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Mary Cassatt, graveuse virtuose

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8 mars 2021

La toute récente mise en ligne sur Gallica de l’œuvre gravé de Mary Cassatt conservé à la Réserve du département des Estampes et de la photographie invite à évoquer brièvement le souvenir de cette artiste majeure, son travail de graveuse et la constitution du fonds de la BnF désormais accessible.

La Nourriture des canards, 4e état, pointe sèche, vernis mou et aquatinte, 1895

Née le 22 mai 1844 en Pennsylvanie, à Pittsburgh, au sein d’une riche famille de banquiers américains d'origine française, Mary Cassatt voyage à Paris et en Allemagne avec ses parents au début des années 1850, s’imprégnant ainsi très tôt de culture européenne. De retour aux États-Unis où ses aptitudes au dessin et à la peinture s’affirment, elle entre à l’âge de seize ans à l’École des Beaux-Arts de Philadelphie. Peu satisfaite, elle quitte bientôt l’institution et, à force de persuasion, finit par convaincre les siens de repartir pour Paris afin de parfaire sa formation artistique. Élève à son arrivée de Paul-Constant Soyer puis de Jean-Léon Gérôme, elle reçoit un enseignement académique des plus traditionnels qu’elle complète toutefois par une intense fréquentation des chefs-d’œuvre du Louvre. Admise au Salon de 1868, elle y expose La Mandoline. Si la guerre franco-prussienne de 1870 la contraint à rentrer aux États-Unis, elle repart en direction de l’Europe dès l’année suivante, se rendant successivement en Italie – où Carlo Raimondi l’initie à la gravure en creux et à l’aquatinte –, en Espagne et enfin en Belgique et aux Pays-Bas.

Son installation définitive à Paris, dans le IXe arrondissement, a lieu en 1874, l’année même de la découverte par Degas de l’œuvre de l’artiste américaine au Salon, et de l’émergence d’une esthétique nouvelle portée par le groupe des impressionnistes vers laquelle Mary Cassatt, désireuse de s‘extraire du carcan officiel académique, va bientôt se tourner. Elle y est précisément conviée en 1877 par Degas en personne dont elle admire le travail. Présente à quatre expositions collectives entre 1879 et 1886, Mary Cassatt est avec Berthe Morisot et Eva Gonzalès l’une des trois seules femmes – et l’unique américaine – à participer aux manifestations du groupe. Son intérêt pour le portrait plus que pour le paysage lui confère une place singulière parmi les impressionnistes. Ses réalisations n’en rencontrent pas moins l’admiration de Pissarro, Gauguin ou encore Zola.

Sa virtuosité dans l’art de la peinture et du pastel lui vaut de collaborer en 1879, avec Degas et Pissarro, à un projet dans le domaine de la gravure relatif à une revue artistique intitulée Le Jour et la Nuit. Renouant avec une pratique à peine effleurée, Mary Cassatt réalise pour la circonstance deux estampes en noir et blanc – Au théâtre, Reflet dans la glace et Au théâtre (Femme à l'éventail) – qui traduisent d’emblée son attrait pour les techniques mixtes et l’expérimentation.

Au théâtre (Femme à l'éventail), vernis mou, aquatinte et eau-forte, 1880

Au théâtre (Reflet dans la glace), vernis mou, aquatinte et eau-forte, 1880

Si l’entreprise avorte, la graveuse ne va pas moins continuer dans cette veine, cherchant à tirer pleinement profit de l’éventail des procédés associés à la taille-douce comme en témoigne sa planche au contre-jour saisissant titrée La Visiteuse (Scène d’intérieur).

La Visiteuse (Scène d’intérieur), vernis mou, aquatinte et eau-forte, 1880
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Plus audacieuse encore est l’introduction de la couleur. Fascinée par la découverte de la xylographie en couleurs japonaise traditionnelle, l’artiste va en effet réussir à reproduire les effets de celle-ci dans ses aquatintes. Un charme inégalé émane ainsi de cette série « japonisante » de dix estampes réalisées en 1891 dans lesquelles s’expriment le quotidien et l’intime (La Lettre).

La Lettre, pointe sèche et aquatinte en couleurs, 1890-1891
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Soucieuse de la maîtrise du processus créatif de ses estampes, Mary Cassatt s’est dotée d’une presse à taille-douce et entourée d’excellents praticiens tels que Bracquemond ou Leroy pour l’obtention de tirages de qualité. Suscitant jalousies et admirations, ce travail de la couleur, d’une complexité technique infinie, s’achèvera vers 1898 avec des œuvres aux aplats prononcés d’une indicible modernité (Sur L’herbe).

Sur l'herbe, pointe sèche et aquatinte en couleurs, 1890-1891
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Ambassadrice de l’impressionnisme aux États-Unis, Mary Cassatt cessera définitivement de peindre et de graver vers 1910 avant de s’éteindre le 14 juin 1926 au Mesnil-Théribus.

Riche de 62 planches, le corpus d’estampes de Marry Cassatt conservé à la Bibliothèque nationale de France provient pour l’essentiel des dons importants faits par Eugène Béjot en 1931 et par Atherton Curtis en 1943, accrus par l’acquisition de la collection Strölin en 1921 aux estampes et par le dépôt du Musée d’Art Moderne en 1963.

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La sélection de Gallica consacrée à Mary Cassatt

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Billet rédigé dans le cadre du Forum Génération Egalité.

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