Titre : Les Nouvelles littéraires, artistiques et scientifiques : hebdomadaire d'information, de critique et de bibliographie / direction : Jacques Guenne et Maurice Martin du Gard
Éditeur : Larousse (Paris)
Date d'édition : 1940-03-16
Contributeur : Guenne, Jacques (1896-1945). Directeur de publication
Contributeur : Martin Du Gard, Maurice (1896-1970). Directeur de publication
Contributeur : Gillon, André (1880-1969). Directeur de publication
Contributeur : Charles, Gilbert (18..-19.. ; poète). Directeur de publication
Contributeur : Lefèvre, Frédéric (1889-1949). Directeur de publication
Contributeur : Charensol, Georges (1899-1995). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328268096
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 16 mars 1940 16 mars 1940
Description : 1940/03/16 (N909). 1940/03/16 (N909).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t595224k
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-Z-133
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 02/05/2021
16-3-40 — LES NOUVELLES LITTERAIRES
3
LE
MONDE
DES
LIVRES
LE LIVRE DE LA SEMAIM
LES THIBAULT. — Epilogue
Voici la fin d'une célèbre série roma
nesque. Epilogue (i), huitième et dernière
partie, onzième livre des Thibault, boucle
magistralement la boucle en arrêtant, par
la mort du dernier fils, Antoine Thibault,
l'histoire d’une famille bourgeoise de notre
temps, histoire qui se trouve être aussi,
dans une certaine mesure, celle d’une so
ciété. Un surgeon de vie, pourtant, em
pêche la lourde pierre tombale de se refer-,
mer complètement. Le sang des Thibault
coule dans les veines d’un petit être, Jean-
Paul, qui ne portera jamais leur nom puis
qu’il est né après la mort tragique de son
père, Jacques Thibault, et sans que ce der
nier ait pu régulariser son union avec Jenny
Jean LESCURE
Professeur à la Faculté de Droit de Paris
RÉGIMES DE LIBERTE
ET
RÉGIMES D’AUTORITÉ
..JLa guerre de 1914 a tout saccagé ’•
la révolution de type soviétique est ve
nue par là-dessus ; les révolutions de
type national-socialiste ont éclaté à
leur tour ; et la guerre que nous vivons
à l’heure actuelle a fait le reste.
...Il n’y a plus de sécurité...
...Le beau résultat est l'appauvrisse
ment des nations et des hommes, la
baisse du niveau de la culture et le re
cul de la civilisation.
M. Lescure, comparant les régimes de
liberté aux régimes autoritaires, le sou
ligne avec preuves à l’appui...
Pierre Dominique
Les Nouvelles Littéraires du 9 Mars
80 fr.
Alice CHEVALIER
Docteur ès-lettres
C.-C. DE RDLHIÈRE
Premier historien de la Pologne
...On ne peut que louer la probité,
poussée jusqu’au scrupule, de cette
grande thèse. Malgré son rythme uni
versitaire elle offre tout l’intérêt d’une
histoire galante, véhémente et impé
rieuse.
Jean-Jacques Broussqn
Les Nouvelles Littéraires du 24 Février
60 fr.
Les ÊditiODS DBMAT-MBNTCHRESTIEN
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de Fontanin. Ce symbole de la vie qui con
tinue, malgré tous les cataclysmes, au-
dessus de tous les conformismes fami
liaux et sociaux, par le seul miracle de sa
force mystérieuse, donne non seulement à
ce livre mais à l’œuvre entière à laquelle
M. Roger Martin du Gard met aujourd’hui
le point final, un sens profond.
Si l’art souverain est une création de vie
dont le frémissement s'e prolonge dans
l’âme des hommes en ondes multipliées, les
Thibault en sont un magnifique exemple.
L’inspiration, l’homogénéité, la démarche,
le ton, l e style de cette suite de romans,
en font pour nos contemporains, en feront
pour les générations à venir, un authentique
chef-d’œuvre, un modèle dans le genre.
Sans doute l’auteur a voulu, comme tout
vrai romancier, y dégager la forte leçon
de la vie ; pourtant, c’est l’apparente « gra
tuité » de son dessein qui nous enchante.
Son secret, c’est qu’il a employé, sans une
erreur, sans une hésitation, sans commet
tre le moindre hiatus, les moyens mêmes
qu’emploie la vie pour se manifester, pour
s’imposer. Aucune visible intention morali
satrice, aucune de ces transpositions, qui
limitent toujours, tantôt sur le plan trop
étroit de l’intellectualité, tantôt sur le plan
incomplet du sentiment. Seulement le flot,
le flot irrésistible qui s’écoule et nous
entraîne, le flot où tout se modifie et s’or
donne suivant une harmonie qui nous échap
pe, suivant une loi qui nous soumet. Un
dosage savant des éléments physiques, mo
raux, passionnels qui constituent l’éternelle
vérité des hommes, fait des personnages des
Thibault des êtres en qui s’incarne l’éter
nelle vérité de la vie parce qu’à travers
toutes leurs transformations, ils restent
'fidèles à eux-mêmes. Et cet art complet,
qui crée avec la même puissance, la même
perfection que la vie, caractérise le talent
de M. Roger Martin du Gard.
Dans Epilogue reparaissent les pro
tagonistes des précédents volumes, soit
directement, soit par l’évocation de sou
venirs qui les rendent présents. Mais
c’est surtout le récit de la fin douloureuse
du Docteur Antoine Thibault, grand gazé,
qui s’éteint dans un sanatorium de la Côte
d’Azur, quelques jours après l'armistice, ou
qui plutôt abrège ses souffrances au terme
d'une lutte héroïque contre un mal dont il a
noté héroïquement la marche impitoyable.
Tout au long de sa lucide agonie, il a
le temps et le courage de revivre sa vie, de
réviser ses idées fondamentales, d’abandon
ner quelques-uns de ses principes, ceux
qu’il croyait les plus inattaquables, et de
tirer, de cette ultime confrontation, des con
clusions malheureusement trop tardives
pour être fécondes. A la lumière glacée de
la mort qui s’approche, comme l’être se dé
pouille enfin du superflu, du factice, comme
tout reprend son vrai sens, et qui était caché ,
■comme les compagnons les plus proches et
les plus fraternels se font regretter ! Dans le
journal où il note à la fois les réactions de
son âme et les observations cliniques du
mal qui désagrège son corps chaque jour
un peu plus, Antoine essaiera de faire béné
ficier son neveu Jean-Paul de son expé
rience toute neuve d'homme de trente-sept
ans. En même temps que son journal , ses
conversations avec des camarades, officiers
gazés comme lui, ses souvenirs de guerre ou
de paix, les rappels de son enfanc§ ou de
sa maturité, les lettres qu’il écrit ou qu’il
reçoit, composent an tableau absolument
complet de la période chaotique qu’il a tra
versée, de celle qui se prépare et dont il vou
drait atténuer les rigueurs pour l’enfant en
lui forgeant l'âme lucide et dure qui mate
l’événement.
Bien gu'Epilogue soit empreint d’une
âpre tristesse, il ne s’en dégage jamais une
impression de découragement. Au contraire.
La vie qui s’éteint chez le docteur Thibault
ne va-t-elle pas se prolonger mystérieuse
ment dans un autre corps ? L’âme qui se
disperse, ne s’éveille-t-elle pas déjà dans une
autre âme ? Le courant n'est pas interrompu
malgré les terribles ravages de la guerre,
malgré les injustices quelle entraîne inévi
tablement. La mort, qui plane comme un
oiseau de proie et décrit de grands cercles
concentriques avant, de s’abattre sur sa vic
time, ne sera pas la victorieuse. Elle ne fait
que participer au cycle de la vie, l’éclairer,
l’enrichir, lui donner son vrai sens.
L’opportunité d’un tel livre, précisément
dans la nouvelle épreuve que nous traver
sons, n’apparaîtra peut-être pas immédiate
ment à certains. Il s’inscrit si brutalement
contre la nécessité, qui nous est chaque
jour démontrée, que quelques-uns s’ef
fareront de sa publication. Pour les esprits
libres, quel réconfort de constater qu’en
France le génie s’impose toujours et qu’il ne
connaît d’autre opportunité que celle de la
vérité qu’il apporte aux hommes.
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LE SENS DE LA POESIE MODERNE
DE BAUDELAIRE AU SURREALISME
par MARCEL RAYMOND
LA VALEUR DE CET OUVRAGE A ETE CONSACREE PAR LE
Résumé de la Table : GRAND PRIX DE LA CRITIQUE
Romanisme et Naturisme - Mariage de rancienne et nouvelle esthétique - P. Valéry ou
le classique du symbolisme - P. Claudel, chantre, du monde total - La poésie des hommes
de bonne volonté - Origines de la poésie nouvelle - Apollinaire - Vers une poésie de
l’action et de la vie modernes - Les jeux de l'esprit libre - Dada - Le surréalisme - Les
poètes du surréalisme - En marge du Surréalisme - Epilogue,
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LES SOURCES DE LA POESIE VIVANTE
L’AME ROMANTIQUE ET LE REVE
ESSAI SUR LE ROMANTISME ALLEMAND ET LA POESIE FRANÇAISE
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Les derniers temps
d’après l’Apocalypse
paf le Comte J. du Plessis
Des divers ouvrages du comte du Plessis,
c’est celui qu’il a consacré à son fils Jean, le
héros du Dixmude, qui est devenu le plus
populaire par son sujet même, mais les autres,
d’un caractère très différent, ont connu, eux
aussi, un réel succès, malgré le public plus
lettré auquel ils s’adressaient.
Quand il publia, en 1922, la Caravane hu
maine, l’auteur nous confia que cet ouvrage
était celui de toute sa vie. Ce livre ouvrait
une série qui a pour titre général Le Sens de
l’histoire, dont le troisième volume paraît au
jourd’hui.
L’histoire humaine a-t-elle donc un sens ?
La loi de contradiction à laquelle elle sem
ble obéir peut faire douter de ses progrès.
Pourtant, à qui l’étudie de près, elle révèle
la voie qu’elle suit, souvent en tâtonnant et
avec beaucoup d’apparents retours en arrière,
mais ce n’est pas parce que nous sommes en
plein recul qu’il faut nier la marche ascen
dante.
Le comte du Plessis est un historien qui a
accumulé d’impressionnants matériaux et que
l’histoire a conduit à l’exégèse. Dans le tome
II, il étudiait les derniers temps d’après les
prophéties évangéliques. Aujourd’hui, c’est
l’Apocalypse qu’il interroge. Sans doute, com
me il nous en prévient, il ne s’agit pas de
scruter les détails de l’avenir ni de rechercher
dans combien de temps aura lieu la fin du
monde, mais le passé projette de la lumière
sur la route future et nous pouvons embrasser
les ensembles, saisir le sens, les lois, l’accélé
ration de la marche, le terme du chemin.
Pour le comte du Plessis, l’Apocalypse, lon
guement étudiée, comporte une explication
simple. A côté des interprétations théologi
ques et mystiques, l’interprétation historique
est également légitime. La théorie des « sept
âges » est une des plus anciennes. Elle consi
dère en chacune des sept Eglises d’Asie évo
quées par saint Jean, l’Eglise universelle dans
une des périodes de son histoire. On voit alors
se dérouler « le grand film du Christ-Roi ».
Il est bien curieux, bien émouvant, de consta
ter que les jalons de l’histoire et ceux de la
prophétie s’alignent constamment. Les conclu
sions rejoignent donc celles que l’auteur dé
veloppait déjà dans La Caravane humaine, à la
seule lumière des événements historiques : que
l’humanité doive cheminer longtemps encore
sur sa route, ou qu’elle s’approche de son but,
l’auteur envisage l’une et l’autre hypothèse
avec la même sérénité. « Ce qui importe, c’est
de ne désespérer de rien. » Nous savons
que, malgré le déchaînement de Satan qui
durera jusqu’à la fin du monde, l’humanité
doit entrer dans l’Accalmie du septième et
dernier âge. Aux jours sombres de l’histoire,
il n’est guère de perspective plus consolante.
— (.Editions Téqui).
Jeanne Ancelet-Hustache.
%%
La petite chronique
d’Anna Magdalena Bach
Traduction de M. et E. Buchet
j Comme son titre l’indique, c’est un tout pe-
! tit livre. Un livre sans apparente importance,
j toujours sincère, presque naïf, sobre comme la
| grande vie qui l’inspira : la vie de J.-S. Bach
| lue à travers le cœur transparent de sa femme.
Qui était-elle, cette Anna Magdalena qu’il
épousa en secondes noces ? Une petite fille en
core et très bourgeoise, plus compréhensive de
sa musique et de lui-même que vraiment intel
ligente. D’aill e urs, elle nous confie peu de cho
ses d’elle-même : rien qu’un secret, le plus
grand et le plus profond, l’amour sans limites
qui voua sa vie à celle de son mari et en fit
un reflet. Dur souvent, violent quelquefois, et
sans doute égoïste comme peut l’être l’artiste
— on peut dire ici le génie — Bach, tout bon
père de famille qu’il fût, devait bien représen
ter, dans le bon et le mauvais sens du mot, cette
« solide forteresse » dont sa femme nous parle
avec une reconnaissante tendresse. Elle rappelle
soigneusement les années de jeunesse et le dé
but de Jean-Sébastien, son premier mariage,
puis le sien. « Alors ma vie commença », dit-
elle. Puis, avec un juste orgueil, sans laisser
de côté les petites difficultés de tous les jours
et les chagrins plus grands, elle retrace la car
rière du « cantor » depuis l’éclosion du Clave
cin bien tempéré jusqu’à celle des cantates,
des fugues et des passions : c’est le récit d’une
belle vie et l’expression d’un très grand amour.
— (Corréa.)
Yette Jeandet.
Fièvre des Polders
par Henri Calet
On lit Fièvre des Polders comme on écou
terait, la nuit dans une chambre d’hôtel, un
voisin inconnu qui délire : avec une curio
sité anxieuse qui vous rend déjà son com
plice. Emporté par un violent élan dans La
Belle Lurette, d’une brutalité un peu mala
droite dans Le Mérinos, M. Calet a trouvé,
en quittant Paris pour les plaines de Flan
dre, un climat où son emportement, sa déso
bligeante franchise peuvent se donner libre
cours sans paraître forcés.
La famille Ward vit à Burrth, village de»
Polders, village maudit comme si la mer ja
louse des terres que l’acharnement des hom
mes lui a dérobées se vengeait sournoisement.
Le père, marchand de bière, qui titube dans
son rêve de grandeur, la mère qui devine,
impuissante, la ruine et la honte, Odilia, hys
térique et douce, Sibélius, dont nous ne sa
vons rien, sinon son amour coupable pour sa
sœur se débattent dans l’atmosphère trouble
d’un estaminet fréquenté par des marins et
des filles, secoué de rixes, gluant de sales
plaisirs. Plus lucide, la grand’mère, gardien
ne gloutonne des superstitions, guérisseuse
sans tendresse qui insulte les morts dont elle
fait la dernière toilette, dénonce les péchés
des siens et prophétise le châtiment. Et la
kermesse permet à tous de vider « cette es
pèce de poche nauséabonde qu’on porte en
soi, si lourde, où s’entassent, jour après jour,
les rancœurs, la peine, la haine ». Tout le
village est entraîné dans une ronde lubrique,
qui hâte la déchéance de la famille de Ward.
Le cheval Jules, dont Ward était si fier, est
écrasé, Nette meurt, la grand’mère s’enfuit,
entraînant la plus jeune fille, après avoir
surpris Odilia et Sibélius. Ward s’embarque
comme domestique, et Odilia reste « bonne
à tout faire * dans l’estaminet que le concur
rent détesté de Ward transforme en cabaret
borgne...
Ce n’est guère que chez les romanciers
américains, Faulkner et Steinbeck, qu’on
trouve ce désespoir morne et destructeur,
cette rage que des êtres primitifs, mais aux
instincts pervertis, apportent à se déchirer
eux-mêmes. Une poésie désolée éclaire çà et
là le récit, comme ces chatoyantes flaques
d’huile qui rendent encore plus noire l’eau
des canaux, la boue des chemins. (.Gallimard.)
Jeanine Delpech.
ET LES HOMME
Explication de la guerre
Voici une explication de la guerre, ou
mieux, un essai de synthèse des événements
contemporains. Depuis 1914, le monde vit
une tragédie effrayante, mais, pauvres ac
teurs que nous sommes, nous la jouons un
peu à la manière des Italiens d’autrefois
dans la Commedia dell’Arte, inventant les
répliques au fur et à mesure des besoins et
les entremêlant de coups. Au moins les ac
teurs italiens s’appuyaient sur quelques
données précises, mais quand on leur parle
d’un thème général, nos grands hommes
hésitent, tergiversent, ânonnent. Georges
Valois, lui, précise : « La lutte est engagée
pour l’aménagement général de la planète,
entre le totalitarisme ou capitalisme d’Etat
d’une part, le capitaine des trusts, d’autre
part, et la démocratie encore d’autre part,
cette dernière n’ayant pas encore de pouvoir
économique. »
Je demande qu’on retienne cette définition
bien qu’elle paraisse distinguer trois adver
saires, d’autant qu’en réalité on n’en retrouve
que deux, « le capitalisme des trusts » et
« la démocratie » combattant dans le même
camp. C’est ce que les totalitaires soulignent
en parlant, pour Londres et Paris , ces puis
sances unies, de démoploutocraties. On peut
ajouter — le livre n’insiste pas là-dessus —
que dans ce camp se trouvent les principales
forces spirituelles du monde, et notamment
les forces chrétiennes.
Mais allons plus loin. Au cours de son
exposé historique, Georges Valois, qui fait
naturellement partir le grand ébranlement
d’août 1914, mais pour qui la révolution
russe est la révolution totalitaire par excel
lence, souligne que si, dans un premier
temps, peu après 1933 , c’est-à-dire peu après
la révolution allemande, un axe Rome-Ber
lin s’est constitué, cet axe s’est pratique
ment rompu en août-septembre 1939, au pro
fit d’un axe Berlin-Moscou :
« Toute l’histoire d’Europe tourne, de
puis 1917, écrit Georges Valois, autour des
journées d’octobre qui ont donné naissance
au totalitarisme, au vrai, à l’authentique to
talitarisme. Contre lui, l’Allemagne, l’Italie,
l’Espagne ont fait des révolutions : mais
c’éait pour lui ressembler en le contrefai
sant. Au bout de vingt deux ans et dans des
conditions prodigieusement dramatiques,
c’est l’authentique totalitarisme qui oblige
ses adversaires, d’hier, ses contrefacteurs,
à se plier à sa loi, à devenir semblables à
lui. »
Pour Georges Valois, nous sommes donc
en présence d’une révolution allemande soi-
disant anti-bolcheviste, qui n’a pas pu se
maintenir sur ce terrain (justement, selon
nous, parce qu’elle s’est affirmée anti-chré
tienne en son principe) et qui, à la faveur
de la guerre, s’est bolchevisée, ce qui — et
il nous semble voir dans ce propos, pour
l’instant, une exagération manifeste, — fe
rait de Hitler un simple instrument de Sta
line.
Quoi qu’il en soit de tout cela, on trou
vera dans le petit livre de Georges Valois
une somme énorme d’idées, de raisonnements,
d’hypothèses ; je ne puis ici les discuter tou
tes ; je signale simplement au passage l’acte
de foi terminal dans la puissance de Pro-
méthêe, du génie humain capable de tirer
« des sources inépuisables de la nature, des
centaines de millions d’esclaves infatigables
pour le service de tous les hommes ». Va
lois ajoute que l’homme maître de toute
la planète est « enfin en possession des
moyens de mettre fin à la guerre ». C’est
lui faire beaucoup de confiance■ A la vérité,
on a connu, au sein de communautés qui
réunissaient des hommes de même langue
et de même culture, et qui dans Tensemble
étaient florissantes, trop de guerres civiles
et sociales pour croire à la disparition de
cette colère collective, de cette explosion
passionnelle qu’est la guerre.
Pierre DOMINIQUE.
* Prométhée vainqueur, par Georges
Valois. (Ed. Liberté.)
VIENT DE PARAITRE
GEORGES VALOIS
PROMÉTHÉE
VAINQUEUR
ou
EXPLICATION
DE LA GUERRE
La guerre expliquée par le
technicien qui en avait prévu
les formes.
Un vol. 15 fr. EDITIONS LIBERTE
6 bis, rue de l’Abbaye, PARIS VI«
Rappel : Du même auteur
Guerre ou Blocus Economique, 20 fr.
CK QCiK XK F AV OR A PKVS RECOIUMBXCER
BERTRAND DE! JOCVENEL
D’UNE GUERRE A L’AUTRE
I. • DE VERSAILLES A LOCARNO
Toutes les difficultés de l’après-guerre de 1918,
toutes les conséquences des solutions ado ptées alors,
toutes les erreurs à éviter par la suite...
Un volume in-8 de 416 pages, broché : *ê fr.
JANE ALLEN
LES JOIES D’HOLLYWOOD
(Superfilm)
Roman traduit de l’anglais par HELENE CLAIREAU
C’est un roman plein d’observation et de bonne humeur, qui nous
introduit dans les dessous des studios d’Holliwood, parmi les
grandes vedettes de l’écran, et c’est un livre gai.
Un volume in-16, broché : 22 fr.
CALMAXX-LÉVY, Éditcors
L’ESPRIT ül DES Hü LIVRE
ous avons signalé ici même la beauté
et l’importance de VIntroduction à la
Poésie française, de M. Thierry Maul-
nier. S’il a été loué, cet ouvrage a été
aussi fort attaqué. Et attaqué avec
injustice. Les réserves que je formu
lais sont devenues des condamnations.
Il était bien facile de déclarer que toute la
poésie française ne se trouvait ni dans cette ex
plication, ni dans les textes réunis.^ Eh! mon
Dieu, cela crevait les yeux! Mais la réduc on de
l’élément le plus continuel de notre poésie à une
philosophie particulière du monde et de l'intelli
gence — et le rôle de l’intelligence et du savoir
dans cette poésie — et la construction d’un ma
gnifique édifice mental sur des fondements déjà
intellectuels ou mythologiques — et parfois même
déjà littéraires — voilà justement ce qu’il fallait
nous présenter, ce que M. Thierry Maulnier nous
a présenté.
Chose d’autant plus considérable que notre épo
que voulut renier tout passé littéraire, travail
ler, comme l’on dit, dans le neuf, c’est-à-dire dans
l’immédiat. Si bien que l’on a pris l’habitude de
considérer comme nouveautés des choses soi-
disant arrachées toutes vives à la vie et qui sont
des imitations toutes simples d’écrivains à peine
antérieurs. Les sensibilités originales sont rares,
presque aussi rares que les personnalités authen
tiques. Montaigne (je m’excuse de citer Mon
taigne ; il paraît qu’on le fait trop ; un parle
mentaire s’est plaint l’autre jour, à la Chambre,
que la Radio parlait trop de lui et qu’il valait
mieux entraîner nos soldats à la victoire, mais
n’avons-nous pas déjà pour cela nos innombra
bles chanteurs), Montaigne, dis-je, écrivait dé
jà : « Nous ne faisons guère que nous entre
gloser... »
La seule erreur, à mes yeux, de L’Introduction
à la Poésie, de M. Thierry Maulnier, serait
d’avoir introduit François Villon parmi ses écri
vains choisis. Villon est d’une autre veine que
Ronsard, Maurice Scève, Racine, Nerval ou Mal
larmé ; Villon exprime une autre humanité que
Du. Bellay. Garnier, Malherbe ou M. Charles
Maurras. Il serait l’aïeul de cette famille à qui
l’on doit Marceline Desbord es-Vaimoire, Paul Ver
laine, Francis Jamm.es et plusieurs des meilleurs
poètes de la fin du XIX e siècle et d’aujourd’hui :
ceux que Ton pourrait apeler les « poètes du dé
pouillement » : ce qui expliquerait que les prin
cipaux d’entre eux soient catholiques.
C’est dans ce dernier groupe qu’il faut ranger
Mlle Alliette Audra. Francis Jammes, qui a pré
facé, avant sa mort, son avant-dernier ouvrage,
écrit d’elle :
« Aujourd’hui, c’est à moi qu’incombe l’hon
neur de vous révéler Voix dans le Renouveau. Je
n’ai pas l’illusion d’accroître beaucoup la répu
tation d’une jeune fille que j’admire pleinement
et dont j’ose dire que je l’aperçois déjà glorieuse
dans cette lueur d’aube qui se lève sur la Renais
sance que j’annonce. Il en sera d’elle comme de
ceux qui lui ressemblent. Ce n’est ni par le ta
page, ni par le scandale au’ils s’imposent — mais,
comme je l’ai dit, par 1 union des cœurs qui se
groupent, un à un et peu à peu, autour d’un au
tre cœur... »
U semble, en effet, (pie les effluves qui se dé
gagent des vers de Mlle Alliette Audra n’aient
d’autre but que de gagner notre cœur — n’en
tendez pas ce mot au sens où le prennent les
amateurs de romances et les simulateurs de la
sensibilité, mais dans son sens réel, qui repré
sente et donne à concevoir la partie la plus émo
tive, la plus affective de notre âme, car notre
âme a aussi une zone spéculative, indifférente
et presque glacée déjà.
Il s’agit ici de la poésie la plus volontairement
modeste qui se puisse lire ; de celle qui répugne
à tout éclat comme à tout pathétique et qui. n’en
est ainsi que plus troublante; de celle qui en
tend ne fausser aucun sentiment par son expres
sion, mais le veut aussi pur, aussi nu qu’il se
forme en nous et pour qui le langage n’est pas
un artifice, mais le moyen le plus naturel, le plus
strict de traduire la vie intérieure. Or, sa force
vient justement de ce que cette vie intérieure
n’est faite que de poésie, de poésie vécue. Quand
tel ou tel Parnassien (je dis cela sans dédain et
pour désigner un « type » littéraire : on revien
dra sur le Parnasse pour lequel on a été incroya
blement injuste), décrit à grand renfort de mots
orfèvres ou surchargés une coupe ciselée de la
Renaissance ou un trophée de kriss malais et de
vafolards, il pouvait très bien, pendant ce temps-
là, réfléchir au moyen de renvoyer sa maîtresse
sans en avoir trop d’ennuis ou se débarrasser
d’une cuisinière onéreuse. Mais qui parle du
souvenir, de l’espérance, de la douleur, de la na
ture, de la pitié et de la mort avec des mots sim
ples, lavés comme les cailloux des torrents, ne
saurait nous tromper sur soi-même, ni sur nous,
et cela fait le mérite de son chant.
Ce chant correspond exactement à ce que dit
du lyrisme Hugo de Hofmannsthal : « Nos sen
timents. nos ébauches de sentiments, tous les
états les plus secrets et les plus profonds de notre
être intime ne sont-ils pas de la plus étrange
façon enlacés à un paysage, à une saison, à une
propriété de l’air, à un souffle? Un certain mou
vement que tu fais en sautant d’une voiture, une
nuit lourde et sans étoiles, l’odeur des pierres
humides dans un vestibule, la sensation glaciale
de l’eau d’une fontaine coulant sur les doigts :
à quelques milliers de choses terrestres de cette
nature toutes tes possessions spirituelles sont
reliées, tons tes élans, toutes tes aspirations, tou
tes tes ivresses. Plus que reliées : les racines mê
mes de leur vie ont grandi, solidement implan
tées, de sorte que si tu les coupais de ce fond,
elles se dessécheraient et se réduiraient à rien
entre tes mains. »
Un cimetière dans le Valais ou dans le canton
de Vaud, un paysage anglais ou italien, une
prière, un calvaire, la vue d’un visage, un sou
venir d’enfance, les malheurs dont on 11e se con
sole jamais — et ces gestes d’embaumeuse avec
lesquels, on ensevelit le passé dans les aromates
— et l’inutilité de sauver une hirondelle blessée
— et la leçon d’un coquillage — et tous les rêves
— et l’éternelle aspiration de l’âme, blessée aussi,
à la paix surnaturelle, à la sagesse et à Dieu —
et le silence — et le vent, voilà les thèmes de
Voix dans le Renouveau et de l)u. côté de la neige.
Ecoutez l’une de ces pièces, le Nom ; elle me
semble particulièrement pénétrante :
Donne-lui le nom d’un bel arbre
vu dans la forêt de tes songes,
ou bien celui d'un dieu de marbre
Au seuil du temple où la nuit plonge.
VOIX DANS LE RENOUVEAU
avec préface de Francis Jammes
DU COTE E)E LA NEIGE
par Alliette Audra (Corréa)
TERRES DE VIGILANCE
par René de Berval (Denoël)
BATTEMENT : IL UNITE
par Thérèse Aubray
(Les Cahiers du Journal des Poètes)
ACCENTS, par Jean Tardieu
(Nouvelle Revue Française)
DONNER A VOIR
par Paul Eluard (N. R. F.)
Donne-lui le nom d’un grand fleuve
Eomportant des bateaux à, voile,
le nom de cette rose neuve,
de ce nuage, ou de l’étoile
que nul encor n’a baptisée.
Donne-lui un nom de lumière,
celui d'une larme irisée
s'échappant hors de ta paupière.
Mais si tu veux un nom robuste,
chaud comme le sang de tes veines,
un nom qui sonne vraiment juste,
donne-lui le nom de ta peine.
Mais comment ne pas citer aussi ce lied admi
rable ?
Ne lui dis pas que je suis morte
non plus que je vais revenir.
Entr’ouvre un petit peu la porte
et raconte des souvenirs
du temps où l’âme é.lail plus forte,
où l’amour savait réunir
ceux c piau loin le devoir emporte.
Ne lui dis rien de l'avemr,
tais-toi sur le présent de sorte
qu'un silence vienne bénir
la douleur que tu lui. apportes.
Ne tâche plus d'intervenir...
Quand tu verras qu’elle supporte
sa peine, trace pour finir
un signe de croix sur lu porte.
Que je devienne un semvenir.
Tel est l’accent mystérieux de ces vers où le
drame n’affleure que sous la forme d’allusion à
des tourments inexprimés ; où l’âme dialogue
avec les voix du monde et en transpose dans
l’ineffable les grondantes menaces ; où chaque
chose apparaît dans son enfance : la fleur com
me un fantôme, l’amitié comme une promesse
béatitique, le silence comme un écho, le sommeil
comme une enfance, la mort comme une vie.
La poésie de M. René de Berval est bien diffé
rente. O. W. de L. Mi Los z, dont M. de Berval a
été l’ami, a dit d'elle qu’elle « unissait la vision
de l’univers à l’introspection ». M. de Berval fait
partie de ce groupe d’écrivains, nés du surréa
lisme, chez qui la métaphysique a pris un carac
tère d’angoisse individuelle ; caractère nette
ment « hamlétique » et qui constituera une des
formes littéraires les plus significatives de notre
temps. Comme Mme Yanette Delétang-Tardif,
M. Roger Lannes, M. Jean Le Louët, M. Jean
Jacquot, M. Fernand Marc, M. Jean Wahl, M.
Maxime Alexandre, M. Bertrand d’Astorg. comme
M. Joë Bousquet et bien d’autres, M. René de
Berval, à travers les synestbésies, les analogies
et les déchirements de l’imagination, cherche à
retrouver l’Etre, à reformer son unité. Mais le
tourbillonnement des mondes l’arrache à lui-
même ; mais le songe l’entraîne dans des méan
dres qui ne lui rendent que plus clair le besoin
de ce qu’ils lui dérobent — à moins que le rêve
ne finisse par se confondre avec le caché — mais
le formidable passé de la création remprisonne;
mais l'inconnu lui laisse entrevoir le filigrane
qui le sortirait du chaotique. Avec, ces élans et
ces défaites, ces envolées et ces crises de cons
cience, M. René de Berval écrit des poèmes
tout crissants d’un bruit de départs dans la nuit,
tout traversés d’images violentes et démesurées,
où l’homme ne perd jamais le sentiment qu’il est
l'Homme et qu’il doit appeler au nom de tous.
Comment ne pas être sensible à la sombre gran
deur de ce début de poëmc :
Ce qui. sort de mon cœur est peut-être la vie
Et peut-être la mort,
Dont les flots charrient des épaves-
Car je n’ai connu de la vie
Qtie son reflet saignant ;
Je n’ai connu de la Terre
Que le brin d’herbe sinistre et froid
Qui garde le seuil des cimetières ;
Je n'ai connu des hommes
Que leur haine lourde et sombre,
Et de Dieu
Que les nuages noirs qui descendent du ciel.
La poésie de Mme Thérèse Aubray a une toute
autre forme d’angoisse. Un lourd tourment sen
suel entrave ces vers implorants et désolés, où
éclate parfois un dur sarcasme. Le mélange que
l’on y trouve des appétences humaines et de leur
évasion par la métaphore est comme résumé
dans ce vers ramassé et comme gnomique :
La pulpe ouverte est cœur autant que fruit.
Une sorte de dialogue s’échange entre le poète
et son ombre, véhément, souvent funèbre, tou
jours tragique. Partout pèse une atmosphère
fatidique qui draine les âmes et les corps. Dans
cette brume, comme tissée d’instincts insatiables,
l'esprit perdu cherche sa route sans espoir. Il
cherche à se délivrer de ce joug par la brutalité,
par la violence d’un geste ou d’un cri. Mais tout
est sourd à sa voix. C’est une confession oppres
sée qui sort de ces pages sans répit ni repos,
haletantes comme au sortir d’un cauchemar —
d’un cauchemar qui serait la vraie vie. Prome
nade est une des rares haltes adoucies dans ce
« battement » anxieux, qui devient pénible à la
longue — quand on sait le lire. Mais plusieurs
parties de ce colloque dramatique où deux volon
tés se combattent et rivalisent du besoin de se
détruire nous touchent pur une secrète horreur
qui ne tolère aucun signe de délivrance. L’ia*
d’entre elles conclut ainsi :
Tout ce qui est senti est gag-né
> En toi, par toi, à tous les pas,
Le vainqueur se soulève et te salue...
Tu restes seule, unique et près de Rien.
La farce continue.
Cette poésie contemporaine, qui pourrait pa
raître monotone à un lecteur superficiel, comme
elle est variée, multiforme, sous son revêtement
uni. derrière sa façade sans affiches ni bario
lages !
M. Jean Tardieu souffre de sentir autour de
lui la matière énorme, hostile, inassimilable, ou
bien il imagine, « à l’écart de la raison », « un
espace en dehors de l’espace ». Cette double han
tise forme l’élément spirituel d’une poésie sac
cadée. cahotée, souvent voisine de la prose et
d’une philosophie abréviative, parfois scandée
par des longues et des brèves, à l’image de la
poésie latine ou allemande : moyen de perception
du rythme peu appréciable d’ailleurs aux oreilles
françaises. Des hallucinations fréquentes permet
tent à l’individu de s’exprimer en profondeur,
comme si l’intérieur de l’être se révélait sous
l’action d’un agent chimique. Mais toujours re
naît l'espoir de regagner cet « espace sans es
pace » où l’esprit vaincrait 1 ’accumulation des
matériaux qui encombrent le champ de la pensée
et la place du corps :
Quelle nuit tout à coup, mais quel espace !
Je reconnus la voix de toujours
Qui pour moi demeure et par moi passe
Et quelle puissance, loin de l'amour !
Je laissais mourir et renaître
Et mourir encor la clarté.
Moi, je creusais mon obscurité
Et j’apprenais à ne plus être.
Cependant on murmurait : « L'ombre
Va l’engloutir ! » Ah ! J’entends le vent
Répondre par les feuilles sans nombre :
« Cet homme a franchi les portes du temps ! »
Mais je préfère peut-être encore aux vers
d’Accent deux poèmes en prose, âprement et du
rement travaillés, et une belle traduction, dans
une langue très musicale, d’un fragment d’Ar-
chipel, de Holderlin. J’aimerais Mire bientôt d’an
tres Grilles et Balcons, d’autres Tintorct dans
la cour de Vlmmeubleè.
J’aurais voulu consacrer un plus long commen
taire à Donner à voir, le choix d’essais, de textes
et de poèmes publié par M. Paul Eluard; mais
nous reviendrons sur ce dernier en parlant de
son florilège de Baudelaaire. Avec des proses
subtiles de M. Paul Eluard, qui semblent en 1
quelque sorte s’étager sur plusieurs paliers, avec-*
quelques chapitres de critique sagace, on trou
vera dans ce livre la réunion de quelques-unes^
des plus belles formules consacrées à la poésij s _
par des poètes et par des philosophes.
Edmond JALOUX, vé*
& l'Académie Française,
3
LE
MONDE
DES
LIVRES
LE LIVRE DE LA SEMAIM
LES THIBAULT. — Epilogue
Voici la fin d'une célèbre série roma
nesque. Epilogue (i), huitième et dernière
partie, onzième livre des Thibault, boucle
magistralement la boucle en arrêtant, par
la mort du dernier fils, Antoine Thibault,
l'histoire d’une famille bourgeoise de notre
temps, histoire qui se trouve être aussi,
dans une certaine mesure, celle d’une so
ciété. Un surgeon de vie, pourtant, em
pêche la lourde pierre tombale de se refer-,
mer complètement. Le sang des Thibault
coule dans les veines d’un petit être, Jean-
Paul, qui ne portera jamais leur nom puis
qu’il est né après la mort tragique de son
père, Jacques Thibault, et sans que ce der
nier ait pu régulariser son union avec Jenny
Jean LESCURE
Professeur à la Faculté de Droit de Paris
RÉGIMES DE LIBERTE
ET
RÉGIMES D’AUTORITÉ
..JLa guerre de 1914 a tout saccagé ’•
la révolution de type soviétique est ve
nue par là-dessus ; les révolutions de
type national-socialiste ont éclaté à
leur tour ; et la guerre que nous vivons
à l’heure actuelle a fait le reste.
...Il n’y a plus de sécurité...
...Le beau résultat est l'appauvrisse
ment des nations et des hommes, la
baisse du niveau de la culture et le re
cul de la civilisation.
M. Lescure, comparant les régimes de
liberté aux régimes autoritaires, le sou
ligne avec preuves à l’appui...
Pierre Dominique
Les Nouvelles Littéraires du 9 Mars
80 fr.
Alice CHEVALIER
Docteur ès-lettres
C.-C. DE RDLHIÈRE
Premier historien de la Pologne
...On ne peut que louer la probité,
poussée jusqu’au scrupule, de cette
grande thèse. Malgré son rythme uni
versitaire elle offre tout l’intérêt d’une
histoire galante, véhémente et impé
rieuse.
Jean-Jacques Broussqn
Les Nouvelles Littéraires du 24 Février
60 fr.
Les ÊditiODS DBMAT-MBNTCHRESTIEN
158-160, Rue Saint-Jacques - PARIS-V e
de Fontanin. Ce symbole de la vie qui con
tinue, malgré tous les cataclysmes, au-
dessus de tous les conformismes fami
liaux et sociaux, par le seul miracle de sa
force mystérieuse, donne non seulement à
ce livre mais à l’œuvre entière à laquelle
M. Roger Martin du Gard met aujourd’hui
le point final, un sens profond.
Si l’art souverain est une création de vie
dont le frémissement s'e prolonge dans
l’âme des hommes en ondes multipliées, les
Thibault en sont un magnifique exemple.
L’inspiration, l’homogénéité, la démarche,
le ton, l e style de cette suite de romans,
en font pour nos contemporains, en feront
pour les générations à venir, un authentique
chef-d’œuvre, un modèle dans le genre.
Sans doute l’auteur a voulu, comme tout
vrai romancier, y dégager la forte leçon
de la vie ; pourtant, c’est l’apparente « gra
tuité » de son dessein qui nous enchante.
Son secret, c’est qu’il a employé, sans une
erreur, sans une hésitation, sans commet
tre le moindre hiatus, les moyens mêmes
qu’emploie la vie pour se manifester, pour
s’imposer. Aucune visible intention morali
satrice, aucune de ces transpositions, qui
limitent toujours, tantôt sur le plan trop
étroit de l’intellectualité, tantôt sur le plan
incomplet du sentiment. Seulement le flot,
le flot irrésistible qui s’écoule et nous
entraîne, le flot où tout se modifie et s’or
donne suivant une harmonie qui nous échap
pe, suivant une loi qui nous soumet. Un
dosage savant des éléments physiques, mo
raux, passionnels qui constituent l’éternelle
vérité des hommes, fait des personnages des
Thibault des êtres en qui s’incarne l’éter
nelle vérité de la vie parce qu’à travers
toutes leurs transformations, ils restent
'fidèles à eux-mêmes. Et cet art complet,
qui crée avec la même puissance, la même
perfection que la vie, caractérise le talent
de M. Roger Martin du Gard.
Dans Epilogue reparaissent les pro
tagonistes des précédents volumes, soit
directement, soit par l’évocation de sou
venirs qui les rendent présents. Mais
c’est surtout le récit de la fin douloureuse
du Docteur Antoine Thibault, grand gazé,
qui s’éteint dans un sanatorium de la Côte
d’Azur, quelques jours après l'armistice, ou
qui plutôt abrège ses souffrances au terme
d'une lutte héroïque contre un mal dont il a
noté héroïquement la marche impitoyable.
Tout au long de sa lucide agonie, il a
le temps et le courage de revivre sa vie, de
réviser ses idées fondamentales, d’abandon
ner quelques-uns de ses principes, ceux
qu’il croyait les plus inattaquables, et de
tirer, de cette ultime confrontation, des con
clusions malheureusement trop tardives
pour être fécondes. A la lumière glacée de
la mort qui s’approche, comme l’être se dé
pouille enfin du superflu, du factice, comme
tout reprend son vrai sens, et qui était caché ,
■comme les compagnons les plus proches et
les plus fraternels se font regretter ! Dans le
journal où il note à la fois les réactions de
son âme et les observations cliniques du
mal qui désagrège son corps chaque jour
un peu plus, Antoine essaiera de faire béné
ficier son neveu Jean-Paul de son expé
rience toute neuve d'homme de trente-sept
ans. En même temps que son journal , ses
conversations avec des camarades, officiers
gazés comme lui, ses souvenirs de guerre ou
de paix, les rappels de son enfanc§ ou de
sa maturité, les lettres qu’il écrit ou qu’il
reçoit, composent an tableau absolument
complet de la période chaotique qu’il a tra
versée, de celle qui se prépare et dont il vou
drait atténuer les rigueurs pour l’enfant en
lui forgeant l'âme lucide et dure qui mate
l’événement.
Bien gu'Epilogue soit empreint d’une
âpre tristesse, il ne s’en dégage jamais une
impression de découragement. Au contraire.
La vie qui s’éteint chez le docteur Thibault
ne va-t-elle pas se prolonger mystérieuse
ment dans un autre corps ? L’âme qui se
disperse, ne s’éveille-t-elle pas déjà dans une
autre âme ? Le courant n'est pas interrompu
malgré les terribles ravages de la guerre,
malgré les injustices quelle entraîne inévi
tablement. La mort, qui plane comme un
oiseau de proie et décrit de grands cercles
concentriques avant, de s’abattre sur sa vic
time, ne sera pas la victorieuse. Elle ne fait
que participer au cycle de la vie, l’éclairer,
l’enrichir, lui donner son vrai sens.
L’opportunité d’un tel livre, précisément
dans la nouvelle épreuve que nous traver
sons, n’apparaîtra peut-être pas immédiate
ment à certains. Il s’inscrit si brutalement
contre la nécessité, qui nous est chaque
jour démontrée, que quelques-uns s’ef
fareront de sa publication. Pour les esprits
libres, quel réconfort de constater qu’en
France le génie s’impose toujours et qu’il ne
connaît d’autre opportunité que celle de la
vérité qu’il apporte aux hommes.
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LE SENS DE LA POESIE MODERNE
DE BAUDELAIRE AU SURREALISME
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Résumé de la Table : GRAND PRIX DE LA CRITIQUE
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le classique du symbolisme - P. Claudel, chantre, du monde total - La poésie des hommes
de bonne volonté - Origines de la poésie nouvelle - Apollinaire - Vers une poésie de
l’action et de la vie modernes - Les jeux de l'esprit libre - Dada - Le surréalisme - Les
poètes du surréalisme - En marge du Surréalisme - Epilogue,
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Les derniers temps
d’après l’Apocalypse
paf le Comte J. du Plessis
Des divers ouvrages du comte du Plessis,
c’est celui qu’il a consacré à son fils Jean, le
héros du Dixmude, qui est devenu le plus
populaire par son sujet même, mais les autres,
d’un caractère très différent, ont connu, eux
aussi, un réel succès, malgré le public plus
lettré auquel ils s’adressaient.
Quand il publia, en 1922, la Caravane hu
maine, l’auteur nous confia que cet ouvrage
était celui de toute sa vie. Ce livre ouvrait
une série qui a pour titre général Le Sens de
l’histoire, dont le troisième volume paraît au
jourd’hui.
L’histoire humaine a-t-elle donc un sens ?
La loi de contradiction à laquelle elle sem
ble obéir peut faire douter de ses progrès.
Pourtant, à qui l’étudie de près, elle révèle
la voie qu’elle suit, souvent en tâtonnant et
avec beaucoup d’apparents retours en arrière,
mais ce n’est pas parce que nous sommes en
plein recul qu’il faut nier la marche ascen
dante.
Le comte du Plessis est un historien qui a
accumulé d’impressionnants matériaux et que
l’histoire a conduit à l’exégèse. Dans le tome
II, il étudiait les derniers temps d’après les
prophéties évangéliques. Aujourd’hui, c’est
l’Apocalypse qu’il interroge. Sans doute, com
me il nous en prévient, il ne s’agit pas de
scruter les détails de l’avenir ni de rechercher
dans combien de temps aura lieu la fin du
monde, mais le passé projette de la lumière
sur la route future et nous pouvons embrasser
les ensembles, saisir le sens, les lois, l’accélé
ration de la marche, le terme du chemin.
Pour le comte du Plessis, l’Apocalypse, lon
guement étudiée, comporte une explication
simple. A côté des interprétations théologi
ques et mystiques, l’interprétation historique
est également légitime. La théorie des « sept
âges » est une des plus anciennes. Elle consi
dère en chacune des sept Eglises d’Asie évo
quées par saint Jean, l’Eglise universelle dans
une des périodes de son histoire. On voit alors
se dérouler « le grand film du Christ-Roi ».
Il est bien curieux, bien émouvant, de consta
ter que les jalons de l’histoire et ceux de la
prophétie s’alignent constamment. Les conclu
sions rejoignent donc celles que l’auteur dé
veloppait déjà dans La Caravane humaine, à la
seule lumière des événements historiques : que
l’humanité doive cheminer longtemps encore
sur sa route, ou qu’elle s’approche de son but,
l’auteur envisage l’une et l’autre hypothèse
avec la même sérénité. « Ce qui importe, c’est
de ne désespérer de rien. » Nous savons
que, malgré le déchaînement de Satan qui
durera jusqu’à la fin du monde, l’humanité
doit entrer dans l’Accalmie du septième et
dernier âge. Aux jours sombres de l’histoire,
il n’est guère de perspective plus consolante.
— (.Editions Téqui).
Jeanne Ancelet-Hustache.
%%
La petite chronique
d’Anna Magdalena Bach
Traduction de M. et E. Buchet
j Comme son titre l’indique, c’est un tout pe-
! tit livre. Un livre sans apparente importance,
j toujours sincère, presque naïf, sobre comme la
| grande vie qui l’inspira : la vie de J.-S. Bach
| lue à travers le cœur transparent de sa femme.
Qui était-elle, cette Anna Magdalena qu’il
épousa en secondes noces ? Une petite fille en
core et très bourgeoise, plus compréhensive de
sa musique et de lui-même que vraiment intel
ligente. D’aill e urs, elle nous confie peu de cho
ses d’elle-même : rien qu’un secret, le plus
grand et le plus profond, l’amour sans limites
qui voua sa vie à celle de son mari et en fit
un reflet. Dur souvent, violent quelquefois, et
sans doute égoïste comme peut l’être l’artiste
— on peut dire ici le génie — Bach, tout bon
père de famille qu’il fût, devait bien représen
ter, dans le bon et le mauvais sens du mot, cette
« solide forteresse » dont sa femme nous parle
avec une reconnaissante tendresse. Elle rappelle
soigneusement les années de jeunesse et le dé
but de Jean-Sébastien, son premier mariage,
puis le sien. « Alors ma vie commença », dit-
elle. Puis, avec un juste orgueil, sans laisser
de côté les petites difficultés de tous les jours
et les chagrins plus grands, elle retrace la car
rière du « cantor » depuis l’éclosion du Clave
cin bien tempéré jusqu’à celle des cantates,
des fugues et des passions : c’est le récit d’une
belle vie et l’expression d’un très grand amour.
— (Corréa.)
Yette Jeandet.
Fièvre des Polders
par Henri Calet
On lit Fièvre des Polders comme on écou
terait, la nuit dans une chambre d’hôtel, un
voisin inconnu qui délire : avec une curio
sité anxieuse qui vous rend déjà son com
plice. Emporté par un violent élan dans La
Belle Lurette, d’une brutalité un peu mala
droite dans Le Mérinos, M. Calet a trouvé,
en quittant Paris pour les plaines de Flan
dre, un climat où son emportement, sa déso
bligeante franchise peuvent se donner libre
cours sans paraître forcés.
La famille Ward vit à Burrth, village de»
Polders, village maudit comme si la mer ja
louse des terres que l’acharnement des hom
mes lui a dérobées se vengeait sournoisement.
Le père, marchand de bière, qui titube dans
son rêve de grandeur, la mère qui devine,
impuissante, la ruine et la honte, Odilia, hys
térique et douce, Sibélius, dont nous ne sa
vons rien, sinon son amour coupable pour sa
sœur se débattent dans l’atmosphère trouble
d’un estaminet fréquenté par des marins et
des filles, secoué de rixes, gluant de sales
plaisirs. Plus lucide, la grand’mère, gardien
ne gloutonne des superstitions, guérisseuse
sans tendresse qui insulte les morts dont elle
fait la dernière toilette, dénonce les péchés
des siens et prophétise le châtiment. Et la
kermesse permet à tous de vider « cette es
pèce de poche nauséabonde qu’on porte en
soi, si lourde, où s’entassent, jour après jour,
les rancœurs, la peine, la haine ». Tout le
village est entraîné dans une ronde lubrique,
qui hâte la déchéance de la famille de Ward.
Le cheval Jules, dont Ward était si fier, est
écrasé, Nette meurt, la grand’mère s’enfuit,
entraînant la plus jeune fille, après avoir
surpris Odilia et Sibélius. Ward s’embarque
comme domestique, et Odilia reste « bonne
à tout faire * dans l’estaminet que le concur
rent détesté de Ward transforme en cabaret
borgne...
Ce n’est guère que chez les romanciers
américains, Faulkner et Steinbeck, qu’on
trouve ce désespoir morne et destructeur,
cette rage que des êtres primitifs, mais aux
instincts pervertis, apportent à se déchirer
eux-mêmes. Une poésie désolée éclaire çà et
là le récit, comme ces chatoyantes flaques
d’huile qui rendent encore plus noire l’eau
des canaux, la boue des chemins. (.Gallimard.)
Jeanine Delpech.
ET LES HOMME
Explication de la guerre
Voici une explication de la guerre, ou
mieux, un essai de synthèse des événements
contemporains. Depuis 1914, le monde vit
une tragédie effrayante, mais, pauvres ac
teurs que nous sommes, nous la jouons un
peu à la manière des Italiens d’autrefois
dans la Commedia dell’Arte, inventant les
répliques au fur et à mesure des besoins et
les entremêlant de coups. Au moins les ac
teurs italiens s’appuyaient sur quelques
données précises, mais quand on leur parle
d’un thème général, nos grands hommes
hésitent, tergiversent, ânonnent. Georges
Valois, lui, précise : « La lutte est engagée
pour l’aménagement général de la planète,
entre le totalitarisme ou capitalisme d’Etat
d’une part, le capitaine des trusts, d’autre
part, et la démocratie encore d’autre part,
cette dernière n’ayant pas encore de pouvoir
économique. »
Je demande qu’on retienne cette définition
bien qu’elle paraisse distinguer trois adver
saires, d’autant qu’en réalité on n’en retrouve
que deux, « le capitalisme des trusts » et
« la démocratie » combattant dans le même
camp. C’est ce que les totalitaires soulignent
en parlant, pour Londres et Paris , ces puis
sances unies, de démoploutocraties. On peut
ajouter — le livre n’insiste pas là-dessus —
que dans ce camp se trouvent les principales
forces spirituelles du monde, et notamment
les forces chrétiennes.
Mais allons plus loin. Au cours de son
exposé historique, Georges Valois, qui fait
naturellement partir le grand ébranlement
d’août 1914, mais pour qui la révolution
russe est la révolution totalitaire par excel
lence, souligne que si, dans un premier
temps, peu après 1933 , c’est-à-dire peu après
la révolution allemande, un axe Rome-Ber
lin s’est constitué, cet axe s’est pratique
ment rompu en août-septembre 1939, au pro
fit d’un axe Berlin-Moscou :
« Toute l’histoire d’Europe tourne, de
puis 1917, écrit Georges Valois, autour des
journées d’octobre qui ont donné naissance
au totalitarisme, au vrai, à l’authentique to
talitarisme. Contre lui, l’Allemagne, l’Italie,
l’Espagne ont fait des révolutions : mais
c’éait pour lui ressembler en le contrefai
sant. Au bout de vingt deux ans et dans des
conditions prodigieusement dramatiques,
c’est l’authentique totalitarisme qui oblige
ses adversaires, d’hier, ses contrefacteurs,
à se plier à sa loi, à devenir semblables à
lui. »
Pour Georges Valois, nous sommes donc
en présence d’une révolution allemande soi-
disant anti-bolcheviste, qui n’a pas pu se
maintenir sur ce terrain (justement, selon
nous, parce qu’elle s’est affirmée anti-chré
tienne en son principe) et qui, à la faveur
de la guerre, s’est bolchevisée, ce qui — et
il nous semble voir dans ce propos, pour
l’instant, une exagération manifeste, — fe
rait de Hitler un simple instrument de Sta
line.
Quoi qu’il en soit de tout cela, on trou
vera dans le petit livre de Georges Valois
une somme énorme d’idées, de raisonnements,
d’hypothèses ; je ne puis ici les discuter tou
tes ; je signale simplement au passage l’acte
de foi terminal dans la puissance de Pro-
méthêe, du génie humain capable de tirer
« des sources inépuisables de la nature, des
centaines de millions d’esclaves infatigables
pour le service de tous les hommes ». Va
lois ajoute que l’homme maître de toute
la planète est « enfin en possession des
moyens de mettre fin à la guerre ». C’est
lui faire beaucoup de confiance■ A la vérité,
on a connu, au sein de communautés qui
réunissaient des hommes de même langue
et de même culture, et qui dans Tensemble
étaient florissantes, trop de guerres civiles
et sociales pour croire à la disparition de
cette colère collective, de cette explosion
passionnelle qu’est la guerre.
Pierre DOMINIQUE.
* Prométhée vainqueur, par Georges
Valois. (Ed. Liberté.)
VIENT DE PARAITRE
GEORGES VALOIS
PROMÉTHÉE
VAINQUEUR
ou
EXPLICATION
DE LA GUERRE
La guerre expliquée par le
technicien qui en avait prévu
les formes.
Un vol. 15 fr. EDITIONS LIBERTE
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Rappel : Du même auteur
Guerre ou Blocus Economique, 20 fr.
CK QCiK XK F AV OR A PKVS RECOIUMBXCER
BERTRAND DE! JOCVENEL
D’UNE GUERRE A L’AUTRE
I. • DE VERSAILLES A LOCARNO
Toutes les difficultés de l’après-guerre de 1918,
toutes les conséquences des solutions ado ptées alors,
toutes les erreurs à éviter par la suite...
Un volume in-8 de 416 pages, broché : *ê fr.
JANE ALLEN
LES JOIES D’HOLLYWOOD
(Superfilm)
Roman traduit de l’anglais par HELENE CLAIREAU
C’est un roman plein d’observation et de bonne humeur, qui nous
introduit dans les dessous des studios d’Holliwood, parmi les
grandes vedettes de l’écran, et c’est un livre gai.
Un volume in-16, broché : 22 fr.
CALMAXX-LÉVY, Éditcors
L’ESPRIT ül DES Hü LIVRE
ous avons signalé ici même la beauté
et l’importance de VIntroduction à la
Poésie française, de M. Thierry Maul-
nier. S’il a été loué, cet ouvrage a été
aussi fort attaqué. Et attaqué avec
injustice. Les réserves que je formu
lais sont devenues des condamnations.
Il était bien facile de déclarer que toute la
poésie française ne se trouvait ni dans cette ex
plication, ni dans les textes réunis.^ Eh! mon
Dieu, cela crevait les yeux! Mais la réduc on de
l’élément le plus continuel de notre poésie à une
philosophie particulière du monde et de l'intelli
gence — et le rôle de l’intelligence et du savoir
dans cette poésie — et la construction d’un ma
gnifique édifice mental sur des fondements déjà
intellectuels ou mythologiques — et parfois même
déjà littéraires — voilà justement ce qu’il fallait
nous présenter, ce que M. Thierry Maulnier nous
a présenté.
Chose d’autant plus considérable que notre épo
que voulut renier tout passé littéraire, travail
ler, comme l’on dit, dans le neuf, c’est-à-dire dans
l’immédiat. Si bien que l’on a pris l’habitude de
considérer comme nouveautés des choses soi-
disant arrachées toutes vives à la vie et qui sont
des imitations toutes simples d’écrivains à peine
antérieurs. Les sensibilités originales sont rares,
presque aussi rares que les personnalités authen
tiques. Montaigne (je m’excuse de citer Mon
taigne ; il paraît qu’on le fait trop ; un parle
mentaire s’est plaint l’autre jour, à la Chambre,
que la Radio parlait trop de lui et qu’il valait
mieux entraîner nos soldats à la victoire, mais
n’avons-nous pas déjà pour cela nos innombra
bles chanteurs), Montaigne, dis-je, écrivait dé
jà : « Nous ne faisons guère que nous entre
gloser... »
La seule erreur, à mes yeux, de L’Introduction
à la Poésie, de M. Thierry Maulnier, serait
d’avoir introduit François Villon parmi ses écri
vains choisis. Villon est d’une autre veine que
Ronsard, Maurice Scève, Racine, Nerval ou Mal
larmé ; Villon exprime une autre humanité que
Du. Bellay. Garnier, Malherbe ou M. Charles
Maurras. Il serait l’aïeul de cette famille à qui
l’on doit Marceline Desbord es-Vaimoire, Paul Ver
laine, Francis Jamm.es et plusieurs des meilleurs
poètes de la fin du XIX e siècle et d’aujourd’hui :
ceux que Ton pourrait apeler les « poètes du dé
pouillement » : ce qui expliquerait que les prin
cipaux d’entre eux soient catholiques.
C’est dans ce dernier groupe qu’il faut ranger
Mlle Alliette Audra. Francis Jammes, qui a pré
facé, avant sa mort, son avant-dernier ouvrage,
écrit d’elle :
« Aujourd’hui, c’est à moi qu’incombe l’hon
neur de vous révéler Voix dans le Renouveau. Je
n’ai pas l’illusion d’accroître beaucoup la répu
tation d’une jeune fille que j’admire pleinement
et dont j’ose dire que je l’aperçois déjà glorieuse
dans cette lueur d’aube qui se lève sur la Renais
sance que j’annonce. Il en sera d’elle comme de
ceux qui lui ressemblent. Ce n’est ni par le ta
page, ni par le scandale au’ils s’imposent — mais,
comme je l’ai dit, par 1 union des cœurs qui se
groupent, un à un et peu à peu, autour d’un au
tre cœur... »
U semble, en effet, (pie les effluves qui se dé
gagent des vers de Mlle Alliette Audra n’aient
d’autre but que de gagner notre cœur — n’en
tendez pas ce mot au sens où le prennent les
amateurs de romances et les simulateurs de la
sensibilité, mais dans son sens réel, qui repré
sente et donne à concevoir la partie la plus émo
tive, la plus affective de notre âme, car notre
âme a aussi une zone spéculative, indifférente
et presque glacée déjà.
Il s’agit ici de la poésie la plus volontairement
modeste qui se puisse lire ; de celle qui répugne
à tout éclat comme à tout pathétique et qui. n’en
est ainsi que plus troublante; de celle qui en
tend ne fausser aucun sentiment par son expres
sion, mais le veut aussi pur, aussi nu qu’il se
forme en nous et pour qui le langage n’est pas
un artifice, mais le moyen le plus naturel, le plus
strict de traduire la vie intérieure. Or, sa force
vient justement de ce que cette vie intérieure
n’est faite que de poésie, de poésie vécue. Quand
tel ou tel Parnassien (je dis cela sans dédain et
pour désigner un « type » littéraire : on revien
dra sur le Parnasse pour lequel on a été incroya
blement injuste), décrit à grand renfort de mots
orfèvres ou surchargés une coupe ciselée de la
Renaissance ou un trophée de kriss malais et de
vafolards, il pouvait très bien, pendant ce temps-
là, réfléchir au moyen de renvoyer sa maîtresse
sans en avoir trop d’ennuis ou se débarrasser
d’une cuisinière onéreuse. Mais qui parle du
souvenir, de l’espérance, de la douleur, de la na
ture, de la pitié et de la mort avec des mots sim
ples, lavés comme les cailloux des torrents, ne
saurait nous tromper sur soi-même, ni sur nous,
et cela fait le mérite de son chant.
Ce chant correspond exactement à ce que dit
du lyrisme Hugo de Hofmannsthal : « Nos sen
timents. nos ébauches de sentiments, tous les
états les plus secrets et les plus profonds de notre
être intime ne sont-ils pas de la plus étrange
façon enlacés à un paysage, à une saison, à une
propriété de l’air, à un souffle? Un certain mou
vement que tu fais en sautant d’une voiture, une
nuit lourde et sans étoiles, l’odeur des pierres
humides dans un vestibule, la sensation glaciale
de l’eau d’une fontaine coulant sur les doigts :
à quelques milliers de choses terrestres de cette
nature toutes tes possessions spirituelles sont
reliées, tons tes élans, toutes tes aspirations, tou
tes tes ivresses. Plus que reliées : les racines mê
mes de leur vie ont grandi, solidement implan
tées, de sorte que si tu les coupais de ce fond,
elles se dessécheraient et se réduiraient à rien
entre tes mains. »
Un cimetière dans le Valais ou dans le canton
de Vaud, un paysage anglais ou italien, une
prière, un calvaire, la vue d’un visage, un sou
venir d’enfance, les malheurs dont on 11e se con
sole jamais — et ces gestes d’embaumeuse avec
lesquels, on ensevelit le passé dans les aromates
— et l’inutilité de sauver une hirondelle blessée
— et la leçon d’un coquillage — et tous les rêves
— et l’éternelle aspiration de l’âme, blessée aussi,
à la paix surnaturelle, à la sagesse et à Dieu —
et le silence — et le vent, voilà les thèmes de
Voix dans le Renouveau et de l)u. côté de la neige.
Ecoutez l’une de ces pièces, le Nom ; elle me
semble particulièrement pénétrante :
Donne-lui le nom d’un bel arbre
vu dans la forêt de tes songes,
ou bien celui d'un dieu de marbre
Au seuil du temple où la nuit plonge.
VOIX DANS LE RENOUVEAU
avec préface de Francis Jammes
DU COTE E)E LA NEIGE
par Alliette Audra (Corréa)
TERRES DE VIGILANCE
par René de Berval (Denoël)
BATTEMENT : IL UNITE
par Thérèse Aubray
(Les Cahiers du Journal des Poètes)
ACCENTS, par Jean Tardieu
(Nouvelle Revue Française)
DONNER A VOIR
par Paul Eluard (N. R. F.)
Donne-lui le nom d’un grand fleuve
Eomportant des bateaux à, voile,
le nom de cette rose neuve,
de ce nuage, ou de l’étoile
que nul encor n’a baptisée.
Donne-lui un nom de lumière,
celui d'une larme irisée
s'échappant hors de ta paupière.
Mais si tu veux un nom robuste,
chaud comme le sang de tes veines,
un nom qui sonne vraiment juste,
donne-lui le nom de ta peine.
Mais comment ne pas citer aussi ce lied admi
rable ?
Ne lui dis pas que je suis morte
non plus que je vais revenir.
Entr’ouvre un petit peu la porte
et raconte des souvenirs
du temps où l’âme é.lail plus forte,
où l’amour savait réunir
ceux c piau loin le devoir emporte.
Ne lui dis rien de l'avemr,
tais-toi sur le présent de sorte
qu'un silence vienne bénir
la douleur que tu lui. apportes.
Ne tâche plus d'intervenir...
Quand tu verras qu’elle supporte
sa peine, trace pour finir
un signe de croix sur lu porte.
Que je devienne un semvenir.
Tel est l’accent mystérieux de ces vers où le
drame n’affleure que sous la forme d’allusion à
des tourments inexprimés ; où l’âme dialogue
avec les voix du monde et en transpose dans
l’ineffable les grondantes menaces ; où chaque
chose apparaît dans son enfance : la fleur com
me un fantôme, l’amitié comme une promesse
béatitique, le silence comme un écho, le sommeil
comme une enfance, la mort comme une vie.
La poésie de M. René de Berval est bien diffé
rente. O. W. de L. Mi Los z, dont M. de Berval a
été l’ami, a dit d'elle qu’elle « unissait la vision
de l’univers à l’introspection ». M. de Berval fait
partie de ce groupe d’écrivains, nés du surréa
lisme, chez qui la métaphysique a pris un carac
tère d’angoisse individuelle ; caractère nette
ment « hamlétique » et qui constituera une des
formes littéraires les plus significatives de notre
temps. Comme Mme Yanette Delétang-Tardif,
M. Roger Lannes, M. Jean Le Louët, M. Jean
Jacquot, M. Fernand Marc, M. Jean Wahl, M.
Maxime Alexandre, M. Bertrand d’Astorg. comme
M. Joë Bousquet et bien d’autres, M. René de
Berval, à travers les synestbésies, les analogies
et les déchirements de l’imagination, cherche à
retrouver l’Etre, à reformer son unité. Mais le
tourbillonnement des mondes l’arrache à lui-
même ; mais le songe l’entraîne dans des méan
dres qui ne lui rendent que plus clair le besoin
de ce qu’ils lui dérobent — à moins que le rêve
ne finisse par se confondre avec le caché — mais
le formidable passé de la création remprisonne;
mais l'inconnu lui laisse entrevoir le filigrane
qui le sortirait du chaotique. Avec, ces élans et
ces défaites, ces envolées et ces crises de cons
cience, M. René de Berval écrit des poèmes
tout crissants d’un bruit de départs dans la nuit,
tout traversés d’images violentes et démesurées,
où l’homme ne perd jamais le sentiment qu’il est
l'Homme et qu’il doit appeler au nom de tous.
Comment ne pas être sensible à la sombre gran
deur de ce début de poëmc :
Ce qui. sort de mon cœur est peut-être la vie
Et peut-être la mort,
Dont les flots charrient des épaves-
Car je n’ai connu de la vie
Qtie son reflet saignant ;
Je n’ai connu de la Terre
Que le brin d’herbe sinistre et froid
Qui garde le seuil des cimetières ;
Je n'ai connu des hommes
Que leur haine lourde et sombre,
Et de Dieu
Que les nuages noirs qui descendent du ciel.
La poésie de Mme Thérèse Aubray a une toute
autre forme d’angoisse. Un lourd tourment sen
suel entrave ces vers implorants et désolés, où
éclate parfois un dur sarcasme. Le mélange que
l’on y trouve des appétences humaines et de leur
évasion par la métaphore est comme résumé
dans ce vers ramassé et comme gnomique :
La pulpe ouverte est cœur autant que fruit.
Une sorte de dialogue s’échange entre le poète
et son ombre, véhément, souvent funèbre, tou
jours tragique. Partout pèse une atmosphère
fatidique qui draine les âmes et les corps. Dans
cette brume, comme tissée d’instincts insatiables,
l'esprit perdu cherche sa route sans espoir. Il
cherche à se délivrer de ce joug par la brutalité,
par la violence d’un geste ou d’un cri. Mais tout
est sourd à sa voix. C’est une confession oppres
sée qui sort de ces pages sans répit ni repos,
haletantes comme au sortir d’un cauchemar —
d’un cauchemar qui serait la vraie vie. Prome
nade est une des rares haltes adoucies dans ce
« battement » anxieux, qui devient pénible à la
longue — quand on sait le lire. Mais plusieurs
parties de ce colloque dramatique où deux volon
tés se combattent et rivalisent du besoin de se
détruire nous touchent pur une secrète horreur
qui ne tolère aucun signe de délivrance. L’ia*
d’entre elles conclut ainsi :
Tout ce qui est senti est gag-né
> En toi, par toi, à tous les pas,
Le vainqueur se soulève et te salue...
Tu restes seule, unique et près de Rien.
La farce continue.
Cette poésie contemporaine, qui pourrait pa
raître monotone à un lecteur superficiel, comme
elle est variée, multiforme, sous son revêtement
uni. derrière sa façade sans affiches ni bario
lages !
M. Jean Tardieu souffre de sentir autour de
lui la matière énorme, hostile, inassimilable, ou
bien il imagine, « à l’écart de la raison », « un
espace en dehors de l’espace ». Cette double han
tise forme l’élément spirituel d’une poésie sac
cadée. cahotée, souvent voisine de la prose et
d’une philosophie abréviative, parfois scandée
par des longues et des brèves, à l’image de la
poésie latine ou allemande : moyen de perception
du rythme peu appréciable d’ailleurs aux oreilles
françaises. Des hallucinations fréquentes permet
tent à l’individu de s’exprimer en profondeur,
comme si l’intérieur de l’être se révélait sous
l’action d’un agent chimique. Mais toujours re
naît l'espoir de regagner cet « espace sans es
pace » où l’esprit vaincrait 1 ’accumulation des
matériaux qui encombrent le champ de la pensée
et la place du corps :
Quelle nuit tout à coup, mais quel espace !
Je reconnus la voix de toujours
Qui pour moi demeure et par moi passe
Et quelle puissance, loin de l'amour !
Je laissais mourir et renaître
Et mourir encor la clarté.
Moi, je creusais mon obscurité
Et j’apprenais à ne plus être.
Cependant on murmurait : « L'ombre
Va l’engloutir ! » Ah ! J’entends le vent
Répondre par les feuilles sans nombre :
« Cet homme a franchi les portes du temps ! »
Mais je préfère peut-être encore aux vers
d’Accent deux poèmes en prose, âprement et du
rement travaillés, et une belle traduction, dans
une langue très musicale, d’un fragment d’Ar-
chipel, de Holderlin. J’aimerais Mire bientôt d’an
tres Grilles et Balcons, d’autres Tintorct dans
la cour de Vlmmeubleè.
J’aurais voulu consacrer un plus long commen
taire à Donner à voir, le choix d’essais, de textes
et de poèmes publié par M. Paul Eluard; mais
nous reviendrons sur ce dernier en parlant de
son florilège de Baudelaaire. Avec des proses
subtiles de M. Paul Eluard, qui semblent en 1
quelque sorte s’étager sur plusieurs paliers, avec-*
quelques chapitres de critique sagace, on trou
vera dans ce livre la réunion de quelques-unes^
des plus belles formules consacrées à la poésij s _
par des poètes et par des philosophes.
Edmond JALOUX, vé*
& l'Académie Française,
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