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Jane Austen et l'exaltation des sentiments

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8 juin 2017

Au cœur d’un véritable culte outre-Manche, Jane Austen (1775-1817) a inventé avant l’heure la comédie romantique et continue de susciter de nombreuses adaptations (mangas, films, séries…).

© Wikimedia commons

Née en 1775 dans le Hampshire, Jane Austen commence à écrire dès son adolescence et joue des saynètes au sein du cercle familial, propice à une vie littéraire foisonnante. Après s’être s’essayée au roman épistolaire, elle publie de façon anonyme Raison et sentiments puis Orgueil et préjugés. D’autres romans suivront et connaîtront un vif succès auprès d’un large lectorat séduit par son sens comique et par la nouveauté de ce type de roman, qui décrit la réalité quotidienne et les relations humaines dans la société anglaise au début du XIXe siècle. Plaisent également l’ardeur et la passion des héroïnes qu’elle met en scène, qu’il s’agisse de Marianne Dashwood, qui tombe amoureuse du séduisant Willoughby (Raison et sentiments) ou d’Elizabeth, au caractère plus vif, qui résiste au dédain de Mr Darcy, maître de Pemberley (Orgueil et préjugés). Le personnage le plus comique de ce roman étant Mr Collins, cousin de la famille devant hériter de leur demeure, prêt à toutes les bassesses pour s’élever dans la société. Les rebondissements ne manquent pas et tiennent le lecteur en haleine. Ainsi, la vivacité d’esprit d’Elizabeth aura raison du dédain affiché de Mr Darcy lors d’un bal :

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Jane Austen, Orgueuil et préjugé. Paris : J.-J. Paschoud, 1822. p. 21

Mais au-delà de ces aventures sentimentales, les romans portent aussi un ton didactique, avec des sœurs aînées qui se révèlent d’astucieuses conseillères et veillent sur les péripéties amoureuses de leurs jeunes sœurs, souvent influencées par la lecture de romans gothiques qui donnent une image idéalisée des héros séducteurs. Jane Austen ira jusqu’à parodier ce type de lecture dans L’Abbaye de Northanger avec une jeune héroïne, Catherine Morland, qui n’a de cesse de rêver à d’improbables aventures dans des lieux insolites, lors de son séjour à l’abbaye de Northanger et compare tout ce qu’elle voit à ses lectures :

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Jane Austen, L'abbaye de Northanger. Paris : Pigoreau, 1824. p. 47

Plus expérimental, Le parc de Mansfield, ou Les trois cousines (1814) présente une héroïne plus insaisissable. C’est que Fanny Price, jeune cousine pauvre recueillie par une famille, porte un regard critique sur une société très patriarcale. Progressivement, les romans se font donc plus réalistes, comme Emma (La nouvelle Emma ou Les caractères anglais du siècle, 1815) que l’on considère comme l’œuvre la plus aboutie de Jane Austen. La quête du conjoint idéal y est retracée avec un humour mordant, comme dans Persuasion (1817). Le lectorat, comme la critique littéraire, savoure la mise en scène des sentiments et l’analyse minutieuse des gestes, propos et malentendus, comme on le voit dans ce compte-rendu publié en 1901 :

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Revue universelle : recueil documentaire universel et illustré, publié sous la direction de M. Georges Moreau. Paris : Librairie Larousse, 1901

Publiant longtemps de façon anonyme, Jane Austen préserve sa vie privée et écrit jusqu’à la fin de sa vie, à l’âge de 41 ans en 1817. Au final, nul doute que les lecteurs d’aujourd’hui soient séduits par les péripéties amoureuses des personnages comme par la richesse des sentiments dépeints avec justesse. De nombreuses adaptations cinématographiques, comme ce film de Robert Z. Leonard (1945) permettent de s’immerger dans cet univers où les jeunes femmes entrent dans la société dès l’âge de 15 ans, rêvant de beaux mariages, cherchant à s’affranchir du cocon familial ou à suivre leurs sentiments.

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Ann Rutherford dans Orgueil et préjugés, film de Robert Z. Leonard, 1945

Pour aller plus loin : 

The Jane Austen Centre

Les manuscrits de Jane Austen commentés par Kathryn Sutherland à la British Library

Retrouvez les premiers billets de la série consacrée aux  femmes de lettres anglaises :

Terreurs gothiques chez Ann Radcliffe

Mary Shelley et le mythe de la création

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