Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1894-03-03
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 03 mars 1894 03 mars 1894
Description : 1894/03/03 (Numéro 62). 1894/03/03 (Numéro 62).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
2
LE FIGARO - SAMEDI 3 MARS 1894
J'entends bien; mais puisqu'à présent
on en est venu à incorporèr tout le con-
tingent et que, d'autre part, vous dites,
avec raison peut-être, qu'il npus faut
plus de monde encore, le moment n'est-
il pas venu d'ouvrir toutes grandes les
portes de l'armée active aux anciens
soldats.rengagés?
Ne serait-ce pas le moyen le plus sim-
ple d'augmenter nos effectifs d'une ma-
nière notable, sans accroître le chiffre
du contingent, ce que je crois impossi-
ble ? Et ne serait-ce pas surtout la meil-
leure manière d'augmenter, dans une
proportion énorme, la qualité et la va-
leur de cet ensemble qu'on appelle la
troupe ?
Car c'est là, encore une fois, ce que
nous devons rechercher à tout prix.
Et il faut avoir enfin le courage de le
dire , nous sommes, en réalité, in-
consciemment ou non, dans la voie où
bientôt nous aurons encore en France
des milices, mais non plus une armée ;
les partisans du nombre à outrance ne
se doutent pas, ou plutôt ne veulent pas
voir l'affaiblissement permanent et
continu que subit parla, depuis bien-
tôt quinze ans, notre puissance mili-
taire.
Oui, si nous voulons avoir une armée
digne de ce nom, il nous faut non seule-
ment de bons cadres d'officiers et de
sous-officiers, mais il nous faut absolu-
ment aussi, dans chaque unité de com-
bat, un noyau de soldats de carrière qui
puisse, en temps de paix, faire non pas
l'instruction, mais l'éducation militaire
du conscrit ; qui puisse surtout, en temps
de guerre, conduire et maintenir au feu,
sous le danger intense du combat mo-
derne, la cohue de soldats inexpérimen-
tés qui viendront, du jour au lendemain,
tripler une compagnie dont les plus an-
ciens n'auront pas deux ans de présence
sous le drapeau, et qui, par leur nombre
même, échapperont, le plus souvent, -à
l'action directe de l'officier.
Non, toute illusion à cet égard serait
coupable, il n'y a pas d'armée véritable^
ment solide sans esprit militaire, et nos
malheurs auraient dû, au contraire,
nous conseiller de l'entretenir comme
l'etincelle précieuse qui peut un jour
rallumer le feu sacré. Et il n'y a pas
non plus, il n'y aura jamais, quoi qu'on
fasse, d'esprit militaire dans une ar-
mée sans vieux soldats ; non pas les
ramollots de l'absurde légende,blanchis
sous le harnois mais les anciens soldats,
jeunes encore et vigoureux, les solides
qui résistent quand même, les forts qui
ne bronchent pas, quoi qu'il advienne,
qui sont le ciment que rien ne peut rem-
placer, le lies sans lequel une troupe
jeune et impressionnable, si vaillante
soit-elle, peut devenir, sous l'influence
de circonstances critiques, nn ingou-
vernable troupeau.
C'est ce soldat qu'il nous iaut mêler
aujourd'hui à l'armée nouvelle; on peut
et on doit le trouver, il existe encore.
On trouvait bien autrefois, en grand
nombre, des remplaçants-, on trouve-
rait certainement de même aujourd'hui
beaucoup d'hommes disposés à rester
au régiment, soit par goût de la profes-
sion des armes, soit pour y trouver, à
présent que la vie est partout si dure,
une situation meilleure que celle qu'ils
auraient dans la vie civile.
Je sais bien que, dans un accès un
peu païf d'illusion patriotique, l'Assem-
blée nationale avait inscrit, en tête delà
toi de 1872, le principe « il n'y a, dans les
troupes françaises, ni primes en argent,
ni prix quelconque.d'engagement ». Une
pompeuse formule, pour ne pas dire
an e phrase creuse, dont l'expérience a,
d'ailleurs, promptement fait justice.
c'est donc, encore une fois, une ques-
tion d'argent, pas autre chose.
Voilà l'effort nécessaire; demandez-
nous le, monsieur le ministre de la
guerre; vous devez savoir que la Com-
mission de l'armée vous soutiendra ré-
solument.
Et quand nous aurons seulement 15 à
20,000 vieux soldats dans nos régiments
de l'Est, nous pourrons dire avec assu-
rance aux voisins de l'autre côté du
Rhin : « Quand vous voudrez, cama-
rades! »
Et si je dis que nous n'avons pas le
droit d'attendre, c'est que ce sont préci-
sément les effectifs de paix de nos corps
de première ligne qui doivent être ren-
forcés, au plus vite et à tout prix.
Je ne veux pas faire de stratégie, ni
surtout rien dire de trop en pareille ma-
tière. Mais il est évident, pour tout le
monde, que les conditions probables de
la guerre future se modifient chaque
jour.
Il y a peu d'années encore on pouvait
compter que la bataille ne s'engagerait
qu'avec des troupes complètemént mo-
bilisées de part et d'autre. En est-il de
même aujourd'hui ? Je ne le pense pas,
et j'estime,au contraire, quel action dé-
cisive se jouera, dès les premiers jours,
entre des troupes qui n'auront dans le
rang que leurs effectifs de paix ren-
forcés.
Eh bien, une chose ne change pas,
c'est le coeur de l'homme ; et comme
dans le combat deux actions morales,
bien plus que deux actions matérielles,
sont en présence, c'est, en somme, de-
main comme toujours, la qualité seule
quiiera l'action réelle.
J'en appelle à tous ceux qui, ayant su
voir, savent se souvenir.
Vicomte do Montfort,
Député de la Seine-Inférieure.
LA MALADIE OU ROI DE SIAM
Lors de mon départ de Bangkok, en
novembre dernier, je savais que le roi
de Siam était d'une santé des plus chan-
celantes. Il allait, pourtant, venait, va-
quait à ses devoirs et offices royaux. Ja-
mais souverain ne fut moins inactif. Les
négociations franco-siamoises termi-
nées, il recevait solennellement en au-
dience de départ, dans son palais d'été
de Bangpain (le Versailles de Bangkok),
le plénipotentiaire de France et sa suite.
Au dîner de gala, Sa Majesté, radieuse,
très cordiale à ses hôtes, mangea de
tous les plats, but de tous les vins les
plus variés, et l'un des convives me ma-
nifesta son étonnement admiratif par
ces mots : « Oh ! le Roi, quelle rude
fourchette I »
Puis le Roi retomba malade et s'alita ;
puis il se releva encore, et tant bien que
mal reprit sa tâche, ses réceptions, ses
audiences. Il célébra des fêtes, celle des
eaux notamment, fit sa tournée annuelle
des pagodes. Je l'aperçus un soir, la tête
à>la portière de son carrosse, précédé et
escorté de ses gardes à cheval en tunique
rouge, .toutes les troupes siamoises sous
les armes formant la haie sur son pas-
sage. Le Roi rentrait au palais venant
d'assister à une cérémonie religieuse. Il
me sembla pâle, fatigué, triste, les yeux
ressortant très clairs sur son teint
bistré.
Aujourd'hui le courrier de Siam m.'ap.
porte une intéressante lettre, dont je
m'empresse de taire le nom du signa-
taire,étant donnée sa situation officielle
à la Cour même. Voici quelques extraits
de cette lettre :
Le Roi a célébré le 25« anniversaire de son
règne et a dépensé beaucoup d'argent, à peu
près 500,000 francs, pour nous montrer que
les trois millions de francs n'ont point
appauvri, le Siam. Le Roi a distribué des
médailles militaires partout en l'honneur de
la victoire de Paknam contre vos marins de
France.
Depuis les fêtes, le Roi se trouve très indis-
posé, même je dirai très malade. Depuis son
enfance, le Roi a été poitrinaire, et le coup
de Paknam, l'ultimatum et le reste, ont été
suffisants pour chavirer le peu de force morale
et physique de Sa Majesté siamoise.Le méde-
cin américain qui le soigne lui donne deux
ou trois mois. Je le crois assez avancé dans
la phtisie. Il a la respiration très troublée.
Là question de la mort du Roi est sérieuse,
parce qu'il y a deux partis : le premier, celui
des deux frères du Roi ; le deuxième, celui
du prince héritier, neveu du prince Dewa-
wongse. Je crois que les mandarins, les
princes et les gens d'autorité dans cè pays -
moi certainement j'en ferai partie - seront
du côté des frères du Roi. (En c« cas, il y au-
rait le Roi et le second Roi.)
Si le prince héritier succède à son père, le
prince Dewawongse serait le véritable Roi.
Dans ce cas, les princes de la famille royale
ne se soumettraient jamais.
Dans les temps reculés, les princes héritiers
succédaient à leurs pères. Mais toujours il y
avait quelques rébellions, et l'on a vu sou-
vent des frères remplacer leurs frères...
Le prince Dewawongse reçoit à présent les
malédictions de tout le monde d'avoir perdu
le Mékong.
Suit un portrait peu flatteur du mi-
nistre des affaires étrangères, frère du
roi de Siam, dont je supprime la partie
trop peu flattée, quoique très exacte.
Le prince Dewawongse ne subit aucune in-
fluence. Il n'écoute que son ambition, qui est
de gouverner et de s'enrichir bon gré mal
gré. B obtient du Roi ce qu'il désire psi' son
influence et l'influence de ses soeurs, la pre-
mière et la deuxième Reine. Mais cette estime
sarn ruinée prtr son jeune frère, le prince Sa-
vasti, qui se trouve en ce moment en Eu-
rope. j
Le prince Savasti est actuellement à
Paris, où il confère, en compagnie du .
prince Wadhana et d'un secrétaire an- |
glais avec M. Hanotaux, pour le nouveau
traité de commerce franco-siamois. (
Cette lettre n'a pas besoin de commen- j
taires.
Henri Bryois. I
AD CONSEIL D'ÉTAT
Le très intéressant arrêt rendu l'autre
semaine par le Conseil d'Etat,et que nous
avons sommairement signalé, est çà et
là l'objet de commentaires très variés
et, à ce qu'il semble, un peu confus.
On se souvient du conflit qui s'était
élevé, il y a environ dix-huit mois, entre
M. le curé et la municipalité de Saint-
Denis, à l'occasion d'un arrêté du ci-
toyen maire de Franciade, M. Walter,
devenu député, - qui prétendait, au
nom de la liberté de conscience, inter-
dire non seulement les défilés de pro-
cessions, mais encore l'exhibition des
emblèmes religieux dans les rues de
Saint-Denis.
A peine l'arrêté était-il rendu que M.
l'abbé Itenet interjetait appel devant le
Conseil d'Etat.
Le curé de Saint-Denis ne faisait là
qu'user d'un droit formellement établi
par Je Concordat; car la loi de Germi-
nal, après avoir prescrit qu' « il y aura
recours au Conseil d'Etat dans tous les
cas d'abus de la part des supérieurs et
autres personnes ecclésiastiques », et
fourni l'énumération de ces abus possi-
bles, ajoute, dans un équitable esprit
de réciprocité {art. 7 du Titre /"),
qu' « il y aura pareillement recours au
Conseil d'Etat, s'il est porté atteinte à
l'exercice public du culte et à la liberté
que les lois et les règlements garantis-
sent à'ses ministres ».
En vertu de ce texte précis, M. l'abbé
Itenet revendiquait donc la liberté d'exer-
cer, en dépit de l'hostilité municipale,
son ministère dans Saint-Denis; il la
revendiquait en un long mémoire, très
bien fait, paraît-il, et qui, venu à l'ins-
truction il y a environ deux mois, était
jeudi dernier, sous la présidence de l'émi-
nent président Laferrière, et en pré-
sence de toutes les sections du Conseil
réunies, l'objet de la discussion solen-
nelle et de l'arrêt dont nous avons parlé.
Le citoyen Walter s'était, on l'a rap-
pelé, fondé, pour interdire les défilés
de processions dans Saint-Denis sur l'ar-
ticle 45 de la loi de Germinal, suivant
lequel « aucune cérémonie religieuse
n'aura lieu hors des édifices consacrés
au culte catholique, dans les villes où
il y a des temples destinés à différents
cultes ».
Placé en face de la loi que son rôle est
justement de faire respecter, le Conseil
d'Etat ne pouvait que ratifier sur ce
point la décision vexatoire mais stricte-
ment légale de la municipalité de Saint-
Denis... et c'est ce qu'il fit. Mais il s'en
est tenu là ; et sur la seconde partie de
l'arrêté qui prétendait interdire l'exhibi-
tion des emblèmes religieux, il a donné
tort au maire socialiste, déclarant en
son arrêt que la croix qui décore le
drap d'un mort ou le crucifix qui suit un
cercueil sont des « emblèmes » sur les-
quels aucune loi n'a jamais permis que
quiconque portât la main.
L'arrêt de jeudi est donc pour la mu-
nicipalité de Saint-Denis une demi-dé-
faite; et l'on a prétendu - ce qui est plus
grave - que cette demi-défaite attei-
gnait le gouvernement lui-même.
Il paraîtrait, en effet, que, au cours du
débat, le Directeur des cultes, M. Du-
may, conseiller d'Etat, lui aussi, et.com-
missaire du gouvernement, aurait pris
avec une certaine vivacité.la défense de
l'ex-maire révolutionnaire, et déclaré
que c'était « au nom du gouvernement »
qu'il réclamait du Conseil d'Etat la ra-
tification intégrale de son arrêté...
Or, on nous affirme - et nous ne pen-
sons pas être démentis, eh reproduisant
cette affirmation - que jamais aucune
instruction de cette nature ne fut don-
née, ni par M. Spuller ni par M. Casimir-
Perier, au Directeur des cultes ! On ne
voit pas, en effet, quel intérêt eût pu
avoir le gouvernement à lier publique-
ment sa cause, en une circonstance aussi
malencontreuse, à celle d'un maire ré-
volutionnaire, son ennemi...
Est-ce à dire que M. Dumay se soit
prévalu devant le Conseil d'approbations
ou d'instructions imaginaires? Point du
tout, et personne ne conteste ni la sin-
cérité ni la loyauté de M. Dumay. On fait
seulement remarquer que M. le Direc-
teur des cultes, qui est un homme très
fin, a pu, en se retranchant derrière la
prétendue approbation du gouverne-
ment., oublier ou feindre d'oublier que
l'incident Walter est vieux d'un an et
demi, et que nous avons, depuis ce
tèmps-là, changé de gouvernement plu-
sieurs fois,.. Duquel de ces gouverne-
ments M. le Directeur des cultes invo-
quait-il la doctrine? Il ne 1'^ pas dit.
Mais personne, au Conseil d'Etat, n'a
pensé un instant que ce fût celle de M.
Casimir-Perier.
Emile Berr.
» » .
LES EXPÉRIENCES D'ASSAINISSEMENT
C'est décidément dimanche soir que
seront closes les expériences d'assai-
nissement par l'électricité (système
Hermite), dont le Figaro avait pris l'ini-
tiative.
Est modus in rébus, et les meilleures
choses n'ont qu'un temps. Au surplus,
les expériences en question auront assez
duré pour permettre à tous ceux qui ont
souci de l'hygiène publique de se rendre
compte de l'incontestable supériorité de
ce procédé original, à propos duquel il
s'est débité un peu partout, voire même
à la tribune du Palais-Bourbon, de si
prodigieuses... inexactitudes.
Des échantillons de la solution, élec-
trolytique, après et avant la lettre, ont
été prélevés, à .fins d'analyse, par tels
ou tels spécialistes ès-bactériologie. Nul
doute que les conclusions de ces savants,
autorisés entre tous, ne soient confor-
.mes au rapport, si remarquable et si
décisif, que vient de publier M. le doc-
teur Alain Piton, professeur à l'Ecole de
médecine navale, à la suite des expé-
riences organisées par la municipalité
de Brest.
Entre temps, des médecins (le docteur
Albert Filleau, par exemple,, et le doc-
teur Regnier) étudient les effets de
l'hermitine au point de vue thérapeu-
tique.
Qui vivra verra!
Il est probable..d'ailleurs, que de nou-
velles expériences, instituées sur d'au-
tres points de Paris, vont bientôt mettre
les retardataires et les incrédules à
même d'édifier définitivement leur reli-
gion.
E. a.
XjE SENAT
11 y a quelques jours, M. Griffe pros-
crivait et faisait proscrire par le Sénat
le mouillage des vins.
Aujourd'hui, - nouveau Fouquier-
Tinville, - le même ardent proscrip-
teur demande aux lois, aux justes lois,
de prohiber l'alcoolisation des vins.
Les ruines du palais du quai d'Orsay
vont disparaître : le Sénat, sur la propo-
sition de M. Trarieux, a voté leur res-
tauration; la Cour des comptes les réin-
tégrera. L'Union centrale des Arts dé-
coratifs, elle, ira au pavillon de Marsan.
Voici donc une question vidée. Mais
la Chambre ne sera pas contente, car
elle avait décidé tout le contraire I II est
vrai que M. Jonnart, ministre des tra-
vaux publics, est venu déclarer hier
qu'il était favorable au projet sénatorial.
Le Sénat s'est ajourné à jeudi, après
avoir confirmé ses décisions en ce qui
concerne les projets relatifs à la répara-
tion des erreurs judiciaires.
P. H.
^ -T- ?
LA VIE PARLEMENTAIRE
L'incident Dupuy-Ducret aura son dénoue-
ment aujourd'hui même en séance publique.
En effet, à la suite d'une réunion tenue hier
.par quelques députés de l'extrême gauche,
MM. Pelletait, Leydet et Mathé se sont ren-
dus chez le président de la Chambre pour l'in-
former de la décision prise par leur groupe.
M. Camille Pelletan - qui est celui des
trois qui prend toujours la parole - a ex-
posé à M. Dupuy qu'il n'avait pas voulu por-
ter la question à la tribune sans l'aviser offi-
ciellement;
Le président de la Chambre a déclaré qu'il
se verrait dans l'obligation de ne pas sortir
de la réserve qu'il s'était imposée et il a ré-
pété à M. Pelletan la phrase bien connue :
« Etant donnée la nature de la question,
» je n'ai rien à répondre. »
M. Pelletan ignorait encore, quand il fai-
sait sa visite, dans quels termes il saisirait la
Chambre de l'incident. Il est vraisemblable
cependant qu'il déposera un projet de résolu-
tion tendant à réduire les fonds secrets.
M. Dupuy - qui présidera la séance -
quittera son fauteuil au moment où M. Pelle-
tan effectuera son dépôt.
P. H.
LES ANARCHISTES
Nouvelles Arrestation»
Vingt-deux nouvelles arrestations d'a-
narchistes ou de gens ainsi désignés par
les inspecteurs de la brigade de recher-
ches ont été opérées hier. Voici la liste :
A PARIS
Bruneau, Amédée-Jean-Baptiste, ou-
vrier cordonnier, né le 14 juillet 1847, à
Châteauroux (Indre), marié, six enfants.,
demeurant 36, rue Saint-Honoré.
Buhr, Victor, ouvrier peintre, né le
3 août 1868, à Cologne (Allemagne), cé-
libataire, demeurant en garni, 127, rue
des Dames.
Cassa, Eugène-Pierre, né le 5 mars
1847, à Paris, marié, sept enfants, de-
meurant 24, rue de Ménilmontant,
établi fabricant d'étalages au n° 135 de
la même rue.
Cassa, Louis-Eugène, fils du précé-
dent, né le 25 octobre 1871, à Paris,
monteur en bronze, travaillant chez son
père, et demeurant avec lui.
Garnier, Auguste, dit Fourot, né le 10
janvier 1860, à Périgny-sur-Oignon
(Côte-d'Or), marié, deux enfants, jour-
nalier, 46, rue de Liancourt.
Grégoire, Aimé-Léopold, né le 17 juin
1847, à Bruxelles (Belgique), ouvrier en
pianos chez M. Prévost, 77, rue Saint-
Maur, veuf avec trois enfants, demeu-
rant 28, boulevard de Charonne.
Guénant, Louis-Désiré, né le 10 avril
1862, à Paris, comptable chez MM. Kay-
ser et Haas, 65, boulevard Beaumar-
chais, demeurant 12, rue des Panoyaux.
Haurock, Fritz-Wilhem, né le 21 juin
1860, à Lyck (Allemagne), doreur à la
fabrique de baguettes dite Société Fran-
çaise, 81, rue Claude Decaen, demeurant
75, même rue.
Joigneau, Alfred, né le 27 janvier 1853,
à Vucherins (Suisse), célibataire, ouvrier
cordonnier, demeurant 125, rue d'Abou-
kir.
Oudin, Clovis, né le 3 décembre 1844,
à Saint-Hilaire-le-Petit (Marne), marié,
deux enfants, mécanicien, demeurant
rue des Lilas, 43.
Parisot, Louis, né le 13 octobre 1856, à
Saint-Avold (Moselle), marié, sans en-
fants, ouvrier boulanger, demeurant 10,
cité de La Chapelle.
Robin, Joseph, né le 4 février 1854 à
Bourgneuf-en-Retz (Loire-Inférieure),
célibataire, terrassier chez M. lion, en-
trepreneur, demeurant 37, rue Frémi-
court.
Schoeffer, Charles, né le 20 juin 1866,
à Paris, célibataire, ébéniste,demeurant
16, rue Faidherbe.
Theuriet, Jean-Baptiste, né le 27 avril
1862, à Lyon,coiffeur, célibataire,vivant
avec Isabelle Boutinot, blanchisseuse,
125, rue des Boulets.
Veret, Octave, né le 23 septembre 1874,
à Paris, célibataire, employé chez M.
Eliacin, photographe rue Oberkampf,
demeurant 8, rue Champlain.
Villa, Jean,né le 24 juin 1855,à Farine-
d'Olmon (Italie), garçon maçon chez
M. Magne, 88, rue de La Roquette, ma-
rié, deux enfants, demeurant 9, rue
Lepeu.
DANS LA BANLIEUE
Borla, Jean-Michel, né à Sirie (Italie)
le 29 septembre 1847. Célibataire, mais
vivant avec Elisa-Blanche Royer, dont il
a un enfant. Ajusteur à l'usine de ca-
nons Hotchkiss, à Saint-Denis. Demeu-
rant à Saint-Denis, 5, rue de Strasbourg.
Cartan, Auguste, né le 9 août 1868, à
Saint-Florent (Cher), célibataire. Ou-
vrier verrier à l'usine Monnot, demeu-
rant 5, rue Michelet, à Pantin.
Colombet, Frédéric-Victor, né le 21
décembre 1865 à Prigonrieux (Dordo-
gne), marié. Marchand de charbon, 49,
rue Chaptal, à Levallois-Perret.
Lenfant, Emile, né le 22 décembre
1867, à Choisy-le-Roi ; célibataire ; céra-
miste à là porcelainerie, demeurant 8,
rue de la Raffinerie, à Choisy-le-Roi.
Mièle, Eugène-Paul, né le 31 octobre
1855 à Creil (Oise) ; marié, un enfant.
Estampeur chez M. Brot, rue de Seine,à
Choisy. Demeurant rue Pierre-Bie, à
Thiais (Seine).
Poirrier, Jacques-Etienne, né le 25 jan-
vier 1862, à Gien (Loiret), marié, sans
enfant, garçon distillateur chez.M. Bou-
nevey, place de l'Eglise, à Choisy-le-Roi.
Demeurant 8, rue du Pont, à Choisy.
Dans toute cette longue liste, pas un
nom connu. Ajoutons que la plupart des
gens arrêtés protestent énergiquement
contre la qualité d'anarchiste. Certains
habitent depuis cinq, six, dix ans, la
même maison-le premier, Bruneau,est
dans le même domicile depuis vingt
ans 1 et personne n'a jamais eu à se
plaindre d'eux.
Il est probable que ces arrestations
n'ont été faites que pour le fameux al-
bum-répertoire dont nous parlions hier
et que presque tous les prisonniers se-
ront relâchés d'ici deux jours.
Emile Henry
L'instruction de l'affaire de la rue des
Bons-Enfants, en ce qui concerne Emile
Henry, touche à sa fin. M. le juge d'ins-
truction Espinas l'a encore une der-
nière fois interrogé hier, afin d'essayer
d'avoir de lui quelques détails et d'arri-
ver à découvrir le nom de celui qui,
quoi qu'il prétende, l'a aidé dans cette
affaire. Ce soir ou demain matin, le
dossier sera remis au Parquet.
DANS LES DÉPARTEMENTS
ROUBAIX. - Cette après-midi, un anar-
chiste nommé Edouard Mario, ouvrier tisse-
rand congédié de l'établissement où il travail-
lait, il y a quinze jours, a tenté d'assassiner
son ancien patron, M. Cauchies, tisseur à fa-
çon, au moment où ce dernier sortait de l'a-
telier; il s'est élancé sur Jui et lui a porté trois
coups de tranchet à la tête.
Arrêté, il n'a pas dissimulé que c'était ses
opinions anarchistes qui l'avaient porté à
tuer son patron. _
Les blessures de M. Cauchies ne sont pas
graves.
ARRAS. - Une fusée de mine destinée à
faire explosion a été jetée ce soir par le sou-
pirail de la cave, dons la maison du mineur
Sauvage, à. Billy-Montigny. On a pu l'éteindre
à temps.
XXX.
A L'ÉTRANGER
M MMM DE M. GLADSTONE
Ce qui hier matin n'était encore qu'une
probabilité est maintenant une certi-
tude. M. Gladstone quitte le pouvoir. Il
remettra aujourd'hui sa démission entre
les mains de la Reine qui désignera
qui bon lui semblera pour présider
le Conseil des ministres. M. Glads-
tone, avant de s'en aller, a voulu tirer,
hier encore, un de ces feux d'artifice
oratoires dont il est coutumier. Il a
parié à la Chambre des communes et
de la plus admirable façon, mais il
a surtout joué un tour extraordinaire
à son successeur, puisque ce successeur
doitêtre lord Roseberry.
M. Gladstone a attaqué avec une vi-
gueur sans pareille la Chambre des
lords. Il a déclaré qu'il y avait assez
longtemps que les lords faisaient échouer
comme à plaisir toutes les réformes
proposées par le gouvernement et vo-
tées par les Communes ; qu'il y avait
là une anomalie qui froissait les idées
modernes, qu'il fallait que cet état
de choses cessât et qu'une des ré-
formes que le parti libéral devait avoir
le plus à coeur de mener à bien, c'était
la réforme de la Chambre des lords et
la diminution de son droit de veto! On
racontait hier à Londres que le vieux
Premier avait décidé de prononcer ce
discours sans aucunement prévenir ses
collègues du cabinet, et que ce fut par
hasard que lord Roseberry, prévenu,
put accourir à la Chambre des commu-
nes pour entendre M. Gladstone tonner
contre un des privilèges qui tiennent le
plus au coeur du fat boy d'Eaton.
Il est de fait que, par cette manoeuvre
delà dernière heure, M. Gladstone a fait
qu'il est très difficile de confier les des-
tinées du parti libéral à un lord - car
on ne voit pas un lord demander qu'on
diminue les privilèges de la Chambre
dont il fait partie. Et de plus, un pareil
choix serait la dislocation immédiate du
parti libéral, tel qu'il existe actuelle-
ment à la Chambre des communes. Une
soixantaine de radicaux sont, aussitôt
que la nouvelle de la retraite de M.
Gladstone est devenue certaine, allés
trouver le whip du parti, M. Marjori-
banks, et lui ont déclaré qu'ils vote-
raient contre tout ministère présidé par
un lord. Or, comme aux meilleurs jours
la majorité libérale de la Chambre des
communes est de 36 voix, on voit ce
qu'il adviendra si la Reine choisit lord
Roseberry.
En tous cas, la situation du parti
libéral n'est pas bonne et il n'était pas
besoin de cette nouvelle difficulté pour
reculer indéfiniment la solution de la
cause irlandaise dont M. Gladstone est
le plus ardent défenseur.
Jacques St-Cèra.
NOUVELLES
PAU DÉPÊCHES DE NOS CORRESPONDANTS
M. GLADSTONE
Londres, 2 mars.
On annonce que M. gladstone aurait pré-
senté sa démission à la Reine, ce soir. La
Reine l'aurait acceptée, en exprimant ses re-
grets.
M. Gladstone aurait recommandé à la Heine
le choix de lord Roseberry.
Le Conseil privé se réunira demain.
On télégraphie d'Epsom, dix heures du soir :
« Lord Roseberry vient de recevoir de la
Reine l'ordre de se rendre à Windsor demain,
à trois heures et demie de l'après-midi.
» Lord Roseberry accepterait le poste de
premier ministre.
» On croit que le cabinet ne subira que
deux modifications. »
UNE ALLOCUTION DU SAINT-PÈRE
Rome, 2 mars.
Le Pape a reçu aujourd'hui le Sacré-Collège
qui lui a exprimé ses voeux à l'occasion du
double anniversaire de sa naissance et de
son couronnement.
Le Saint-Père, très bien portant, a répondu
par le discours suivant :
« Au déclin de la vie, nous continuerons
jusqu'au dernier jour à nous dévouer afin que
l'action bienfaisante de l'Eglise soit univer-
sellement sentie. Le besoin est en grand, car
les concepts d'honnêteté, de justice, d'auto-
rité, de liberté et des droits et des devoirs so-
ciaux ont été bouleversés. »
L'Eglise, dit Léon XM, s'efforce de rappe-
ler aux nations les principes de foi et de mo-
rale, d'indiquer les vraies causes des maux,
de dénoncer les desseins francs-maçonni-
ques, d'harmoniser les institutions .utiles
avec la vérité et la justice, d'inspirer la vie
chrétienne aux familles, l'équité et la charité
aux classes sociales, la rectitude aux gou-
vernants, la soumission chez les peuples, et
chez tous le désir de la paix venant de Dieu.
Enfin l'Eglise restaurera les études par des
règles de sagesse chrétienne, comme l'a fait
la récente Encyclique sur l'interprétation des
Saintes-Ecritures.
Le Pape termine en disant :
« Nous désirons que les germes semés par
l'action de l'Eglise donnent une moisson
abondante, et recevez-en, comme gage, notre
bénédiction. »
Berlin, 2 mars.
LaCommission chargée d'examiner le traité
de commerce russo-allemand se compose de
5 conservateurs, 3 membres du parti de l'Em-
pire, 4 libéraux-nationaux, 8 membres du
centre, 3 libéraux, 1 polonais, 1 antisémite et
3 socialistes, soit 14 membres favorables au
traité, 11 défavorables et 3 douteux.
Le comte Doenhoff a déclaré à ses électeurs,
à Koenigsberg, que le prince de Bismarck lui
a affirmé que le rejet du traité germano-russe
signifierait la guerre,'ce qui fait présumer
que. les nationaux libéraux voteront pour le
traité et en assureront l'adoption.
On croit.que M. Miquel donnera sa démis-
sion après le vote du traité ; il ressort claire-
ment de son discours d'hier qu'il ne partage
pas les opinions de M. de Caprivi, en fait de
politique commerciale.
M. Holstein, conseiller intime au ministère
des affaires étrangères, a provoqué le comte
Herbert de Bismarck en duel. Le comte Her-
bert de Bismarck a refusé de se battre avec
M. Holstein.
Des propos injurieux, tenus par le comte
Herbert, auraient motivé cette provocation.
Vienne, 2 mars.
L'échange des télégrammes entre M. Carnot
et l'Empereur a produit la meilleure impres-
sion et a causé une. grande satisfaction.
L'Extrablatt de ce soir dit que ces télé-
grammes ont trouvé un écho parmi les peu-
ples des deux pays. Ce journal exprime le
Voeu que les relations austro-françaises de-
viennent toujours plus amicales.
Rome, 2 mars.
En Sicile, sur plusieurs points couverts de
neige, les paysans manquent de farine. Les
municipalités de Lentini et Mascalucia ont
dû faire des distributions de pain, mais in-
suffisantes. Des familles entières sont sans
abri et, par un froid excessif, manquent de
vêtements et de nourriture.
Montevideo, 2 mars
Le docteur José Ellauri, qui avait été pré-
sident pendant quelque temps en 1873, a été
élu président par 54 voix.
Il n'y a pas eu de désordres.
Mulhouse, 2 mars.
Un volontaire d'un an nommé Zierer fut
puni il y a deux mois d'une peine de quatre
semaines de prison de rigueur, c'est-à-dire
au régime du pain sec et de l'eau claire, pour
avoir répondu en riant à un sous-officier, en
dehors du service : « Je resterais bien au ré-
giment si nous étions Français. »
Le ministre de la guèrre, alors qu'on
croyait l'affaire oubliée, vient d'infliger deux
ans de forteresse au volontaire Zierer.
REVUE DES JOURNAUX
Mgr Servonnet, évêque de Digne,
ayant envoyé au souverain pontife le
mandement de carême sur le quatrième
commandement, qui lui valut de nom-
breuses et violentes attaques de la part
des journaux réfractaires à la direction
du Saint-Siège, a reçu de S. Em. le car-
dinal Rampolla une lettre de félicita-
tion dont nous détachons les. passages
suivants :
Sa Sainteté a tenu pour agréable l'hom-
mage de Votre Seigneurie, et en apprenant
que le zèle avec lequel elle s'applique à suivre
la direction donnée aux catholiques de
France par les récentes Encycliques et Lettres
pontificales lui a occasionné quelque désa-
grément, l'auguste Pontife m'a chargé de
l'exhorter à ne pas perdre courage, mais à
se souvenir que toute bonne cause a toujours
été contredite et contrariée dans la personne
de ses plus chauds défenseurs.
D'ailleurs, Votre Seigneurie, en s'inspirant
des enseignements du Souverain Pontife et en
travaillant efficacement à les propager dans
son diocèse, doit trouver dans ses efforts cette
satisfaction qui accompagne toujours l'ac-
complissement d'un devoir positif et peut at-
tendre en paix le jour où la vérité sera rendue
manifeste, même aux yeux de ceux qui, au-
jourd'hui, sont les moins disposés à l'accueil-
lir.
La Revue rétrospective a retrouvé
dans un catalogue d'autographes une
piquante appréciation du journalisme
par Edmond About.
Plus je vais dans le journalisme, écrit-il,
plus je reste convaincu que c'est une car-
rière nuisible à tout écrivain connu qui peut
faire autre chose. Le public des journaux
quotidiens veut qu'en échange de ses sous on
lui donne de l'actualité. Or, l'actualité est
comme la pâtisserie : il n'en reste rien au
bout de huit jours.
Cette appréciation de l'ancien direc-
teur du XIXe Siècle est curieuse à rap-
procher du jugement que M. Brunetière
vient de porter sur la presse, dans son
discours de réception à l'Académie fran-
çaise.
*** Dans la Revue blanche, deux docu-
ments sur Stendhal, d'une réelle impor-
tance littéraire et historique :
Les « Avis aux têtes légères », datés
du 1er octobre 1824, ont été écrits par
Stendhal pour ses deux soeurs, qui al-
laient faire un voyage en Italie.
Les « Impressions d'audience de Mi-
chel Duffléard » nous donnent la clef de
le Rouge et le Noir; elles nous fournis-
sent les documents dont Beyle se servit
pour écrire l'histoire de Julien Sorel.
Les grandes lignes du roman, les per-
sonnages principaux : Mme de Rénal et
même Mathilde de La Môle, sont indi-
qués dans ce procès-verbal, écrit, du
reste, non sans talent.
Le commandant Monteil publie,
dans le troisième volume de la Revue de
Paris, une remarquable étude sur «Tom-
bouctou et les Touareg». Les conclu-
sions du vaillant explorateur sont les
suivantes :
Au point de vue politique, notre occu-
pation ne saurait donner d'importance
à une ville qui, par sa situation, n'en
peut posséder. Au point de vue du mar-
ché, la décadence de Tombouctou ne
peut que s'accentuer parce que, de plus
en plus, les routes se multiplient pa»
lesquelles les produits manufacturés
arrivent sur les marchés du Soudan que
Tombouctou pouvait pourvoir.
Au point de vue touareg, la prise de
Tombouctou porte un coup fatal à l'in-
fluence de ces peuplades. Ce sont de
gros revenus qui leur échappent, et ce
qui fait pour le présent peut-être la joie
des commerçants arabes, délivrés de
leurs intéressés protecteurs, pourra
faire leur perte dans l'avenir, car les
Touareg empêcheront le passage des
caravanes venant du Sahara.
Telles sont les conséquences de l'oc-
cupation de Tombouctou. « Maîtres de
Tombouctou, désormais, dit M. Mon-
teil, nous devons y rester. L'honneur du
pavillon est engagé ! »
*** Un dialogue amusant, dans le
Charivari:
- Qu'est-ce que c'est donc que ce père
Peinard qu'on a poursuivi?
- Encore quelque pauvre religieux
qu'on persécute !
Le Liseur.
A L'HOTEL DE VILLE
Il y a, à l'Hôtel de Ville,deux Commissions
des omnibus et tramways : celle du Conseil
municipal, celle du Conseil général. Comme
elles ont des intérêts communs, elles se sont
réunies hier en Commission mixte.
On y a discuté, une dernière fois, le rapport
qui va être distribué aux conseillers et dont
l'épreuve seule est terminée. Ce rapport inté-
resse vivement les Parisiens à cause des très
nombreuses lignes dont la création ou le pro-
longement sont demandés.
Si la Préfecture de police a approuvé la plu-
part des propositions, il n'en est pas de même
de la Compagnie, qui ne voudrait naturelle-
ment créer ou prolonger que les lignes qui lui
sont avantageuses.
Comme chaque conseiller plaidera pour son
quartier, il est impossible de prévoir tous les
résultats de la discussion. Il est néanmoins
certain que Passy et Auteuil, où se sont por-
tés de nombreux Parisiens, seront particuliè-
rement favorisés.
Nous avons parlé de l'entente survepue
entre la Commission des indemnités et le pro-
priétaire de la maison de la rue Taitbout qui
est sise dans l'axe du boulevard Haussmann.
Le prix de 2,220,000 francs a été finalement
proposé et accepté. Reste à savoir si le Con-
seil ratifiera le contrat. Quelques-uns de ses
membres reconnaissent que l'achèvement du
boulevard Haussmann est moins une ques-
tion de quartier que d'intérêt public, mais
beaucoup déclarent d'ores et déjà qu'ils
voteront contre le projet... pour une miséra-
ble raison absolument étrangère à la cause
et qu'il vaut mieux taire.
Petites nouvelles :
L'Association des artistes dramatiques
est autorisée à accepter la donation d'une somme
de 27,562 fr. 50.
L'exposition des projets de décoration delà
mairie de Bagnolet sera ouverte dans les salons
à arcades à partir d'aujourd'hui jusqu'au 13 mars.
*-~ M. Bassinet, se rendant compte du dan-
ger que courent les sapeurs-pompiers quand, sor-
tant d'une atmosphère surchauffée, ils remontent
sur leurs voitures découvertes, demande qu'un
service de voitures fermées soit mis à leur dis-
position devant les lieux d'incendie.
Nous rencontrons à la bibliothèque M.
Maurice Binder qui nous annonce qu'il a con-
voqué la veille, en réunion publique, ses
électeurs. Il leur a soumis son intention de
garder les deux sièges de conseiller et de dé-
puté. L'assemblée l'a autorisé à rester à l'Hô-
tel de Ville.
Henri Hamoise.
? . .-: y :--:--- ;-
N ouvelles Diverses
LB LENDEMAIN DE LA MI-CARÊME
Nous l'avons dit, les confetti ont été pro-
jetés sur la voie publique en quantité si con-
sidérable, pendant la soirée d'avant-hier et
la journée d'hier, que l'épaisseur de ces petits
ronds de papier avait atteint sur la chaussée,
principalement de la Madeleine à la place'de
la République, une épaisseur de près de trois
centimètres. Et les arbres ! Les branches dis-
paraissaient sous les longues spirales des
serpentins, et ce n'eût pas été une mince
tâche pour les employés aux plantations de la
Ville d'avoir à débarasser les platanes de nos
promenades de ces rubans multicolores, si la
pluie ne fût venue, fort à props, leur simpli-
fier la besogne.
Dès la pointe du jour, une armée de ba-
layeurs a pris possession de la grande ligne
des boulevards et les travailleurs ont pu, non
sans peine et avec le concours des balais-
rouleaux, entasser sur les bas côtés des mon-
ticules de confetti que l'eau, répandue à pro-
fusion dans les ruisseaux, entraînait ensuite
dans les bouches d'égout.
Mais avant les balayeurs, des maraudeurs,
des camelots d'occasion avaient déjà fait une
ample moisson de ces minuscules projectiles
devenus si à la mode et qu'ils ont été reven-
dre ensuite à des papetiers en gros, au prix
de cinq francs les cent kilos. Rassurez-vous
cependant, chers lecteurs, ces confetti souillés
par la boue seront remis au pilon et livrés à
la vente l'année prochaine dans un état de
propreté qui ne laissera rien à désirer.
A côté des quelques accidents que nous
avons signalés, nous ne devons pas oublier
de mentionner les arrestations, rares d'ail-
leurs, de pickpockets. C'est surtout sur les
boulevards Montmartre et des Italiens que
ces honnêtes messieurs ont « travaillé ». Cinq
d'entre eux, surpris la main dans lés poches
de leurs voisins ou plutôt de leurs voisines,
ont été conduits chez M. Mouquin, commis-
saire de police. Ils étaient tous nantis de bi-
joux et de porte-monnaie dont ils n'ont pu in-
diquer la provenance. Ces voleurs à la tire
ont été envoyés au Dépôt.
TENTATIVE DE MEURTRE
Une affaire assez étrange, et qui n'est pas
encore complètement éclaircie, s'est passée
avant-hier soir, boulevard de la Gare, 305.
A cette adresse habite un nommé François
Castien, sujet belge, âgé de trente-deux ans,
brocanteur. Cet individu est réputé dans le
quartier pour un « mauvais coucheur ».
Se trouvant dans sa boutique, son attention
fut attirée, vers neuf heures - c'est du moins
ce qu'il a déclaré au commissaire de police -
par les allées et venues d'un jeune homme
qui s'arrêtait de temps en temps à la devan-'
ture. Prenant ce garçon pour un malfaiteur
n'attendant que le moment propice pour le
dévaliser, le brocanteur s'arma de son revol-
ver et fit bonne garde,caché derrière un vieux
meuble. Tout à coup la porte s'ouvrit, li-
vrant passage au promeneur. Alors Castien
bondit hors de sa cachette et fit feu à plu-
sieurs reprises sur l'intrus, qui tomba frappé
à la tête.
Au bruit des détonations, des voisins arri-
vèrent.Le blessé,un jeune homme de dix-sept
ans, Léon Beauté, fut transporté immédiate-
ment à l'hôpital de la Pitié, où son état fut
jugé très grave.
M. Bolot, commissaire de police, après
avoir recueilli du meurtrier les explications
que nous venons de donner, l'a envoyé au
Dépôt.
LES CAMBRIOLEURS
Ils font, en ce moment, parler d'eux plus
que jamais.
M. Georges Robin, conducteur des ponts
et chaussées, demeurant 104, boulevard de
Clichy,était descendu dans Paris jeudi, après-
midi, pour voir passer la Reine des Reines et
son joyeux cortège. Quand il rentra, il trouva
la porte de son appartement fracturée et les
tiroirs des meubles complètement vides. Des
malfaiteurs avaient pénétré chez lui et lui
avaient volé, en plus d'une somme de 10,000
francs, tous ses bijoux et ses vêtements.
Dans la même journée, M. Bourgon, artiste-
peintre, habitant au 128 ter du susdit boule-
vard, a 4t4 victime d'un. vol commis dans d«a
LE FIGARO - SAMEDI 3 MARS 1894
J'entends bien; mais puisqu'à présent
on en est venu à incorporèr tout le con-
tingent et que, d'autre part, vous dites,
avec raison peut-être, qu'il npus faut
plus de monde encore, le moment n'est-
il pas venu d'ouvrir toutes grandes les
portes de l'armée active aux anciens
soldats.rengagés?
Ne serait-ce pas le moyen le plus sim-
ple d'augmenter nos effectifs d'une ma-
nière notable, sans accroître le chiffre
du contingent, ce que je crois impossi-
ble ? Et ne serait-ce pas surtout la meil-
leure manière d'augmenter, dans une
proportion énorme, la qualité et la va-
leur de cet ensemble qu'on appelle la
troupe ?
Car c'est là, encore une fois, ce que
nous devons rechercher à tout prix.
Et il faut avoir enfin le courage de le
dire , nous sommes, en réalité, in-
consciemment ou non, dans la voie où
bientôt nous aurons encore en France
des milices, mais non plus une armée ;
les partisans du nombre à outrance ne
se doutent pas, ou plutôt ne veulent pas
voir l'affaiblissement permanent et
continu que subit parla, depuis bien-
tôt quinze ans, notre puissance mili-
taire.
Oui, si nous voulons avoir une armée
digne de ce nom, il nous faut non seule-
ment de bons cadres d'officiers et de
sous-officiers, mais il nous faut absolu-
ment aussi, dans chaque unité de com-
bat, un noyau de soldats de carrière qui
puisse, en temps de paix, faire non pas
l'instruction, mais l'éducation militaire
du conscrit ; qui puisse surtout, en temps
de guerre, conduire et maintenir au feu,
sous le danger intense du combat mo-
derne, la cohue de soldats inexpérimen-
tés qui viendront, du jour au lendemain,
tripler une compagnie dont les plus an-
ciens n'auront pas deux ans de présence
sous le drapeau, et qui, par leur nombre
même, échapperont, le plus souvent, -à
l'action directe de l'officier.
Non, toute illusion à cet égard serait
coupable, il n'y a pas d'armée véritable^
ment solide sans esprit militaire, et nos
malheurs auraient dû, au contraire,
nous conseiller de l'entretenir comme
l'etincelle précieuse qui peut un jour
rallumer le feu sacré. Et il n'y a pas
non plus, il n'y aura jamais, quoi qu'on
fasse, d'esprit militaire dans une ar-
mée sans vieux soldats ; non pas les
ramollots de l'absurde légende,blanchis
sous le harnois mais les anciens soldats,
jeunes encore et vigoureux, les solides
qui résistent quand même, les forts qui
ne bronchent pas, quoi qu'il advienne,
qui sont le ciment que rien ne peut rem-
placer, le lies sans lequel une troupe
jeune et impressionnable, si vaillante
soit-elle, peut devenir, sous l'influence
de circonstances critiques, nn ingou-
vernable troupeau.
C'est ce soldat qu'il nous iaut mêler
aujourd'hui à l'armée nouvelle; on peut
et on doit le trouver, il existe encore.
On trouvait bien autrefois, en grand
nombre, des remplaçants-, on trouve-
rait certainement de même aujourd'hui
beaucoup d'hommes disposés à rester
au régiment, soit par goût de la profes-
sion des armes, soit pour y trouver, à
présent que la vie est partout si dure,
une situation meilleure que celle qu'ils
auraient dans la vie civile.
Je sais bien que, dans un accès un
peu païf d'illusion patriotique, l'Assem-
blée nationale avait inscrit, en tête delà
toi de 1872, le principe « il n'y a, dans les
troupes françaises, ni primes en argent,
ni prix quelconque.d'engagement ». Une
pompeuse formule, pour ne pas dire
an e phrase creuse, dont l'expérience a,
d'ailleurs, promptement fait justice.
c'est donc, encore une fois, une ques-
tion d'argent, pas autre chose.
Voilà l'effort nécessaire; demandez-
nous le, monsieur le ministre de la
guerre; vous devez savoir que la Com-
mission de l'armée vous soutiendra ré-
solument.
Et quand nous aurons seulement 15 à
20,000 vieux soldats dans nos régiments
de l'Est, nous pourrons dire avec assu-
rance aux voisins de l'autre côté du
Rhin : « Quand vous voudrez, cama-
rades! »
Et si je dis que nous n'avons pas le
droit d'attendre, c'est que ce sont préci-
sément les effectifs de paix de nos corps
de première ligne qui doivent être ren-
forcés, au plus vite et à tout prix.
Je ne veux pas faire de stratégie, ni
surtout rien dire de trop en pareille ma-
tière. Mais il est évident, pour tout le
monde, que les conditions probables de
la guerre future se modifient chaque
jour.
Il y a peu d'années encore on pouvait
compter que la bataille ne s'engagerait
qu'avec des troupes complètemént mo-
bilisées de part et d'autre. En est-il de
même aujourd'hui ? Je ne le pense pas,
et j'estime,au contraire, quel action dé-
cisive se jouera, dès les premiers jours,
entre des troupes qui n'auront dans le
rang que leurs effectifs de paix ren-
forcés.
Eh bien, une chose ne change pas,
c'est le coeur de l'homme ; et comme
dans le combat deux actions morales,
bien plus que deux actions matérielles,
sont en présence, c'est, en somme, de-
main comme toujours, la qualité seule
quiiera l'action réelle.
J'en appelle à tous ceux qui, ayant su
voir, savent se souvenir.
Vicomte do Montfort,
Député de la Seine-Inférieure.
LA MALADIE OU ROI DE SIAM
Lors de mon départ de Bangkok, en
novembre dernier, je savais que le roi
de Siam était d'une santé des plus chan-
celantes. Il allait, pourtant, venait, va-
quait à ses devoirs et offices royaux. Ja-
mais souverain ne fut moins inactif. Les
négociations franco-siamoises termi-
nées, il recevait solennellement en au-
dience de départ, dans son palais d'été
de Bangpain (le Versailles de Bangkok),
le plénipotentiaire de France et sa suite.
Au dîner de gala, Sa Majesté, radieuse,
très cordiale à ses hôtes, mangea de
tous les plats, but de tous les vins les
plus variés, et l'un des convives me ma-
nifesta son étonnement admiratif par
ces mots : « Oh ! le Roi, quelle rude
fourchette I »
Puis le Roi retomba malade et s'alita ;
puis il se releva encore, et tant bien que
mal reprit sa tâche, ses réceptions, ses
audiences. Il célébra des fêtes, celle des
eaux notamment, fit sa tournée annuelle
des pagodes. Je l'aperçus un soir, la tête
à>la portière de son carrosse, précédé et
escorté de ses gardes à cheval en tunique
rouge, .toutes les troupes siamoises sous
les armes formant la haie sur son pas-
sage. Le Roi rentrait au palais venant
d'assister à une cérémonie religieuse. Il
me sembla pâle, fatigué, triste, les yeux
ressortant très clairs sur son teint
bistré.
Aujourd'hui le courrier de Siam m.'ap.
porte une intéressante lettre, dont je
m'empresse de taire le nom du signa-
taire,étant donnée sa situation officielle
à la Cour même. Voici quelques extraits
de cette lettre :
Le Roi a célébré le 25« anniversaire de son
règne et a dépensé beaucoup d'argent, à peu
près 500,000 francs, pour nous montrer que
les trois millions de francs n'ont point
appauvri, le Siam. Le Roi a distribué des
médailles militaires partout en l'honneur de
la victoire de Paknam contre vos marins de
France.
Depuis les fêtes, le Roi se trouve très indis-
posé, même je dirai très malade. Depuis son
enfance, le Roi a été poitrinaire, et le coup
de Paknam, l'ultimatum et le reste, ont été
suffisants pour chavirer le peu de force morale
et physique de Sa Majesté siamoise.Le méde-
cin américain qui le soigne lui donne deux
ou trois mois. Je le crois assez avancé dans
la phtisie. Il a la respiration très troublée.
Là question de la mort du Roi est sérieuse,
parce qu'il y a deux partis : le premier, celui
des deux frères du Roi ; le deuxième, celui
du prince héritier, neveu du prince Dewa-
wongse. Je crois que les mandarins, les
princes et les gens d'autorité dans cè pays -
moi certainement j'en ferai partie - seront
du côté des frères du Roi. (En c« cas, il y au-
rait le Roi et le second Roi.)
Si le prince héritier succède à son père, le
prince Dewawongse serait le véritable Roi.
Dans ce cas, les princes de la famille royale
ne se soumettraient jamais.
Dans les temps reculés, les princes héritiers
succédaient à leurs pères. Mais toujours il y
avait quelques rébellions, et l'on a vu sou-
vent des frères remplacer leurs frères...
Le prince Dewawongse reçoit à présent les
malédictions de tout le monde d'avoir perdu
le Mékong.
Suit un portrait peu flatteur du mi-
nistre des affaires étrangères, frère du
roi de Siam, dont je supprime la partie
trop peu flattée, quoique très exacte.
Le prince Dewawongse ne subit aucune in-
fluence. Il n'écoute que son ambition, qui est
de gouverner et de s'enrichir bon gré mal
gré. B obtient du Roi ce qu'il désire psi' son
influence et l'influence de ses soeurs, la pre-
mière et la deuxième Reine. Mais cette estime
sarn ruinée prtr son jeune frère, le prince Sa-
vasti, qui se trouve en ce moment en Eu-
rope. j
Le prince Savasti est actuellement à
Paris, où il confère, en compagnie du .
prince Wadhana et d'un secrétaire an- |
glais avec M. Hanotaux, pour le nouveau
traité de commerce franco-siamois. (
Cette lettre n'a pas besoin de commen- j
taires.
Henri Bryois. I
AD CONSEIL D'ÉTAT
Le très intéressant arrêt rendu l'autre
semaine par le Conseil d'Etat,et que nous
avons sommairement signalé, est çà et
là l'objet de commentaires très variés
et, à ce qu'il semble, un peu confus.
On se souvient du conflit qui s'était
élevé, il y a environ dix-huit mois, entre
M. le curé et la municipalité de Saint-
Denis, à l'occasion d'un arrêté du ci-
toyen maire de Franciade, M. Walter,
devenu député, - qui prétendait, au
nom de la liberté de conscience, inter-
dire non seulement les défilés de pro-
cessions, mais encore l'exhibition des
emblèmes religieux dans les rues de
Saint-Denis.
A peine l'arrêté était-il rendu que M.
l'abbé Itenet interjetait appel devant le
Conseil d'Etat.
Le curé de Saint-Denis ne faisait là
qu'user d'un droit formellement établi
par Je Concordat; car la loi de Germi-
nal, après avoir prescrit qu' « il y aura
recours au Conseil d'Etat dans tous les
cas d'abus de la part des supérieurs et
autres personnes ecclésiastiques », et
fourni l'énumération de ces abus possi-
bles, ajoute, dans un équitable esprit
de réciprocité {art. 7 du Titre /"),
qu' « il y aura pareillement recours au
Conseil d'Etat, s'il est porté atteinte à
l'exercice public du culte et à la liberté
que les lois et les règlements garantis-
sent à'ses ministres ».
En vertu de ce texte précis, M. l'abbé
Itenet revendiquait donc la liberté d'exer-
cer, en dépit de l'hostilité municipale,
son ministère dans Saint-Denis; il la
revendiquait en un long mémoire, très
bien fait, paraît-il, et qui, venu à l'ins-
truction il y a environ deux mois, était
jeudi dernier, sous la présidence de l'émi-
nent président Laferrière, et en pré-
sence de toutes les sections du Conseil
réunies, l'objet de la discussion solen-
nelle et de l'arrêt dont nous avons parlé.
Le citoyen Walter s'était, on l'a rap-
pelé, fondé, pour interdire les défilés
de processions dans Saint-Denis sur l'ar-
ticle 45 de la loi de Germinal, suivant
lequel « aucune cérémonie religieuse
n'aura lieu hors des édifices consacrés
au culte catholique, dans les villes où
il y a des temples destinés à différents
cultes ».
Placé en face de la loi que son rôle est
justement de faire respecter, le Conseil
d'Etat ne pouvait que ratifier sur ce
point la décision vexatoire mais stricte-
ment légale de la municipalité de Saint-
Denis... et c'est ce qu'il fit. Mais il s'en
est tenu là ; et sur la seconde partie de
l'arrêté qui prétendait interdire l'exhibi-
tion des emblèmes religieux, il a donné
tort au maire socialiste, déclarant en
son arrêt que la croix qui décore le
drap d'un mort ou le crucifix qui suit un
cercueil sont des « emblèmes » sur les-
quels aucune loi n'a jamais permis que
quiconque portât la main.
L'arrêt de jeudi est donc pour la mu-
nicipalité de Saint-Denis une demi-dé-
faite; et l'on a prétendu - ce qui est plus
grave - que cette demi-défaite attei-
gnait le gouvernement lui-même.
Il paraîtrait, en effet, que, au cours du
débat, le Directeur des cultes, M. Du-
may, conseiller d'Etat, lui aussi, et.com-
missaire du gouvernement, aurait pris
avec une certaine vivacité.la défense de
l'ex-maire révolutionnaire, et déclaré
que c'était « au nom du gouvernement »
qu'il réclamait du Conseil d'Etat la ra-
tification intégrale de son arrêté...
Or, on nous affirme - et nous ne pen-
sons pas être démentis, eh reproduisant
cette affirmation - que jamais aucune
instruction de cette nature ne fut don-
née, ni par M. Spuller ni par M. Casimir-
Perier, au Directeur des cultes ! On ne
voit pas, en effet, quel intérêt eût pu
avoir le gouvernement à lier publique-
ment sa cause, en une circonstance aussi
malencontreuse, à celle d'un maire ré-
volutionnaire, son ennemi...
Est-ce à dire que M. Dumay se soit
prévalu devant le Conseil d'approbations
ou d'instructions imaginaires? Point du
tout, et personne ne conteste ni la sin-
cérité ni la loyauté de M. Dumay. On fait
seulement remarquer que M. le Direc-
teur des cultes, qui est un homme très
fin, a pu, en se retranchant derrière la
prétendue approbation du gouverne-
ment., oublier ou feindre d'oublier que
l'incident Walter est vieux d'un an et
demi, et que nous avons, depuis ce
tèmps-là, changé de gouvernement plu-
sieurs fois,.. Duquel de ces gouverne-
ments M. le Directeur des cultes invo-
quait-il la doctrine? Il ne 1'^ pas dit.
Mais personne, au Conseil d'Etat, n'a
pensé un instant que ce fût celle de M.
Casimir-Perier.
Emile Berr.
» » .
LES EXPÉRIENCES D'ASSAINISSEMENT
C'est décidément dimanche soir que
seront closes les expériences d'assai-
nissement par l'électricité (système
Hermite), dont le Figaro avait pris l'ini-
tiative.
Est modus in rébus, et les meilleures
choses n'ont qu'un temps. Au surplus,
les expériences en question auront assez
duré pour permettre à tous ceux qui ont
souci de l'hygiène publique de se rendre
compte de l'incontestable supériorité de
ce procédé original, à propos duquel il
s'est débité un peu partout, voire même
à la tribune du Palais-Bourbon, de si
prodigieuses... inexactitudes.
Des échantillons de la solution, élec-
trolytique, après et avant la lettre, ont
été prélevés, à .fins d'analyse, par tels
ou tels spécialistes ès-bactériologie. Nul
doute que les conclusions de ces savants,
autorisés entre tous, ne soient confor-
.mes au rapport, si remarquable et si
décisif, que vient de publier M. le doc-
teur Alain Piton, professeur à l'Ecole de
médecine navale, à la suite des expé-
riences organisées par la municipalité
de Brest.
Entre temps, des médecins (le docteur
Albert Filleau, par exemple,, et le doc-
teur Regnier) étudient les effets de
l'hermitine au point de vue thérapeu-
tique.
Qui vivra verra!
Il est probable..d'ailleurs, que de nou-
velles expériences, instituées sur d'au-
tres points de Paris, vont bientôt mettre
les retardataires et les incrédules à
même d'édifier définitivement leur reli-
gion.
E. a.
XjE SENAT
11 y a quelques jours, M. Griffe pros-
crivait et faisait proscrire par le Sénat
le mouillage des vins.
Aujourd'hui, - nouveau Fouquier-
Tinville, - le même ardent proscrip-
teur demande aux lois, aux justes lois,
de prohiber l'alcoolisation des vins.
Les ruines du palais du quai d'Orsay
vont disparaître : le Sénat, sur la propo-
sition de M. Trarieux, a voté leur res-
tauration; la Cour des comptes les réin-
tégrera. L'Union centrale des Arts dé-
coratifs, elle, ira au pavillon de Marsan.
Voici donc une question vidée. Mais
la Chambre ne sera pas contente, car
elle avait décidé tout le contraire I II est
vrai que M. Jonnart, ministre des tra-
vaux publics, est venu déclarer hier
qu'il était favorable au projet sénatorial.
Le Sénat s'est ajourné à jeudi, après
avoir confirmé ses décisions en ce qui
concerne les projets relatifs à la répara-
tion des erreurs judiciaires.
P. H.
^ -T- ?
LA VIE PARLEMENTAIRE
L'incident Dupuy-Ducret aura son dénoue-
ment aujourd'hui même en séance publique.
En effet, à la suite d'une réunion tenue hier
.par quelques députés de l'extrême gauche,
MM. Pelletait, Leydet et Mathé se sont ren-
dus chez le président de la Chambre pour l'in-
former de la décision prise par leur groupe.
M. Camille Pelletan - qui est celui des
trois qui prend toujours la parole - a ex-
posé à M. Dupuy qu'il n'avait pas voulu por-
ter la question à la tribune sans l'aviser offi-
ciellement;
Le président de la Chambre a déclaré qu'il
se verrait dans l'obligation de ne pas sortir
de la réserve qu'il s'était imposée et il a ré-
pété à M. Pelletan la phrase bien connue :
« Etant donnée la nature de la question,
» je n'ai rien à répondre. »
M. Pelletan ignorait encore, quand il fai-
sait sa visite, dans quels termes il saisirait la
Chambre de l'incident. Il est vraisemblable
cependant qu'il déposera un projet de résolu-
tion tendant à réduire les fonds secrets.
M. Dupuy - qui présidera la séance -
quittera son fauteuil au moment où M. Pelle-
tan effectuera son dépôt.
P. H.
LES ANARCHISTES
Nouvelles Arrestation»
Vingt-deux nouvelles arrestations d'a-
narchistes ou de gens ainsi désignés par
les inspecteurs de la brigade de recher-
ches ont été opérées hier. Voici la liste :
A PARIS
Bruneau, Amédée-Jean-Baptiste, ou-
vrier cordonnier, né le 14 juillet 1847, à
Châteauroux (Indre), marié, six enfants.,
demeurant 36, rue Saint-Honoré.
Buhr, Victor, ouvrier peintre, né le
3 août 1868, à Cologne (Allemagne), cé-
libataire, demeurant en garni, 127, rue
des Dames.
Cassa, Eugène-Pierre, né le 5 mars
1847, à Paris, marié, sept enfants, de-
meurant 24, rue de Ménilmontant,
établi fabricant d'étalages au n° 135 de
la même rue.
Cassa, Louis-Eugène, fils du précé-
dent, né le 25 octobre 1871, à Paris,
monteur en bronze, travaillant chez son
père, et demeurant avec lui.
Garnier, Auguste, dit Fourot, né le 10
janvier 1860, à Périgny-sur-Oignon
(Côte-d'Or), marié, deux enfants, jour-
nalier, 46, rue de Liancourt.
Grégoire, Aimé-Léopold, né le 17 juin
1847, à Bruxelles (Belgique), ouvrier en
pianos chez M. Prévost, 77, rue Saint-
Maur, veuf avec trois enfants, demeu-
rant 28, boulevard de Charonne.
Guénant, Louis-Désiré, né le 10 avril
1862, à Paris, comptable chez MM. Kay-
ser et Haas, 65, boulevard Beaumar-
chais, demeurant 12, rue des Panoyaux.
Haurock, Fritz-Wilhem, né le 21 juin
1860, à Lyck (Allemagne), doreur à la
fabrique de baguettes dite Société Fran-
çaise, 81, rue Claude Decaen, demeurant
75, même rue.
Joigneau, Alfred, né le 27 janvier 1853,
à Vucherins (Suisse), célibataire, ouvrier
cordonnier, demeurant 125, rue d'Abou-
kir.
Oudin, Clovis, né le 3 décembre 1844,
à Saint-Hilaire-le-Petit (Marne), marié,
deux enfants, mécanicien, demeurant
rue des Lilas, 43.
Parisot, Louis, né le 13 octobre 1856, à
Saint-Avold (Moselle), marié, sans en-
fants, ouvrier boulanger, demeurant 10,
cité de La Chapelle.
Robin, Joseph, né le 4 février 1854 à
Bourgneuf-en-Retz (Loire-Inférieure),
célibataire, terrassier chez M. lion, en-
trepreneur, demeurant 37, rue Frémi-
court.
Schoeffer, Charles, né le 20 juin 1866,
à Paris, célibataire, ébéniste,demeurant
16, rue Faidherbe.
Theuriet, Jean-Baptiste, né le 27 avril
1862, à Lyon,coiffeur, célibataire,vivant
avec Isabelle Boutinot, blanchisseuse,
125, rue des Boulets.
Veret, Octave, né le 23 septembre 1874,
à Paris, célibataire, employé chez M.
Eliacin, photographe rue Oberkampf,
demeurant 8, rue Champlain.
Villa, Jean,né le 24 juin 1855,à Farine-
d'Olmon (Italie), garçon maçon chez
M. Magne, 88, rue de La Roquette, ma-
rié, deux enfants, demeurant 9, rue
Lepeu.
DANS LA BANLIEUE
Borla, Jean-Michel, né à Sirie (Italie)
le 29 septembre 1847. Célibataire, mais
vivant avec Elisa-Blanche Royer, dont il
a un enfant. Ajusteur à l'usine de ca-
nons Hotchkiss, à Saint-Denis. Demeu-
rant à Saint-Denis, 5, rue de Strasbourg.
Cartan, Auguste, né le 9 août 1868, à
Saint-Florent (Cher), célibataire. Ou-
vrier verrier à l'usine Monnot, demeu-
rant 5, rue Michelet, à Pantin.
Colombet, Frédéric-Victor, né le 21
décembre 1865 à Prigonrieux (Dordo-
gne), marié. Marchand de charbon, 49,
rue Chaptal, à Levallois-Perret.
Lenfant, Emile, né le 22 décembre
1867, à Choisy-le-Roi ; célibataire ; céra-
miste à là porcelainerie, demeurant 8,
rue de la Raffinerie, à Choisy-le-Roi.
Mièle, Eugène-Paul, né le 31 octobre
1855 à Creil (Oise) ; marié, un enfant.
Estampeur chez M. Brot, rue de Seine,à
Choisy. Demeurant rue Pierre-Bie, à
Thiais (Seine).
Poirrier, Jacques-Etienne, né le 25 jan-
vier 1862, à Gien (Loiret), marié, sans
enfant, garçon distillateur chez.M. Bou-
nevey, place de l'Eglise, à Choisy-le-Roi.
Demeurant 8, rue du Pont, à Choisy.
Dans toute cette longue liste, pas un
nom connu. Ajoutons que la plupart des
gens arrêtés protestent énergiquement
contre la qualité d'anarchiste. Certains
habitent depuis cinq, six, dix ans, la
même maison-le premier, Bruneau,est
dans le même domicile depuis vingt
ans 1 et personne n'a jamais eu à se
plaindre d'eux.
Il est probable que ces arrestations
n'ont été faites que pour le fameux al-
bum-répertoire dont nous parlions hier
et que presque tous les prisonniers se-
ront relâchés d'ici deux jours.
Emile Henry
L'instruction de l'affaire de la rue des
Bons-Enfants, en ce qui concerne Emile
Henry, touche à sa fin. M. le juge d'ins-
truction Espinas l'a encore une der-
nière fois interrogé hier, afin d'essayer
d'avoir de lui quelques détails et d'arri-
ver à découvrir le nom de celui qui,
quoi qu'il prétende, l'a aidé dans cette
affaire. Ce soir ou demain matin, le
dossier sera remis au Parquet.
DANS LES DÉPARTEMENTS
ROUBAIX. - Cette après-midi, un anar-
chiste nommé Edouard Mario, ouvrier tisse-
rand congédié de l'établissement où il travail-
lait, il y a quinze jours, a tenté d'assassiner
son ancien patron, M. Cauchies, tisseur à fa-
çon, au moment où ce dernier sortait de l'a-
telier; il s'est élancé sur Jui et lui a porté trois
coups de tranchet à la tête.
Arrêté, il n'a pas dissimulé que c'était ses
opinions anarchistes qui l'avaient porté à
tuer son patron. _
Les blessures de M. Cauchies ne sont pas
graves.
ARRAS. - Une fusée de mine destinée à
faire explosion a été jetée ce soir par le sou-
pirail de la cave, dons la maison du mineur
Sauvage, à. Billy-Montigny. On a pu l'éteindre
à temps.
XXX.
A L'ÉTRANGER
M MMM DE M. GLADSTONE
Ce qui hier matin n'était encore qu'une
probabilité est maintenant une certi-
tude. M. Gladstone quitte le pouvoir. Il
remettra aujourd'hui sa démission entre
les mains de la Reine qui désignera
qui bon lui semblera pour présider
le Conseil des ministres. M. Glads-
tone, avant de s'en aller, a voulu tirer,
hier encore, un de ces feux d'artifice
oratoires dont il est coutumier. Il a
parié à la Chambre des communes et
de la plus admirable façon, mais il
a surtout joué un tour extraordinaire
à son successeur, puisque ce successeur
doitêtre lord Roseberry.
M. Gladstone a attaqué avec une vi-
gueur sans pareille la Chambre des
lords. Il a déclaré qu'il y avait assez
longtemps que les lords faisaient échouer
comme à plaisir toutes les réformes
proposées par le gouvernement et vo-
tées par les Communes ; qu'il y avait
là une anomalie qui froissait les idées
modernes, qu'il fallait que cet état
de choses cessât et qu'une des ré-
formes que le parti libéral devait avoir
le plus à coeur de mener à bien, c'était
la réforme de la Chambre des lords et
la diminution de son droit de veto! On
racontait hier à Londres que le vieux
Premier avait décidé de prononcer ce
discours sans aucunement prévenir ses
collègues du cabinet, et que ce fut par
hasard que lord Roseberry, prévenu,
put accourir à la Chambre des commu-
nes pour entendre M. Gladstone tonner
contre un des privilèges qui tiennent le
plus au coeur du fat boy d'Eaton.
Il est de fait que, par cette manoeuvre
delà dernière heure, M. Gladstone a fait
qu'il est très difficile de confier les des-
tinées du parti libéral à un lord - car
on ne voit pas un lord demander qu'on
diminue les privilèges de la Chambre
dont il fait partie. Et de plus, un pareil
choix serait la dislocation immédiate du
parti libéral, tel qu'il existe actuelle-
ment à la Chambre des communes. Une
soixantaine de radicaux sont, aussitôt
que la nouvelle de la retraite de M.
Gladstone est devenue certaine, allés
trouver le whip du parti, M. Marjori-
banks, et lui ont déclaré qu'ils vote-
raient contre tout ministère présidé par
un lord. Or, comme aux meilleurs jours
la majorité libérale de la Chambre des
communes est de 36 voix, on voit ce
qu'il adviendra si la Reine choisit lord
Roseberry.
En tous cas, la situation du parti
libéral n'est pas bonne et il n'était pas
besoin de cette nouvelle difficulté pour
reculer indéfiniment la solution de la
cause irlandaise dont M. Gladstone est
le plus ardent défenseur.
Jacques St-Cèra.
NOUVELLES
PAU DÉPÊCHES DE NOS CORRESPONDANTS
M. GLADSTONE
Londres, 2 mars.
On annonce que M. gladstone aurait pré-
senté sa démission à la Reine, ce soir. La
Reine l'aurait acceptée, en exprimant ses re-
grets.
M. Gladstone aurait recommandé à la Heine
le choix de lord Roseberry.
Le Conseil privé se réunira demain.
On télégraphie d'Epsom, dix heures du soir :
« Lord Roseberry vient de recevoir de la
Reine l'ordre de se rendre à Windsor demain,
à trois heures et demie de l'après-midi.
» Lord Roseberry accepterait le poste de
premier ministre.
» On croit que le cabinet ne subira que
deux modifications. »
UNE ALLOCUTION DU SAINT-PÈRE
Rome, 2 mars.
Le Pape a reçu aujourd'hui le Sacré-Collège
qui lui a exprimé ses voeux à l'occasion du
double anniversaire de sa naissance et de
son couronnement.
Le Saint-Père, très bien portant, a répondu
par le discours suivant :
« Au déclin de la vie, nous continuerons
jusqu'au dernier jour à nous dévouer afin que
l'action bienfaisante de l'Eglise soit univer-
sellement sentie. Le besoin est en grand, car
les concepts d'honnêteté, de justice, d'auto-
rité, de liberté et des droits et des devoirs so-
ciaux ont été bouleversés. »
L'Eglise, dit Léon XM, s'efforce de rappe-
ler aux nations les principes de foi et de mo-
rale, d'indiquer les vraies causes des maux,
de dénoncer les desseins francs-maçonni-
ques, d'harmoniser les institutions .utiles
avec la vérité et la justice, d'inspirer la vie
chrétienne aux familles, l'équité et la charité
aux classes sociales, la rectitude aux gou-
vernants, la soumission chez les peuples, et
chez tous le désir de la paix venant de Dieu.
Enfin l'Eglise restaurera les études par des
règles de sagesse chrétienne, comme l'a fait
la récente Encyclique sur l'interprétation des
Saintes-Ecritures.
Le Pape termine en disant :
« Nous désirons que les germes semés par
l'action de l'Eglise donnent une moisson
abondante, et recevez-en, comme gage, notre
bénédiction. »
Berlin, 2 mars.
LaCommission chargée d'examiner le traité
de commerce russo-allemand se compose de
5 conservateurs, 3 membres du parti de l'Em-
pire, 4 libéraux-nationaux, 8 membres du
centre, 3 libéraux, 1 polonais, 1 antisémite et
3 socialistes, soit 14 membres favorables au
traité, 11 défavorables et 3 douteux.
Le comte Doenhoff a déclaré à ses électeurs,
à Koenigsberg, que le prince de Bismarck lui
a affirmé que le rejet du traité germano-russe
signifierait la guerre,'ce qui fait présumer
que. les nationaux libéraux voteront pour le
traité et en assureront l'adoption.
On croit.que M. Miquel donnera sa démis-
sion après le vote du traité ; il ressort claire-
ment de son discours d'hier qu'il ne partage
pas les opinions de M. de Caprivi, en fait de
politique commerciale.
M. Holstein, conseiller intime au ministère
des affaires étrangères, a provoqué le comte
Herbert de Bismarck en duel. Le comte Her-
bert de Bismarck a refusé de se battre avec
M. Holstein.
Des propos injurieux, tenus par le comte
Herbert, auraient motivé cette provocation.
Vienne, 2 mars.
L'échange des télégrammes entre M. Carnot
et l'Empereur a produit la meilleure impres-
sion et a causé une. grande satisfaction.
L'Extrablatt de ce soir dit que ces télé-
grammes ont trouvé un écho parmi les peu-
ples des deux pays. Ce journal exprime le
Voeu que les relations austro-françaises de-
viennent toujours plus amicales.
Rome, 2 mars.
En Sicile, sur plusieurs points couverts de
neige, les paysans manquent de farine. Les
municipalités de Lentini et Mascalucia ont
dû faire des distributions de pain, mais in-
suffisantes. Des familles entières sont sans
abri et, par un froid excessif, manquent de
vêtements et de nourriture.
Montevideo, 2 mars
Le docteur José Ellauri, qui avait été pré-
sident pendant quelque temps en 1873, a été
élu président par 54 voix.
Il n'y a pas eu de désordres.
Mulhouse, 2 mars.
Un volontaire d'un an nommé Zierer fut
puni il y a deux mois d'une peine de quatre
semaines de prison de rigueur, c'est-à-dire
au régime du pain sec et de l'eau claire, pour
avoir répondu en riant à un sous-officier, en
dehors du service : « Je resterais bien au ré-
giment si nous étions Français. »
Le ministre de la guèrre, alors qu'on
croyait l'affaire oubliée, vient d'infliger deux
ans de forteresse au volontaire Zierer.
REVUE DES JOURNAUX
Mgr Servonnet, évêque de Digne,
ayant envoyé au souverain pontife le
mandement de carême sur le quatrième
commandement, qui lui valut de nom-
breuses et violentes attaques de la part
des journaux réfractaires à la direction
du Saint-Siège, a reçu de S. Em. le car-
dinal Rampolla une lettre de félicita-
tion dont nous détachons les. passages
suivants :
Sa Sainteté a tenu pour agréable l'hom-
mage de Votre Seigneurie, et en apprenant
que le zèle avec lequel elle s'applique à suivre
la direction donnée aux catholiques de
France par les récentes Encycliques et Lettres
pontificales lui a occasionné quelque désa-
grément, l'auguste Pontife m'a chargé de
l'exhorter à ne pas perdre courage, mais à
se souvenir que toute bonne cause a toujours
été contredite et contrariée dans la personne
de ses plus chauds défenseurs.
D'ailleurs, Votre Seigneurie, en s'inspirant
des enseignements du Souverain Pontife et en
travaillant efficacement à les propager dans
son diocèse, doit trouver dans ses efforts cette
satisfaction qui accompagne toujours l'ac-
complissement d'un devoir positif et peut at-
tendre en paix le jour où la vérité sera rendue
manifeste, même aux yeux de ceux qui, au-
jourd'hui, sont les moins disposés à l'accueil-
lir.
La Revue rétrospective a retrouvé
dans un catalogue d'autographes une
piquante appréciation du journalisme
par Edmond About.
Plus je vais dans le journalisme, écrit-il,
plus je reste convaincu que c'est une car-
rière nuisible à tout écrivain connu qui peut
faire autre chose. Le public des journaux
quotidiens veut qu'en échange de ses sous on
lui donne de l'actualité. Or, l'actualité est
comme la pâtisserie : il n'en reste rien au
bout de huit jours.
Cette appréciation de l'ancien direc-
teur du XIXe Siècle est curieuse à rap-
procher du jugement que M. Brunetière
vient de porter sur la presse, dans son
discours de réception à l'Académie fran-
çaise.
*** Dans la Revue blanche, deux docu-
ments sur Stendhal, d'une réelle impor-
tance littéraire et historique :
Les « Avis aux têtes légères », datés
du 1er octobre 1824, ont été écrits par
Stendhal pour ses deux soeurs, qui al-
laient faire un voyage en Italie.
Les « Impressions d'audience de Mi-
chel Duffléard » nous donnent la clef de
le Rouge et le Noir; elles nous fournis-
sent les documents dont Beyle se servit
pour écrire l'histoire de Julien Sorel.
Les grandes lignes du roman, les per-
sonnages principaux : Mme de Rénal et
même Mathilde de La Môle, sont indi-
qués dans ce procès-verbal, écrit, du
reste, non sans talent.
Le commandant Monteil publie,
dans le troisième volume de la Revue de
Paris, une remarquable étude sur «Tom-
bouctou et les Touareg». Les conclu-
sions du vaillant explorateur sont les
suivantes :
Au point de vue politique, notre occu-
pation ne saurait donner d'importance
à une ville qui, par sa situation, n'en
peut posséder. Au point de vue du mar-
ché, la décadence de Tombouctou ne
peut que s'accentuer parce que, de plus
en plus, les routes se multiplient pa»
lesquelles les produits manufacturés
arrivent sur les marchés du Soudan que
Tombouctou pouvait pourvoir.
Au point de vue touareg, la prise de
Tombouctou porte un coup fatal à l'in-
fluence de ces peuplades. Ce sont de
gros revenus qui leur échappent, et ce
qui fait pour le présent peut-être la joie
des commerçants arabes, délivrés de
leurs intéressés protecteurs, pourra
faire leur perte dans l'avenir, car les
Touareg empêcheront le passage des
caravanes venant du Sahara.
Telles sont les conséquences de l'oc-
cupation de Tombouctou. « Maîtres de
Tombouctou, désormais, dit M. Mon-
teil, nous devons y rester. L'honneur du
pavillon est engagé ! »
*** Un dialogue amusant, dans le
Charivari:
- Qu'est-ce que c'est donc que ce père
Peinard qu'on a poursuivi?
- Encore quelque pauvre religieux
qu'on persécute !
Le Liseur.
A L'HOTEL DE VILLE
Il y a, à l'Hôtel de Ville,deux Commissions
des omnibus et tramways : celle du Conseil
municipal, celle du Conseil général. Comme
elles ont des intérêts communs, elles se sont
réunies hier en Commission mixte.
On y a discuté, une dernière fois, le rapport
qui va être distribué aux conseillers et dont
l'épreuve seule est terminée. Ce rapport inté-
resse vivement les Parisiens à cause des très
nombreuses lignes dont la création ou le pro-
longement sont demandés.
Si la Préfecture de police a approuvé la plu-
part des propositions, il n'en est pas de même
de la Compagnie, qui ne voudrait naturelle-
ment créer ou prolonger que les lignes qui lui
sont avantageuses.
Comme chaque conseiller plaidera pour son
quartier, il est impossible de prévoir tous les
résultats de la discussion. Il est néanmoins
certain que Passy et Auteuil, où se sont por-
tés de nombreux Parisiens, seront particuliè-
rement favorisés.
Nous avons parlé de l'entente survepue
entre la Commission des indemnités et le pro-
priétaire de la maison de la rue Taitbout qui
est sise dans l'axe du boulevard Haussmann.
Le prix de 2,220,000 francs a été finalement
proposé et accepté. Reste à savoir si le Con-
seil ratifiera le contrat. Quelques-uns de ses
membres reconnaissent que l'achèvement du
boulevard Haussmann est moins une ques-
tion de quartier que d'intérêt public, mais
beaucoup déclarent d'ores et déjà qu'ils
voteront contre le projet... pour une miséra-
ble raison absolument étrangère à la cause
et qu'il vaut mieux taire.
Petites nouvelles :
L'Association des artistes dramatiques
est autorisée à accepter la donation d'une somme
de 27,562 fr. 50.
L'exposition des projets de décoration delà
mairie de Bagnolet sera ouverte dans les salons
à arcades à partir d'aujourd'hui jusqu'au 13 mars.
*-~ M. Bassinet, se rendant compte du dan-
ger que courent les sapeurs-pompiers quand, sor-
tant d'une atmosphère surchauffée, ils remontent
sur leurs voitures découvertes, demande qu'un
service de voitures fermées soit mis à leur dis-
position devant les lieux d'incendie.
Nous rencontrons à la bibliothèque M.
Maurice Binder qui nous annonce qu'il a con-
voqué la veille, en réunion publique, ses
électeurs. Il leur a soumis son intention de
garder les deux sièges de conseiller et de dé-
puté. L'assemblée l'a autorisé à rester à l'Hô-
tel de Ville.
Henri Hamoise.
? . .-: y :--:--- ;-
N ouvelles Diverses
LB LENDEMAIN DE LA MI-CARÊME
Nous l'avons dit, les confetti ont été pro-
jetés sur la voie publique en quantité si con-
sidérable, pendant la soirée d'avant-hier et
la journée d'hier, que l'épaisseur de ces petits
ronds de papier avait atteint sur la chaussée,
principalement de la Madeleine à la place'de
la République, une épaisseur de près de trois
centimètres. Et les arbres ! Les branches dis-
paraissaient sous les longues spirales des
serpentins, et ce n'eût pas été une mince
tâche pour les employés aux plantations de la
Ville d'avoir à débarasser les platanes de nos
promenades de ces rubans multicolores, si la
pluie ne fût venue, fort à props, leur simpli-
fier la besogne.
Dès la pointe du jour, une armée de ba-
layeurs a pris possession de la grande ligne
des boulevards et les travailleurs ont pu, non
sans peine et avec le concours des balais-
rouleaux, entasser sur les bas côtés des mon-
ticules de confetti que l'eau, répandue à pro-
fusion dans les ruisseaux, entraînait ensuite
dans les bouches d'égout.
Mais avant les balayeurs, des maraudeurs,
des camelots d'occasion avaient déjà fait une
ample moisson de ces minuscules projectiles
devenus si à la mode et qu'ils ont été reven-
dre ensuite à des papetiers en gros, au prix
de cinq francs les cent kilos. Rassurez-vous
cependant, chers lecteurs, ces confetti souillés
par la boue seront remis au pilon et livrés à
la vente l'année prochaine dans un état de
propreté qui ne laissera rien à désirer.
A côté des quelques accidents que nous
avons signalés, nous ne devons pas oublier
de mentionner les arrestations, rares d'ail-
leurs, de pickpockets. C'est surtout sur les
boulevards Montmartre et des Italiens que
ces honnêtes messieurs ont « travaillé ». Cinq
d'entre eux, surpris la main dans lés poches
de leurs voisins ou plutôt de leurs voisines,
ont été conduits chez M. Mouquin, commis-
saire de police. Ils étaient tous nantis de bi-
joux et de porte-monnaie dont ils n'ont pu in-
diquer la provenance. Ces voleurs à la tire
ont été envoyés au Dépôt.
TENTATIVE DE MEURTRE
Une affaire assez étrange, et qui n'est pas
encore complètement éclaircie, s'est passée
avant-hier soir, boulevard de la Gare, 305.
A cette adresse habite un nommé François
Castien, sujet belge, âgé de trente-deux ans,
brocanteur. Cet individu est réputé dans le
quartier pour un « mauvais coucheur ».
Se trouvant dans sa boutique, son attention
fut attirée, vers neuf heures - c'est du moins
ce qu'il a déclaré au commissaire de police -
par les allées et venues d'un jeune homme
qui s'arrêtait de temps en temps à la devan-'
ture. Prenant ce garçon pour un malfaiteur
n'attendant que le moment propice pour le
dévaliser, le brocanteur s'arma de son revol-
ver et fit bonne garde,caché derrière un vieux
meuble. Tout à coup la porte s'ouvrit, li-
vrant passage au promeneur. Alors Castien
bondit hors de sa cachette et fit feu à plu-
sieurs reprises sur l'intrus, qui tomba frappé
à la tête.
Au bruit des détonations, des voisins arri-
vèrent.Le blessé,un jeune homme de dix-sept
ans, Léon Beauté, fut transporté immédiate-
ment à l'hôpital de la Pitié, où son état fut
jugé très grave.
M. Bolot, commissaire de police, après
avoir recueilli du meurtrier les explications
que nous venons de donner, l'a envoyé au
Dépôt.
LES CAMBRIOLEURS
Ils font, en ce moment, parler d'eux plus
que jamais.
M. Georges Robin, conducteur des ponts
et chaussées, demeurant 104, boulevard de
Clichy,était descendu dans Paris jeudi, après-
midi, pour voir passer la Reine des Reines et
son joyeux cortège. Quand il rentra, il trouva
la porte de son appartement fracturée et les
tiroirs des meubles complètement vides. Des
malfaiteurs avaient pénétré chez lui et lui
avaient volé, en plus d'une somme de 10,000
francs, tous ses bijoux et ses vêtements.
Dans la même journée, M. Bourgon, artiste-
peintre, habitant au 128 ter du susdit boule-
vard, a 4t4 victime d'un. vol commis dans d«a
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