Le Blog
Gallica
La Bibliothèque numérique
de la BnF et de ses partenaires

La joubarbe

0
27 mars 2023

« On l’appelle toujours vive » : c’est en ces termes qu’un herbier du XVe siècle célèbre le caractère vivace de la joubarbe. Coutumière des rochers escarpés et des terrains inhospitaliers, la joubarbe parvient au printemps sans avoir rien cédé de sa vigueur aux rigoureux hivers de montagne.

Platearius, Livre des symples medichines, autrement dit Arboriste, continué selon le A, B, C, 1401-1500, Bibliothèque nationale de France

Plante vivace, la jourbarbe reçoit, dès l’Antiquité, son appellation de sempervivum (« toujours vivante »), qui s’imposera dans la nomenclature scientifique et que Linné retiendra pour qualifier le genre dans son ensemble. Le nom commun de cette plante grasse est plus étonnant et mène à s’interroger sur son étymologie. La forme particulière de la joubarbe, dont les feuilles se déploient en rosettes et se terminent par de petits piquants, évoquerait-elle un attribut pileux ? Le terme joubarbe viendrait en effet de Jovis barba, qui signifie « barbe de Jupiter » : la joubarbe entretiendrait ainsi avec le souverain du panthéon gréco-romain un lien particulier, qui lui confère des priorités protectrices contre la foudre. On a coutume de planter de la joubarbe des toits (sempervivum tectorum) sur les toits de chaume et les murs de clôtures pour en éloigner les orages. La joubarbe doit aussi à sa morphologie en rosette les noms communs de petit artichaut, ou artichaut des montagnes. Enfin, les vertus qu’on lui attribue dans la guérison des plaies et contusions ont pu lui valoir le nom d’herbe à la blessure.

joubarbe_belgique_horticole.jpg

« Sempervivum Funcki var. Aqualiense » dans La Belgique horticole, t. 23, 1873, Bibliothèque nationale de France

Le genre Sempervivum appartient à la famille des Crassulacées, qui comprend d’autres plantes succulentes, tels que les Sedum : les deux genres ont d’ailleurs longtemps été confondus en un seul ensemble. Plantes grasses, les joubarbes ont en commun leurs feuilles charnues et vertes. Si la joubarbe pousse au ras du sol et se niche dans les fissures des roches, la période de la floraison offre à ces plantes une nouvelle allure. En été, ses fleurs étoilées éclosent au sommet de longues tiges, qui chez certaines espèces peuvent atteindre jusqu’à 50 cm. Une fois la fleur fanée, la plante qui l’a portée se dessèche. Les joubarbes se propagent et se multiplient surtout par rejets.

joubarbe_mnhn.jpg

Jean Joubert, Sedum montanum, 17e siècle. Muséum national d’histoire naturelle, Collection des vélins, Portefeuille 49, folio 21.

Le genre Sempervivum comprend une trentaine d’espèces : outre la joubarbe des toits, sans doute la plus connue, les jourbarbes les plus répandues en Europe sont la joubarbe toile d’araignée (Sempervivum arachnoideum), qui doit son nom  aux fils blancs qui recouvrent ses rosettes et permettent à la plante de lutter contre les températures les plus rudes, et la joubarbe des montagnes (Sempervivum montanum). Cette dernière n’est pas la seule à se plaire en terrain montagneux : toutes les joubarbes poussent facilement en haute altitude. La joubarbe toile d’araignée peut ainsi se trouver jusqu’à 3000 mètres.

Charles Flahaut, « Sempervivum arachnoideum, Joubarbe toile d’araignée » dans Nouvelle flore coloriée de poche des Alpes et des Pyrénées, Paris, P. Klincksieck, 1906.

La joubarbe est également employée dans l’art des jardins, pour l’ornementation de rocailles notamment. Les différentes espèces de joubarbes s’acclimatent facilement : si au XIXe siècle, l’École de botanique du Muséum national d’histoire naturelle a pu être le berceau d’espèces variées, c’est aujourd’hui surtout dans les jardins alpins que les joubarbes s’offrent au regard des visiteurs assez curieux pour scruter le sol, à la recherche de ces plantes discrètes.

Ajouter un commentaire

Plain text

  • Aucune balise HTML autorisée.
  • Les adresses de pages web et de courriels sont transformées en liens automatiquement.
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.