Titre : L'Ordre
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1947-01-07
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32829724j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 07 janvier 1947 07 janvier 1947
Description : 1947/01/07 (A19,N609). 1947/01/07 (A19,N609).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t5117807g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-1857
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/11/2021
L’EXPERIENCE BLUM
1919 Année a Nouvelle Série * N* 609 7 .4. RANCS
eree
F‘ Mardi 7 Janvier 1947
El Et CONTINUITE POLITIQUE
par André STIBIO
L'élan incontestable du départ, sa réussite même, ne doivent
pas fermer nos yeux aux difficultés de la route. L’orientation à
la baisse a eu, certes, un premier avantage. Sans elle, nous nous
trouverions aujourd’hui serrés jusqu’à l’étranglement dans l’étau
des salaires et des prix. Un gouvernement, moins maître de son
destin, aurait, après discussion, accepté l’augmentation des uns
et subi en soupirant la progression fatale des autres. En prévi
sion d’une nouvelle flambée des cours, où se seraient englouties
les espérances d’une vie meilleure pour tous, bien des produits
étaient stockés. Nous ne pourrons être certains de l’expérience
Léon Blum qu’à partir du moment où ces marchandises, déva
lorisées par une attente inutile, reviendront sur le marché nor
mal.
Nous n’en sommes pas encore là ! Un certain enthousiasme
publicitaire autour de la baisse des prix est même fait pour
nous inspirer plus de méfiance que de confiance. On a presque
l'envie de s’écrier : « C’est trop beau ! » Et les ministres qui
L’ORDRE
Directeur politique : Émile BURÉ
Rédaction, Administration : 31, Rue Tronchet
Anjou : 86-40 « 4 lignes
Publicité : Régie-Presse, 65, Champs-Elysées
Après 21 heures : TRUdaine 65-96
M. Marins MOÜTET quitte
Le rapport de la Commission
-- —
Qualité' d ahoert
BESANCON - reprit ses belles fabricdlions de çualifé g
-219 ' - ’ mais la production est encore lintitée et seul N
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de montrât bracelets pour hommes E
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BESANÇON • • D • lus Métro St-Sébastien-FroisMrt |
xom asazmsssssassenanssazaronmess
LETTRE DE LO^DRES
prennent la parole à la radio devraient ne pas manquer de la
mesure et de la prudence qu’observe Léon Blum quand il parle,
lui, de l’avenir. Dire, par exemple, que d’ici quelques jours on
enregistrera une baisse supérieure à 5 %, c’est déconsidérer,
sans le vouloir, le premier effort qui est tenté dans les limites
fixées par la loi.
De tels propos laissent supposer à l’opinion publique qu’un
retournement de situation quasi miraculeux va s’opérer. Il aurait
suffi de presser sur un déclic pour que nous assistions à un
changement de décor à vue. L’expérience Léon Blum est d’une
autre nature et l’on doit se garder de lancer de la poudre aux
yeux. Mieux vaudrait instruire le public avec exactitude, sinon
les premiers signes d’une nouvelle offensive des prix engendre
raient un amer découragement. Nous sommes, en réalité, devant
une opération d’assez longue haleine où la question des prix
n’est qu’un des facteurs de redressement qui demande à être
suivie, contrôlée de très près, et dont il ne faut d’abord attendre
comme effet heureux qu’une stabilisation des cours à un taux
un peu moins élevé que les taux d’avant janvier.
Il restera à empêcher que cette stabilisation relative, tou
jours menacée, ne soit remise brusquement en cause. Si le mieux-
être matériel ne correspond pas aux espérances du départ, si
les difficultés du ravitaillement pèsent toujours aussi lourdement
sur la vie des grands centres, si le manque de charbon paralyse
notre industrie, si la spéculation continue de jouer contre l’in
térêt national, la digue pénibleinent construite par Léon Blum
sautera. Et, par parenthèse, l’heure n’a-t-elle pas sonné d’une
énergique récupération des bénéfices illicites. soustraits à l’im
pôt dans des conditions scandaleuses? Les millionnaires de 1947
ne versent rien au percepteur dans la commune où on les a
connus besogneux. Mais ils achètent immeubles, restaurants, ca
fés à Paris ou ailleurs sans que personne leur demande d’où
vient l’argent, sans qu’on s’occupe un peu de ces étranges
transactions !
De toute façon l’œuvre entreprise par Léon Blum ne pro
duira ses fruits que grâce à la continuité. C’est essentiellement
un problème politique. A coup sûr, les successeurs de Léon Blum
— s’il ne se succède pas à lui-même ! — auront à cœur de pour
suivre, ils promettront même d’amplifier une politique dont ils
mesurent la popularité. Mais vouloir et pouvoir sont deux. Une
crise gouvernementale longue suffira déjà à provoquer un relâ
chement dans l'action qui est aujourd’hui menée. Et si le gou
vernement nouveau devait ensuite passer son temps à arbitrer
ses querelles internes, le 5 % ne serait bientôt plus qu’une éti
quette sans efficacité, le souvenir d’un beau rêve.
Le premier point est donc de demander aux partis de se
mettre en mesure de dénouer très rapidement la crise gouver
nementale. Ils en connaissent assez les données, car ils ont déjà
tourné la question dans tous les sens. L’union est souhaitable.
Est-elle faisable et à quel prix ? Que les partis qui ne veulent
pas d’elle, parce qu’ils repoussent visiblement la collaboration
au pouvoir avec les communistes, prennent position. Dès l’ins
tant qu’ils se refuseront à l’union, il n’y a plus que deux solutions
possibles : le bipartisme socialo-communiste (mais un gouver
nement selon cette formule n’aurait pas une majorité à l’Assem
blée nationale) ou la reconduction pure et simple d’une équipe
qui s’est acquis des titres à la reconnaissance du pays.
Nous avons souvent dit avec bien des confrères — et Léon
Blum l’a expressément souligné dans sa déclaration ministé
rielle - le côté paradoxal d’un gouvernement de minorité pré
sidé par le chef d’un parti battu à quelques semaines d’élections
qui avaient consacré le triomphe du Mouvement Républicain
Populaire et du parti communiste. Mais c’est la dure rançon de
la loi électorale que ces deux partis précisément avaient âpre-
ment défendue ensemble. Cette loi n’a pas créé de majorité poli
tique. Et les communistes qui avaient compté sur certains radi
caux pour refaire l’ancien front commun découvrent que ceux-
ci, à une dizaine de voix près, sont rejetés très à droite, malgré
la bannière où s’inscrivent les mots de « Rassemblement des
Gauches ». Tant qu’il n’y aura pas de majorité concevable, la
formule du soutien d’un gouvernement homogène, gérant au nom
de tous les partis la chose publique, sera la plus commode et la
moins stérile.
aujourd’hui l’Indochine
Ho Chi Minh nest pas sérieux
d’enquête parlementaire
britannique en Grèce
vient d’être publié
LA VAGUE D’OPTIMISME
TEND-ELLE
DEJA A SE DISPERSER ?
La crise du charbon prend
des proportions alarmantes
La parole reste aux armes
// demande le retrait des troupes anglaises
et la formation d 9 un cabinet de coalition
Abandon de la politique de nationalisation ?
Saigon, 6 janvier. — M. Marius
Moutet venant de Ban Methuot, est
arrivé à l’aérodrome de Saigon, au
jourd’hui, à 17 heures.
Au cours de la journée d’hier, le
ministre de la France d’outre-Mer
s’était rendu à Nhatrang, dans le
sud de l’Annam où il s’était entre
tenu avec des personnalités fran
çaises et annamites, et les habitants
français de la ville.
Au cours de ses entretiens, le mi
nistre à pu étudier la situation dans
le sud de l’Annam.
Après une nuit passée à Dalat, le
ministre de la France d’outre-Mer
s’était rendu par avion à Ban Me
thuot où, au cours d’une grande
manifestation, plusieurs milliers de
Mois acclamèrent le ministre.
Recevant une première fois la
presse unioniste de Saigon, M. Ma
rius Moutet avait déclaré :
« Mes impressions de Hanoï sont
absolument navrantes. J’ai voulu
me rendre compte par moi-même.
Je puis vous affirmer que j’ai la
preuve absolue de la préméditation
viet-namienne dans l’attaque qui a
bien été préparée de longue main.
Je vous assure que j’étais loin de
m’attendre à cela.
« Ma position maintenant est
nette : L’attaque du 19 décembre,
sa nature, sa préméditation et ses
développements nous contraignent
à une action militaire. Lorsque l’ar
mée aura rétabli l’ordre, il sera pos
sible d’examiner à nouveau les
problèmes politiques. »
Le ministre avait ajouté :
« Je vais couvrir à Paris le com
mandement et les autorités qui,
conformément à l’ordre du gouver
nement, ont attendu jusqu’à l’ex
trême limite pour intervenir. »
Solliciter d’exprimer son opinion
sur Ho Chi Minh, M. Marius Mou
tet avait déclaré qu’il ne croyait pas
que celui-ci ait eu une part déter
minante dans les événements et
qu’il a peut-être été débordé.
« Mon voyage était connu, avait-
il dit, et je n’ai pourtant pas été
l’objet de la moindre tentative de
sa part pour prendre contact. »
En reconduisant ses visiteurs, le
ministre de la France d‘outre-Mer
avait conclu :
« Luttez, travaillez contre la vio
lence, plaidez sans cesse pour la
paix et le retour à la confiance.
C’est le seul moyen de sortir de
cette dramatique situation. »
ministre de la France d’outre-Mer a
dit qu’il n’avait pas été invité par le
gouvernement viet-namien.
‘La radio viet-namienne affirmait
que Ho Chi Minh a adressé le 3 jan
vier la lettre suivante à M. Marius
Moutet :
« Je suis très heureux d’apprendre
votre arrivée à Hanoï, à un triple
titre, celui de vieil ami, de représen
tant de la France et de nouveau mes
sager de paix, soyez le bienvenu.
» Je serais très heureux d’avoir
avec vous un long entretien afin de
vous faire part de notre sincère dé
sir de paix et de coopération, et de
(Lire la suite en troisième page)
Londres, 6 janvier. — La déléga
tion parlementaire britannique qui a
visité la Grèce au mois d’août pu
blie ce matin son rapport.
La délégation estime que le retour
du roi en Grèce doit fournir l’occa-
sion de promouvoir une politique
d’inspiration nouvelle avec l’appui
de la Grande-Bretagne. Un gouver
nement de coalition devrait pouvoir
être formé comprenant toutes les
tendances politiques avec toutefois
l’exclusion possible de l’extrême-
gauche.
Le premier objectif de ce gouver-
nement serait le rétablissement
de
Le président Truman
devant le Congrès
66
La collaboration avec VU. R. S.
est indispensable"
“La législation du travail ne doit pas être punitive
Peu après la radio viet-namienne
diffusait un commentaire selon le
quel « les milieux proches de la pré
sidence du. gouvernement viet-na-
mien » ont exprimé leur étonnement
à la suite de la déclaration, faite par
M. Marius Moutet dans laquelle le
Washington, 6 janvier. —- Ac
cueilli par une longue ovation, le
président Truman se présenta au
jourd’hui devant le Congrès où U
n’a plus la majorité, et donna lec
ture du message traditionnel.
Danÿ les milieux politiques de
Washington, on estime qu’aucun
passage de ce message du président
Truman ne devrait provoquer l’op
position de la majorité républicaine
du Congrès contre l’administration
démocrate.
On déclare que le président Tru
man a demandé la coopération du
Congrès en termes simples et me
surés, propres à attirer la sympa
thie de l’opinion publique en ïiné
période où sa popularité semble
manifester une tendance à se dé
velopper.
Sur les problèmes plus délicats,
comme, par exemple, ceux du tra
vail, le président a proposé des so
lutions de sagesse et de modération
et sa ferme attitude en faveur dès
syndicats ne peut, ’ajoute-t-on, que
lui valoir l’adhésion des dirigeants
et des militants des confédérations
syndicales.
Dans le domaine extérieur, le
président Truman a simplement
demandé au Congrès de poursuivre
la politique dont jusqu’à présent,
a-t-il dit, les heureux résultats ont
été encourageants pour les États-
Unis.
On considère dans tes 'milieux
autorisés que si le Congrès évite
d’orienter son attitude dans un sens
antidémocrate, une collaboration
efficace pourrait s’établir entre
Maison Blanche et le Congrès.
des
la
Le message
La possibilité de modeler l’avenir
nations repose dans nos mains,
“La mobilisation des bonnes volontés est nécessaire”
déclare à la radio M. R. LACOSTE, ministre de la Production industrielle
BOURRET
l’assassin de la rue Boulard
a été arrêté
A son tour, M. R. Lacoste, ministre de la Production industrielle, a lancé hier un appel radiodif
fusé. En termes excellents, il a défini les conditions de réussite. L’accroissement de la production, la mise
en circulation d^s stocks, la résorption du circuit parallèle exigent, en effet, une « véritable mobilisation
des bonnes volo tés » pour que la stabilisation, « impérieusement nécessaire », du marché puisse être réa
lisée. N’oubliom pas, toutefois, que certaines des conditions essentielles au déroulement correct de l’expé
rience dépende ,t aussi du gouvernement.
Je veux, to it d’abord, rendre
hommage à h. détermination ré
fléchie avec laquelle les représen
tants qualifiés des producteurs in
dustriels authentiques de notre
pays ont accepté les responsabilités
et les sacrifices qui découlent pour
eux des consignes qui leur ont été
données par M. le président Léon
Blum.
Le ministre de la Production in
dustrielle sait, en effet, et perti-
nemment, que la plupart des indus
tries dont il a la charge ont ac
compli, depuis la libération, un ef
fort de production dans des cir
constances parfois dramatiques, au
milieu d’un monde de difficultés
nées de l’épuisement matériel de
la France, de notre disette de ma
tières premières et d’énergie, de de
vises et de main-d’œuvre. Ces dif
ficultés, le plus grand nombre d’en
tre eux — je parle toujours, ne
l’oubliez pas, des producteurs di
gnes de ce nom — n’ont pas cher
ché à les résoudre par des artifices
de mauvaises foi.
Je sais que dans tous les sec
teurs de l’industrie et dans la plu-
part des entreprises, ces produc
teurs ont observé les disciplines de
prix qui leur ont été imposées et ils
l’on fait, bien souvent, en dépit des
conséquences qui en ont découlé
pour le renouvellement de leur ou
tillage ou l’aisance de leur tréso
rerie.
Personne ne doit ignorer que
l’effort nouveau demandé par le
gouvernement constitue pour tous
les entrepreneurs, qui ont observé
avec scrupule les réglementations
en vigueur, une lourde charge. Je
il est évident qu’elle ne saurait
s’accompagner d’une tolérance à
l’égard de ceux qui, depuis la libé
ration, profitant de l’aspiration
commune à la liberté, ont exploité
les circonstances dans un esprit de
lucre. Ceux-là ont ruiné en grande
partie les bienfaisants effets de
l’effort des industriels honnêtes et
des travailleurs salariés.
Les éléments parasitaires aux
quels je fais allusion, en s’intro
duisant dans les circuits normaux
d’échanges, ont empêché l’élargis-
leur sais gré d’apporter dans
conditions leur concours sans
serve au gouvernement.
Mais ma tâche ne consiste
ces
ré-
pas
sement du marché intérieur et
la consommation domestique à
mesure des possibilités actuelles
la production.
de
la
de
uniquement dans l’application à
mon secteur de la baisse de prix
décidée. Mon devoir est également
de tout faire pour que la plus
grande quantité possible de mar
chandises fabriquées par notre in
dustrie soit mise à la disposition
du consommateur, aux nouveaux
prix.
S’il est exact qu’en cette période
d’effort national la mobilisation
des bonnes volontés soit nécessaire,
Le sort de l’expérience
dépend des agriculteurs
Le budget-type établi par la C.G.T.
pour la détermination du minimum
vital compte pour un peu plus des
trois cinquièmes la part de l’alimen
tation. Cette estimation semble très
modérée, surtout dans les grands
centres urbains où l’absence de jar
dins et de relations paysannes proches
privent les foyers de suppléments
substantiels. L’abaissement du prix
des produits agricoles serait donc celle
qui apporterait un soulagement immé
diat et concrétiserait de la façon la
plus heureuse la politique lancée par
M. L. Blum.
Or, si la diminution de 5% semble
avoir été acceptée avec une grande
bonne volonté dans le domaine de la
production et de la distribution des
produits manufacturés, elle ne paraît
pas réunir la même unanimité dans
les campagnes.
Pour le pain, le
le sucre, il n’y a
grosses difficultés,
pas de même de
lard, le beurre et
pas à prévoir de
mais il n’en est
la viande et des
noncer. La politique de la viande
suivie depuis six mois y est certes
pour quelque chose. Pratiquement la
taxe est tombée presque partout en
désuétude, sans qu’en contre-partie la
liberté ait été laissée pour permettre
de juger dans les faits si, oui ou non,
la production est suffisante pour que
les effets de la concurrence puissent
se faire sentir. L’éclatement du Ravi
taillement laisse à trois ministres,
MM. Philip, Tanguy-Prigent et Min-
joz, la responsabilité des mesures à
adopter. Il devient urgent qu’une dé
cision soit prise et qu’une ligne soit
enfin adoptée. Car l’échec de l’expé
rience. dans ce secteur si important,
ne tarderait pas à faire tâche d’huile
et à compromettre le succès de Ven-
semble. Permettons-nous de souhaiter
toutefois que les décisions soient tel
les qu’elles n’aient pas pour effet de
faire, une fois de plus, disparaître la
marchandise du circuit légal au profit
du marché parallèle.
H. B.
légumes. Hier, à La Villette, la moitié
des bovins, peu nombreux d’ailleurs
pour un lundi, est restée invendue.
L’agriculture reste en arrière de la
main et attend encore pour se.pro-
Lire en troisième page :
La situation en Palestine
par Claude VIVIERES
Chacun comprendra donc que
ces éléments néfastes devront être
sévèrement éliminés afin que le
rythme normal des échanges, rom
pu par eux, soit rétabli.
Il sera sans doute nécessaire de
prendre certaines mesures impor
tantes pour aider à l’écoulement ré
gulier des stocks. Ces mesures se
ront' prises en collaboration avec les
éléments sains de la production
réunis dans les groupements repré
sentatifs et capables d’actions
conscientes que sont les syndicats.
C’est d’un commun accord qu’il
faudra mettre fin aux circuits
anormaux qui détournent la mar
chandise, fruit du labeur national,
soit de sa destination licite, soit
du marché régulier, pour la diriger
vers le marché "noir ou vers des
centres de stockage clandestin.
Au reste, une fois rompu, le cy
cle infernal des prix et des salai
res, avec le sentiment d'insécurité
financière et monétaire qui l'ac-
compagne et l'esprit de spéculation
qu’il envisage, qui aura intérêt à
la rétention des marchandises ?
Qui aura intérêt à la quête effré
née des produits normalement des
tinés à la consommation des Fran
çais ou à l’équipement du pays ?
Le choix est donc fait entre une
cascade de hausse sans fin et une
stabilisation difficile — mais impé
rieusement nécessaire -— des condi
tions du marché.
Il s’agit, au terme de l'expérience
commencée avec confiance, d’arri
ver à ce que la nation bénéficie en
commun de l’effort de tous — ou
vriers, techniciens et industriels.
Le. fruit de cet effort appartient
à tous ; il ne doit pas être la proie
de quelques détrousseurs : voilà
pourquoi tous les Français doivent,
chacun sur son plan, participer en
tièrement à l’offensive ordonnée par
le gouvernement contre la hausse
des prix.
Bourret n’est point un homme cou
rageux. Criminel d’occasion, il a tué
dans une de ses crises de colère ter
rible qu’on lui connaissait. Il n’a pas
tué pour tuer. Il a tué pour n’avoir
pas pu maîtriser à temps ses réflexes.
Arrêté près de la Porte d’Orléans,
il est passé tout de suite aux aveux.
Il affirme d’abord avoir eu une très
violente querelle avec sa maîtresse
Ghislaine Thévenin, puis leur fille
Anne-Marie, s’étant jetée dans ses
jambes, il la prit brutalement par le
cou, la projetant dans son berceau,
s’apercevant à ce moment que la. pe
tite fille était morte. Ghislaine eut
alors — selon Bourret — la révéla
tion de sa fille morte. Elle prit un
couteau pointu sur la table. Bourret
se précipita sur elle, la désarma et,
comme la jeune femme voulait lui
arrs cher l'arme, il la frappa. Ghislaine
s’effondra, morte.
Soigneusement, Bourret se lava
les mains, enveloppa le couteau en
sanglanté dans du papier et le mit
dans son veston, répara le désordre
des vêtements de la fleuriste et jeta
sur elle un manteau de fourrure.
Puis il partit, jeta son arme dans
une bouche d’égout et s’en alla tout
bonnement, passer la nuit avec une
de ses amies — le chant 1 du cygne !
Bourret est au dépôt maintenant.
Il pourra invoquer tous les motifs
pécuniaires du monde, l’attitude de
ses créanciers, la destinée, peut-être.
Il ne pourra jamais nier cependant
qu’il a supprimé deux vies, deux vies
jeunes, une femme, une enfant. Ne
serait-ce que pour cela, et sans tenir
compte des circonstances du drame,
Bourret doit payer. 1
les \ vôtres et les miennes jointes
ensemble. » C’est par cet appel à.
la coopération du congrès que débute
le message du président Truman.
« Au cours de cette année et de
l’année prochaine, nous pouvons trou
ver la meilleure formule possible
pour chacune des nations, et si, en
dépit des difficultés, nous avons le
courage et la résolution d'agir ainsi,
nous pourrons assurer à notre peuple
un bien-être sans précédent dans
"histoire.
« Et si nous continuons a travail-
1er sérieusement, patiemment, et sa
gement avec les autres nations. du
monde, nous pouvons, si la même
volonté existe chez nos voisins, réali
ser une paix durable. »
« Mais le congrès et le président
doivent travailler ensemble .pour at
teindre ce but. » . ;
M. Truman prévoit des divergences
d’opinion et ajoute qu’elles ne sont
pas à craindre. 1
« Des hommes dont les avis diver
gent peuvent toujours agir ensemble
avec sincérité pour le bien commun. »
Puis le président trace les grandes
lignes de la politique qu’il estime in-
dispensable de suivre. Dans tous les
domaines pour assurer la prospérité
et la sécurité de la- nation et la paix
dans le monde.
Il considère tout d’abord la colla
boration avec l’U.R.S.S. comme indis-
pensable. « Quels que soient les diffé
rends qui peuvent surgir entre nous
et les Soviets, nous ne devons toute
fois pas oublier que les intérêts es
sentiels des deux nations résident
dans l’établissement rapide d’une paix
qui permettre aux peuples de toutes
les nations de redevenir des groupes
d’hommes et de femmes libres, atta-
chés aux questions primordiales de la
(Lire ta suite en troisième page)
l’ordre, de la paix intérieure et des
libertés constitutionnelles. De nou
velles élections, basées sur de nou
velles listes, auraient lieu à une
date qui serait à déterminer.
L’institution par le gouvernement
d’une commission générale du tra
vail et la nomination de délégués
syndicalistes devraient être annu
lées ; les anciens représentants
syndicalistes seraient rétablis dans
leurs fonctions et il conviendrait
d’organiser de nouvelles élections
syndicales sous le contrôle du T.U.
O. et de la Fédération syndicale
mondiale.
Le rapport insiste en outre pour
que le peuple grec soit plus étroi
tement associé à l’administration
locale ou gouvernementale, l’établis-
sement de tout régime ressemblant
à une dictature pouvant avoir des
conséquences fatales.
Tout en reconnaissant que la vic
toire monarchiste a été moins im
pressionnante qu’elle aurait pu
l’être et qu’il en est résulté un ap
profondissement du ressentiment de
certains contre le gouvernement, la
délégation considère que la .majo
rité en faveur du roi était pourtant
évidente pour les trois raisons sui
vantes ; l’opinion générale verrait
dans la restauration de la monar
chie une possibilité de paix et de
stabilité sociale ; en second lieu,
la croyance générale serait que le
gouvernement britannique désirait
ce résultat et qu’un vote contre le
roi aurait pu signifier un vote en
faveur de la Russie et hostile à la
Grande-Bretagne ; enfin la crainte
du communisme et de la répétition
des événements de 1944 serait gé
nérale.
La délégation admet cependant
que certaines accusation portées
contre le gouvernement sont sé
rieuses, en particulier en ce qui
concerne l’action contre les orga
nismes syndicaux et l’arrestation de
centaines de militants de gauche.
Le gouvernement grec, ajoute le
rapport à ce sujet, devrait au moins
adopter une politique de .clémence
envers ceux qu'il considère comme
des délinquants politiques, dans Le
cas où il estimerait qu’une amnistie
générale est impossible.
(De notre correspondant particulier.)
Londres, 4 janvier. — L’année qui
vient de prendre fin a été aussi
mauvaise que possible, pour l’An
gleterre comme pour presque tous
les autres pays en Europe. Elle n’a
pas adouci les souffrances que la
guerre a laissées en héritage, et
dans beaucoup de domaines elle a
rendu les condititons de vie plus
dures que pendant la grande tour
mente. Durant toute cette année,
on a même cru à la possibilité d’un
nouveau conflit armé. Le sang ne
cessa de couler aux Indes, en Pa
lestine, en Grèce et ailleurs. Elle
s’est tout de même achevée sous un
jour moins désespéré.
Les perspectives pour 1947 se pré
sentent sous un double aspect : en
courageantes en politique extérieu
re, sombres en politique intérieure,
économique, sociale, industrielle.
Mais le monde veut demeurer
sous l’impression de l’heureux revi
rement qui s’est produit fin 1945 sur
le terrain des relations interna
tionales. Les journaux anglais at
tribuent ce revirement aux Russes,
ou plus exactement au changement
de tactique de la politique russe.
Les dirigeants de Moscou se se
raient subitement aperçus que
« l’obstination » ne paye pas et
que l’on a plus d’intérêt à se mon
trer conciliant. Les Anglais d’autre
part adorent le compromis et dans
la plupart des cas courent à sa
rencontre à bride abattue.
C’est
Un étrange verdict
au procès de Belgrade
Belgrade, 6 janvier. — L’ancien
président du gouvernement yougo-
slave émigré, Milos Trifunovitch, a
été condamné à huit ans de tra
vaux forcés pour avoir « communi
qué à l’ambassade des Etats-Unis
des secrets d’Etat et des informa
tions calomnieuses su ria Yougo
slavie ».
Milutine Stevanovitch, ancien em
ployé du service de presse de l'am-
bassade des Etats-Unis, Zelko Su-
sin, et le journaliste Branko Jova-
novitch, ont été condamnés à la
peine capitale pour s’être, décla
rent les attendus du jugement, « liés
avec les espions étrangers Prida-
nov, ancien conseiller commercial de
l'ambassade des Etats-Unis ; Ha
rold Shants, ancien conseiller d’am
bassade et l’attaché naval adjoint
Kosunitch, pour avoir donné des
fausses informations dans le but
d’inciter une puissance étrangère à
intervenir en Yougoslavie ou pro
voquer la rupture des relations di
plomatiques et économiques et pour
avoir aidé d’anciens collaborateurs
de l’ennemi ».
La môme MOINEAU
avait 80 millions de bijoux et de dollars
Deux cambrioleurs les lui volent
Deux malfaiteurs ont cambriolé
la chambre de Mme Lucienne De-
nitez-Rejach, à l’hôtel de la Vieille-
Fontaine, situé dans le pare de
Maisons-Laffitte. Ils se sont empa
rés d’un coffret renfermant une
somme de 40 millions de francs en
dollars, ainsi que des bijoux repré
sentant une somme équivalente,
notamment deux bracelets en pla
tine et un collier de cinq, rangs de
perles fines. Mme Denitez-Rejach,
née Lucienne Dautel, mariée de
puis vingt ans à un milliardaire
américain industriel à Porto-Rico,
est une ancienne artiste lyrique qui
fut connue à Paris dans les music-
halls sous le pseudonyme de « Mô
me Moineau ».
L’enquête a établi que ks deux
cambrioleurs présumés étaient ve
nus ces jours derniers à l’hôtel ;
ils y avaient pris des repas et y
avaient loué une chambre. Sans
doute avaient-ils voulu examiner la
disposition des lieux.
Le personnel de l’hôtel est mis
complètement hors de cause.
Mme Denitez-Rejach offre une
forte récompense à quiconque four
nira des renseignements devant
aboutir à l'arrestation des coupa-
L’armoire contenant son trésor a
été fracturée. Les cambrioleurs se
sont emparés d’une valise en croco
dile rouge renfermant deux brace
lets en platine, un clips en platine,
40 millions de francs de valeurs
américaines et deux carnets de
« travellers cheks » pour un mon
tant total de 10.000 dollars, le tout
évalué à 80 millions de francs.
La « Môme Moineau », que Paul
Poiret avait découverte en 1925, a
eu son heure de célébrité à l’Olym-
pia et dans les établissements mont
martrois. Mais c’est aux Etats-Unis,
à Broadway, qu’elle rencontra M.
Denitez-Rejach, propriétaire d’un
casino, dont elle assura la fortune.
Londres, 6 janvier. — A propos du
rapport de la délégation parlementai
re britannique sur la situation en Grè
ce qui est publié aujourd’hui, le Man
chester Guardian écrit que ce rapport
révele que « les idéaux de liberté et
de démocratie si chers au peuple
grec n’ont pas de place dans la vie
sociale politique et économique de la
Grèce d’aujourd’hui. »
« Le gouvernement grec, ajoute le
journal, ne parait en outre avoir au
cun plan pour remédier à une situa
tion économique qui est décrite avec
raison comme « effroyable ».
«H reste à voir, écrit le Manches
ter Guardian, si le retrait des trou
pes britanniques que la délégation re
commande peut s’accorder avec les
considérations d’ordre stratégique ou
avec rétablissement d’un gouverne-
ment de coalition qui bénéficierait de
l’appui de la Grande-Bretagne. »
« Quoi qu’il en soit, conclut le jour
nal, le gouvernement doit se deman
der si les troupes britanniques peu
vent demeurer plus longtemps sur
place, pendant que l’armée et la gen-
darmerie grecques, entraînée par des
missions britanniques, sont transfor
mées en instruments politiques dont
‘l’utilisation ne contribue en rien à éli
miner les causes réelle» des difficultés |
actuelles en Grèce. » I
dans cette atmosphère que s’est
produite la détente angle-améri
cano-russe à New-York, suivie du
discours si extraordinairement op
timiste de M. Bevin, accueilli par
l’opinion britannique unanime avec
soulagement et gratitude.
Reste à savoir combien de temps
durera la détente si péniblement
obtenue après douze mois d’inces
santes querelles ? On ne le saura
pas avant une dizaine de semaines,
avant la conférence de. Moscou fi
xée au-10 mars, et c’est la solution
donnée au problème allemand qui
constituera l’épreuve suprême de la
capacité des grands Alliés de s’en
tendre et de se départir de leurs
habituelles méfiance et suspicion
réciproques. Jusque-là les pronostics
demeurent réservés.
Voici cependant un événement
d’envergure : le voyage du maré
chal lord Montgomery à Moscou.
L’opinion britannique y attache
un prix énorme et en soupèse
d’avance les résultats. Si ceux-ci
s’avéraient positifs, la conférence
du mois de mars aurait toutes les
chances de réussir. Si la mission
L’ARCHE DE NOE
Melbourne, 6 janvier. — Il est
évident, qu’ayant à son bord 70
guépards, plusieurs hyènes, chim
panzés, lions, autruches et tortues,
plus un rhinocéros, un éléphant,
des serpents venimeux et près d’un
millier d’oiseaux exotiques, le va
peur suédois « Mangarella » devait
réserver à ses passagers humains
quelques surprises pendant la tra
versée du Cap à Melbourne.
Ainsi une hyène frileuse, ayant
rongé les barreaux de sa cage en
bois, pénétra dans une cabine et
s’enroula dans les couvertures d'un
passager endormi. Une autre
hyène, lorsque le navire mouilla
dans un port africain, manifesta
des vélléités de liberté : elle s’en
fuit sur une passerelle, où elle fut
d’ailleurs recapturée.
Quant au chimpanzé, il entra
dans la salle à manger en plein
dîner, monta sur une table et vida
une bouteille de bière.
Montgomery échouait, nous retom
berions dans la pagaïe. Mais quelle
est donc la mission assignée au
héros de l’armée britannique ?
L’hebdomadaire socialiste « The
People » croit savoir que Mont
gomery négocierait à Moscou des
accords militaires semblables à
ceux qui viennent d’être conclus
à New-York entre la Grande-Bre
tagne et les Etats-Unis, standardi
sation des armes de guerre, colla
boration des états-majors, politi
que aérienne commune, etc.
Ces négociations commenceraient
sous de bons auspices, s’il faut en
croire les nouvelles de source
russe, suivant lesquelles les effec
tifs de l’armée rouge seraient bien
tôt considérablement réduits .à la
fois à l’intérieur du pays et au de
hors. L’ « Observer » dit qu’à par
tir du mois de mai prochain l’ar-
mée soviétique ne compterait plus
qu’un million et demi d’hommes et
que les divisions stationnées à
l’étranger seraient ramenées à
vingt au lieu de quarante, chiffre
que Staline lui-même avait men
tionné dans sa réponse aux fameu
ses révélations de Churchill.
Ces commentaires et prévisions
de fin d’année reflètent certaine
ment un optimisme exagéré. C’est
du « wishful thinking », comme
disent les Anglais ou comme nous
disons, nous, prendre ses désirs pour
la réalité. La détente du reste ne
se borne pas au seul domaine mi
litaire : le politique n’est pas
moins important. Dans les milieux
libéraux anglais on insiste surtout
sur la nécessité de relâcher les ri
gueurs qui sévissent toujours dans
certains pays qui gravitent autour
de l’Union Soviétique. « Un peu
plus de liberté par ici, un peu moins
d’ostracisme par là, me disait un
député libéral important, c’est plu
tôt cela que nous attendons de
Moscou pour pouvoir lui témoigner
notre confiance. En faisant quel
ques concessions au libéralisme, le
Kremlin dissiperait beaucoup de
suspicion et pourrait même deve
nir un jour populaire à l’Occident.
Ces concessions sont d’ailleurs dans
l’intérêt de l’Union Soviétique. L’ex
périence prouve que les « puppet
governments » font à la Russie plus
de mal que de bien, car on la rend
responsable du zèle étalé par ses
protégés. La même Chose se passe
du reste partout ailleurs. Certains
militaires américains se conduisent
en Allemagne de telle façon que
Washington doit les rappeler d’ur
gence. En Palestine, les écarts de
langage du général Barker ennuyè
rent plus d’une fois Londres, à tel
point que le départ de Barker est
virtuellement décidé.
Donc, pour en finir avec la vague
d’optimisme, le moins que l’on
puisse dire à l’heure où nous som
mes est que l’on ne doit pas s’em
baller trop tôt, mais attendre pa
tiemment la suite des événements.
Plus on observera de réserve, moins
on aura de désillusions et de dé
ceptions, A lui seul, le problème
allemand suffit pour justifier cette
réserve. De même, le problème de
la Sarre, bien que d’importance
moindre, recommande la prudence,
surtout lorsqu’on doit compter aved
la bonne volonté des autres...
Les réserves formulées ci-dessus
viennent d’être confirmées par le
« Manchester Guardian », dans un
Pierre PIERNAT,
(Lire la suite en troisième page) '
LES CHRONIQUES DE L’a ORDRE»
Revenons an scandale de Panama !
par Émile BURÉ
A l’occasion de l’arrestation et de l’incarcéra-
tion de Paul de Lesseps — descendant de Ferdi
nand de Lesseps —, mon vieil ami et collaborateur,
Alexandre Zévaès, a porté sur ce dernier un juge
ment qui ne sera pas, je crois, celui de l’Histoire.
En tout cas, il est pour moi hors de doute que Fer
dinand de Lesseps fut vraiment un « grand Fran
çais ». Il a trompé, mais en se trompant lui-même.
Le polytechnicien Philippe, Bunau-Varilla qui
brilla parmi les ingénieurs de l’isthme de Panama,
dont il devait plus tard négocier la cession à l’Amé-
rique, a dit assez exactement, selon moi, dans son
livre F rom Panama io Ferri un my fight for France
que i’ai lu à New-York, ce qu’il convenait de pen
ser de lui. Ingénieur émérite et par conséquent redou
table, son éclatante réussite à Suez le rendait à l’or-
dinaire incapable de supporter la critique. Ce qu’il
avait fait en Afrique, il le voulait faire en Amé
rique par les mêmes moyens, encore que les condi
tions de son entreprise d’hier fussent, différentes de
celles de son entreprise d’aujourd’hui. Par ailleurs,
il eut à compter avec la fièvre jaune qui décima ses
équipes d’ingénieurs et d’ouvriers ; aussi avec les
entrepreneurs, avec les agents de publicité dévorés,
eux, par la soif de l’or. Ceux-ci agirent sur la presse
qui affola et le Parlement et le Gouvernement.
Quelle presse d’abord ? La presse républicaine ?
Non pas ! La presse réactionnaire qui, plus tard,
devait rendre responsable le régime républicain d’un
scandale qu’elle avait elle-même provoqué. Si, en
effet, la Compagnie de Panama distribua de l’ar-
gent, beaucoup d’argent aux journaux, comme en
témoigne un certain rapport Vallée établi au nom
de la commission d’enquête parlementaire, c’est
qu’elle avait besoin de, se défendre, et si elle avait
besoin de se défendre c’est qu’elle était attaquée- Son
premier agresseur fut Edouard Drumont, pour attes
ter une fois de plus que c’est au cri de « à bas,les
voleurs » que se perpètrent avec le maximum d’ai-
sance les escroqueries politiques comme les escro
queries financières.
Le futur directeur de l’antisémite Libre Parole
écrivait, le 9 février 1890, avec toute l’assurance
ue procure l’ignorance : « Ce gredin (Ferdinand
e Lesseps) se promène triomphant. Personne ne lui
demande, à cet homme : « Qu’avez-vous fait de
l’argent ?» Le Sénat, à qui de Lesseps a donné
secretement une quantité de présents, se hâte de vo-
ter une loi sur la faillite qui permette à cet homme
d’échapper à la marque de l’infâmie. La digue de
Chalgrée a été démontrée impraticable. Quand
sera-t-il possible d’écrire l’histoire de son atroce es
croquerie rien qu’avec les dérisoires chansons qu’il
chanta à Panama ? »
Certains socialistes, notamment René Viviani et
Gustave Rouanet, qui donnaient encore alors dans
l’antisémitisme, ce « socialisme des imbéciles », fai
saient imprudemment écho à Edouard Drumont pour
soulever l’opinion publique, troubler les pouvoirs
publics, ruiner une entreprise de haute valeur natio
nale et finalement mettre en péril le régime.
« C’est une triste histoire que celle de la guerre
des jeunes et des vieux 1893-1894, écrit Joseph
Caillaux dans ses mémoires. Des jeunes aux dents
longues bondirent sur un scandale qui s’offrait à
leur avidité. Négligeant d’exiger . que rendissent
gorge les grands forbans qui avaient arraché des
millions à la Compagnie de Panama, ils s’achar
nèrent sur des parlementaires accusés à tort ou à
raison d’avoir « pignoché » dans les fonds secrets
de l’entreprise. Jaurès a dit à la tribune de la Cham
bre comment de jeunes professeurs de vertu se ré
pandirent dans, les couloirs du Palais-Bourbon, exci
tant les gens d’extrême gauche, les pressant de récla
mer la lumière, toute la lumière, les poursuites, les
exécutions. Admirable occasion pour paver la voie aux
impatients. Le Panama permit de liquider sans frais
un personnel de gouvernement, le personnel gambet-
tste. Sans doute, je le reconnais, y avait-il parmi ces
hommes qui avaient fondé la République quelques
brebis galeuses. Il eût suffi de les pousser dehors par
les épaules, doucement. »
Les hommes d’Etat américains, dont le pays a
pu, profitant de la légèreté des Français toujours
sensibles aux campagnes démagogiques des insensés
et des fripons, racheter à bon compte les biens de
la Compagnie de Panama en faillite, ont réhabilité
et glorifié Ferdinand de Lesseps dont la descendance
fut indigne de lui comme il arrive souvent. Dès 1906,
le, grand président américain Théodore Roosevelt
déclarait, après une, visite , aux chantiers de cette
entreprise : « Je désire d’abord rendre hommage
à la valeur du travail accompli par la compagnie
française de Panama dans de très difficiles circons
tances. » « Difficile », ce n’était pas assez dire,
c’est effroyable qui eût convenu.
1919 Année a Nouvelle Série * N* 609 7 .4. RANCS
eree
F‘ Mardi 7 Janvier 1947
El Et CONTINUITE POLITIQUE
par André STIBIO
L'élan incontestable du départ, sa réussite même, ne doivent
pas fermer nos yeux aux difficultés de la route. L’orientation à
la baisse a eu, certes, un premier avantage. Sans elle, nous nous
trouverions aujourd’hui serrés jusqu’à l’étranglement dans l’étau
des salaires et des prix. Un gouvernement, moins maître de son
destin, aurait, après discussion, accepté l’augmentation des uns
et subi en soupirant la progression fatale des autres. En prévi
sion d’une nouvelle flambée des cours, où se seraient englouties
les espérances d’une vie meilleure pour tous, bien des produits
étaient stockés. Nous ne pourrons être certains de l’expérience
Léon Blum qu’à partir du moment où ces marchandises, déva
lorisées par une attente inutile, reviendront sur le marché nor
mal.
Nous n’en sommes pas encore là ! Un certain enthousiasme
publicitaire autour de la baisse des prix est même fait pour
nous inspirer plus de méfiance que de confiance. On a presque
l'envie de s’écrier : « C’est trop beau ! » Et les ministres qui
L’ORDRE
Directeur politique : Émile BURÉ
Rédaction, Administration : 31, Rue Tronchet
Anjou : 86-40 « 4 lignes
Publicité : Régie-Presse, 65, Champs-Elysées
Après 21 heures : TRUdaine 65-96
M. Marins MOÜTET quitte
Le rapport de la Commission
-- —
Qualité' d ahoert
BESANCON - reprit ses belles fabricdlions de çualifé g
-219 ' - ’ mais la production est encore lintitée et seul N
| EEAA peut offrir un choix incomparable
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HORLOGERIE ■ •i9t mm 14 Rue de Bretagne 14:
BESANÇON • • D • lus Métro St-Sébastien-FroisMrt |
xom asazmsssssassenanssazaronmess
LETTRE DE LO^DRES
prennent la parole à la radio devraient ne pas manquer de la
mesure et de la prudence qu’observe Léon Blum quand il parle,
lui, de l’avenir. Dire, par exemple, que d’ici quelques jours on
enregistrera une baisse supérieure à 5 %, c’est déconsidérer,
sans le vouloir, le premier effort qui est tenté dans les limites
fixées par la loi.
De tels propos laissent supposer à l’opinion publique qu’un
retournement de situation quasi miraculeux va s’opérer. Il aurait
suffi de presser sur un déclic pour que nous assistions à un
changement de décor à vue. L’expérience Léon Blum est d’une
autre nature et l’on doit se garder de lancer de la poudre aux
yeux. Mieux vaudrait instruire le public avec exactitude, sinon
les premiers signes d’une nouvelle offensive des prix engendre
raient un amer découragement. Nous sommes, en réalité, devant
une opération d’assez longue haleine où la question des prix
n’est qu’un des facteurs de redressement qui demande à être
suivie, contrôlée de très près, et dont il ne faut d’abord attendre
comme effet heureux qu’une stabilisation des cours à un taux
un peu moins élevé que les taux d’avant janvier.
Il restera à empêcher que cette stabilisation relative, tou
jours menacée, ne soit remise brusquement en cause. Si le mieux-
être matériel ne correspond pas aux espérances du départ, si
les difficultés du ravitaillement pèsent toujours aussi lourdement
sur la vie des grands centres, si le manque de charbon paralyse
notre industrie, si la spéculation continue de jouer contre l’in
térêt national, la digue pénibleinent construite par Léon Blum
sautera. Et, par parenthèse, l’heure n’a-t-elle pas sonné d’une
énergique récupération des bénéfices illicites. soustraits à l’im
pôt dans des conditions scandaleuses? Les millionnaires de 1947
ne versent rien au percepteur dans la commune où on les a
connus besogneux. Mais ils achètent immeubles, restaurants, ca
fés à Paris ou ailleurs sans que personne leur demande d’où
vient l’argent, sans qu’on s’occupe un peu de ces étranges
transactions !
De toute façon l’œuvre entreprise par Léon Blum ne pro
duira ses fruits que grâce à la continuité. C’est essentiellement
un problème politique. A coup sûr, les successeurs de Léon Blum
— s’il ne se succède pas à lui-même ! — auront à cœur de pour
suivre, ils promettront même d’amplifier une politique dont ils
mesurent la popularité. Mais vouloir et pouvoir sont deux. Une
crise gouvernementale longue suffira déjà à provoquer un relâ
chement dans l'action qui est aujourd’hui menée. Et si le gou
vernement nouveau devait ensuite passer son temps à arbitrer
ses querelles internes, le 5 % ne serait bientôt plus qu’une éti
quette sans efficacité, le souvenir d’un beau rêve.
Le premier point est donc de demander aux partis de se
mettre en mesure de dénouer très rapidement la crise gouver
nementale. Ils en connaissent assez les données, car ils ont déjà
tourné la question dans tous les sens. L’union est souhaitable.
Est-elle faisable et à quel prix ? Que les partis qui ne veulent
pas d’elle, parce qu’ils repoussent visiblement la collaboration
au pouvoir avec les communistes, prennent position. Dès l’ins
tant qu’ils se refuseront à l’union, il n’y a plus que deux solutions
possibles : le bipartisme socialo-communiste (mais un gouver
nement selon cette formule n’aurait pas une majorité à l’Assem
blée nationale) ou la reconduction pure et simple d’une équipe
qui s’est acquis des titres à la reconnaissance du pays.
Nous avons souvent dit avec bien des confrères — et Léon
Blum l’a expressément souligné dans sa déclaration ministé
rielle - le côté paradoxal d’un gouvernement de minorité pré
sidé par le chef d’un parti battu à quelques semaines d’élections
qui avaient consacré le triomphe du Mouvement Républicain
Populaire et du parti communiste. Mais c’est la dure rançon de
la loi électorale que ces deux partis précisément avaient âpre-
ment défendue ensemble. Cette loi n’a pas créé de majorité poli
tique. Et les communistes qui avaient compté sur certains radi
caux pour refaire l’ancien front commun découvrent que ceux-
ci, à une dizaine de voix près, sont rejetés très à droite, malgré
la bannière où s’inscrivent les mots de « Rassemblement des
Gauches ». Tant qu’il n’y aura pas de majorité concevable, la
formule du soutien d’un gouvernement homogène, gérant au nom
de tous les partis la chose publique, sera la plus commode et la
moins stérile.
aujourd’hui l’Indochine
Ho Chi Minh nest pas sérieux
d’enquête parlementaire
britannique en Grèce
vient d’être publié
LA VAGUE D’OPTIMISME
TEND-ELLE
DEJA A SE DISPERSER ?
La crise du charbon prend
des proportions alarmantes
La parole reste aux armes
// demande le retrait des troupes anglaises
et la formation d 9 un cabinet de coalition
Abandon de la politique de nationalisation ?
Saigon, 6 janvier. — M. Marius
Moutet venant de Ban Methuot, est
arrivé à l’aérodrome de Saigon, au
jourd’hui, à 17 heures.
Au cours de la journée d’hier, le
ministre de la France d’outre-Mer
s’était rendu à Nhatrang, dans le
sud de l’Annam où il s’était entre
tenu avec des personnalités fran
çaises et annamites, et les habitants
français de la ville.
Au cours de ses entretiens, le mi
nistre à pu étudier la situation dans
le sud de l’Annam.
Après une nuit passée à Dalat, le
ministre de la France d’outre-Mer
s’était rendu par avion à Ban Me
thuot où, au cours d’une grande
manifestation, plusieurs milliers de
Mois acclamèrent le ministre.
Recevant une première fois la
presse unioniste de Saigon, M. Ma
rius Moutet avait déclaré :
« Mes impressions de Hanoï sont
absolument navrantes. J’ai voulu
me rendre compte par moi-même.
Je puis vous affirmer que j’ai la
preuve absolue de la préméditation
viet-namienne dans l’attaque qui a
bien été préparée de longue main.
Je vous assure que j’étais loin de
m’attendre à cela.
« Ma position maintenant est
nette : L’attaque du 19 décembre,
sa nature, sa préméditation et ses
développements nous contraignent
à une action militaire. Lorsque l’ar
mée aura rétabli l’ordre, il sera pos
sible d’examiner à nouveau les
problèmes politiques. »
Le ministre avait ajouté :
« Je vais couvrir à Paris le com
mandement et les autorités qui,
conformément à l’ordre du gouver
nement, ont attendu jusqu’à l’ex
trême limite pour intervenir. »
Solliciter d’exprimer son opinion
sur Ho Chi Minh, M. Marius Mou
tet avait déclaré qu’il ne croyait pas
que celui-ci ait eu une part déter
minante dans les événements et
qu’il a peut-être été débordé.
« Mon voyage était connu, avait-
il dit, et je n’ai pourtant pas été
l’objet de la moindre tentative de
sa part pour prendre contact. »
En reconduisant ses visiteurs, le
ministre de la France d‘outre-Mer
avait conclu :
« Luttez, travaillez contre la vio
lence, plaidez sans cesse pour la
paix et le retour à la confiance.
C’est le seul moyen de sortir de
cette dramatique situation. »
ministre de la France d’outre-Mer a
dit qu’il n’avait pas été invité par le
gouvernement viet-namien.
‘La radio viet-namienne affirmait
que Ho Chi Minh a adressé le 3 jan
vier la lettre suivante à M. Marius
Moutet :
« Je suis très heureux d’apprendre
votre arrivée à Hanoï, à un triple
titre, celui de vieil ami, de représen
tant de la France et de nouveau mes
sager de paix, soyez le bienvenu.
» Je serais très heureux d’avoir
avec vous un long entretien afin de
vous faire part de notre sincère dé
sir de paix et de coopération, et de
(Lire la suite en troisième page)
Londres, 6 janvier. — La déléga
tion parlementaire britannique qui a
visité la Grèce au mois d’août pu
blie ce matin son rapport.
La délégation estime que le retour
du roi en Grèce doit fournir l’occa-
sion de promouvoir une politique
d’inspiration nouvelle avec l’appui
de la Grande-Bretagne. Un gouver
nement de coalition devrait pouvoir
être formé comprenant toutes les
tendances politiques avec toutefois
l’exclusion possible de l’extrême-
gauche.
Le premier objectif de ce gouver-
nement serait le rétablissement
de
Le président Truman
devant le Congrès
66
La collaboration avec VU. R. S.
est indispensable"
“La législation du travail ne doit pas être punitive
Peu après la radio viet-namienne
diffusait un commentaire selon le
quel « les milieux proches de la pré
sidence du. gouvernement viet-na-
mien » ont exprimé leur étonnement
à la suite de la déclaration, faite par
M. Marius Moutet dans laquelle le
Washington, 6 janvier. —- Ac
cueilli par une longue ovation, le
président Truman se présenta au
jourd’hui devant le Congrès où U
n’a plus la majorité, et donna lec
ture du message traditionnel.
Danÿ les milieux politiques de
Washington, on estime qu’aucun
passage de ce message du président
Truman ne devrait provoquer l’op
position de la majorité républicaine
du Congrès contre l’administration
démocrate.
On déclare que le président Tru
man a demandé la coopération du
Congrès en termes simples et me
surés, propres à attirer la sympa
thie de l’opinion publique en ïiné
période où sa popularité semble
manifester une tendance à se dé
velopper.
Sur les problèmes plus délicats,
comme, par exemple, ceux du tra
vail, le président a proposé des so
lutions de sagesse et de modération
et sa ferme attitude en faveur dès
syndicats ne peut, ’ajoute-t-on, que
lui valoir l’adhésion des dirigeants
et des militants des confédérations
syndicales.
Dans le domaine extérieur, le
président Truman a simplement
demandé au Congrès de poursuivre
la politique dont jusqu’à présent,
a-t-il dit, les heureux résultats ont
été encourageants pour les États-
Unis.
On considère dans tes 'milieux
autorisés que si le Congrès évite
d’orienter son attitude dans un sens
antidémocrate, une collaboration
efficace pourrait s’établir entre
Maison Blanche et le Congrès.
des
la
Le message
La possibilité de modeler l’avenir
nations repose dans nos mains,
“La mobilisation des bonnes volontés est nécessaire”
déclare à la radio M. R. LACOSTE, ministre de la Production industrielle
BOURRET
l’assassin de la rue Boulard
a été arrêté
A son tour, M. R. Lacoste, ministre de la Production industrielle, a lancé hier un appel radiodif
fusé. En termes excellents, il a défini les conditions de réussite. L’accroissement de la production, la mise
en circulation d^s stocks, la résorption du circuit parallèle exigent, en effet, une « véritable mobilisation
des bonnes volo tés » pour que la stabilisation, « impérieusement nécessaire », du marché puisse être réa
lisée. N’oubliom pas, toutefois, que certaines des conditions essentielles au déroulement correct de l’expé
rience dépende ,t aussi du gouvernement.
Je veux, to it d’abord, rendre
hommage à h. détermination ré
fléchie avec laquelle les représen
tants qualifiés des producteurs in
dustriels authentiques de notre
pays ont accepté les responsabilités
et les sacrifices qui découlent pour
eux des consignes qui leur ont été
données par M. le président Léon
Blum.
Le ministre de la Production in
dustrielle sait, en effet, et perti-
nemment, que la plupart des indus
tries dont il a la charge ont ac
compli, depuis la libération, un ef
fort de production dans des cir
constances parfois dramatiques, au
milieu d’un monde de difficultés
nées de l’épuisement matériel de
la France, de notre disette de ma
tières premières et d’énergie, de de
vises et de main-d’œuvre. Ces dif
ficultés, le plus grand nombre d’en
tre eux — je parle toujours, ne
l’oubliez pas, des producteurs di
gnes de ce nom — n’ont pas cher
ché à les résoudre par des artifices
de mauvaises foi.
Je sais que dans tous les sec
teurs de l’industrie et dans la plu-
part des entreprises, ces produc
teurs ont observé les disciplines de
prix qui leur ont été imposées et ils
l’on fait, bien souvent, en dépit des
conséquences qui en ont découlé
pour le renouvellement de leur ou
tillage ou l’aisance de leur tréso
rerie.
Personne ne doit ignorer que
l’effort nouveau demandé par le
gouvernement constitue pour tous
les entrepreneurs, qui ont observé
avec scrupule les réglementations
en vigueur, une lourde charge. Je
il est évident qu’elle ne saurait
s’accompagner d’une tolérance à
l’égard de ceux qui, depuis la libé
ration, profitant de l’aspiration
commune à la liberté, ont exploité
les circonstances dans un esprit de
lucre. Ceux-là ont ruiné en grande
partie les bienfaisants effets de
l’effort des industriels honnêtes et
des travailleurs salariés.
Les éléments parasitaires aux
quels je fais allusion, en s’intro
duisant dans les circuits normaux
d’échanges, ont empêché l’élargis-
leur sais gré d’apporter dans
conditions leur concours sans
serve au gouvernement.
Mais ma tâche ne consiste
ces
ré-
pas
sement du marché intérieur et
la consommation domestique à
mesure des possibilités actuelles
la production.
de
la
de
uniquement dans l’application à
mon secteur de la baisse de prix
décidée. Mon devoir est également
de tout faire pour que la plus
grande quantité possible de mar
chandises fabriquées par notre in
dustrie soit mise à la disposition
du consommateur, aux nouveaux
prix.
S’il est exact qu’en cette période
d’effort national la mobilisation
des bonnes volontés soit nécessaire,
Le sort de l’expérience
dépend des agriculteurs
Le budget-type établi par la C.G.T.
pour la détermination du minimum
vital compte pour un peu plus des
trois cinquièmes la part de l’alimen
tation. Cette estimation semble très
modérée, surtout dans les grands
centres urbains où l’absence de jar
dins et de relations paysannes proches
privent les foyers de suppléments
substantiels. L’abaissement du prix
des produits agricoles serait donc celle
qui apporterait un soulagement immé
diat et concrétiserait de la façon la
plus heureuse la politique lancée par
M. L. Blum.
Or, si la diminution de 5% semble
avoir été acceptée avec une grande
bonne volonté dans le domaine de la
production et de la distribution des
produits manufacturés, elle ne paraît
pas réunir la même unanimité dans
les campagnes.
Pour le pain, le
le sucre, il n’y a
grosses difficultés,
pas de même de
lard, le beurre et
pas à prévoir de
mais il n’en est
la viande et des
noncer. La politique de la viande
suivie depuis six mois y est certes
pour quelque chose. Pratiquement la
taxe est tombée presque partout en
désuétude, sans qu’en contre-partie la
liberté ait été laissée pour permettre
de juger dans les faits si, oui ou non,
la production est suffisante pour que
les effets de la concurrence puissent
se faire sentir. L’éclatement du Ravi
taillement laisse à trois ministres,
MM. Philip, Tanguy-Prigent et Min-
joz, la responsabilité des mesures à
adopter. Il devient urgent qu’une dé
cision soit prise et qu’une ligne soit
enfin adoptée. Car l’échec de l’expé
rience. dans ce secteur si important,
ne tarderait pas à faire tâche d’huile
et à compromettre le succès de Ven-
semble. Permettons-nous de souhaiter
toutefois que les décisions soient tel
les qu’elles n’aient pas pour effet de
faire, une fois de plus, disparaître la
marchandise du circuit légal au profit
du marché parallèle.
H. B.
légumes. Hier, à La Villette, la moitié
des bovins, peu nombreux d’ailleurs
pour un lundi, est restée invendue.
L’agriculture reste en arrière de la
main et attend encore pour se.pro-
Lire en troisième page :
La situation en Palestine
par Claude VIVIERES
Chacun comprendra donc que
ces éléments néfastes devront être
sévèrement éliminés afin que le
rythme normal des échanges, rom
pu par eux, soit rétabli.
Il sera sans doute nécessaire de
prendre certaines mesures impor
tantes pour aider à l’écoulement ré
gulier des stocks. Ces mesures se
ront' prises en collaboration avec les
éléments sains de la production
réunis dans les groupements repré
sentatifs et capables d’actions
conscientes que sont les syndicats.
C’est d’un commun accord qu’il
faudra mettre fin aux circuits
anormaux qui détournent la mar
chandise, fruit du labeur national,
soit de sa destination licite, soit
du marché régulier, pour la diriger
vers le marché "noir ou vers des
centres de stockage clandestin.
Au reste, une fois rompu, le cy
cle infernal des prix et des salai
res, avec le sentiment d'insécurité
financière et monétaire qui l'ac-
compagne et l'esprit de spéculation
qu’il envisage, qui aura intérêt à
la rétention des marchandises ?
Qui aura intérêt à la quête effré
née des produits normalement des
tinés à la consommation des Fran
çais ou à l’équipement du pays ?
Le choix est donc fait entre une
cascade de hausse sans fin et une
stabilisation difficile — mais impé
rieusement nécessaire -— des condi
tions du marché.
Il s’agit, au terme de l'expérience
commencée avec confiance, d’arri
ver à ce que la nation bénéficie en
commun de l’effort de tous — ou
vriers, techniciens et industriels.
Le. fruit de cet effort appartient
à tous ; il ne doit pas être la proie
de quelques détrousseurs : voilà
pourquoi tous les Français doivent,
chacun sur son plan, participer en
tièrement à l’offensive ordonnée par
le gouvernement contre la hausse
des prix.
Bourret n’est point un homme cou
rageux. Criminel d’occasion, il a tué
dans une de ses crises de colère ter
rible qu’on lui connaissait. Il n’a pas
tué pour tuer. Il a tué pour n’avoir
pas pu maîtriser à temps ses réflexes.
Arrêté près de la Porte d’Orléans,
il est passé tout de suite aux aveux.
Il affirme d’abord avoir eu une très
violente querelle avec sa maîtresse
Ghislaine Thévenin, puis leur fille
Anne-Marie, s’étant jetée dans ses
jambes, il la prit brutalement par le
cou, la projetant dans son berceau,
s’apercevant à ce moment que la. pe
tite fille était morte. Ghislaine eut
alors — selon Bourret — la révéla
tion de sa fille morte. Elle prit un
couteau pointu sur la table. Bourret
se précipita sur elle, la désarma et,
comme la jeune femme voulait lui
arrs cher l'arme, il la frappa. Ghislaine
s’effondra, morte.
Soigneusement, Bourret se lava
les mains, enveloppa le couteau en
sanglanté dans du papier et le mit
dans son veston, répara le désordre
des vêtements de la fleuriste et jeta
sur elle un manteau de fourrure.
Puis il partit, jeta son arme dans
une bouche d’égout et s’en alla tout
bonnement, passer la nuit avec une
de ses amies — le chant 1 du cygne !
Bourret est au dépôt maintenant.
Il pourra invoquer tous les motifs
pécuniaires du monde, l’attitude de
ses créanciers, la destinée, peut-être.
Il ne pourra jamais nier cependant
qu’il a supprimé deux vies, deux vies
jeunes, une femme, une enfant. Ne
serait-ce que pour cela, et sans tenir
compte des circonstances du drame,
Bourret doit payer. 1
les \ vôtres et les miennes jointes
ensemble. » C’est par cet appel à.
la coopération du congrès que débute
le message du président Truman.
« Au cours de cette année et de
l’année prochaine, nous pouvons trou
ver la meilleure formule possible
pour chacune des nations, et si, en
dépit des difficultés, nous avons le
courage et la résolution d'agir ainsi,
nous pourrons assurer à notre peuple
un bien-être sans précédent dans
"histoire.
« Et si nous continuons a travail-
1er sérieusement, patiemment, et sa
gement avec les autres nations. du
monde, nous pouvons, si la même
volonté existe chez nos voisins, réali
ser une paix durable. »
« Mais le congrès et le président
doivent travailler ensemble .pour at
teindre ce but. » . ;
M. Truman prévoit des divergences
d’opinion et ajoute qu’elles ne sont
pas à craindre. 1
« Des hommes dont les avis diver
gent peuvent toujours agir ensemble
avec sincérité pour le bien commun. »
Puis le président trace les grandes
lignes de la politique qu’il estime in-
dispensable de suivre. Dans tous les
domaines pour assurer la prospérité
et la sécurité de la- nation et la paix
dans le monde.
Il considère tout d’abord la colla
boration avec l’U.R.S.S. comme indis-
pensable. « Quels que soient les diffé
rends qui peuvent surgir entre nous
et les Soviets, nous ne devons toute
fois pas oublier que les intérêts es
sentiels des deux nations résident
dans l’établissement rapide d’une paix
qui permettre aux peuples de toutes
les nations de redevenir des groupes
d’hommes et de femmes libres, atta-
chés aux questions primordiales de la
(Lire ta suite en troisième page)
l’ordre, de la paix intérieure et des
libertés constitutionnelles. De nou
velles élections, basées sur de nou
velles listes, auraient lieu à une
date qui serait à déterminer.
L’institution par le gouvernement
d’une commission générale du tra
vail et la nomination de délégués
syndicalistes devraient être annu
lées ; les anciens représentants
syndicalistes seraient rétablis dans
leurs fonctions et il conviendrait
d’organiser de nouvelles élections
syndicales sous le contrôle du T.U.
O. et de la Fédération syndicale
mondiale.
Le rapport insiste en outre pour
que le peuple grec soit plus étroi
tement associé à l’administration
locale ou gouvernementale, l’établis-
sement de tout régime ressemblant
à une dictature pouvant avoir des
conséquences fatales.
Tout en reconnaissant que la vic
toire monarchiste a été moins im
pressionnante qu’elle aurait pu
l’être et qu’il en est résulté un ap
profondissement du ressentiment de
certains contre le gouvernement, la
délégation considère que la .majo
rité en faveur du roi était pourtant
évidente pour les trois raisons sui
vantes ; l’opinion générale verrait
dans la restauration de la monar
chie une possibilité de paix et de
stabilité sociale ; en second lieu,
la croyance générale serait que le
gouvernement britannique désirait
ce résultat et qu’un vote contre le
roi aurait pu signifier un vote en
faveur de la Russie et hostile à la
Grande-Bretagne ; enfin la crainte
du communisme et de la répétition
des événements de 1944 serait gé
nérale.
La délégation admet cependant
que certaines accusation portées
contre le gouvernement sont sé
rieuses, en particulier en ce qui
concerne l’action contre les orga
nismes syndicaux et l’arrestation de
centaines de militants de gauche.
Le gouvernement grec, ajoute le
rapport à ce sujet, devrait au moins
adopter une politique de .clémence
envers ceux qu'il considère comme
des délinquants politiques, dans Le
cas où il estimerait qu’une amnistie
générale est impossible.
(De notre correspondant particulier.)
Londres, 4 janvier. — L’année qui
vient de prendre fin a été aussi
mauvaise que possible, pour l’An
gleterre comme pour presque tous
les autres pays en Europe. Elle n’a
pas adouci les souffrances que la
guerre a laissées en héritage, et
dans beaucoup de domaines elle a
rendu les condititons de vie plus
dures que pendant la grande tour
mente. Durant toute cette année,
on a même cru à la possibilité d’un
nouveau conflit armé. Le sang ne
cessa de couler aux Indes, en Pa
lestine, en Grèce et ailleurs. Elle
s’est tout de même achevée sous un
jour moins désespéré.
Les perspectives pour 1947 se pré
sentent sous un double aspect : en
courageantes en politique extérieu
re, sombres en politique intérieure,
économique, sociale, industrielle.
Mais le monde veut demeurer
sous l’impression de l’heureux revi
rement qui s’est produit fin 1945 sur
le terrain des relations interna
tionales. Les journaux anglais at
tribuent ce revirement aux Russes,
ou plus exactement au changement
de tactique de la politique russe.
Les dirigeants de Moscou se se
raient subitement aperçus que
« l’obstination » ne paye pas et
que l’on a plus d’intérêt à se mon
trer conciliant. Les Anglais d’autre
part adorent le compromis et dans
la plupart des cas courent à sa
rencontre à bride abattue.
C’est
Un étrange verdict
au procès de Belgrade
Belgrade, 6 janvier. — L’ancien
président du gouvernement yougo-
slave émigré, Milos Trifunovitch, a
été condamné à huit ans de tra
vaux forcés pour avoir « communi
qué à l’ambassade des Etats-Unis
des secrets d’Etat et des informa
tions calomnieuses su ria Yougo
slavie ».
Milutine Stevanovitch, ancien em
ployé du service de presse de l'am-
bassade des Etats-Unis, Zelko Su-
sin, et le journaliste Branko Jova-
novitch, ont été condamnés à la
peine capitale pour s’être, décla
rent les attendus du jugement, « liés
avec les espions étrangers Prida-
nov, ancien conseiller commercial de
l'ambassade des Etats-Unis ; Ha
rold Shants, ancien conseiller d’am
bassade et l’attaché naval adjoint
Kosunitch, pour avoir donné des
fausses informations dans le but
d’inciter une puissance étrangère à
intervenir en Yougoslavie ou pro
voquer la rupture des relations di
plomatiques et économiques et pour
avoir aidé d’anciens collaborateurs
de l’ennemi ».
La môme MOINEAU
avait 80 millions de bijoux et de dollars
Deux cambrioleurs les lui volent
Deux malfaiteurs ont cambriolé
la chambre de Mme Lucienne De-
nitez-Rejach, à l’hôtel de la Vieille-
Fontaine, situé dans le pare de
Maisons-Laffitte. Ils se sont empa
rés d’un coffret renfermant une
somme de 40 millions de francs en
dollars, ainsi que des bijoux repré
sentant une somme équivalente,
notamment deux bracelets en pla
tine et un collier de cinq, rangs de
perles fines. Mme Denitez-Rejach,
née Lucienne Dautel, mariée de
puis vingt ans à un milliardaire
américain industriel à Porto-Rico,
est une ancienne artiste lyrique qui
fut connue à Paris dans les music-
halls sous le pseudonyme de « Mô
me Moineau ».
L’enquête a établi que ks deux
cambrioleurs présumés étaient ve
nus ces jours derniers à l’hôtel ;
ils y avaient pris des repas et y
avaient loué une chambre. Sans
doute avaient-ils voulu examiner la
disposition des lieux.
Le personnel de l’hôtel est mis
complètement hors de cause.
Mme Denitez-Rejach offre une
forte récompense à quiconque four
nira des renseignements devant
aboutir à l'arrestation des coupa-
L’armoire contenant son trésor a
été fracturée. Les cambrioleurs se
sont emparés d’une valise en croco
dile rouge renfermant deux brace
lets en platine, un clips en platine,
40 millions de francs de valeurs
américaines et deux carnets de
« travellers cheks » pour un mon
tant total de 10.000 dollars, le tout
évalué à 80 millions de francs.
La « Môme Moineau », que Paul
Poiret avait découverte en 1925, a
eu son heure de célébrité à l’Olym-
pia et dans les établissements mont
martrois. Mais c’est aux Etats-Unis,
à Broadway, qu’elle rencontra M.
Denitez-Rejach, propriétaire d’un
casino, dont elle assura la fortune.
Londres, 6 janvier. — A propos du
rapport de la délégation parlementai
re britannique sur la situation en Grè
ce qui est publié aujourd’hui, le Man
chester Guardian écrit que ce rapport
révele que « les idéaux de liberté et
de démocratie si chers au peuple
grec n’ont pas de place dans la vie
sociale politique et économique de la
Grèce d’aujourd’hui. »
« Le gouvernement grec, ajoute le
journal, ne parait en outre avoir au
cun plan pour remédier à une situa
tion économique qui est décrite avec
raison comme « effroyable ».
«H reste à voir, écrit le Manches
ter Guardian, si le retrait des trou
pes britanniques que la délégation re
commande peut s’accorder avec les
considérations d’ordre stratégique ou
avec rétablissement d’un gouverne-
ment de coalition qui bénéficierait de
l’appui de la Grande-Bretagne. »
« Quoi qu’il en soit, conclut le jour
nal, le gouvernement doit se deman
der si les troupes britanniques peu
vent demeurer plus longtemps sur
place, pendant que l’armée et la gen-
darmerie grecques, entraînée par des
missions britanniques, sont transfor
mées en instruments politiques dont
‘l’utilisation ne contribue en rien à éli
miner les causes réelle» des difficultés |
actuelles en Grèce. » I
dans cette atmosphère que s’est
produite la détente angle-améri
cano-russe à New-York, suivie du
discours si extraordinairement op
timiste de M. Bevin, accueilli par
l’opinion britannique unanime avec
soulagement et gratitude.
Reste à savoir combien de temps
durera la détente si péniblement
obtenue après douze mois d’inces
santes querelles ? On ne le saura
pas avant une dizaine de semaines,
avant la conférence de. Moscou fi
xée au-10 mars, et c’est la solution
donnée au problème allemand qui
constituera l’épreuve suprême de la
capacité des grands Alliés de s’en
tendre et de se départir de leurs
habituelles méfiance et suspicion
réciproques. Jusque-là les pronostics
demeurent réservés.
Voici cependant un événement
d’envergure : le voyage du maré
chal lord Montgomery à Moscou.
L’opinion britannique y attache
un prix énorme et en soupèse
d’avance les résultats. Si ceux-ci
s’avéraient positifs, la conférence
du mois de mars aurait toutes les
chances de réussir. Si la mission
L’ARCHE DE NOE
Melbourne, 6 janvier. — Il est
évident, qu’ayant à son bord 70
guépards, plusieurs hyènes, chim
panzés, lions, autruches et tortues,
plus un rhinocéros, un éléphant,
des serpents venimeux et près d’un
millier d’oiseaux exotiques, le va
peur suédois « Mangarella » devait
réserver à ses passagers humains
quelques surprises pendant la tra
versée du Cap à Melbourne.
Ainsi une hyène frileuse, ayant
rongé les barreaux de sa cage en
bois, pénétra dans une cabine et
s’enroula dans les couvertures d'un
passager endormi. Une autre
hyène, lorsque le navire mouilla
dans un port africain, manifesta
des vélléités de liberté : elle s’en
fuit sur une passerelle, où elle fut
d’ailleurs recapturée.
Quant au chimpanzé, il entra
dans la salle à manger en plein
dîner, monta sur une table et vida
une bouteille de bière.
Montgomery échouait, nous retom
berions dans la pagaïe. Mais quelle
est donc la mission assignée au
héros de l’armée britannique ?
L’hebdomadaire socialiste « The
People » croit savoir que Mont
gomery négocierait à Moscou des
accords militaires semblables à
ceux qui viennent d’être conclus
à New-York entre la Grande-Bre
tagne et les Etats-Unis, standardi
sation des armes de guerre, colla
boration des états-majors, politi
que aérienne commune, etc.
Ces négociations commenceraient
sous de bons auspices, s’il faut en
croire les nouvelles de source
russe, suivant lesquelles les effec
tifs de l’armée rouge seraient bien
tôt considérablement réduits .à la
fois à l’intérieur du pays et au de
hors. L’ « Observer » dit qu’à par
tir du mois de mai prochain l’ar-
mée soviétique ne compterait plus
qu’un million et demi d’hommes et
que les divisions stationnées à
l’étranger seraient ramenées à
vingt au lieu de quarante, chiffre
que Staline lui-même avait men
tionné dans sa réponse aux fameu
ses révélations de Churchill.
Ces commentaires et prévisions
de fin d’année reflètent certaine
ment un optimisme exagéré. C’est
du « wishful thinking », comme
disent les Anglais ou comme nous
disons, nous, prendre ses désirs pour
la réalité. La détente du reste ne
se borne pas au seul domaine mi
litaire : le politique n’est pas
moins important. Dans les milieux
libéraux anglais on insiste surtout
sur la nécessité de relâcher les ri
gueurs qui sévissent toujours dans
certains pays qui gravitent autour
de l’Union Soviétique. « Un peu
plus de liberté par ici, un peu moins
d’ostracisme par là, me disait un
député libéral important, c’est plu
tôt cela que nous attendons de
Moscou pour pouvoir lui témoigner
notre confiance. En faisant quel
ques concessions au libéralisme, le
Kremlin dissiperait beaucoup de
suspicion et pourrait même deve
nir un jour populaire à l’Occident.
Ces concessions sont d’ailleurs dans
l’intérêt de l’Union Soviétique. L’ex
périence prouve que les « puppet
governments » font à la Russie plus
de mal que de bien, car on la rend
responsable du zèle étalé par ses
protégés. La même Chose se passe
du reste partout ailleurs. Certains
militaires américains se conduisent
en Allemagne de telle façon que
Washington doit les rappeler d’ur
gence. En Palestine, les écarts de
langage du général Barker ennuyè
rent plus d’une fois Londres, à tel
point que le départ de Barker est
virtuellement décidé.
Donc, pour en finir avec la vague
d’optimisme, le moins que l’on
puisse dire à l’heure où nous som
mes est que l’on ne doit pas s’em
baller trop tôt, mais attendre pa
tiemment la suite des événements.
Plus on observera de réserve, moins
on aura de désillusions et de dé
ceptions, A lui seul, le problème
allemand suffit pour justifier cette
réserve. De même, le problème de
la Sarre, bien que d’importance
moindre, recommande la prudence,
surtout lorsqu’on doit compter aved
la bonne volonté des autres...
Les réserves formulées ci-dessus
viennent d’être confirmées par le
« Manchester Guardian », dans un
Pierre PIERNAT,
(Lire la suite en troisième page) '
LES CHRONIQUES DE L’a ORDRE»
Revenons an scandale de Panama !
par Émile BURÉ
A l’occasion de l’arrestation et de l’incarcéra-
tion de Paul de Lesseps — descendant de Ferdi
nand de Lesseps —, mon vieil ami et collaborateur,
Alexandre Zévaès, a porté sur ce dernier un juge
ment qui ne sera pas, je crois, celui de l’Histoire.
En tout cas, il est pour moi hors de doute que Fer
dinand de Lesseps fut vraiment un « grand Fran
çais ». Il a trompé, mais en se trompant lui-même.
Le polytechnicien Philippe, Bunau-Varilla qui
brilla parmi les ingénieurs de l’isthme de Panama,
dont il devait plus tard négocier la cession à l’Amé-
rique, a dit assez exactement, selon moi, dans son
livre F rom Panama io Ferri un my fight for France
que i’ai lu à New-York, ce qu’il convenait de pen
ser de lui. Ingénieur émérite et par conséquent redou
table, son éclatante réussite à Suez le rendait à l’or-
dinaire incapable de supporter la critique. Ce qu’il
avait fait en Afrique, il le voulait faire en Amé
rique par les mêmes moyens, encore que les condi
tions de son entreprise d’hier fussent, différentes de
celles de son entreprise d’aujourd’hui. Par ailleurs,
il eut à compter avec la fièvre jaune qui décima ses
équipes d’ingénieurs et d’ouvriers ; aussi avec les
entrepreneurs, avec les agents de publicité dévorés,
eux, par la soif de l’or. Ceux-ci agirent sur la presse
qui affola et le Parlement et le Gouvernement.
Quelle presse d’abord ? La presse républicaine ?
Non pas ! La presse réactionnaire qui, plus tard,
devait rendre responsable le régime républicain d’un
scandale qu’elle avait elle-même provoqué. Si, en
effet, la Compagnie de Panama distribua de l’ar-
gent, beaucoup d’argent aux journaux, comme en
témoigne un certain rapport Vallée établi au nom
de la commission d’enquête parlementaire, c’est
qu’elle avait besoin de, se défendre, et si elle avait
besoin de se défendre c’est qu’elle était attaquée- Son
premier agresseur fut Edouard Drumont, pour attes
ter une fois de plus que c’est au cri de « à bas,les
voleurs » que se perpètrent avec le maximum d’ai-
sance les escroqueries politiques comme les escro
queries financières.
Le futur directeur de l’antisémite Libre Parole
écrivait, le 9 février 1890, avec toute l’assurance
ue procure l’ignorance : « Ce gredin (Ferdinand
e Lesseps) se promène triomphant. Personne ne lui
demande, à cet homme : « Qu’avez-vous fait de
l’argent ?» Le Sénat, à qui de Lesseps a donné
secretement une quantité de présents, se hâte de vo-
ter une loi sur la faillite qui permette à cet homme
d’échapper à la marque de l’infâmie. La digue de
Chalgrée a été démontrée impraticable. Quand
sera-t-il possible d’écrire l’histoire de son atroce es
croquerie rien qu’avec les dérisoires chansons qu’il
chanta à Panama ? »
Certains socialistes, notamment René Viviani et
Gustave Rouanet, qui donnaient encore alors dans
l’antisémitisme, ce « socialisme des imbéciles », fai
saient imprudemment écho à Edouard Drumont pour
soulever l’opinion publique, troubler les pouvoirs
publics, ruiner une entreprise de haute valeur natio
nale et finalement mettre en péril le régime.
« C’est une triste histoire que celle de la guerre
des jeunes et des vieux 1893-1894, écrit Joseph
Caillaux dans ses mémoires. Des jeunes aux dents
longues bondirent sur un scandale qui s’offrait à
leur avidité. Négligeant d’exiger . que rendissent
gorge les grands forbans qui avaient arraché des
millions à la Compagnie de Panama, ils s’achar
nèrent sur des parlementaires accusés à tort ou à
raison d’avoir « pignoché » dans les fonds secrets
de l’entreprise. Jaurès a dit à la tribune de la Cham
bre comment de jeunes professeurs de vertu se ré
pandirent dans, les couloirs du Palais-Bourbon, exci
tant les gens d’extrême gauche, les pressant de récla
mer la lumière, toute la lumière, les poursuites, les
exécutions. Admirable occasion pour paver la voie aux
impatients. Le Panama permit de liquider sans frais
un personnel de gouvernement, le personnel gambet-
tste. Sans doute, je le reconnais, y avait-il parmi ces
hommes qui avaient fondé la République quelques
brebis galeuses. Il eût suffi de les pousser dehors par
les épaules, doucement. »
Les hommes d’Etat américains, dont le pays a
pu, profitant de la légèreté des Français toujours
sensibles aux campagnes démagogiques des insensés
et des fripons, racheter à bon compte les biens de
la Compagnie de Panama en faillite, ont réhabilité
et glorifié Ferdinand de Lesseps dont la descendance
fut indigne de lui comme il arrive souvent. Dès 1906,
le, grand président américain Théodore Roosevelt
déclarait, après une, visite , aux chantiers de cette
entreprise : « Je désire d’abord rendre hommage
à la valeur du travail accompli par la compagnie
française de Panama dans de très difficiles circons
tances. » « Difficile », ce n’était pas assez dire,
c’est effroyable qui eût convenu.
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