
ques. Ils avaient occupé les rives du Pô, et
y avaient établi des camps retranchés qui
plus tard devinrent des villes, comme Mi-
lan, Vérone, Bologne et- Brescia..D'ordi-
naire, ils erraient dans les campagnes, dor-
mant sur l'herbe ou sur la paille, ne se nour-
rissant que de viandes, ne s'occupant que de
la guerre et d'urf peu de culture, et n'esti-
mant comme richesse que les troupeaux et
l'or, seuls biens qu'on puisse emporler à son j
gré et à tout événement. J
L'an 391 avant Jésus-Christ, une de ces ;
bandes, nombreuse comme une armée, vint J
demander aux Etrusques < e Clusium de leur
céder des terres. Clusium ferma ses portes
et demanda du secours aux Romains; Telle
fut l'origine d'une guerre qui devait durer
40C ans et ne se terminer que par la eon-
quête des Gaules. :
Les Gaulois réunis devant Clugjum,) lors-
qu'ils virent les Romains sortir de la-neu-
tralité', laissèrent là le siège commencé,1 et
se remirent en marche, ne s'arrêtant: point
pour piller, et proclamant partout sur leur
route : -r- Nous allons à Rome, nous ne fai-
sons la-guerre qu'aux Romains!
. A une dcjjavrjpurnéei. ,de : la ville, rencon-
trant l'armée ennemie, ils entonnèrent brus-
quement leur chant idc guerre et se ruèrent
sur elle.
M. G uiijot, - dans l' Histoire de Franc& l'a-
contée à r ses petits-enfants, qui paraît en ce
moment'par livraisons, - donne des .détails
précis sur ce grand événement :
« Quand les Gaulois vainqueurs entuèrent
dans Rome, ils n'y trouvèrent que quelques -
: vieillards, assis dans le vestibule de leurs
maisons, sur leur siège orné d'ivoire, un
; bâton d'ivoire à la main, et parés des insi-
gnes des charges publiques qu'ils avaient
remplies. Tout le peuple romain avait fui et
errait dans les campagnes ou cherchait un
refuge chez les peuples voisins. Le sénat
seulement et mille guerriers s'étaient ren-
fermés dans le Capitole, citadelle qui 'domi-
nait la ville. Les Gaulois les y tinrent assié-
gés pendant sept mois. Les aventures de ce
siége célèbre sont connues. Les histo-
riens rornai n s les ont un peu embellies. Non
qu'ils aient trop bien parlé des Romains
eux-mêmes, qui montrèrent, dans ce désas-
tre de leur patrie, un courage, une persévé-
rance et une espérance admirables. Pontius
Cominius, qui traversa le camp gaulois,
passa le Tibre à la nage et escalada pendant
la nuit les rochers du Capitole, pour aller
porter au sénat des nouvelles ; M. Manlius
qui, le premier et quelques moments- seul,
repoussa, du haut des murs de la citadelle,
les Gaulois près d'y pénétrer; M. Fucius
Camillus, banni de Rome l'année précédente
et vivant réfugié dans la ville d'Ardée, qui
se remit soudain en campagne pour sa pa-
trie, rallia les Romains fugitifs et harcela
incessamment les Gaulois, — ce sont là de
: vrais héros, qui ont mérité leur gloire. Mais
leur mémoire n'aurait rien perdu à ce qué
toute vérité fût connue, et les prétentions < 'e
la vanité nationale n'ont pas droit aux mê-
ROCAMBOLE
(NOUVEL ÉPISODE)
LA CORDE DU PENDU
LXX
70
A sept heures ce soir-là, un cab à quatre
places stationnait devant la principale -porte
de Bedlam.
Les domestiques avaient déjà chargé dessus
, une demi-douzaine de colis.
7 C'étaient les bagages de M. John Bell.
Son valet de chambre, qui était du voyage,
- causait familièrement avec le cocher.
—• Nous sommes de vieilles connaissances,
Tobby, disait-il.
— En effet, monsieur Jack, répondit le co-
cher. Voici bien près de dix ans que nous
nous connaissons.
— Oui, Tobby, il y a bien dix ans, en effet.
— Dame! reprit Tobby le cabman, voici
plus de trente fous que je vous amène.
— C'est comme une fatalité, monsieur Jack,
et toutes les fois que les policemen amènent
un fou à l'hospice; c'est moi qui passe en ce
moment dans la rue et à qui ils font signe de
s'arrêter pour le prendre.
— Et les pourboire, dans ces cas-là, sont
maigres, n'est-ce pas, Tobby ?
— Oh! il y a quelquefois des fous généreux.
— Eh bien ! cette fois, vous ne vous plain-
drez pas, Tobby.
— Mais, monsieur Jack, il me semble que je
ne vais pas voiturer des fous aujourd'hui.
— Mais si...
— On m'a dit cependant que j'allais con-
duire M. Eell, un de vos directeurs, au che-
min de fer.
— On vous a dit la vérité, Tobby.
— Et M. Bell n'est pas fou, que je sache,
monsieur Jack.
Jack se prit à sourire :
— M. Bell n'est pas seul, dit-il.
— Ali !
— Il emmène avec lui trois pensionnaires
de Bedlam.
— Qui sont guéris sans doute?
— Oui et non.
— Je iie vous comprends pas, dit Jack.
— Ecoutez-moi, Tobby, je vais vous dire la
vérité tout entière.
— Parlez, monsieur Jack.
— Vous allez conduire quatre personnes à
l'intérieur et moi sur le siége.
— Ce qui fait cinq, monsieur Jack.
— Eh bien ! sur les cinq personnes, il n'y a
véritablement qu'un fou.
— En vérité ?
— Et, ce fou, je vous le montrerai quand
nous arriverons à Charring Cross.
— Pourquoi pas tout de suite, monsieur
Jack ?
— Non, j'ai mes raisons pour cela.
Comme il vous plaira, monsieur Jack.
— Qu'il vous suffise de savoir, Tobby, que
l'homme le J1us heureux de Bedlam, en ce
moment, ce n'est pas une d'a ces cinq per-
sonnes, comme vous pourriez le croire»
— Qui donc est-ce?
— C'est M. Blount, le second directeur.
— Et pourquoi est-il si joyeux, monsieur
Jack?
— Parce que M. Bell s'en va.
— Question de jalousie, peut être...
— Chut! dit Jack, voici nos voyage T».
En effet, fa porte s'ouvrit et M. John Bell
parut,, coiffé d'mie casquette à double visière,
une lorgnette et une gibecière en bandou-
lière et un plaid sur l'épaule.
Derrière lui venait lord William à qui Mar-
mouset donnait le bras.
Edward Cokeries fermait la marche;
M. John Bell était toujours dans le même
état d'exaltation.
Il interpella Tobby.
— Hé! cabman, lui dit-il, votre cheval
m,irche-t-il bien au moins?
— Ah t pour ça, oui, Votre Honneur...
— C'est que je ne veux pas manquer le'che-
min. Songez donc', Colcram, il y va pour
moi de Eept ou huit cent mille livres, peut-
être... ^ j
— Juste ciel ! dit M. Colcram; mais il !
Voir le numéro du 12 juin.
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