Titre : Figaro : journal non politique
Éditeur : Figaro (Paris)
Date d'édition : 1875-08-09
Contributeur : Villemessant, Hippolyte de (1810-1879). Directeur de publication
Contributeur : Jouvin, Benoît (1810-1886). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 09 août 1875 09 août 1875
Description : 1875/08/09 (Numéro 220). 1875/08/09 (Numéro 220).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
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Droits : Consultable en ligne
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 15/10/2007
LE FIGARO .uilNDI 9 AOOT 187à
£
amie Mme de R. il est bon que les
jeunes gens prennent l'habitude du
monde. va, mon enfant »'î
Et alors, il est venu. Pour cela, il a
renoncé à un souper de jeunes gens, à
une loge aux Bouffes et il est là, tour-
nant et retournant son chapeau, cher-
chant une contenance.
Il aurait bien envie d'aller causer avec
ces jeunes filles collées contre la mu-
raille, mais il s'aperçoit que la mode
actuelle veut que les hommes soient
d'un côté et les femmes de l'autre. Déjà
il â voulu se mêler à la conversation po-
litique, faire une petite plaisanterie à la
table de thé. Mais, il est si jeune, c'est
à Tjeîne si on a eu l'air de l'entendre. Et
cependant, sa bonne volonté est telle
qu'il saisit les'moindres phrases au pas-
sage pour dire quelque chose, ou plu-
tôt pour pouvoir raconter à sa mère,
qu'il a été bien aimable. Peine perdue.
ses paroles tombent comme dans un
puits.
Alors, décontenancé il recule, s'adosse
à la muraille et réfléchit. Il songe à
tous les plaisirs auxquels il a renoncé;
il voit ses camarades, il entend leurs
plaisanteries, leurs joyeux éclats de ri-
re. Et il se dit « Voilà donc ce que c'est
que la société? le demi-monde est si vai-
mable ? Pourquoi le véritable monde
est-il si ennuyeux ?. »
Et cependant, sous l'influence mater-
nelle, il retournera encore chez Mme de
R. puis, quand il aura passé plusieurs
soirées comme celles-là, un jour viendra
où on. l'entraînera ailleurs.
Ah! là il ne s'ennuiera pas, certes!
Lit, les soirées seront remplies, et il y
aura de la gaieté, du mouvement, de
l'entrain, et les femmes seront aimables
et elles feront des frais! Aussi, il y
reviendra, il y restera; et, quand il
aura tout à fait abandonné la bonne so-
ciété, un jour arrivera où vous entendrez
dire « Malheureux jeune homme,
quelle vie mène-t-il? Qu'est-ce qui a
pu la jeter là? »,
Eh parbleu, c'est vous, qui, en rayon-
nant l'ennui, l'avez dégoûté du monde!
On dirait que vous cherchez à répandre
cette idée que l'ennui est inséparable du
bien et la gaieté du mal. Une fois que
vous avez convaincu la jeunesse, elle
vous croit sur parole et s'en va ailleurs.
Il n'y a pas de milieu aujourd'hui ou
bien les grandes soirées glacées par la
convention et la vanité, toutes sembla-
bles à un défilé d'Opéra, ou bien ces
réunions plus- intimes qui ne donnent
satisfaction qu'à l'esprit de coterie, à la
fièvre politique ou à l'austérité reli-
gieuse.
Mais tout cela, c'est pour nous. Je le
demande, où y a-t-il place pour la
jeunesse? que fait-on pour elle? Que
fait-on pour amuser ces jeunes filles qui
sont là immobiles sur leurs sièges ? Que
fait-on pour retenir ces jeunes gens qui
regrettent leurs théâtres et leurs clubs?
Nous leur imposons le poids de nos va-
nités et de nos conventions; et; si-nous
nous sommes bien amusés jadis, nous
•leur faisons porter le poids de nos re-
mords.
Tout cela est nouveau; je me rappelle
le monde de mon enfance jeme rappelle
ces longues causeries ces joyeuses réu-
nions, ces petits bals improvisés, quand
tout à coup, laissant là, tapisserie et tri-
cot, on ouvrait le piano, mères et jeunes
filles se mettaient à valser; après quoi,
un souper s'organisait, puis la danse re-
prenait.»
Je vois encore ces fêtes intimes qui se
prolongeaient jusqu'au jour. Je vois le
général Nègre, capitaine alors, en
tenue de route, ôtant et remettant vingt
fois son épée, et quittant la valse pour
sauter à cheval à la tête de son esca-
dron. Je vois toutes celles qui étaient
là J Alors, je me disais: « Sont-ils heu-
reux que la vie est belle comme je
m'amuserai un jour! »
Quand, devenu officier, je suis entré
dans le monde, je ne me suis point
amusé 1 lorsque j'ai cherché le plaisir, il
avait disparu. Le spectre de la vanité
l'avait chassé. Vanité de réception, va-
nité de toilette, vanité de nom, vanité
de fortune.
Comment songer à s'amuser quand on
ne songe--qu'à paraître? Dans le vrai et
franc plaisir, les moins en train sont en-
traînés par les autres; c'est une ronde
qui finit par tout emporter. Mais,les sa-
tisltactions de vanité ne s'obtenant que
sur le prochain, il faut bien qu'il y ait
une partie sacrifiée, qui fasse lés frais du
plaisir des autres.
Pour que les uns soient ravis de leur
feuilleton du FIGARO du 9 Août 1875 '1
LA.
CHASSE ~U~ FANTOMES
PREMIÈRE PARTIE
~A,~OnUR BE 0~
;̃̃ '̃ "X ̃.̃•̃̃ 'j
m Suite.,0 (
Ils entrèrent tous les deux dans le jar-
din et abordèrent Prosper.
Monsieur le comte, dit Dachet, per-
mettez-moi de vous présenter mon ami,
M. Pierre Melven, un de nos journalis-
teS les plus distingués et qui désire faire
votre connaissance.
Et se tournant vers Melven:
M. le comte de Prévodal, un Breton
qui n'a d'autre désir que de devenir un
Parisien du tout Paris.
̃ Ah monsieur, dit Melven, Paris est
un ogre dévorant: jeunesse, illusions,
fortune, tout y passe.
Puis-je vous croire en ce moment? Y
demanda Prospei en souriant.
Et son regard enthousiaste se pro-
mena sur la foule.
Dachet les avaient quittés.
Melven passa son bras sous celui du
jeune homme,
Fantômes que tout cela!
Fantômes, ces femmes charmantes,
jeunes, belles ?
•– Fantômes, monsieur le comte! fan.
tômes séduisants, il est vrai, mais de
ûùin. Si vous voulez conserver vos illu-
sions, si vous voulez vivre heureux et
longtemps, fuyez-les.
Qu'est-ce donc que la vie, selon
,vous? demanda Prosper.
Keprpduction autorisée pour les journaux qui
pat traité avec la société des Gens &,l«ttxes.
succès, il faut que les autres soient at.
tristés de leur défaite, puisque c'est une
lutte Et alors, on se détaille, on s'exa-
mine, on compare. tandis que la maî.
tresse de maison, au lieu de se donner
tout entière au plaisir de ses invitéSj se
préoccupe de savoir si sa mise en scene
égale les soirées de la veille.
Mon Dieu, si cela nous amuse da ne
plus nous amuser, c'est bien, c'est notre
affaire; mais alors, il ne faut pas se
plaindre que les jeunes gens abandon-
nent un pareil monde; il faut plutôt s'é-
tonner de la bonne volonté qu'ils met-
tent à,y passer encore quelques heiires; ->
car, je vois bien ce que nous faisons
pour nous, mais je ne vois pas ce que
nous faisons pour eux. La politique, la
convention, la vanité, l'austérité, tout
cela c'est nous, c'est pour nous. A vingt
ans il faut autre chose. Il faut donner un
cours à ce trop plein de vie et à cette
sève qui a besoin de se répandre. Si vous
ne lui donnez pas un aliment dans votre
monde, elle ira le chercher ailleurs.
Vous vous décriez Et oui le meilleur
moyen d'éviter le mal n'est pas de le
maudire, c'est-à-dire d'ennuyer la jeu-
nesse par des sermons; c'est de lui
prouver qu'on peut s'amuser honnête-
ment C'est d'inspirer à ses enfants cette
pensée, que c'est encore dans la maison
paternelle que se trouve le bonheur le
plus vrai, le plus complet que c'est dans
le monde honnête que se trouvent les
meilleures joies; joies sans amertume,
sans arrière-pensée. Et alors, ils vous
resteront; ils vous resteront malgré cer-
tains entraînements et certains écarts.
Mais, si vous comptez sur la morale, sur
la surveillance et l'austérité, tout sera
inutile. Le jeune homme va au plaisir,
comme la fleur au soleil.
Vous vous lamentez! Eh La vie
est une lutte il faut lutter. Tout autour
de vous, il y a des créatures que vous
ne voyez pas, mais qui sont là, qui at-
tendent, qui guettent, profitant de vos
fautes, d'autant plus aimables que vous
Fêtes moins. Contre elles, vous devez
combattre sans relâche pour garder non-
seulement vos enfants, mais vos frères,
vos neveux, vos maris! 1
Alors même que vous avez perdu le
goût du plaisir, il faut vous. rajeunir
pour vos fils, et si les deuils et les cha-
grins vous en ôtent le. courage, il faut
au moins animer votre salon, y faire en-
trer la vie et la lumière, ne pas laisser
l'implacable ennui le glacer de ses froi-
des ailes. En un mot, il faut arriver à
ce que vos enfants disent tôt ou tard:
«Nous avons pu nous étourdir dans le
demi-monde, mais c'était un plaisir mal-
sainj plein de dégoût et de remords.
C'est encore ici qu'est le vrai bonheur,
la véritable joie; il n'y a qu'ici qu'on
est vraiment heureux. »
Saint-Gknest.
FIGARO EN VOYAGE
LES COURSES DE DEAUVILLE-TROUVILLK
Je serais tenté de croire que les cour-
ses ont un peu d'influence sur la tem-
pérature -Ail y a des années où elles amè-
nent invariablement la pluie, il y en a
d'autres où elles sont des porte-beau
temps.
Il y a huit jours, j'arrivais au Havre au
milieu d'un déluge décourageant pour
les plus vieux loups de mer Il faisait un
temps exquis le lendemain et le surlen-
demain sur le turf
Depuis un mois, à Deauville, les tou-
ristes étaient perpétuellement entre
deux eaux. Nous arrivons, et le ciel dé-
couvre tout à coup son voile gris pour
se teindre du bleu le plus pur et nous
prométtre une semaine sans nuages! 1
Il y a de quoi, ce me semble, réconci-
lier avec les courses les gens qui profes-
sent pour elles la plus complète indiffé-
rence. Je n'ai pas trouvé Deauville bien
changé depuis l'année dernière, c'est
toujours la même plage un peu aride,
bordée de villas d'une élégance qui con-
traste avec la simplicité du site qui les a
vues naître.
Au milieu de l'unique rue qui conduit
de la gare au Casino, se dresse encore le
socle en marbre de la statue du feu duc
de Morny; la statue est à côté dans un
hangar et dort paisiblement dans une
caisse d'emballage, jusqu'à ce qu'il plaise
aux Deauvillais de la remettre à sa place.
Ces excellents Deauvi!lais! il paraît
que ce n'est pas la bonne volonté qui
leur manque; plus d'une fois déjà,* ils
-La vie? Une plaisanterie amère, un
cigare de la régie 1
L'amour? •
L amour sentiment? Fantôme! l'a-
mour passion? Lisez Chamfort; il en
a donne une excellente définition.
L'amitié ?
Fantôme l'égoïsme à un
Vous calomniez l'humanité, mon-
sieur.
Je dis la vérité
Le bonheur?
Autre tantôme un mensonge 1
La gloire ?
Fantôme l'ombre de l'ombre
L'honneur?
Fantôme Une convention dont les
degrés sont si nombreux qu'on n'en voit
pas les extrémités.
Le patriotisme?
Fantôme! Allez à la Bourse, de une
heure à trois heures, vous verrez ce
qu'on le cote
La famille?
Fantôme une invention pour héri-
ter de ses oncles, tantes, cousins et cou-
sines. lorsqu'ils sont riches! Tout cela
fantômes, rengaines, mensonges, illu-
sions trompeuses. Il n'y a plus guère que
les collégiens âgés de moins de douze
ans, les demoiselles non nubiles et les
Bretons fraîchement débarqués qui les
prennent pour des réalités.
Vous ne croyez donc à rien
Si fait; je crois'aux huîtres vertes,
aux écrevisses bordelaises et au cham-
pagne qui porte la marque veuve Clic-
quot.
Allons, dit Prosper en souriant, vous
êtes moins coupable que je ne le pensais.
Je crois encore a autre chose, s'em-
pressa d'ajouter Melven en fixant son re-
gard vers l'un des points de la salle.
Ah! voyons!
Regardez cette belle jeune fille dont
le teint est blanc et mat comme celui
d'une créole, et qui se promène au bras
d'un grand jeune homme à la moustache
blonde.
Prosper tressaillit.
II venait de reconnaître sa voisine.
<– Je la vais, dit-ii-
16
ont eu l'intention d'exhumer le bronze
de leur fondateur; mais leurs frères ré-
publicains du Havre les ayant menacés
de leur tirer tes oreilles au cas où ils se
permettraient cette petite cérémonie,
ils ont prudemment retiré la clef qu'ils
avaient engagée dans la serrure du
hangar!
II y a un monde fou Deauville, et on
ne le dirait pas à voir ses rues et ses pro-
menades presque constamment désertes.
L'aristocratie baigneuse ,qui le peuple
sort peu, et ce n'est guère que pendant
la semaine des courses qu'il sera possi-
ble de la passer en revue..
Cependant, presque tous les chalets
sont habités.
Voici d'abord ceux qui sont occupés
par leurs propriétaires
Chalet de M. Deîahante,,
Chalet du baron Poisson,
Chalet de M.-Sapia,
Chalet de M. Artus,
Chalet du comte de. Gontaut-Biron
Chalet de M. Donon.
Le chalet de Morny est loué par la
grande-duchesse de Toscane.
Le chalet Demidoff, récemment acheté
par M. de Soubeyran, est louç par le
prince Troubetzkoï.
Le chalet Kersaint est loué par Mme
Erlanger.
Le chalet Tenré est loué par, Mme
Cahen d'Anvers.
Le chalet Dalloz est loué par M. Pre-
musel.
MM. Edmond de Rothschild et
.Edouard Fould ont loué la villa Djemil.
La baronne de Poilly est dans la maison
Cardon; sa fille l'a quittée hier, sans
penser, bien enteridu, au mariage dont
on a. parlé entre elfe et le marquis de
Caumont-Laforce, projet qui n'a jamais
existé.
Je sais encore que Deauville complète
la liste des étrangers qui y sont en vil-
légiature par les noms suivants le comte
et la comtesse de Saint-Sauveur, le duc
et la duchesse de Fézensac Batbedat,
William Baron, le comte et la comtesse
de Merlemont, Delâtre, le prince Louis
Murât, Roy, le baron de Varenne, Hu-
bert Delamarre, le comte de Croix, le
marquis du Lau, de Bonneval, Pernetti,
le baron J. d'Hélie, le vicomte Aguado,
le comte de Juigné, Staub, les dames
Mendeville, le baron do, Noirmont, le
comte de Tournon-Simiane, Riggs, Gas-
pard de Errazu, Berthelin, René Petit,
Shepard, Post, le baron de Bourgoing, le
vicomte'et la vicomtesse de Grouchy, le
vicomte Martel de Janville, Mme de
Fitz-James, la princesse Tolstoï, la prin-
cesse Galitzin, Edouard André, Moreau-
Chaslon, de la Redorte, de Gouy-d'Arsy,
Schickler, R. Hennessy, de Janzé, vi-
comte Paul Daru, de Jaucourt, As. Blount,
Hallez-Claparède, etc.
Trouville, où je n'ai fait que passer un >
quart d'heure ce matin, me paraît moins
brillant et plus encocotté; j'y ai cepen-
dant aperçu M. et Mme Bischofsheim, de
Borda, Delchet, Carolus Duran et Ca-
dol. Mais ma promenade a été si
courte!
Ici, l'on fait du sport avec frénésie.
Hier on a commencé à tirer aux pi-
geons. Ce matin, après le travail des
chevaux de course, qui étaient au nom-.
bre de soixante-dix-nèuf sur l'hippo-
drome, j'ai vu plusieurs sportsmen se li-
vrer à un jeu nouvellement introduit en
France c'est le Lawn-Tennis, traduisez
paume de pelouse.
Sur l'herbe soigneusement tondue et
roulée, on trace avec un pinceau trem-
pé dans la chaux délayée un champ
de vingt mètres de long sur huit mè-
tres de large; on marque un camp à
chaque extrémité et au milieu du champ
on tend un filet. La règle du jeu est a
peu près celle de la courte paume; seu-
lement on se sert de raquettes et de
balles légères en caoutchouc, ce qui fait
que les femmes pourraient très bien y
prendre part.
Depuis deux jours, la jeunesse sportive
joue au Polo vers cinq heures. Le Polo
est assez connu déjà pour que je n'aie
pas besoin de le décrire en détail. Il a
été très suivi ce printemps au bois de
Boulogne. C'est le crocket à cheval. On
trace une piste avec des petits drapeaux;
les cavaliers, montés sur de petits poneys,
en nombre égal, se divisent en deux
camps, les uns vêtus de casaques rouges,
les autres vêtus de casaques bleues. Au
centre,, on lance une boule qu'il s'agit
de pousser, entre deux drapeaux, dans
le camp opposé.
Cet exercice donne lieu à des mêlées
étonnantes, les coups de marteau pleu-
vent et, quelle que soit l'adresse des
joueurs, il est bien rare que l'un d'entre
Eh bien, il n'y a de vraiment bons
et de vraiment amoureux ici que ce
couple je crois à leurs grandes qualités,
à leur sincère amour, mais ils seront
malheureux! 1
Pourquoi ?
Parce que le bonheur est une illu-
sion. parce que leur amour, qui est une
honte, un reproche vivant pour tous ces
marchands chez lesquels le sentiment t
n'existe pas, soulèvera des tempêtes et
des haines qui briseront la vie de ces
enfants! L'amour de l'or a. tout anéanti
chez les gens que vous voyez autour de
nous'; leur cœur est vide de dignité et
de noblesse, et ce qu'ils appellent
l'amour n'est qu'un appétit sensuel, un
désir de chair fraîche.
Comment se nomme cette char-
mante personne?
Elise Desprez.
-Elle est orpheline?
-Non; mais son père habite le Bré-
sil pour les besoins de son commerce sa
mère est cette belle personne aux che-
veux cendrés qui est assise à notre
droite. Cette famille est déplacée ici les
autres font tache sur elle.
La connaissez-vous assez pour me
présenter?
Pas assez Mme Desprez ni sa fille,
mais suffisamment l'amoureux. Tenez,
il m'a aperçu et vient de ce côté! Vous.
allez être satisfait.
Bonsoir, Desgenais, dit Paul Mai-;
sonneuve d'un ton joyeux et en tendant
sa main à Melven.
Bonsoir, monsieur Melven, dit la
petite voix flûtée d'Elise.
Bonsoir, mes beaux amoureux, re-
pliqua le journaliste. Je disais tant de
mal de vous tout à l'heure à monsieur,
qu'il a désiré vous être présenté.
Elise leva ses yeux charmants et pleins
d'expression sur Prosper.
Monsieur le comte de Prévodal, dit
Melven, un Breton naïf et crédule qui
croit à une foule de choses que nous avons
répudiées depuis longtemps. Mlle Elise
Desprez, une perle d un prix inestima-
ble, son pendant n'existant pas. M.
Paul Maisonneuvet l'heureux fiancé de
eux ne revienne pas avec des bleus ou
des bosses. Quant aux jambes des poneys,
je n'en parle pas, ils ont ls sort d'un jeu
de quilles
Quant au Casino, il ne sera guère fré-
quenté qu'à partir de demain. Voici le
programme des -soirées de la semaine
Dimanche 8, représentation de Mme
Pesçhard et Edouard Georges.
Lundi 9, pupazzi de Lemercier de
Neuville.
Mardi 10, bal et feu d'artifice sur la
nouvelle jetée des bains.
Mercredi 1 t, représentation de Mlle
Antonine et de M. Porel, de l'Odéon.
Jeudi 12, représentation du Procès
Veauradieux:
Vendredi 13, Repos.
Samedi 14, Bal des pauvres.
Voilà ce qui peut s'appeler une 'se-
maine bien remplie 1 Au moment où je
vous envoie ces notes, j'entends roucou-
ler la fauvette Peschard qui répète au
Casino de Deauville, en même temps
que le rossignol Judic gazouille au Ca-
sino de Trouville.
Les deux divas, autrefois inséparables,
ont maintenant chacune sa plage où
sont les duos d'antau ?
P. S. J'apprends à l'instant que le
prince de Galles, accompagné du duc de
Saint-Albans, arriveraici mardi. Il devait
habiter son yacht, mais il paraît avoir
changé d'avis, car on lui a retenu un ap-
partement dans la maison déjà occupée
par Mmes de Fezensac et de Saint-Sau-
veur. L'argenterie de Son Altesse vient
d'y être expédiée.
TÉLÉGRAMMES & CORRESPONDANCES
Froeschwiixer, 7 août. -Le monu-
ment élevé aux soldats français morts le 5
août 1870, inauguré hier, est l'œuvre d'une
souscription ouverte en Alsace, sur l'initiative
de Mlle Fanny de Diétrich. Il est situé sur
une colline dominant Wœrth et Frceschwiller
et faisant face à une autre colline sur laquelle
s'élève le beau noyer, qu'on appelle l'arbre de
Mac-Mahon.
Le monument se compose d'abord d'un
soubassement élevé, sous lequel se trouve
l'ossuaire, et qui est formé par huit sarco-
phages accouplés sur lesquels sont inscrits
les noms des différents régiments qui ontpris
part à la bataille. Voici les inscriptions;
Premier et deuxième sarcophage
Infanterie de ligne Chasseurs à pied
3= 18° 21° 36e 45» 47° 10r 8° 13° 16°
48° 50' 74» 78' 96e 99e 17<=
Troisième et quatrième sarcophage
Zouaves Tirailleurs algériens
(Turcos)
1« 2« 3» l« 2» et S«
Cinquième et sixième sarcophage
Artillerie Génie
6° 7° 9e 12? i«
20° 2'
.Septième et huitième sarcophage
Cuirassiers Chasseurs: à cheval
8e 9' 11e
Dragons .̃ Hussards
40» >
Lanciers
2» 6»
Sur ïe soubassement s'élève une sorte ô?e
chapelle, percée de quatre portes fermées de i
grilles, sur lesquelles s'appliquent des palmes
dorées. La couverture de la chapelle se ter-
mine par une croix à quatre branches ornée
de guirlandes de chêne. Différents chiffres,
glaives, couronnes, décorent le monument,
qui est exécuté en grès rouge des Vosges.
Cette œuvre imposante et sévère a été con-
çue et exécutée par un Alsacien, M. Dock.
Deux mille personnes environ assistaient à
la cérémonie. Dans le nombre, on distinguait
les familles de Diétrich, de Tûrckheim, de
Bussière, de Pourtalès et Charpentier quel-
ques dames en grand deuil, Mme.de Joinville
entre autres, veuve du colonel du 99e de li-
gne tué à Frœschwiller.
M. de Bussière aconstaté dans son discours
que l'Alsace seule a fait les frais du monu-
ment.
Il n'y a eu d'exception que pour le 2e régi-
ment de cuirassiers français et pour M. le
comte Louis de Turenne qui avait pris part à
cette sanglante journée. Le comité alsacien
n'a pas cru pouvoir refuser leur offrande.
NANCY, 7 août La cour d'appel de
Nancy vient de perdre successivement M. Lif-
fort de Bufféveht, président de chambre, che-
valier de la Légion d'honneur et M. Louis
Mengin, bâtonnier de l'ordre des avocats, au-
teur d'un essai sur l'histoire du barreau Lor-
rain. ;i' ̃
«~«- La Cour d'assises vient de condam-
ner à mort François Chaussy, berger, reconnu
coupable d'attentat à la pudeur et de meurtre
Mlle Elise et que la banque n'a pas en-
core gâté.
Je proteste en ce qui me concerne,
dit Elise gaiement.
Moi, mademoiselle, dit Prosper,
j'estime les appréciations de M» Melven
très exactes.
Ce qu'il nous dit de vous, monsieur, 1
observa Paul Maisohneuve, est un véri-
table éloge.
-Et voici ma main, en signe d'alliance,
ajouta Elise, car, comme vous, monsieur,
je crois à tout ce qui est beau, noble,
grand, généreux.
Prosper prit cette petite main mi-
gnonne, et la pressa affectueusement en
disant
N'y eût-il que vous d'exception, ma-
demoiselle, aux théories de M. Melven,
que je conserverais intactes toutes mes
croyances, toute ma foi.
Oh n'écoutez pas trop M. Melven, il
est meilleur qu'il ne paraît. Je connais
de lui des traits charmants.
-Je me sauve! s'écria Melven, ça me
changerait si j'entendais faire mon éloge.
Elise se tourna vers son fiancé.
Paul, dit-elle, M. le comte de Pré-
vodal est notre voisin.
Si monsieur le comte veut bien me
le permettre, j'irai lui faire une visite.
Et vous serez le bienvenu, monsieur..
Les jeunes gens se saluèrent et Paul
et Elise continuèrent leur promenade.
Eh bien dit Melven à Prosper ,voilà
la connaissance faite, mais à part la pré-
sentation, il me semble que vous n'aviez
pas besoin de moi.
J'aperçois tous les matins Mlle Elise
Desprez à son balcon, et j'avais eu l'hon-
neur de la saluer sans la connaître.
Puisque vous avez la foi, cultivez
cette amitié, monsieur le comte; si elle
n'existe pas là, elle n'existe nulle part.
Je ne crois plus à vos boutades,
monsieur Malven, depuis que j'ai en-
tendu Mlle Desprez faire votre éloge.
Vous avez tort. Je vous crie a casse-
cou parce que je vous vois jeune et
confiant; parce que, s'il faut vous le dire,
je suis un peu de cette vieille race celti-
que dont vous descendez. Mon nom doit
vous rapprendre, mon père était Breton»
sur le jeune François Pierson, âgé de sept
ans. fils d'un fermier des environs de Géna-
ville.
L'exécution aura lieu sur l'une des places
publiques de Nancy.
Bellegarde (Ain) 7 août. Un
commis-voyageur d'une maison de Paris,
nommé Jacquot, a été trouvé porteur ces
jours-ci, à Bellegarde, de deux Lanterne et
de trois brochures dont le titre est Le voile.
Le tribunal de Nantua vient de le condam-
ner à 50 fr. d'amende.
• La crue du Rhône s'est arrêtée.
L'eau se retire lentement à Seyssel. Le
beau temps est revenu.
–̃̃–̃̃ Lyon, 8 août. Le Rhône a com-
mencé à décroître ce matin et a baissé de 20
centimètres. Tout danger semble écarté.
Chahbéry, 8 août. Après soixante
heures on a vu ce matin le soleil briller dans
la vallée de Chambéry. Il était temps.
SAINT-HoNORÉ-LES-BAINS (Nièvre~ 8
août. C'est par erreur qu'on a annoncé
l'arrivée prochaine du général Frossard a
Contrexéville. L'honorable général est ici
depuis le 25 juillet, et est bien souffrant.
• > Blois, 7 août. M. Edmond Cha-
maillard, rédacteur en chef-gérant du jour-
nal bonapartiste L 'Echo du Loir-et-Cher, est
poursuivi par le duc d'Aumale pour diffa-
mation.
L'assignation est donnée pour le 13 août
en police correctionnelle.
L'offre faite par la ville, d'un em-
placement dans l'ancien cimetière pour la
reconstruction d'un haras, vient d'être ac-
ceptée par l'Etat.
Comme nous avons vu au budget de l'agri-
culture une somme de 395,000 fr. portée pour
faire face à la réorganisation de cet établis-
sement, nous espérons que des travaux im-
portants vont s'ouvrir dans notre ville.
On nous affirme que les plans sont déjà
dressés par M. de la Morandière.
Rouohantin, 7 août. Il y a quel-
ques mois M. Quatrehomme, notaire à La-
motte-Beuvron, disparaissait en laissant un
déficit considérable, mais il put être arrêté
presque aussitôt.
Aujourd'hui, l'instruction est terminée.
Quatrehomme comparaîtra devant la Cour
d'assises dans la session de novembre il aura
à répondre à cinquante-huit chefs d'accusa-
tion.
Cette affaire ne manquera pas d'être fort
intéressante.
Robert Milto.n.
» i Londres, 7 août. Beaucoup d'An-
glais ont été étonnés d'entendre .M. le mar-
quis d'Harcourt s'exprimer aussi purement en
anglais. Ils ignorent que l'ambassadeur de
France est, comme son prédécesseur, le comte
de Jarnac, à moitié Anglais.
Le père du marquis; émigré pendant la Ré-
volution, épousa la fille d'un propriétaire du
Sussex, qui se nommait Harcourt, et se fit
naturaliser Anglais.
Le frère de l'ambassadeur a passé toute sa
vie en Angleterre, où il a été page de Geor-
ges III et officier dans la garde royale. C est
lui qui a hérité de la terre, près Windsor, ap-
partenant au feu lord Harcourt, après son
mariage avec la fille du général Cavendish.
M. Georges-Trevor-Douglas Bernard, mar-
quis d'Harcourt, est né le 4 novembre 1809.
•– Un Français arrivé à Douvres hier
matin, venant de Calais, s'est suicidé en se
jetant du haut du quai dans la mer. Il pa-
raissait avoir une cinquantaine d'années, et,
d'après ses papiers, on croit qu'il se nomme
Merlin d'Haillecourt Originaire de -Calais.
Auguste Marcade.
PARIS m jouis Jûm
M. Lacascade a jailli– pardon a parlé:
la République française contient la circu-
laire du nouveau député de la Guade-
loupe à ses électeurs il se dit républi-
cain pour la vie et recommande le pro-
gramme qu'on va lire à « tous les créo-
les de bonne volonté »
République; avec ses garanties de liberté et
d'égalité
Assimilation politique des colonies à la mé-
tropole
Guerre à tous les préjugés de couleur.
Parions que M. Lacascade est unpeu.
brun.
La Chambre des communes, après
l'incident Plimsoil, a eu Pincident Ke-
nealy. C'est le nom de l'avocat qui, après
s'être compromis dans l'affaire de l'im-
posteur Tichborne et s'être fait rayer du
tableau des avocats, est devenu membre
du Parlement pour l'Irlande. Le 5, il a
protesté en plein Parlement contre la
sentence qui condamne le colonel Baker
à douze mois de détention et qui lui pa-
raît trop douce.
Selon le récit qu'on envoie au Gaulois,
M. -Kenealy a prétendu que le colonel
et il m'a semblé que cette origine, qui
nous est commune, éveillait en moi je ne
sais quels sentiments nouveaux que je ne
croyais point posséder
Vous vous calomniez, monsieur
Melven, dit Prosper très touché de ces
paroles. Voici ma main, donnez-moi la
vôtre.
De grand cœur.
Nous nous reverrons, n'est-ce pas ? 2
Je le désire vivement.
̃ Et moi aussi.
Les deux hommes échangèrent leurs
cartes et se séparèrent.
Prosper de Prévodal n'avait plus rien
à faire chez Dachet.. Il éprouvait le be-
soin de s'isoler, de se sentir vivre avec
ses pensées, avec l'amour qui envahis-
sait son être. Il quitta le bal et rentra
chez lui à pied, rêvant de joies surhu-
maines, bercé par l'hymne amoureuse
que chantaient son cœur et ses lèvres.
.̃'̃̃̃.̃̃ 'si' '.̃̃̃̃•̃
Nous sommes au lendemain de la fête
donnée par Robert Dachet.
Cette journée doit être fécond'e en in-
cidents.
Le Paris des étrangers qui y viennent
pour se divertir, celui du bourgeois pla-
cide qui vit de ses rentes, du commer-
çant qui borne son horizon à son quar-
tier, ne sont que des faces de cette ville
aux mille aspects. A côté du boulevard
somptueux, de la rue aux riches maga-
sins et brillamment éclairés, il y a les
rues misérables et tortueuses, les carre-
fours boueux, les impasses sans issue,
les ruelles fétides où le soleil n'a jamais
pénétré, où deux personnes ne passe-
raient pas de front; à côté des industries
avouables, patentées, se rencontrent les
industries interlopes. Un écrivain d'il y
a vingt ans, qui possédait son Paris sur
le bout du doigt, nous a fait connaître
plusieurs de ces industries ignorées; i
mais nous avons progressé depuis ce
temps et aujourd'hui ce serait une nou*
velle étude à faire.
Ce que nous avons à présenter à nos
lecteurs est une page des vrais mystèx«§
Baker était aussi coupable que s'il avait
accompli l'attentat qu'il a seulement
essayé de commettre.
Il dit qu'une condamnation à douze moia `
de détention, sans travail forcé, sans être sou-
mis à la discipline rigoureuse de la prison, et
une amende de 500 livres, est une simple
morsure de puce (flea, bite). Le colonel pourra
se distraire, pourra recevoir ses amis, vivre
comme il lui plaira, passer son temps le plus
agréablement possible et continuer des rela-
tions avec des personnes de sa classe. On n'a
jamais vu un ecclésiastique ne pas subir les
travaux forcés parce qu'il avait la chance
d'être ecclésiastique, Un grand nombre de
marchands et de banquiers, dont les senti-
ments valaient bien ceux de ce colonel, ont
été condamnés à la servitude pénale pour des
crimes beaucoup moins odieux.
Il a rappelé ensuite les peines dont on frap-
pait les personnes qui séduisaient une jeune
fille, les voleurs de nuit, les maris qui bat.
taient leurs femmes. Il a terminé en disant
que la sentence rendue en faveur du colonel
Baker lui avait permis de faire un pied-de-
nez à la justice de son pays tosnap his ftn-
gers on justice in this counlry.
Au milieu de l'émotion qu'excite ce
petit discours, un membre des Commu-
nes raconte qu'il y a vingt-cinq ans,
M. Kenealy avait été condamné à un
mois de prison pour sévices sur la per-,
sonne de son propre fils, et que, par con-
séquent, il avait moins que personne le
droit de s'insurger contre les sentences de
la justice. La Chambre des communes a
décidé qu'elle passerait à l'ordre du jouiy-,
sans plus tenir compte de l'incident.
/» M: Cuvillier-Fleury, .comme nous
l'annoncions hier matin, a consacré tout
un article de réfutation aux Mémoires
d'Odilon Barrot, surtout en ce qui con-,
cerne Louis-Philippe, pour qui l'ancien
chef de l'opposition dynastique montre
une malveillance peu dissimulée. Odilon
Barrot a non-seulement méconnu, mais
mal connu le roi des Français, et c'est
une occasion pour M. Cuvillier-Fleury
de tracer un intéressant portrait de ce
monarque.
Le roi, quoiqu'il eût une certaine impétuo-
sité de premier mouvement vis-à-vis de' ses
parents et de ses amis, ne se livrait pas tout
entier au premier venu, fût-il aussi honorable
que M. Barrot. Il se laissait juger avec une
sorte de placide indifférence, trop facile à
tourner contre lui. Il en appelait volontiers,
comme son aïeul Henri IV, du présent aveu-
gle à l'avenir mieux informé. C'est bien lui
qui aurait pu dire avec l'illustre Guizot que
l'injure n'asrivait pas « à la hauteur de son
dédain ». A cette patience de son âme -en face
dé l'injustice ne se mêlait aucun orgueil; sa
rancune prenait mesure sur sa bonté. ,11 n'a
jamais su haïr, et c'est encore une inexactitude
de M. Barrot de prétendre qu'il méprisait les
hommes. Personne n'avait plus le respect de
la vie humaine, même chez ceux qui. avaient
attenté à la sienne. On sait le double registre
qu'il tenait avec tant de soin des grâces qu'il
avait pu; faire à des condamnés, et de celles
que ses ministres l'obligeaient à refuser. Il
avait, jusqu'à l'excès, le souci des existences,
des situations, des droits, des libertés, des in-
térêts de chacun. C'était une affaire pour lui
que la destitution d'un employé de sa maison;
on l'a vu tenir conseil, avec la reine et le gé-
néral Athalin, pour le simple renvoi d'un do-
mestique.
Tous les Parisiens savent que la
mairie de la rue Drouot, avant d'être
l'hôtel Aguado, avait appartenu à un
fameux financier du dix-huitième siècle
M. d'Augny. La Gazette de France nous
apprend une particularité assez curieuse.
En 1793 les biens de M. d'Augny évitè-
rent la confiscation grâce au dévoue-
ment et à l'adresse de son intendant qui
était le grand-père de M. François.
Coppée.
Une triste coïncidence relevée par
M. Claretie dans ï Indépendance belge, à
propos de la mort du vice-amiral Exel-
mans.
Mme la vicomtesse Êxelmans, qui habite les
environs de Saint-Galmier, avait, ce même
jour, donné asile à deux sœurs de charité
surprises par l'orage. Au moment de s'éloi-
gner, les sœurs, pour payer leur hospitalité.
déposaient dans le salon de la vicomtesse une
de ces petites images de sainteté ornées de
dentelles, et la vicomtesse était occupée à re-
garder cette image et à en lire la légende lors-
qu'on lui apporta une dépêche.
La légende de l'image était celle-ci c Le
temps nous sépare, l'éternité nous rapproche* »
Triste et pourtant consolante deviso. dit
la vicomtesse en déchirant l'enveloppe de ia
dépêche.
Cette dépêche était celle qui lui annonçait
la mort du vicomte Exelmans.
»*» V Economiste français publie une in-
téressante série d'articles de M. de Foville
sur les variations des prix en France. Lé
chapitre de la verrerie contient des ren-
seignements intéressants.
La France resta longtemps tributaire
de Paris, un des côtés omis par Eugène
Sue et ses imitateurs.
Il existe dans le faubourg Montmar-
tre une rue qui part du faubourg pour
prendre fin à la rue Lamartine, c est la
rue de Buffault.
Jadis elle pouvait être classée parmi
les voies spacieuses, mais depuis que la
grande ville a été à peu près recons-
truite, la rue de Buffault est abandonnée,
on n'y passe plus. C'est, une rue de pro:
vince, triste et solitaire. Je crois que
l'herbe y pousse dans les interstices des
pavés et que les poules y picorent en
toute tranquillité, comme dans les rues
de villages.
Au numéro de la rue de Buffault, -on
voyait à cette époque une petite maison
basse, d'aspect sombre et reluisante de
crasse et de boue délayée; depuis vingt
ans au moins, le badigeon n'y avait pas
passé. L'unique boutique du rez-de-
chaussée était occupée par un de ces
Auvergnats qui ont le privilège de ven-
dre aux crédules parisiens des fumerons
pour du charbon de bois, des pierres
noircies pour du charbon de terre, du
bois à faux poids et de l'eau puisée à la
borne voisine. Cette industrie, assez
malpropre, n'était point de nature à em-
bellir la maison dont nous parlons.
A côté de cette boutique se trouvait
un escalier de bois, aux marches tor-
tueuses, tourmentées, usées et recou-
vertes d'une couche de boue cet esca-
lier sang autre rampe qu'une grosse
corde graisseuse, conduisait au premier
étage et à l'étage en mansardes qui le
dominait. Sous l'escalier une porte bâ-
tarde, ressemblant plutôt à une issue de
cave qu'à une porte de communication,
conduisait à un terrain vague, espèce de
jardin abandonné, et, de là, par une
ruelle enserrée entre deux mucailles,, au
passage des Deux-Soeurs.
^rmand Lapone*
{La suite à demain.\
k
£
amie Mme de R. il est bon que les
jeunes gens prennent l'habitude du
monde. va, mon enfant »'î
Et alors, il est venu. Pour cela, il a
renoncé à un souper de jeunes gens, à
une loge aux Bouffes et il est là, tour-
nant et retournant son chapeau, cher-
chant une contenance.
Il aurait bien envie d'aller causer avec
ces jeunes filles collées contre la mu-
raille, mais il s'aperçoit que la mode
actuelle veut que les hommes soient
d'un côté et les femmes de l'autre. Déjà
il â voulu se mêler à la conversation po-
litique, faire une petite plaisanterie à la
table de thé. Mais, il est si jeune, c'est
à Tjeîne si on a eu l'air de l'entendre. Et
cependant, sa bonne volonté est telle
qu'il saisit les'moindres phrases au pas-
sage pour dire quelque chose, ou plu-
tôt pour pouvoir raconter à sa mère,
qu'il a été bien aimable. Peine perdue.
ses paroles tombent comme dans un
puits.
Alors, décontenancé il recule, s'adosse
à la muraille et réfléchit. Il songe à
tous les plaisirs auxquels il a renoncé;
il voit ses camarades, il entend leurs
plaisanteries, leurs joyeux éclats de ri-
re. Et il se dit « Voilà donc ce que c'est
que la société? le demi-monde est si vai-
mable ? Pourquoi le véritable monde
est-il si ennuyeux ?. »
Et cependant, sous l'influence mater-
nelle, il retournera encore chez Mme de
R. puis, quand il aura passé plusieurs
soirées comme celles-là, un jour viendra
où on. l'entraînera ailleurs.
Ah! là il ne s'ennuiera pas, certes!
Lit, les soirées seront remplies, et il y
aura de la gaieté, du mouvement, de
l'entrain, et les femmes seront aimables
et elles feront des frais! Aussi, il y
reviendra, il y restera; et, quand il
aura tout à fait abandonné la bonne so-
ciété, un jour arrivera où vous entendrez
dire « Malheureux jeune homme,
quelle vie mène-t-il? Qu'est-ce qui a
pu la jeter là? »,
Eh parbleu, c'est vous, qui, en rayon-
nant l'ennui, l'avez dégoûté du monde!
On dirait que vous cherchez à répandre
cette idée que l'ennui est inséparable du
bien et la gaieté du mal. Une fois que
vous avez convaincu la jeunesse, elle
vous croit sur parole et s'en va ailleurs.
Il n'y a pas de milieu aujourd'hui ou
bien les grandes soirées glacées par la
convention et la vanité, toutes sembla-
bles à un défilé d'Opéra, ou bien ces
réunions plus- intimes qui ne donnent
satisfaction qu'à l'esprit de coterie, à la
fièvre politique ou à l'austérité reli-
gieuse.
Mais tout cela, c'est pour nous. Je le
demande, où y a-t-il place pour la
jeunesse? que fait-on pour elle? Que
fait-on pour amuser ces jeunes filles qui
sont là immobiles sur leurs sièges ? Que
fait-on pour retenir ces jeunes gens qui
regrettent leurs théâtres et leurs clubs?
Nous leur imposons le poids de nos va-
nités et de nos conventions; et; si-nous
nous sommes bien amusés jadis, nous
•leur faisons porter le poids de nos re-
mords.
Tout cela est nouveau; je me rappelle
le monde de mon enfance jeme rappelle
ces longues causeries ces joyeuses réu-
nions, ces petits bals improvisés, quand
tout à coup, laissant là, tapisserie et tri-
cot, on ouvrait le piano, mères et jeunes
filles se mettaient à valser; après quoi,
un souper s'organisait, puis la danse re-
prenait.»
Je vois encore ces fêtes intimes qui se
prolongeaient jusqu'au jour. Je vois le
général Nègre, capitaine alors, en
tenue de route, ôtant et remettant vingt
fois son épée, et quittant la valse pour
sauter à cheval à la tête de son esca-
dron. Je vois toutes celles qui étaient
là J Alors, je me disais: « Sont-ils heu-
reux que la vie est belle comme je
m'amuserai un jour! »
Quand, devenu officier, je suis entré
dans le monde, je ne me suis point
amusé 1 lorsque j'ai cherché le plaisir, il
avait disparu. Le spectre de la vanité
l'avait chassé. Vanité de réception, va-
nité de toilette, vanité de nom, vanité
de fortune.
Comment songer à s'amuser quand on
ne songe--qu'à paraître? Dans le vrai et
franc plaisir, les moins en train sont en-
traînés par les autres; c'est une ronde
qui finit par tout emporter. Mais,les sa-
tisltactions de vanité ne s'obtenant que
sur le prochain, il faut bien qu'il y ait
une partie sacrifiée, qui fasse lés frais du
plaisir des autres.
Pour que les uns soient ravis de leur
feuilleton du FIGARO du 9 Août 1875 '1
LA.
CHASSE ~U~ FANTOMES
PREMIÈRE PARTIE
~A,~OnUR BE 0~
;̃̃ '̃ "X ̃.̃•̃̃ 'j
m Suite.,0 (
Ils entrèrent tous les deux dans le jar-
din et abordèrent Prosper.
Monsieur le comte, dit Dachet, per-
mettez-moi de vous présenter mon ami,
M. Pierre Melven, un de nos journalis-
teS les plus distingués et qui désire faire
votre connaissance.
Et se tournant vers Melven:
M. le comte de Prévodal, un Breton
qui n'a d'autre désir que de devenir un
Parisien du tout Paris.
̃ Ah monsieur, dit Melven, Paris est
un ogre dévorant: jeunesse, illusions,
fortune, tout y passe.
Puis-je vous croire en ce moment? Y
demanda Prospei en souriant.
Et son regard enthousiaste se pro-
mena sur la foule.
Dachet les avaient quittés.
Melven passa son bras sous celui du
jeune homme,
Fantômes que tout cela!
Fantômes, ces femmes charmantes,
jeunes, belles ?
•– Fantômes, monsieur le comte! fan.
tômes séduisants, il est vrai, mais de
ûùin. Si vous voulez conserver vos illu-
sions, si vous voulez vivre heureux et
longtemps, fuyez-les.
Qu'est-ce donc que la vie, selon
,vous? demanda Prosper.
Keprpduction autorisée pour les journaux qui
pat traité avec la société des Gens &,l«ttxes.
succès, il faut que les autres soient at.
tristés de leur défaite, puisque c'est une
lutte Et alors, on se détaille, on s'exa-
mine, on compare. tandis que la maî.
tresse de maison, au lieu de se donner
tout entière au plaisir de ses invitéSj se
préoccupe de savoir si sa mise en scene
égale les soirées de la veille.
Mon Dieu, si cela nous amuse da ne
plus nous amuser, c'est bien, c'est notre
affaire; mais alors, il ne faut pas se
plaindre que les jeunes gens abandon-
nent un pareil monde; il faut plutôt s'é-
tonner de la bonne volonté qu'ils met-
tent à,y passer encore quelques heiires; ->
car, je vois bien ce que nous faisons
pour nous, mais je ne vois pas ce que
nous faisons pour eux. La politique, la
convention, la vanité, l'austérité, tout
cela c'est nous, c'est pour nous. A vingt
ans il faut autre chose. Il faut donner un
cours à ce trop plein de vie et à cette
sève qui a besoin de se répandre. Si vous
ne lui donnez pas un aliment dans votre
monde, elle ira le chercher ailleurs.
Vous vous décriez Et oui le meilleur
moyen d'éviter le mal n'est pas de le
maudire, c'est-à-dire d'ennuyer la jeu-
nesse par des sermons; c'est de lui
prouver qu'on peut s'amuser honnête-
ment C'est d'inspirer à ses enfants cette
pensée, que c'est encore dans la maison
paternelle que se trouve le bonheur le
plus vrai, le plus complet que c'est dans
le monde honnête que se trouvent les
meilleures joies; joies sans amertume,
sans arrière-pensée. Et alors, ils vous
resteront; ils vous resteront malgré cer-
tains entraînements et certains écarts.
Mais, si vous comptez sur la morale, sur
la surveillance et l'austérité, tout sera
inutile. Le jeune homme va au plaisir,
comme la fleur au soleil.
Vous vous lamentez! Eh La vie
est une lutte il faut lutter. Tout autour
de vous, il y a des créatures que vous
ne voyez pas, mais qui sont là, qui at-
tendent, qui guettent, profitant de vos
fautes, d'autant plus aimables que vous
Fêtes moins. Contre elles, vous devez
combattre sans relâche pour garder non-
seulement vos enfants, mais vos frères,
vos neveux, vos maris! 1
Alors même que vous avez perdu le
goût du plaisir, il faut vous. rajeunir
pour vos fils, et si les deuils et les cha-
grins vous en ôtent le. courage, il faut
au moins animer votre salon, y faire en-
trer la vie et la lumière, ne pas laisser
l'implacable ennui le glacer de ses froi-
des ailes. En un mot, il faut arriver à
ce que vos enfants disent tôt ou tard:
«Nous avons pu nous étourdir dans le
demi-monde, mais c'était un plaisir mal-
sainj plein de dégoût et de remords.
C'est encore ici qu'est le vrai bonheur,
la véritable joie; il n'y a qu'ici qu'on
est vraiment heureux. »
Saint-Gknest.
FIGARO EN VOYAGE
LES COURSES DE DEAUVILLE-TROUVILLK
Je serais tenté de croire que les cour-
ses ont un peu d'influence sur la tem-
pérature -Ail y a des années où elles amè-
nent invariablement la pluie, il y en a
d'autres où elles sont des porte-beau
temps.
Il y a huit jours, j'arrivais au Havre au
milieu d'un déluge décourageant pour
les plus vieux loups de mer Il faisait un
temps exquis le lendemain et le surlen-
demain sur le turf
Depuis un mois, à Deauville, les tou-
ristes étaient perpétuellement entre
deux eaux. Nous arrivons, et le ciel dé-
couvre tout à coup son voile gris pour
se teindre du bleu le plus pur et nous
prométtre une semaine sans nuages! 1
Il y a de quoi, ce me semble, réconci-
lier avec les courses les gens qui profes-
sent pour elles la plus complète indiffé-
rence. Je n'ai pas trouvé Deauville bien
changé depuis l'année dernière, c'est
toujours la même plage un peu aride,
bordée de villas d'une élégance qui con-
traste avec la simplicité du site qui les a
vues naître.
Au milieu de l'unique rue qui conduit
de la gare au Casino, se dresse encore le
socle en marbre de la statue du feu duc
de Morny; la statue est à côté dans un
hangar et dort paisiblement dans une
caisse d'emballage, jusqu'à ce qu'il plaise
aux Deauvillais de la remettre à sa place.
Ces excellents Deauvi!lais! il paraît
que ce n'est pas la bonne volonté qui
leur manque; plus d'une fois déjà,* ils
-La vie? Une plaisanterie amère, un
cigare de la régie 1
L'amour? •
L amour sentiment? Fantôme! l'a-
mour passion? Lisez Chamfort; il en
a donne une excellente définition.
L'amitié ?
Fantôme l'égoïsme à un
Vous calomniez l'humanité, mon-
sieur.
Je dis la vérité
Le bonheur?
Autre tantôme un mensonge 1
La gloire ?
Fantôme l'ombre de l'ombre
L'honneur?
Fantôme Une convention dont les
degrés sont si nombreux qu'on n'en voit
pas les extrémités.
Le patriotisme?
Fantôme! Allez à la Bourse, de une
heure à trois heures, vous verrez ce
qu'on le cote
La famille?
Fantôme une invention pour héri-
ter de ses oncles, tantes, cousins et cou-
sines. lorsqu'ils sont riches! Tout cela
fantômes, rengaines, mensonges, illu-
sions trompeuses. Il n'y a plus guère que
les collégiens âgés de moins de douze
ans, les demoiselles non nubiles et les
Bretons fraîchement débarqués qui les
prennent pour des réalités.
Vous ne croyez donc à rien
Si fait; je crois'aux huîtres vertes,
aux écrevisses bordelaises et au cham-
pagne qui porte la marque veuve Clic-
quot.
Allons, dit Prosper en souriant, vous
êtes moins coupable que je ne le pensais.
Je crois encore a autre chose, s'em-
pressa d'ajouter Melven en fixant son re-
gard vers l'un des points de la salle.
Ah! voyons!
Regardez cette belle jeune fille dont
le teint est blanc et mat comme celui
d'une créole, et qui se promène au bras
d'un grand jeune homme à la moustache
blonde.
Prosper tressaillit.
II venait de reconnaître sa voisine.
<– Je la vais, dit-ii-
16
ont eu l'intention d'exhumer le bronze
de leur fondateur; mais leurs frères ré-
publicains du Havre les ayant menacés
de leur tirer tes oreilles au cas où ils se
permettraient cette petite cérémonie,
ils ont prudemment retiré la clef qu'ils
avaient engagée dans la serrure du
hangar!
II y a un monde fou Deauville, et on
ne le dirait pas à voir ses rues et ses pro-
menades presque constamment désertes.
L'aristocratie baigneuse ,qui le peuple
sort peu, et ce n'est guère que pendant
la semaine des courses qu'il sera possi-
ble de la passer en revue..
Cependant, presque tous les chalets
sont habités.
Voici d'abord ceux qui sont occupés
par leurs propriétaires
Chalet de M. Deîahante,,
Chalet du baron Poisson,
Chalet de M.-Sapia,
Chalet de M. Artus,
Chalet du comte de. Gontaut-Biron
Chalet de M. Donon.
Le chalet de Morny est loué par la
grande-duchesse de Toscane.
Le chalet Demidoff, récemment acheté
par M. de Soubeyran, est louç par le
prince Troubetzkoï.
Le chalet Kersaint est loué par Mme
Erlanger.
Le chalet Tenré est loué par, Mme
Cahen d'Anvers.
Le chalet Dalloz est loué par M. Pre-
musel.
MM. Edmond de Rothschild et
.Edouard Fould ont loué la villa Djemil.
La baronne de Poilly est dans la maison
Cardon; sa fille l'a quittée hier, sans
penser, bien enteridu, au mariage dont
on a. parlé entre elfe et le marquis de
Caumont-Laforce, projet qui n'a jamais
existé.
Je sais encore que Deauville complète
la liste des étrangers qui y sont en vil-
légiature par les noms suivants le comte
et la comtesse de Saint-Sauveur, le duc
et la duchesse de Fézensac Batbedat,
William Baron, le comte et la comtesse
de Merlemont, Delâtre, le prince Louis
Murât, Roy, le baron de Varenne, Hu-
bert Delamarre, le comte de Croix, le
marquis du Lau, de Bonneval, Pernetti,
le baron J. d'Hélie, le vicomte Aguado,
le comte de Juigné, Staub, les dames
Mendeville, le baron do, Noirmont, le
comte de Tournon-Simiane, Riggs, Gas-
pard de Errazu, Berthelin, René Petit,
Shepard, Post, le baron de Bourgoing, le
vicomte'et la vicomtesse de Grouchy, le
vicomte Martel de Janville, Mme de
Fitz-James, la princesse Tolstoï, la prin-
cesse Galitzin, Edouard André, Moreau-
Chaslon, de la Redorte, de Gouy-d'Arsy,
Schickler, R. Hennessy, de Janzé, vi-
comte Paul Daru, de Jaucourt, As. Blount,
Hallez-Claparède, etc.
Trouville, où je n'ai fait que passer un >
quart d'heure ce matin, me paraît moins
brillant et plus encocotté; j'y ai cepen-
dant aperçu M. et Mme Bischofsheim, de
Borda, Delchet, Carolus Duran et Ca-
dol. Mais ma promenade a été si
courte!
Ici, l'on fait du sport avec frénésie.
Hier on a commencé à tirer aux pi-
geons. Ce matin, après le travail des
chevaux de course, qui étaient au nom-.
bre de soixante-dix-nèuf sur l'hippo-
drome, j'ai vu plusieurs sportsmen se li-
vrer à un jeu nouvellement introduit en
France c'est le Lawn-Tennis, traduisez
paume de pelouse.
Sur l'herbe soigneusement tondue et
roulée, on trace avec un pinceau trem-
pé dans la chaux délayée un champ
de vingt mètres de long sur huit mè-
tres de large; on marque un camp à
chaque extrémité et au milieu du champ
on tend un filet. La règle du jeu est a
peu près celle de la courte paume; seu-
lement on se sert de raquettes et de
balles légères en caoutchouc, ce qui fait
que les femmes pourraient très bien y
prendre part.
Depuis deux jours, la jeunesse sportive
joue au Polo vers cinq heures. Le Polo
est assez connu déjà pour que je n'aie
pas besoin de le décrire en détail. Il a
été très suivi ce printemps au bois de
Boulogne. C'est le crocket à cheval. On
trace une piste avec des petits drapeaux;
les cavaliers, montés sur de petits poneys,
en nombre égal, se divisent en deux
camps, les uns vêtus de casaques rouges,
les autres vêtus de casaques bleues. Au
centre,, on lance une boule qu'il s'agit
de pousser, entre deux drapeaux, dans
le camp opposé.
Cet exercice donne lieu à des mêlées
étonnantes, les coups de marteau pleu-
vent et, quelle que soit l'adresse des
joueurs, il est bien rare que l'un d'entre
Eh bien, il n'y a de vraiment bons
et de vraiment amoureux ici que ce
couple je crois à leurs grandes qualités,
à leur sincère amour, mais ils seront
malheureux! 1
Pourquoi ?
Parce que le bonheur est une illu-
sion. parce que leur amour, qui est une
honte, un reproche vivant pour tous ces
marchands chez lesquels le sentiment t
n'existe pas, soulèvera des tempêtes et
des haines qui briseront la vie de ces
enfants! L'amour de l'or a. tout anéanti
chez les gens que vous voyez autour de
nous'; leur cœur est vide de dignité et
de noblesse, et ce qu'ils appellent
l'amour n'est qu'un appétit sensuel, un
désir de chair fraîche.
Comment se nomme cette char-
mante personne?
Elise Desprez.
-Elle est orpheline?
-Non; mais son père habite le Bré-
sil pour les besoins de son commerce sa
mère est cette belle personne aux che-
veux cendrés qui est assise à notre
droite. Cette famille est déplacée ici les
autres font tache sur elle.
La connaissez-vous assez pour me
présenter?
Pas assez Mme Desprez ni sa fille,
mais suffisamment l'amoureux. Tenez,
il m'a aperçu et vient de ce côté! Vous.
allez être satisfait.
Bonsoir, Desgenais, dit Paul Mai-;
sonneuve d'un ton joyeux et en tendant
sa main à Melven.
Bonsoir, monsieur Melven, dit la
petite voix flûtée d'Elise.
Bonsoir, mes beaux amoureux, re-
pliqua le journaliste. Je disais tant de
mal de vous tout à l'heure à monsieur,
qu'il a désiré vous être présenté.
Elise leva ses yeux charmants et pleins
d'expression sur Prosper.
Monsieur le comte de Prévodal, dit
Melven, un Breton naïf et crédule qui
croit à une foule de choses que nous avons
répudiées depuis longtemps. Mlle Elise
Desprez, une perle d un prix inestima-
ble, son pendant n'existant pas. M.
Paul Maisonneuvet l'heureux fiancé de
eux ne revienne pas avec des bleus ou
des bosses. Quant aux jambes des poneys,
je n'en parle pas, ils ont ls sort d'un jeu
de quilles
Quant au Casino, il ne sera guère fré-
quenté qu'à partir de demain. Voici le
programme des -soirées de la semaine
Dimanche 8, représentation de Mme
Pesçhard et Edouard Georges.
Lundi 9, pupazzi de Lemercier de
Neuville.
Mardi 10, bal et feu d'artifice sur la
nouvelle jetée des bains.
Mercredi 1 t, représentation de Mlle
Antonine et de M. Porel, de l'Odéon.
Jeudi 12, représentation du Procès
Veauradieux:
Vendredi 13, Repos.
Samedi 14, Bal des pauvres.
Voilà ce qui peut s'appeler une 'se-
maine bien remplie 1 Au moment où je
vous envoie ces notes, j'entends roucou-
ler la fauvette Peschard qui répète au
Casino de Deauville, en même temps
que le rossignol Judic gazouille au Ca-
sino de Trouville.
Les deux divas, autrefois inséparables,
ont maintenant chacune sa plage où
sont les duos d'antau ?
P. S. J'apprends à l'instant que le
prince de Galles, accompagné du duc de
Saint-Albans, arriveraici mardi. Il devait
habiter son yacht, mais il paraît avoir
changé d'avis, car on lui a retenu un ap-
partement dans la maison déjà occupée
par Mmes de Fezensac et de Saint-Sau-
veur. L'argenterie de Son Altesse vient
d'y être expédiée.
TÉLÉGRAMMES & CORRESPONDANCES
Froeschwiixer, 7 août. -Le monu-
ment élevé aux soldats français morts le 5
août 1870, inauguré hier, est l'œuvre d'une
souscription ouverte en Alsace, sur l'initiative
de Mlle Fanny de Diétrich. Il est situé sur
une colline dominant Wœrth et Frceschwiller
et faisant face à une autre colline sur laquelle
s'élève le beau noyer, qu'on appelle l'arbre de
Mac-Mahon.
Le monument se compose d'abord d'un
soubassement élevé, sous lequel se trouve
l'ossuaire, et qui est formé par huit sarco-
phages accouplés sur lesquels sont inscrits
les noms des différents régiments qui ontpris
part à la bataille. Voici les inscriptions;
Premier et deuxième sarcophage
Infanterie de ligne Chasseurs à pied
3= 18° 21° 36e 45» 47° 10r 8° 13° 16°
48° 50' 74» 78' 96e 99e 17<=
Troisième et quatrième sarcophage
Zouaves Tirailleurs algériens
(Turcos)
1« 2« 3» l« 2» et S«
Cinquième et sixième sarcophage
Artillerie Génie
6° 7° 9e 12? i«
20° 2'
.Septième et huitième sarcophage
Cuirassiers Chasseurs: à cheval
8e 9' 11e
Dragons .̃ Hussards
40» >
Lanciers
2» 6»
Sur ïe soubassement s'élève une sorte ô?e
chapelle, percée de quatre portes fermées de i
grilles, sur lesquelles s'appliquent des palmes
dorées. La couverture de la chapelle se ter-
mine par une croix à quatre branches ornée
de guirlandes de chêne. Différents chiffres,
glaives, couronnes, décorent le monument,
qui est exécuté en grès rouge des Vosges.
Cette œuvre imposante et sévère a été con-
çue et exécutée par un Alsacien, M. Dock.
Deux mille personnes environ assistaient à
la cérémonie. Dans le nombre, on distinguait
les familles de Diétrich, de Tûrckheim, de
Bussière, de Pourtalès et Charpentier quel-
ques dames en grand deuil, Mme.de Joinville
entre autres, veuve du colonel du 99e de li-
gne tué à Frœschwiller.
M. de Bussière aconstaté dans son discours
que l'Alsace seule a fait les frais du monu-
ment.
Il n'y a eu d'exception que pour le 2e régi-
ment de cuirassiers français et pour M. le
comte Louis de Turenne qui avait pris part à
cette sanglante journée. Le comité alsacien
n'a pas cru pouvoir refuser leur offrande.
NANCY, 7 août La cour d'appel de
Nancy vient de perdre successivement M. Lif-
fort de Bufféveht, président de chambre, che-
valier de la Légion d'honneur et M. Louis
Mengin, bâtonnier de l'ordre des avocats, au-
teur d'un essai sur l'histoire du barreau Lor-
rain. ;i' ̃
«~«- La Cour d'assises vient de condam-
ner à mort François Chaussy, berger, reconnu
coupable d'attentat à la pudeur et de meurtre
Mlle Elise et que la banque n'a pas en-
core gâté.
Je proteste en ce qui me concerne,
dit Elise gaiement.
Moi, mademoiselle, dit Prosper,
j'estime les appréciations de M» Melven
très exactes.
Ce qu'il nous dit de vous, monsieur, 1
observa Paul Maisohneuve, est un véri-
table éloge.
-Et voici ma main, en signe d'alliance,
ajouta Elise, car, comme vous, monsieur,
je crois à tout ce qui est beau, noble,
grand, généreux.
Prosper prit cette petite main mi-
gnonne, et la pressa affectueusement en
disant
N'y eût-il que vous d'exception, ma-
demoiselle, aux théories de M. Melven,
que je conserverais intactes toutes mes
croyances, toute ma foi.
Oh n'écoutez pas trop M. Melven, il
est meilleur qu'il ne paraît. Je connais
de lui des traits charmants.
-Je me sauve! s'écria Melven, ça me
changerait si j'entendais faire mon éloge.
Elise se tourna vers son fiancé.
Paul, dit-elle, M. le comte de Pré-
vodal est notre voisin.
Si monsieur le comte veut bien me
le permettre, j'irai lui faire une visite.
Et vous serez le bienvenu, monsieur..
Les jeunes gens se saluèrent et Paul
et Elise continuèrent leur promenade.
Eh bien dit Melven à Prosper ,voilà
la connaissance faite, mais à part la pré-
sentation, il me semble que vous n'aviez
pas besoin de moi.
J'aperçois tous les matins Mlle Elise
Desprez à son balcon, et j'avais eu l'hon-
neur de la saluer sans la connaître.
Puisque vous avez la foi, cultivez
cette amitié, monsieur le comte; si elle
n'existe pas là, elle n'existe nulle part.
Je ne crois plus à vos boutades,
monsieur Malven, depuis que j'ai en-
tendu Mlle Desprez faire votre éloge.
Vous avez tort. Je vous crie a casse-
cou parce que je vous vois jeune et
confiant; parce que, s'il faut vous le dire,
je suis un peu de cette vieille race celti-
que dont vous descendez. Mon nom doit
vous rapprendre, mon père était Breton»
sur le jeune François Pierson, âgé de sept
ans. fils d'un fermier des environs de Géna-
ville.
L'exécution aura lieu sur l'une des places
publiques de Nancy.
Bellegarde (Ain) 7 août. Un
commis-voyageur d'une maison de Paris,
nommé Jacquot, a été trouvé porteur ces
jours-ci, à Bellegarde, de deux Lanterne et
de trois brochures dont le titre est Le voile.
Le tribunal de Nantua vient de le condam-
ner à 50 fr. d'amende.
• La crue du Rhône s'est arrêtée.
L'eau se retire lentement à Seyssel. Le
beau temps est revenu.
–̃̃–̃̃ Lyon, 8 août. Le Rhône a com-
mencé à décroître ce matin et a baissé de 20
centimètres. Tout danger semble écarté.
Chahbéry, 8 août. Après soixante
heures on a vu ce matin le soleil briller dans
la vallée de Chambéry. Il était temps.
SAINT-HoNORÉ-LES-BAINS (Nièvre~ 8
août. C'est par erreur qu'on a annoncé
l'arrivée prochaine du général Frossard a
Contrexéville. L'honorable général est ici
depuis le 25 juillet, et est bien souffrant.
• > Blois, 7 août. M. Edmond Cha-
maillard, rédacteur en chef-gérant du jour-
nal bonapartiste L 'Echo du Loir-et-Cher, est
poursuivi par le duc d'Aumale pour diffa-
mation.
L'assignation est donnée pour le 13 août
en police correctionnelle.
L'offre faite par la ville, d'un em-
placement dans l'ancien cimetière pour la
reconstruction d'un haras, vient d'être ac-
ceptée par l'Etat.
Comme nous avons vu au budget de l'agri-
culture une somme de 395,000 fr. portée pour
faire face à la réorganisation de cet établis-
sement, nous espérons que des travaux im-
portants vont s'ouvrir dans notre ville.
On nous affirme que les plans sont déjà
dressés par M. de la Morandière.
Rouohantin, 7 août. Il y a quel-
ques mois M. Quatrehomme, notaire à La-
motte-Beuvron, disparaissait en laissant un
déficit considérable, mais il put être arrêté
presque aussitôt.
Aujourd'hui, l'instruction est terminée.
Quatrehomme comparaîtra devant la Cour
d'assises dans la session de novembre il aura
à répondre à cinquante-huit chefs d'accusa-
tion.
Cette affaire ne manquera pas d'être fort
intéressante.
Robert Milto.n.
» i Londres, 7 août. Beaucoup d'An-
glais ont été étonnés d'entendre .M. le mar-
quis d'Harcourt s'exprimer aussi purement en
anglais. Ils ignorent que l'ambassadeur de
France est, comme son prédécesseur, le comte
de Jarnac, à moitié Anglais.
Le père du marquis; émigré pendant la Ré-
volution, épousa la fille d'un propriétaire du
Sussex, qui se nommait Harcourt, et se fit
naturaliser Anglais.
Le frère de l'ambassadeur a passé toute sa
vie en Angleterre, où il a été page de Geor-
ges III et officier dans la garde royale. C est
lui qui a hérité de la terre, près Windsor, ap-
partenant au feu lord Harcourt, après son
mariage avec la fille du général Cavendish.
M. Georges-Trevor-Douglas Bernard, mar-
quis d'Harcourt, est né le 4 novembre 1809.
•– Un Français arrivé à Douvres hier
matin, venant de Calais, s'est suicidé en se
jetant du haut du quai dans la mer. Il pa-
raissait avoir une cinquantaine d'années, et,
d'après ses papiers, on croit qu'il se nomme
Merlin d'Haillecourt Originaire de -Calais.
Auguste Marcade.
PARIS m jouis Jûm
M. Lacascade a jailli– pardon a parlé:
la République française contient la circu-
laire du nouveau député de la Guade-
loupe à ses électeurs il se dit républi-
cain pour la vie et recommande le pro-
gramme qu'on va lire à « tous les créo-
les de bonne volonté »
République; avec ses garanties de liberté et
d'égalité
Assimilation politique des colonies à la mé-
tropole
Guerre à tous les préjugés de couleur.
Parions que M. Lacascade est unpeu.
brun.
La Chambre des communes, après
l'incident Plimsoil, a eu Pincident Ke-
nealy. C'est le nom de l'avocat qui, après
s'être compromis dans l'affaire de l'im-
posteur Tichborne et s'être fait rayer du
tableau des avocats, est devenu membre
du Parlement pour l'Irlande. Le 5, il a
protesté en plein Parlement contre la
sentence qui condamne le colonel Baker
à douze mois de détention et qui lui pa-
raît trop douce.
Selon le récit qu'on envoie au Gaulois,
M. -Kenealy a prétendu que le colonel
et il m'a semblé que cette origine, qui
nous est commune, éveillait en moi je ne
sais quels sentiments nouveaux que je ne
croyais point posséder
Vous vous calomniez, monsieur
Melven, dit Prosper très touché de ces
paroles. Voici ma main, donnez-moi la
vôtre.
De grand cœur.
Nous nous reverrons, n'est-ce pas ? 2
Je le désire vivement.
̃ Et moi aussi.
Les deux hommes échangèrent leurs
cartes et se séparèrent.
Prosper de Prévodal n'avait plus rien
à faire chez Dachet.. Il éprouvait le be-
soin de s'isoler, de se sentir vivre avec
ses pensées, avec l'amour qui envahis-
sait son être. Il quitta le bal et rentra
chez lui à pied, rêvant de joies surhu-
maines, bercé par l'hymne amoureuse
que chantaient son cœur et ses lèvres.
.̃'̃̃̃.̃̃ 'si' '.̃̃̃̃•̃
Nous sommes au lendemain de la fête
donnée par Robert Dachet.
Cette journée doit être fécond'e en in-
cidents.
Le Paris des étrangers qui y viennent
pour se divertir, celui du bourgeois pla-
cide qui vit de ses rentes, du commer-
çant qui borne son horizon à son quar-
tier, ne sont que des faces de cette ville
aux mille aspects. A côté du boulevard
somptueux, de la rue aux riches maga-
sins et brillamment éclairés, il y a les
rues misérables et tortueuses, les carre-
fours boueux, les impasses sans issue,
les ruelles fétides où le soleil n'a jamais
pénétré, où deux personnes ne passe-
raient pas de front; à côté des industries
avouables, patentées, se rencontrent les
industries interlopes. Un écrivain d'il y
a vingt ans, qui possédait son Paris sur
le bout du doigt, nous a fait connaître
plusieurs de ces industries ignorées; i
mais nous avons progressé depuis ce
temps et aujourd'hui ce serait une nou*
velle étude à faire.
Ce que nous avons à présenter à nos
lecteurs est une page des vrais mystèx«§
Baker était aussi coupable que s'il avait
accompli l'attentat qu'il a seulement
essayé de commettre.
Il dit qu'une condamnation à douze moia `
de détention, sans travail forcé, sans être sou-
mis à la discipline rigoureuse de la prison, et
une amende de 500 livres, est une simple
morsure de puce (flea, bite). Le colonel pourra
se distraire, pourra recevoir ses amis, vivre
comme il lui plaira, passer son temps le plus
agréablement possible et continuer des rela-
tions avec des personnes de sa classe. On n'a
jamais vu un ecclésiastique ne pas subir les
travaux forcés parce qu'il avait la chance
d'être ecclésiastique, Un grand nombre de
marchands et de banquiers, dont les senti-
ments valaient bien ceux de ce colonel, ont
été condamnés à la servitude pénale pour des
crimes beaucoup moins odieux.
Il a rappelé ensuite les peines dont on frap-
pait les personnes qui séduisaient une jeune
fille, les voleurs de nuit, les maris qui bat.
taient leurs femmes. Il a terminé en disant
que la sentence rendue en faveur du colonel
Baker lui avait permis de faire un pied-de-
nez à la justice de son pays tosnap his ftn-
gers on justice in this counlry.
Au milieu de l'émotion qu'excite ce
petit discours, un membre des Commu-
nes raconte qu'il y a vingt-cinq ans,
M. Kenealy avait été condamné à un
mois de prison pour sévices sur la per-,
sonne de son propre fils, et que, par con-
séquent, il avait moins que personne le
droit de s'insurger contre les sentences de
la justice. La Chambre des communes a
décidé qu'elle passerait à l'ordre du jouiy-,
sans plus tenir compte de l'incident.
/» M: Cuvillier-Fleury, .comme nous
l'annoncions hier matin, a consacré tout
un article de réfutation aux Mémoires
d'Odilon Barrot, surtout en ce qui con-,
cerne Louis-Philippe, pour qui l'ancien
chef de l'opposition dynastique montre
une malveillance peu dissimulée. Odilon
Barrot a non-seulement méconnu, mais
mal connu le roi des Français, et c'est
une occasion pour M. Cuvillier-Fleury
de tracer un intéressant portrait de ce
monarque.
Le roi, quoiqu'il eût une certaine impétuo-
sité de premier mouvement vis-à-vis de' ses
parents et de ses amis, ne se livrait pas tout
entier au premier venu, fût-il aussi honorable
que M. Barrot. Il se laissait juger avec une
sorte de placide indifférence, trop facile à
tourner contre lui. Il en appelait volontiers,
comme son aïeul Henri IV, du présent aveu-
gle à l'avenir mieux informé. C'est bien lui
qui aurait pu dire avec l'illustre Guizot que
l'injure n'asrivait pas « à la hauteur de son
dédain ». A cette patience de son âme -en face
dé l'injustice ne se mêlait aucun orgueil; sa
rancune prenait mesure sur sa bonté. ,11 n'a
jamais su haïr, et c'est encore une inexactitude
de M. Barrot de prétendre qu'il méprisait les
hommes. Personne n'avait plus le respect de
la vie humaine, même chez ceux qui. avaient
attenté à la sienne. On sait le double registre
qu'il tenait avec tant de soin des grâces qu'il
avait pu; faire à des condamnés, et de celles
que ses ministres l'obligeaient à refuser. Il
avait, jusqu'à l'excès, le souci des existences,
des situations, des droits, des libertés, des in-
térêts de chacun. C'était une affaire pour lui
que la destitution d'un employé de sa maison;
on l'a vu tenir conseil, avec la reine et le gé-
néral Athalin, pour le simple renvoi d'un do-
mestique.
Tous les Parisiens savent que la
mairie de la rue Drouot, avant d'être
l'hôtel Aguado, avait appartenu à un
fameux financier du dix-huitième siècle
M. d'Augny. La Gazette de France nous
apprend une particularité assez curieuse.
En 1793 les biens de M. d'Augny évitè-
rent la confiscation grâce au dévoue-
ment et à l'adresse de son intendant qui
était le grand-père de M. François.
Coppée.
Une triste coïncidence relevée par
M. Claretie dans ï Indépendance belge, à
propos de la mort du vice-amiral Exel-
mans.
Mme la vicomtesse Êxelmans, qui habite les
environs de Saint-Galmier, avait, ce même
jour, donné asile à deux sœurs de charité
surprises par l'orage. Au moment de s'éloi-
gner, les sœurs, pour payer leur hospitalité.
déposaient dans le salon de la vicomtesse une
de ces petites images de sainteté ornées de
dentelles, et la vicomtesse était occupée à re-
garder cette image et à en lire la légende lors-
qu'on lui apporta une dépêche.
La légende de l'image était celle-ci c Le
temps nous sépare, l'éternité nous rapproche* »
Triste et pourtant consolante deviso. dit
la vicomtesse en déchirant l'enveloppe de ia
dépêche.
Cette dépêche était celle qui lui annonçait
la mort du vicomte Exelmans.
»*» V Economiste français publie une in-
téressante série d'articles de M. de Foville
sur les variations des prix en France. Lé
chapitre de la verrerie contient des ren-
seignements intéressants.
La France resta longtemps tributaire
de Paris, un des côtés omis par Eugène
Sue et ses imitateurs.
Il existe dans le faubourg Montmar-
tre une rue qui part du faubourg pour
prendre fin à la rue Lamartine, c est la
rue de Buffault.
Jadis elle pouvait être classée parmi
les voies spacieuses, mais depuis que la
grande ville a été à peu près recons-
truite, la rue de Buffault est abandonnée,
on n'y passe plus. C'est, une rue de pro:
vince, triste et solitaire. Je crois que
l'herbe y pousse dans les interstices des
pavés et que les poules y picorent en
toute tranquillité, comme dans les rues
de villages.
Au numéro de la rue de Buffault, -on
voyait à cette époque une petite maison
basse, d'aspect sombre et reluisante de
crasse et de boue délayée; depuis vingt
ans au moins, le badigeon n'y avait pas
passé. L'unique boutique du rez-de-
chaussée était occupée par un de ces
Auvergnats qui ont le privilège de ven-
dre aux crédules parisiens des fumerons
pour du charbon de bois, des pierres
noircies pour du charbon de terre, du
bois à faux poids et de l'eau puisée à la
borne voisine. Cette industrie, assez
malpropre, n'était point de nature à em-
bellir la maison dont nous parlons.
A côté de cette boutique se trouvait
un escalier de bois, aux marches tor-
tueuses, tourmentées, usées et recou-
vertes d'une couche de boue cet esca-
lier sang autre rampe qu'une grosse
corde graisseuse, conduisait au premier
étage et à l'étage en mansardes qui le
dominait. Sous l'escalier une porte bâ-
tarde, ressemblant plutôt à une issue de
cave qu'à une porte de communication,
conduisait à un terrain vague, espèce de
jardin abandonné, et, de là, par une
ruelle enserrée entre deux mucailles,, au
passage des Deux-Soeurs.
^rmand Lapone*
{La suite à demain.\
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