Auscher part d’un constat : les grandes vallées françaises des Alpes, contrairement à celles de Suisse, ne communiquent pas entre elles et constituent de véritables culs de sacs, dont la seule issue est l’Italie, eu égard à leur ancienne appartenance au
. Et en premier lieu, les deux plus grandes vallées savoyardes, la
Ainsi entre
Val d’Isère et
Bonneval, il y a seulement 25 km, mais il faut en parcourir 226 en passant par Albertville si l’on veut rejoindre les deux communes par une route carrossable. L'itinéraire projeté envisage donc de passer par le
col de l’Iseran, à 2770 mètres. Un attrait de plus car la voie deviendrait alors la
plus haute route d’Europe devant sa cousine autrichienne la
route du Stelvio, dans le Tyrol et dépassant l’actuelle plus haute route de France, un tunnel percé dans le
col du Parpaillon, à 2644 mètres d’altitude, entre Ubaye et
Embrunais.
Depuis le
Lac Léman, le premier vrai point d’achoppement sur la route des Alpes, c’est donc le col de l’Iseran, chemin muletier de 16 km qui fait obstacle à la liaison Tarentaise-Maurienne, au plus près des cimes du
massif de la Vanoise. Et cette voie sans issue le restera encore une trentaine d'années avant que 16 km de revêtement permettent aux automobilistes de franchir le défilé entre les deux vallées.
Vers le classement de la route
« Le jour prochain où la route nationale reliant l'Ubaye au Var, par le col de la Cayolle, sera terminée, on aura de Nice à la Savoie par les cols de la Cayolle, de Vars et du Galibier, à 20 km en arrière de la frontière, une route carrossable qui sera le passage favori, obligé presque, du grand tourisme et des colonies étrangères qui partagent leur séjour en France entre le littoral de la Méditerranée et la Savoie. »
Le classement d’une nouvelle route nationale empruntant le
col de la Cayolle remonte à une
délibération du 31 décembre 1896. Mais depuis, les travaux n’ont pas vraiment avancé. Et pour cause : afin de mener à bien ces projets, il faut des financements. Qui pour subventionner les travaux : l’Etat ? Les départements concernés ?
Le 22 janvier 1906, le ministre des travaux publics annonce dans une
dépêche que la route des Alpes, d’une longueur totale de 601 km, empruntera des routes nationales existantes sur 472 km, 30 km étant en construction et 50 km restant à construire. Et réclame, pour ce faire, le concours des départements de Savoie, des Hautes et Basses Alpes.
Entre 1906 et 1909, le classement et la construction de la route donnent lieu à une passe d’arme entre le ministère des travaux publics et le
conseil général des Hautes Alpes, qui se déclare dans l’incapacité de répondre aux investissements exigés par les pouvoirs publics. C'est, à nouveau, l'appui du Touring Club de France, qui permet de remettre le projet sur les rails. Une aubaine pour le conseil général des Hautes Alpes, évoquée lors de la
session extraordinaire du 22 novembre 1913:
« Le classement et la construction de la Route des Alpes devaient déjà à cette époque préoccuper vivement les sociétés sportives, et cette préoccupation devait être très vive puisque la très importante association du Touring Club de France crut devoir (…) proposer son intervention financière ».
Abel Ballif, le président du Touring Club de France, résume, en effet, l’entrain du TCF pour ce projet dans
Le Matin.
La Route des Alpes !... Ce n’est ni celle d’Annibal (…) ni celle de Bonaparte (…) Notre route des Alpes ne menace point les fertiles plaines de la Lombardie et ne prépare nulle invasion (…) Sa valeur, pour nous, est d’être la voie touristique la plus remarquable dont la France puisse se glorifier bientôt
Un tel dessein valait bien les
188 000 francs de rallonge accordée au Conseil général des Hautes Alpes par l’association de tourisme.
Le pouvoir politique embraye le pas du TCF, déclarant la route
« d’utilité publique » le
5 avril 1912. Le classement d’une nouvelle route nationale 212, dite
« route des Alpes » est
officiellement adopté. Reste désormais à finaliser l’itinéraire mais la guerre va venir s'interposer sur le tracé.
Bibliographie