Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1922-08-17
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34355551z
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 17 août 1922 17 août 1922
Description : 1922/08/17 (Numéro 229). 1922/08/17 (Numéro 229).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
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Description : Collection numérique : La Commune de Paris Collection numérique : La Commune de Paris
Description : Collection numérique : France-Brésil Collection numérique : France-Brésil
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k293309q
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
68me Année -3meSérie No 229
Le Numéro (juotidi&irVtmmENTmES EH FBANCt
Jeudi 17 Août 19 >2
GASTON CALMETTE
Directeur {1902-1914)
RÉDACTION ADMINISTRATION
26, Rue Drouot, Parts (9e Arr')
Directeur politique ALFRED CAPUS
Directeur littéraire ROBERT DE FLERS
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Paris, Départements ) 14 » 28 n 54 »
et Colonies françaises ) x*
Étranger-Union postale. 28 » 54 » 100
On s'abonne dans tous les bureaux de poste
de France et d'Algérie
Une entrevue
avec le orand-rtuc Cyrille
Sainl-Briac, 14 août.
De Dinard à Saint-Briac, la côte bre-
tonne, tant elle est tourmentée, semble
avoir été découpée au ciseau par quel-
que dieu capricieux et raffiné. C'est une
véritable dentelle d'eau et de terre dont
on ne sait plus par lequel de ces deux
éléments elle fut brodée, ni qui a
conquis sur l'autre ici un cap, là une
baie.
Pourtant, ce décor balnéaire et clas-
sique, unité de lieu du monde drama-
tique, a dépouillé aujourd'hui le charme
qu'il a accoutumé de nous offrir. 11 pleut
depuis le matin,, il tombe par ondées
continuelles une petite pluie line, péné-
trante, glaciale, et'le vent,,en dépit des
proverbes, jongle avec elle et vous l'en-
voie tantôt, au visage et tantôt sur la
nuque. Il y a trop d'eau dans le paysage.
Il est lavé, noyé, il n'a plus ni lignes,
ni contours, ni couleurs il est enve-
loppé d'un grand voile humide fait de
la brume qui monte et de l'averse qui
descend, car la nier et le ciel n'attendent
pas- l'horizon pourw se rejoindre. On
croise quelques baigneuses obstinées à
profiler de leur villégiature et, dans cette
lumière grise, leurs sweaters jaune ci-
tron ou vert jade ont l'acidité des fruits
pas mûrs. Oh la Bretagne sous la
pluie
Dans la petite anse de Saint-Briac, il
y a beaucoup de barques blanches.
Mais elles ont replié leurs voiles, comme
des oiseaux leurs ailes, et elles atten-
dent pour sortir une éclaircie probléma-
tique. Sur la côte, de petits peupliers,
frissonnent et elaquent des feuilles, de
leurs feuilles qui semblent en argent.
Dans le pays, tout le monde connaît
« Ker Briac n, la résidence du grand-duc
Cyrille et de sa famille. A la façon dont
on me regarde quand je demande mon
chemin, je devine qu'on ne doit recevoir
que peu de visiteurs dans cette grande
villa qui se dresse sur une hauteur, loin
du village, et dont le toit d'ardoise
émerge d'un petit bois de sapins.
Sur le portail de bois blanc dont les
battants sont grands ouverts, je cherche
en vain une sonnette. J'entre par une
allée sombre, profonde, véritable tunnel
ouvert dans du feuillage. Quand on est
là, pn a. sur. les. épaules un grand man-
teau de verdure et de tristesse. ïl se dé-
gage de cette ombre et de ce silence une
mélancolie infinie, comme si la nature
avait vjjulu que ses hôtes fussent, au
seuil même de leur maison, préparés
aux douleurs sourdes de l'exil.
Brusquement, à un tournant de l'allée,
la villa surgit au milieu d'une grande
place de gravier ,blanc. Elle est carrée,
et sa façade est plate, comme le veut
l'architecture bretonne. Devant la porte,
un.gros massif de soleils rouges .s'égout-
te lentement et se fane.
C'est dans ce lieu modeste et soli-
taire que -réside S. A. 1. le grand-duc
Cyrille, petit-fils de l'empereur Alexan-
dre III et cousin germain de l'empereur
Nicolas II, qui vient de se déclarer gar-
dien du trône des tsars dont il est, par
droit de 'primogéniture, le seul héritier.
C'est là qu'il vit, d'une vie familiale et
austère, avec la grande-duchesse et ses
trois enfants.
En attendant d'être reçu par Son Al-
tesse, qui a bien voulu 'm'accorder un
rendez-vous, je m'entretiens avec un de
ses familiers, .ancien général des cosa-
ques. C'est un homme immense dont les
vêtements civils ne masquent qu'à demi
son allure militaire. Il a le teint vif et,
sous son front lourd et chauve, brillent
des yeux très doux, très bleus, dés yeux
d'enfant, qui font un saisissant con-
traste avec son corps de géant.
Il me raconte comment éclata cette ré-
volution russe, qui fut l'oeuvre d'un pe-
tit groupe d'aventuriers, cette révolution
dont le monde entier devait subir les
tristes conséquences et qui fut si brus-
que, si imprévue, que personne n'y crut
tout d'abord et que pendant longtemps
elle resta ignorée d'une grande partie de
la Russie.
Pour moi, me dit-il, j'en fus averti
aux portes de Pefrograd, un jour que
j'arrivais en permission. A peine avais-je
mis pied à quai qu'on m'arrêta. Une
heure plus' tôt, à la dernière station
avant Petrograd, tout était calme. J'étais
descendu pour acheter les journaux. Il
n'y. en avait point, mais cela ne m'éton-
aia .pas autrement. Tout marchait si niai
depuis la guerre. D'ailleurs, le mar-
chand lui-même m'avoua « Je né sais
pas ce qui se passe voilà plusieurs
jours que les journaux ne,sont pas arri-
vés. » Ainsi, à quelques kilomètres de
Petrograd, on ignorai't encore qu'il y
avait une révolution russe.
Il me parle ensuite de la brillante' car-
rière militaire du grand-duc Cyrille qui,
déjà, avait pris une part active à la guer-
re russo-jappnaise. C'est par miracle
,qu'il avait alors échappé à la mort, car
il se trouvait sur le Petropwvlowsk, tor-
pillé par les Japonais, et dont presque
tout l'équipage périt, y compris l'amiral
Makaroff de qui ce cuirassé battait pavil-
lon..
Et, dans son esprit un peu mystique,
l'ancien cosaque voit un présage en ce
miracle.
Pourquoi le grand-duc aurait-il sur-
vécu, me dit-il, s'il ne devait un jour
reprendre en main les destinées de son
pays ? Je suis sûr que c'est là l'opinion
du peuple courbé sous le joug du bol-
chevisme et' qu'un jour il -recevra le
grand-duc Cyrille comme un libérateur.
Il y a un vieux proverbe de chez nous
qui dit Quand le maître revient,, c'est
lui qui remet l'ordre. Il est temps que
l'ordre règne de nouveau en Russie.
Dans le grand salon ;deSj.a villa, dont
les deux baies ouvrent T.tuie. sur la mer
et l'autre sur la campagne, l'héritier des
tsars, debout, contemple, à travers les
vitres marbrées de pluie, quelque hori-
zon emprunté à ses souvenirs. Grand,
mince, vêtu d'un complet de" sport, ie
grand-duc Cyrille paraît très jeune, eu
égard à ses quarante-cinq ans. Son visa-
ge est allongé, ses yeux d'un bleu-gris,
très froid, et sous sa moustache légn re-
nient tombante, sa. bouche apparait à la
fois volontaire et dédaigneuse, comme si
la vie intérieure de cet exilé était cristal-
lisée en un pli de ses lèvres. A ses côtés,
la grande-duchesse est assise à une ta-
ble encombrée de palettes et de pin-
ceaux. Ses traits purs ont une expres-
sion un peu hautaine qui se dissipe vite
dès qu'elle parle de la Russie pour la-
quelle elle a gardé un amour passionné
qui incline vers l'oubli et vers le par-
don.
Il est exact, me dit le grand-duc
Cyrille, que je me sois déclaré gardien' du
trône vacant, et je crois' obéir ainsi aux
aspirations du peuple russe qui, depuis
longtemps déjà, est las du joug bolche-'
vique. Chaque fois qu'un courrier nous
parvient, nous y trouvons des lettres qui
nous éclairent sur l'état d'esprit, de ceux
qui sont restés là-bas. Pour que l'ordre
se rétablisse dans notre pays, il faut que
s'exerce une action reconstituante dont
̃mies droits légitimes me désignent
pour être le chef. Ces droits, d'ailleurs,
je me propose de les faire confirmer par
les Etats-Généraux, dans le cas où l'em-
pereur Nicolas II serait mort, ainsi que
ses descendants.
Son Altesse Impériale possède-
t-elle quelque document nouveau qui lui
permette de croire à la survivance de la
famille impériale ? `?
Non, mais une conviction intime,
profondément- enracinée dans notre
cœur comme dans ceux de tous les Rus-
ses, nous fait espérer que Sa Majesté est
vivante. Et puis il a circulé tant de ver-
sions sur la mort tragique de la famille
impériale qu'elles n'ont servi qu'à épais-
sir le mystère. Puisque tous les récits
qu'on en a faits ne peuvent être. vrais,
pourquoi ne pas admettre qu'ils peu-
vent être tous également faux ?
» Ce qui importe pour l'instant, c'est
de rétablir l'ordre, et pour cela il faut
que les Russes émiigrés se groupent et
fassent bloc contre les forces du bolche-
visme, qui sont moins redoutables qu'on
ne le suppose. »
Sans doute ai-je marqué quelque éton-
nement, car le grand-duc Cyrille ajoute
Oh ce n'est pas une action mili-
taire que j'envisage: Je considère com-
me fratricide toute hostilité envers les
forces armées de la Russie. Mais c'est
des forces morales que je veux parler,
de ces forces qui sont représentées, en
Russie et à l'étranger, par tous ceux
qui n'appartiennent pas au bolchevis-
me et qui sont l'ordre, la paix, la vérité
en un mot. La vérité porte en elle une
puissance de conviction si grande qu'elle
peut produire à elle seule un revirement
complet du peuple. La révolution russe
ne ressemble à aucune autre dans l'his-
toire. Elle n'est rien de moins qu'un mi-
racle qui a créé l'anarchie et la misère.
Quand on connaît bien l'âme russe, on
se rend compte- que le mira'cle inverse
est possible.
» D'ailleurs,le peuple commence à com-
prendre qu'on lui a ravi ses libertés sous
couleur de lui en donner de plus gran-
des. On l'a manœuvré en s'adressant à
ses sentiments les plus bas, il s'est lais-
sé séduire par le vol et par le pillage
vers lesquels le poussaient les chefs du
parti rouge. Mais dans le cœur du pay-
san russe, le remords s'est installé. Il n'a
point de goût pour ce qu'il a mal acquis;
il n'aime que ce qu'il a gagné honnête-
ment, par son travail, et c'est une des
raisons pour lesquelles ce grand peuple
meurt de faim devant ses terres incultes.
Po.ur qu'il secoue cette torpeur, il faut
qu'il sache qu'on ne l'abandonne pas
aux mains des despotes qui ont fait sa
ruine et qui ont anéanti un pays dont
ils s'étaient emparés à l'apogée de sa
prospérité.
» Dans quelques jours, le peuple et
l'armée recevront un manifeste par le-
quel ils connaîtront mes intentions. Ils
sauront que je suis animé du plus large
esprit de clémence et que notre parti,
sans s'occuper des divisions politiques
d'autrefois, ne veut que le rétablisse-
ment de la légalité et de l'ordre.
Que trouverons-nous quand nous
reviendrons en Russie?.
C'est la grande-duchesse qui vient de
parler. Elle a prononcé ces mots avec
une conviction qui a quelque chose d'é-
mouvant, dans ce salon si éloigné des
splendeurs de la Cour.
«.Quand nous reviendrons. » Cette
phrase surgit dans ma mémoire au mo-
ment où je quitte « Ker Briac n. Dans le
jardin une éclaircie a séché le gravier
des allées. 11 fait plus clair déjà. Un en-
fant blond est là qui joue. Il est né en
Roumanie, aux heures les plus tragi-
ques de la Révolution. Cependant qu'il
joue, d'autres travaillent pour que sa
destinée s'accomplisse, et peut-être un
jour régnera-t-il en maître sur cette
Russie qui est son pays et qu'il ignore.
Sait-on jamais .?.
James de Coquet.
La santé de d'Annunzio
On continue à ignorer les causes
exactes de l'accident de Gabriele d'An-'
nunzio. Plusieurs versions circulent et
la dernière est que le poète, ayant eu
une vive discussion, au cours d'un re-
pas avec quelques amis intimes, aurait
eu une congestion à la fenêtre près de
laquelle il venait de se rendre.
Seuls les médecins pénètrent dans sa
« Loué par ceux-ci, blâmé par ceux-là, me moquant dfes sots. bravatït-lescméchaiits, je me presse
.de rire .de tout. de peur d'être obligé d'en pleurer. V (Beaumarchais). •'
maison, les légionnaires de Fiume mon-
tant autour de sa, demeure une garde vi-
gilante'. '•
Le dernier bulletin publié -constate
une amélioration légère et un retour pr^
grëssif à' la conscience: La température
et le pouls sont normaux.
Le nom de nos rues
Nous avons reçu, depuis quelques
jours, de nombreuses lettres de nos
abonnés, qui nous montrent à quel point
ils s'intéressent aux modifications que
̃le Conseil municipal doit prochainement
apporter dans la nomenclature de nos
rues. •
Il nous a semblé que nos lecteurs, par
leurs conseils et leurs avis, étaient tout
désignés pour être les précieux collabo-
rateurs d'une œuvre à laquelle sont in-
téressés V éclat et la gloire de Paris.
N'oiis prions donc nos amis de bien
vouloir nous faire part de leurs réflexions
et de leurs observations' sur un sujet qui
les regarde aussi: directement. H n'est
point douteux que les communications
qu'ils voudront bien nous faire enrichi-
ront de la façon la plus utile le dossier
de nos édiles et contribueront jiux heu-
réuses décisions de l'Hôtel de Ville..
ÉCHOS
Fêtes sur fêtes.
Dans nos belles provinces, le'vent est,
en ce moment-ci, aux fêtes. On en an-
nonce de partout et chaque ville veut
rivaliser avec sa voisine. La contagion
finira par gagner le pays tout entier et
l'on fera bientôt la fêle, dans,Tla.,France
entière, autant qu'à Paris. L"
Jaloux sans doute de ce qui-se spj-é-t
pare à Foix, et dont nous avons déjà à,L
parlé, voici que Pamiers veut attirer dans
ses murs les populations ariégeoises.
Il usera pour cela de procédés, en-
core qu'honnêtes, pas très neufs et qui
ne valent que par l'exécution reconsti-
tutions historiques, auditions d'art, feux
d'artifices et bals. ̃-
Cependant, il promet un spectacle
qui alléchera sans doute bien des ama7
teurs, et c'est la représentation en plein
air de la Fille de la Terre, du regretté
maître Déodat de Séverae, tragédie lyri-
que et rustique puissante et colorée.
Il faut louer Pamiers de rendre ainsi
homirnage au talent d'un compatriote,
ou presque; dont la France entière-' -peut
être fière. ̃̃
L'utile réforme. w
Le Parlement a été bien inspiré eh
votant –'notamment l'abaissement, à
10 centimes de l'affranchissement des
cartes postales illustrées' II y a un mois
environ que la réforme est en vigueur
et, dans un bureau de poste provincial,
on en a expédié plus en trente jours
qu'on ne l'avait fait en un an, lorsque le
tarif était, de 20 centimes.
De ce chef, les recettes à la poste ont,
comme rendement, plus que décuplé.'
C'est donc une excellente affaire pour
les P. T: T. comme, ce l'est.' pourries:
« spécialistes » de la carte postale et. inê-i
me pour. le public. '̃
Tout le monde, de la sorte, |est;çoilten.ti
et. à peu de frais. •')" lj..
Combien d'autres réformes pourraient'
être ainsi réalisées pour le profit de
tous!
Mais Dame Routine a, parfois, la vie
dure.
Les chats de Cluny.
Le petit, jardin, les broussailles, '4es
thermes du musée de Cluny constituent
un merveilleux domaine où régnent en
maîtres, quand les grilles sont fermées,
une légion de chats hirsutes et halluci-
nants.
Ils sont sales, pouilleux, fugaces et re-
venus à un état de demi-sauvagerie qui
en rend l'approche difficile.
Cependant, ils ont conservé, de la vie'
domestique d'où ils s'évadèrent, .cer-,
tains goûts de civilisés ils aimient le lait.*
C'est pourquoi on peut les, voir tous,,
à l'heure du crépuscule, à la chien-loup,
tapis sur le mur bas, à l'abri des grilles,
et guettant la charitable dame, peut-être
membre de la S. P. A., qui s'en vient
tous les jours, sa bouteille à la main,
leur verser dans une' soucoupe un peu
de lait qu'ils lapnent avec avidité et sa-
tisfaction.
Leur gourmandise satisfaite, ils s'en
retournent à leurs broussailles, sans un
regard pour leur bienfaitrice, qui n'en
continuera pas moins demain et les jours
suivants son ingrate mission.
L'apothéose de la bouillabaisse.
11 ne faudra plus médire de notre ad-
ministration des P. T. T. devant un
Marseillais ou un Anglais.
Nos amis britanniques qui sont venus
à l'Exposition coloniale de Marseille ont
fait connaissance avec la bouillabaisse.
Ils en raffolent, .paraît-il,, et à. ce .point
que plusieurs d'entre eux ont voulu en
emporter à Londres par boîtes de
conserve.
Mais que vaut la bouillabaisse de,
conserve, comparée à celle que l'on con-
somme fraîche ? ••̃"
Or, les P. T. T. c'est. l'Office natio-
nal de commerce extérieur qui nous
l'apprend viennent d'élever à deux
kilos le poids maximum des « corres-
pondances » transportées de, Marseille
à Londres par avions.
On pense bien que, dans ces condi-
tions, les kilos de bouillabaisse passent,
au-dessus de nos tètes, comme des let-
tres à la poste. ̃
Et nous n'en avons, hélas même pas
le fumet.
le fumel. Le, Masque de Fer..
LA SITUATION
APRÈS LA CONFÉRENCE
La conviction
s 'c, delà France
«j>y Gouvernement, Parlement, toutes
les formes du pouvoir et de l'opi-
nion, tous les interprètes du sentiment
français sont d'accord pour approuver
l'attitude de M. Poincaré à Londres. Eût-
on convoqué les Chambres, elles n'au-
raient pas donné à cette unanimité un
aspect plus" imposant et nos députés,
en vacances, restent en contact assez di-
rect avec la nation, pour n'avoir pas le
moindre doute à.cet égard. La convic-
tion de la France est. faite conviction
d'expérience en même temps que d'ins-
tinct. L'expérience dé ces dernières an-
nées nous démontre que nous arrivions
au bord du gouffre, sans un arrêt brus-
que et à n'importe quel risque et l'ins-
tinct nous avertit que notre pays vient
>de retrouver, par là, la ligne abandon-
née de la vie Loire. En France, l'opposi-
tion à ces idées est nulle dans les coins
où elle se manifeste, elle ne compte pas
dèrns:les esprits où elle parait sincère,
elle n'est qu'une aberration momenta-
née.
Quelle erreur commet un homme aussi
distingué que M. le chancelier Wirth,
et d'une aussi bonne volonté apparente,
quand il s'imagine que nous nous achar-
nons à la ruine de l'Allemagne Ce qui
est strictement vrai, c'est que la falla-
cieuse politique dé reconstruction euro-
péenne, ébauchée à Gênes et poursuivie
à Londres, avait fini par poser la ques-
tion entre la ruine de l'Allemagne et les
réparations dues à la France. On eût dit
qu'il fallait choisir entre ces deux ter-
mes extrêmes et qu'on ne pouvait ren-
dre justice à la France sans achever le
vaincu. C'est .cette politique-là qui était
intransigeante et hautaine, et qui, de
moratorium en moratorium, nous amie.-
îiait à un désastre prochain, sous pré-
texté .d'en épargner à l'Allemagne un
.ijjînié'diaL.ËsUcè que, dans des circons-
tances- -.rëiiverséeSj • un boit 'n Allemand
'.cotiftné M. Wiïth'èût liésile ? Nous ne
l'avons pas fait et aucune pression hu-
maine n'y contraindra un peuple de l'in-
telligence et de la valeur du nôtre. Ainsi,
c'est M.Lloyd George et c'est M. Wirth
qui envisagent les solutions violentes
destinées à.briser le peu .qui reste d'or-
dre européen et c'est, au contraire, la
politique française qui cherche l'équili-
bre du monde bouleversé et une conci-
J-iation entre les intérêts, mais une con-
̃çiliation qui lie sacrifie pas les plus lé-
igitimes aux plus hasardeux. M. Wirth
et, ses compatriotes 1& comprendront à
la longue.
r Alfred Capus,
de l'Académie française.
Les ministres à Rambouillet
̃ ̃ ̃ s».
Les résultats négatifs de la Conféren-
ce de Londres ont amené, on le sait, le
gouvernement français à se concerter
tout de suite sur la ligne de conduite à
adopter. Un Conseil des ministres a
donc été tenu hier à Rambouillet.
fi A la gare Montparnasse
Les membres du Cabinet prirent place
a. Paris dans le rapide de Brest qui quit-
te la gare- Montparnasse à. 8 h. 40 et où
un wagon-salon leur avait été réservé.
Ceux d'entre -eux qui étaient absents de
Paris avaient été rappelés par télégram-
me en raison de.rimpo.rlauce de cette
avance, où M. PoMcàré doit mettre ses
collègues au courant de la situation telle
qu'elle se présente après la Conférence
de Londres.
M. Raiberti, ministre de la marine,
qui se trouvait à Nice, et qui arriva hier
imalin la gare de Lyon, trop tard pour
pouvoir être en temps utile à la gare
Montparnasse, s'est rendu .directement
en automobile à Rambouillet.
Suivant l'usage, M. Col rat, sous-se-
crétaire d'Etat de la présidence du Con-
seil, avait été convoqué à la réunion.
Sur le quai de la gare Montparnasse,
les membres du gouvernement ont été
salués par MM. Naudin, préfet de poli-
ce Grignon, chef de cabinet du prési-
dent du Conseil .-André Dejean, direc-
teur des chemins de fer de l'Etat, et par
le1 commandant Brosse, commandant le
palais de l'Elysée; M. Vanaisé, commis-
saire spécial, dirigeait, le service d'or-
dre. La foule a. fait au président du Con-
seil et, à ses collègues un accueil cha-
leureux:,
,Le,rxipidfi,se.s,t, arrivé à 9 h. 45 à Ram-
bouillet où il s'est arrêté exceptionnelle-
ment. Les ministres ont été salués par
M.Bodereau, sous-préfet, et par le com-
mandant Derendinger, de la maison mi-
litaire du Président de la République,
puis ils sont montés en automobile pour
se rendre au château où la séance du
Conseil a aussitôt commencé.
Le Conseil''
La séance, ouverte à 10 heures, à pris
fin à midi 50.
Avant de se rendre dans la grande
salle à manger du château pour prendre
au déjeuner auquel ils avaient été
conviés par le Président de la. Républi-
que, les ministres ont transmis cette no-
te à la presse
«Le président du Conseil a fait l'ex-
posé complet des négociations poursui-
vies à Londres et des raisons pour les-
quelles, il a été impossible d'aboutir à
un accord. Le Conseil a. été unanime à
approuver l'attitude de son président- et
à se solidariser avec lui. Le Conseil tien-
dra une seconde séance cet après-
midi. »
On croyait savoir, en outre, que la
question de la convocation éventuelle
des Chambres n'avait été envisagée à
aucun moment au cours de la. réunion
du matin.
A deux heures, les ministres sont ren-
trés dans la salle de leurs délibérations
et, un moment, après, M. Maunoury, mi-
nistre de l'intérieur, en sortait pour fai-
re aux journalistes cette déclaration
« Je suis autorisé à vous dire qu'il
n'est pas question de convoquer les
Chambres. »
Et le ministre rentra en séance pour
prendre part à la suite de ta. délibération,
laquelle dura jusqu'à 4 h. 25.
Le retour
A ce moment, les, ministres quittèrent
rapidement le château pour regagner la
gare et prendre le train qui passe à
Rambouillet à Il h. 40.
Au cours du voyage de retour cette
nouvelle note aussi laconique que les
autres a été communiquée à la presse
« Le Conseil a examiné en détail les
diverses éventualités qui pourront, se
produire suivant la décision de la Com-
mission des réparations. »
A 5 h. 45, le train entrait en gare de
Paris.
Notons que M. Poincaré a été vive-
ment, acclamé par les curieux, assez
nombreux, qui s'étaient massés auprès
de la porte de sortie.
Au Quai d'Orsay
f Peu de temps après son arrivée au
Quai d'Orsay, M. Poincaré a reçu M.
Louis Dubois, représentant français à
la Commission des réparations. M.
Schanzer, ministre des affaires ̃ étran-
gères et le comte Sforza, ambassadeur
d'Italie à Paris.
La Commission des réparations
statuera sans doute aujourd'hui
Les gou'vernemients alliés n'ont pu se
mettre d'accord, à la Conférence de
Londres, sur la réponse à faire à la de-
mande allemande d'un nouveau mora-
toire, qui serait, d'après la requête du
chancelier, applicable à, la totalité des
versements eli espèces a effectuer jus-
qu'à la, fin de 1922 (50 millions de marks-
or les 15 août, 15 septembre, 15 octobre
et 60 millions les 15 novembre et 15 dé-
cembre), puis aux versements en espè-
ces de 1923 et 1 92 'j
La parole est donc maintenant à la
Commission des réparations qui, atten-
dant les résultats de la Conférence de
Londres avant de prendre elle-mênte
une décision, a. suspendu le payement
du 15 août. La Commission se réunira
sans doute aujourd'hui pour discuter les
termes de sa réponse à la demande alle-
mande de moratoire formulée dans ta,
requête du gouvernement allemand en
date du 12 juillet dernier. Elle peut, soit
accueillir la requête, soit la repousser,
soit l'accepter partiellement en ajour-
nant un certain nombre de payements
relatifs aux prochaines échéances.
Aux termes du traité de Versailles
(paragraphe 13 de l'annexe II à la par-
tie VIII) la décision de la Commission
sera prise à la simple majorité, la ques-
tion n'étant pas de celles, strictement
définies, pour lesquelles l'unanimité est t,
nécessaire. La simple majorité suffit,
puisqu'il ne s'agit pas d'un report de
payement au delà de l'année 1930.
Quatre puissances seront appelées à
se prononcer parTintermédiaire de leurs
délégués à la Commission la France,
la Grande-Bretagne, l'Italie et la Bel-
gique.
Le règlement intérieur de la Commis-
sion a décidé que, dans tous les votes,
la vefix du président, qui est le délégué
français M. Louis Dubois, est prépondé-
rante. C'est-à-dire qu'en cas de partage
égal des voix, celle de M. Louis Dubois
détermine la majorité. En d'autres ter-
mes, la thèse française est assurée de
triompher dans tous les scrutins à sim-
ple majorité, sauf si le délégué français
est'seul de son avis.
Dans la question du moratoire, M.
Poincaré a donné au délégué français
l'instruction de voter contre. Les délé-
gués britannique et italien ont reçu de
leur gouvernemenli respectif rinstruc-
tion de voter pour. La décision de la
Commission sera donc déterminée par
le vote du délégué belge.
Si la Belgique vote avec la France,
c 'est-à-djre • se.. «prononce cont»ê l 'octroi
du moratoire, le moratoire sera re-
poussé. '̃•
Si la. Belgique vote avec l'Angleterre
et l'Italie, c'est-à-dire pour le moratoire,
le moratoire sera accordé.
Enfin, si la Belgique s'abstient, te pa-
ragraphe 13 de l'annexe II précise
«L'abstention est considérée comme un
vote émis contre la. proposition en dis-
cussion » il en résulte que l'abstention
du délégué belge équivaudrait à un vote
contre. Ce vote, joint à celui du-délégué
français, qui a voix prépondérante, cons-
tituerait une majorité et le moratoire se-
rait repoussé.
Ajoutons qu'en vertu du paragraphe
14 de l'annexe II,, « les décisions prises
pa/ la Commission des réparafions, en
conformité des pouvoirs qui lui sonteon-
H. DE VILL.EMESSANT
Fondateur {1854-1879)
TELEPHONE Gutenberg 02-46 02-47 02-49
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S'adresser, 26, rue Drouot, à l'Hôtel du FIGARO
les Annonces et Réclames soht également reçues
à l'Agence Havas, 62, rue de Richelieu. Paris
férés, seront aussitôt exécutoires et
.pourront recevoir application iniimédiate
sans autre formalité ».
On assurait, dans la soirée, que la
Commission ajournerait, probablement-
sa décision, se réservant de demander
aux experts du gouvernement allemand1
sans doute M. Bergmann des
éclaircissements sur la. situation..
'On semble croire aussi que la Com-
mission pourrait être amenée à accor-
der le moratorium moyennant. la prise
des gages réclamé?? par M.' Poincaré,
c'est-à-dire le contrôle des mines fisca-'
les et des forêts domaniales.
Du côté italien
Rome, 16 août. V Agence Stefani
publie la note suivante
« M. Schanzer, ministre des affaires
étrangères, s'est arrêté à Paris aujour-
d'hui et est allé au Quai d'Orsay, accom-
pagné de l'ambassadeur d'Italie, le
comte Sforza, pour rendre visite à M.
Poincaré.
» M. Schanzer a également conféré
avec le délégué italien à la Commission
des réparations.
» Le but du ministre des affaires
étrangères reste, celui qui a inspiré sou
action à Londres et qui consiste à proté-
ger les intérêts économiques et Jinan-
ciers italiens, à éviter les secousses vio-
lentes à l'organisme européen et à coopé-
rer ainsi au maintien de la .vitalité de
l'Entente. »
D'autre part, on attribue cette déci-
sion du ministre italien de s'arrêter à
Paris à son désir de connaître, au plus
tut les décisions du Conseil des minis-
tres do Rambouillet et de se rendre
compte de l'opinion française.
Rome, 16 août. Les milieux politi-
ques italiens qui, durant la Conférence,
de Gênes, approuvaient, sans réserve la
politique anglophile de M. Schanzer,
commencent à déchanter.
Les résultats négatifs de la Confé-
rence de Londres semblent devoir orien-
ter les Italiens d'un aiïlr'ô côte.
Le Popolo dltatia écrit
L'Angleterre veut annuler les obligations
germaniques et demande en munie temps
les paiements de sa. créance sur l'Italie.
Pourquoi l'Italie devrait-elle, après avoir
versé son sang pour la. victoire «niaise,
être astreinte à payer des indemnités de
guerre ?
Il est inadmissible qu'après de pareilles
constatations, on continue a suivre en lia-
lie une politique anglophile inspirée pur on
ne sait- qui; et nous avons le droit :ie nous
demander ce que représentent ù la. ConsniUi!
certains diplomates réformistes et îiHtiens'
qui s'y sont incrustés iels'd.es huîtres
M. Schanzer, ministre des affaires
étrangères- d'Italie, a quitté Paris hier
soir par rOrienl-Express.
11 a été salué à la gare par le comte
Sforza, ambassadeur d'Italie à Paris, et
les membres de l'ambassade.
Son de cloche belge
Bruxelles, 16 août. Les délégués
belges rentrés cle Londres ont donné, ce,
matin, à la presse, leurs impressions sur
les résultats de la Conférence.
Leurs déclarations se terminent ainsi
Il n'y a qu'une solution possible à ce vaste
problème c'est celle de la conclusion d'un
emprunt international basé sur une préala-
ble suppression des dettes interalliées. C'est
vers cette solution qu'il faut tendre, sous
peine de ne créer que du gâchis.
C'est pourquoi tous, à Londres, nous nous
sommes trouvés d'accord pour désirer un-j
conférence prochaine, au cours de laque''e
la question serait envisagée dans toute son
ampleur.
BRUXELLES, 16 août. Le Soir. publie
un article se terminant ainsi
La politique de M. Lloyd George. tendant
systématiquement h la réconciliation avec
l'Allemagne avant que soient effectuées les
réparations dues à la France et à la Belgi-
que, aboutit ainsi à une crise angoissante,
où les meilleurs efforts des hommes de bon-
ne volonté ne suffiront peut-être pas à sau-
ver l'Entente. Il en est qui déjà ont oublié
la guerre, qui déjà ont oublié la victoire et
que le souvenir des morts glorieux ne suffit
plus à mettre en garde contre le péril qui,
aujourd'hui comme hier, vient de l'Est.
Le chancelier Wirth
répond à M. Poincaré
Berlin, 16 août Le chancelier
Wirth a reçu ce soir un certain nombre
de représentants de la presse étrangère,
à qui il a exposé l'état actuel du pro-
blème des réparations.
Il a déclaré que la Conférence de Lon-
dres avait pris fin dans des circonstan-
ces qui, non seulement n'apportent pas
à la situation européenne les éclaircis-
sements absolument nécessaires, mais
encore avaient augmenté l'incertitude
qui a régné jusqu'à présent.
Le chancelier s'est vivement élevé
contre le reproche fait à l'Allemagne
par M. Poincaré de poursuivre la dépré-
ciation systématique du mark.
M. Poincaré, a-t-il dit, trouvera en dehors
du territoire français, peu de gens pour le
croire et, en France même, il setrouve beau-
coup de personnes clairvoyantes qui ne pren-
nent pas au sérieux des "affirmations aussi
invraisemblables.
Le président du Conseil français a pré-
tendu aussi que l'Allemagne avait offert un
emprunt de quatre milliards de marks h la
Tchéco-Slovaquie. Il n'y a rien de vrai dans
cette assertion. Une offre semblable n'a été
faite ni par le gouvernement allemand, ni
par' la Reischsbarik, ni par les banques al-
lemandes dont il pourrait être question pour
une aussi grosse affaire financière.
'l Aucun de ces milieux n'a connaissance de
négociations à ce sujet.
Pour quiconque connaît la situation
Le Numéro (juotidi&irVtmmENTmES EH FBANCt
Jeudi 17 Août 19 >2
GASTON CALMETTE
Directeur {1902-1914)
RÉDACTION ADMINISTRATION
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Directeur politique ALFRED CAPUS
Directeur littéraire ROBERT DE FLERS
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et Colonies françaises ) x*
Étranger-Union postale. 28 » 54 » 100
On s'abonne dans tous les bureaux de poste
de France et d'Algérie
Une entrevue
avec le orand-rtuc Cyrille
Sainl-Briac, 14 août.
De Dinard à Saint-Briac, la côte bre-
tonne, tant elle est tourmentée, semble
avoir été découpée au ciseau par quel-
que dieu capricieux et raffiné. C'est une
véritable dentelle d'eau et de terre dont
on ne sait plus par lequel de ces deux
éléments elle fut brodée, ni qui a
conquis sur l'autre ici un cap, là une
baie.
Pourtant, ce décor balnéaire et clas-
sique, unité de lieu du monde drama-
tique, a dépouillé aujourd'hui le charme
qu'il a accoutumé de nous offrir. 11 pleut
depuis le matin,, il tombe par ondées
continuelles une petite pluie line, péné-
trante, glaciale, et'le vent,,en dépit des
proverbes, jongle avec elle et vous l'en-
voie tantôt, au visage et tantôt sur la
nuque. Il y a trop d'eau dans le paysage.
Il est lavé, noyé, il n'a plus ni lignes,
ni contours, ni couleurs il est enve-
loppé d'un grand voile humide fait de
la brume qui monte et de l'averse qui
descend, car la nier et le ciel n'attendent
pas- l'horizon pourw se rejoindre. On
croise quelques baigneuses obstinées à
profiler de leur villégiature et, dans cette
lumière grise, leurs sweaters jaune ci-
tron ou vert jade ont l'acidité des fruits
pas mûrs. Oh la Bretagne sous la
pluie
Dans la petite anse de Saint-Briac, il
y a beaucoup de barques blanches.
Mais elles ont replié leurs voiles, comme
des oiseaux leurs ailes, et elles atten-
dent pour sortir une éclaircie probléma-
tique. Sur la côte, de petits peupliers,
frissonnent et elaquent des feuilles, de
leurs feuilles qui semblent en argent.
Dans le pays, tout le monde connaît
« Ker Briac n, la résidence du grand-duc
Cyrille et de sa famille. A la façon dont
on me regarde quand je demande mon
chemin, je devine qu'on ne doit recevoir
que peu de visiteurs dans cette grande
villa qui se dresse sur une hauteur, loin
du village, et dont le toit d'ardoise
émerge d'un petit bois de sapins.
Sur le portail de bois blanc dont les
battants sont grands ouverts, je cherche
en vain une sonnette. J'entre par une
allée sombre, profonde, véritable tunnel
ouvert dans du feuillage. Quand on est
là, pn a. sur. les. épaules un grand man-
teau de verdure et de tristesse. ïl se dé-
gage de cette ombre et de ce silence une
mélancolie infinie, comme si la nature
avait vjjulu que ses hôtes fussent, au
seuil même de leur maison, préparés
aux douleurs sourdes de l'exil.
Brusquement, à un tournant de l'allée,
la villa surgit au milieu d'une grande
place de gravier ,blanc. Elle est carrée,
et sa façade est plate, comme le veut
l'architecture bretonne. Devant la porte,
un.gros massif de soleils rouges .s'égout-
te lentement et se fane.
C'est dans ce lieu modeste et soli-
taire que -réside S. A. 1. le grand-duc
Cyrille, petit-fils de l'empereur Alexan-
dre III et cousin germain de l'empereur
Nicolas II, qui vient de se déclarer gar-
dien du trône des tsars dont il est, par
droit de 'primogéniture, le seul héritier.
C'est là qu'il vit, d'une vie familiale et
austère, avec la grande-duchesse et ses
trois enfants.
En attendant d'être reçu par Son Al-
tesse, qui a bien voulu 'm'accorder un
rendez-vous, je m'entretiens avec un de
ses familiers, .ancien général des cosa-
ques. C'est un homme immense dont les
vêtements civils ne masquent qu'à demi
son allure militaire. Il a le teint vif et,
sous son front lourd et chauve, brillent
des yeux très doux, très bleus, dés yeux
d'enfant, qui font un saisissant con-
traste avec son corps de géant.
Il me raconte comment éclata cette ré-
volution russe, qui fut l'oeuvre d'un pe-
tit groupe d'aventuriers, cette révolution
dont le monde entier devait subir les
tristes conséquences et qui fut si brus-
que, si imprévue, que personne n'y crut
tout d'abord et que pendant longtemps
elle resta ignorée d'une grande partie de
la Russie.
Pour moi, me dit-il, j'en fus averti
aux portes de Pefrograd, un jour que
j'arrivais en permission. A peine avais-je
mis pied à quai qu'on m'arrêta. Une
heure plus' tôt, à la dernière station
avant Petrograd, tout était calme. J'étais
descendu pour acheter les journaux. Il
n'y. en avait point, mais cela ne m'éton-
aia .pas autrement. Tout marchait si niai
depuis la guerre. D'ailleurs, le mar-
chand lui-même m'avoua « Je né sais
pas ce qui se passe voilà plusieurs
jours que les journaux ne,sont pas arri-
vés. » Ainsi, à quelques kilomètres de
Petrograd, on ignorai't encore qu'il y
avait une révolution russe.
Il me parle ensuite de la brillante' car-
rière militaire du grand-duc Cyrille qui,
déjà, avait pris une part active à la guer-
re russo-jappnaise. C'est par miracle
,qu'il avait alors échappé à la mort, car
il se trouvait sur le Petropwvlowsk, tor-
pillé par les Japonais, et dont presque
tout l'équipage périt, y compris l'amiral
Makaroff de qui ce cuirassé battait pavil-
lon..
Et, dans son esprit un peu mystique,
l'ancien cosaque voit un présage en ce
miracle.
Pourquoi le grand-duc aurait-il sur-
vécu, me dit-il, s'il ne devait un jour
reprendre en main les destinées de son
pays ? Je suis sûr que c'est là l'opinion
du peuple courbé sous le joug du bol-
chevisme et' qu'un jour il -recevra le
grand-duc Cyrille comme un libérateur.
Il y a un vieux proverbe de chez nous
qui dit Quand le maître revient,, c'est
lui qui remet l'ordre. Il est temps que
l'ordre règne de nouveau en Russie.
Dans le grand salon ;deSj.a villa, dont
les deux baies ouvrent T.tuie. sur la mer
et l'autre sur la campagne, l'héritier des
tsars, debout, contemple, à travers les
vitres marbrées de pluie, quelque hori-
zon emprunté à ses souvenirs. Grand,
mince, vêtu d'un complet de" sport, ie
grand-duc Cyrille paraît très jeune, eu
égard à ses quarante-cinq ans. Son visa-
ge est allongé, ses yeux d'un bleu-gris,
très froid, et sous sa moustache légn re-
nient tombante, sa. bouche apparait à la
fois volontaire et dédaigneuse, comme si
la vie intérieure de cet exilé était cristal-
lisée en un pli de ses lèvres. A ses côtés,
la grande-duchesse est assise à une ta-
ble encombrée de palettes et de pin-
ceaux. Ses traits purs ont une expres-
sion un peu hautaine qui se dissipe vite
dès qu'elle parle de la Russie pour la-
quelle elle a gardé un amour passionné
qui incline vers l'oubli et vers le par-
don.
Il est exact, me dit le grand-duc
Cyrille, que je me sois déclaré gardien' du
trône vacant, et je crois' obéir ainsi aux
aspirations du peuple russe qui, depuis
longtemps déjà, est las du joug bolche-'
vique. Chaque fois qu'un courrier nous
parvient, nous y trouvons des lettres qui
nous éclairent sur l'état d'esprit, de ceux
qui sont restés là-bas. Pour que l'ordre
se rétablisse dans notre pays, il faut que
s'exerce une action reconstituante dont
̃mies droits légitimes me désignent
pour être le chef. Ces droits, d'ailleurs,
je me propose de les faire confirmer par
les Etats-Généraux, dans le cas où l'em-
pereur Nicolas II serait mort, ainsi que
ses descendants.
Son Altesse Impériale possède-
t-elle quelque document nouveau qui lui
permette de croire à la survivance de la
famille impériale ? `?
Non, mais une conviction intime,
profondément- enracinée dans notre
cœur comme dans ceux de tous les Rus-
ses, nous fait espérer que Sa Majesté est
vivante. Et puis il a circulé tant de ver-
sions sur la mort tragique de la famille
impériale qu'elles n'ont servi qu'à épais-
sir le mystère. Puisque tous les récits
qu'on en a faits ne peuvent être. vrais,
pourquoi ne pas admettre qu'ils peu-
vent être tous également faux ?
» Ce qui importe pour l'instant, c'est
de rétablir l'ordre, et pour cela il faut
que les Russes émiigrés se groupent et
fassent bloc contre les forces du bolche-
visme, qui sont moins redoutables qu'on
ne le suppose. »
Sans doute ai-je marqué quelque éton-
nement, car le grand-duc Cyrille ajoute
Oh ce n'est pas une action mili-
taire que j'envisage: Je considère com-
me fratricide toute hostilité envers les
forces armées de la Russie. Mais c'est
des forces morales que je veux parler,
de ces forces qui sont représentées, en
Russie et à l'étranger, par tous ceux
qui n'appartiennent pas au bolchevis-
me et qui sont l'ordre, la paix, la vérité
en un mot. La vérité porte en elle une
puissance de conviction si grande qu'elle
peut produire à elle seule un revirement
complet du peuple. La révolution russe
ne ressemble à aucune autre dans l'his-
toire. Elle n'est rien de moins qu'un mi-
racle qui a créé l'anarchie et la misère.
Quand on connaît bien l'âme russe, on
se rend compte- que le mira'cle inverse
est possible.
» D'ailleurs,le peuple commence à com-
prendre qu'on lui a ravi ses libertés sous
couleur de lui en donner de plus gran-
des. On l'a manœuvré en s'adressant à
ses sentiments les plus bas, il s'est lais-
sé séduire par le vol et par le pillage
vers lesquels le poussaient les chefs du
parti rouge. Mais dans le cœur du pay-
san russe, le remords s'est installé. Il n'a
point de goût pour ce qu'il a mal acquis;
il n'aime que ce qu'il a gagné honnête-
ment, par son travail, et c'est une des
raisons pour lesquelles ce grand peuple
meurt de faim devant ses terres incultes.
Po.ur qu'il secoue cette torpeur, il faut
qu'il sache qu'on ne l'abandonne pas
aux mains des despotes qui ont fait sa
ruine et qui ont anéanti un pays dont
ils s'étaient emparés à l'apogée de sa
prospérité.
» Dans quelques jours, le peuple et
l'armée recevront un manifeste par le-
quel ils connaîtront mes intentions. Ils
sauront que je suis animé du plus large
esprit de clémence et que notre parti,
sans s'occuper des divisions politiques
d'autrefois, ne veut que le rétablisse-
ment de la légalité et de l'ordre.
Que trouverons-nous quand nous
reviendrons en Russie?.
C'est la grande-duchesse qui vient de
parler. Elle a prononcé ces mots avec
une conviction qui a quelque chose d'é-
mouvant, dans ce salon si éloigné des
splendeurs de la Cour.
«.Quand nous reviendrons. » Cette
phrase surgit dans ma mémoire au mo-
ment où je quitte « Ker Briac n. Dans le
jardin une éclaircie a séché le gravier
des allées. 11 fait plus clair déjà. Un en-
fant blond est là qui joue. Il est né en
Roumanie, aux heures les plus tragi-
ques de la Révolution. Cependant qu'il
joue, d'autres travaillent pour que sa
destinée s'accomplisse, et peut-être un
jour régnera-t-il en maître sur cette
Russie qui est son pays et qu'il ignore.
Sait-on jamais .?.
James de Coquet.
La santé de d'Annunzio
On continue à ignorer les causes
exactes de l'accident de Gabriele d'An-'
nunzio. Plusieurs versions circulent et
la dernière est que le poète, ayant eu
une vive discussion, au cours d'un re-
pas avec quelques amis intimes, aurait
eu une congestion à la fenêtre près de
laquelle il venait de se rendre.
Seuls les médecins pénètrent dans sa
« Loué par ceux-ci, blâmé par ceux-là, me moquant dfes sots. bravatït-lescméchaiits, je me presse
.de rire .de tout. de peur d'être obligé d'en pleurer. V (Beaumarchais). •'
maison, les légionnaires de Fiume mon-
tant autour de sa, demeure une garde vi-
gilante'. '•
Le dernier bulletin publié -constate
une amélioration légère et un retour pr^
grëssif à' la conscience: La température
et le pouls sont normaux.
Le nom de nos rues
Nous avons reçu, depuis quelques
jours, de nombreuses lettres de nos
abonnés, qui nous montrent à quel point
ils s'intéressent aux modifications que
̃le Conseil municipal doit prochainement
apporter dans la nomenclature de nos
rues. •
Il nous a semblé que nos lecteurs, par
leurs conseils et leurs avis, étaient tout
désignés pour être les précieux collabo-
rateurs d'une œuvre à laquelle sont in-
téressés V éclat et la gloire de Paris.
N'oiis prions donc nos amis de bien
vouloir nous faire part de leurs réflexions
et de leurs observations' sur un sujet qui
les regarde aussi: directement. H n'est
point douteux que les communications
qu'ils voudront bien nous faire enrichi-
ront de la façon la plus utile le dossier
de nos édiles et contribueront jiux heu-
réuses décisions de l'Hôtel de Ville..
ÉCHOS
Fêtes sur fêtes.
Dans nos belles provinces, le'vent est,
en ce moment-ci, aux fêtes. On en an-
nonce de partout et chaque ville veut
rivaliser avec sa voisine. La contagion
finira par gagner le pays tout entier et
l'on fera bientôt la fêle, dans,Tla.,France
entière, autant qu'à Paris. L"
Jaloux sans doute de ce qui-se spj-é-t
pare à Foix, et dont nous avons déjà à,L
parlé, voici que Pamiers veut attirer dans
ses murs les populations ariégeoises.
Il usera pour cela de procédés, en-
core qu'honnêtes, pas très neufs et qui
ne valent que par l'exécution reconsti-
tutions historiques, auditions d'art, feux
d'artifices et bals. ̃-
Cependant, il promet un spectacle
qui alléchera sans doute bien des ama7
teurs, et c'est la représentation en plein
air de la Fille de la Terre, du regretté
maître Déodat de Séverae, tragédie lyri-
que et rustique puissante et colorée.
Il faut louer Pamiers de rendre ainsi
homirnage au talent d'un compatriote,
ou presque; dont la France entière-' -peut
être fière. ̃̃
L'utile réforme. w
Le Parlement a été bien inspiré eh
votant –'notamment l'abaissement, à
10 centimes de l'affranchissement des
cartes postales illustrées' II y a un mois
environ que la réforme est en vigueur
et, dans un bureau de poste provincial,
on en a expédié plus en trente jours
qu'on ne l'avait fait en un an, lorsque le
tarif était, de 20 centimes.
De ce chef, les recettes à la poste ont,
comme rendement, plus que décuplé.'
C'est donc une excellente affaire pour
les P. T: T. comme, ce l'est.' pourries:
« spécialistes » de la carte postale et. inê-i
me pour. le public. '̃
Tout le monde, de la sorte, |est;çoilten.ti
et. à peu de frais. •')" lj..
Combien d'autres réformes pourraient'
être ainsi réalisées pour le profit de
tous!
Mais Dame Routine a, parfois, la vie
dure.
Les chats de Cluny.
Le petit, jardin, les broussailles, '4es
thermes du musée de Cluny constituent
un merveilleux domaine où régnent en
maîtres, quand les grilles sont fermées,
une légion de chats hirsutes et halluci-
nants.
Ils sont sales, pouilleux, fugaces et re-
venus à un état de demi-sauvagerie qui
en rend l'approche difficile.
Cependant, ils ont conservé, de la vie'
domestique d'où ils s'évadèrent, .cer-,
tains goûts de civilisés ils aimient le lait.*
C'est pourquoi on peut les, voir tous,,
à l'heure du crépuscule, à la chien-loup,
tapis sur le mur bas, à l'abri des grilles,
et guettant la charitable dame, peut-être
membre de la S. P. A., qui s'en vient
tous les jours, sa bouteille à la main,
leur verser dans une' soucoupe un peu
de lait qu'ils lapnent avec avidité et sa-
tisfaction.
Leur gourmandise satisfaite, ils s'en
retournent à leurs broussailles, sans un
regard pour leur bienfaitrice, qui n'en
continuera pas moins demain et les jours
suivants son ingrate mission.
L'apothéose de la bouillabaisse.
11 ne faudra plus médire de notre ad-
ministration des P. T. T. devant un
Marseillais ou un Anglais.
Nos amis britanniques qui sont venus
à l'Exposition coloniale de Marseille ont
fait connaissance avec la bouillabaisse.
Ils en raffolent, .paraît-il,, et à. ce .point
que plusieurs d'entre eux ont voulu en
emporter à Londres par boîtes de
conserve.
Mais que vaut la bouillabaisse de,
conserve, comparée à celle que l'on con-
somme fraîche ? ••̃"
Or, les P. T. T. c'est. l'Office natio-
nal de commerce extérieur qui nous
l'apprend viennent d'élever à deux
kilos le poids maximum des « corres-
pondances » transportées de, Marseille
à Londres par avions.
On pense bien que, dans ces condi-
tions, les kilos de bouillabaisse passent,
au-dessus de nos tètes, comme des let-
tres à la poste. ̃
Et nous n'en avons, hélas même pas
le fumet.
le fumel. Le, Masque de Fer..
LA SITUATION
APRÈS LA CONFÉRENCE
La conviction
s 'c, delà France
«j>y Gouvernement, Parlement, toutes
les formes du pouvoir et de l'opi-
nion, tous les interprètes du sentiment
français sont d'accord pour approuver
l'attitude de M. Poincaré à Londres. Eût-
on convoqué les Chambres, elles n'au-
raient pas donné à cette unanimité un
aspect plus" imposant et nos députés,
en vacances, restent en contact assez di-
rect avec la nation, pour n'avoir pas le
moindre doute à.cet égard. La convic-
tion de la France est. faite conviction
d'expérience en même temps que d'ins-
tinct. L'expérience dé ces dernières an-
nées nous démontre que nous arrivions
au bord du gouffre, sans un arrêt brus-
que et à n'importe quel risque et l'ins-
tinct nous avertit que notre pays vient
>de retrouver, par là, la ligne abandon-
née de la vie Loire. En France, l'opposi-
tion à ces idées est nulle dans les coins
où elle se manifeste, elle ne compte pas
dèrns:les esprits où elle parait sincère,
elle n'est qu'une aberration momenta-
née.
Quelle erreur commet un homme aussi
distingué que M. le chancelier Wirth,
et d'une aussi bonne volonté apparente,
quand il s'imagine que nous nous achar-
nons à la ruine de l'Allemagne Ce qui
est strictement vrai, c'est que la falla-
cieuse politique dé reconstruction euro-
péenne, ébauchée à Gênes et poursuivie
à Londres, avait fini par poser la ques-
tion entre la ruine de l'Allemagne et les
réparations dues à la France. On eût dit
qu'il fallait choisir entre ces deux ter-
mes extrêmes et qu'on ne pouvait ren-
dre justice à la France sans achever le
vaincu. C'est .cette politique-là qui était
intransigeante et hautaine, et qui, de
moratorium en moratorium, nous amie.-
îiait à un désastre prochain, sous pré-
texté .d'en épargner à l'Allemagne un
.ijjînié'diaL.ËsUcè que, dans des circons-
tances- -.rëiiverséeSj • un boit 'n Allemand
'.cotiftné M. Wiïth'èût liésile ? Nous ne
l'avons pas fait et aucune pression hu-
maine n'y contraindra un peuple de l'in-
telligence et de la valeur du nôtre. Ainsi,
c'est M.Lloyd George et c'est M. Wirth
qui envisagent les solutions violentes
destinées à.briser le peu .qui reste d'or-
dre européen et c'est, au contraire, la
politique française qui cherche l'équili-
bre du monde bouleversé et une conci-
J-iation entre les intérêts, mais une con-
̃çiliation qui lie sacrifie pas les plus lé-
igitimes aux plus hasardeux. M. Wirth
et, ses compatriotes 1& comprendront à
la longue.
r Alfred Capus,
de l'Académie française.
Les ministres à Rambouillet
̃ ̃ ̃ s».
Les résultats négatifs de la Conféren-
ce de Londres ont amené, on le sait, le
gouvernement français à se concerter
tout de suite sur la ligne de conduite à
adopter. Un Conseil des ministres a
donc été tenu hier à Rambouillet.
fi A la gare Montparnasse
Les membres du Cabinet prirent place
a. Paris dans le rapide de Brest qui quit-
te la gare- Montparnasse à. 8 h. 40 et où
un wagon-salon leur avait été réservé.
Ceux d'entre -eux qui étaient absents de
Paris avaient été rappelés par télégram-
me en raison de.rimpo.rlauce de cette
avance, où M. PoMcàré doit mettre ses
collègues au courant de la situation telle
qu'elle se présente après la Conférence
de Londres.
M. Raiberti, ministre de la marine,
qui se trouvait à Nice, et qui arriva hier
imalin la gare de Lyon, trop tard pour
pouvoir être en temps utile à la gare
Montparnasse, s'est rendu .directement
en automobile à Rambouillet.
Suivant l'usage, M. Col rat, sous-se-
crétaire d'Etat de la présidence du Con-
seil, avait été convoqué à la réunion.
Sur le quai de la gare Montparnasse,
les membres du gouvernement ont été
salués par MM. Naudin, préfet de poli-
ce Grignon, chef de cabinet du prési-
dent du Conseil .-André Dejean, direc-
teur des chemins de fer de l'Etat, et par
le1 commandant Brosse, commandant le
palais de l'Elysée; M. Vanaisé, commis-
saire spécial, dirigeait, le service d'or-
dre. La foule a. fait au président du Con-
seil et, à ses collègues un accueil cha-
leureux:,
,Le,rxipidfi,se.s,t, arrivé à 9 h. 45 à Ram-
bouillet où il s'est arrêté exceptionnelle-
ment. Les ministres ont été salués par
M.Bodereau, sous-préfet, et par le com-
mandant Derendinger, de la maison mi-
litaire du Président de la République,
puis ils sont montés en automobile pour
se rendre au château où la séance du
Conseil a aussitôt commencé.
Le Conseil''
La séance, ouverte à 10 heures, à pris
fin à midi 50.
Avant de se rendre dans la grande
salle à manger du château pour prendre
au déjeuner auquel ils avaient été
conviés par le Président de la. Républi-
que, les ministres ont transmis cette no-
te à la presse
«Le président du Conseil a fait l'ex-
posé complet des négociations poursui-
vies à Londres et des raisons pour les-
quelles, il a été impossible d'aboutir à
un accord. Le Conseil a. été unanime à
approuver l'attitude de son président- et
à se solidariser avec lui. Le Conseil tien-
dra une seconde séance cet après-
midi. »
On croyait savoir, en outre, que la
question de la convocation éventuelle
des Chambres n'avait été envisagée à
aucun moment au cours de la. réunion
du matin.
A deux heures, les ministres sont ren-
trés dans la salle de leurs délibérations
et, un moment, après, M. Maunoury, mi-
nistre de l'intérieur, en sortait pour fai-
re aux journalistes cette déclaration
« Je suis autorisé à vous dire qu'il
n'est pas question de convoquer les
Chambres. »
Et le ministre rentra en séance pour
prendre part à la suite de ta. délibération,
laquelle dura jusqu'à 4 h. 25.
Le retour
A ce moment, les, ministres quittèrent
rapidement le château pour regagner la
gare et prendre le train qui passe à
Rambouillet à Il h. 40.
Au cours du voyage de retour cette
nouvelle note aussi laconique que les
autres a été communiquée à la presse
« Le Conseil a examiné en détail les
diverses éventualités qui pourront, se
produire suivant la décision de la Com-
mission des réparations. »
A 5 h. 45, le train entrait en gare de
Paris.
Notons que M. Poincaré a été vive-
ment, acclamé par les curieux, assez
nombreux, qui s'étaient massés auprès
de la porte de sortie.
Au Quai d'Orsay
f Peu de temps après son arrivée au
Quai d'Orsay, M. Poincaré a reçu M.
Louis Dubois, représentant français à
la Commission des réparations. M.
Schanzer, ministre des affaires ̃ étran-
gères et le comte Sforza, ambassadeur
d'Italie à Paris.
La Commission des réparations
statuera sans doute aujourd'hui
Les gou'vernemients alliés n'ont pu se
mettre d'accord, à la Conférence de
Londres, sur la réponse à faire à la de-
mande allemande d'un nouveau mora-
toire, qui serait, d'après la requête du
chancelier, applicable à, la totalité des
versements eli espèces a effectuer jus-
qu'à la, fin de 1922 (50 millions de marks-
or les 15 août, 15 septembre, 15 octobre
et 60 millions les 15 novembre et 15 dé-
cembre), puis aux versements en espè-
ces de 1923 et 1 92 'j
La parole est donc maintenant à la
Commission des réparations qui, atten-
dant les résultats de la Conférence de
Londres avant de prendre elle-mênte
une décision, a. suspendu le payement
du 15 août. La Commission se réunira
sans doute aujourd'hui pour discuter les
termes de sa réponse à la demande alle-
mande de moratoire formulée dans ta,
requête du gouvernement allemand en
date du 12 juillet dernier. Elle peut, soit
accueillir la requête, soit la repousser,
soit l'accepter partiellement en ajour-
nant un certain nombre de payements
relatifs aux prochaines échéances.
Aux termes du traité de Versailles
(paragraphe 13 de l'annexe II à la par-
tie VIII) la décision de la Commission
sera prise à la simple majorité, la ques-
tion n'étant pas de celles, strictement
définies, pour lesquelles l'unanimité est t,
nécessaire. La simple majorité suffit,
puisqu'il ne s'agit pas d'un report de
payement au delà de l'année 1930.
Quatre puissances seront appelées à
se prononcer parTintermédiaire de leurs
délégués à la Commission la France,
la Grande-Bretagne, l'Italie et la Bel-
gique.
Le règlement intérieur de la Commis-
sion a décidé que, dans tous les votes,
la vefix du président, qui est le délégué
français M. Louis Dubois, est prépondé-
rante. C'est-à-dire qu'en cas de partage
égal des voix, celle de M. Louis Dubois
détermine la majorité. En d'autres ter-
mes, la thèse française est assurée de
triompher dans tous les scrutins à sim-
ple majorité, sauf si le délégué français
est'seul de son avis.
Dans la question du moratoire, M.
Poincaré a donné au délégué français
l'instruction de voter contre. Les délé-
gués britannique et italien ont reçu de
leur gouvernemenli respectif rinstruc-
tion de voter pour. La décision de la
Commission sera donc déterminée par
le vote du délégué belge.
Si la Belgique vote avec la France,
c 'est-à-djre • se.. «prononce cont»ê l 'octroi
du moratoire, le moratoire sera re-
poussé. '̃•
Si la. Belgique vote avec l'Angleterre
et l'Italie, c'est-à-dire pour le moratoire,
le moratoire sera accordé.
Enfin, si la Belgique s'abstient, te pa-
ragraphe 13 de l'annexe II précise
«L'abstention est considérée comme un
vote émis contre la. proposition en dis-
cussion » il en résulte que l'abstention
du délégué belge équivaudrait à un vote
contre. Ce vote, joint à celui du-délégué
français, qui a voix prépondérante, cons-
tituerait une majorité et le moratoire se-
rait repoussé.
Ajoutons qu'en vertu du paragraphe
14 de l'annexe II,, « les décisions prises
pa/ la Commission des réparafions, en
conformité des pouvoirs qui lui sonteon-
H. DE VILL.EMESSANT
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les Annonces et Réclames soht également reçues
à l'Agence Havas, 62, rue de Richelieu. Paris
férés, seront aussitôt exécutoires et
.pourront recevoir application iniimédiate
sans autre formalité ».
On assurait, dans la soirée, que la
Commission ajournerait, probablement-
sa décision, se réservant de demander
aux experts du gouvernement allemand1
sans doute M. Bergmann des
éclaircissements sur la. situation..
'On semble croire aussi que la Com-
mission pourrait être amenée à accor-
der le moratorium moyennant. la prise
des gages réclamé?? par M.' Poincaré,
c'est-à-dire le contrôle des mines fisca-'
les et des forêts domaniales.
Du côté italien
Rome, 16 août. V Agence Stefani
publie la note suivante
« M. Schanzer, ministre des affaires
étrangères, s'est arrêté à Paris aujour-
d'hui et est allé au Quai d'Orsay, accom-
pagné de l'ambassadeur d'Italie, le
comte Sforza, pour rendre visite à M.
Poincaré.
» M. Schanzer a également conféré
avec le délégué italien à la Commission
des réparations.
» Le but du ministre des affaires
étrangères reste, celui qui a inspiré sou
action à Londres et qui consiste à proté-
ger les intérêts économiques et Jinan-
ciers italiens, à éviter les secousses vio-
lentes à l'organisme européen et à coopé-
rer ainsi au maintien de la .vitalité de
l'Entente. »
D'autre part, on attribue cette déci-
sion du ministre italien de s'arrêter à
Paris à son désir de connaître, au plus
tut les décisions du Conseil des minis-
tres do Rambouillet et de se rendre
compte de l'opinion française.
Rome, 16 août. Les milieux politi-
ques italiens qui, durant la Conférence,
de Gênes, approuvaient, sans réserve la
politique anglophile de M. Schanzer,
commencent à déchanter.
Les résultats négatifs de la Confé-
rence de Londres semblent devoir orien-
ter les Italiens d'un aiïlr'ô côte.
Le Popolo dltatia écrit
L'Angleterre veut annuler les obligations
germaniques et demande en munie temps
les paiements de sa. créance sur l'Italie.
Pourquoi l'Italie devrait-elle, après avoir
versé son sang pour la. victoire «niaise,
être astreinte à payer des indemnités de
guerre ?
Il est inadmissible qu'après de pareilles
constatations, on continue a suivre en lia-
lie une politique anglophile inspirée pur on
ne sait- qui; et nous avons le droit :ie nous
demander ce que représentent ù la. ConsniUi!
certains diplomates réformistes et îiHtiens'
qui s'y sont incrustés iels'd.es huîtres
M. Schanzer, ministre des affaires
étrangères- d'Italie, a quitté Paris hier
soir par rOrienl-Express.
11 a été salué à la gare par le comte
Sforza, ambassadeur d'Italie à Paris, et
les membres de l'ambassade.
Son de cloche belge
Bruxelles, 16 août. Les délégués
belges rentrés cle Londres ont donné, ce,
matin, à la presse, leurs impressions sur
les résultats de la Conférence.
Leurs déclarations se terminent ainsi
Il n'y a qu'une solution possible à ce vaste
problème c'est celle de la conclusion d'un
emprunt international basé sur une préala-
ble suppression des dettes interalliées. C'est
vers cette solution qu'il faut tendre, sous
peine de ne créer que du gâchis.
C'est pourquoi tous, à Londres, nous nous
sommes trouvés d'accord pour désirer un-j
conférence prochaine, au cours de laque''e
la question serait envisagée dans toute son
ampleur.
BRUXELLES, 16 août. Le Soir. publie
un article se terminant ainsi
La politique de M. Lloyd George. tendant
systématiquement h la réconciliation avec
l'Allemagne avant que soient effectuées les
réparations dues à la France et à la Belgi-
que, aboutit ainsi à une crise angoissante,
où les meilleurs efforts des hommes de bon-
ne volonté ne suffiront peut-être pas à sau-
ver l'Entente. Il en est qui déjà ont oublié
la guerre, qui déjà ont oublié la victoire et
que le souvenir des morts glorieux ne suffit
plus à mettre en garde contre le péril qui,
aujourd'hui comme hier, vient de l'Est.
Le chancelier Wirth
répond à M. Poincaré
Berlin, 16 août Le chancelier
Wirth a reçu ce soir un certain nombre
de représentants de la presse étrangère,
à qui il a exposé l'état actuel du pro-
blème des réparations.
Il a déclaré que la Conférence de Lon-
dres avait pris fin dans des circonstan-
ces qui, non seulement n'apportent pas
à la situation européenne les éclaircis-
sements absolument nécessaires, mais
encore avaient augmenté l'incertitude
qui a régné jusqu'à présent.
Le chancelier s'est vivement élevé
contre le reproche fait à l'Allemagne
par M. Poincaré de poursuivre la dépré-
ciation systématique du mark.
M. Poincaré, a-t-il dit, trouvera en dehors
du territoire français, peu de gens pour le
croire et, en France même, il setrouve beau-
coup de personnes clairvoyantes qui ne pren-
nent pas au sérieux des "affirmations aussi
invraisemblables.
Le président du Conseil français a pré-
tendu aussi que l'Allemagne avait offert un
emprunt de quatre milliards de marks h la
Tchéco-Slovaquie. Il n'y a rien de vrai dans
cette assertion. Une offre semblable n'a été
faite ni par le gouvernement allemand, ni
par' la Reischsbarik, ni par les banques al-
lemandes dont il pourrait être question pour
une aussi grosse affaire financière.
'l Aucun de ces milieux n'a connaissance de
négociations à ce sujet.
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