Titre : Le Bien public : Union bourguignonne ["puis" libéral, anticollectiviste "puis plus de sous-titre"]
Éditeur : [s.n.] (Dijon)
Date d'édition : 1887-05-22
Contributeur : Jobard, Eugène (1828-1902). Directeur de publication
Contributeur : Langeron, Jean-Claude (1809-1898). Directeur de publication
Contributeur : Mercier, Jules (rédacteur au Bien public de Dijon). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327124626
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 22 mai 1887 22 mai 1887
Description : 1887/05/22 (A37,N139). 1887/05/22 (A37,N139).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG21 Collection numérique : BIPFPIG21
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t54500212
Source : Bibliothèque nationale de France, département Fonds du service reproduction, NUM P.V-19
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 11/07/2021
Dimanche 22 Mai 1887
UNION BOURGUIGNONNE
Trente-Septième Année. - N‘ 138
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DIJON
LE
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jusqu’à ti heures.
QUOTIDIEN
HUIT NUMÉROS PAR SEMAINE
RÉDACTEUR EN CHEE
LANGERON
Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus.
Mbera
2"
Table rase
On attribue à M. Grévy ces paroles solen
nelles : Table rase, hommes nouveaux.
Parmi les hommes nouveaux que M. Grévy
entend charger de former un cabinet, brille
M. de Freycinet, déjà ministre cinq ou six
fois. Impossible de prendre la souris blanche
pour quelque chose de nouveau.
Bref, mercredi, M. de Freycinet s’est rendu,
à trois heures, à l’Elysée, et a eu un long
entretien avec le président de la République
qui a fait appel à son concours pour former
le nouveau cabinet.
M. Grévy a fait observer à M. de Freycinet
que le conflit budgétaire qui vient de se termi
ner devant la Chambre par la chute du cabinet
Goblet, n’apportait aucun obstacle à la poli
tique de concentration républicaine qui a été
appliquée depuis quelque temps, et il lui a
demandé, en conséquence, de constituer un
ministère, en partant de cet ordre d’idées.
La concentration, voilà encore du neuf 1
M. de Freycinet a répondu qu’avant de
prendre une détermination, il était nécessaire,
vu les difficultés de la situation, qu’il conférât
avec un certain nombre d’hommes politiques.
Il a promis à M. le président de la République
de le revoir demain ou samedi matin au plus
tard.
En quittant l’Elysée, M. de Freycinet s’est
rendu chez M. Floquet, à qui il a fait part de
la mission dont il était chargé. Il s’est assez
longuement entretenu avec le président de la
Chambre,de la situation parlementaire.
D’après ce que l’on disait, l’intention de
M. de Freycinet serait de conserver dans le
nouveau cabinet un certain nombre de colla
borateurs de M. Goblet, et notamment le gé
néral Boulanger.
On sait qu’antérieurement à sa visite à M.
Grévy, M. de Freycinet avait eu plusieurs en-
trevues avec divers membres de l’Union des
gauches, auxquels il avait demandé leur con
cours éventuel. Il paraît toutefois résulter
aujourd’hui des impressions recueillies que
l’accord ne semble pas devoir s’établir facile
ment entre M. de Freycinet et le groupe
républicain de la Chambre, si le nouveau chef
du ministère avait réellement les intentions
qu’on lui prête pour la formation du cabinet.
Dès mercredi soir, M. de Freycinet a com
mencé officiellement les négociations pour la
constitution du ministère.
Il a vu plusieurs membres des deux Cham
bres, notamment M. Clémenceau. Celui-ci lui
a déclaré que, dans les circonstances actuelles,
il aurait le regret de ne pouvoir lui donner
son concours.
Conduis ta barque avec prudence.
On semble croire généralement que M. Clé-
menceau fera échouer les diverses combinai
sons reposant sur une trêve des groupes
républicains ; il désirerait la constitution d’un
ministère homogène, mais opportuniste, qui
ramènerait immédiatement sous son drapeau |
les soldats de l’extrême gauche qui ont cessé
de le reconnaître pour chef, et dont 65, sur
les 95 membres du groupe radical, ont passé
mardi dernier dans le camp ministériel. On
peut également supposer qu’il entre dans le
plan de M. Clémenceau d’acculer le président
de la République à une dissolution de la
Chambre, lorsqu’il aurait ainsi repris la di
rection des forces radicales et aurait réussi à
les discipliner pour la lutte contre un gouver
nement opportuniste.
Tels sont, du moins, les projets que les ré
publicains, même radicaux, prêtent à M. Clé
menceau ; on reconnaîtra qu’ils n’ont rien
d’absolument invraisemblable. Dans tous les
cas, M. Ferry semble prendre tous ces bruits
au sérieux, car il soutient, et ses amis le sou
tiennent comme lui, que si M. Clémenceau
fait échouer les diverses combinaisons minis
térielles considérées actuellement comme pos
sibles, ou réussit à renverser le nouveau cabi
net peu de temps après sa naissance, M. Grévy
devra, avant de faire appel aux chefs du parti
opportuniste, charger M. Clémenceau de cons
tituer un ministère.
On lit, d’autre part, dans le Rappel :
« Pressentant depuis deux jours qu’il serait
chargé de constituer le nouveau ministère,
M. de Freycinet avait commencé à conférer
officieusement avec divers membres du Par
lement, notamment avec les chefs de l’Union
des gauches de la Chambre, pour se rensei
gner sur les conditions auxquelles les repré
sentants de ce groupe lui accorderaient leur
concours.
» Il semble résulter, de la manière dont M.
de Freycinet entend former son cabinet, qu’il
ne pourra s’entendre avec les membres de
l’Union des gauches, auxquels il se proposait
d’attribuer des portefeuilles, M. de Freycinet,
en effet, semblant résolu à ne pas admettre
certaine condition préjudicielle que les mem
bres en question avaient mise à leur collabo
ration, et qu’ils avaient fait connaître égale
ment à M. Grévy. »
Tous ces hommes nouveaux sont bien usés.
C’est de la vaisselle plate qui n’a déjà que
trop servi. L.
NOUVELLES
Paris, 21 mai.
La solution de la crise ministérielle n’a pas
fait un pas depuis hier. Voici la note qui a été
communiquée aux journaux de Paris par l’A
gence Havas, vendredi soir :
« M. de Freycinet s’est rendu à l’Elysée à |
4 heures. |
Il a fait connaître à M. le président de la Répu- i
blique qu’après examen de la situation, il ne i
croyait pas pouvoir former un cabinet ayant des |
chances suffisantes de durée; que, dès lors, il se |
voyait dans l’obligation de décliner le mandat |
que M. le président de la République avait bien |
voulu lui proposer. »
Vendredi soir également, au dire de la Répu- ’
blique française. M. le président de la République |
a eu un entretien avec M. Jules Ferry, qui est •
revenu à l’Elysée, à 9 heures du soir, avec M. :
Raynal. !
M. Grévy s’est longuement entretenu de la I
situation avec M. Ferry et M. Raynal.
M. René Goblet a quitté aujourd’hui l’hôtel de
la place Beau vau et ne viendra plus au minis
tère que pour donner les signatures indispen
sables.
Ce matin, M. Goblet a fait ses adieux aux
chefs de service et chefs de bureaux du minis
tère de l’intérieur. Après un échange de paroles
cordiales, le ministre a serré la main à ses colla
borateurs.
Quelques journaux ont annoncé que plusieurs
députés se sont rendus près du ministre de la
guerre pour lui demander d’abandonner son
projet d’essai de mobilisation et d’y substituer
un appel d’une durée de six semaines pour les
hommes dispensés du service d’activité en temps
de paix.
Cette nouvelle est absolument inexacte, aucun
député n’a fait une démarche de ce genre. En ce
qui concerne du reste l’appel des dispensés, qui
ne recevaient jusqu’ici aucune instruction con
trairement aux dispositions de la loi de 1872 sur
le recrutement, cette question avait été mise à
l’étude par le ministre de la guerre, et elle sera
mise en application si le ministre est maintenu à
son poste. ' f
Quant à la contexture d’une note affirmant
qu’un gouvernement étranger se préparait à faire
parvenir à notre gouvernement des observations
sur l’essai de mobilisation projetée, il nous pa
raît superflu d’y insister.
Nous apprenons par une dépêche de Saint-
Louis que l’expédition Rip, dans le Sénégal, a été
brillamment menée et terminée par la colonne
Coronnat. On a obtenu des résultats importants
pour le commerce et la sécurité de la colonie.
La santé des troupes est excellente.
Le colonel Gallieni a signé avec Ahmadou un
traité qui met son territoire sous notre protec
torat.
Un traité d’extradition vient d’être conclu en
tre la France et le Mexique.
Le Messager du Gouvernement publie le juge
ment condamnant à mort les nihilistes Genera-
low, Andrejuschkin, Ossipanow, Schewyrerew
et Uljanow, dont l’exécution a eu lieu hier.
On mande de Berlin au Daily News :
« D’après des informations de la frontière
russe, on s’y inquiète fort de voir la Russie ren
forcer considérablement ses garnisons, princi
palement celles de la ligne autrichienne.
La cavalerie reçoit' des contingents cosa
ques ; une grande activité règne à l’arsenal de
Kiew.
Les dépôts de munitions et de subsistances
militaires sont augmentés en Pologne; leur
stock doit être complété pour le 1* juillet. »
Le correspondant de la Gazette de Cologne à
Berlin déclare que si l’on fait en France l’es
sai de mobilisation projeté, on ne prendra au
cune mesure militaire spéciale en Alsace-Lor
raine.
On télégraphie de Rome, le 21 mai :
La nouvelle de la mobilisation d’un corps d’ar
mée, pendant les grandes manœuvres qui au
ront lieu dans l’Emilie entre la fin d’août et les |
premiers jours de septembre, est dénuée de
tout fondement.
CORRESPONDANCES
Paris, 21 mai.
Le refus de M. de Freycinet de se charger de
la formation du nouveau cabinet met sens des
sous tout notre monde politique, qui comprend
que, si ce refus est maintenu, il n’y a pas de |
combinaison possible. Malheureusement, tout '
indique que M. de Freycinet ne reviendra pas |
sur sa résolution et cela par les deux motifs sui
vants :
M. Clémenceau, aussitôt qu’il a su que l’an
cien président du conseil motivait son refus sur
les conditions rattachées au concours de l’ex
trême-gauche, n’a fait ni une ni deux, il a con
voqué hier soir officieusement dans les bureaux
de la Justice, les membres du groupe dont il est
le chef, et après leur avoir soumis les déclara
tions faites avant-hier par lui à M. de Freycinet,
l a obtenu leur approbation unanime.
Ajoutez que la gauche radicale, dans sa réu
nion d’hier, a formulé un programme identique
à celui de l’extrême-gauche et vous conviendrez
qu’il n’y a guère d’apparence que M. de Freyci
net revienne sur sa résolution.
Que si, par suite des instances du président de
la République et de quelques-uns de ses amis, il
consentait à devenir le chef d'une nouvelle com
binaison destinée à sombrer piteusement, d’ici
à quelques semaines, sous le coup d’un vote de
la droite renforcée par l’un des groupes de la
majorité, tant pis pour ses espérances de recueil
lir la succession présidentielle de M. Jules Grévy.
Il pourra en faire son deuil.
On dit, au Palais-Bourbon, que M. Jules Grévy
a fait une faute en affectant, cette fois encore,
de traiter M. Clémenceau comme une quantité
négligeable, c’est-à-dire en ne le mandant pas à
l’Elysée pour lui demander son avis, comme il
l’a fait pour quelques-uns des députés les plus
influents de la majorité. Ce dédain aurait pro
fondément froissé le chef de l’extrême gauche
et ne contribuerait pas peu, assuraient ses amis,
à le rendre intraitable sur les conditions de son
concours à tout nouveau cabinet qui ne se ral
lierait pas nettement et ouvertement au pro
gramme radical. Comme il est certain que la
gauche radicale, ainsi qu’en témoigne sa réunion
d’hier, a été très froissée d’avoir été oubliée par
le président de la République dans ses consulta
tions de ces jours derniers, l’on comprend aisé
ment les susceptibilités de M. Clémenceau et de
son groupe.
Cette part faite à l’influence du refus de con
cours du chef de l’extrême gauche n’empêche
pas de croire que l’éventualité d’avoir ou de
n’avoir pas pour collègue le général Boulanger,
n’ait également pesé sur la résolution de M. de
Freycinet.
On persiste, en effet, à soutenir que M. Jules
Grévy est opposé à l’entrée du général dans le
nouveau ministère, et l’on se demande si dans
l’impossibilité de passer outre, nonobstant le
cri de l’opinion publique, M. de Freycinet ne
préfère pas résigner le mandat qui lui a été
confié.
A propos de ce prétendu cri de l’opinion pu
blique, M. Rochefort, pour en bien établir l’exis
tence, propose ce matin dans son journal que
tous les électeurs de la Seine appelés à voter de
main pour la nomination d’un député, inscrivent
sur leurs bulletins, à la suite du nom du candi
dat de leur choix, celui du général Boulanger.
Le directeur de l’ Intransigeant ne doute pas
qu’après cette consultation, le portefeuille de la
guerre doive être rendu à son protégé.
Malheureusement, M. Rochefort oublie deux
choses qui tourneront contre sa proposition. La
première, c’est qu’aux termes de la loi, le nom
du général Boulanger sera annulé sur le bulle
tin où il figurera, par ce motif que le général
étant en activité de service, ne saurait être can
didat.
La seconde, c’est qu’en admettant que les bul
letins dont il s’agit puissent être comptés au
profit du général Boulanger, l’expérience ne
prouverait pas l’unanimité de l’opinion publi
que, puisque le département de la Seine est loin
de représenter la France entière.
Il me faut ajouter que V intransigeant est seul
dans cette campagne, et qu’en outre, la plupart
des feuilles socialistes et même radicales affec
tent de considérer comme sans importance le
refus de M. de Freycinet. Tant mieux pour lui
et pour ses parrains, s’il ne se ravise pas, s’é
crient-elles, car il ne durerait pas six semaines,
et puisqu'alors M. Grévy devrait forcément faire
appel au chef de l’extrême gauche pour for
mer un cabinet, autant qu’il l'appelle tout de
suite.
Les radicaux continuent, du reste, à annoncer
que M. Clémenceau ne consentira à composer un
ministère qu'autant qu’il aura un blanc-seing du
président de la République pour la dissolution
de la Chambre, car, ajoutent-ils, à l'aide de ce
blanc-seing, il fera de la majorité tout ce qu'il
voudra.
Au surplus, ce qui enhardit beaucoup, en ce
moment, les radicaux, ce sont les dernières nou
velles reçues de l’Elysée et qui annoncent que
tous les hommes politiques auxquels s’est adressé
M. Jules Grévy, depuis le refus de M. de Freyci
net, n’ont abouti à aucun résultat, et que, de
guerre lasse, le chef de l’Etat a remis à demain
la continuation de ses négociations.
L’on rapporte, d’autre part, que plusieurs sé
nateurs liés personnellement avec M. de Freyci
net, sont allés, cette après-midi, rue de la Fai
sanderie, pour essayer de le faire revenir sur ta
résolution, mais qu’ils se sont heurtés à une vo
lonté inflexible.
Ces démarches seront sans doute continuées,
attendu que l’on sait, par expérience, que la
fixité des résolutions n’est pas précisément la
qualité maîtresse de l’ancien président du Con
seil. Et, cependant, il est difficile de supposer
que M. de Freycinet se prête à un pareil,eu,
puisqu’il doit comprendre que rien que de pa
reilles tentatives diminuent singulièrement son
autorité et son prestige.
Les journaux du soir sont remplis de supposi
tions contradictoires au sujet de la formation du
nouveau Cabinet, les uns et les autres s’atta
chant, avant tout, à faire figurer leurs amis dans
la combinaison.
C’est ainsi que MM. Raynal, Jules Ferry et
Rouvier, sont mis en vedette dans certaines
feuilles, tandis que MM. Granet, Lockroy et
Boulanger le sont dans d’autres. M. Devès vient
par dessus le marché, mais il est de tous les
échos.
La toquade du moment, dans les couloirs du
Palais-Bourbon où les membres de l’Union des
Gauches errent comme des âmes en peine, c’est
de faire non plus un Cabinet de conciliation ré
publicaine, mais purement budgétaire.
Et comme c’est la commission du budget qui
a remporté la victoire dans la dernière bataille
contre le ministère Goblet, M. Rouvier serait un
président du conseil tout désigné et, naturelle
ment, il prendrait pour collaborateurs les mem
bres de la commission qu’il préside actuelle
ment. Dans ces conditions, M. Wilson a une
place toute trouvée, celle de ministre du com-
merce et de l’industrie, et l’on croit pouvoir
compter sur son influence sur son beau-père
pour lui faire accepter la combinaison.
En attendant, on ne compte plus sur un résul
tat avant lundi, jour où la Chambre reprend ses
séances et l’on n’ose plus fixer la date pour l’é
laboration du budget de 1888, qui ne sera pro
bablement pas voté avant l’année prochaine.
Heureusement, il y a toujours la ressource des
douzièmes provisoires.
La Bourse a été faible avec 32 centimes de
baisse sur l’avortement de la combinaison Frey
cinet.
La Caravane Parlementaire
L'Indépendance de l’Est a reçu communi
cation d'une lettre de l’Algérie, dont voici un
extrait :
La caravane parlementaire est venue en Algé
rie; il est à craindre que nos représentants
n’emportent une fausse idée sur notre colonie,
sma=en n sos asxsms=ssnansssssznzunsszsmoanasennaenenannzaeuneasnesuzzzusnszesrsezanrssnen*ErlendneHSEHRBOCKESC*cRzcStsSECeTANYEesTcTEnTNRTnAR R OTOGR —
“BUILLETON
— 11 —
Le Secret du Squelette
PAR GEORGES PRADEL
PREMIÈRE PARTIE
LA FEUILLE D’OR
es hurlements féroces, des cris prolongés
aTivèrent jusqu’à ses oreilles.
8 provenaient d’au-dessus de lui, et lui par-
'paient comme par les soupiraux d’une cave.
afressange, bien que réveillé en sursaut, com-
‘ aussitôt la situation.
i 4 foule, avide de vengeance, s’était acharnée
poursuite. Elle avait d’abord cerné la pre-
misre prison.
6 guis, sans doute, le passage de la voiture avait
; signalé, ainsi que la direction qu’elle avait
ane, et l'on avait couru jusqu’à Corn Castle
^Gait cerné de tous les côtés.
menntenant, Lafressange distinguait parfaite-
1er es cris. Il entendait répéter, avec des hur-
Uts (|g rage •
sWalter Handel!... Walter Handel !... ,
tradu?" ajoutait un autre mot qu’il ne pouvait
le sens 65 mais dont il comprenait parfaitement
sTodeatht..To death! ,
ne ndemment, et il avait raison d’ailleurs, cela
mortus" vouloir dire qu « à mort!... à
forla Sécria-t-ilen tapant du pied, c’est trop
avoir bous" Fens là vont arriver jusqu’ici, après
é poste... ils me mettront en
charpie, ou me pendront !... Croyant faire acte
de souveraine justice en exécutant Walter Han
del, le chef de la grève, c’est certain, celui qui a
fait mettre le feu, qui a fait tout sauter... Et
pendant que l’on va me pendre, ou me hacher,
le vrai Handel se promène les mains dans les
poches, protégé par mon carnet et mes papiers
qu’il a réussi à me faire enlever, s’il n’a pas
opéré lui-même !...
Et il ajouta, en appuyant ses paroles d’une
grimace désespérée :
— Le Courrier et M. Jacquemain n’auront pas
demain de dernière heure, mais pour ce qui est
de moi, dans quelques instants, je pourrais bien
être arrivé à mon heure dernière.
Le cris devenaient plus furieux, plus prolon
gés, plus violents.
La foule grossissait... et se montrait de plus
en plus menaçante.
Elle s’était emparée de la porte de la tour, et
le brigadier, ainsi que son petit nombre d’hom
mes, étaient complètement débordés et es
sayaient inutilement de parlementer avec les en
ragés qui l’assiégeaient.
Ce qui empêchait la foule d’avoir déjà envahi
la tour de Corn-Castle, c’est que le brigadier se
refusait obstinément à indiquer l’endroit où se
trouvait le prisonnier.
Mais au tumulte croissant, aux bruits, aux
soubresauts désordonnés qu’il percevait au-
dessus de sa tête, Lafressange devinait bien que
cette résistance ne serait pas de longue durée et
que cette foule, dans quelques instants, se ré
pandrait dans la tour, envahirait toutes les par
ties et finirait bien par le découvrir.
Son parti était pris.
On ne lui avait pas enlevé son revolver. Il le
déchargerait dans le tas, et se défendrait jus
qu’à la dernière goutte de son sang. C’était tou
jours quelque chose.
Maintenant qu’il était résolu de tailler sa part
de vengeance, sa pensée allait ailleurs.
Elle allait à Flavien, cet ami sûr, pour qui sa
mort serait un profond chagrin.
Et aussi elle allait à Berthe de Kermor, cette
adorable figure qu’il n’avait fait qu’entrevoir, à
cette jeune fille qui s’était intéressée à lui, qui
l’avait prévenu du danger.
Cette pensée, la pensée de cette merveille de
la création, à laquelle involontairement et à pre
mière vue il avait su inspirer un sympathie sin
cère, cette pensée, malgré lui, le raccrochait à
l’existence.
Il se sentait faiblir... Malgré lui, il mollissait,
le désespoir le prenait à la gorge...
Marchant à grands pas dans son cachot :
— Est-ce bête!... répétait-il, est-ce idiot!...
venir ici me faire égorger, me faire hacher pour
un autre !...
Et il se tapait la tête contre les murs, il
donnait de grands coups de pieds contre les
pierres...
Etait-ce une illusion? il lui sembla que l’une
de ces pierres hochait dans sa gaine de ci
ment !...
Oui ! elle remuait, cette pierre ! c’était certain,
elle oscillait même d’une façon sensible.
Laffressange se mit à genoux, il essaya de
pousser cette pierre, qui résista tout en conti
nuant à remuer.
Il fit un effort alors en sens contaire.
Et bien qu’elle ne sortît point de son al
véole, il sentit que le mouvement s’accentuait
encore.
Un fol espoir venait de traverser le cerveau
du pauvre prisonnier. Et à cette suprême espé
rance , il s’accrochait avec une énergie de
noy .
Fouiller dans sa poche, y prendre un couteau,
introduire la lame dans la fissure et, faisant
levier, tirer à lui tandis que l’autre main suivait
le même mouvement, ce fut pour Lafressange
l’affaire d'une seconde.
Dix fois ses ongles s’écaillèrent contre ce coin
de dalle qui présentait si peu de prise...
Dix fois, il fut sur le point d’y renoncer, et
d’attendre la mort qui approchait, car la foule
s’était enfin répandue dans l’intérieur delà tour
pour continuer sa chasse à l’homme.
Enfin, la pierre fit un mouvement en avant.
Oui!... Dieu bon !... Elle sortait de sa gaine !
elle cédait!
En s’y reprenant à plusieurs reprises, Lafres
sange l’attirait à lui!...
Elle finit par sortir tout à fait de son alvéole,
laissant libre un passage souterrain, une sorte de
trou noir dans lequel le prisonnier se faufila
résolument.
Le tout, pour lui, c’était de gagner du temps,
d’échapper à cette foule affolée...
Dès l’entrée, fort heureusement, le trou était
assez vaste... assez, du moins, pour permettre à
Lafressange de se retourner et de garder la
liberté de ses mouvements.
Il en profita pour attirer à lui la pierre et lui
faire reprendre sa première place.
De cette façon, il assurait sa retraite.
D’abord, on mettrait certainement un long
espace de temps avant de découvrir cette pierre
mouvante, dont il n’avait trouvé le secret que
par un hasard providentiel.
En outre, si on touchait à la pierre, il se tenait
là, derrière, pour l’empêcher de bouger, pour la
serrer contre la paroi du roc.
Enfin, il était en sûreté..., voilà ce qu’il com
prenait, voilà ce qui le faisait respirer longue
ment!...
Aussi bien, il était temps qu’il trouvât ce re
fuge...
La porte du cachot venait de s’ouvrir, il l’en
tendait très bien, il s’en rendait parfaitement
compte.
Le brigadier, évidemment, avait été obligé de
céder à la foule, et désignant la place du cachot,
ouvrait la porte, se résignant à livrer son pri
sonnier.
Lafressange entendait les cris de fureur de la
foule... les exclamations du brigadier... les re
cherches minutieuses... et avec une indicible
joie, il pouvait constater que personne ne son
geait à la bienheureuse pierre contre laquelle il
s’areboutait de toutes ses forces.
Cependant, la foule se retirait désappointée...
Le brigadier courait même de grands dangers,
car on avait bien envie de lui faire un mauvais
parti, croyant qu’il avait caché Walter Handel
autre part, ou qu’il avait fait évader le prison
nier.
Bientôt, tout retomba dans le silence... la foule
s’éloignait.
Et Lafressange se tenait tapi dans son trou, en
remerciant la Providence... Mâtin ! ainsi qu il le
murmurait, il l’avait échappe belle !
Mais aussitôt, sans perdre de temps, il songea
à tirer parti de la situation.
Ce couloir secret avait dû servir, sans nul
doute, à l’évasion d’un prisonnier.
Il y avait combien d'années ?... Combien de
siècles de cela ?
Et aussitôt, les évasions fameuses lui reve
naient en mémoire.
Celles qui appartenaient au domaine de la fan
taisie, comme celle d’Edmond Dantès. Celles,
malheureusement historiques, et qui rappelaient
d’épouvantables tortures, telle que celle du ba
ron de Trenk, de Latude, etc.
Le sort d’Edmond Dantès lui souriait davan
tage.
Maintenant que, pour le moment du moins,
il était hors de danger, il reconnaissait que rien
ne manquait au romanesque de son aventure !. .
En aurait-il à raconter à Mlle Berthe!...
(La suite au prochain numéro).
UNION BOURGUIGNONNE
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On attribue à M. Grévy ces paroles solen
nelles : Table rase, hommes nouveaux.
Parmi les hommes nouveaux que M. Grévy
entend charger de former un cabinet, brille
M. de Freycinet, déjà ministre cinq ou six
fois. Impossible de prendre la souris blanche
pour quelque chose de nouveau.
Bref, mercredi, M. de Freycinet s’est rendu,
à trois heures, à l’Elysée, et a eu un long
entretien avec le président de la République
qui a fait appel à son concours pour former
le nouveau cabinet.
M. Grévy a fait observer à M. de Freycinet
que le conflit budgétaire qui vient de se termi
ner devant la Chambre par la chute du cabinet
Goblet, n’apportait aucun obstacle à la poli
tique de concentration républicaine qui a été
appliquée depuis quelque temps, et il lui a
demandé, en conséquence, de constituer un
ministère, en partant de cet ordre d’idées.
La concentration, voilà encore du neuf 1
M. de Freycinet a répondu qu’avant de
prendre une détermination, il était nécessaire,
vu les difficultés de la situation, qu’il conférât
avec un certain nombre d’hommes politiques.
Il a promis à M. le président de la République
de le revoir demain ou samedi matin au plus
tard.
En quittant l’Elysée, M. de Freycinet s’est
rendu chez M. Floquet, à qui il a fait part de
la mission dont il était chargé. Il s’est assez
longuement entretenu avec le président de la
Chambre,de la situation parlementaire.
D’après ce que l’on disait, l’intention de
M. de Freycinet serait de conserver dans le
nouveau cabinet un certain nombre de colla
borateurs de M. Goblet, et notamment le gé
néral Boulanger.
On sait qu’antérieurement à sa visite à M.
Grévy, M. de Freycinet avait eu plusieurs en-
trevues avec divers membres de l’Union des
gauches, auxquels il avait demandé leur con
cours éventuel. Il paraît toutefois résulter
aujourd’hui des impressions recueillies que
l’accord ne semble pas devoir s’établir facile
ment entre M. de Freycinet et le groupe
républicain de la Chambre, si le nouveau chef
du ministère avait réellement les intentions
qu’on lui prête pour la formation du cabinet.
Dès mercredi soir, M. de Freycinet a com
mencé officiellement les négociations pour la
constitution du ministère.
Il a vu plusieurs membres des deux Cham
bres, notamment M. Clémenceau. Celui-ci lui
a déclaré que, dans les circonstances actuelles,
il aurait le regret de ne pouvoir lui donner
son concours.
Conduis ta barque avec prudence.
On semble croire généralement que M. Clé-
menceau fera échouer les diverses combinai
sons reposant sur une trêve des groupes
républicains ; il désirerait la constitution d’un
ministère homogène, mais opportuniste, qui
ramènerait immédiatement sous son drapeau |
les soldats de l’extrême gauche qui ont cessé
de le reconnaître pour chef, et dont 65, sur
les 95 membres du groupe radical, ont passé
mardi dernier dans le camp ministériel. On
peut également supposer qu’il entre dans le
plan de M. Clémenceau d’acculer le président
de la République à une dissolution de la
Chambre, lorsqu’il aurait ainsi repris la di
rection des forces radicales et aurait réussi à
les discipliner pour la lutte contre un gouver
nement opportuniste.
Tels sont, du moins, les projets que les ré
publicains, même radicaux, prêtent à M. Clé
menceau ; on reconnaîtra qu’ils n’ont rien
d’absolument invraisemblable. Dans tous les
cas, M. Ferry semble prendre tous ces bruits
au sérieux, car il soutient, et ses amis le sou
tiennent comme lui, que si M. Clémenceau
fait échouer les diverses combinaisons minis
térielles considérées actuellement comme pos
sibles, ou réussit à renverser le nouveau cabi
net peu de temps après sa naissance, M. Grévy
devra, avant de faire appel aux chefs du parti
opportuniste, charger M. Clémenceau de cons
tituer un ministère.
On lit, d’autre part, dans le Rappel :
« Pressentant depuis deux jours qu’il serait
chargé de constituer le nouveau ministère,
M. de Freycinet avait commencé à conférer
officieusement avec divers membres du Par
lement, notamment avec les chefs de l’Union
des gauches de la Chambre, pour se rensei
gner sur les conditions auxquelles les repré
sentants de ce groupe lui accorderaient leur
concours.
» Il semble résulter, de la manière dont M.
de Freycinet entend former son cabinet, qu’il
ne pourra s’entendre avec les membres de
l’Union des gauches, auxquels il se proposait
d’attribuer des portefeuilles, M. de Freycinet,
en effet, semblant résolu à ne pas admettre
certaine condition préjudicielle que les mem
bres en question avaient mise à leur collabo
ration, et qu’ils avaient fait connaître égale
ment à M. Grévy. »
Tous ces hommes nouveaux sont bien usés.
C’est de la vaisselle plate qui n’a déjà que
trop servi. L.
NOUVELLES
Paris, 21 mai.
La solution de la crise ministérielle n’a pas
fait un pas depuis hier. Voici la note qui a été
communiquée aux journaux de Paris par l’A
gence Havas, vendredi soir :
« M. de Freycinet s’est rendu à l’Elysée à |
4 heures. |
Il a fait connaître à M. le président de la Répu- i
blique qu’après examen de la situation, il ne i
croyait pas pouvoir former un cabinet ayant des |
chances suffisantes de durée; que, dès lors, il se |
voyait dans l’obligation de décliner le mandat |
que M. le président de la République avait bien |
voulu lui proposer. »
Vendredi soir également, au dire de la Répu- ’
blique française. M. le président de la République |
a eu un entretien avec M. Jules Ferry, qui est •
revenu à l’Elysée, à 9 heures du soir, avec M. :
Raynal. !
M. Grévy s’est longuement entretenu de la I
situation avec M. Ferry et M. Raynal.
M. René Goblet a quitté aujourd’hui l’hôtel de
la place Beau vau et ne viendra plus au minis
tère que pour donner les signatures indispen
sables.
Ce matin, M. Goblet a fait ses adieux aux
chefs de service et chefs de bureaux du minis
tère de l’intérieur. Après un échange de paroles
cordiales, le ministre a serré la main à ses colla
borateurs.
Quelques journaux ont annoncé que plusieurs
députés se sont rendus près du ministre de la
guerre pour lui demander d’abandonner son
projet d’essai de mobilisation et d’y substituer
un appel d’une durée de six semaines pour les
hommes dispensés du service d’activité en temps
de paix.
Cette nouvelle est absolument inexacte, aucun
député n’a fait une démarche de ce genre. En ce
qui concerne du reste l’appel des dispensés, qui
ne recevaient jusqu’ici aucune instruction con
trairement aux dispositions de la loi de 1872 sur
le recrutement, cette question avait été mise à
l’étude par le ministre de la guerre, et elle sera
mise en application si le ministre est maintenu à
son poste. ' f
Quant à la contexture d’une note affirmant
qu’un gouvernement étranger se préparait à faire
parvenir à notre gouvernement des observations
sur l’essai de mobilisation projetée, il nous pa
raît superflu d’y insister.
Nous apprenons par une dépêche de Saint-
Louis que l’expédition Rip, dans le Sénégal, a été
brillamment menée et terminée par la colonne
Coronnat. On a obtenu des résultats importants
pour le commerce et la sécurité de la colonie.
La santé des troupes est excellente.
Le colonel Gallieni a signé avec Ahmadou un
traité qui met son territoire sous notre protec
torat.
Un traité d’extradition vient d’être conclu en
tre la France et le Mexique.
Le Messager du Gouvernement publie le juge
ment condamnant à mort les nihilistes Genera-
low, Andrejuschkin, Ossipanow, Schewyrerew
et Uljanow, dont l’exécution a eu lieu hier.
On mande de Berlin au Daily News :
« D’après des informations de la frontière
russe, on s’y inquiète fort de voir la Russie ren
forcer considérablement ses garnisons, princi
palement celles de la ligne autrichienne.
La cavalerie reçoit' des contingents cosa
ques ; une grande activité règne à l’arsenal de
Kiew.
Les dépôts de munitions et de subsistances
militaires sont augmentés en Pologne; leur
stock doit être complété pour le 1* juillet. »
Le correspondant de la Gazette de Cologne à
Berlin déclare que si l’on fait en France l’es
sai de mobilisation projeté, on ne prendra au
cune mesure militaire spéciale en Alsace-Lor
raine.
On télégraphie de Rome, le 21 mai :
La nouvelle de la mobilisation d’un corps d’ar
mée, pendant les grandes manœuvres qui au
ront lieu dans l’Emilie entre la fin d’août et les |
premiers jours de septembre, est dénuée de
tout fondement.
CORRESPONDANCES
Paris, 21 mai.
Le refus de M. de Freycinet de se charger de
la formation du nouveau cabinet met sens des
sous tout notre monde politique, qui comprend
que, si ce refus est maintenu, il n’y a pas de |
combinaison possible. Malheureusement, tout '
indique que M. de Freycinet ne reviendra pas |
sur sa résolution et cela par les deux motifs sui
vants :
M. Clémenceau, aussitôt qu’il a su que l’an
cien président du conseil motivait son refus sur
les conditions rattachées au concours de l’ex
trême-gauche, n’a fait ni une ni deux, il a con
voqué hier soir officieusement dans les bureaux
de la Justice, les membres du groupe dont il est
le chef, et après leur avoir soumis les déclara
tions faites avant-hier par lui à M. de Freycinet,
l a obtenu leur approbation unanime.
Ajoutez que la gauche radicale, dans sa réu
nion d’hier, a formulé un programme identique
à celui de l’extrême-gauche et vous conviendrez
qu’il n’y a guère d’apparence que M. de Freyci
net revienne sur sa résolution.
Que si, par suite des instances du président de
la République et de quelques-uns de ses amis, il
consentait à devenir le chef d'une nouvelle com
binaison destinée à sombrer piteusement, d’ici
à quelques semaines, sous le coup d’un vote de
la droite renforcée par l’un des groupes de la
majorité, tant pis pour ses espérances de recueil
lir la succession présidentielle de M. Jules Grévy.
Il pourra en faire son deuil.
On dit, au Palais-Bourbon, que M. Jules Grévy
a fait une faute en affectant, cette fois encore,
de traiter M. Clémenceau comme une quantité
négligeable, c’est-à-dire en ne le mandant pas à
l’Elysée pour lui demander son avis, comme il
l’a fait pour quelques-uns des députés les plus
influents de la majorité. Ce dédain aurait pro
fondément froissé le chef de l’extrême gauche
et ne contribuerait pas peu, assuraient ses amis,
à le rendre intraitable sur les conditions de son
concours à tout nouveau cabinet qui ne se ral
lierait pas nettement et ouvertement au pro
gramme radical. Comme il est certain que la
gauche radicale, ainsi qu’en témoigne sa réunion
d’hier, a été très froissée d’avoir été oubliée par
le président de la République dans ses consulta
tions de ces jours derniers, l’on comprend aisé
ment les susceptibilités de M. Clémenceau et de
son groupe.
Cette part faite à l’influence du refus de con
cours du chef de l’extrême gauche n’empêche
pas de croire que l’éventualité d’avoir ou de
n’avoir pas pour collègue le général Boulanger,
n’ait également pesé sur la résolution de M. de
Freycinet.
On persiste, en effet, à soutenir que M. Jules
Grévy est opposé à l’entrée du général dans le
nouveau ministère, et l’on se demande si dans
l’impossibilité de passer outre, nonobstant le
cri de l’opinion publique, M. de Freycinet ne
préfère pas résigner le mandat qui lui a été
confié.
A propos de ce prétendu cri de l’opinion pu
blique, M. Rochefort, pour en bien établir l’exis
tence, propose ce matin dans son journal que
tous les électeurs de la Seine appelés à voter de
main pour la nomination d’un député, inscrivent
sur leurs bulletins, à la suite du nom du candi
dat de leur choix, celui du général Boulanger.
Le directeur de l’ Intransigeant ne doute pas
qu’après cette consultation, le portefeuille de la
guerre doive être rendu à son protégé.
Malheureusement, M. Rochefort oublie deux
choses qui tourneront contre sa proposition. La
première, c’est qu’aux termes de la loi, le nom
du général Boulanger sera annulé sur le bulle
tin où il figurera, par ce motif que le général
étant en activité de service, ne saurait être can
didat.
La seconde, c’est qu’en admettant que les bul
letins dont il s’agit puissent être comptés au
profit du général Boulanger, l’expérience ne
prouverait pas l’unanimité de l’opinion publi
que, puisque le département de la Seine est loin
de représenter la France entière.
Il me faut ajouter que V intransigeant est seul
dans cette campagne, et qu’en outre, la plupart
des feuilles socialistes et même radicales affec
tent de considérer comme sans importance le
refus de M. de Freycinet. Tant mieux pour lui
et pour ses parrains, s’il ne se ravise pas, s’é
crient-elles, car il ne durerait pas six semaines,
et puisqu'alors M. Grévy devrait forcément faire
appel au chef de l’extrême gauche pour for
mer un cabinet, autant qu’il l'appelle tout de
suite.
Les radicaux continuent, du reste, à annoncer
que M. Clémenceau ne consentira à composer un
ministère qu'autant qu’il aura un blanc-seing du
président de la République pour la dissolution
de la Chambre, car, ajoutent-ils, à l'aide de ce
blanc-seing, il fera de la majorité tout ce qu'il
voudra.
Au surplus, ce qui enhardit beaucoup, en ce
moment, les radicaux, ce sont les dernières nou
velles reçues de l’Elysée et qui annoncent que
tous les hommes politiques auxquels s’est adressé
M. Jules Grévy, depuis le refus de M. de Freyci
net, n’ont abouti à aucun résultat, et que, de
guerre lasse, le chef de l’Etat a remis à demain
la continuation de ses négociations.
L’on rapporte, d’autre part, que plusieurs sé
nateurs liés personnellement avec M. de Freyci
net, sont allés, cette après-midi, rue de la Fai
sanderie, pour essayer de le faire revenir sur ta
résolution, mais qu’ils se sont heurtés à une vo
lonté inflexible.
Ces démarches seront sans doute continuées,
attendu que l’on sait, par expérience, que la
fixité des résolutions n’est pas précisément la
qualité maîtresse de l’ancien président du Con
seil. Et, cependant, il est difficile de supposer
que M. de Freycinet se prête à un pareil,eu,
puisqu’il doit comprendre que rien que de pa
reilles tentatives diminuent singulièrement son
autorité et son prestige.
Les journaux du soir sont remplis de supposi
tions contradictoires au sujet de la formation du
nouveau Cabinet, les uns et les autres s’atta
chant, avant tout, à faire figurer leurs amis dans
la combinaison.
C’est ainsi que MM. Raynal, Jules Ferry et
Rouvier, sont mis en vedette dans certaines
feuilles, tandis que MM. Granet, Lockroy et
Boulanger le sont dans d’autres. M. Devès vient
par dessus le marché, mais il est de tous les
échos.
La toquade du moment, dans les couloirs du
Palais-Bourbon où les membres de l’Union des
Gauches errent comme des âmes en peine, c’est
de faire non plus un Cabinet de conciliation ré
publicaine, mais purement budgétaire.
Et comme c’est la commission du budget qui
a remporté la victoire dans la dernière bataille
contre le ministère Goblet, M. Rouvier serait un
président du conseil tout désigné et, naturelle
ment, il prendrait pour collaborateurs les mem
bres de la commission qu’il préside actuelle
ment. Dans ces conditions, M. Wilson a une
place toute trouvée, celle de ministre du com-
merce et de l’industrie, et l’on croit pouvoir
compter sur son influence sur son beau-père
pour lui faire accepter la combinaison.
En attendant, on ne compte plus sur un résul
tat avant lundi, jour où la Chambre reprend ses
séances et l’on n’ose plus fixer la date pour l’é
laboration du budget de 1888, qui ne sera pro
bablement pas voté avant l’année prochaine.
Heureusement, il y a toujours la ressource des
douzièmes provisoires.
La Bourse a été faible avec 32 centimes de
baisse sur l’avortement de la combinaison Frey
cinet.
La Caravane Parlementaire
L'Indépendance de l’Est a reçu communi
cation d'une lettre de l’Algérie, dont voici un
extrait :
La caravane parlementaire est venue en Algé
rie; il est à craindre que nos représentants
n’emportent une fausse idée sur notre colonie,
sma=en n sos asxsms=ssnansssssznzunsszsmoanasennaenenannzaeuneasnesuzzzusnszesrsezanrssnen*ErlendneHSEHRBOCKESC*cRzcStsSECeTANYEesTcTEnTNRTnAR R OTOGR —
“BUILLETON
— 11 —
Le Secret du Squelette
PAR GEORGES PRADEL
PREMIÈRE PARTIE
LA FEUILLE D’OR
es hurlements féroces, des cris prolongés
aTivèrent jusqu’à ses oreilles.
8 provenaient d’au-dessus de lui, et lui par-
'paient comme par les soupiraux d’une cave.
afressange, bien que réveillé en sursaut, com-
‘ aussitôt la situation.
i 4 foule, avide de vengeance, s’était acharnée
poursuite. Elle avait d’abord cerné la pre-
misre prison.
6 guis, sans doute, le passage de la voiture avait
; signalé, ainsi que la direction qu’elle avait
ane, et l'on avait couru jusqu’à Corn Castle
^Gait cerné de tous les côtés.
menntenant, Lafressange distinguait parfaite-
1er es cris. Il entendait répéter, avec des hur-
Uts (|g rage •
sWalter Handel!... Walter Handel !... ,
tradu?" ajoutait un autre mot qu’il ne pouvait
le sens 65 mais dont il comprenait parfaitement
sTodeatht..To death! ,
ne ndemment, et il avait raison d’ailleurs, cela
mortus" vouloir dire qu « à mort!... à
forla Sécria-t-ilen tapant du pied, c’est trop
avoir bous" Fens là vont arriver jusqu’ici, après
é poste... ils me mettront en
charpie, ou me pendront !... Croyant faire acte
de souveraine justice en exécutant Walter Han
del, le chef de la grève, c’est certain, celui qui a
fait mettre le feu, qui a fait tout sauter... Et
pendant que l’on va me pendre, ou me hacher,
le vrai Handel se promène les mains dans les
poches, protégé par mon carnet et mes papiers
qu’il a réussi à me faire enlever, s’il n’a pas
opéré lui-même !...
Et il ajouta, en appuyant ses paroles d’une
grimace désespérée :
— Le Courrier et M. Jacquemain n’auront pas
demain de dernière heure, mais pour ce qui est
de moi, dans quelques instants, je pourrais bien
être arrivé à mon heure dernière.
Le cris devenaient plus furieux, plus prolon
gés, plus violents.
La foule grossissait... et se montrait de plus
en plus menaçante.
Elle s’était emparée de la porte de la tour, et
le brigadier, ainsi que son petit nombre d’hom
mes, étaient complètement débordés et es
sayaient inutilement de parlementer avec les en
ragés qui l’assiégeaient.
Ce qui empêchait la foule d’avoir déjà envahi
la tour de Corn-Castle, c’est que le brigadier se
refusait obstinément à indiquer l’endroit où se
trouvait le prisonnier.
Mais au tumulte croissant, aux bruits, aux
soubresauts désordonnés qu’il percevait au-
dessus de sa tête, Lafressange devinait bien que
cette résistance ne serait pas de longue durée et
que cette foule, dans quelques instants, se ré
pandrait dans la tour, envahirait toutes les par
ties et finirait bien par le découvrir.
Son parti était pris.
On ne lui avait pas enlevé son revolver. Il le
déchargerait dans le tas, et se défendrait jus
qu’à la dernière goutte de son sang. C’était tou
jours quelque chose.
Maintenant qu’il était résolu de tailler sa part
de vengeance, sa pensée allait ailleurs.
Elle allait à Flavien, cet ami sûr, pour qui sa
mort serait un profond chagrin.
Et aussi elle allait à Berthe de Kermor, cette
adorable figure qu’il n’avait fait qu’entrevoir, à
cette jeune fille qui s’était intéressée à lui, qui
l’avait prévenu du danger.
Cette pensée, la pensée de cette merveille de
la création, à laquelle involontairement et à pre
mière vue il avait su inspirer un sympathie sin
cère, cette pensée, malgré lui, le raccrochait à
l’existence.
Il se sentait faiblir... Malgré lui, il mollissait,
le désespoir le prenait à la gorge...
Marchant à grands pas dans son cachot :
— Est-ce bête!... répétait-il, est-ce idiot!...
venir ici me faire égorger, me faire hacher pour
un autre !...
Et il se tapait la tête contre les murs, il
donnait de grands coups de pieds contre les
pierres...
Etait-ce une illusion? il lui sembla que l’une
de ces pierres hochait dans sa gaine de ci
ment !...
Oui ! elle remuait, cette pierre ! c’était certain,
elle oscillait même d’une façon sensible.
Laffressange se mit à genoux, il essaya de
pousser cette pierre, qui résista tout en conti
nuant à remuer.
Il fit un effort alors en sens contaire.
Et bien qu’elle ne sortît point de son al
véole, il sentit que le mouvement s’accentuait
encore.
Un fol espoir venait de traverser le cerveau
du pauvre prisonnier. Et à cette suprême espé
rance , il s’accrochait avec une énergie de
noy .
Fouiller dans sa poche, y prendre un couteau,
introduire la lame dans la fissure et, faisant
levier, tirer à lui tandis que l’autre main suivait
le même mouvement, ce fut pour Lafressange
l’affaire d'une seconde.
Dix fois ses ongles s’écaillèrent contre ce coin
de dalle qui présentait si peu de prise...
Dix fois, il fut sur le point d’y renoncer, et
d’attendre la mort qui approchait, car la foule
s’était enfin répandue dans l’intérieur delà tour
pour continuer sa chasse à l’homme.
Enfin, la pierre fit un mouvement en avant.
Oui!... Dieu bon !... Elle sortait de sa gaine !
elle cédait!
En s’y reprenant à plusieurs reprises, Lafres
sange l’attirait à lui!...
Elle finit par sortir tout à fait de son alvéole,
laissant libre un passage souterrain, une sorte de
trou noir dans lequel le prisonnier se faufila
résolument.
Le tout, pour lui, c’était de gagner du temps,
d’échapper à cette foule affolée...
Dès l’entrée, fort heureusement, le trou était
assez vaste... assez, du moins, pour permettre à
Lafressange de se retourner et de garder la
liberté de ses mouvements.
Il en profita pour attirer à lui la pierre et lui
faire reprendre sa première place.
De cette façon, il assurait sa retraite.
D’abord, on mettrait certainement un long
espace de temps avant de découvrir cette pierre
mouvante, dont il n’avait trouvé le secret que
par un hasard providentiel.
En outre, si on touchait à la pierre, il se tenait
là, derrière, pour l’empêcher de bouger, pour la
serrer contre la paroi du roc.
Enfin, il était en sûreté..., voilà ce qu’il com
prenait, voilà ce qui le faisait respirer longue
ment!...
Aussi bien, il était temps qu’il trouvât ce re
fuge...
La porte du cachot venait de s’ouvrir, il l’en
tendait très bien, il s’en rendait parfaitement
compte.
Le brigadier, évidemment, avait été obligé de
céder à la foule, et désignant la place du cachot,
ouvrait la porte, se résignant à livrer son pri
sonnier.
Lafressange entendait les cris de fureur de la
foule... les exclamations du brigadier... les re
cherches minutieuses... et avec une indicible
joie, il pouvait constater que personne ne son
geait à la bienheureuse pierre contre laquelle il
s’areboutait de toutes ses forces.
Cependant, la foule se retirait désappointée...
Le brigadier courait même de grands dangers,
car on avait bien envie de lui faire un mauvais
parti, croyant qu’il avait caché Walter Handel
autre part, ou qu’il avait fait évader le prison
nier.
Bientôt, tout retomba dans le silence... la foule
s’éloignait.
Et Lafressange se tenait tapi dans son trou, en
remerciant la Providence... Mâtin ! ainsi qu il le
murmurait, il l’avait échappe belle !
Mais aussitôt, sans perdre de temps, il songea
à tirer parti de la situation.
Ce couloir secret avait dû servir, sans nul
doute, à l’évasion d’un prisonnier.
Il y avait combien d'années ?... Combien de
siècles de cela ?
Et aussitôt, les évasions fameuses lui reve
naient en mémoire.
Celles qui appartenaient au domaine de la fan
taisie, comme celle d’Edmond Dantès. Celles,
malheureusement historiques, et qui rappelaient
d’épouvantables tortures, telle que celle du ba
ron de Trenk, de Latude, etc.
Le sort d’Edmond Dantès lui souriait davan
tage.
Maintenant que, pour le moment du moins,
il était hors de danger, il reconnaissait que rien
ne manquait au romanesque de son aventure !. .
En aurait-il à raconter à Mlle Berthe!...
(La suite au prochain numéro).
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