Titre : Le Temps
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1940-01-11
Contributeur : Nefftzer, Auguste (1820-1876). Fondateur de la publication. Directeur de publication
Contributeur : Hébrard, Adrien (1833-1914). Directeur de publication
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 11 janvier 1940 11 janvier 1940
Description : 1940/01/11 (Numéro 28607). 1940/01/11 (Numéro 28607).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/01/2011
QUATRE-VINGTIEME ANNEE. - N" 28607
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JEUDI 11 JANVIER 1940
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CHÈQUE POSTAL : Paris, Numéro 60
SOMMAIRE
PAGE 1
Les Communiqués officiels. - Sur le front. - Sur
mer. - Le Discours de M. Chamberlain à Man-
sion House.
PAGE 2
L'Agression soviétique contre la Finlande. - Nou-
velles de l'Etranger. - La Rentrée parlemen-
taire : A la Chambre; au Sénat. - Nouvelles du
jour. - Echos et informations.
PAGE 3
Au jour le jour : la Statue de Racine, ROBERT
KEMP. - Académies. - Tribunaux. - Les
Spectacles : Théâtres; Cinémas. - T. S. F.
PAGE 4
LA JOURNÉE : DERNIÈRES NOUVELLES. - Les Opé-
rations militaires. - Sur mer. - La Reconsti-
tution de l'armée polonaise en France.
Paris, le 10 janvier 1940
BULLETIN DU JOUR
LE DISCOURS DE M. CHAMBERLAIN
Dans le discours qu'il a prononcé hier à
Mansion-House, et qui était très attendu,
M. Neville Chamberlain a fait le point de la
situation au début de l'année 1940, après quatre
mois de guerre. Son exposé prouve que le pre-
mier ministre maintient intégralement la poli-
tique du gouvernement britannique telle qu'elle
a été fixée sous l'empire des circonstances qui
ont provoqué le conflit européen. Ayant dé-
ployé ses meilleurs efforts en vue de main-
tenir la paix, M. Chamberlain a dû reconnaître
que la politique hitlérienne constituait une me-
nace permanente pour l'ordre international et
ne laisait place à aucun règlement raisonnable
et honnête. Il demeure animé aujourd'hui de
la volonté de poursuivre la guerre jusqu'à la
victoire, parce que si cette victoire n'était pas
remportée sans équivoque possible la civilisa-
tion ne pourrait être sauvée. Telle est bien la
pensée qui commande la politique extérieure
de la Grande-Bretagne et qui constitue le fon-
dement moral de cette coopération constante t
de l'Angleterre et de la France qui est la su-
prême garantie du maintien d'une Europe où
l'existence soit possible pour des peuples libres.
Le gouvernement de Berlin pourra se rendre
compte par le discours de M. Chamberlain que
toutes les campagnes de la propagande alle-
mande visant à dissocier les deux grandes puis-
sances démocratiques, à favoriser une paix de
compromis laissant subsister intacte la puis-
sance militaire du Reich ou à ébranler le moral
des peuples britannique et français ont totale-
ment échoué. La résolution de l'Angleterre et
de la France est la même qu'aux premiers jours
des hostilités; 'les buts de guerre des deux
puissances restent tels qu'ils furent définis le
3 septembre de l'année dernière; les condi-
tions si particulières d'une guerre qui ne res-
semble à aucune autre n'ont modifié en rien
ce qui constitue l'essentiel de la politique
franco-britannique. M. Chamberlain a souligné
avec force que toutes ses pensées et toute son
action tendent à faire le possible pour amener,
en coopération avec la France, la guerre à sa
fin victorieuse, qu'il subordonne à cette préoc-
cupation tous lès sentiments personnels et
toutes les considérations de quelque nature
qu'elles soient. Il a indiqué que cette année
1940 sera probablement décisive dans l'histoire
du monde, mais que le calme relatif actuel
n'est que le calme précédant la tempête. Aussi
a-t-il fait appel à l'esprit de sacrifice du peuple
anglais, qui ne voudra pas, a-t-il dit, rester en
arrière du peuple français dans sa résolution
d'accepter courageusement les privations insé-
parables de toute guerre. Le premier ministre
a rendu un juste hommage au peuple finlan-
dais odieusement attaqué par une puissance
avec laquelle l'Allemagne a conclu un pacte
impie, et il a montré comment la Finlande se
bat aujourd'hui pour le même idéal pour lequel
nous combattons, c'est-à-dire pour la liberté et
la justice.
À propos de l'aide à la Turquie, le premier
ministre a parlé de la coopération franco-bri-
tannique dans des termes auxquels nous ne
pouvons qu'être sensibles. Il a dit notamment
que cette collaboration de 'la France et de l'An-
gleterre se révélera si précieuse qu'on ne
voudra, ni d'une part ni de l'autre, y mettre fin
lorsque la guerre sera terminée, et qu'il pour-
rait même en résulter quelque chose de plus
large et de plus profond qui faciliterait gran-
dement la tâche de la reconstruction pacifique
qui devra être entreprise jin jour, que rien ne
contribuera davantage à la stabilité des résul-
tats qui seront obtenus que l'extension de cette
collaboration à d'autres nations d'Europe, peut-
être même du monde entier, dans le domaine
de la finance et des relations économiques. Les
commentaires de la presse anglaise ce matin
mettent l'accent sur la communauté de l'action
franco-britannique, et il ne saurait faire aucun
cloute, en effet, que celle-ci constitue la plus
sûre garantie de la victoire de nos armes. Aussi
importe-t-il, on le conçoit sans peine, que cette
solidarité totale se traduise dans les actes de
chaque jour, dans les efforts à déployer en
commun sur tous les terrains et sous tous les
climats, car on ne saurait faire de distinction
entre les positions respectives de deux empires
qui sont également baignés par toutes les mers
du monde, dont la défense doit être assurée
dans les mêmes conditions partout où c'est né-
cessaire, dont la sécurité et la prospérité dépen-
dent entièrement de la mise en commun de
leurs moyens et de leurs ressources. L'entente
franco-britannique ne prend toute sa signifi-
cation que par une action totalement commune,
ainsi qu'il se doit, au service de buts com-
muns. C'est là ce qui fait la valeur effective de
cette intime association des deux grandes dé-
mocraties à laquelle aucune autre alliance ne
peut se comparer.
Le langage que M. Neville Chamberlain a
tenu à l'adresse de l'Allemagne mériterait d'être
médité à Berlin si les esprits y sont encore
, accessibles à la raison. Les Allemands n'ont
cessé de proclamer leur volonté de détruire
l'empire britannique, tandis que le premier
ministre du Royaume-Uni dénie formellement
que les alliés, eux, souhaitent anéantir le peuple
allemand. Mais ce peuple allemand doit se
rendre, compte, a dit le chef du gouvernement
britannique, que la responsabilité d'une guerre
prolongée et des souffrances qu'elle peut en-
traîner incombe.à lui-même, ainsi qu'au tyran
qui le domine. « Il doit se rendre compte,
a-t-il ajouté, que le désir qu'ont les alliés d'un
règlement humain, juste et chrétien, ne saurait
"se satisfaire d'assurances que l'expérience a
montrées vaines. » M. Chamberlain rejoint
par là la formule de M. Daladier, quand le.
président du conseil a déclaré que la paix équi-
table et durable devra être accompagnée de ga-
ranties matérielles et positives. Sur ce point,
comme sur tous les autres. Paris et Londres
sont donc d'accord. « Dans notre volonté d'at-
teindre notre but, a dit encore M. Chamberlain,
.nous sommes unis entre nous, nous sommes
soutenus 'par les peuples de l'empire, par ia
puissance et la résolution de notre grande et
vaillante alliée, la France, par l'approbation
morale de tous ceux qui comprennent que le
sort de la civilisation est lié à notre victoire. »
Là est la certitude de cette victoire que souhai-
tent tous les peuples libres et que la vaillance
de ceux qui combattent sous nos deux drapeaux
unis saura mériter.
«ni
Le Parlement a tenu hier la première séance
de la ' nouvelle session. Chacune des deux
Assemblées était présidée par son doyen d'âge,
et Chambre et Sénat ont ainsi entendu des dis-
cours qu'inspiraient l'expérience et cette
sereine sagesse qu'acquièrent souvent les politi-
ques dans la seconde partie d'une carrière bien
remplie. M. Damecour, devant la haute Assem-
blée, M. Lévy-Alphandéry, devant la Chambre,
ont exprimé les idées et les sentiments qui sont
ceux aujourd'hui de tous les Français. Les
assentiments qu'ils ont recueillis de part et
d'autre, les applaudissement qui ont souligné
les passages principaux de leurs allocu-
tions traduisaient fidèlement l'opinion publi-
que du pays. L'hommage rendu par les deux
Assemblées aux armées nationales et le témoi-
gnage de la gratitude qui était adressé à nos
combattants par les deux présidents avaient le
ton de sincérité et de simplicité qu'on trouve
actuellement dans les manifestations de toute
la nation française. Représentants du peuple,
les parlementaires ont vraiment interprété, hier,
la foi, la volonté unanime de notre peuple.
Il faut tenir pour regrettable le bref « inci-
dent de séance » qu'a provoqué l'attitude de
trois ou .quatre députés communistes; mais il
faut aussi se bien garder d'en exagérer la por-
tée. Le mieux est de choisir le bon moyen d'en
éviter le retour, et l'on annonce aujourd'hui que
le gouvernement s'apprête à proposer au Par-
lement les mesures nécessaires à cet effet. Il
conviendra de les adopter promptement. Le
gouvernement, pour ce qui le concerne, et le
Parlement, dans l'exercice régulier de son droit
de contrôle, devront toutefois redoubler de vigi-
lance. Qu'elles proviennent d'ennemis déclarés
ou non déclarés, toutes les entreprises de propa-
gande étrangère seront ainsi réduites à l'im-
t puissance.
Le pays est prêt à supporter tous les sacrifices
qu'exige la guerre. Il se soumet à toutes les
disciplines utiles. A ceux qui assument la grave
responsabilité de le gouverner et de l'adminis-
trer de coordonner ses efforts. Nous faisons la
guerre pour rétablir la paix, une paix digne de
la civilisation, une paix qui rende à l'Europe sa
dignité, son honneur et ses libertés légitimes.
L'épreuve que subissent actuellement l'Angle-
terre et la France est douloureuse; mais les
forces morales de ces deux nations peuvent s'y
retremper, à condition, qu'elles n'oublient ni
l'une ni. l'autre et à aucun moment les causes
du mal qu'elles endurent. Il importe de vaincre
l'ennemi; il importe autant de détruire la mo-
rale immorale de cet ennemi. C'est à perpétuer
l'esprit qui anime aujourd'hui les nations com-
battant pour la justice et la loyauté internatio-
nales que nous devons nous employer. « La
France et l'Angleterre, a dit hier le premier
ministre britannique,-iront, même après la vie-,
toire, la main dans la main. » C'est la plus
noble et la plus sage, des espérances. Faisons^
en dès maintenant une certitude en fortifiant
l'union de tous les Français.
LES ENTRETIENS DE VENISE
Un communiqué officieux hongrois
On mande de Budapest, le 9 janvier :
Un communiqué de l'Agence télégraphique hon-
groise publié par les journaux constate que l'Ita-
lie et la Hongrie désirent dans une égale mesure
le maintien de la paix dans la zone orientale et
méridionale de l'Europe.
Leurs rapports avec le Reich allemand sont
immuablement excellents. L'Italie et la Hongrie
ont l'une et l'autre intérêt à l'existence d'une
Yougoslavie forte.
Pour ce qui a trait aux relations avec l'Union
soviétique, poursuit le communiqué, on fait ob-
server que la Hongrie développe avec sa nouvelle
voisine des rapports diplomatiques normaux, tan-
dis que l'Italie, il y a très peu de temps, a clai-
rement affirmé qu'elle n'avait aucune intention
agressive contre l'U. R. S. S. mais que cependant,
conformément à la tradition politique fasciste,
elle opposerait une résistance décisive à toute
tentative d'expansion du bolchevisme en Europe
sud-orientale.
On peut, en conclusion des conversations de
Venise, constater que la grande puissance ita-
lienne et la'Hongrie, devenue plus forte aussi bien
politiquement que militairement, regardent l'ave-
nir avec la plus grande confiance et le calme le
plus parfait. Les deux nations sont défendues par
leur sérénité politique contre toute espèce d'aven-
ture et sont protégées par leurs forces armées et
par leur amitié contre toute surprise.
D'autre part, on mande de Budapest, le 9 janvier :
L'officieux Pester Lloyd, dans une correspon-
dance de Venise commentant la rencontre du
comte Ciano et du comte Csaky, précise que les
revendications auxquelles ne renonce pas la Hon-
grie ne dépendent pas d'une guerre européenne,
et affirme que « si la Roumanie faisait, éventuel-
lement, des concessions à d'autres pays, il fau-
drait qu'elle fît les mêmes concessions à la Hon-
grie ».
LE COMTE CSAKY
PARTIRAIT DEMAIN POUR ROME
On mande de Rome, le 9 janvier :
Les journaux annoncent que le comte Csaky,
ministre des affaires étrangères de Hongrie,
repartira de Budapest très prochainement, proba-
blement après-demain jeudi, pour Rome, où il
aura, disent-ils, de nouveaux entretiens avec le
comte Ciano ainsi qu'avec M. Mussolini.
SUISSE
La politique de neutralité
On télégraphie de Berne, 9 janvier :
Dans son éditorial, la Gazette de" Lausanne
réfute la thèse exposée récemment par l'officieuse
Boersen Zeitung et suivant laquelle on estime à
Berlin que la qualité de membre de la Société
des nations est désormais incompatible avec la
neutralité :
Il est évident, écrit le journal, que le Reich exerce
une pression sur les neutres pour les engager à se
détacher de l'institution de Genève.
En ce qui concerne la Suisse, la situation particulière
qui lui est faite stipule que le pays conserve intégra-
lement sa neutralité traditionnelle, dans le cadre de la
Société des nations.
Au demeurant, quand le chancelier Hitler a solen-
nellement promis de respecter la neutralité et l'indé-
pendance de la Suisse, il n'a fait aucune allusion à
notre appartenance à la Société des nations.
On reprend dans certains journaux allemands la
thèse qui voulait étendre la neutralité jusqu'à en faire
une obligation pour le peuple tout entier. Cette concep-
tion fut aussitôt réfutée et combattue comme il convient
par la presse suisse unanime, qui souligne que la neu-
tralité de l'Etat ne signifie en aucune façon la neu-
tralité morale des citoyens, dont la liberté d'opinion
reste entière dans les limites prescrites par la discipline
nationale et les convenances Internationales.
En marge M
On se donne grand mal à. expliquer Hitler. Lai.
vie, pourtant, se passe d'explications pour se dé-
truire elle-même et quand même se perpétuer. Le;
racisme n'a pas besoin de Gobineau. Le machiavié-
lisme allemand n'a pas besoin de Machiavel. Gain,
le premier des méchants, était fils d'un brave
homme qui se nommait Adam, et d'une mère naïve
que Jéhovah appela Eve... Néanmoins, il y a des
coïncidences qui sont des prétextes à raisonner de
l'irraisonnable.. Il est probable que les hommes
d'action n'empruntent aux idées d'autrui que la
littérature; elles leur permettent de formuler leur
penchant. M. Henri Berr a découvert une coïnci-
dence entre Machiavel et l'Allemagne, et il nous
révèle sa trouvaille dans une petite brochure riche
de citations.
Pauvre Florentin, qui ne connut guère de la
puissance que les disgrâces, quel destin te réser-
vaient ton intelligence et ton art d'écrivain ! La
postérité te punit d'avoir mis de l'esprit dans l'ins-
tinct. Mais ton souci ne fut-il pas étrange de vou-
loir enseigner à tes maîtres un secret qu'ilsconnais-
saient si bien, sains-se l'être jamais confié à eux-
mêmes?,.. Tu t'es donné l'air de leur apprendre
la ruse, quand tu pratiquais la candeur. Tu. fus
pauvre, abandonné, exilé. J'ai souvenir d'une lettre
de toi où tu te montres cherchant l'amour comme
un mendiant, et ton beau style devient cynique,
dans le sens originel du mot... Tu enduras toutes
les misères, tu dus te contenter des plus bas plai-
sirs. D'une carrière à quoi celle de Goethe res-
sembla, tu ne tiras que l'ingratitude des Princes
que tu avais servis et qui te traitèrent finalement
avec uri machiavélisme sans vergagne...
Cependant, tu as écrit que le Prince, « tant qu'il
le peut », ne doit point s'écarter de « la voie du,
bien », mais qu'il lui faut, « au besoin », « entrer
dans la voie du mal ». Alors, Frédéric II composa
son Anti-Machiavel, et Voltaire eut sujet à son
tour d'en sourire : « L'invasion de la Silésie est
un héroïsme d'une autre espèce que celui de la
modération tant prêchée dans VAnti-Machiavel. La
chatte, métamorphosée en femme, court aux sou-
ris dès qu'elle en voit, et le prince jette son man-
teau de philosophie et prend l'épée dès qu'il voit
une province à sa bienséance. Puis fiez-vous à la
philosophie ! » A tous ces avertissements que nous
fournissait l'histoire, nous avons préféré la phi-
losophie, quoi qu'ait pu faire Guillaume II, après
Bismarck et le grand Frédéric, quoi qu'ait pu
dire Stresemann dans ses harangues aux buveurs
de bière. Philosopher, pour nous, c'était théoriser
notre ignorance ou notre oubli. « Arrière les
canons ! arrière les mitrailleuses ! » Et le bon vin
français coulait dans les coupes de Thoiry...
Aujourd'hui, nous nous mettons à relire les
livrés et nous nous apercevons que « c'était écrit ».
C'était écrit par les Allemands, eux-mêmes, à qui.
l'orgueil tient lieu de sincérité. Machiavel explique
Hitler. Et qui donc explique M. Staline ? Nous
effaçâmes de la carte géographique le nom de
Brest-Litovsk. Hitler et Staline, ensemble, en ont
effacé le nom de Varsovie. Pour un Frédéric II
qui aimait à lire, combien de ces perturbateurs dir
monde n'obéissent qu'à leur génie malfaisant !
"Plutôt que de leur trouver des maîtres en malfai-'
sance, ne devrions-nous pas écouter ceux des,'
nôtres qui n'ont jamais manqué de nous rappeler,
la bonne leçon ? Les vrais inspirateurs de l'Alle-
magne parjure et de la Russie traîtresse sont notre
imprévoyance et notre méconnaissance des faits.
JEAN LEFRANC."
SUR MER
Après le naufrage
du patrouilleur français « Barsac »
On télégraphie de Vigo, 10 janvier
Le patrouilleur auxiliaire Barsac, en croisière
de surveillance contre les sous-marins au large
du cap Finistère, s'est échoué dans la nuit de lundi "
à mardi sur la côte d'Espagne, près de Vigo, et
paraît perdu.
Deux bâtiments espagnols ont sauvé la plus
grande partie du personnel.
On a a déplorer la disparition d'une vingtaine
d'hommes de l'équipage, dont les familles sont
prévenues.
Les obsèques de six des victimes du naufrage
du patrouilleur auxiliaire français Barsac ont eu
lieu hier en présence du maire de Vigo, des con-
suls de France et d'Angleterre et d'un détache-
ment de la garnison. Des couronnes avaient été
envoyées par les commandants des places militaire
et navale du port, ainsi que par le maire et les
corps consulaires français et britannique.
On apprend que c'est par suite du brouillard
que le Barsac est allé s'échouer sur les récifs d'Is-
laons, à 16 milles de Marin. Un violent coup de
mer l'a jeté sur les rochers, où il s'est brisé en
trois. Les appareils radiotélégraphiques ayant été
détruits, le Barsac a utilisé, pour signaler sa po-
sition, des feux de Bengale qui ont été aperçus
par le Léoville, qui retransmit la demande de se-
cours..
Comme on le sait, c'est le bateau espagnol Ile-
de-Ténériffe qui est arrivé le premier sur les
lieux. La mer démontée rendait les travaux dé
sauvetage extrêmement difficiles. Quarante-cinq
naufragés ont cependant pu être recueillis et être
transportés à bord de l'Ile-de-Ténériffe, où ils ont
reçu les soins les plus attentifs.
Six cadavres ont été recueillis sur les lieux du
sinistre par les navires Canalejas et Moncho.
Un autre corps a été rejeté par la mer sur la
plage de Grove.
Navires coulés par des mines
On mande de Londres :
Le bateau-citerne britannique British-Liberty,
jaugeant 8,485 tonnes, a sombré à la suite d'une
série d'explosions causées, croit-on, par une mine.
Après la première explosion, les membres de
l'équipage purent prendre place dans deux ba-
teaux de sauvetage dont l'un chavira. Voyant que
le British-Liberty n'avait pas coulé, le capitaine
et les hommes qui 'avaient pris place dans l'autre
canot ont voulu regagner le navire, mais, peu de
temps après, deux autres explosions se produi-
sirent. La cargaison prit feu et le vaisseau sombra.
On crain que tous ceux qui avaient rejoint le
British-Liberty n'aient péri.
Le canot de sauvetage qui avait chaviré put
être redressé, et les membres de l'équipage qui
avaient été projetés à la mer parvinrent à y prenf
dre place de nouveau et à gagner un bateaux-
phare. Un certain nombre de survivants étaient
demeurés pendant près d'une heure dans les flots.
Les 18 survivants furent débarqués en France
et ramenés en Angleterre. [
Le British-Liberty appartenait à la British
Tanker Co Ltd. Il avait été construit en 1939 et
était immatriculé à Londres.
On mande d'Amsterdam, 9 janvier : j |
Le bateau à moteur hollandais Truida, jau-
géant 176 tonnes brut, a heurté ce matin, dans.
la mer du Nord, au large des bouches de l'Escaut,
une mine et a sombré. Tous les membres de l'équi-
page, composé de quatre personnes, ont été re-
cueillis par un vapeur hollandais. Le Truida se
rendait à Londres et avait quitté Ymuiden lundi
matin.
POLOGNE j
La fermeture de l'université de Wilno
On télégraphie de Londres :
L'ambassadeur de Pologne à Londres a remis
au Foreign Office une protestation du gouverne-
ment polonais contre la fermeture de l'université
polonaise de Wilno par les autorités lituaniennes.
Cette protestation souligne l'importance de cette
université pour la vie intellectuelle des Polonais
du district de (Wilno.
LIS OPÉRATIONS
MILITAIRES
COMMUNIQUÉS OFFICIELS FRANÇAIS
DU 9 JANVIER (SOIR)
Activité marquée de nos patrouilles au cours
de la journée.
DU 10 JANVIER (MATIN)
Activité locale des éléments de contact dans
la région à l'ouest des Vosges.
SUR LE FRONT
La visite de M. Churchill
Le premier lord de l'amirauté est rentré mardi
soir à Londres après avoir conféré longuement
avec le général Gort, commandant en chef du
corps expéditionnaire, dont il était l'hôte. Il a eu
également des' entretiens avec les membres du
gouvernement français et avec le général Gamelin
et nos grands chefs militaires.
Son voyage en France n'avait pas pour but,
d'inspecter le corps expéditionnaire britannique
"mais seulement dé consulter les chefs militaires
anglais et français et de se rencontrer avec les
membres du gouvernement français. Il en a pro-
fité pour faire une courte visite au quartier gé-
néral de l'armée de l'air britannique en France.
Avant de quitter la France, le premier lord de
l'amirauté a fait les déclarations suivantes :
Ayant dû me rendre en France pour voir l'amiral
Darlan au sujet de certains problèmes navals, j'ai saisi .
l'occasion de visiter plusieurs secteurs du front fran-
çais et du front anglais. J'ai passé quelques jours ex-
trêmement intéressants. J'ai visité les troupes anglaises
qui sont en contact direct avec l'ennemi et je les ai
trouvées dans un moral splendide. Au cours de ma
visite, tout était calme, sauf, de temps en temps, le
son du canon dans le lointain.
J'ai été très heureux de visiter certaines parties de
la ligne Maginot que je n'avais eu l'occasion de- voir
qu'en temps de paix. Partout j'ai été extrêmement im-
pressionné par la coopération intime et l'amitié qui se
manifestent non seulement entre les états-majors mais
parmi les officiers et les hommes des troupes fran-
çaises et britanniques. Elles m'ont même paru D!US
intimes que lors de la dernière guerre. Les habitants
ont également montré, partout, qu'ils étaient dan6 les
meilleurs termes avec nos troupes.
J'ai passé la journée au quartier général de la Royal
Air Force et j'ai visité un certain nombre d'escadrilles;
la façon dont elles se 6ont adaptées aux conditions
d'existence si diverses m'a paru très remarquable. J'ai
été très frappé de leur état de préparation. Elles sont
prêtes à la moindre alerte.
Certes, cette attente durant des semaines est très
monotone mais chacun semble comprendre que nos
forces s'accroissent de jour en jour et que, dans cette
guerre, on doit se résigner à la monotonie.
Ceux qui, à l'arrière, chez nous, se sont un peu at-
tristés ou inquiétés au sujet de la guerre tireraient
grand'profit à venir passer quelques 'jours avec les
j troupes françaises et. anglaises en France. Ils trouve-
raient là un tonique et un sédatif.
; Je remporte la même impression d'organisation, de
discipline, de zèle et de confiance qije j'ai retirée de
, mes précédentes visites à la flotte et à nos grands
ports de guerre.
La collaboration de l'aviation britannique
avec les forces terrestres
On a publié mardi soir, à Downing Street, le commu-
niqué officiel suivant :
L'accroissement de la' force de l'armée britan-
nique en France a impliqué nécessairement quel-
ques modifications dans l'organisation des forces
aériennes requises, aussi bien que la question des
meilleurs moyens de fournir la coopération et
l'appui de nos forces à l'armée. En novembre der-
nier, cette question a été entièrement examinée à
la lumière de l'expérience pratique de l'exercice
du contrôle de la Royal Air Force pour l'appui de
l'armée en France.
Comme résultat de cet examen, ^"recommanda-
tions suivantes sur lesquelles s'est effectué l'ac-
cord ont été approuvées par le cabinet de guerre
au début de décembre.
Un commandement de la Royal Air Force devant
inclure toutes les unités de la Royal Air Force en
, France va être formé. Le nouveau commandement
sera appelé « Forces aériennes britanniques en
; France » et sera placé sous la direction d'un offi-
i cier de l'air, commandant en chef, qui est le maré-
chal de l'air A. S. Barratt.
L'officier de l'air commandant en chef sera éga-
lement responsable, en consultation avec les com-
mandants en chef de l'armée intéressée, de l'ap-
port de l'aide la plus effective des forces aériennes
britanniques au corps expéditionnaire eh France
et aux armées françaises sur le front occidental.
Conjointement avec l'officier général commandant
en chef des forces aériennes françaises, il sera
également responsable de la coordination des opé-
rations de la Royal Air Force en France avec celles
des forces aériennes françaises.
L'arrangement sus-mentionné n'impliqué aucun
changement dans le principe qui gouverne les
relations entre l'armée et la Royal Air Force. Il
est basé sur l'analogie des relations existantes
entre la marine royale et le commandement des
lorces côtières de la Royal Air Force et assurera
la coopération la plus étroite entre l'armée et les
forces aériennes en campagne. . .
[Le maréchal de l'air A. S. Barratt, qui vient d'être
nommé commandant en chef des forces aériennes bri-
tanniques en France, est âgé de 48 ans. II fut promu
au commandement des forces aériennes aux Indes à
la fin du mois d'ooût, après avoir été pendant trois ans
commandant de l'état-major 3e la Royal Air Force du
centre d'Andover. Il se distingua pendant la précé-
dente guerre et reçut la Croix de guerre en 1916
et obtint l'ordre de Saint-Michael et Saint-George en
1919. En août 1919, il devint chef d'escadrille de Is
Royal Air Force, et en novembre de la même année ii
devint « wing commander ». Vice-amiral de l'air en
janvier 1936, il avait été promu maréchal de l'air en
juin dernier.]
DANS LIS AIRS
Attaque de navires
par des bombardiers allemands
L'amirauté britannique a publié mardi l'information
suivante :
' Profitant du brouillard, des avions ennemis ont.
bombardé et mitraillé, ce matin, deux navires
marchands, au large de la côte est de l'Ecosse, et
deux autres plus au sud.
Les informations reçues des navires indiquent
qu'aucun d'entre eux n'a subi de dégâts sérieux,
et que seul un homme a été légèrement blessé.
Un cinquième navire a été attaqué par deux
Heinkel. Un certain nombre de bombes ont été
jetées et le navire a été endommagé.
Des avions de chasse ont pris l'air, mais par
suite de la mauvaise visibilité n'ont pu entrer
en contact avec l'ennemi.
U. R. S. S.
Vague de froid sur la mer Noire
On mande de Moscou, le 9 janvier :
Un froid particulièrement rigoureux sévit en
U. R. S. S. C est ainsi qu'on a noté aujourd'hui, à
Odessa, 24 degrés au-dessous de zéro; la mer Noire
est gelée aux abords de ce port.
A Mansion House
LE DISCOURS DE M. CHAMBERLAIN
Tout doit être subordonné à ce but : amener ta perre à la victoire
Le premier ministre britannique a prononcé,
mardi après-midi, à Mansion House, le premier
de la série des discours qui doivent être pronon-
cés par les ministres britanniques pour expliquer
au public la politique de guerre du gouvernement.
M. Chamberlain a d'abord rappelé combien il
souhaitait jadis que la guerre pût être évitée..
Mais, depuis qu'elle est déclarée, toutes ses pen-
sées et toutes ses actions ne tendent plus que vers
un seul but : « Faire tout ce que je pourrai,
en coopération avec nos vaillants alliés français,
pour amener cette guerre à sa fin victorieuse. »
« Je subordonne à ce but tout le reste, toute
pensée de repos ou de détente, ' tous sentiments
partiaux ou personnels et toutes considérations
de n'importe quelle sorte. Aussi longtemps que
j'occuperai mon poste actuel et jusqu'à ce que la
guerre prenne fin, je ne me détournerai pas de ce
but et je ne chercherai pas à me soustraire à la
responsabilité qui m'incombe. Je ferai tout ce que
je croirai devoir faire, quels qu'en puissent être
les difficultés ou le désagrément.
Le calme précédant la tempête
» Cette nouvelle année, qui sera probablement
décisive dans ^histoire du monde,- a débuté dans
Je calme, mais c'est le calme précédant la. tem-
pête. -
» Dans les airs comme sur terre, on assiste
pour le moment au prélude de la grande lutte.
C'est seulement sur mer que l'on peut dire que la
guerre bat son plein, et c'est sur mer que nous
pouvons discerner le plus clairement la marche
des hostilités dans les quatre premiers mois de
guerre. Si nous prenons une vue d'ensemble, je
crois que nous nous apercevrons que le résultat
n'est pas mauvais. »
Le premier ministre fait le bilan des pertes
.allemandes : 228,000 tonnes de navires capturés,
coulés ou sabordés; le reste des bâtiments alle-
mands bloqué dans des ports étrangers ou con-
finé dans la Baltique.
En regard, quelle est la situation de la flotte
marchande britannique : « Si nous soustrayons
de nos pertes dues à l'action de l'ennemi ou à
des accidents survenus en mer. les gains que
nous avons réalisés par la capture de bateaux
ennemis ou par le transfert de navires étrangers
sous notre drapeau, nos pertes, à ce jour, se
chiffrent par 122,000 tonnes, c'est-à-dire moins
de 1 0/0 de notre flotte marchande. Chaque jour,
11,000,000 de tonnes de navires britanniques con-
tinuent de sillonner les océans. »
M. Chamberlain estime que la perte du Royal-
Oak, du Courageous et de plusieurs petites unités
n'a compromis en rien la maîtrise des mers par
la Grande-Bretagne, qui continue d'exercer une
pression inexorable, accroissant sans cesse les dif-
ficultés de l'Allemagne.
L'agression contre la Finlande
Après avoir brossé un tableau saisissant des
méthodes d'agression et d'oppression inaugurées
par l'Allemagne, bientôt imitées p.ar la Russie,
M. Chamberlain déclare :
« C'est maintenant au' tour de la Finlande d'être
attaquée p.ar une puissance avec laquelle l'Alle-
magne a conclu un pacte impie. La Finlande se
bat aujourd'hui contre des forces d'une violence
sans scrupule, comme nous le faisons nous-mê-
mes. Nous nous battons pour la même chose,
c'est-à-dire pour la liberté et la justice, et les
succès étonnants remportés par la Finlande nous
remplissent d'admiration pour son héroïsme. Ce
peuple vaillant peut être assuré que notre ré-
ponse à la résolution adoptée par la Société des
nations ne sera pas une simple formalité. »
Puis le premier ministre exprime la sympathie
qu'il éprouve à l'égard de cet autre pays ami, la
Turquie, qui vient d'être éprouvé par une si ter-
tible catastrophe. Il rappelle l'aide financière déjà
fournie par le», gouvernements britannique et
français, et ajoute : « Les gouvernements britan-
nique et français ont informé le gouvernement
turc de leur désir de donner à leur aide ultérieure
une forme qui est actuellement examinée en plein
accord entre ces trois pays. »
L'intimité franco-britannique
Cette collaboration franco-britannique pour un
but humanitaire fournit à son avis un nouvel
exemple de « cette association intime entre nous
qui caractérise actuellement tous les aspects de
la guerre, dans les domaines militaire, politique,
financier et économique ».
Il pense même que cette collaboration se révé-
lera si précieuse qu' « on ne voudra ni d'une
part ni de l'autre y mettre fin lorsque la guerre
sera terminée ». (Applaudissements.)
« Il pourrait même en résulter quelque chose de
plus large et de plus profond, car il n'est rien
qui faciliterait davantage la tâche de la recons-
truction pacifique qui doit être entreprise un
jour; il n'est rien qui contribuerait davantage à
la stabilité des résultats visés que l'extension de
la collaboration entre la France et l'Angleterre à
d'autres nations d'Europe et peut-être du monde
entier, dans le domaine de la finance et des rela-
tions économiques. »
L'acceptation des privations
M. Chamberlain souhaite à M. Daladier un
prompt rétablissement des suites de son accident.
Puis il se déclare persuadé que les Anglais « ne
voudront pas rester en arrière des Français dans
leur résolution d'accepter joyeusement les pri-
vations inséparatbles de la guerre ».
Il parle de l'échelle prodigieuse sur laquelle
s'est poursuivie jusqu'ici la mobilisation des res-
sources humaines britanniques : à eux seuls, les
« conscrits » déjà mobilisés depuis l'institution
du service obligatoire ou mobilisables immédia-
tement par simple proclamation atteignent un
chiffre variant entre deux millions et demi et
deux millions sept cent cinquante mille. _
En ce qui concerne là défense .passive, il recon-
naît volontiers combien les règlements en vigueur
sont gênants pour la population, cependant a son
avis aucun de ces règlements n'est superflu.
« Je ne considère pas que les dangers de raids
aériens soient passés ni même qu'ils aient dimi-
nué. Et tant qu'il en sera ainsi, je suis persuadé
que nous commettrions une faute capitale en
changeant la politique que nous avons suivie jus-
qu'ici. »
Il ne doute pas de l'union et de la détermina-
tion du peuple anglais de gagner la guerre et de
mettre fin à l'esprit qui domine la politique de
l'Allemagne : « Mais ce dont je suis moins sûr,
c'est qu'on comprenne en Allemagne ce à quoi
on s'attaque, et que nous devrons faire face à une
phase de la guerre bien plus terrible que tout ce
que nous avons vu jusqu'ici.
» Nous ne devons pas penser que, du fait que
la guerre n'a pas pris jusqu'ici la forme qu'elle
avait prise en 1914, nous pouvons poursuivre nos
existences comme si nous étions encore en paix.
Nous devons nous passer de bien des choses qui
nous feront grandement défaut. »
Les combats sur terre ne sont pas actuellement
très actifs, mais « nous nous préparons à agir de
la façon la plus efficace lorsque le moment sera
venu, et, à cet effet, nous consacrons de plus en
plus de main-d'oeuvre à la production de nos
armements. Ceci implique une diminution corres-
pondante de la main-d'oeuvre occupée à produire
des marchandises pour la vie civile. »
A cet égard, il indique que ces chômeurs seront
progressivement absorbés au fur et à mesure que
s'accroîtra l'effort industriel national. La demande
sera notamment considérable dans les usines
d'aviation.
Le problème des salaires
« Nous devrons nous imposer des - sacrifices,
poursuit M. Chamberlain, comme on s'en impose
dans l'Allemagne totalitaire et dans la grande
démocratie française. Je ne veux pas dire par
là qu'il ne devra pas y avoir d'augmentation de-
salaires ; mais je dis que ce serait une erreur de
lier les salaires au coût de la vie, ce qui en fin
de compte; ne profiterait à personne, ne faisant
que mettre en mouvement lç_ cercle vicieux des
hausses alternées des prix et des salaires, et cela
nous voulons tous l'éviter. »
Le premier ministre, esquissant à grands traits
la tâche qui s'impose a la Grande-Bretagne,
s'exprime ainsi : -
« Nous devons économiser ; nous devons con-
trôler nos importations ; nous devons nous passer
des articles non indispensables ; nous devons
même au besoin nous imposer des rationnement^
afin que tous y participent, et y participent pareil-
lement.
» La viande va être prochainement ajoutée à
la liste des denrées rationnées, et, bien qu'il n'y
ait aucune raison de supposer que notre pays
aurait manqué de quoi que ce soit qui fût néces-
saire à sa santé ou à son efficacité, nous ne devrons
Eas hésiter à multiplier ces rationnements si le
esoin en devenait urgent. Chacune dé ces mesures
est simplement une partie du plan général qui
doit nous assurer la victoire dans le moindre
délai possible. »
Avertissement au peuple allemand
Rappelant que le gouvernement allemand avait
préparé depuis longtemps ses campagnes succes-
sives, et qu'il n'hésite pas aujourd'hui à avouer
son désir de détruire l'empire britannique,
M. Chamberlain ajoute :
« De notre côté, nous n'avons pas de tels désirs
dç vengeance. Dire que les alliés souhaitent
l'anéantissement du peuple allemand est une
invention fantaisiste et perfide qui ne peut servir
qu'à la propagande intérieure de l'Allemagne. Le
peuple allemand doit se rendre compte que la
responsabilité d'une guerre prolongée et de toute
la souffrance qu'elle peut entraîner au cours de
l'année qui vient lui incombe à lui-même ainsi
qu'au tyran qui le domine. Il doit se rendre
compte que le désir qu'ont les alliés d'un règle-
ment humain, juste et chrétien, ne saurait \se
satisfaire des assurances que l'expérience a mon-
trées vaines. »
Dans sa péroraison, le premier ministre observe
que l'action de l'Allemagne a soulevé dans le
monde une réprobation générale, « et nulle part
elle n'a été plus vive que dans les deux Amé-
riques ». U donne son approbation entière au
message de M. Roosevelt au pape, où le président
américain déclare que « ce n'est que par l'asso-
ciation amicale des chercheurs de lumière et des
chercheurs de paix, en tous lieux, que les forces
du mal pourront être vaincues ». « Je suis, dit-il,
profondément d'accord,, avec lui et j'ajoute que si
les forces du_ bien doivent prévaloir, nous ne
devons pas hésiter à risquer notre sang et nos
trésors pour une fin aussi élevée. » (Applaudis-
sements.)
« A présent, dans notre volonté d'atteindre notre
but, nous sommes unis entre nous, nous sommes
soutenus par les peuples de l'empire, par la puis-
sance et la résolution de notre grande et vaillante
alliée la France, par l'approbation morale de tous
ceux qui comprennent que le sort de la civilisa-
tion est lié a notre victoire. Contre une telle
combinaison de forces, les puissances du mal com-
battront en vain, et, au seuil de cette nouvelle
année, nous pouvons faire fâce à l'avenir avec
une confiance inébranlée' dans la vertu de nos
armes et la "justice de notre cause. » (Applaudis-
sements.)
GRANDE-BRETAGNE
Les audiences royales
Le roi a reçu le premier ministre en audience
mardi soir, à Buckingham-Palace.
Après avoir reçu M. Hore Belisha, qui lui a
remis les sceaux du ministère de la guerre, le
roi a accordé audience à lord Macmillan, qui vient
de résigner ses fonctions de ministre de l'infor-
mation.
Conseil privé
Le roi a tenu mardi un conseil privé, au cours
duquel Sir Andrew Duncan, le nouveau président
du Board of Trade, .a prêté serment en tant que
membre du conseil.
Souffrant de la grippe, M. Oliver Stanley, nou-
veau ministre de la guerre, n'a pu assister à la
cérémonie et recevoir du souverain les sceaux de
son ministère.
Le ministre du travail demande l'effort
maximum
M. Ernest Brown, ministre du travail, a déclaré
mardi à Edimbourg :
Il faut que la Grande-Bretagne et ses alliés se pré^
parent rapidement à accomplir l'effort maximum. Il
faut que les alliés restent unis derrière leurs chefs
afin d'assurer la victoire décisive.
J'estime que les événements décisifs de la guerre
auront lieu cette année. La victoire ne sera peut-être
pas remportée en 1940, mais les bases en seront po-
sées. Les Allemands se sont figuré que nous ne res-
pecterions pas nos engagements. Ils ont été amère-
ment déçus par l'inexorable résolution 1 des peuples
libres.
v
Le ministre de l'intérieur recommande
la vigilance
Parlant mardi à Edimbourg, Sir John Ander-
son, ministre de l'intérieur et de la sécurité na-
tionale, a développé le thème de la vigilance,
engageant notamment ses auditeurs à ne pas ra-
mener leurs familles - en particulier les enfants
- des campagnes dans les villes exposées .au
péril aérien, mais au contraire à profiter au
maximum des facilités offertes par le plan d'éva-
cuation.
Le ministre a observé que « l'absence d'évé-
nements sensationnels sur le front territorial »
était peut-être la cause d'un « sentiment noté çà
et là que la guerre ne valait peut-être pas la
peine d'être poursuivie ».
Un tel sentiment n'est guère répandu, a-t-il ajouté,
mais j'aimerais formuler un avertissement contre Ja
propagande pacifiste. Elle peut être très subtile et
son origine est pour le moins suspecte. Le pays a
montré de cent façons qu'il était résolument derrière
le gouvernement dans sa détermination de mettre fin
à la loi de la jungle dans les relations internationales.
La paix pourrait être à l'heure actuelle tout à fait du
goût de notre ennemi. Mais qui pourrait croire qu'il
s'agirait d'autre chose que d'un ajournement de la
guerre ?
Une très grande question est en jeu : vivrons-nous
sous le règne du droit ou 60us le règne de la force
brutale? Cette question ne peut être laissée sans ré-
ponse. Il ne peut y avoir qu'une réponse et elle doit
être donnée maintenant.
La démission de M. Hore Belisha
et le Labour Party
Le parti travailliste réservera son jugement
sur la démission de M. Hore Belisha jusqu'à ce
qu'il ait entendu les explications que le ministre
démissionnaire et M. Neville Chamberlain four-
niront mardi prochain à la Chambre des com-
munes.
La journée du 16 aux Communes sera entiè-
rement consacrée à cette discussion à laquelle,
après M. Hore Belisha et le premier ministre,
M. Attlee, chef de l'opposition travailliste, et Sir
Archibald Sinclair, au groupe libéral d'opposi-
tion, doivent participer.
On s'abonne aux Bureaux du Journal, 5, RUE DES ITALIENS, A PARIS (9'), et dans tous les Bureaux de Poste
JEUDI 11 JANVIER 1940
PONDATELTR ' -A.'u.g'U.st© NEFPTZSB (îeel)
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Le Journal décline toute responsabilité quant à leur teneur
CHÈQUE POSTAL : Paris, Numéro 60
SOMMAIRE
PAGE 1
Les Communiqués officiels. - Sur le front. - Sur
mer. - Le Discours de M. Chamberlain à Man-
sion House.
PAGE 2
L'Agression soviétique contre la Finlande. - Nou-
velles de l'Etranger. - La Rentrée parlemen-
taire : A la Chambre; au Sénat. - Nouvelles du
jour. - Echos et informations.
PAGE 3
Au jour le jour : la Statue de Racine, ROBERT
KEMP. - Académies. - Tribunaux. - Les
Spectacles : Théâtres; Cinémas. - T. S. F.
PAGE 4
LA JOURNÉE : DERNIÈRES NOUVELLES. - Les Opé-
rations militaires. - Sur mer. - La Reconsti-
tution de l'armée polonaise en France.
Paris, le 10 janvier 1940
BULLETIN DU JOUR
LE DISCOURS DE M. CHAMBERLAIN
Dans le discours qu'il a prononcé hier à
Mansion-House, et qui était très attendu,
M. Neville Chamberlain a fait le point de la
situation au début de l'année 1940, après quatre
mois de guerre. Son exposé prouve que le pre-
mier ministre maintient intégralement la poli-
tique du gouvernement britannique telle qu'elle
a été fixée sous l'empire des circonstances qui
ont provoqué le conflit européen. Ayant dé-
ployé ses meilleurs efforts en vue de main-
tenir la paix, M. Chamberlain a dû reconnaître
que la politique hitlérienne constituait une me-
nace permanente pour l'ordre international et
ne laisait place à aucun règlement raisonnable
et honnête. Il demeure animé aujourd'hui de
la volonté de poursuivre la guerre jusqu'à la
victoire, parce que si cette victoire n'était pas
remportée sans équivoque possible la civilisa-
tion ne pourrait être sauvée. Telle est bien la
pensée qui commande la politique extérieure
de la Grande-Bretagne et qui constitue le fon-
dement moral de cette coopération constante t
de l'Angleterre et de la France qui est la su-
prême garantie du maintien d'une Europe où
l'existence soit possible pour des peuples libres.
Le gouvernement de Berlin pourra se rendre
compte par le discours de M. Chamberlain que
toutes les campagnes de la propagande alle-
mande visant à dissocier les deux grandes puis-
sances démocratiques, à favoriser une paix de
compromis laissant subsister intacte la puis-
sance militaire du Reich ou à ébranler le moral
des peuples britannique et français ont totale-
ment échoué. La résolution de l'Angleterre et
de la France est la même qu'aux premiers jours
des hostilités; 'les buts de guerre des deux
puissances restent tels qu'ils furent définis le
3 septembre de l'année dernière; les condi-
tions si particulières d'une guerre qui ne res-
semble à aucune autre n'ont modifié en rien
ce qui constitue l'essentiel de la politique
franco-britannique. M. Chamberlain a souligné
avec force que toutes ses pensées et toute son
action tendent à faire le possible pour amener,
en coopération avec la France, la guerre à sa
fin victorieuse, qu'il subordonne à cette préoc-
cupation tous lès sentiments personnels et
toutes les considérations de quelque nature
qu'elles soient. Il a indiqué que cette année
1940 sera probablement décisive dans l'histoire
du monde, mais que le calme relatif actuel
n'est que le calme précédant la tempête. Aussi
a-t-il fait appel à l'esprit de sacrifice du peuple
anglais, qui ne voudra pas, a-t-il dit, rester en
arrière du peuple français dans sa résolution
d'accepter courageusement les privations insé-
parables de toute guerre. Le premier ministre
a rendu un juste hommage au peuple finlan-
dais odieusement attaqué par une puissance
avec laquelle l'Allemagne a conclu un pacte
impie, et il a montré comment la Finlande se
bat aujourd'hui pour le même idéal pour lequel
nous combattons, c'est-à-dire pour la liberté et
la justice.
À propos de l'aide à la Turquie, le premier
ministre a parlé de la coopération franco-bri-
tannique dans des termes auxquels nous ne
pouvons qu'être sensibles. Il a dit notamment
que cette collaboration de 'la France et de l'An-
gleterre se révélera si précieuse qu'on ne
voudra, ni d'une part ni de l'autre, y mettre fin
lorsque la guerre sera terminée, et qu'il pour-
rait même en résulter quelque chose de plus
large et de plus profond qui faciliterait gran-
dement la tâche de la reconstruction pacifique
qui devra être entreprise jin jour, que rien ne
contribuera davantage à la stabilité des résul-
tats qui seront obtenus que l'extension de cette
collaboration à d'autres nations d'Europe, peut-
être même du monde entier, dans le domaine
de la finance et des relations économiques. Les
commentaires de la presse anglaise ce matin
mettent l'accent sur la communauté de l'action
franco-britannique, et il ne saurait faire aucun
cloute, en effet, que celle-ci constitue la plus
sûre garantie de la victoire de nos armes. Aussi
importe-t-il, on le conçoit sans peine, que cette
solidarité totale se traduise dans les actes de
chaque jour, dans les efforts à déployer en
commun sur tous les terrains et sous tous les
climats, car on ne saurait faire de distinction
entre les positions respectives de deux empires
qui sont également baignés par toutes les mers
du monde, dont la défense doit être assurée
dans les mêmes conditions partout où c'est né-
cessaire, dont la sécurité et la prospérité dépen-
dent entièrement de la mise en commun de
leurs moyens et de leurs ressources. L'entente
franco-britannique ne prend toute sa signifi-
cation que par une action totalement commune,
ainsi qu'il se doit, au service de buts com-
muns. C'est là ce qui fait la valeur effective de
cette intime association des deux grandes dé-
mocraties à laquelle aucune autre alliance ne
peut se comparer.
Le langage que M. Neville Chamberlain a
tenu à l'adresse de l'Allemagne mériterait d'être
médité à Berlin si les esprits y sont encore
, accessibles à la raison. Les Allemands n'ont
cessé de proclamer leur volonté de détruire
l'empire britannique, tandis que le premier
ministre du Royaume-Uni dénie formellement
que les alliés, eux, souhaitent anéantir le peuple
allemand. Mais ce peuple allemand doit se
rendre, compte, a dit le chef du gouvernement
britannique, que la responsabilité d'une guerre
prolongée et des souffrances qu'elle peut en-
traîner incombe.à lui-même, ainsi qu'au tyran
qui le domine. « Il doit se rendre compte,
a-t-il ajouté, que le désir qu'ont les alliés d'un
règlement humain, juste et chrétien, ne saurait
"se satisfaire d'assurances que l'expérience a
montrées vaines. » M. Chamberlain rejoint
par là la formule de M. Daladier, quand le.
président du conseil a déclaré que la paix équi-
table et durable devra être accompagnée de ga-
ranties matérielles et positives. Sur ce point,
comme sur tous les autres. Paris et Londres
sont donc d'accord. « Dans notre volonté d'at-
teindre notre but, a dit encore M. Chamberlain,
.nous sommes unis entre nous, nous sommes
soutenus 'par les peuples de l'empire, par ia
puissance et la résolution de notre grande et
vaillante alliée, la France, par l'approbation
morale de tous ceux qui comprennent que le
sort de la civilisation est lié à notre victoire. »
Là est la certitude de cette victoire que souhai-
tent tous les peuples libres et que la vaillance
de ceux qui combattent sous nos deux drapeaux
unis saura mériter.
«ni
Le Parlement a tenu hier la première séance
de la ' nouvelle session. Chacune des deux
Assemblées était présidée par son doyen d'âge,
et Chambre et Sénat ont ainsi entendu des dis-
cours qu'inspiraient l'expérience et cette
sereine sagesse qu'acquièrent souvent les politi-
ques dans la seconde partie d'une carrière bien
remplie. M. Damecour, devant la haute Assem-
blée, M. Lévy-Alphandéry, devant la Chambre,
ont exprimé les idées et les sentiments qui sont
ceux aujourd'hui de tous les Français. Les
assentiments qu'ils ont recueillis de part et
d'autre, les applaudissement qui ont souligné
les passages principaux de leurs allocu-
tions traduisaient fidèlement l'opinion publi-
que du pays. L'hommage rendu par les deux
Assemblées aux armées nationales et le témoi-
gnage de la gratitude qui était adressé à nos
combattants par les deux présidents avaient le
ton de sincérité et de simplicité qu'on trouve
actuellement dans les manifestations de toute
la nation française. Représentants du peuple,
les parlementaires ont vraiment interprété, hier,
la foi, la volonté unanime de notre peuple.
Il faut tenir pour regrettable le bref « inci-
dent de séance » qu'a provoqué l'attitude de
trois ou .quatre députés communistes; mais il
faut aussi se bien garder d'en exagérer la por-
tée. Le mieux est de choisir le bon moyen d'en
éviter le retour, et l'on annonce aujourd'hui que
le gouvernement s'apprête à proposer au Par-
lement les mesures nécessaires à cet effet. Il
conviendra de les adopter promptement. Le
gouvernement, pour ce qui le concerne, et le
Parlement, dans l'exercice régulier de son droit
de contrôle, devront toutefois redoubler de vigi-
lance. Qu'elles proviennent d'ennemis déclarés
ou non déclarés, toutes les entreprises de propa-
gande étrangère seront ainsi réduites à l'im-
t puissance.
Le pays est prêt à supporter tous les sacrifices
qu'exige la guerre. Il se soumet à toutes les
disciplines utiles. A ceux qui assument la grave
responsabilité de le gouverner et de l'adminis-
trer de coordonner ses efforts. Nous faisons la
guerre pour rétablir la paix, une paix digne de
la civilisation, une paix qui rende à l'Europe sa
dignité, son honneur et ses libertés légitimes.
L'épreuve que subissent actuellement l'Angle-
terre et la France est douloureuse; mais les
forces morales de ces deux nations peuvent s'y
retremper, à condition, qu'elles n'oublient ni
l'une ni. l'autre et à aucun moment les causes
du mal qu'elles endurent. Il importe de vaincre
l'ennemi; il importe autant de détruire la mo-
rale immorale de cet ennemi. C'est à perpétuer
l'esprit qui anime aujourd'hui les nations com-
battant pour la justice et la loyauté internatio-
nales que nous devons nous employer. « La
France et l'Angleterre, a dit hier le premier
ministre britannique,-iront, même après la vie-,
toire, la main dans la main. » C'est la plus
noble et la plus sage, des espérances. Faisons^
en dès maintenant une certitude en fortifiant
l'union de tous les Français.
LES ENTRETIENS DE VENISE
Un communiqué officieux hongrois
On mande de Budapest, le 9 janvier :
Un communiqué de l'Agence télégraphique hon-
groise publié par les journaux constate que l'Ita-
lie et la Hongrie désirent dans une égale mesure
le maintien de la paix dans la zone orientale et
méridionale de l'Europe.
Leurs rapports avec le Reich allemand sont
immuablement excellents. L'Italie et la Hongrie
ont l'une et l'autre intérêt à l'existence d'une
Yougoslavie forte.
Pour ce qui a trait aux relations avec l'Union
soviétique, poursuit le communiqué, on fait ob-
server que la Hongrie développe avec sa nouvelle
voisine des rapports diplomatiques normaux, tan-
dis que l'Italie, il y a très peu de temps, a clai-
rement affirmé qu'elle n'avait aucune intention
agressive contre l'U. R. S. S. mais que cependant,
conformément à la tradition politique fasciste,
elle opposerait une résistance décisive à toute
tentative d'expansion du bolchevisme en Europe
sud-orientale.
On peut, en conclusion des conversations de
Venise, constater que la grande puissance ita-
lienne et la'Hongrie, devenue plus forte aussi bien
politiquement que militairement, regardent l'ave-
nir avec la plus grande confiance et le calme le
plus parfait. Les deux nations sont défendues par
leur sérénité politique contre toute espèce d'aven-
ture et sont protégées par leurs forces armées et
par leur amitié contre toute surprise.
D'autre part, on mande de Budapest, le 9 janvier :
L'officieux Pester Lloyd, dans une correspon-
dance de Venise commentant la rencontre du
comte Ciano et du comte Csaky, précise que les
revendications auxquelles ne renonce pas la Hon-
grie ne dépendent pas d'une guerre européenne,
et affirme que « si la Roumanie faisait, éventuel-
lement, des concessions à d'autres pays, il fau-
drait qu'elle fît les mêmes concessions à la Hon-
grie ».
LE COMTE CSAKY
PARTIRAIT DEMAIN POUR ROME
On mande de Rome, le 9 janvier :
Les journaux annoncent que le comte Csaky,
ministre des affaires étrangères de Hongrie,
repartira de Budapest très prochainement, proba-
blement après-demain jeudi, pour Rome, où il
aura, disent-ils, de nouveaux entretiens avec le
comte Ciano ainsi qu'avec M. Mussolini.
SUISSE
La politique de neutralité
On télégraphie de Berne, 9 janvier :
Dans son éditorial, la Gazette de" Lausanne
réfute la thèse exposée récemment par l'officieuse
Boersen Zeitung et suivant laquelle on estime à
Berlin que la qualité de membre de la Société
des nations est désormais incompatible avec la
neutralité :
Il est évident, écrit le journal, que le Reich exerce
une pression sur les neutres pour les engager à se
détacher de l'institution de Genève.
En ce qui concerne la Suisse, la situation particulière
qui lui est faite stipule que le pays conserve intégra-
lement sa neutralité traditionnelle, dans le cadre de la
Société des nations.
Au demeurant, quand le chancelier Hitler a solen-
nellement promis de respecter la neutralité et l'indé-
pendance de la Suisse, il n'a fait aucune allusion à
notre appartenance à la Société des nations.
On reprend dans certains journaux allemands la
thèse qui voulait étendre la neutralité jusqu'à en faire
une obligation pour le peuple tout entier. Cette concep-
tion fut aussitôt réfutée et combattue comme il convient
par la presse suisse unanime, qui souligne que la neu-
tralité de l'Etat ne signifie en aucune façon la neu-
tralité morale des citoyens, dont la liberté d'opinion
reste entière dans les limites prescrites par la discipline
nationale et les convenances Internationales.
En marge M
On se donne grand mal à. expliquer Hitler. Lai.
vie, pourtant, se passe d'explications pour se dé-
truire elle-même et quand même se perpétuer. Le;
racisme n'a pas besoin de Gobineau. Le machiavié-
lisme allemand n'a pas besoin de Machiavel. Gain,
le premier des méchants, était fils d'un brave
homme qui se nommait Adam, et d'une mère naïve
que Jéhovah appela Eve... Néanmoins, il y a des
coïncidences qui sont des prétextes à raisonner de
l'irraisonnable.. Il est probable que les hommes
d'action n'empruntent aux idées d'autrui que la
littérature; elles leur permettent de formuler leur
penchant. M. Henri Berr a découvert une coïnci-
dence entre Machiavel et l'Allemagne, et il nous
révèle sa trouvaille dans une petite brochure riche
de citations.
Pauvre Florentin, qui ne connut guère de la
puissance que les disgrâces, quel destin te réser-
vaient ton intelligence et ton art d'écrivain ! La
postérité te punit d'avoir mis de l'esprit dans l'ins-
tinct. Mais ton souci ne fut-il pas étrange de vou-
loir enseigner à tes maîtres un secret qu'ilsconnais-
saient si bien, sains-se l'être jamais confié à eux-
mêmes?,.. Tu t'es donné l'air de leur apprendre
la ruse, quand tu pratiquais la candeur. Tu. fus
pauvre, abandonné, exilé. J'ai souvenir d'une lettre
de toi où tu te montres cherchant l'amour comme
un mendiant, et ton beau style devient cynique,
dans le sens originel du mot... Tu enduras toutes
les misères, tu dus te contenter des plus bas plai-
sirs. D'une carrière à quoi celle de Goethe res-
sembla, tu ne tiras que l'ingratitude des Princes
que tu avais servis et qui te traitèrent finalement
avec uri machiavélisme sans vergagne...
Cependant, tu as écrit que le Prince, « tant qu'il
le peut », ne doit point s'écarter de « la voie du,
bien », mais qu'il lui faut, « au besoin », « entrer
dans la voie du mal ». Alors, Frédéric II composa
son Anti-Machiavel, et Voltaire eut sujet à son
tour d'en sourire : « L'invasion de la Silésie est
un héroïsme d'une autre espèce que celui de la
modération tant prêchée dans VAnti-Machiavel. La
chatte, métamorphosée en femme, court aux sou-
ris dès qu'elle en voit, et le prince jette son man-
teau de philosophie et prend l'épée dès qu'il voit
une province à sa bienséance. Puis fiez-vous à la
philosophie ! » A tous ces avertissements que nous
fournissait l'histoire, nous avons préféré la phi-
losophie, quoi qu'ait pu faire Guillaume II, après
Bismarck et le grand Frédéric, quoi qu'ait pu
dire Stresemann dans ses harangues aux buveurs
de bière. Philosopher, pour nous, c'était théoriser
notre ignorance ou notre oubli. « Arrière les
canons ! arrière les mitrailleuses ! » Et le bon vin
français coulait dans les coupes de Thoiry...
Aujourd'hui, nous nous mettons à relire les
livrés et nous nous apercevons que « c'était écrit ».
C'était écrit par les Allemands, eux-mêmes, à qui.
l'orgueil tient lieu de sincérité. Machiavel explique
Hitler. Et qui donc explique M. Staline ? Nous
effaçâmes de la carte géographique le nom de
Brest-Litovsk. Hitler et Staline, ensemble, en ont
effacé le nom de Varsovie. Pour un Frédéric II
qui aimait à lire, combien de ces perturbateurs dir
monde n'obéissent qu'à leur génie malfaisant !
"Plutôt que de leur trouver des maîtres en malfai-'
sance, ne devrions-nous pas écouter ceux des,'
nôtres qui n'ont jamais manqué de nous rappeler,
la bonne leçon ? Les vrais inspirateurs de l'Alle-
magne parjure et de la Russie traîtresse sont notre
imprévoyance et notre méconnaissance des faits.
JEAN LEFRANC."
SUR MER
Après le naufrage
du patrouilleur français « Barsac »
On télégraphie de Vigo, 10 janvier
Le patrouilleur auxiliaire Barsac, en croisière
de surveillance contre les sous-marins au large
du cap Finistère, s'est échoué dans la nuit de lundi "
à mardi sur la côte d'Espagne, près de Vigo, et
paraît perdu.
Deux bâtiments espagnols ont sauvé la plus
grande partie du personnel.
On a a déplorer la disparition d'une vingtaine
d'hommes de l'équipage, dont les familles sont
prévenues.
Les obsèques de six des victimes du naufrage
du patrouilleur auxiliaire français Barsac ont eu
lieu hier en présence du maire de Vigo, des con-
suls de France et d'Angleterre et d'un détache-
ment de la garnison. Des couronnes avaient été
envoyées par les commandants des places militaire
et navale du port, ainsi que par le maire et les
corps consulaires français et britannique.
On apprend que c'est par suite du brouillard
que le Barsac est allé s'échouer sur les récifs d'Is-
laons, à 16 milles de Marin. Un violent coup de
mer l'a jeté sur les rochers, où il s'est brisé en
trois. Les appareils radiotélégraphiques ayant été
détruits, le Barsac a utilisé, pour signaler sa po-
sition, des feux de Bengale qui ont été aperçus
par le Léoville, qui retransmit la demande de se-
cours..
Comme on le sait, c'est le bateau espagnol Ile-
de-Ténériffe qui est arrivé le premier sur les
lieux. La mer démontée rendait les travaux dé
sauvetage extrêmement difficiles. Quarante-cinq
naufragés ont cependant pu être recueillis et être
transportés à bord de l'Ile-de-Ténériffe, où ils ont
reçu les soins les plus attentifs.
Six cadavres ont été recueillis sur les lieux du
sinistre par les navires Canalejas et Moncho.
Un autre corps a été rejeté par la mer sur la
plage de Grove.
Navires coulés par des mines
On mande de Londres :
Le bateau-citerne britannique British-Liberty,
jaugeant 8,485 tonnes, a sombré à la suite d'une
série d'explosions causées, croit-on, par une mine.
Après la première explosion, les membres de
l'équipage purent prendre place dans deux ba-
teaux de sauvetage dont l'un chavira. Voyant que
le British-Liberty n'avait pas coulé, le capitaine
et les hommes qui 'avaient pris place dans l'autre
canot ont voulu regagner le navire, mais, peu de
temps après, deux autres explosions se produi-
sirent. La cargaison prit feu et le vaisseau sombra.
On crain que tous ceux qui avaient rejoint le
British-Liberty n'aient péri.
Le canot de sauvetage qui avait chaviré put
être redressé, et les membres de l'équipage qui
avaient été projetés à la mer parvinrent à y prenf
dre place de nouveau et à gagner un bateaux-
phare. Un certain nombre de survivants étaient
demeurés pendant près d'une heure dans les flots.
Les 18 survivants furent débarqués en France
et ramenés en Angleterre. [
Le British-Liberty appartenait à la British
Tanker Co Ltd. Il avait été construit en 1939 et
était immatriculé à Londres.
On mande d'Amsterdam, 9 janvier : j |
Le bateau à moteur hollandais Truida, jau-
géant 176 tonnes brut, a heurté ce matin, dans.
la mer du Nord, au large des bouches de l'Escaut,
une mine et a sombré. Tous les membres de l'équi-
page, composé de quatre personnes, ont été re-
cueillis par un vapeur hollandais. Le Truida se
rendait à Londres et avait quitté Ymuiden lundi
matin.
POLOGNE j
La fermeture de l'université de Wilno
On télégraphie de Londres :
L'ambassadeur de Pologne à Londres a remis
au Foreign Office une protestation du gouverne-
ment polonais contre la fermeture de l'université
polonaise de Wilno par les autorités lituaniennes.
Cette protestation souligne l'importance de cette
université pour la vie intellectuelle des Polonais
du district de (Wilno.
LIS OPÉRATIONS
MILITAIRES
COMMUNIQUÉS OFFICIELS FRANÇAIS
DU 9 JANVIER (SOIR)
Activité marquée de nos patrouilles au cours
de la journée.
DU 10 JANVIER (MATIN)
Activité locale des éléments de contact dans
la région à l'ouest des Vosges.
SUR LE FRONT
La visite de M. Churchill
Le premier lord de l'amirauté est rentré mardi
soir à Londres après avoir conféré longuement
avec le général Gort, commandant en chef du
corps expéditionnaire, dont il était l'hôte. Il a eu
également des' entretiens avec les membres du
gouvernement français et avec le général Gamelin
et nos grands chefs militaires.
Son voyage en France n'avait pas pour but,
d'inspecter le corps expéditionnaire britannique
"mais seulement dé consulter les chefs militaires
anglais et français et de se rencontrer avec les
membres du gouvernement français. Il en a pro-
fité pour faire une courte visite au quartier gé-
néral de l'armée de l'air britannique en France.
Avant de quitter la France, le premier lord de
l'amirauté a fait les déclarations suivantes :
Ayant dû me rendre en France pour voir l'amiral
Darlan au sujet de certains problèmes navals, j'ai saisi .
l'occasion de visiter plusieurs secteurs du front fran-
çais et du front anglais. J'ai passé quelques jours ex-
trêmement intéressants. J'ai visité les troupes anglaises
qui sont en contact direct avec l'ennemi et je les ai
trouvées dans un moral splendide. Au cours de ma
visite, tout était calme, sauf, de temps en temps, le
son du canon dans le lointain.
J'ai été très heureux de visiter certaines parties de
la ligne Maginot que je n'avais eu l'occasion de- voir
qu'en temps de paix. Partout j'ai été extrêmement im-
pressionné par la coopération intime et l'amitié qui se
manifestent non seulement entre les états-majors mais
parmi les officiers et les hommes des troupes fran-
çaises et britanniques. Elles m'ont même paru D!US
intimes que lors de la dernière guerre. Les habitants
ont également montré, partout, qu'ils étaient dan6 les
meilleurs termes avec nos troupes.
J'ai passé la journée au quartier général de la Royal
Air Force et j'ai visité un certain nombre d'escadrilles;
la façon dont elles se 6ont adaptées aux conditions
d'existence si diverses m'a paru très remarquable. J'ai
été très frappé de leur état de préparation. Elles sont
prêtes à la moindre alerte.
Certes, cette attente durant des semaines est très
monotone mais chacun semble comprendre que nos
forces s'accroissent de jour en jour et que, dans cette
guerre, on doit se résigner à la monotonie.
Ceux qui, à l'arrière, chez nous, se sont un peu at-
tristés ou inquiétés au sujet de la guerre tireraient
grand'profit à venir passer quelques 'jours avec les
j troupes françaises et. anglaises en France. Ils trouve-
raient là un tonique et un sédatif.
; Je remporte la même impression d'organisation, de
discipline, de zèle et de confiance qije j'ai retirée de
, mes précédentes visites à la flotte et à nos grands
ports de guerre.
La collaboration de l'aviation britannique
avec les forces terrestres
On a publié mardi soir, à Downing Street, le commu-
niqué officiel suivant :
L'accroissement de la' force de l'armée britan-
nique en France a impliqué nécessairement quel-
ques modifications dans l'organisation des forces
aériennes requises, aussi bien que la question des
meilleurs moyens de fournir la coopération et
l'appui de nos forces à l'armée. En novembre der-
nier, cette question a été entièrement examinée à
la lumière de l'expérience pratique de l'exercice
du contrôle de la Royal Air Force pour l'appui de
l'armée en France.
Comme résultat de cet examen, ^"recommanda-
tions suivantes sur lesquelles s'est effectué l'ac-
cord ont été approuvées par le cabinet de guerre
au début de décembre.
Un commandement de la Royal Air Force devant
inclure toutes les unités de la Royal Air Force en
, France va être formé. Le nouveau commandement
sera appelé « Forces aériennes britanniques en
; France » et sera placé sous la direction d'un offi-
i cier de l'air, commandant en chef, qui est le maré-
chal de l'air A. S. Barratt.
L'officier de l'air commandant en chef sera éga-
lement responsable, en consultation avec les com-
mandants en chef de l'armée intéressée, de l'ap-
port de l'aide la plus effective des forces aériennes
britanniques au corps expéditionnaire eh France
et aux armées françaises sur le front occidental.
Conjointement avec l'officier général commandant
en chef des forces aériennes françaises, il sera
également responsable de la coordination des opé-
rations de la Royal Air Force en France avec celles
des forces aériennes françaises.
L'arrangement sus-mentionné n'impliqué aucun
changement dans le principe qui gouverne les
relations entre l'armée et la Royal Air Force. Il
est basé sur l'analogie des relations existantes
entre la marine royale et le commandement des
lorces côtières de la Royal Air Force et assurera
la coopération la plus étroite entre l'armée et les
forces aériennes en campagne. . .
[Le maréchal de l'air A. S. Barratt, qui vient d'être
nommé commandant en chef des forces aériennes bri-
tanniques en France, est âgé de 48 ans. II fut promu
au commandement des forces aériennes aux Indes à
la fin du mois d'ooût, après avoir été pendant trois ans
commandant de l'état-major 3e la Royal Air Force du
centre d'Andover. Il se distingua pendant la précé-
dente guerre et reçut la Croix de guerre en 1916
et obtint l'ordre de Saint-Michael et Saint-George en
1919. En août 1919, il devint chef d'escadrille de Is
Royal Air Force, et en novembre de la même année ii
devint « wing commander ». Vice-amiral de l'air en
janvier 1936, il avait été promu maréchal de l'air en
juin dernier.]
DANS LIS AIRS
Attaque de navires
par des bombardiers allemands
L'amirauté britannique a publié mardi l'information
suivante :
' Profitant du brouillard, des avions ennemis ont.
bombardé et mitraillé, ce matin, deux navires
marchands, au large de la côte est de l'Ecosse, et
deux autres plus au sud.
Les informations reçues des navires indiquent
qu'aucun d'entre eux n'a subi de dégâts sérieux,
et que seul un homme a été légèrement blessé.
Un cinquième navire a été attaqué par deux
Heinkel. Un certain nombre de bombes ont été
jetées et le navire a été endommagé.
Des avions de chasse ont pris l'air, mais par
suite de la mauvaise visibilité n'ont pu entrer
en contact avec l'ennemi.
U. R. S. S.
Vague de froid sur la mer Noire
On mande de Moscou, le 9 janvier :
Un froid particulièrement rigoureux sévit en
U. R. S. S. C est ainsi qu'on a noté aujourd'hui, à
Odessa, 24 degrés au-dessous de zéro; la mer Noire
est gelée aux abords de ce port.
A Mansion House
LE DISCOURS DE M. CHAMBERLAIN
Tout doit être subordonné à ce but : amener ta perre à la victoire
Le premier ministre britannique a prononcé,
mardi après-midi, à Mansion House, le premier
de la série des discours qui doivent être pronon-
cés par les ministres britanniques pour expliquer
au public la politique de guerre du gouvernement.
M. Chamberlain a d'abord rappelé combien il
souhaitait jadis que la guerre pût être évitée..
Mais, depuis qu'elle est déclarée, toutes ses pen-
sées et toutes ses actions ne tendent plus que vers
un seul but : « Faire tout ce que je pourrai,
en coopération avec nos vaillants alliés français,
pour amener cette guerre à sa fin victorieuse. »
« Je subordonne à ce but tout le reste, toute
pensée de repos ou de détente, ' tous sentiments
partiaux ou personnels et toutes considérations
de n'importe quelle sorte. Aussi longtemps que
j'occuperai mon poste actuel et jusqu'à ce que la
guerre prenne fin, je ne me détournerai pas de ce
but et je ne chercherai pas à me soustraire à la
responsabilité qui m'incombe. Je ferai tout ce que
je croirai devoir faire, quels qu'en puissent être
les difficultés ou le désagrément.
Le calme précédant la tempête
» Cette nouvelle année, qui sera probablement
décisive dans ^histoire du monde,- a débuté dans
Je calme, mais c'est le calme précédant la. tem-
pête. -
» Dans les airs comme sur terre, on assiste
pour le moment au prélude de la grande lutte.
C'est seulement sur mer que l'on peut dire que la
guerre bat son plein, et c'est sur mer que nous
pouvons discerner le plus clairement la marche
des hostilités dans les quatre premiers mois de
guerre. Si nous prenons une vue d'ensemble, je
crois que nous nous apercevrons que le résultat
n'est pas mauvais. »
Le premier ministre fait le bilan des pertes
.allemandes : 228,000 tonnes de navires capturés,
coulés ou sabordés; le reste des bâtiments alle-
mands bloqué dans des ports étrangers ou con-
finé dans la Baltique.
En regard, quelle est la situation de la flotte
marchande britannique : « Si nous soustrayons
de nos pertes dues à l'action de l'ennemi ou à
des accidents survenus en mer. les gains que
nous avons réalisés par la capture de bateaux
ennemis ou par le transfert de navires étrangers
sous notre drapeau, nos pertes, à ce jour, se
chiffrent par 122,000 tonnes, c'est-à-dire moins
de 1 0/0 de notre flotte marchande. Chaque jour,
11,000,000 de tonnes de navires britanniques con-
tinuent de sillonner les océans. »
M. Chamberlain estime que la perte du Royal-
Oak, du Courageous et de plusieurs petites unités
n'a compromis en rien la maîtrise des mers par
la Grande-Bretagne, qui continue d'exercer une
pression inexorable, accroissant sans cesse les dif-
ficultés de l'Allemagne.
L'agression contre la Finlande
Après avoir brossé un tableau saisissant des
méthodes d'agression et d'oppression inaugurées
par l'Allemagne, bientôt imitées p.ar la Russie,
M. Chamberlain déclare :
« C'est maintenant au' tour de la Finlande d'être
attaquée p.ar une puissance avec laquelle l'Alle-
magne a conclu un pacte impie. La Finlande se
bat aujourd'hui contre des forces d'une violence
sans scrupule, comme nous le faisons nous-mê-
mes. Nous nous battons pour la même chose,
c'est-à-dire pour la liberté et la justice, et les
succès étonnants remportés par la Finlande nous
remplissent d'admiration pour son héroïsme. Ce
peuple vaillant peut être assuré que notre ré-
ponse à la résolution adoptée par la Société des
nations ne sera pas une simple formalité. »
Puis le premier ministre exprime la sympathie
qu'il éprouve à l'égard de cet autre pays ami, la
Turquie, qui vient d'être éprouvé par une si ter-
tible catastrophe. Il rappelle l'aide financière déjà
fournie par le», gouvernements britannique et
français, et ajoute : « Les gouvernements britan-
nique et français ont informé le gouvernement
turc de leur désir de donner à leur aide ultérieure
une forme qui est actuellement examinée en plein
accord entre ces trois pays. »
L'intimité franco-britannique
Cette collaboration franco-britannique pour un
but humanitaire fournit à son avis un nouvel
exemple de « cette association intime entre nous
qui caractérise actuellement tous les aspects de
la guerre, dans les domaines militaire, politique,
financier et économique ».
Il pense même que cette collaboration se révé-
lera si précieuse qu' « on ne voudra ni d'une
part ni de l'autre y mettre fin lorsque la guerre
sera terminée ». (Applaudissements.)
« Il pourrait même en résulter quelque chose de
plus large et de plus profond, car il n'est rien
qui faciliterait davantage la tâche de la recons-
truction pacifique qui doit être entreprise un
jour; il n'est rien qui contribuerait davantage à
la stabilité des résultats visés que l'extension de
la collaboration entre la France et l'Angleterre à
d'autres nations d'Europe et peut-être du monde
entier, dans le domaine de la finance et des rela-
tions économiques. »
L'acceptation des privations
M. Chamberlain souhaite à M. Daladier un
prompt rétablissement des suites de son accident.
Puis il se déclare persuadé que les Anglais « ne
voudront pas rester en arrière des Français dans
leur résolution d'accepter joyeusement les pri-
vations inséparatbles de la guerre ».
Il parle de l'échelle prodigieuse sur laquelle
s'est poursuivie jusqu'ici la mobilisation des res-
sources humaines britanniques : à eux seuls, les
« conscrits » déjà mobilisés depuis l'institution
du service obligatoire ou mobilisables immédia-
tement par simple proclamation atteignent un
chiffre variant entre deux millions et demi et
deux millions sept cent cinquante mille. _
En ce qui concerne là défense .passive, il recon-
naît volontiers combien les règlements en vigueur
sont gênants pour la population, cependant a son
avis aucun de ces règlements n'est superflu.
« Je ne considère pas que les dangers de raids
aériens soient passés ni même qu'ils aient dimi-
nué. Et tant qu'il en sera ainsi, je suis persuadé
que nous commettrions une faute capitale en
changeant la politique que nous avons suivie jus-
qu'ici. »
Il ne doute pas de l'union et de la détermina-
tion du peuple anglais de gagner la guerre et de
mettre fin à l'esprit qui domine la politique de
l'Allemagne : « Mais ce dont je suis moins sûr,
c'est qu'on comprenne en Allemagne ce à quoi
on s'attaque, et que nous devrons faire face à une
phase de la guerre bien plus terrible que tout ce
que nous avons vu jusqu'ici.
» Nous ne devons pas penser que, du fait que
la guerre n'a pas pris jusqu'ici la forme qu'elle
avait prise en 1914, nous pouvons poursuivre nos
existences comme si nous étions encore en paix.
Nous devons nous passer de bien des choses qui
nous feront grandement défaut. »
Les combats sur terre ne sont pas actuellement
très actifs, mais « nous nous préparons à agir de
la façon la plus efficace lorsque le moment sera
venu, et, à cet effet, nous consacrons de plus en
plus de main-d'oeuvre à la production de nos
armements. Ceci implique une diminution corres-
pondante de la main-d'oeuvre occupée à produire
des marchandises pour la vie civile. »
A cet égard, il indique que ces chômeurs seront
progressivement absorbés au fur et à mesure que
s'accroîtra l'effort industriel national. La demande
sera notamment considérable dans les usines
d'aviation.
Le problème des salaires
« Nous devrons nous imposer des - sacrifices,
poursuit M. Chamberlain, comme on s'en impose
dans l'Allemagne totalitaire et dans la grande
démocratie française. Je ne veux pas dire par
là qu'il ne devra pas y avoir d'augmentation de-
salaires ; mais je dis que ce serait une erreur de
lier les salaires au coût de la vie, ce qui en fin
de compte; ne profiterait à personne, ne faisant
que mettre en mouvement lç_ cercle vicieux des
hausses alternées des prix et des salaires, et cela
nous voulons tous l'éviter. »
Le premier ministre, esquissant à grands traits
la tâche qui s'impose a la Grande-Bretagne,
s'exprime ainsi : -
« Nous devons économiser ; nous devons con-
trôler nos importations ; nous devons nous passer
des articles non indispensables ; nous devons
même au besoin nous imposer des rationnement^
afin que tous y participent, et y participent pareil-
lement.
» La viande va être prochainement ajoutée à
la liste des denrées rationnées, et, bien qu'il n'y
ait aucune raison de supposer que notre pays
aurait manqué de quoi que ce soit qui fût néces-
saire à sa santé ou à son efficacité, nous ne devrons
Eas hésiter à multiplier ces rationnements si le
esoin en devenait urgent. Chacune dé ces mesures
est simplement une partie du plan général qui
doit nous assurer la victoire dans le moindre
délai possible. »
Avertissement au peuple allemand
Rappelant que le gouvernement allemand avait
préparé depuis longtemps ses campagnes succes-
sives, et qu'il n'hésite pas aujourd'hui à avouer
son désir de détruire l'empire britannique,
M. Chamberlain ajoute :
« De notre côté, nous n'avons pas de tels désirs
dç vengeance. Dire que les alliés souhaitent
l'anéantissement du peuple allemand est une
invention fantaisiste et perfide qui ne peut servir
qu'à la propagande intérieure de l'Allemagne. Le
peuple allemand doit se rendre compte que la
responsabilité d'une guerre prolongée et de toute
la souffrance qu'elle peut entraîner au cours de
l'année qui vient lui incombe à lui-même ainsi
qu'au tyran qui le domine. Il doit se rendre
compte que le désir qu'ont les alliés d'un règle-
ment humain, juste et chrétien, ne saurait \se
satisfaire des assurances que l'expérience a mon-
trées vaines. »
Dans sa péroraison, le premier ministre observe
que l'action de l'Allemagne a soulevé dans le
monde une réprobation générale, « et nulle part
elle n'a été plus vive que dans les deux Amé-
riques ». U donne son approbation entière au
message de M. Roosevelt au pape, où le président
américain déclare que « ce n'est que par l'asso-
ciation amicale des chercheurs de lumière et des
chercheurs de paix, en tous lieux, que les forces
du mal pourront être vaincues ». « Je suis, dit-il,
profondément d'accord,, avec lui et j'ajoute que si
les forces du_ bien doivent prévaloir, nous ne
devons pas hésiter à risquer notre sang et nos
trésors pour une fin aussi élevée. » (Applaudis-
sements.)
« A présent, dans notre volonté d'atteindre notre
but, nous sommes unis entre nous, nous sommes
soutenus par les peuples de l'empire, par la puis-
sance et la résolution de notre grande et vaillante
alliée la France, par l'approbation morale de tous
ceux qui comprennent que le sort de la civilisa-
tion est lié a notre victoire. Contre une telle
combinaison de forces, les puissances du mal com-
battront en vain, et, au seuil de cette nouvelle
année, nous pouvons faire fâce à l'avenir avec
une confiance inébranlée' dans la vertu de nos
armes et la "justice de notre cause. » (Applaudis-
sements.)
GRANDE-BRETAGNE
Les audiences royales
Le roi a reçu le premier ministre en audience
mardi soir, à Buckingham-Palace.
Après avoir reçu M. Hore Belisha, qui lui a
remis les sceaux du ministère de la guerre, le
roi a accordé audience à lord Macmillan, qui vient
de résigner ses fonctions de ministre de l'infor-
mation.
Conseil privé
Le roi a tenu mardi un conseil privé, au cours
duquel Sir Andrew Duncan, le nouveau président
du Board of Trade, .a prêté serment en tant que
membre du conseil.
Souffrant de la grippe, M. Oliver Stanley, nou-
veau ministre de la guerre, n'a pu assister à la
cérémonie et recevoir du souverain les sceaux de
son ministère.
Le ministre du travail demande l'effort
maximum
M. Ernest Brown, ministre du travail, a déclaré
mardi à Edimbourg :
Il faut que la Grande-Bretagne et ses alliés se pré^
parent rapidement à accomplir l'effort maximum. Il
faut que les alliés restent unis derrière leurs chefs
afin d'assurer la victoire décisive.
J'estime que les événements décisifs de la guerre
auront lieu cette année. La victoire ne sera peut-être
pas remportée en 1940, mais les bases en seront po-
sées. Les Allemands se sont figuré que nous ne res-
pecterions pas nos engagements. Ils ont été amère-
ment déçus par l'inexorable résolution 1 des peuples
libres.
v
Le ministre de l'intérieur recommande
la vigilance
Parlant mardi à Edimbourg, Sir John Ander-
son, ministre de l'intérieur et de la sécurité na-
tionale, a développé le thème de la vigilance,
engageant notamment ses auditeurs à ne pas ra-
mener leurs familles - en particulier les enfants
- des campagnes dans les villes exposées .au
péril aérien, mais au contraire à profiter au
maximum des facilités offertes par le plan d'éva-
cuation.
Le ministre a observé que « l'absence d'évé-
nements sensationnels sur le front territorial »
était peut-être la cause d'un « sentiment noté çà
et là que la guerre ne valait peut-être pas la
peine d'être poursuivie ».
Un tel sentiment n'est guère répandu, a-t-il ajouté,
mais j'aimerais formuler un avertissement contre Ja
propagande pacifiste. Elle peut être très subtile et
son origine est pour le moins suspecte. Le pays a
montré de cent façons qu'il était résolument derrière
le gouvernement dans sa détermination de mettre fin
à la loi de la jungle dans les relations internationales.
La paix pourrait être à l'heure actuelle tout à fait du
goût de notre ennemi. Mais qui pourrait croire qu'il
s'agirait d'autre chose que d'un ajournement de la
guerre ?
Une très grande question est en jeu : vivrons-nous
sous le règne du droit ou 60us le règne de la force
brutale? Cette question ne peut être laissée sans ré-
ponse. Il ne peut y avoir qu'une réponse et elle doit
être donnée maintenant.
La démission de M. Hore Belisha
et le Labour Party
Le parti travailliste réservera son jugement
sur la démission de M. Hore Belisha jusqu'à ce
qu'il ait entendu les explications que le ministre
démissionnaire et M. Neville Chamberlain four-
niront mardi prochain à la Chambre des com-
munes.
La journée du 16 aux Communes sera entiè-
rement consacrée à cette discussion à laquelle,
après M. Hore Belisha et le premier ministre,
M. Attlee, chef de l'opposition travailliste, et Sir
Archibald Sinclair, au groupe libéral d'opposi-
tion, doivent participer.
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