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Jean-Baptiste Bernadotte (1763-1844) : roi scandinave né en Béarn

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27 novembre 2020

Entre Révolution française et guerres napoléoniennes, Bernadotte a gravi les échelons militaires au cœur d'une Europe instable, pour devenir roi de Suède et Norvège. Les collections de Gallica témoignent de ce destin exceptionnel.

Jean-Baptiste Bernadotte en 1794 (Archives et bibliothèques Pau Béarn Pyrénées, 250336)

 

Né en 1763 à Pau dans la province du Béarn, Bernadotte est issu de la bourgeoisie. Il embrasse à 17 ans une carrière militaire au sein du régiment Royal-La Marine.

France pittoresque : Costumes basques, Henri IV, Bernadotte. Eau-forte gouachée, 1838.
Bernadotte a été à plusieurs reprises représenté avec Henri IV (1553-1610), autre roi né en pays béarnais)

Gravir les échelons
Ainsi débutent ses pérégrinations françaises, puis internationales (Allemagne, Pays-Bas actuels) dans le sillage de la Révolution française. Promu général de division en 1794, il est soutien de Napoléon durant la campagne d’Italie de 1797, et quitte définitivement la péninsule après la signature du traité de Campo-Formio. Il est ensuite envoyé par Talleyrand comme ambassadeur à Vienne en 1798, mais regagne rapidement la France.

F. Haudricourt, Fastes de la nation française et des puissances alliées,
ou Tableaux pittoresques gravés…, 1807 (vue 78/186) (détail)

 

Il épouse en 1798 Désirée Clary, belle-sœur de Joseph Bonaparte, frère aîné du futur empereur. Durant le Directoire, Emmanuel-Joseph Sieyès le nomme éphémère ministre de la Guerre en 1799 : au cœur d’une époque troublée, le simple soldat est devenu commandant en chef des armées. Malgré sa proximité familiale avec Napoléon, il ne s’implique pas dans les coups d’État de 1799 conduisant la France vers le Consulat issu du 18 brumaire (9 novembre). Susceptible de s'éloigner jusqu'aux jeunes États-Unis, il se rapproche finalement du Premier Consul et se voit nommé gouverneur du Hanovre, puis maréchal d'Empire en 1804.

Comptez sur tous les moyens qui seront au pouvoir du Directoire et du ministre de la guerre (1799)

Bernadotte : dans sa main, le bâton de maréchal d’Empire
(Archives et bibliothèques Pau Béarn Pyrénées, 250461)

 

Un maréchal diplomate aux portes de l’Europe
Engagé dans les guerres napoléoniennes contre la Deuxième coalition opposée à la France, il se voit attribuer le titre de prince-duc de Ponte-Corvo en 1806, et entre pour la première fois en contact avec les troupes suédoises dans le nord de l’Allemagne. L’Europe est alors en guerre permanente. Suite à la déposition de Gustave IV en Suède en 1809, Charles XIII accède au trône, et choisit comme prince héritier le général Charles-Auguste. La mort accidentelle de ce dernier laissant la succession du pouvoir de nouveau vacante, la Suède se rapproche de la France : la Russie est dorénavant leur ennemi commun, les Suédois ayant perdu la Finlande durant la guerre du même nom (1808-1809).  

Carte du royaume de Suède et des royaumes de Danemarck et de Norvège. Paris, 1813
(BnF département Cartes et plans, GE C-8995)

 

Le Parlement suédois se met en quête d’une personnalité en Europe pour conduire le pays : Bernadotte est contacté, et intéressé ; Napoléon laisse faire.

Note autographe de Napoléon au sujet de Bernadotte
(BnF NAF 2003, f.5r., vue 19) (détail)

 

La pratique peut surprendre, mais une personnalité extérieure de renommée favorable convient suffisamment aux différents partis en place pour être retenue : en août 1810, Bernadotte est élu prince héritier de Suède. Il prend le nom de Charles Jean.

Bernadotte représenté en « Prince héréditaire des Suédois »
(BnF – département des Estampes - RESERVE QB-201 (169)-FOL)

 

Devenir monarque suédois ?

Le contexte géopolitique européen conduit à un retournement de situation : alors que la Suède appliquait depuis 1810 le Blocus continental français visant à l’asphyxie de la Grande-Bretagne, Charles Jean se rapproche à partir de 1812 des Anglais et des Russes. Intégrant la Sixième Coalition contre la France l’année suivante, il continue de correspondre avec Napoléon. Faisant partie du camp victorieux, la Suède se voit attribuer la Norvège, au détriment du Danemark (Traité de Kiel, 1814). À la mort de Charles XIII en 1818, Bernadotte est couronné en la cathédrale Saint-Nicolas de Stockholm, ainsi qu’à Nidaros (Trondheim) en Norvège. Il devient Karl XIV Johan ; en français : Charles XIV.

Dans cette lutte entre la liberté du monde et l'oppression, je dirai aux Suédois : Je combats pour vous et avec vous, et les vœux des nations libres accompagneront nos efforts (1813)

Bernadotte, par C. É Mauraisse
(Archives et bibliothèques Pau Béarn Pyrénées, 250518)

 

Alors que s’éveillent les sentiments nationaux dans toute l’Europe, il vise une stabilité économique et politique intérieure ; à l’international, il reste proche du pouvoir russe d’Alexandre Ier avec lequel il correspond, puis de Nicolas Ier qui lui succède en 1826. Il assoit ainsi son pouvoir de roi élu, tout en sécurisant ses prétentions sur la Norvège. Le contexte le requiert : les mouvements norvégiens aspirant à davantage d’autonomie sont actifs, et l’abdication de Charles X au profit de Louis-Philippe Ier en France est un signal qui n’échappe à aucune monarchie. En politique intérieure, Charles XIV doit affirmer son pouvoir sans heurter les parlementaires qui demandent davantage de pouvoir pour le Riksdag (le Parlement), ainsi qu'une liberté de la presse accrue. Des figures de la société civile comme Anders Lindeberg, emprisonné un temps en 1834, se font les porte-voix des aspirations libérales, face au conservatisme de la noblesse et du clergé. La Suède de Charles XIV connaît ainsi des heurts semblables à ceux de ses voisins européens.

Lettre au conseiller Bascle de Lagrèze (Stockholm, 16 novembre 1830)
Extrait d'un recueil exceptionnel de 79 lettres de Bernadotte conservées au département des Archives et manuscrits (NAF 28823) (vue 311/470)

 
Dans les dernières années de son règne, la situation sociale et politique se stabilise. En s’opposant dans un premier temps à Napoléon, puis en composant avec les limites parlementaires encadrant le pouvoir royal suédois, Charles XIV est parvenu à se maintenir à un pouvoir auquel il avait été élu, et n’était pas destiné par naissance. À sa mort en 1844, il est enterré dans l'église de Riddarholmen de Stockholm.

Famille royale de Suède, 1922
(BnF, département Estampes et photographie, EI-13 (864)

 

Charles XVI Gustave est l’actuel souverain : il est le 7e descendant de Jean-Baptiste Bernadotte à exercer le pouvoir. Sa fille Victoria lui succédera, première descendante de Charles XIV à accéder au trône suédois.
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Pour aller plus loin :

  • La Bibliothèque Nordique (Bibliothèque Sainte-Geneviève) conserve la collection la plus importante en Europe, en dehors des pays concernés, en langues et civilisations scandinaves et finno-ougriennes. Riche de 180 000 monographies (dont 150 000 en langues scandinaves, finno-ougriennes et anglo-saxonnes) et de plus de 3 400 périodiques, elle est un fonds unique pour les études nordiques (page Facebook).

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