Le glaïeul
Signifiant étymologiquement « petits glaives », les glaïeuls ont tout de victorieux. Puisant leur énergie dans leur corme, ils développent de multiples fleurs autour de leur tige. Ainsi ils ornent nos jardins et bouquets mais offrent également, depuis l’Antiquité, un sujet pictural aux artistes.
Le genre glaïeul fait partie de la famille des Iridacées, à laquelle appartiennent également les iris. Les glaïeuls les plus connus aujourd'hui nous viennent d'Afrique du Sud et ont fait l'objet d'hybridations spectaculaires par le pépiniériste Victor Lemoine entre 1877 et 1882. Cependant, le genre compte plus de 260 espèces, dont certaines étaient déjà présentes en Europe dès l'Antiquité, comme en témoignent les fresques de Pompéi.
Ce sont ses feuilles longues et pointues, en forme de poignard, qui lui ont valu le nom de gladiolus en latin, ou « petit glaive ». En été, ces tiges rigides développent une dizaine de fleurs, formant ainsi de longues hampes florales, avec une variété de couleurs allant du blanc pur au rouge profond, en passant par des teintes de rose, jaune, orange et même violet. Chaque fleur est composée de six pétales disposés en entonnoir, créant un bel effet visuel.
Pierre-Joseph Redouté, Gladiolus hirsutus, Fin 18e siècle - début du 19e siècle
Collection des vélins du Muséum national d'histoire naturelle, portefeuille 12, folio 47
Les glaïeuls sont aussi classés parmi les plantes à corme. La corme est un organe de réserve, comme le bulbe, mais pour lequel les réserves sont situées dans la tige alors que, pour le bulbe, elles sont stockées dans les écailles.
Outre leur nom évoquant une arme, les glaïeuls sont également liés à la victoire. En effet, nos voisins néerlandais utilisent l'expression "de dood of de gladiolen", que l'on peut traduire par « la mort ou le glaïeul », signifiant « tout ou rien ». L'origine de cette expression est incertaine, mais elle pourrait venir du fait que des glaïeuls sont offerts aux coureurs cyclistes victorieux, une tradition qui témoigne du caractère glorieux de cette fleur.
Eugène Atget, Glaïeul, entre 1890 et 1900
La renommée du glaïeul remonte encore plus loin, puisqu'il apparaît dans le Capitulaire De Villis, un texte de Charlemagne recommandant la culture de certaines plantes dans les jardins de ses domaines. Ce genre est également présent dans l'histoire de l'art. Les glaïeuls figurent dans de nombreuses peintures représentant des natures mortes. Chaïm Soutine leur a consacré une série de quinze toiles, utilisant toute une gamme de rouge, sa couleur de prédilection, pour les représenter.
Madeleine Basseporte, Gladiolus polystachyus, 1780
Collection des vélins du Muséum national d'histoire naturelle, portefeuille 12, folio 54
Il n’y a pas que l’art pictural qui rend hommage à ces fleurs. Les glaïeuls illustrent de belles descriptions aux accents poétiques, comme chez Marcel Proust dans son roman Du côté de chez Swann : « C’est ainsi qu’au pied de l’allée qui dominait l’étang artificiel, s’était composée sur deux rangs, tressés de fleurs de myosotis et de pervenches, la couronne naturelle, délicate et bleue qui ceint le front clair-obscur des eaux, et que le glaïeul, laissant fléchir ses glaives avec un abandon royal, étendait sur l’eupatoire et la grenouillette au pied mouillé, les fleurs de lis en lambeaux, violettes et jaunes, de son sceptre lacustre. » On le retrouve chez Georges Sand dans Lélia : « Le lac était calme ce soir-là, calme comme les derniers jours de l’automne, alors que le vent d’hiver n’ose pas encore troubler les flots muets et que les glaïeuls roses de la rive dorment à peine, bercés par de molles ondulations. ».
Maquette de papier peint, Paris, 1908
Cyclisme, fresques, ordonnances royales, peinture, littérature, les glaïeuls trouvent leur place dans de nombreux domaines, et bien entendu dans nos jardins et bouquets.
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