Titre : L'Ordre
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1945-09-30
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32829724j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 30 septembre 1945 30 septembre 1945
Description : 1945/09/30 (A17,N210). 1945/09/30 (A17,N210).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t5116840x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-1857
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/11/2021
ï— L'ÉDITORIAL •
| d’Emile BURÉ |
17% Année - Nouvelle Série N’ 210
2 francs
Dimanche 30 Septembre 1945
BYZANTINISME
POLITIQUE
Pour l’anniversaire de Munich
C’est l’anniversaire de la conférence de Munich, Je relis ce que
j’écrivis le 1er octobre 1938, au lendemain de la rentrée triomphale
de Daladier à Paris, qui m’avait plongé dans le désespoir. J’avais,
toùt ému encore des manifestations pacifistes de la rue auxquelles
j’avais assisté, dit en pleurant a mes collaborateurs : « A quoi bon
continuer le combat, la France a décidément le goût du suicide !
Mieux vaut fermer la maison. » Mes interlocuteurs m’avaient rap
pelé au sentiment de ma responsabilité, que je n’avais point, en
vérité, perdu, et ils m’avaient recommandé de tenir compte, en écri
vant mon éditorial, des réactions folles, mais sincères des foules, qui,
comme M. Chamberlain, croyaient que vingt années de paix et plus
leur étaient assurées. Je, fus docile à leur amicale recommandation,
comme en témoignent ces lignes, que je transcris avec quelque
émotion :
« J’ai trop le sens de l’humain
pour n’avoir pas, hier, été touché
par l’allégresse des mères qui
s’étaient séparées courageuse
ment de leurs enfants et qui vont
les retrouver joyeusement, les
horreurs de la guerre s’étant éloi
gnées. Je voudrais, comme elles,
être persuadé qu’éileS se sont
éloignées pour toujours. Mais je
manquerais d’honnêteté intellec
tuelle si je dissimulais que je de
meure en inquiétude au sujet des
accords de Munich, qu’elles ont
salués avec tant de confiance
dans leur émouvante détente sen-
timentale. Tous les peuples ne
sont pas aussi pacifiques que le
peuple français et les richesses
de notre pays, désormais sans
alliances, sont pour tenter ceux
de Berlin et de Rome, dont le
bellicisme orgueilleusement, bru
talement arboré, a déjà reçu tant
de
nach
plus
poir
dans
récompenses. Le « Drang
Osten », ne rencontrera
d’obstacle, et le dernier es-
de paix réside désormais
la bonne volonté de Hitler
et de Mussolini, dont je me per
mets de douter. »
Je ne suis pas homme à accepter de restreindre longtemps ma
pensée et, dès le 4 octobre, j’invitais Daladier à démissionner en ces
termes ;
« Le gouvernement qui est ac
tuellement indispensable à la
France n’est pas le sien, atroce
ment divisé, incapable de dresser
avec sang-froid le bilan désas
treux de notre pays, de décider
ce qu’il convient de faire pour
sauver ce qui reste de sa fortune
à l’extérieur. Il faut savoir qu’on
est au plus bas si l’on veut bien
calculer l’effort à fournir pour
remonter... Une certaine féoda-
mais pourquoi a-t-il donc voulu,
grand Dieu ! ce retour de Mu
nich en fanfare ? Au Soldat In-
connu quel discours a-t-il
pu tenir ? Il lui aura dit : «
en paix, nul ne reverra les
cités que tu as vues. » Ce
hélas ! qu’une
promesse,
bien
Dors
atro-
n’est,
une
lité financière
et industrielle,
par -esprit de classe ou par esprit
de lucre, a, dans notre démocra
tie, conduit le jeu défaitiste.
Elle eût souffert de la chute de
Hitler et de Mussolini, qu’elle
considère, bien à tort, selon moi,
comme le palladium de la conser
vation sociale. Elle trouva même
quelques juifs pour appuyer son
effort, des juifs aussi imprudents
promesse que l’avenir peut dé
mentir. Le certain est qu’il a ren
du aux Allemands presque tout
ce que celui qui repose sous
l’Arc de Triomphe les avait obli
gés à restituer, qu’il a effacé le
mot « Droit » que celui-ci avait
considéré comme sacré, pour le
quel il a sacrifié son existence...
Au moins, président Daladier,
découragez les initiatives des fols
qui veulent changer en victoire
française la victoire allemande
que ceux
qui, en Allemagne,
soutinrent le nazisme... Je ne
m’attends pas que Daladier se
rende aux raisons
que je lui
donne pour l’inciter à démission ¬
ner. Il entend jouir de sa popu
larité. Professeur d’histoire, il
devrait savoir, pourtant, qu’il
n’est pas de popularité durable
fondée sur l’illusion. Pourquoi,
de Munich,
notamment,
ne permettez pas,
qu’il y ait à Paris
une rue du 30-septembre, comme
il y en aura certainement une à
Berlin. N’oubliez pas que les
Tchécoslovaques furent nos fi
dèles alliés, que, jusqu’au dernier
jour, vous leur avez promis l’as
sistance de la France et que c’est
aujourd’hui jour de deuil pour
eux. »
L’idée est venue à quelques amis et à moi-même de fonder le
groupe des résistants de 1938. Il ne sera pas très nombreux ; mais il
sera impossible, à tout le moins, de ranger ses membres parmi les
prévoyants du passé. Ils furent à temps clairvoyants, ils crurent, le
30 septembre 1938, qu’il était encore possible d’arrêter la guerre que
poursuivaient Hitler, Mussolini et Hiro Hito, avant quelle atteignît
la France, tout en regrettant qu’on ne T eût pas arrêtée le 7 mars-
1936, alors qu’il était facile de le faire. En dépit de leur âge, ils se
sont toujours efforcés de ne pas se laisser dépasser par les événe
ments, contrairement à l’opinion de Jean Piot, leader de l’Aurore.
Drôle d’article, vraiment, le dernier article de celui-ci ! Il écrit :
Si l’organisation syndicale mondiale, a dit Sir Walter Citrine, dé
légué des Trade-Unions britanniques, s'engage dans le labyrinthe de la
politique, elle se désagrégera et se perdra.
Emile Buré l’approuve. Mais Walter Citrine et Emile Buré sont
des gens de mon âge, et même mes aînés. Et j’ai l’impression qu’ils
sont — eussent-ils raison en théorie, en doctrine — dépassés par les
événements.
Si je comprends bien, Jean Piot, la pratique aujourd’hui se doit
de nier et la théorie et la raison. Julien Benda, à vos pièces !.. Ce
n’est pas seulement le byzantinisme littéraire qui menace la France,
c’est le byzantinisme politique. Une certaine école politique, que
j’appellerai kaléidoscopique, vise à remuer notre pays au hasard des
inspirations individuelles ou partisanes, sans tenir compte de l’expé
rience et de l’intelligence, en déclarant philosophiquement ; « On
verra bien ce que ça donnera » Je vais vous le dire, moi, Jean Piot,
ce que ça donnera, puisque vous ne le savez pas ; du sang, encore dû.
sang, toujours du sang.
faire grève ?
Chaque jour, le déséquilibre appa
raît plus flagrant entre les traite
ments et le coût de la vie. Aussi cer
taines catégories de Français voient-
elles leurs ressources s’amenuiser.
Cela est vrai particulièrement pour
les policiers de la Sûreté nationale,
qui veulent voir leurs traitements
s’aligner avec ceux de leurs collè
gues parisiens. Même, au cours d’une
réunion, les commissaires de la Sû
reté nationale de la région de Paris
ont voté une motion mettant en de
meure leur bureau syndical d’envi-
sager les solutions les plus extrêmes
si le problème des traitements ne re
cevait pas de solution avant le 20 oc
tobre.
Si l’ordre de grève est donné, il
sera suivi et affectera 100.000 fonc
tionnaires.
Le 20 octobre se trouvant la veille
du referendum et des élections gé
nérales, il est fort probable qu’une
prolongation de délai puisse être envi
sagée.
L’ORDRE
Directeur politique
Emile BURÉ
Rédaction, Administration : 31, Rue Tronchet
Publicité : 36, Rue Tronchet
Anjou 86-40 — 4 lignes
Après 21 heures : Gutenberg 95-66
LE CONSEIL DES CINQ NE DESARME PAS
L’éviction de la France des discussions
sur les Balkans semble bien définitive
Aux urnes
PAS D’ABSTENTIONS !
Ce soir, 1410 nouveaux élus
Aujourd’hui, second et dernier tour
des élections cantonales: 1.410 conseil
lers généraux restent en effet à dési-
gner, 1.618 l’ayant été dimanche
nier.
On ne doit pas attendre grandes
prises de ce scrutin : les jeux
faits. Les tendances manifestées
du premier tour ne pourront que
der-
sur-
sont
lors
s’af-
firmer. La « discipline républicaine »
va jouer dans la plupart des départe
ments en faveur du candidat le plus
favorisé des communistes, socialistes
et radicaux.
Sauf en de
tel le Var —
communiste et
tomatiquement.
rares départements —
le désistement mutuel
socialiste 8’est fait au-
Quant aux radicaux,
ils bénéficient en principe aussi de la
tactique — de même qu’ils l’appliquent
— C’est ainsi que M. Albert Sarraut
vient de se retirer, dans l’Aude, au
profit du candidat socialiste. Mais en
ce qui les concerne, une condition sup
plémentaire est souvent requise : ils
doivent se montrer purs de toute com
promission avec la droite et avec Vi
chy. A Clermont-Ferrand, par exem
ple, c’est M. Mabrut, député socialiste,
arrivant en seconde position derrière
le conseiller sortant, radical, qui bé
néficie du désistement communiste.
Le M.U.R. applique strictement les
consignes des gauches. L’U.D.S.R., elle,
estime qu’en dehors de danger réac
tionnaire menaçant, c’est en faveur des
partisans du « oui » « oui » pour le
referendum qu il conviendra de se pro
noncer. Le M.R.P., qui se présentera
avec le même programme qu’au pre-
LE RICHELIEU”
HEURTE UNE MINE
mais n'en continue
pas moins sa route
Le cuirassé français « Richelieu »,
de 35.000 tonnes-Washington, alors
qu’il gagnait Saigon pour y protéger
le débarquement de troupes britan
niques de renfort, à heurté une mine
magnétique qui a fait explosion à la
hauteur de la tourelle 1. Grâce à
son compartimentage extrêmement
serré et à la solidité de sa construc
tion, seul un léger enfoncement de
la coque a pu être décelé. Le « Ri
chelieu » a continué sa route, ne ces
sant de suivre son matelot d’avant.
Le roi Léopold en Suisse
Berne.
La radio suisse annonce
que le roi Léopold de Belgique, se
rendant à Genève, est entré sur le
territoire de la Confédération (P.F.A.)
Protestation américaine
à Buenos-Aires
New-York.
Le représentant des
Etats-Unis en Argentine a été chargé
d’adresser une protestation au gouver
nement Farrell, au sujet de la récente
mesure interdisant l’expéditon de tou
tes les dépêches à destination de l’é
tranger.
LE GENERAL DE GAULLE
assiste à la séance de clôture
du congrès de l’Enseignement
Hier matin s’est tenue la séance de
clôture du congrès de la Ligue de
renseignement.
Placée sous la présidence de M. Ca
pitant, ministre de l’Education natio
nale, cette séance, qui s’est déroulée
en présence du général de Gaulle et
de MM. Pineau et Soustelle, respective
ment ministres du Ravitaillement et de
l’Information, a débuté par un exposé
de M. Albert Bayet. /
Ce dernier, président de la Ligue,
retraça son histoire et ses luttes.
« Ce que nous demandons, conclut-il,
c’est justice pour l’idéal que nous re
présentons, idéal que l’on a tenté de
salir et que Vichy et les Allemaands
ont si violemment attaqué parce qu’il
représentait la République et la
liberté. »
A midi, enfin, salué par la « Mar
seillaise » , le général de Gaulle fai-
sait son entrée et entendit en premier
lieu le rapport général du congrès et
une courte allocution de M. Smelten,
président de la Ligue belge de rensei
gnement, qui dit au président du gou
vernement la gratitude à son égard
du peuple belge.
M. Capitant prit
souligna l’intérêt
général de Gaulle
rapports entre la
nement.
ensuite la parole et
de la présence du
et définit ensuite les
Ligue et le gouver-
Cette fois nous
donner tort à M.
sommes obligés de
Molotov de vouloir
Après la libération, les Allemands
avaient parachuté en France
quatre-vingt-quinze de leurs agents
Les services de la Surveillance du
territoire ont révélé hier comment
ils ont traqué et arrêté les espions
et agents allemands qui avaient été
parachutés au lendemain de la libé
ration.
Les miliciens, membres du P.P.F.
et collaborateurs qui le désiraient,
pouvaient entrer dans des écoles spé
ciales qui fonctionnaient en Allema
gne. Les nazis voulaient saboter l’œu
vre du gouvernement de Gaulle et
ne se contentaient pas de former des
terroristes, les cours portaient sur
toutes les formes de la propagande
et du sabotage économique et politi-
que. Les professeurs étalent pour la
plupart officiers dans la Werhmacht.
Les élèves, qui étaient au nombre de
500, d’après l’enquête de la Sûreté,
travaillaient deux mois dans ces
étranges écoles et leur instruction
terminée, ils étaient parachutés
le territoire français.
Quelques-uns de ces hitlériens
rent acheminés par sous-marin et
barqués sur nos côtes.
- Près de la moitié de ces agents
sur
fu-
dé-
al-
lemands ont été arrêtés. Les services
spéciaux alliés qui ont collaboré avec
notre Sûreté ont également décou-
vent un certain nombre de ces es-
pic ns. Le plus grand nombre d’en
tre eux s’étaient infiltrés dans les
convois de rapatriés.
Les services d’espionnage allemands
firent effectuer trente et un parachu
tages à partir du mois de décembre
1944 La Sûreté donna aussitôt la
chasse à ces traîtres. Car ils étaient
presque tous Français ces saboteurs
et ces espions.
Ils furent jetés sur notre territoire
par équipes de deux ou trois. Les po
liciers français ont récapitulé devant
nous, hier après-midi, le travail qu’ils
ont effectué depuis un an. Les résul
tats sont concluants : sur les 95 mi
liciens ou fascistes parachutés, 90 ont
été arrêtés.
Parmi ces individus qui attendent
d’être jugés, se trouve le lieutenant
de vaisseau Platon, fils de l’amiral.
Cet officier de marine avait quitté
la France à la suite de ses amis na
zis. Il se spécialisa dans une école,
lui aussi, et fut parachuté au mois
de mars 1945, dans la région de Sens.
Il était chargé d’un travail « d’ac
tion politique » pour lequel il devait
recevoir d’autres instructions. Le lieu
tenant de vaisseau Platon réussit à
se cacher et avait essayé de régula
riser sa situation. Il voulut même
Puis le général de Gaulle se leva
et proponça ‘une courte allocution
qu’il conclut ainsi :
«La Ligue • française de l’enseigne-
ment reparaît. Elle a reparu tout na
turellement avec la République. Elle a
reparu avec son esprit, avec l’esprit de
tolérance, • avec l’esprit de libération,
de la fraternité qui l’animait au mo
ment même où elle se fondait, qui l’a
soutenue dans son œuvre et dans ses
combats pour l’école publique, qui l’a
maintenue dans les pires épreuves du
côté où il fallait, c’est-à-dire du côté
de la résistance, et oui, maintenant,
inspire tous ses membres dans leur
tâche grandiose et mignifique d’édu-
ration de la jeunesse française. Et puis-
que l’honneur, aujourd’hui, se mesure
aux services que l’on rend a la renais
sance' de la patrie, de li liberté, de
la justice, au nom du gouvernement de
la République, je dis : honneur à la
Ligue française de renseignement. »
la
IL FAUT CREER
Fédération syndicale
mondiale
déclare M. L. Jouhaux
partir en mission officielle
dochine. Sans doute pour
le même métier avec les
pour ITn-
continuer
Japonais !
Ch.-Ch.
(Lire la suite en deuxième page)
C’est le discours de M. Jouhaux qui
a été l’événement marquant de la
journée d’hier à la conférence syndi
cale mondiale.
Le secrétaire général de la C.Ç.T.
française s’est déclaré un partisan ar
dent de la F.S.M.
« La classe ouvrière a gagné le droit
de parler. Elle a gagné davantage.
Elle a gagné le droit de s’occuper des
grands problèmes économiques et so
ciaux. Il faut créer la fédération
syndicale mondiale pour qu’enfin l’or
ganisme international puisse parler au
nom des travailleurs de tous les pays. »
Puis il ajoute :
« Il faut que la classe ouvrière soit
présente à la conférence de la paix
dans les délégations de chaque pays.
Mais il faut aussi qu’elle y soit pré
sente par le canal de la fédération
syndicale mondiale. »
mier tour, peut
voix.
Mais il est un
les partis sont
donc profiter de ses
point sur lequel tous
d’accord : c’est pour
recommander aux électeurs de venir
plus nombreux aux urnes que diman
che dernier. Les organisations de droi-
te se plaignent, en effet,
les abstentionnistes sont
breux parmi leurs fidèles
adversaires, tandis que M.
cite le cas d’une commune
de ce que
plus nom-
que leurs
Léon Blum
où, du fait
des non-votants, le chiffre des voix
obtenues au premier tous par le can
didat socialiste est très inférieur à ce
lui des membres de la section locale
du parti !
excidre les Français des réunions sé
rieuses. En un jour où Anglais et
Américains rivalisaient de pessimis
me, officiels et agences françaises
sont venus nous annoncer que tout
allait bien à Londres. Le porte-pa
role de notre délégation a poussé
même la courtoisie jusqu’à faire en
dosser à la France la responsabilité
des quelques difficultés rencontrées
par les membres de la conférence.
Voici ses déclarations :
« Les événements internationaux
ont donné, dans l’établissement de la
paix, un rôle prédominant à cinq
pays : la Grande-Bretagne, l’Union
Soviétique, les Etats-Unis, la Chine
et la France. Et c’est la première
fols que ces cinq pays sont appelés
à travailler ensemble à une aussi
lourde tâche.
« Comment s’étonner qu’au pre
mier contact, des divergences de vues
se soient manifestées ? La confron
tation des thèses et des intérêts en
présence est faite. Elle permettra de
travailler demain sur des bases sai
nes. Désormais, chacun connaîtra de
façon précise le point de vue de ses
alliés, et ôn pourra effectuer en plei-
nus à exiger que la Conférence de
Londres refasse l’Europe en moins de
trois semaines.
Mais qui demandait donc qu’on
« refasse l’Europe » à Londres en
trois semaines et même plus ? Ce que
nous espérions c’était de ne pas nous
enfoncer un peu plus dans le désor
dre. Or, suivons le bilan établi par
ce même expert et jugeons :
« En ce qui concerne les traités de
paix, pour la Bulgarie, la Roumanie
et . la Hongrie, les résultats sont né
gatifs. Le Conseil s’est heurté à une
question préjudicielle, celle de la lé-
gitimité des gouvernements de Sofia,
Bucarest et Budapest. Les trois points
principaux, frontières, désarmement
et réparations n’ont pratiquement
pas été élucidés. C’est essentiellement
à l’Union soviétique, à la Grande-
Bretagne et aux Etats-Unis que re
vient le soin de trancher cette ques
tion préjudicielle. »
M. Molotov doit rendre grâce à no
tre expert qui explique pour lui que
la France, assimilée en cela à la Chi
ne, n’a pas à s’occuper des questions
balkaniques.
Continuons la lecture du bilan :
Pour l’Italie, les problèmes de la
ne connaissance de cause
nagements nécessaires. »
les amé-
Ce que disent
les chiffres
Avantage aux «oui-oui»
Le ministère de l’Intérieur vient de
communiquer une statistique don
nant pour l’ensemble du territoire,
sauf la Seine et la Haute-Vienne, le
chiffre des voix obtenues par les
différents partis au premier tour des
élections cantonales.
(Lire la suite en deuxième page)
En somme, les « Trois » étaient
parfaitement d’accord
lorsqu’ils
étaient à trois, mais l’intrusion de la
France et de la Chine dans leurs
conseils a tout changé. L’exposé des
thèses et des intérêts des nouveaux
venus a occupé la trentaine de séan
ces qu’ont tenues les ministres. Des
divergences en sont nées. Désormais,
le terrain pourra être déblayé par les
experts. MM. Molotov, Byrnes et Be-
vin doivent une fière chandelle à no
tre diplomate qui leur donne aussi
galamment la formule d’explication
à. fournir dans le communiqué final
destiné à couvrir leurs dissentiments.
Mais ce n’est pas tout. Nos servi
ces sont complets. Notre diplomatie
est aidée par son agence de presse,
qui nous dit doctement que. le traité
de Westphalie ayant mis cinq ans à
être établi, nous aurions été malve-
MERCREDI, EN HAUTE COUR
procès de Darnand
le chef des tueurs de la Milice
La Haute Cour se réunira à nouveau
mercredi pour le procès de Joseph
Darnand, qui, à l’instar de Himmler,
organisa en France une véritable Ges
tapo : la Milice. C’est l’avocat général
Carrive qui occupera le siège du mi
nistère public, tandis que Mes Collin
et Georgie-Myers prendront la défen
se de l’accusé. Les débats sont prévus
pour une seule audience.
Joseph Darnand ! Tout le monde se
souvient de son allure de bête traquée
lorsqu’au procès Pétain il fut entendu
comme témoin. Massif, une carrure de
déménageur (c’était sa profession à
Nice), le cou dans les épaules, ce lut
teur de champs de foire a un passé
militaire des plus glorieux. En 1914-
1918 il ne récolta pas moins de neuf
citations et pendant la « drôle de
guerre », à la tête d’un groupe franc,
il se couvrit de gloire. Peut-être cher-
cha-t-ii à rallier la France Libre lors
des journées de juin 1940 ? De toute
façon son passé politique (militant
d’ « Action Française » et ancien ca-
goulard) devait prendre le pas sur son
patriotisme.
Membre du P. P. F. pendant l’occu
pation. Darnand fonda le S. O. L., qui
allait opposer en novembre 42 la ré
sistance la plus sérieuse au débarque-
quement anglo-américain en Afrique
du Nord. Waffen S. S., il prêta ser
ment à Hitler, mais ne parvint jamais
qu’à enrôler une centain e d’individus
louches et sans aveu.
Il fut plus heureux lorsqu’il trans
forma le S. O. L. en milice. Camouflé
derrière sa prétendue action sociale, la
Milice, à l’instigation de son chef,
joua le rôle atroce que l’on sait.
« Continuez la répression, soyez sans
pitié », ordonnait-il. Et ce furent les
massacres. En récompense, Darnand
était nommé, en mai 1944, secrétaire
général au maintien de l’ordre.
Prétendant être subventionné par
le gouvernement, Darnand et ses mi
liciens emportèrent 300 millions d’or
en Allemagne provenant du pillage
de la Banque de France de Belfort.
Ct or servit à payer les soudards de
l aMilice repliés à Sigmaringen.
Aujourd’hui, l’ancien déménageur
prétend qu’il ignorait tout des atroci
tés de ses tueurs !
Un détail : la veille de son procès,
mardi, la Cour de Justice de la Seine
jugera sa maitresse en lever de rideau.
E. VIGOUROUX.
frontière
parafions
suspens.
avec la Yougoslavie, des ré-
et des colonies restent en
(SUITE
EN DERNIERE HEURE)
Les Cinq honoreront
en palabrant
le Jour du Seigneur
Voici le communiqué publié hier
par le Conseil des Cinq :
« Le Conseil des ministres des Af
faires étrangères s’est réuni aujour
d’hui deux fois, M. Molotov présidant
dans la matinée et le Dr Wang, dans
la soirée.
« Les deux réunions ont été consa
crées à l’examen des protcoles de la
présente session du Conseil. La pro
chaine réunion aura lieu demain di
manche après-midi à trois heures ».
La Hollande désire participer
à l’occupation de l’Allemagne
Londres. — Le ministre de la Guerre
des Pays-Bas a fait savoir que la Hol
lande entendait participer à l’occupa-
Hon de l’Allemagne avec deux divi
sions. « La Hollande ne peut laisser la
lourde tâche d’occuper ‘Allemagne en
tièrement à la charge des grandes puis-
sances, car ‘occupation est un devoir
international et un honneur », a-t-il
déclaré.
L’EFFERVESCENCE EN EXTRÊME-ORIENT
UNE «PROCESSION»
qui n’est pas catholique
LE TORTIONNAIRE
BEAUVAL EST
CONDAMNE A MORT
Troisième et dernière audience du
procès Beauval. Le commissaire du
gouvernement Bouchard demande
la
peine de mort. Comme le défenseur
Me Louis Hubert, fait le procès des
Cours de justice, juridictions d’excep
tion, et les assimile aux juridictions
de Vichy qui étaient illégales, le pré
sident Gaché proteste avec énergie :
— C’est infamant. -L’ordonnance qui
a constitué les Cours de justice était
parfaitement régulière.
Finalement, Beauval, qui n’aura au
cune réaction, est condamné à mort
et ses biens seront confisqués.
ET LA FAMILLE
II. - AUX ÉTATS-UNIS
Une politique “humaine”, mais qui tient
peu compte des données démographiques
par François CHARBONNIER.
Nous l’écrivions hier : ce n’est pas
seulement en Indochine que les Japo
nais ont semé le trouble ; c’est dans
toute la « sphère de coprospérité de
l’Asie orientale ». On s’en aperçoit
une fois de plus par l’exemple des
Indes néerlandaises, où une agitation
nationaliste se fait également sentir.
D’après les déclarations du général
britannique sir Philip Christinson, les
Indonésiens auraient juré de s’opposer
à un débarquement allié si les forces
d’occupation comprenaient des troupes
hollandaises.
Sir Philip Christinson, d’ailleurs,
vient d’être nommé commandant en
chef allié aux Indes néerlandaises ;
il préside aux débarquements de
troupes britanniques et indiennes qui
sont en cours à Batavia, et il a affir
mé que le seul but des forces bri
tanniques était de venir en aide aux
anciens prisonniers de guerre et de
désarmer les Japonais. sans se mêler
en rien des problèmes de politique
intérieure. On enregistrera avec inté
rêt cette déclaration, qui corrobore
et confirme l’attitude des Anglais en
Indochine.
Mais l’effort même que sont obligés
de faire nos alliés, en attendant que
nos troupes soient à pied d’œuvre,
montre l’étendue du mal : c’est, com
me le dit joliment le correspondant
de l’ « Associated Press » à Singa
pour, « une véritable procession pour
mouvements qui n’ont pour but que
d’évincer les Européens. C’est très
exactement aussi la - raison pour la
quelle il importe au premier chef
que nos forces militaires et nos ca
dres administratifs rétablissent au
plus tôt à la fois leur autorité et
notre prestige. Et c’est pourquoi, en
fin, nos alliés britanniques, quelque
service que nous rende leur aide,
ont intérêt à faciliter, dans une beau
coup plus large mesure que par le
passé, le transport de nos régiments.
Claude VIVIERES.
Protestation
française
à Tchounking
la liberté » dans
trême-Orient.
Il conviendrait
ce qu’on entend
tous les pays d’Ex-
d’ailleurs de savoir
par « liberté ». En
l’occurrence, c’est l’étiquette commo
de qui recouvre les ambitions ou les
intérêts des agitateurs. Car, enfin,
pour prendre l’exemple de l’Indochi
ne, qui nous touche directement, il
n’est que de lire la déclaration pu
bliée par le gouvernement français le
24 mars dernier pour voir que la
France ne refuse aux Indochinois au
cune des libertés auxquelles ils peu
vent prétendre.
C’est très exactement la raison pour
laquelle il est impossible d’admettre
que se généralisent et s’étendent, sous
prétexte d’ « indépendance », des
Le gouvernement français a chargé
son représentant à Tchounking d’ef
fectuer des démarches; auprès du gou
vernement. chinois pour attirer son at
tention. sur la situation, créée par
l’avance des troupes chinoises dans le
Laos. Dan? cette région où la popula
tion a toujours manifesté son attache
ment à la France, il n’y a pour ainsi
dire plus de Japonais et l’administra
tion française y exerce sans difficulté
son autorité. Or, une division chinoise
forte de 16.000 hommes s’est avancée
jusqu’à Louang Prabang etd es mesu
res pour le moins surprenantes —
Claude Vivières les signalaient ici
l’autre jour — ont été prises par les
autorités chinoises.
Après les assurances données par M
Soung, président du Conseil chinois,
lors de son passage à Paris, O n aurait
pu croire que des incidents semblables
à ceux qui avaient provoqué l’attitude
du général Lou Han a.u Tonkin ne se
reproduiraient pas.
D. R.
FINIES LES VACANCES
Ecoliers et libraires s’arrachent les cheveux !
rez
pour
Vous me fe-
cent lignes
demain.
— Oui monsieur,
mais donnez-moi
deux points.
— Bon, alors,
apprenez-moi deux
pages d’histoire.
— Je n’en ai
pas... »
Pauvres profes
seurs, qui allez
recommencer à
éduquer trente
élèves sans livres
et sans program
mes !
Pour le moment,
de longues queues
s’étirent devant
les librairies sco
laires ou dans les
grands magasins.
Les petites filles
31 mars 1946 !
Fini, le temps de
la feuille
au panier
un dessin i
« pâté » !
jetée
après
ou un
longues listes de
livres, et les mal-
heureux
vent en
ne peu-
don ner
IL PLEUT DE L’OR
A NEW-YORK !
Une pluie d’argent tombe régu
lièrement chaque jour au centre
même de New-York. Un mystérieux
philanthrope lance du 15e ou 16 e
étage du Rockfeller Building, de 7
à 10 dollars en petite monnaie.
Depuis juillet, tous les fours, cet
te pluie d’argent tombe dans la 51e
rue. Vendredi dernier, une-centaine
de New-Yorkais se pressaient dans
la rue pour profiter de l’aubaine.
Certaines personnes y viennent ré
gulièrement et arrivent ainsi à re
cueillir jusqu’à 50 cents. — A. P.
et les
attendent
ment
leurs
et
mamans
sage-
tendent
feuilles de
tickets , comme
chez Potin, pour
recevoir la ration
de cahiers.
« Que ça ? »,
s’indigne un pe
tit garçon en re-
cevant
cahiers ;
choisit '
sement
nets.
ses neuf
et il
soigneu-
des
car-
sieur,
vez
Non,
vous
plus
mon-
droit
aux carnets, tous
vos
points sont
utilisés. »
Quatre feuilles
par Jour jusqu’au
aussi le temps
des achats de four
nitures luxueuses,
de trousses et de
cartables, dans
des magasins sen
tant le bon cuir
ou le papier frais.
Les cartables et
les trousses sont
en carton, les boi
tes de compas, les
plumes sont in
trouvables, ou à
un prix exorbi-
tant.
Dehors, un peu
partout, on vend
des cahiers au
marché noir, 50
francs pièce : pas
pour les enfants
pauvres.
Les libraires
s'arrachent les
cheveux : on bran
dit devant eux de
plus de deux ou
trois sur vingt.
Les histoires
sont Introuvables
et les éditeurs
n’en fabriqueront
pas avant la paix.
On s'embrouille
entre les program
mes de 1938, 41
et 44.
La rentrée s'an-
nonce bien,
les
J3 vont bien tra
vailler.
F.-DOMINIQUE.
Demain, métro
jusqu’à 1 h. 15
.et alignement des horaires
des trains de banlieue
Le service du Métropolitain étant
prolongé jusqu’à 1 h. 15 (arrivée aux
terminus dé’ la dernière rame), les ho
raires des trains de banlieue, au dé
part des gares de Paris seront prolon
gés au delà de zéro heure (nuit du
1er au 2 octobre).
Les voyageurs sont invités à se
renseigner dans les gares^
Il est très difficile d’étudier les
rapports de l’Etat et de la famille
aux Etats-Unis, car il n’y existe
pas de législation qui leur soit ex
clusivement consacrée : les textes
concernant ces problèmes font par
tie d’un ensemble plus vaste, dont
il est parfois malaisé de les isoler.
L’Américain moyen considérerait
comme une atteinte à ses libertés
— il est aisé de s’en persuader en
parlant de ces questions avec quel
ques-uns d’entre eux — toute im
mixtion de l’Etat, fût-ce à son
avantage, dans une affaire qui, de
son point de vue, ne regarde que
lui.
De plus, chaque Etat promulgué
ses propres lois, qui complètent,
confirment ou contredisent parfois
celles du gouvernement fédéral.
Aussi la législation diffère-t-elle
d’une région à l’autre.
C’est ainsi que les congés accor
dés aux femmes enceintes sont —
pour citer un exemple — de huit
semaines dans le Connecticut, de
six dans le Missouri et de quatre
seulement dans l’Etat de New-
York, cependant que dans la ma
jorité des autres, aucune loi n’en
précise la durée et que le soin de
la fixer est laissé à la bonne vo
lonté des employeurs.
Ce qui surprend le plus l’Euro
péen, déjà habitué — il est des ha
bitudes qui se prennent vite ! — à
la protection tutélaire de l’Etat,
c’est le peu d’avantages pécuniai
res accordés aux pères de famille.
Le principal est un avantage né
gatif : un dégrèvement d’impôts.
Il ne faudrait cependant pas croi
re pour cela que les gouvernants
de Washington se désintéressent de
la question. Mais ils ne l’envisa
gent pas sous le même angle que
nous. Dans la plupart des pays de
l’Occident, on tente de la résoudre
sur le plan matériel et c’est au
problème démographique que l’on
attachez la plus grande importance.
Les Américains se placent, tout au
contraire, sur le plan humain.
The social security act de 1935 est
la base même, en la matière, de
leur législation. Il permet d’accor
der des subventions aux Etats et
aux municipalités pour la création
et le développement d’hôpitaux et
de dispensaires pour les femmes en
ceintes et les nouveau-nés.
Il y en avait 1.800 environ en
1941, et 1.900 comtés — le comté
est une subdivision de l’Etat —
avaient organisé des services d’as
sistance aux mères avant et après
la naissance de l’enfant.
Le premier résultat de cette po
litique fut une diminution de la
mortalité infantile, qui était tombée
à 4,7 % en 1940, contre 6 % en
France à la même époque et 7.5 %
maintenant. Ajoutons que, pendant
la guerre, cette politique d’assis-
tance prit une nouvelle extension.
Un autre paragraphe du Social
security act est consacré à une
innovation inconnue en Europe jus
qu’à ce jour : l’éducation des pa
rents. La « Child Study Associa
tion of America » (Association amé
ricaine pour l’étude de l’enfant)
sert de centre directeur des recher
ches, et de nombreux groupes fé
minins consacrent leur temps et
leur activité à étudier le problème
des relations familiales.
L’acte prévoit enfin une « aide
aux enfants de l'Assistance publi
que ». Elle est accordée aux per
sonnes qui s’occupent d’eux, et le
montant en varie d’un Etat à l’au
tre. Il s’agit, d’ailleurs, d’une vé ¬
ritable pension pouvant s’élever,
pour l’aîné, à 18 dollars par mois
et de 12 pour chacun des autres
enfants.
Mais cette question n’est que se
condaire. L’important est de dé
couvrir des familles susceptibles de
donner à ces petits malheureux
l’affection dont ils ont besoin. Dif
férentes œuvres sociales — d’inspi
ration privée pour la plupart —
s’en occupent. Mais l’adoption reste
cependant la solution la meilleure.
Le nombre des enfants adoptés est,
chaque année, de près de 18.000.
C’est un trait curieux, spécifi
quement américain, et qui rappelle
à certains égards, l’adoption telle
quelle se pratiquait à Rome.
La procédure en varie selon les
Etats. Pour l’entourer de toutes les
garanties nécessaires, l’U. S. Chil-
dren’s Bureau a proposé récem
ment à leurs gouvernements un
modèle de loi, dont l’article le plus
intéressant me paraît être celui qui
prévoit une pét d’essai — si
possible d’un an —• . ans la maison
des futurs parents adoptifs.
Il existe, il est vrai, un troisième
rapide nous le montre — d’une lé
gislation familiale au sens le plus
exact du terme, mais totalement
différentes de celle que nous con
naissons.
Et pourtant, les Etats-Unis ne
sont pas un pays de forte, natalité.
Le nombre des naissances — pour
10.000 habitants — y était avant
guerre de l’ordre de 170 ou 180
chaque année. Ils. bénéficiaient bien
jusqu’à ces derniers temps d’une
immigration régulière et nombreu
se. dont la part dans l’accroisse
ment total de la population était
encore, dans la période 1921-1930,
de 15.5 %. Mais elle diminua en
suite — conséquence de la sévère
politique de contrôle suivie par le
gouvernement fédéral — et dans les
dernières années qui précédèrent le
conflit, immigration et émigration
se compensaient à peu près, avec
même un léger avantage à cette
dernière.
Il existe, c’est vrai, un troisième
facteur, d’importance capitale :
c’est le taux relativement bas de
l’indice de mortalité. Il est envi
ron de 11 0/00, ce qui donne tous
les ans un excédent de naissances
d’environ 900.000. C’est peu par
rapport à l’Union Soviétique, c’est
beaucoup si l’on compare ce chiffre
aux nôtres.
Ceci explique — d’autant plus
que le nombre des naissances est
à peu près constant — que la si
tuation ne nécessite pas l’interven-
tion plus directe de l’Etat dans un
pays où l’opinion publique lui se
rait hostile.
L’opposition entre les façons dont
ce problème de la famille est trai
té en Amérique et en Russie — et
l’on peut ajouter dans tous les .pays
d’Occident, sauf peut-être en An
gleterre — est donc fondamentale.
Elle ne réside pas seulement dans
les moyen s employés pour le ré
soudre. mais surtout dans les buts
poursuivis. Elle s’explique aisément
par des conditions matérielles en
tièrement différentes : le standard
de vie du peuple américain est
très supérieur, en moyenne, à ce
lui des autres, le pays regorge de
richesses, sa position géographique
l’a mis, jusqu’à présent, à l’abri des
invasions.
A tout cela, nous ne pouvons rien
changer... pour le moment.
(4) Voir l’« Ordre » du 26 septembre.
AU FIL DES JOURS
La licence directoriale
JEAN DE LÉTRAZ NOUS DIT...
Jean de Létraz est non seulement un auteur à succès, il est aussi
directeur du Palais-Royal vice-vrésident de l’Association des directeurs,
membre du Syndicat des directeurs de Paris, de la commission consulta
tive auprès du Comité d’organisation des spectacles, de. la commission pari
taire, et représentant des directeurs à la commission d’épuration et admi
nistrateur de la Caisse des allocations familiales et des congés payés.
A ces titres divers, nous avons interrogé M. Jean de Létraz sur la
licence directoriale. Voici sa réponse :
On lit avec surprise des articles passionnés, partiaux et mal
documentés sur cette licence.
Ceux qui refuseraient de l’accepter les yeux fermés, seraient
« suspects » ! De quoi ? De dire ce qu’ils pensent ?
Il y a si peu de gens qui ont le courage de leur opinion ! Es
sayer de-les faire taire en les traitant de « suspects », me paraît
extrêmement suspect de la part de ceux qui les accusent.
Parlons net.
Quels sont les arguments donnés par les promoteurs de la li
cence :
1° Eviter que des théâtres, comme autrefois le Vaudeville, ne
changent de destination ;
2° Supprimer les cascades de sous-locations, qui ne profitent
qu’à des intermédiaires sans vergogne ;
3° Chasser les « margoulins » des fauteuils directoriaux, que
l’on réserverait aux professionnels du. spectacle ;
4° Empêcher un directeur d’avoir des intérêts dans plusieurs
théâtres ;
5° Contrôler la valeur artistique du spectacle en général.
Tous ces motifs méritent d’être examinés avec le plus grand
intérêt, mais-..
Mais dans quelle mesure est-il nécessaire de brider l’initiative
et la liberté individuelles et de porter atteinte aux droits de pro
priété ? Voilà le fond du problème.
L’outil, forgé au nom de principes très défendables, ne ris-
que-t-il pas de servir à d’autres fins et à préparer un dirigisme
artistique qui n’a guère réussi aux régimes fascistes et qui est
contraire à l’esprit de notre légalité républicaine ?
C’est depuis 1940 et l’occupation, remarquons-le, que ce projet
de licence a pris corps- il a donné lieu à des échanges de vue que
n’ont pas ignorés certaines personnalités de la Propaganda Staffel.
Voilà qui sent tout de même un peu le roussi, comme le faisait très
justement remarquer M. Max Pavelli, dans la Dépêche de Paris.
Cette licence intéressant le sort de tous les directeurs en exer
cice, il eût été naturel, pour commencer, que toutes les chambres
syndicales de directeurs soient représentées aux réunions qui ont
abouti à l’élaboration d’un texte définitif.
Or, quoi qu’aient prétendu certains journalistes mal informés,
seul le Syndicat des directeurs de Paris a été consulté et je peux
affirmer qu’un bon nombre de nos confrères ne sont d’accord ni sur
la nécessité, ni sur les modalités d’application de cette licence-
D’autre part, et cela paraît invraisemblable, les directeurs de
music-halls, de tournées, des théâtres de province et des cabarets
artistiques dont l’existence et les intérêts sont en jeu, non seule
ment n’ont pas été invités à prendre part à la discussion, mais ne
seront même pas représentés à la commission qui sera chargée de
leur accorder ou de leur enlever la licence.
Comme je n’ai aucun intérêt personnel dans une quelconque de
ces entreprises, j’espère qu'on ne trouvera pas « suspect » la pro
testation que jé tiens à élever en faveur de ces confrères, protes
tation à laquelle tous les directeurs de Paris devraient s’associer.
Imagine-t-on un organisme professionnel où les intéressés
soient tenus à la porte, sans avoir un seul représentant pour les
défendre ? Licencedirectoriale ? Ils sont en droit de dire : licence
dictatoriale. , .
(Lire la suite en deuxième page)
| d’Emile BURÉ |
17% Année - Nouvelle Série N’ 210
2 francs
Dimanche 30 Septembre 1945
BYZANTINISME
POLITIQUE
Pour l’anniversaire de Munich
C’est l’anniversaire de la conférence de Munich, Je relis ce que
j’écrivis le 1er octobre 1938, au lendemain de la rentrée triomphale
de Daladier à Paris, qui m’avait plongé dans le désespoir. J’avais,
toùt ému encore des manifestations pacifistes de la rue auxquelles
j’avais assisté, dit en pleurant a mes collaborateurs : « A quoi bon
continuer le combat, la France a décidément le goût du suicide !
Mieux vaut fermer la maison. » Mes interlocuteurs m’avaient rap
pelé au sentiment de ma responsabilité, que je n’avais point, en
vérité, perdu, et ils m’avaient recommandé de tenir compte, en écri
vant mon éditorial, des réactions folles, mais sincères des foules, qui,
comme M. Chamberlain, croyaient que vingt années de paix et plus
leur étaient assurées. Je, fus docile à leur amicale recommandation,
comme en témoignent ces lignes, que je transcris avec quelque
émotion :
« J’ai trop le sens de l’humain
pour n’avoir pas, hier, été touché
par l’allégresse des mères qui
s’étaient séparées courageuse
ment de leurs enfants et qui vont
les retrouver joyeusement, les
horreurs de la guerre s’étant éloi
gnées. Je voudrais, comme elles,
être persuadé qu’éileS se sont
éloignées pour toujours. Mais je
manquerais d’honnêteté intellec
tuelle si je dissimulais que je de
meure en inquiétude au sujet des
accords de Munich, qu’elles ont
salués avec tant de confiance
dans leur émouvante détente sen-
timentale. Tous les peuples ne
sont pas aussi pacifiques que le
peuple français et les richesses
de notre pays, désormais sans
alliances, sont pour tenter ceux
de Berlin et de Rome, dont le
bellicisme orgueilleusement, bru
talement arboré, a déjà reçu tant
de
nach
plus
poir
dans
récompenses. Le « Drang
Osten », ne rencontrera
d’obstacle, et le dernier es-
de paix réside désormais
la bonne volonté de Hitler
et de Mussolini, dont je me per
mets de douter. »
Je ne suis pas homme à accepter de restreindre longtemps ma
pensée et, dès le 4 octobre, j’invitais Daladier à démissionner en ces
termes ;
« Le gouvernement qui est ac
tuellement indispensable à la
France n’est pas le sien, atroce
ment divisé, incapable de dresser
avec sang-froid le bilan désas
treux de notre pays, de décider
ce qu’il convient de faire pour
sauver ce qui reste de sa fortune
à l’extérieur. Il faut savoir qu’on
est au plus bas si l’on veut bien
calculer l’effort à fournir pour
remonter... Une certaine féoda-
mais pourquoi a-t-il donc voulu,
grand Dieu ! ce retour de Mu
nich en fanfare ? Au Soldat In-
connu quel discours a-t-il
pu tenir ? Il lui aura dit : «
en paix, nul ne reverra les
cités que tu as vues. » Ce
hélas ! qu’une
promesse,
bien
Dors
atro-
n’est,
une
lité financière
et industrielle,
par -esprit de classe ou par esprit
de lucre, a, dans notre démocra
tie, conduit le jeu défaitiste.
Elle eût souffert de la chute de
Hitler et de Mussolini, qu’elle
considère, bien à tort, selon moi,
comme le palladium de la conser
vation sociale. Elle trouva même
quelques juifs pour appuyer son
effort, des juifs aussi imprudents
promesse que l’avenir peut dé
mentir. Le certain est qu’il a ren
du aux Allemands presque tout
ce que celui qui repose sous
l’Arc de Triomphe les avait obli
gés à restituer, qu’il a effacé le
mot « Droit » que celui-ci avait
considéré comme sacré, pour le
quel il a sacrifié son existence...
Au moins, président Daladier,
découragez les initiatives des fols
qui veulent changer en victoire
française la victoire allemande
que ceux
qui, en Allemagne,
soutinrent le nazisme... Je ne
m’attends pas que Daladier se
rende aux raisons
que je lui
donne pour l’inciter à démission ¬
ner. Il entend jouir de sa popu
larité. Professeur d’histoire, il
devrait savoir, pourtant, qu’il
n’est pas de popularité durable
fondée sur l’illusion. Pourquoi,
de Munich,
notamment,
ne permettez pas,
qu’il y ait à Paris
une rue du 30-septembre, comme
il y en aura certainement une à
Berlin. N’oubliez pas que les
Tchécoslovaques furent nos fi
dèles alliés, que, jusqu’au dernier
jour, vous leur avez promis l’as
sistance de la France et que c’est
aujourd’hui jour de deuil pour
eux. »
L’idée est venue à quelques amis et à moi-même de fonder le
groupe des résistants de 1938. Il ne sera pas très nombreux ; mais il
sera impossible, à tout le moins, de ranger ses membres parmi les
prévoyants du passé. Ils furent à temps clairvoyants, ils crurent, le
30 septembre 1938, qu’il était encore possible d’arrêter la guerre que
poursuivaient Hitler, Mussolini et Hiro Hito, avant quelle atteignît
la France, tout en regrettant qu’on ne T eût pas arrêtée le 7 mars-
1936, alors qu’il était facile de le faire. En dépit de leur âge, ils se
sont toujours efforcés de ne pas se laisser dépasser par les événe
ments, contrairement à l’opinion de Jean Piot, leader de l’Aurore.
Drôle d’article, vraiment, le dernier article de celui-ci ! Il écrit :
Si l’organisation syndicale mondiale, a dit Sir Walter Citrine, dé
légué des Trade-Unions britanniques, s'engage dans le labyrinthe de la
politique, elle se désagrégera et se perdra.
Emile Buré l’approuve. Mais Walter Citrine et Emile Buré sont
des gens de mon âge, et même mes aînés. Et j’ai l’impression qu’ils
sont — eussent-ils raison en théorie, en doctrine — dépassés par les
événements.
Si je comprends bien, Jean Piot, la pratique aujourd’hui se doit
de nier et la théorie et la raison. Julien Benda, à vos pièces !.. Ce
n’est pas seulement le byzantinisme littéraire qui menace la France,
c’est le byzantinisme politique. Une certaine école politique, que
j’appellerai kaléidoscopique, vise à remuer notre pays au hasard des
inspirations individuelles ou partisanes, sans tenir compte de l’expé
rience et de l’intelligence, en déclarant philosophiquement ; « On
verra bien ce que ça donnera » Je vais vous le dire, moi, Jean Piot,
ce que ça donnera, puisque vous ne le savez pas ; du sang, encore dû.
sang, toujours du sang.
faire grève ?
Chaque jour, le déséquilibre appa
raît plus flagrant entre les traite
ments et le coût de la vie. Aussi cer
taines catégories de Français voient-
elles leurs ressources s’amenuiser.
Cela est vrai particulièrement pour
les policiers de la Sûreté nationale,
qui veulent voir leurs traitements
s’aligner avec ceux de leurs collè
gues parisiens. Même, au cours d’une
réunion, les commissaires de la Sû
reté nationale de la région de Paris
ont voté une motion mettant en de
meure leur bureau syndical d’envi-
sager les solutions les plus extrêmes
si le problème des traitements ne re
cevait pas de solution avant le 20 oc
tobre.
Si l’ordre de grève est donné, il
sera suivi et affectera 100.000 fonc
tionnaires.
Le 20 octobre se trouvant la veille
du referendum et des élections gé
nérales, il est fort probable qu’une
prolongation de délai puisse être envi
sagée.
L’ORDRE
Directeur politique
Emile BURÉ
Rédaction, Administration : 31, Rue Tronchet
Publicité : 36, Rue Tronchet
Anjou 86-40 — 4 lignes
Après 21 heures : Gutenberg 95-66
LE CONSEIL DES CINQ NE DESARME PAS
L’éviction de la France des discussions
sur les Balkans semble bien définitive
Aux urnes
PAS D’ABSTENTIONS !
Ce soir, 1410 nouveaux élus
Aujourd’hui, second et dernier tour
des élections cantonales: 1.410 conseil
lers généraux restent en effet à dési-
gner, 1.618 l’ayant été dimanche
nier.
On ne doit pas attendre grandes
prises de ce scrutin : les jeux
faits. Les tendances manifestées
du premier tour ne pourront que
der-
sur-
sont
lors
s’af-
firmer. La « discipline républicaine »
va jouer dans la plupart des départe
ments en faveur du candidat le plus
favorisé des communistes, socialistes
et radicaux.
Sauf en de
tel le Var —
communiste et
tomatiquement.
rares départements —
le désistement mutuel
socialiste 8’est fait au-
Quant aux radicaux,
ils bénéficient en principe aussi de la
tactique — de même qu’ils l’appliquent
— C’est ainsi que M. Albert Sarraut
vient de se retirer, dans l’Aude, au
profit du candidat socialiste. Mais en
ce qui les concerne, une condition sup
plémentaire est souvent requise : ils
doivent se montrer purs de toute com
promission avec la droite et avec Vi
chy. A Clermont-Ferrand, par exem
ple, c’est M. Mabrut, député socialiste,
arrivant en seconde position derrière
le conseiller sortant, radical, qui bé
néficie du désistement communiste.
Le M.U.R. applique strictement les
consignes des gauches. L’U.D.S.R., elle,
estime qu’en dehors de danger réac
tionnaire menaçant, c’est en faveur des
partisans du « oui » « oui » pour le
referendum qu il conviendra de se pro
noncer. Le M.R.P., qui se présentera
avec le même programme qu’au pre-
LE RICHELIEU”
HEURTE UNE MINE
mais n'en continue
pas moins sa route
Le cuirassé français « Richelieu »,
de 35.000 tonnes-Washington, alors
qu’il gagnait Saigon pour y protéger
le débarquement de troupes britan
niques de renfort, à heurté une mine
magnétique qui a fait explosion à la
hauteur de la tourelle 1. Grâce à
son compartimentage extrêmement
serré et à la solidité de sa construc
tion, seul un léger enfoncement de
la coque a pu être décelé. Le « Ri
chelieu » a continué sa route, ne ces
sant de suivre son matelot d’avant.
Le roi Léopold en Suisse
Berne.
La radio suisse annonce
que le roi Léopold de Belgique, se
rendant à Genève, est entré sur le
territoire de la Confédération (P.F.A.)
Protestation américaine
à Buenos-Aires
New-York.
Le représentant des
Etats-Unis en Argentine a été chargé
d’adresser une protestation au gouver
nement Farrell, au sujet de la récente
mesure interdisant l’expéditon de tou
tes les dépêches à destination de l’é
tranger.
LE GENERAL DE GAULLE
assiste à la séance de clôture
du congrès de l’Enseignement
Hier matin s’est tenue la séance de
clôture du congrès de la Ligue de
renseignement.
Placée sous la présidence de M. Ca
pitant, ministre de l’Education natio
nale, cette séance, qui s’est déroulée
en présence du général de Gaulle et
de MM. Pineau et Soustelle, respective
ment ministres du Ravitaillement et de
l’Information, a débuté par un exposé
de M. Albert Bayet. /
Ce dernier, président de la Ligue,
retraça son histoire et ses luttes.
« Ce que nous demandons, conclut-il,
c’est justice pour l’idéal que nous re
présentons, idéal que l’on a tenté de
salir et que Vichy et les Allemaands
ont si violemment attaqué parce qu’il
représentait la République et la
liberté. »
A midi, enfin, salué par la « Mar
seillaise » , le général de Gaulle fai-
sait son entrée et entendit en premier
lieu le rapport général du congrès et
une courte allocution de M. Smelten,
président de la Ligue belge de rensei
gnement, qui dit au président du gou
vernement la gratitude à son égard
du peuple belge.
M. Capitant prit
souligna l’intérêt
général de Gaulle
rapports entre la
nement.
ensuite la parole et
de la présence du
et définit ensuite les
Ligue et le gouver-
Cette fois nous
donner tort à M.
sommes obligés de
Molotov de vouloir
Après la libération, les Allemands
avaient parachuté en France
quatre-vingt-quinze de leurs agents
Les services de la Surveillance du
territoire ont révélé hier comment
ils ont traqué et arrêté les espions
et agents allemands qui avaient été
parachutés au lendemain de la libé
ration.
Les miliciens, membres du P.P.F.
et collaborateurs qui le désiraient,
pouvaient entrer dans des écoles spé
ciales qui fonctionnaient en Allema
gne. Les nazis voulaient saboter l’œu
vre du gouvernement de Gaulle et
ne se contentaient pas de former des
terroristes, les cours portaient sur
toutes les formes de la propagande
et du sabotage économique et politi-
que. Les professeurs étalent pour la
plupart officiers dans la Werhmacht.
Les élèves, qui étaient au nombre de
500, d’après l’enquête de la Sûreté,
travaillaient deux mois dans ces
étranges écoles et leur instruction
terminée, ils étaient parachutés
le territoire français.
Quelques-uns de ces hitlériens
rent acheminés par sous-marin et
barqués sur nos côtes.
- Près de la moitié de ces agents
sur
fu-
dé-
al-
lemands ont été arrêtés. Les services
spéciaux alliés qui ont collaboré avec
notre Sûreté ont également décou-
vent un certain nombre de ces es-
pic ns. Le plus grand nombre d’en
tre eux s’étaient infiltrés dans les
convois de rapatriés.
Les services d’espionnage allemands
firent effectuer trente et un parachu
tages à partir du mois de décembre
1944 La Sûreté donna aussitôt la
chasse à ces traîtres. Car ils étaient
presque tous Français ces saboteurs
et ces espions.
Ils furent jetés sur notre territoire
par équipes de deux ou trois. Les po
liciers français ont récapitulé devant
nous, hier après-midi, le travail qu’ils
ont effectué depuis un an. Les résul
tats sont concluants : sur les 95 mi
liciens ou fascistes parachutés, 90 ont
été arrêtés.
Parmi ces individus qui attendent
d’être jugés, se trouve le lieutenant
de vaisseau Platon, fils de l’amiral.
Cet officier de marine avait quitté
la France à la suite de ses amis na
zis. Il se spécialisa dans une école,
lui aussi, et fut parachuté au mois
de mars 1945, dans la région de Sens.
Il était chargé d’un travail « d’ac
tion politique » pour lequel il devait
recevoir d’autres instructions. Le lieu
tenant de vaisseau Platon réussit à
se cacher et avait essayé de régula
riser sa situation. Il voulut même
Puis le général de Gaulle se leva
et proponça ‘une courte allocution
qu’il conclut ainsi :
«La Ligue • française de l’enseigne-
ment reparaît. Elle a reparu tout na
turellement avec la République. Elle a
reparu avec son esprit, avec l’esprit de
tolérance, • avec l’esprit de libération,
de la fraternité qui l’animait au mo
ment même où elle se fondait, qui l’a
soutenue dans son œuvre et dans ses
combats pour l’école publique, qui l’a
maintenue dans les pires épreuves du
côté où il fallait, c’est-à-dire du côté
de la résistance, et oui, maintenant,
inspire tous ses membres dans leur
tâche grandiose et mignifique d’édu-
ration de la jeunesse française. Et puis-
que l’honneur, aujourd’hui, se mesure
aux services que l’on rend a la renais
sance' de la patrie, de li liberté, de
la justice, au nom du gouvernement de
la République, je dis : honneur à la
Ligue française de renseignement. »
la
IL FAUT CREER
Fédération syndicale
mondiale
déclare M. L. Jouhaux
partir en mission officielle
dochine. Sans doute pour
le même métier avec les
pour ITn-
continuer
Japonais !
Ch.-Ch.
(Lire la suite en deuxième page)
C’est le discours de M. Jouhaux qui
a été l’événement marquant de la
journée d’hier à la conférence syndi
cale mondiale.
Le secrétaire général de la C.Ç.T.
française s’est déclaré un partisan ar
dent de la F.S.M.
« La classe ouvrière a gagné le droit
de parler. Elle a gagné davantage.
Elle a gagné le droit de s’occuper des
grands problèmes économiques et so
ciaux. Il faut créer la fédération
syndicale mondiale pour qu’enfin l’or
ganisme international puisse parler au
nom des travailleurs de tous les pays. »
Puis il ajoute :
« Il faut que la classe ouvrière soit
présente à la conférence de la paix
dans les délégations de chaque pays.
Mais il faut aussi qu’elle y soit pré
sente par le canal de la fédération
syndicale mondiale. »
mier tour, peut
voix.
Mais il est un
les partis sont
donc profiter de ses
point sur lequel tous
d’accord : c’est pour
recommander aux électeurs de venir
plus nombreux aux urnes que diman
che dernier. Les organisations de droi-
te se plaignent, en effet,
les abstentionnistes sont
breux parmi leurs fidèles
adversaires, tandis que M.
cite le cas d’une commune
de ce que
plus nom-
que leurs
Léon Blum
où, du fait
des non-votants, le chiffre des voix
obtenues au premier tous par le can
didat socialiste est très inférieur à ce
lui des membres de la section locale
du parti !
excidre les Français des réunions sé
rieuses. En un jour où Anglais et
Américains rivalisaient de pessimis
me, officiels et agences françaises
sont venus nous annoncer que tout
allait bien à Londres. Le porte-pa
role de notre délégation a poussé
même la courtoisie jusqu’à faire en
dosser à la France la responsabilité
des quelques difficultés rencontrées
par les membres de la conférence.
Voici ses déclarations :
« Les événements internationaux
ont donné, dans l’établissement de la
paix, un rôle prédominant à cinq
pays : la Grande-Bretagne, l’Union
Soviétique, les Etats-Unis, la Chine
et la France. Et c’est la première
fols que ces cinq pays sont appelés
à travailler ensemble à une aussi
lourde tâche.
« Comment s’étonner qu’au pre
mier contact, des divergences de vues
se soient manifestées ? La confron
tation des thèses et des intérêts en
présence est faite. Elle permettra de
travailler demain sur des bases sai
nes. Désormais, chacun connaîtra de
façon précise le point de vue de ses
alliés, et ôn pourra effectuer en plei-
nus à exiger que la Conférence de
Londres refasse l’Europe en moins de
trois semaines.
Mais qui demandait donc qu’on
« refasse l’Europe » à Londres en
trois semaines et même plus ? Ce que
nous espérions c’était de ne pas nous
enfoncer un peu plus dans le désor
dre. Or, suivons le bilan établi par
ce même expert et jugeons :
« En ce qui concerne les traités de
paix, pour la Bulgarie, la Roumanie
et . la Hongrie, les résultats sont né
gatifs. Le Conseil s’est heurté à une
question préjudicielle, celle de la lé-
gitimité des gouvernements de Sofia,
Bucarest et Budapest. Les trois points
principaux, frontières, désarmement
et réparations n’ont pratiquement
pas été élucidés. C’est essentiellement
à l’Union soviétique, à la Grande-
Bretagne et aux Etats-Unis que re
vient le soin de trancher cette ques
tion préjudicielle. »
M. Molotov doit rendre grâce à no
tre expert qui explique pour lui que
la France, assimilée en cela à la Chi
ne, n’a pas à s’occuper des questions
balkaniques.
Continuons la lecture du bilan :
Pour l’Italie, les problèmes de la
ne connaissance de cause
nagements nécessaires. »
les amé-
Ce que disent
les chiffres
Avantage aux «oui-oui»
Le ministère de l’Intérieur vient de
communiquer une statistique don
nant pour l’ensemble du territoire,
sauf la Seine et la Haute-Vienne, le
chiffre des voix obtenues par les
différents partis au premier tour des
élections cantonales.
(Lire la suite en deuxième page)
En somme, les « Trois » étaient
parfaitement d’accord
lorsqu’ils
étaient à trois, mais l’intrusion de la
France et de la Chine dans leurs
conseils a tout changé. L’exposé des
thèses et des intérêts des nouveaux
venus a occupé la trentaine de séan
ces qu’ont tenues les ministres. Des
divergences en sont nées. Désormais,
le terrain pourra être déblayé par les
experts. MM. Molotov, Byrnes et Be-
vin doivent une fière chandelle à no
tre diplomate qui leur donne aussi
galamment la formule d’explication
à. fournir dans le communiqué final
destiné à couvrir leurs dissentiments.
Mais ce n’est pas tout. Nos servi
ces sont complets. Notre diplomatie
est aidée par son agence de presse,
qui nous dit doctement que. le traité
de Westphalie ayant mis cinq ans à
être établi, nous aurions été malve-
MERCREDI, EN HAUTE COUR
procès de Darnand
le chef des tueurs de la Milice
La Haute Cour se réunira à nouveau
mercredi pour le procès de Joseph
Darnand, qui, à l’instar de Himmler,
organisa en France une véritable Ges
tapo : la Milice. C’est l’avocat général
Carrive qui occupera le siège du mi
nistère public, tandis que Mes Collin
et Georgie-Myers prendront la défen
se de l’accusé. Les débats sont prévus
pour une seule audience.
Joseph Darnand ! Tout le monde se
souvient de son allure de bête traquée
lorsqu’au procès Pétain il fut entendu
comme témoin. Massif, une carrure de
déménageur (c’était sa profession à
Nice), le cou dans les épaules, ce lut
teur de champs de foire a un passé
militaire des plus glorieux. En 1914-
1918 il ne récolta pas moins de neuf
citations et pendant la « drôle de
guerre », à la tête d’un groupe franc,
il se couvrit de gloire. Peut-être cher-
cha-t-ii à rallier la France Libre lors
des journées de juin 1940 ? De toute
façon son passé politique (militant
d’ « Action Française » et ancien ca-
goulard) devait prendre le pas sur son
patriotisme.
Membre du P. P. F. pendant l’occu
pation. Darnand fonda le S. O. L., qui
allait opposer en novembre 42 la ré
sistance la plus sérieuse au débarque-
quement anglo-américain en Afrique
du Nord. Waffen S. S., il prêta ser
ment à Hitler, mais ne parvint jamais
qu’à enrôler une centain e d’individus
louches et sans aveu.
Il fut plus heureux lorsqu’il trans
forma le S. O. L. en milice. Camouflé
derrière sa prétendue action sociale, la
Milice, à l’instigation de son chef,
joua le rôle atroce que l’on sait.
« Continuez la répression, soyez sans
pitié », ordonnait-il. Et ce furent les
massacres. En récompense, Darnand
était nommé, en mai 1944, secrétaire
général au maintien de l’ordre.
Prétendant être subventionné par
le gouvernement, Darnand et ses mi
liciens emportèrent 300 millions d’or
en Allemagne provenant du pillage
de la Banque de France de Belfort.
Ct or servit à payer les soudards de
l aMilice repliés à Sigmaringen.
Aujourd’hui, l’ancien déménageur
prétend qu’il ignorait tout des atroci
tés de ses tueurs !
Un détail : la veille de son procès,
mardi, la Cour de Justice de la Seine
jugera sa maitresse en lever de rideau.
E. VIGOUROUX.
frontière
parafions
suspens.
avec la Yougoslavie, des ré-
et des colonies restent en
(SUITE
EN DERNIERE HEURE)
Les Cinq honoreront
en palabrant
le Jour du Seigneur
Voici le communiqué publié hier
par le Conseil des Cinq :
« Le Conseil des ministres des Af
faires étrangères s’est réuni aujour
d’hui deux fois, M. Molotov présidant
dans la matinée et le Dr Wang, dans
la soirée.
« Les deux réunions ont été consa
crées à l’examen des protcoles de la
présente session du Conseil. La pro
chaine réunion aura lieu demain di
manche après-midi à trois heures ».
La Hollande désire participer
à l’occupation de l’Allemagne
Londres. — Le ministre de la Guerre
des Pays-Bas a fait savoir que la Hol
lande entendait participer à l’occupa-
Hon de l’Allemagne avec deux divi
sions. « La Hollande ne peut laisser la
lourde tâche d’occuper ‘Allemagne en
tièrement à la charge des grandes puis-
sances, car ‘occupation est un devoir
international et un honneur », a-t-il
déclaré.
L’EFFERVESCENCE EN EXTRÊME-ORIENT
UNE «PROCESSION»
qui n’est pas catholique
LE TORTIONNAIRE
BEAUVAL EST
CONDAMNE A MORT
Troisième et dernière audience du
procès Beauval. Le commissaire du
gouvernement Bouchard demande
la
peine de mort. Comme le défenseur
Me Louis Hubert, fait le procès des
Cours de justice, juridictions d’excep
tion, et les assimile aux juridictions
de Vichy qui étaient illégales, le pré
sident Gaché proteste avec énergie :
— C’est infamant. -L’ordonnance qui
a constitué les Cours de justice était
parfaitement régulière.
Finalement, Beauval, qui n’aura au
cune réaction, est condamné à mort
et ses biens seront confisqués.
ET LA FAMILLE
II. - AUX ÉTATS-UNIS
Une politique “humaine”, mais qui tient
peu compte des données démographiques
par François CHARBONNIER.
Nous l’écrivions hier : ce n’est pas
seulement en Indochine que les Japo
nais ont semé le trouble ; c’est dans
toute la « sphère de coprospérité de
l’Asie orientale ». On s’en aperçoit
une fois de plus par l’exemple des
Indes néerlandaises, où une agitation
nationaliste se fait également sentir.
D’après les déclarations du général
britannique sir Philip Christinson, les
Indonésiens auraient juré de s’opposer
à un débarquement allié si les forces
d’occupation comprenaient des troupes
hollandaises.
Sir Philip Christinson, d’ailleurs,
vient d’être nommé commandant en
chef allié aux Indes néerlandaises ;
il préside aux débarquements de
troupes britanniques et indiennes qui
sont en cours à Batavia, et il a affir
mé que le seul but des forces bri
tanniques était de venir en aide aux
anciens prisonniers de guerre et de
désarmer les Japonais. sans se mêler
en rien des problèmes de politique
intérieure. On enregistrera avec inté
rêt cette déclaration, qui corrobore
et confirme l’attitude des Anglais en
Indochine.
Mais l’effort même que sont obligés
de faire nos alliés, en attendant que
nos troupes soient à pied d’œuvre,
montre l’étendue du mal : c’est, com
me le dit joliment le correspondant
de l’ « Associated Press » à Singa
pour, « une véritable procession pour
mouvements qui n’ont pour but que
d’évincer les Européens. C’est très
exactement aussi la - raison pour la
quelle il importe au premier chef
que nos forces militaires et nos ca
dres administratifs rétablissent au
plus tôt à la fois leur autorité et
notre prestige. Et c’est pourquoi, en
fin, nos alliés britanniques, quelque
service que nous rende leur aide,
ont intérêt à faciliter, dans une beau
coup plus large mesure que par le
passé, le transport de nos régiments.
Claude VIVIERES.
Protestation
française
à Tchounking
la liberté » dans
trême-Orient.
Il conviendrait
ce qu’on entend
tous les pays d’Ex-
d’ailleurs de savoir
par « liberté ». En
l’occurrence, c’est l’étiquette commo
de qui recouvre les ambitions ou les
intérêts des agitateurs. Car, enfin,
pour prendre l’exemple de l’Indochi
ne, qui nous touche directement, il
n’est que de lire la déclaration pu
bliée par le gouvernement français le
24 mars dernier pour voir que la
France ne refuse aux Indochinois au
cune des libertés auxquelles ils peu
vent prétendre.
C’est très exactement la raison pour
laquelle il est impossible d’admettre
que se généralisent et s’étendent, sous
prétexte d’ « indépendance », des
Le gouvernement français a chargé
son représentant à Tchounking d’ef
fectuer des démarches; auprès du gou
vernement. chinois pour attirer son at
tention. sur la situation, créée par
l’avance des troupes chinoises dans le
Laos. Dan? cette région où la popula
tion a toujours manifesté son attache
ment à la France, il n’y a pour ainsi
dire plus de Japonais et l’administra
tion française y exerce sans difficulté
son autorité. Or, une division chinoise
forte de 16.000 hommes s’est avancée
jusqu’à Louang Prabang etd es mesu
res pour le moins surprenantes —
Claude Vivières les signalaient ici
l’autre jour — ont été prises par les
autorités chinoises.
Après les assurances données par M
Soung, président du Conseil chinois,
lors de son passage à Paris, O n aurait
pu croire que des incidents semblables
à ceux qui avaient provoqué l’attitude
du général Lou Han a.u Tonkin ne se
reproduiraient pas.
D. R.
FINIES LES VACANCES
Ecoliers et libraires s’arrachent les cheveux !
rez
pour
Vous me fe-
cent lignes
demain.
— Oui monsieur,
mais donnez-moi
deux points.
— Bon, alors,
apprenez-moi deux
pages d’histoire.
— Je n’en ai
pas... »
Pauvres profes
seurs, qui allez
recommencer à
éduquer trente
élèves sans livres
et sans program
mes !
Pour le moment,
de longues queues
s’étirent devant
les librairies sco
laires ou dans les
grands magasins.
Les petites filles
31 mars 1946 !
Fini, le temps de
la feuille
au panier
un dessin i
« pâté » !
jetée
après
ou un
longues listes de
livres, et les mal-
heureux
vent en
ne peu-
don ner
IL PLEUT DE L’OR
A NEW-YORK !
Une pluie d’argent tombe régu
lièrement chaque jour au centre
même de New-York. Un mystérieux
philanthrope lance du 15e ou 16 e
étage du Rockfeller Building, de 7
à 10 dollars en petite monnaie.
Depuis juillet, tous les fours, cet
te pluie d’argent tombe dans la 51e
rue. Vendredi dernier, une-centaine
de New-Yorkais se pressaient dans
la rue pour profiter de l’aubaine.
Certaines personnes y viennent ré
gulièrement et arrivent ainsi à re
cueillir jusqu’à 50 cents. — A. P.
et les
attendent
ment
leurs
et
mamans
sage-
tendent
feuilles de
tickets , comme
chez Potin, pour
recevoir la ration
de cahiers.
« Que ça ? »,
s’indigne un pe
tit garçon en re-
cevant
cahiers ;
choisit '
sement
nets.
ses neuf
et il
soigneu-
des
car-
sieur,
vez
Non,
vous
plus
mon-
droit
aux carnets, tous
vos
points sont
utilisés. »
Quatre feuilles
par Jour jusqu’au
aussi le temps
des achats de four
nitures luxueuses,
de trousses et de
cartables, dans
des magasins sen
tant le bon cuir
ou le papier frais.
Les cartables et
les trousses sont
en carton, les boi
tes de compas, les
plumes sont in
trouvables, ou à
un prix exorbi-
tant.
Dehors, un peu
partout, on vend
des cahiers au
marché noir, 50
francs pièce : pas
pour les enfants
pauvres.
Les libraires
s'arrachent les
cheveux : on bran
dit devant eux de
plus de deux ou
trois sur vingt.
Les histoires
sont Introuvables
et les éditeurs
n’en fabriqueront
pas avant la paix.
On s'embrouille
entre les program
mes de 1938, 41
et 44.
La rentrée s'an-
nonce bien,
les
J3 vont bien tra
vailler.
F.-DOMINIQUE.
Demain, métro
jusqu’à 1 h. 15
.et alignement des horaires
des trains de banlieue
Le service du Métropolitain étant
prolongé jusqu’à 1 h. 15 (arrivée aux
terminus dé’ la dernière rame), les ho
raires des trains de banlieue, au dé
part des gares de Paris seront prolon
gés au delà de zéro heure (nuit du
1er au 2 octobre).
Les voyageurs sont invités à se
renseigner dans les gares^
Il est très difficile d’étudier les
rapports de l’Etat et de la famille
aux Etats-Unis, car il n’y existe
pas de législation qui leur soit ex
clusivement consacrée : les textes
concernant ces problèmes font par
tie d’un ensemble plus vaste, dont
il est parfois malaisé de les isoler.
L’Américain moyen considérerait
comme une atteinte à ses libertés
— il est aisé de s’en persuader en
parlant de ces questions avec quel
ques-uns d’entre eux — toute im
mixtion de l’Etat, fût-ce à son
avantage, dans une affaire qui, de
son point de vue, ne regarde que
lui.
De plus, chaque Etat promulgué
ses propres lois, qui complètent,
confirment ou contredisent parfois
celles du gouvernement fédéral.
Aussi la législation diffère-t-elle
d’une région à l’autre.
C’est ainsi que les congés accor
dés aux femmes enceintes sont —
pour citer un exemple — de huit
semaines dans le Connecticut, de
six dans le Missouri et de quatre
seulement dans l’Etat de New-
York, cependant que dans la ma
jorité des autres, aucune loi n’en
précise la durée et que le soin de
la fixer est laissé à la bonne vo
lonté des employeurs.
Ce qui surprend le plus l’Euro
péen, déjà habitué — il est des ha
bitudes qui se prennent vite ! — à
la protection tutélaire de l’Etat,
c’est le peu d’avantages pécuniai
res accordés aux pères de famille.
Le principal est un avantage né
gatif : un dégrèvement d’impôts.
Il ne faudrait cependant pas croi
re pour cela que les gouvernants
de Washington se désintéressent de
la question. Mais ils ne l’envisa
gent pas sous le même angle que
nous. Dans la plupart des pays de
l’Occident, on tente de la résoudre
sur le plan matériel et c’est au
problème démographique que l’on
attachez la plus grande importance.
Les Américains se placent, tout au
contraire, sur le plan humain.
The social security act de 1935 est
la base même, en la matière, de
leur législation. Il permet d’accor
der des subventions aux Etats et
aux municipalités pour la création
et le développement d’hôpitaux et
de dispensaires pour les femmes en
ceintes et les nouveau-nés.
Il y en avait 1.800 environ en
1941, et 1.900 comtés — le comté
est une subdivision de l’Etat —
avaient organisé des services d’as
sistance aux mères avant et après
la naissance de l’enfant.
Le premier résultat de cette po
litique fut une diminution de la
mortalité infantile, qui était tombée
à 4,7 % en 1940, contre 6 % en
France à la même époque et 7.5 %
maintenant. Ajoutons que, pendant
la guerre, cette politique d’assis-
tance prit une nouvelle extension.
Un autre paragraphe du Social
security act est consacré à une
innovation inconnue en Europe jus
qu’à ce jour : l’éducation des pa
rents. La « Child Study Associa
tion of America » (Association amé
ricaine pour l’étude de l’enfant)
sert de centre directeur des recher
ches, et de nombreux groupes fé
minins consacrent leur temps et
leur activité à étudier le problème
des relations familiales.
L’acte prévoit enfin une « aide
aux enfants de l'Assistance publi
que ». Elle est accordée aux per
sonnes qui s’occupent d’eux, et le
montant en varie d’un Etat à l’au
tre. Il s’agit, d’ailleurs, d’une vé ¬
ritable pension pouvant s’élever,
pour l’aîné, à 18 dollars par mois
et de 12 pour chacun des autres
enfants.
Mais cette question n’est que se
condaire. L’important est de dé
couvrir des familles susceptibles de
donner à ces petits malheureux
l’affection dont ils ont besoin. Dif
férentes œuvres sociales — d’inspi
ration privée pour la plupart —
s’en occupent. Mais l’adoption reste
cependant la solution la meilleure.
Le nombre des enfants adoptés est,
chaque année, de près de 18.000.
C’est un trait curieux, spécifi
quement américain, et qui rappelle
à certains égards, l’adoption telle
quelle se pratiquait à Rome.
La procédure en varie selon les
Etats. Pour l’entourer de toutes les
garanties nécessaires, l’U. S. Chil-
dren’s Bureau a proposé récem
ment à leurs gouvernements un
modèle de loi, dont l’article le plus
intéressant me paraît être celui qui
prévoit une pét d’essai — si
possible d’un an —• . ans la maison
des futurs parents adoptifs.
Il existe, il est vrai, un troisième
rapide nous le montre — d’une lé
gislation familiale au sens le plus
exact du terme, mais totalement
différentes de celle que nous con
naissons.
Et pourtant, les Etats-Unis ne
sont pas un pays de forte, natalité.
Le nombre des naissances — pour
10.000 habitants — y était avant
guerre de l’ordre de 170 ou 180
chaque année. Ils. bénéficiaient bien
jusqu’à ces derniers temps d’une
immigration régulière et nombreu
se. dont la part dans l’accroisse
ment total de la population était
encore, dans la période 1921-1930,
de 15.5 %. Mais elle diminua en
suite — conséquence de la sévère
politique de contrôle suivie par le
gouvernement fédéral — et dans les
dernières années qui précédèrent le
conflit, immigration et émigration
se compensaient à peu près, avec
même un léger avantage à cette
dernière.
Il existe, c’est vrai, un troisième
facteur, d’importance capitale :
c’est le taux relativement bas de
l’indice de mortalité. Il est envi
ron de 11 0/00, ce qui donne tous
les ans un excédent de naissances
d’environ 900.000. C’est peu par
rapport à l’Union Soviétique, c’est
beaucoup si l’on compare ce chiffre
aux nôtres.
Ceci explique — d’autant plus
que le nombre des naissances est
à peu près constant — que la si
tuation ne nécessite pas l’interven-
tion plus directe de l’Etat dans un
pays où l’opinion publique lui se
rait hostile.
L’opposition entre les façons dont
ce problème de la famille est trai
té en Amérique et en Russie — et
l’on peut ajouter dans tous les .pays
d’Occident, sauf peut-être en An
gleterre — est donc fondamentale.
Elle ne réside pas seulement dans
les moyen s employés pour le ré
soudre. mais surtout dans les buts
poursuivis. Elle s’explique aisément
par des conditions matérielles en
tièrement différentes : le standard
de vie du peuple américain est
très supérieur, en moyenne, à ce
lui des autres, le pays regorge de
richesses, sa position géographique
l’a mis, jusqu’à présent, à l’abri des
invasions.
A tout cela, nous ne pouvons rien
changer... pour le moment.
(4) Voir l’« Ordre » du 26 septembre.
AU FIL DES JOURS
La licence directoriale
JEAN DE LÉTRAZ NOUS DIT...
Jean de Létraz est non seulement un auteur à succès, il est aussi
directeur du Palais-Royal vice-vrésident de l’Association des directeurs,
membre du Syndicat des directeurs de Paris, de la commission consulta
tive auprès du Comité d’organisation des spectacles, de. la commission pari
taire, et représentant des directeurs à la commission d’épuration et admi
nistrateur de la Caisse des allocations familiales et des congés payés.
A ces titres divers, nous avons interrogé M. Jean de Létraz sur la
licence directoriale. Voici sa réponse :
On lit avec surprise des articles passionnés, partiaux et mal
documentés sur cette licence.
Ceux qui refuseraient de l’accepter les yeux fermés, seraient
« suspects » ! De quoi ? De dire ce qu’ils pensent ?
Il y a si peu de gens qui ont le courage de leur opinion ! Es
sayer de-les faire taire en les traitant de « suspects », me paraît
extrêmement suspect de la part de ceux qui les accusent.
Parlons net.
Quels sont les arguments donnés par les promoteurs de la li
cence :
1° Eviter que des théâtres, comme autrefois le Vaudeville, ne
changent de destination ;
2° Supprimer les cascades de sous-locations, qui ne profitent
qu’à des intermédiaires sans vergogne ;
3° Chasser les « margoulins » des fauteuils directoriaux, que
l’on réserverait aux professionnels du. spectacle ;
4° Empêcher un directeur d’avoir des intérêts dans plusieurs
théâtres ;
5° Contrôler la valeur artistique du spectacle en général.
Tous ces motifs méritent d’être examinés avec le plus grand
intérêt, mais-..
Mais dans quelle mesure est-il nécessaire de brider l’initiative
et la liberté individuelles et de porter atteinte aux droits de pro
priété ? Voilà le fond du problème.
L’outil, forgé au nom de principes très défendables, ne ris-
que-t-il pas de servir à d’autres fins et à préparer un dirigisme
artistique qui n’a guère réussi aux régimes fascistes et qui est
contraire à l’esprit de notre légalité républicaine ?
C’est depuis 1940 et l’occupation, remarquons-le, que ce projet
de licence a pris corps- il a donné lieu à des échanges de vue que
n’ont pas ignorés certaines personnalités de la Propaganda Staffel.
Voilà qui sent tout de même un peu le roussi, comme le faisait très
justement remarquer M. Max Pavelli, dans la Dépêche de Paris.
Cette licence intéressant le sort de tous les directeurs en exer
cice, il eût été naturel, pour commencer, que toutes les chambres
syndicales de directeurs soient représentées aux réunions qui ont
abouti à l’élaboration d’un texte définitif.
Or, quoi qu’aient prétendu certains journalistes mal informés,
seul le Syndicat des directeurs de Paris a été consulté et je peux
affirmer qu’un bon nombre de nos confrères ne sont d’accord ni sur
la nécessité, ni sur les modalités d’application de cette licence-
D’autre part, et cela paraît invraisemblable, les directeurs de
music-halls, de tournées, des théâtres de province et des cabarets
artistiques dont l’existence et les intérêts sont en jeu, non seule
ment n’ont pas été invités à prendre part à la discussion, mais ne
seront même pas représentés à la commission qui sera chargée de
leur accorder ou de leur enlever la licence.
Comme je n’ai aucun intérêt personnel dans une quelconque de
ces entreprises, j’espère qu'on ne trouvera pas « suspect » la pro
testation que jé tiens à élever en faveur de ces confrères, protes
tation à laquelle tous les directeurs de Paris devraient s’associer.
Imagine-t-on un organisme professionnel où les intéressés
soient tenus à la porte, sans avoir un seul représentant pour les
défendre ? Licencedirectoriale ? Ils sont en droit de dire : licence
dictatoriale. , .
(Lire la suite en deuxième page)
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