Titre : La Petite presse : journal quotidien... / [rédacteur en chef : Balathier Bragelonne]
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1872-07-09
Contributeur : Balathier Bragelonne, Adolphe de (1811-1888). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32837965d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 09 juillet 1872 09 juillet 1872
Description : 1872/07/09 (N2254). 1872/07/09 (N2254).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k47160545
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-190
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 22/10/2017
22 juillet. "
Mon cher Millière,
Je suis seul propriétaire et fondateur de la
Marseillaise, faite avec mon argent et sous ma
responsabilité.
Je vous avais choisi pour administrer mon
journal. Vous avez cru devplr m'envoyer votre
démission. Je l'ai acceptée et j'ai pourvu à vo-
tre remplacement.
5 Vous ne faites donc plus partie de la malson
à aucun titre; aussi la demande que vous m'a-
dressez me paraîtrait-elle le comble de l'au-
dace si je n'étais convaincu que vous la consi-
dérez vous-même comme une mauvaise plai-
santerie.
Votre dévoué,
HENRI ROCHEFORT.
J'apprends à l'Instant rotra- refus de rendre
l'argent déposé en votre nom. Ceci clôt toute
discuâfcion. Vous êtes un lâche et un voleur,
et je ne puis que m'<;pplaudir d'être à jamais
séparé de 1 individu qui a laissé disparaîtra
16,500 fr. de la caisse.
Vous voyez que la rédaction avait raison
quand elle m'assurait que vous étiez une af-
freuse canaille.
H. R.
5e CONSEIL DE GUERRE
Présidence de M. le colonel Donnat.
Audience du 5 juillet.
Maljournal, ex-membre du comité central
On se rappelle que Maijonrna! fat frappé, te 22 mars
1871, le jour de la manifestation de la place Vendôme,
d'une balle à la jambe. Au moment de l'entrée des
troupes dans Paris, Il fut arrêté et depuis 11 est main-
tenu en état d'art e4at'on, mais sa blessure n'est pas
guérie et actuellement il est encore dans i'imposs!bi!ité
jde marcher. Deux gendarmes l'apportent à l'audience;
11 paraît très-faible et est encore très-souffrant. Des
journaux, en rendant compte de ce procès, essayent
de faire croire que Mabournal est innocent et abso-
lument étianger aux événements; nous ne nous lasse-
rons pas de dire que tous ceux qui sont les Inspirateurs
du mouvement du 18 mars et ont appartenu d'une ma-
nière quelconque à l'organisation de cette sinistre tra-
gédie sont tous coupables au premier degré. A ce titre,
Maljournal est absolument coupable.
L accu cation portait sur le crime d'embauchage et
sur le commandement de bandes armées.
; Nous appelons l'attention de nos lecteurs sur la
question si souvent débattue, relativement à l'ordre de
raire feu donné par les fédérés et établissant que l'a-
gression est réellement venue de leur côté, alors
qu'aucun coup de fea n'avait été tiré du côté des ma-
nifestants.
Après les formalffés habituelles, M.Ile président
procède à l'interrogatoire de l'accusé.
D. ,,A£°.nsé>. quoique vous ne soyez pas Impliqué
dans l affaire de la place Vendôme, je vais cependant
vous adresser quelques questions à ce sujet, car il
serait utile de connaître les faits tels qu'ils se sont
passés, et jusqu'à présent la vérité a été plus ou moins
dénaturée. Vous étiez sur la place Vendôme le 22 mars ,
lu moment de la manifestation ?
R. Parfaitement, je n'ai jamais, cherché à le nier. -
D. Et que faisiez-vous là, dans un pareil moment ?
t R. J'étais à mon poste, étant attaché depuis trois
jours à l'état-major du colonel Bergeret.
D. Vous étiez sur la plaee quand s'est présentée la
manifestation. Quel a été votre rôle en cette affaire ?
< R. Un rôle de conciliateur ; j'ai fait la leçon aux
gardes nationaux, je leur ai recommandé de ne point
tirer, malgré les provocations de la foule. Malheureu-
sement plusieurs coups de feu furent tirés par les ma-
nifestants, et les gardes nationaux, se trouvant sur le
pied de légitime défense, déchargèrent leurs fnsils.
D. Vous prétendez que ce sont les manifestants qui
ont tiré les premiers; des témoins diront le contraire
tout à l'heure.
R. Je vous assure, monsieur le président, que les
gardes nationaux t'ont tiré qu'après avoir essuyé
une première fois le feu des soi-disant amis de l'ordre.
1-t D. Mais qui a donné aux gardes nationaux l'ordre
de tirer ?
R. Personne. Attaqués, ils ont fait feu, sans ordre,
sans commandement, poussés seulement par l'instinct
de conservation.
Il y a eu un roulement de tambours auparavant 5
et c est vous qui l'avez ordonné.
R. C est vrai. Je l'ai fait exécuter sur l'ordre de
Bergeret, pour réunir les gardes nationaux, afin de
repousser par la force, au besoin, la manifestation qui ■
flevenalt de plus en plus menaçante et qui était sur le
1 point d'envahir les bureaux de l'état-major. Mais
je vous assure que ce roulement de tambour n'avait
point d'autre but. Nous voulions simplement réunir les
gardes nationaux sous les armes, afin de ne pas tëtre'
débordés.
D. Passons" maintenant à un autre ordre de faits.
Vous étiez présent, le 22 mars au matin, à cette déli-
bération du comité central où fut voté le décret relatif
à l'enrôlement des soldats de l'armée régulière dans
les bataillons de la garde nationale.
R. Oh 1 vous vous trompez complétement. Je n'ai
pas assisté à cette délibération, je n'étais même pas à
l'bôtel de ville. Je me trouvais auprès de Bergeret, à
l'état-major de la place Vendôme, jusqu'au moment
où j'ai reçu cette blessure.
D. A propos, quand avez-vous reçu cette blessure?
R. Au moment où je m'adressais aux gardes natio-
naux pour les supplier de rester calmes en présence
de la manifestation. Une balle partie de la foula est
venue me frapper à cette jambe et depuis lors je suis
resté étranger aux faits et gestes de la Communs.
D. Vous avez été secrétaire du comité central jus-
qu'au 20 mars, le reconnaissez- votis? î
R. Parfaitement ; je n'ai jamais songé à décliner la
responsabilité de mes actes.
Au cours de sa plaidoirie, le défenseur établit, piè-
ces en mains, quo Maijournal appartient à une famille
très-honorable, et de plus, il s'Attache à démontrer
qu 'il n'était pas présent à la délibération du comité
central, le 22 mars.
Le conseil, après une courte délibération, répond
négativement sur la question d'embauchage, et con-
damne Maljournal à la déportation simple.
Cour d'assises des Bouches-du-Rhône
LA BANDE DE LA TAILLE
Audience du 5 juillet.
La foule des curieux, toujours fort empressée am
abords du palais, commente à sa façon les incidents
de l'audience d'hier. On ne veut voir dans la mala-
die de Fontana qu'une habile comédie pour se tirer
d affaire, quant à présent. Cette maladie est cepen-
dant chose réelle, trop réelle, car le malheureux n'a
pas longtemps à vivre, et le docteur qui l'a visité ne
croit pas qu'il ait le temps d'attendre une prochaine
session; quand cette session viendra, Fontana ne
sera certainement plus de ce monde.
Les commentaires faits par la foule sur les causes
et les effets de la maladie, ou mieux la comédie de
Fontana, ont quelque fondement à raison des diver-
ses tentatives d'évasions faites par les brigands et
des moyens dont le chef les aurait pourvus.
Trouer des murs, scier des barres de fer, n'est
pas un mince travail, et il faut encore être muni de
pas mal d'instruments pour mener à bonne fin une
telle entreprise. Pour se procurer des instru-
ments, petites scies, petites limes, trousse com-
plète de repris de justice, nous savons que messieurs
les voleurs disposent de plus d'un moyen. Toutefois,
°.^ n'aurait jamais rencontré prisonniers mieux ou-
tillés et près à abattre tant de pans de murs, tant
de barreaux de fenêtre.
Il paraît que les premiers brigands de la bande,
arrêtes et détenus avec Coda, en 1867, avaient, eux
aussi, tAntR dp. KY vnrïpr. r,'pst.';'¡ ces premiers détenus
que ceux qui comparaissent aujourd'hui, et alors en
liberté, faisaient passer des armes et des outils, par
tous les moyens à eux connus.
On se souvient encore ici, à Aix, de l'émotion pro.
duite par la découverte d'un couteau enrermé dans
un pain servi sur la table de Coda-Zabetta.
Il paraît donc que Coda-Zabetta, Nardi, Quaransa
et les autres brigands, ne purent se servir de leurs
outils et de leurs armes avant de quitter la prison.
— Pour eux, s'ils y revenaient jamais; pour les con-
frères, s'ils étaient jamais pris, — ils eurent l'idée de
cacher leur trousse dans un trou de mur parfaite-
ment réparé et dissimulé. L'endroit choisi était à
côté de la pompe qui fournit de l'eau à la prison.
L'endroit était bien choisi, sous tous les rapports.
D'abord, le coin où se trouve la pompe est hors des
regards des surveillants; ensuite, se îendant à deux
a. la pompe, l'un faisait le trou et le bouchait, pen-
dant que l'autre, pompant à tour de bras, dissimulait
le bruit fait par le premier.
Ce sont ces outils cachés qui auraient servi aux
successeurs de Coda, Nardi et Ce, pour les tenta-
tives d'évasion dont il a été question ces jours pré-
cédents.
Ce sont tous ces détails connus de la foule qui
fournissent matière aux commentaires nouveaux faits
sur le cas de Fontana. On ne veut voir dans la mala-
lie du chef de la bande de brigands qu'un moyen de
servir les intérêts de ses hommes. Là-dessus, ce sont i.
les contes bleus que l'on brode, et je m'anête pour
le pas me faire l'écho de toutes les sornettes qui peu- i
,? vent passer dans l'esprit d'un public exalté et tro
It facilement impressionnable.
s L'absence de Fontana n'enlèvera aucun intérêt au
e débats. Le chef de la Taille n'a jamais opéré seul, (
chacun des crimes relevés par l'accusation demeur
. à la charge des gens de la bande.
Les interrogatoires vont se poursuivre active
f ment.
s Pour ne pas perdre le fil de l'accusation, M. li
président rappelle un à un les crimes de la bande, e
1 interroge les accusés, par groupe de deux, trois
ï quatre, selon le nombre des figurants, pour chacui
t des forfaits commis.
t Pour ne plus revenir sur l'interrogatoire individuel
M. le président rappelle les antécédents de chaqui
' accusé et les invite à s'expliquer.
Nous avons fait connaître les ancécédents de ces
i gens-là, nous ne nous arrêterons qu'à certains dé.
tails nouveaux.
t avons dit déjà que G'aletto, dit Bochon, eS1
petityus d un homme exécuté et fils de père et mère,
tous les deux perdus de réputation. C'est donc un
homme de race que ce Galetto.
Il n est pas tout à fait âgé de vingt ans, mais il
est doué de muscles puissants et jouit d'une force
herculéenne. A le voir au repos et en ne considérant
que son visage, on ne croirait pas avoir devant soi
le monstre qui a pris part à tous les assassinats com-
mis par la bande. C'est de tous les accusés celui qui
a la meilleure physionomie; il a même quelque
chose de fin dans les traits du visage. C'est, je le
répète, un homme de race, il a toutes les délicatesses
de traits, toute la noirceur morale d'un fils de-César.
Comme un prince, quand il consulte sa généalogie,
ce jeune brigand peut trouver pour chacun des
siens les rages de sang qui ont fait de lui l'homme
qu il est.
Nous ne nous arrêterons que sur un fait cité par
M. le président : OrsJlano, le trop célèbre Orsolano,
grand-père de Galetto, connu en Italie sous le nom
de la Hyene, fut condamné à mort et exécuté. Sa-
vez-vous quel était son crime, — un de ses crimes,
faut-il dire?
Cet homme féroce, cette hyène, volait des petits
enfants, les tuait et se servait de leur chair pour
faire des petits pâtés qu'il vendait.
La révélation de ces faits horribles fait frissonner
I auditoire. Tous les regards se braquent sur Galetto,
toutes les bouches murmurent des imprécations.
En donnaut les antécédents des accusés, nous
avons parlé de l'immoralité de la femme Mante-
gazza. La conduite actuelle de cette femme, à la pri-
son, est tellemement révoltante que M. le président
annonce qu 'il est question de lui enlever son enfant,
qu'elle n'est pas digue d'allaiter.
Pour tous les autres accusés, le président ne peut
que répéter les renseignements que nous avons déjà
fait connaître.
Les interrogatoires se poursuivent. Chaque vol ex-
posé, et les explications des accusés entendues, on
appelle les témoins relatifs à chaque fait. Chacun de
ces faits se ressemble.
C'est le vol à outrance. C'est l'emmagasinage chez
Fontana de toutes les denrées prises à droite et à
gauche. Mais jusqu'ici, point de sang. Les victi-
mes de ces vols ont eu la chance de ne pas se ren-
contrer avec les brigands sur les lieux du pillage*
fort heureusement, car les brigands, « qui ne lais-
saient pas de témoins, » leur eussent fait un mauvais
parti. Eux aussi auraient été taillés, et ils ne pour-
raient pas venir aujourd'hui à l'audience reconnaître
leur linge, leurs bijoux, leurs sacs de blé, voire même
compter les peaux de lapins et les peaux de moutons,
seuls restes des ripailles de la bande.
Avant d'entamer la série d'assassinats, la cour en-
tend les témoins qui ont participé à l'arrestation de
Fontana et des principaux brigands.
Ces témoignages sont relatifs aux diverses circon-
stances de la capture des bandits dont nous avons
lonné le résumé dans l analyse de l'acte d'accu-
;ation.
L'interrogatoire touchant les arrestations et les
fols commis par la baude ne fatigue pas outre me-
sure les accusés. Ceux-ci se contentent de nier, et
juand les témoins viennent apporter un démenti a
eurs dénégations, ils ne savent répondre qu'une
;hose : « Je ne connaissais pas ce témoin. » On di-
rait un mot d'ordre.
Si les accusés nient les faits qui leur sont repro-
:hés, il arrive cependant qu'ils avouent certains vols
Ini ne sont pas relevés contre eux. C'est ainsi qu'à
)ropos d'un vol de blé comnris à S?Hon, vol nié par
jeux qui l'ont commis, Galeîto déclare que le seul
auteur du vol, c'est lui.
M. l'avocat général. — Un moment! un moment!
Tous avez intérêt, vous, à vous donner comme l'au-
eur du vol. C'est un alibi que vous cherchez. Il y a
ix mois qu 'on vous interroge et pour la première
Dis vous parlez de ce vol que vous auriez commis.
ion, le 3 septembre, jour du vol, vous n'étiez pas à
lalon. vous é!iez dans la commune de Lurs, à la
srme de l'Evé, où s'est commis un quadruple assas-
inat.
L'exposé des expéditions nocturnes dans lesquelles
le sang a ooulé si abondamment promet de donn*.,.
un interrogatoire des plus saisissants, car ce ne sont
,pas, hélasl les détails horribles qui manquent.
dic!nce.Cet re commencera à la prochaine au-
Peut-être bien les accusés ne montreront-ils nne
demain la même assurance, le Se oTm pasles
leur surtout, qui n'ont ?*! l'air ^ se soucier de
leur état. Seule, la femme Arèse, concubine de Fon.
tana, paraît accablée. Ses traits sont altérés, sur ses et elle
mains. tient constamment le front deuxelle
De temps à autre, la petite Montegazza ë crie. -
Pauvre enfant ! quel triste baptême !
L audience est levée à sept heures. Malgré l'intérêt
qui cloue le public des curieux à sa place, la foule
le mur teniie barrière, serrée dans le fond de la salle, entre
t?n^ i^nèr?' quitte la salle avec saiisfao
tion, comme et la des prisonniers rendus à la lil)erté. -
Un peu d air pur n'est pas de trop pour ces bonnes
venus,?uire dans fournaise. pour ifffl
ici une chaleur accablante et, quand on jette un de COUD3
l'audience, saisi
bl'ûlante.à voir 6 foule public qui se presse dans une atmosphère
CHRONIQUE JUDICIAIRE
UN AGENT BONAPARTISTE, - Tous les hommes
de cinquante à soixante ans de notre époque
connaissent, sinon de vue, mais tout au moins !
de réputation — et quelle réputation! un
certain M. de Pindray, aventurier, spadassin;,
joueur effréné, entrepreneur d'opérations finan::
cières et irrégulières. :lu
M. de Pindray, gentilhomme du Poitou, ayant
été comprenais dans une affaire de fabrication de
billets de la Banque de France,fut forcé de s'ex-
patrier sous le règne de Louis-Philippe.
Ensuite, on le voit au Mexique, faisant une
expédition en même temps que M. de Raoasset
Boulbon qui fut fusillé dans ce pays.
Sous J'Empire M. de Pindray revint en France
et se fit agent de police, mais agent de la haute.
Ses nombreuses aventures, son audace à toute
epieuve et sa connaissance profonde du mondé
interlope et taré de Paris devaient faire de lui
un collaborateur précieux pour M. le préfet.
L Empire tombé, M. de Pindray se présenta au
gouvernement du 4 septembre. Il offrit à ce
gouvernement de former quatre escadrons d'é-
claireurs à cheval qui, disait-il, devaient rendre
de grands services. Le gouvernement, ignorant-
quil avait affairera un agent de BOQaparte, ac-
cepta ces propositions.
L agent bonapartiste de Pindray reçut, dit le
Rappel, pour l organisation des escadrons en
question, des sommes qu'il mit dans sa poche.
Il escroqua en même temps une certaine quan-
tite de chevaux.
Puis, on n entendit plus parler de l'agent bo-
napartiste de Pindray, non plus que de ses esca-*-'
drons.
On évalue à 100,000 francs environ la valeur
des détournements commis par ce serviteur de
X
Le 3e conseil de guerre, le jugeant par contu-
mace, vient de le condamner à vinp't ans de tra-
vaux forcés.
Nous avons rapporté hier la condamnation à i
la peine capitale, prononcée contre Jules Vallès,.:
contumace, par le 6e conseil de guerre. 4
Parmi les pièces du dossier de cet énërgumène'
se trouvait la pièce suivante, trouvée parmi les 1
papiers de toute nature recueillis au ministère.
de la guerre. Elle montre les sentiments infâme^
Sont Vallès était animé à l'égard de ses con-
frères :
Paris, le 23 mar 1871.
Au chef des Prussiens.
Mon cher commandant,
d^ns la rue de Lille une maison, que Vallès.
vous recommandent p'articulièrementr
; > est la maison portant le no 49. Il y a là ce qui
)araît, un réactionnaire qui s'appelle Debans, et qui;
icnva.it dans le Moniteur contre la Commune. Ce
versaillais a vexé, ce qui paraît, les citoyens Pyat et-'
vallès, qui vous le recommandent le manquez pas, j
nais n oubliez pas la maison du nommé Vrignault
)u Vregnaut. ÿ
Salut et égalité.
(Confidentielle.)
E. MARTIN.
N° 81. — Feuilleton de la PETITE PRESSE
Le Chiffonnier Philosophe
DEUXIÈME PARTIE
XXVI
Les exploits d'un Zaporogue.
Mais, une fois entrés dans le bum retiro, le
boyard saisit violemment le poignet de l'he.t-
man, et d'un signe de tête, ponctué d'un terri-
comb.froncement sourcils, lui montra Mme Will-
Le Zaporogue porta sa main droits à son cou
vre-cbef avec une mauvaise grâce évidente;
Pu s se campant en face de Georges, il le toisa
d'un dialité. qui manquait complètement de cor-
mohAeVe bienvenu, monsieur, dit néan-
moins le Transatlantique, sans se départir de
son flepie caractéristique. Et croyez bien que,
le et moi, nous eussions connu votre
? comte Powschine, nous ne vous
Sp? « f pas réduit à la nécessité d'em-
pressé porter P°rtv d'assaut ; je me serais em-
tants. l'ouvrir moi-même à deux bat-
effet accueil f plaisant et courtois produisit un
tellement négatif sur l'étranger, que son
le Pftwéro d'hier.
interlocuteur supposait tout d'abord qu'il ne
comprenait pas le français.
Mais le Cosaque lui prouva bientôt. le con-
traire, en établissant cependant que son voca-
bulaire était des plqs restreints dans cette lan-
gue préférée à la leur par les, classes aristocra-
tiques de la Russie. *
— Importe! s'écria-t-il, roulant toujours fu-
rieusement ses prunelles glauques. Outragé !...
hetman et prince, pareils!... Sur titre, reçu
partout, mni !... on insulte aux Markoff I... Vos
moujicks insolents, par eux chassé d'abord!...
Rendrez raison... ou excuses!
Pétrus avait en vain essayé d'arrêter du geste
ce flux de phrases estropiées, mais néanmoins
compréhensibles dans leur sens presque incon-
venant. N 'y pouvant réussir, il y coupa court
par un grand moyen : en appliquant sa main
nerveuse sur la bouche moustachue du mulâtre.
Il lui adressa alors quelques mots assez mena-
çants de ton, dans ce joli langage que les cor-
beaux eussent revendiqué pour leur chant.
Cette mercuriale parut exercer une certaine
influence sur l'hérissé personnage, car il s'en
vint mettre un genou en terre devant Elise, assez
effrayée du scabreux résultat de sa curiosité en
matière d aborigènes du Pont-Euxin.
"7" Mazeppa... tout aux belles! ànonna-t-il.
Moi aussi... Vengeance se taire pour vous, péri!
Il se releva d'un air très-satisfait de son élo-
quence.
Allons, fit en raillant le boyard, s'adressant
lux maitres de la maison, la paix est signée. Le
.^os... légendaire... des cirques olympiques sa-
:nSait jusqu'à à ses haines aux dames. Son imita-
teur, 1 illustre chef de Sotma, mon trop fidèle
imi, immole à la bonne fée de céans ses préten-
griefs, consistant dans l'empêchement ap-
| porté par vos serviteurs à l'entrée triomphale
j qu'il se croit due, partout où je suis ! Par culte
| chevaleresque pour la châtelaine, il consent à ne
j point se couper la gorge avec le châtelain, en
j réparation d'un tel affront ! Auriez-vous supposé,
noble dame et preux seigneur, le dernier des,
| troubadours-abricot né au fond de nos solitudes
i turco-russes ? Voilà l'effet des sujets de pendules
1 françaises, qui pénètrent dans les contrées les
plus arriérées ?
La gouaillerie était trop parisienne pour être
saisie par l'hetman, demeuré debout, immobile,
ci stupide et fier, » selon l'expression d'Alfred
de Musset qualifiant le front de Belcolore.
— Ali çà, répondit à mi-voix le citoyen des
Etats-Unis; dont le sourire avait pris une certaine
nuance de dédain, votre croquemitaine des
chandelles est donc aussi un nouveau saint
Georges, pour en appeler aux armes sous d'aussi j
futiles prétextes?... Et pour n'avoir pas encore '
rencontré.un autre bretteur qui ait coupé court 1
à sa manie, en vérité trop... blessante?
— Ohl Markoff possède une adresse réelle-
ment... malheureuse en tous les genres d'es- '
crime. Rien que pour oubli des honneurs aux-
quels il prétend avoir droit, il a eu une dizaine I
de combats singuliers... dans toutes les accep- !
tations du mot. I
— Douze, rectifia le Zaporogue, car son cor- 'j
nac avait parlé assez lentement pour qu'il saisit
tout le sens de la phrase. I
— Et, dans ces diverses rencontres au sabre,
à l'épée, au pistolet, à la carabine et même à i
la lance, poursuivit Powschine, il n'a jamais
reçu une égratignure. Quant à ses adversaires,
je ne crois pas qu'aucun d'eux soit sorti sain et
sauf du duel.
Tous tués... de snlte... ou des suites 1 çx-
piiqua le spadassin nomade, avec une soudaine
intuition des nuances de notre homonymie qui
étonna un peu l'Américain. ;
Quant au Russe, il se mordit imperceptible-
ment les lèvres.
, Le quasi-jeu de mots du barbare, sur un aussi
sinistre sujet, jjausa un frisson d'épouvante à'
Elise. Elle regretta tout à fait que son naïf ca-
price eût introduit ce loup féroce dans sa berge-'
rie. Aussi ne s'en cramponna-t-elle que mieux
à l'idée d'éviter l'ombre d'une occasion aux1
fureurs de la bête fauve, pendant son séjour né-
cessairement court à l'hôtel Willcomb.
En ce moment, les bouffées musicales d'une
des plus enlevantes valses de Strauss parvinrent
jusqu'au petit salon. L'hetman tendit l'oreille.
— Voir le bal ! grogna-t-il, dodelinant sa
grosse tête chevelue et barbue d'une façon qu'on
peut étudier dans les fosses du Jardin des
plantes. ,.v
— Mais certainement, acquiesça la jeune fem-
me avec un empressement fébrile. Mon ami, et
vous, monsieur le comte, montrez donc notre ' :.
fête à.Son Excellence...'Et surtout ne le quittez
pas, ajouta-t-elle tout bas à l'adresse de Pétrus '
d'un accent sUDDIiant.
(La suite à demain.)
JULES CAUVAIN.
LES PETITS BILLETS DE BANQUE. — Au fur et à
mesure qu'ils rentrent dans les caisses de la
Banque de France, les billets de S francs ac-
tuellement en circulation, :sont détruits. On se
propose de les remplacer par des billets de 20
francs, beaucoup plus commodes pour les tran-
sactions, et par une émission de coupures de
10 francs. Enfin, le conseil de la Banque de
France s'occupe activement de prévenir UBA
çyi au moment de t-', ~
Mon cher Millière,
Je suis seul propriétaire et fondateur de la
Marseillaise, faite avec mon argent et sous ma
responsabilité.
Je vous avais choisi pour administrer mon
journal. Vous avez cru devplr m'envoyer votre
démission. Je l'ai acceptée et j'ai pourvu à vo-
tre remplacement.
5 Vous ne faites donc plus partie de la malson
à aucun titre; aussi la demande que vous m'a-
dressez me paraîtrait-elle le comble de l'au-
dace si je n'étais convaincu que vous la consi-
dérez vous-même comme une mauvaise plai-
santerie.
Votre dévoué,
HENRI ROCHEFORT.
J'apprends à l'Instant rotra- refus de rendre
l'argent déposé en votre nom. Ceci clôt toute
discuâfcion. Vous êtes un lâche et un voleur,
et je ne puis que m'<;pplaudir d'être à jamais
séparé de 1 individu qui a laissé disparaîtra
16,500 fr. de la caisse.
Vous voyez que la rédaction avait raison
quand elle m'assurait que vous étiez une af-
freuse canaille.
H. R.
5e CONSEIL DE GUERRE
Présidence de M. le colonel Donnat.
Audience du 5 juillet.
Maljournal, ex-membre du comité central
On se rappelle que Maijonrna! fat frappé, te 22 mars
1871, le jour de la manifestation de la place Vendôme,
d'une balle à la jambe. Au moment de l'entrée des
troupes dans Paris, Il fut arrêté et depuis 11 est main-
tenu en état d'art e4at'on, mais sa blessure n'est pas
guérie et actuellement il est encore dans i'imposs!bi!ité
jde marcher. Deux gendarmes l'apportent à l'audience;
11 paraît très-faible et est encore très-souffrant. Des
journaux, en rendant compte de ce procès, essayent
de faire croire que Mabournal est innocent et abso-
lument étianger aux événements; nous ne nous lasse-
rons pas de dire que tous ceux qui sont les Inspirateurs
du mouvement du 18 mars et ont appartenu d'une ma-
nière quelconque à l'organisation de cette sinistre tra-
gédie sont tous coupables au premier degré. A ce titre,
Maljournal est absolument coupable.
L accu cation portait sur le crime d'embauchage et
sur le commandement de bandes armées.
; Nous appelons l'attention de nos lecteurs sur la
question si souvent débattue, relativement à l'ordre de
raire feu donné par les fédérés et établissant que l'a-
gression est réellement venue de leur côté, alors
qu'aucun coup de fea n'avait été tiré du côté des ma-
nifestants.
Après les formalffés habituelles, M.Ile président
procède à l'interrogatoire de l'accusé.
D. ,,A£°.nsé>. quoique vous ne soyez pas Impliqué
dans l affaire de la place Vendôme, je vais cependant
vous adresser quelques questions à ce sujet, car il
serait utile de connaître les faits tels qu'ils se sont
passés, et jusqu'à présent la vérité a été plus ou moins
dénaturée. Vous étiez sur la place Vendôme le 22 mars ,
lu moment de la manifestation ?
R. Parfaitement, je n'ai jamais, cherché à le nier. -
D. Et que faisiez-vous là, dans un pareil moment ?
t R. J'étais à mon poste, étant attaché depuis trois
jours à l'état-major du colonel Bergeret.
D. Vous étiez sur la plaee quand s'est présentée la
manifestation. Quel a été votre rôle en cette affaire ?
< R. Un rôle de conciliateur ; j'ai fait la leçon aux
gardes nationaux, je leur ai recommandé de ne point
tirer, malgré les provocations de la foule. Malheureu-
sement plusieurs coups de feu furent tirés par les ma-
nifestants, et les gardes nationaux, se trouvant sur le
pied de légitime défense, déchargèrent leurs fnsils.
D. Vous prétendez que ce sont les manifestants qui
ont tiré les premiers; des témoins diront le contraire
tout à l'heure.
R. Je vous assure, monsieur le président, que les
gardes nationaux t'ont tiré qu'après avoir essuyé
une première fois le feu des soi-disant amis de l'ordre.
1-t D. Mais qui a donné aux gardes nationaux l'ordre
de tirer ?
R. Personne. Attaqués, ils ont fait feu, sans ordre,
sans commandement, poussés seulement par l'instinct
de conservation.
Il y a eu un roulement de tambours auparavant 5
et c est vous qui l'avez ordonné.
R. C est vrai. Je l'ai fait exécuter sur l'ordre de
Bergeret, pour réunir les gardes nationaux, afin de
repousser par la force, au besoin, la manifestation qui ■
flevenalt de plus en plus menaçante et qui était sur le
1 point d'envahir les bureaux de l'état-major. Mais
je vous assure que ce roulement de tambour n'avait
point d'autre but. Nous voulions simplement réunir les
gardes nationaux sous les armes, afin de ne pas tëtre'
débordés.
D. Passons" maintenant à un autre ordre de faits.
Vous étiez présent, le 22 mars au matin, à cette déli-
bération du comité central où fut voté le décret relatif
à l'enrôlement des soldats de l'armée régulière dans
les bataillons de la garde nationale.
R. Oh 1 vous vous trompez complétement. Je n'ai
pas assisté à cette délibération, je n'étais même pas à
l'bôtel de ville. Je me trouvais auprès de Bergeret, à
l'état-major de la place Vendôme, jusqu'au moment
où j'ai reçu cette blessure.
D. A propos, quand avez-vous reçu cette blessure?
R. Au moment où je m'adressais aux gardes natio-
naux pour les supplier de rester calmes en présence
de la manifestation. Une balle partie de la foula est
venue me frapper à cette jambe et depuis lors je suis
resté étranger aux faits et gestes de la Communs.
D. Vous avez été secrétaire du comité central jus-
qu'au 20 mars, le reconnaissez- votis? î
R. Parfaitement ; je n'ai jamais songé à décliner la
responsabilité de mes actes.
Au cours de sa plaidoirie, le défenseur établit, piè-
ces en mains, quo Maijournal appartient à une famille
très-honorable, et de plus, il s'Attache à démontrer
qu 'il n'était pas présent à la délibération du comité
central, le 22 mars.
Le conseil, après une courte délibération, répond
négativement sur la question d'embauchage, et con-
damne Maljournal à la déportation simple.
Cour d'assises des Bouches-du-Rhône
LA BANDE DE LA TAILLE
Audience du 5 juillet.
La foule des curieux, toujours fort empressée am
abords du palais, commente à sa façon les incidents
de l'audience d'hier. On ne veut voir dans la mala-
die de Fontana qu'une habile comédie pour se tirer
d affaire, quant à présent. Cette maladie est cepen-
dant chose réelle, trop réelle, car le malheureux n'a
pas longtemps à vivre, et le docteur qui l'a visité ne
croit pas qu'il ait le temps d'attendre une prochaine
session; quand cette session viendra, Fontana ne
sera certainement plus de ce monde.
Les commentaires faits par la foule sur les causes
et les effets de la maladie, ou mieux la comédie de
Fontana, ont quelque fondement à raison des diver-
ses tentatives d'évasions faites par les brigands et
des moyens dont le chef les aurait pourvus.
Trouer des murs, scier des barres de fer, n'est
pas un mince travail, et il faut encore être muni de
pas mal d'instruments pour mener à bonne fin une
telle entreprise. Pour se procurer des instru-
ments, petites scies, petites limes, trousse com-
plète de repris de justice, nous savons que messieurs
les voleurs disposent de plus d'un moyen. Toutefois,
°.^ n'aurait jamais rencontré prisonniers mieux ou-
tillés et près à abattre tant de pans de murs, tant
de barreaux de fenêtre.
Il paraît que les premiers brigands de la bande,
arrêtes et détenus avec Coda, en 1867, avaient, eux
aussi, tAntR dp. KY vnrïpr. r,'pst.';'¡ ces premiers détenus
que ceux qui comparaissent aujourd'hui, et alors en
liberté, faisaient passer des armes et des outils, par
tous les moyens à eux connus.
On se souvient encore ici, à Aix, de l'émotion pro.
duite par la découverte d'un couteau enrermé dans
un pain servi sur la table de Coda-Zabetta.
Il paraît donc que Coda-Zabetta, Nardi, Quaransa
et les autres brigands, ne purent se servir de leurs
outils et de leurs armes avant de quitter la prison.
— Pour eux, s'ils y revenaient jamais; pour les con-
frères, s'ils étaient jamais pris, — ils eurent l'idée de
cacher leur trousse dans un trou de mur parfaite-
ment réparé et dissimulé. L'endroit choisi était à
côté de la pompe qui fournit de l'eau à la prison.
L'endroit était bien choisi, sous tous les rapports.
D'abord, le coin où se trouve la pompe est hors des
regards des surveillants; ensuite, se îendant à deux
a. la pompe, l'un faisait le trou et le bouchait, pen-
dant que l'autre, pompant à tour de bras, dissimulait
le bruit fait par le premier.
Ce sont ces outils cachés qui auraient servi aux
successeurs de Coda, Nardi et Ce, pour les tenta-
tives d'évasion dont il a été question ces jours pré-
cédents.
Ce sont tous ces détails connus de la foule qui
fournissent matière aux commentaires nouveaux faits
sur le cas de Fontana. On ne veut voir dans la mala-
lie du chef de la bande de brigands qu'un moyen de
servir les intérêts de ses hommes. Là-dessus, ce sont i.
les contes bleus que l'on brode, et je m'anête pour
le pas me faire l'écho de toutes les sornettes qui peu- i
,? vent passer dans l'esprit d'un public exalté et tro
It facilement impressionnable.
s L'absence de Fontana n'enlèvera aucun intérêt au
e débats. Le chef de la Taille n'a jamais opéré seul, (
chacun des crimes relevés par l'accusation demeur
. à la charge des gens de la bande.
Les interrogatoires vont se poursuivre active
f ment.
s Pour ne pas perdre le fil de l'accusation, M. li
président rappelle un à un les crimes de la bande, e
1 interroge les accusés, par groupe de deux, trois
ï quatre, selon le nombre des figurants, pour chacui
t des forfaits commis.
t Pour ne plus revenir sur l'interrogatoire individuel
M. le président rappelle les antécédents de chaqui
' accusé et les invite à s'expliquer.
Nous avons fait connaître les ancécédents de ces
i gens-là, nous ne nous arrêterons qu'à certains dé.
tails nouveaux.
t avons dit déjà que G'aletto, dit Bochon, eS1
petityus d un homme exécuté et fils de père et mère,
tous les deux perdus de réputation. C'est donc un
homme de race que ce Galetto.
Il n est pas tout à fait âgé de vingt ans, mais il
est doué de muscles puissants et jouit d'une force
herculéenne. A le voir au repos et en ne considérant
que son visage, on ne croirait pas avoir devant soi
le monstre qui a pris part à tous les assassinats com-
mis par la bande. C'est de tous les accusés celui qui
a la meilleure physionomie; il a même quelque
chose de fin dans les traits du visage. C'est, je le
répète, un homme de race, il a toutes les délicatesses
de traits, toute la noirceur morale d'un fils de-César.
Comme un prince, quand il consulte sa généalogie,
ce jeune brigand peut trouver pour chacun des
siens les rages de sang qui ont fait de lui l'homme
qu il est.
Nous ne nous arrêterons que sur un fait cité par
M. le président : OrsJlano, le trop célèbre Orsolano,
grand-père de Galetto, connu en Italie sous le nom
de la Hyene, fut condamné à mort et exécuté. Sa-
vez-vous quel était son crime, — un de ses crimes,
faut-il dire?
Cet homme féroce, cette hyène, volait des petits
enfants, les tuait et se servait de leur chair pour
faire des petits pâtés qu'il vendait.
La révélation de ces faits horribles fait frissonner
I auditoire. Tous les regards se braquent sur Galetto,
toutes les bouches murmurent des imprécations.
En donnaut les antécédents des accusés, nous
avons parlé de l'immoralité de la femme Mante-
gazza. La conduite actuelle de cette femme, à la pri-
son, est tellemement révoltante que M. le président
annonce qu 'il est question de lui enlever son enfant,
qu'elle n'est pas digue d'allaiter.
Pour tous les autres accusés, le président ne peut
que répéter les renseignements que nous avons déjà
fait connaître.
Les interrogatoires se poursuivent. Chaque vol ex-
posé, et les explications des accusés entendues, on
appelle les témoins relatifs à chaque fait. Chacun de
ces faits se ressemble.
C'est le vol à outrance. C'est l'emmagasinage chez
Fontana de toutes les denrées prises à droite et à
gauche. Mais jusqu'ici, point de sang. Les victi-
mes de ces vols ont eu la chance de ne pas se ren-
contrer avec les brigands sur les lieux du pillage*
fort heureusement, car les brigands, « qui ne lais-
saient pas de témoins, » leur eussent fait un mauvais
parti. Eux aussi auraient été taillés, et ils ne pour-
raient pas venir aujourd'hui à l'audience reconnaître
leur linge, leurs bijoux, leurs sacs de blé, voire même
compter les peaux de lapins et les peaux de moutons,
seuls restes des ripailles de la bande.
Avant d'entamer la série d'assassinats, la cour en-
tend les témoins qui ont participé à l'arrestation de
Fontana et des principaux brigands.
Ces témoignages sont relatifs aux diverses circon-
stances de la capture des bandits dont nous avons
lonné le résumé dans l analyse de l'acte d'accu-
;ation.
L'interrogatoire touchant les arrestations et les
fols commis par la baude ne fatigue pas outre me-
sure les accusés. Ceux-ci se contentent de nier, et
juand les témoins viennent apporter un démenti a
eurs dénégations, ils ne savent répondre qu'une
;hose : « Je ne connaissais pas ce témoin. » On di-
rait un mot d'ordre.
Si les accusés nient les faits qui leur sont repro-
:hés, il arrive cependant qu'ils avouent certains vols
Ini ne sont pas relevés contre eux. C'est ainsi qu'à
)ropos d'un vol de blé comnris à S?Hon, vol nié par
jeux qui l'ont commis, Galeîto déclare que le seul
auteur du vol, c'est lui.
M. l'avocat général. — Un moment! un moment!
Tous avez intérêt, vous, à vous donner comme l'au-
eur du vol. C'est un alibi que vous cherchez. Il y a
ix mois qu 'on vous interroge et pour la première
Dis vous parlez de ce vol que vous auriez commis.
ion, le 3 septembre, jour du vol, vous n'étiez pas à
lalon. vous é!iez dans la commune de Lurs, à la
srme de l'Evé, où s'est commis un quadruple assas-
inat.
L'exposé des expéditions nocturnes dans lesquelles
le sang a ooulé si abondamment promet de donn*.,.
un interrogatoire des plus saisissants, car ce ne sont
,pas, hélasl les détails horribles qui manquent.
dic!nce.Cet re commencera à la prochaine au-
Peut-être bien les accusés ne montreront-ils nne
demain la même assurance, le Se oTm pasles
leur surtout, qui n'ont ?*! l'air ^ se soucier de
leur état. Seule, la femme Arèse, concubine de Fon.
tana, paraît accablée. Ses traits sont altérés, sur ses et elle
mains. tient constamment le front deuxelle
De temps à autre, la petite Montegazza ë crie. -
Pauvre enfant ! quel triste baptême !
L audience est levée à sept heures. Malgré l'intérêt
qui cloue le public des curieux à sa place, la foule
le mur teniie barrière, serrée dans le fond de la salle, entre
t?n^ i^nèr?' quitte la salle avec saiisfao
tion, comme et la des prisonniers rendus à la lil)erté. -
Un peu d air pur n'est pas de trop pour ces bonnes
venus,?uire dans fournaise. pour ifffl
ici une chaleur accablante et, quand on jette un de COUD3
l'audience, saisi
bl'ûlante.à voir 6 foule public qui se presse dans une atmosphère
CHRONIQUE JUDICIAIRE
UN AGENT BONAPARTISTE, - Tous les hommes
de cinquante à soixante ans de notre époque
connaissent, sinon de vue, mais tout au moins !
de réputation — et quelle réputation! un
certain M. de Pindray, aventurier, spadassin;,
joueur effréné, entrepreneur d'opérations finan::
cières et irrégulières. :lu
M. de Pindray, gentilhomme du Poitou, ayant
été comprenais dans une affaire de fabrication de
billets de la Banque de France,fut forcé de s'ex-
patrier sous le règne de Louis-Philippe.
Ensuite, on le voit au Mexique, faisant une
expédition en même temps que M. de Raoasset
Boulbon qui fut fusillé dans ce pays.
Sous J'Empire M. de Pindray revint en France
et se fit agent de police, mais agent de la haute.
Ses nombreuses aventures, son audace à toute
epieuve et sa connaissance profonde du mondé
interlope et taré de Paris devaient faire de lui
un collaborateur précieux pour M. le préfet.
L Empire tombé, M. de Pindray se présenta au
gouvernement du 4 septembre. Il offrit à ce
gouvernement de former quatre escadrons d'é-
claireurs à cheval qui, disait-il, devaient rendre
de grands services. Le gouvernement, ignorant-
quil avait affairera un agent de BOQaparte, ac-
cepta ces propositions.
L agent bonapartiste de Pindray reçut, dit le
Rappel, pour l organisation des escadrons en
question, des sommes qu'il mit dans sa poche.
Il escroqua en même temps une certaine quan-
tite de chevaux.
Puis, on n entendit plus parler de l'agent bo-
napartiste de Pindray, non plus que de ses esca-*-'
drons.
On évalue à 100,000 francs environ la valeur
des détournements commis par ce serviteur de
X
Le 3e conseil de guerre, le jugeant par contu-
mace, vient de le condamner à vinp't ans de tra-
vaux forcés.
Nous avons rapporté hier la condamnation à i
la peine capitale, prononcée contre Jules Vallès,.:
contumace, par le 6e conseil de guerre. 4
Parmi les pièces du dossier de cet énërgumène'
se trouvait la pièce suivante, trouvée parmi les 1
papiers de toute nature recueillis au ministère.
de la guerre. Elle montre les sentiments infâme^
Sont Vallès était animé à l'égard de ses con-
frères :
Paris, le 23 mar 1871.
Au chef des Prussiens.
Mon cher commandant,
d^ns la rue de Lille une maison, que Vallès.
vous recommandent p'articulièrementr
; > est la maison portant le no 49. Il y a là ce qui
)araît, un réactionnaire qui s'appelle Debans, et qui;
icnva.it dans le Moniteur contre la Commune. Ce
versaillais a vexé, ce qui paraît, les citoyens Pyat et-'
vallès, qui vous le recommandent le manquez pas, j
nais n oubliez pas la maison du nommé Vrignault
)u Vregnaut. ÿ
Salut et égalité.
(Confidentielle.)
E. MARTIN.
N° 81. — Feuilleton de la PETITE PRESSE
Le Chiffonnier Philosophe
DEUXIÈME PARTIE
XXVI
Les exploits d'un Zaporogue.
Mais, une fois entrés dans le bum retiro, le
boyard saisit violemment le poignet de l'he.t-
man, et d'un signe de tête, ponctué d'un terri-
comb.froncement sourcils, lui montra Mme Will-
Le Zaporogue porta sa main droits à son cou
vre-cbef avec une mauvaise grâce évidente;
Pu s se campant en face de Georges, il le toisa
d'un dialité. qui manquait complètement de cor-
mohAeVe bienvenu, monsieur, dit néan-
moins le Transatlantique, sans se départir de
son flepie caractéristique. Et croyez bien que,
le et moi, nous eussions connu votre
? comte Powschine, nous ne vous
Sp? « f pas réduit à la nécessité d'em-
pressé porter P°rtv d'assaut ; je me serais em-
tants. l'ouvrir moi-même à deux bat-
effet accueil f plaisant et courtois produisit un
tellement négatif sur l'étranger, que son
le Pftwéro d'hier.
interlocuteur supposait tout d'abord qu'il ne
comprenait pas le français.
Mais le Cosaque lui prouva bientôt. le con-
traire, en établissant cependant que son voca-
bulaire était des plqs restreints dans cette lan-
gue préférée à la leur par les, classes aristocra-
tiques de la Russie. *
— Importe! s'écria-t-il, roulant toujours fu-
rieusement ses prunelles glauques. Outragé !...
hetman et prince, pareils!... Sur titre, reçu
partout, mni !... on insulte aux Markoff I... Vos
moujicks insolents, par eux chassé d'abord!...
Rendrez raison... ou excuses!
Pétrus avait en vain essayé d'arrêter du geste
ce flux de phrases estropiées, mais néanmoins
compréhensibles dans leur sens presque incon-
venant. N 'y pouvant réussir, il y coupa court
par un grand moyen : en appliquant sa main
nerveuse sur la bouche moustachue du mulâtre.
Il lui adressa alors quelques mots assez mena-
çants de ton, dans ce joli langage que les cor-
beaux eussent revendiqué pour leur chant.
Cette mercuriale parut exercer une certaine
influence sur l'hérissé personnage, car il s'en
vint mettre un genou en terre devant Elise, assez
effrayée du scabreux résultat de sa curiosité en
matière d aborigènes du Pont-Euxin.
"7" Mazeppa... tout aux belles! ànonna-t-il.
Moi aussi... Vengeance se taire pour vous, péri!
Il se releva d'un air très-satisfait de son élo-
quence.
Allons, fit en raillant le boyard, s'adressant
lux maitres de la maison, la paix est signée. Le
.^os... légendaire... des cirques olympiques sa-
:nSait jusqu'à à ses haines aux dames. Son imita-
teur, 1 illustre chef de Sotma, mon trop fidèle
imi, immole à la bonne fée de céans ses préten-
griefs, consistant dans l'empêchement ap-
| porté par vos serviteurs à l'entrée triomphale
j qu'il se croit due, partout où je suis ! Par culte
| chevaleresque pour la châtelaine, il consent à ne
j point se couper la gorge avec le châtelain, en
j réparation d'un tel affront ! Auriez-vous supposé,
noble dame et preux seigneur, le dernier des,
| troubadours-abricot né au fond de nos solitudes
i turco-russes ? Voilà l'effet des sujets de pendules
1 françaises, qui pénètrent dans les contrées les
plus arriérées ?
La gouaillerie était trop parisienne pour être
saisie par l'hetman, demeuré debout, immobile,
ci stupide et fier, » selon l'expression d'Alfred
de Musset qualifiant le front de Belcolore.
— Ali çà, répondit à mi-voix le citoyen des
Etats-Unis; dont le sourire avait pris une certaine
nuance de dédain, votre croquemitaine des
chandelles est donc aussi un nouveau saint
Georges, pour en appeler aux armes sous d'aussi j
futiles prétextes?... Et pour n'avoir pas encore '
rencontré.un autre bretteur qui ait coupé court 1
à sa manie, en vérité trop... blessante?
— Ohl Markoff possède une adresse réelle-
ment... malheureuse en tous les genres d'es- '
crime. Rien que pour oubli des honneurs aux-
quels il prétend avoir droit, il a eu une dizaine I
de combats singuliers... dans toutes les accep- !
tations du mot. I
— Douze, rectifia le Zaporogue, car son cor- 'j
nac avait parlé assez lentement pour qu'il saisit
tout le sens de la phrase. I
— Et, dans ces diverses rencontres au sabre,
à l'épée, au pistolet, à la carabine et même à i
la lance, poursuivit Powschine, il n'a jamais
reçu une égratignure. Quant à ses adversaires,
je ne crois pas qu'aucun d'eux soit sorti sain et
sauf du duel.
Tous tués... de snlte... ou des suites 1 çx-
piiqua le spadassin nomade, avec une soudaine
intuition des nuances de notre homonymie qui
étonna un peu l'Américain. ;
Quant au Russe, il se mordit imperceptible-
ment les lèvres.
, Le quasi-jeu de mots du barbare, sur un aussi
sinistre sujet, jjausa un frisson d'épouvante à'
Elise. Elle regretta tout à fait que son naïf ca-
price eût introduit ce loup féroce dans sa berge-'
rie. Aussi ne s'en cramponna-t-elle que mieux
à l'idée d'éviter l'ombre d'une occasion aux1
fureurs de la bête fauve, pendant son séjour né-
cessairement court à l'hôtel Willcomb.
En ce moment, les bouffées musicales d'une
des plus enlevantes valses de Strauss parvinrent
jusqu'au petit salon. L'hetman tendit l'oreille.
— Voir le bal ! grogna-t-il, dodelinant sa
grosse tête chevelue et barbue d'une façon qu'on
peut étudier dans les fosses du Jardin des
plantes. ,.v
— Mais certainement, acquiesça la jeune fem-
me avec un empressement fébrile. Mon ami, et
vous, monsieur le comte, montrez donc notre ' :.
fête à.Son Excellence...'Et surtout ne le quittez
pas, ajouta-t-elle tout bas à l'adresse de Pétrus '
d'un accent sUDDIiant.
(La suite à demain.)
JULES CAUVAIN.
LES PETITS BILLETS DE BANQUE. — Au fur et à
mesure qu'ils rentrent dans les caisses de la
Banque de France, les billets de S francs ac-
tuellement en circulation, :sont détruits. On se
propose de les remplacer par des billets de 20
francs, beaucoup plus commodes pour les tran-
sactions, et par une émission de coupures de
10 francs. Enfin, le conseil de la Banque de
France s'occupe activement de prévenir UBA
çyi au moment de t-', ~
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