Titre : La Dépêche algérienne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1885-09-24
Contributeur : Robe, Eugène (1890-1970). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32755912k
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 24 septembre 1885 24 septembre 1885
Description : 1885/09/24 (A1,N70). 1885/09/24 (A1,N70).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t5448526
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-10449
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/04/2021
FtîEFFlCTTJfîE
DEPOT
Première année.
N° 70.
Le numéro £5 oentinaies
D‘AÏ.(ÏER
F G A L
Jeudi, 24 septembre 1885.
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois Un an
ALGÉRIE 4.50 O 18
Frange O 12 24
ADMINISTRATION ST RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin
Tontes les communications relatives aux annnonees et réclames dolvut,
Algérie, être adressées à l'AGENCE HAVAS, boulevard de la Republions.,, idg® s
En France, les communications sont régnés savoir :
A Marseille, chez M. Gustave ALLARD, rue du Bansset, 4
A Paris, chez MM. AUDBOURG et G 1 », place de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
La DÉPÊCHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats.
Alger, . le 23 Septembre 1885.
Élections législatives du 4 octobre 1885.
DÉPUTÉ SORTANT.
CONSEILLER GÉNÉRAL
Notre feuilleton, LA GRANDE
MARNIÈRE, tirant à sa fin, nous
commencerons après-demain :
Les tas è Hieor
Roman dû à la plume autorisée de
MM. Racot et Georges Pradel qui
occupent actuellement une haute place
dans le journalisme parisien. -
Nous ne préjugeons pas en affirmant
que nos lecteurs feront un excellent
accueil à ce livre aussi élégamment
écrit qu’intéressant.
Les radicaux « d’Alger » ou soi-disant
tels, ont une tactique qui doit être excel
lente, car ils ne négligent pas une occasion
de l’appliquer. Elle consiste à prêter à
leurs adversaires tous les actes de nature
à les déconsidérer qu’iis ont pu commettre,
et à donner ensuite le signal du haro.
C’est ainsi qu’à propos de la réunion de
samedi, le Petit Colon, par la plume de
son rédacteur en chef, traite les assistants
qui n’appartenaient pas à son parti, d’a-
boyeurs de l’opportunisme.
La chose peut sembler quelque peu auda
cieuse aux personnes qui assistaient à cette
soirée ; on leur fera difficilement croire que
les huées adressées à deux de nos collègues
de la presse, aux candidats absents et à
l’honorable M. Mauguin, ne partaient pas
du clan radical ; mais à l’extérieur, on n’est
pas si bien placé pour connaître la vérité,
et si l’on peut persuader à quelques-uns
que tout ce qui n’est pas radical est grossier
et mal élevé, ce sera toujours cela de gagné.
Très curieux à lire et à étudier d’ailleurs
l’article auquel nous faisons allusion et dans
lequel le candidat Marchai exulte de joie.
Tout relatif qu’il soit, ce demi-succès rem
porté lui fait perdre toute mesure.
Après s’ôtre ménagé, en cas d’échec trop
éclatant, une retraite honorable en se désis
tant au profit du citoyen Le Lièvre, il s’ima
gine avoir déjà bataille gagnée, et le voilà
tout prêt à entrer dans la lutte casque en
tête et dague au poing, alors même qu’il
sait devoir y rencontrer les deux hommes
qu’il saluait naguère comme ses maîtres
vénérés: Le citoyen Le Lièvre déjà nommé
et le citoyen Trolard.
Franchement, ce n’est pas avoir de chance
que de se déclarer prêt à se retirer devant
deux ^candidatures éventuelles, et da
les voir tout à coup surgir devant soi
double spectre de Banco, prêtes à vous re
procher votre ingratitude et votre manque
de foi.
C’est là sans doute le commencement du
châtiment et nous sommes curieux de voir
comment le rédacteur du Petit Colon fera
pour concilier les nécessités de la lutte avec
le respect dont il ne peut plus, sans se cou
vrir de honte et de ridicule, se départir
visrà-vis de ses nouveaux adversaires.
Quant au prétexte qui consiste à se cou
vrir de la volonté persistante de ses amis et
à se poser soi-même en victime du devoir,
il est usé, archi-usè et ne peut plus servir ;
on l’a bien vu samedi soir à la réunion du
Théâtre où, lorsque M. Marchai a eniaœé ce
couplet, ses amis mêmes ne se sont pas
gênés pour manifester leur incrédulité.
Il faut trouver autre-chose et ,ce n’est pas
facile.
Ah ! comme la haine que le parti radical
porte à M. Mauguin s’explique ! N’est-ce
pas, en effet, l’échec infligé au citoyen Le
Lièvre, lors de l’élection sénatoriale, qui est
la cause des difficultés d’aujourd’hui?
Si le patriarche de la démocratie avait
été réélu, non-seulement il ne serait pas
devenu un gros embarras, et on ne serait
pas conduit à chercher à le récuser, mais il
protégerait de son influence les candidatures
amies !
En ce qui le concerne personnellement, le
citoyen Marchai n’aurait à combattre que
les députés sortants et non ses prétendus
maîtres vénérés !
C’est là, nous le répétons, le commen
cement du châtiment.
-s*
Quand les intransigeants combattent des
candidats républicains, ils ne manquent
jamais, après les avoir accusés de clérica
lisme, de les traiter de bonapartistes ou
d’orléanistes, selon les époques.
Après les premières années qui suivirent
la chute de l’empire, tous les candidats qui
n’étaient pas intransigeants ou ne. voulaient
pas feindre de l’être étaient des bonapartis
tes.
On craignait encore le bonapartisme ; au
jourd’hui, c’est l’orléanisme qui tient la
corde dans le parti conservateur, et les
candidats simplement républicains, voire
même radicaux, sont traités d’orléanistes.
J’ai lu dans le journal de Rochefort et
dans celui, du citoyen Basset que Gambetta,
Jules Ferry et tous les membres de l’union
rêpublica.ne étaient des orléanistes plus ou
moins déguisés. Ii n’y a donc pas lieu de
s’étonner que l’honorable M. Bourli r soit
traité d’orléaniste par le Radical algérien.
Demandez-lui pourquoi. Il n’en sait trop
rien. Il l’avance, à tout hasard. Il reconnaît
bien que M. Bourlier n’en a jamais fait
l’aveu.
Mais, dit-il, son passé l’affirme.
— Comment cela, s’il vous plaît ?
On se garde bien de le dire.
— La seule preuve qu’on en donne, est
que M. Bourlier n’a pas fait de grands
efforts pour détruire cette ridicule accusa
tion.
Et, en eflV t, m quoi pourrait-on l’ap
puyer pour ét b m- l’orléanisme de cet hono
rable candidat ?
En 1848, lorsque la révolution de février
éclata, M. Bourlier avait 17 ans; il était bien
jeune pour avoir une opinion politique et
s’il en avait une, je ne crois pas qu’à ce mo
ment il Tait f rit connaître à M. Basset et
encore moins à M. Marchai.
Médecin militaire sous l’empire, il fit son
devoir devant l’ennemi et je me suis laissé
dire que Tors‘de l’épidémie cholérique qui
sévit avec tant de rigueur sur la colonne
espèditionnàiie du Maroc en 1859, il fit
preuve d’assez de courage et de dévouement
pour mériter la croix des braves. Ce n’était
fà, je crois, ni du bonapartisme ni de l’or
léanisme, mais tout simplement du patrio
tisme.
La vérité et, que la carrière politique de
M. Bourlier n’a commencé qu’en 1872 et il a
bien fallu qu'à cette époque, il se soit mon
tré républicain dans ses actes et dans ses
paroles, puisque c’est en cette qualité qu’il
fut élu en octobre 1872 membre du Conseil
général d’Alger.
N’oublions pas qu’il fut nommé à Marsa,
lancé contre le baron de Schonen, candidat
réactionnaire, et qu’il était porté sur la listé
de la Solidarité journal qui, à cette époque,
était rédigé par MM. Basset et Marchai.
On était bien près de l’empire en ce
temps-là, comme on en est loin aujourd’hui;
si donc M. Bourlier était républicain aux
yeux de MM. Basset et Marchai, pourquoi
serait-il orléaniste aujourd’hui ? Quel que
soit le mal que ces messieurs aient fait et
fassent encore à la République, je ne crois
pas qu’ils aient réussi à en dégoûter les
hommes intelligents et honnêtes,
— 1 — - —»
L’ENTREPRIS^ OEIZÉRA
Le candidat Marchai continua la campa
gne diffamatoire, contre son concurrent
Bourlier.
C’est à propos de l’entreprise de M’zéra
qu’il attaque aujourd’hui l’honorable candi
dat.
§
Feuilleton de LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE
N° 70.
LA
PAR
Georges OHNET
Mlle de Cia ire font baissa le front en signe
d’assentiment, et se perdit dans une rêverie
profonde. Au bout d’un instant, elle sou-
? ira, et ses yeux s’emplirent de larmes.
ascal pâlit et fit un mouvement vers elle ;
©lie sourit et dit :
Pardonnez-moi... J’ai tant de chagrin.
Je m’oublie...
Elle reprit sa sérénité un peu hautaine :
— Il faudra, Monsieur, que vous ayez la
bonté de venir souvent ici. Nous serons
certainement calomniés : il faut que vous
appreniez à nous connaître, que vous viviez
de notre existence, afin de pouvoir nous
défendre. C’est un sacrifice que je vous im
pose, en vous demandant de fréquenter as
sidûment une maison où vous ne trouverez
qu’un vieillard malade et des femmes attris
tées. J’espère que vous voudrez bien vous y
résigner ?
Il s’inclina sans répondre. Il tremblait à
la fois de crainte et de joie, ravi de voir les
portes du château s’ouvrir devant lui, ef
frayé en pensant au trouble que celte inti
mité allait jeter dans son cœur. Ils se diri
gèrent vers le salon. En entrant, Pascal en
tendit Mlle de Saint-Maurice qui disait à
Malézeau d’une voix furieuse :
— Mais il n’a pas ouvert la bouche ! Ja
mais un avocat aussi peu bavard ne pourra
sauver l’enfant ! Non, vous ne me ferez pas
entrer dans la tête qu’un avocat puisse faire
acquitter son client, s’il ne parle pas deux
heures de suite 1
Et le marquis de répondre, avec sa petite
voix grelottante et vide :
— C’est moi qui ai eu l’idée !... Ne crai
gnez rien, tante Elle est de moi
Elle est bonne !
Pascal rejoignit Malézeau, salua le vieil
lard, la tante Isabelle, et, reconduit par An
toinette jusqu’à la grille, s’éloigna. Il se
présenta chaque jour à Clairefont, à partir
de cette visite et, dès le lendemain, rencon
tra M. de Croix-Mesnil.
Il appréhendait vivement de se trouver en
rapport avec le jeune officier. Il revint bien
vite de scs préventions. Il vit dans le baron
un homme courtois, réservé, un peu froid,
dont il apprécia promptement le réel mérite.
Il se sentit d’autant plus vivement entraîné
vers lui qu’il reconnut, dans celui en qui il
redoutait un rival heureux, un compagnon
de tristesse. L’indifférence charmante avec
là quel lé Antoinette traitait M. de Croix-
Mesnil parut à Pascal le dernier degré du
malheur. Son âme ardente eût préféré de la
haine à cette exquise insensibilité. Il com
prit que le baron aimait Mlle de Clairefont
et ne conservait aucun espoir. Le danger de
Robert était le dernier lien qui l’attachait à
cette maison où il avait rêvé de vivre heu
reux. Il y souffrait maintenant, et n’y venait
que par devoir. Il sut trouver des paroles
louangeuses et délicates à l'adres=e du dé
fenseur de sou ami, et se conduisit avec un
tact raffiné qui lui conquit définitivement
Pascal.
C’était un curieux spectacle que celui de
ces jeunes gens auprès d’Antoinette. Tous
deux passionnément épris et résolus à n’en
rieniaisser voir : l’un, aimable, fin, léger,
dissimulant ses sentiments avec une grâce
aisée et correcte ; l’autre, sévère, âpre, gla
cé, avec des éclats soudains qui illuminaient
ses yeux d’une rayonnante inspiration.
Lorsque Pascal lâchait ainsi, involontai
rement, la bride à sa fougue, un battement
singulier de la paupière, un plissement su
bit de la lèvre donnaient au visage de Mlle
de Clairefont une gravité recueillie. Elle ne
.semblait plus entendre ce qui se passait au
tour d’elle ; on eût dit qu’elle écoutait une
voix intérieure qui lui parlait, impérieuse.
Puis, le jeune homme reprenantson ton me
suré, la physionomie d’Antoinette redeve
nait calme. Ces sensations fugitives n’avaient
peut-être été remarquées que par Malézeau
qui, avec ses yeux tourbillonnant derrière
ses lunettes d’or, voyait fort clair.
Pendant qu’à Clairefont la vie se traînait
ainsi dans l’attente, rue du Marché l’agita
tion ne faisait qu’augmenter. La haine dé
çue, la convoitise trompée, avaient jeté Car-
vajan dans un état de fureur qui faisait
craindre pour sa raison. Dans la ville, une
réaction se produisait ea faveur des victi
mes contre le bourreau.
L’oppression matérielle qu’exerçait le
banquier sur ses tributaires les laissait li
bres de leurs impressions morales. S’il pou
vait les contraindre à agir dans tel sens, il
ne pouvait les forcer à penser telle chose.
Et la majorité se déclarait décidément en
faveur du fils contre le père. Carvajan, sans
sortir de chez lui, avec l’admirable instinct
qui le guidait toujours, se rendait un compte
parfaitement exact de l'état des esprits. Il
se faisait en lui une sorte de répercus-Ton
de l’opinion publique. Il pesait, il compa
raît, et, avec fureur, il était obligé de s’a
vouer qu’entre ce jeune homme, qui n’avait
jamais fait de mal à personne, et lui, le ty
ran de La Neuville, oa n’hésitait pas. Lors
que Fleury, pour essayer de le calmer, lui
disait le contraire, il l’interrompait avec
violence :
— Taisez vous, imbécile, vous ne savez
point de quoi vous parlez ! C’est Pascal qui
nous perd ! Vous ne le connaissez pas...
Je n’aurais pas dû le laisser revenir. Il re
tournera comme un gant tous ceux qui l’en-
tendrcnt... Triple brute que j’ai été de me
brouiller avec lui ! C’est la passion qui m’a
emporté!... La passion ne fait faire que
des sottises ! Si j’avais raisonné, au lieu de
m’emporter, nous aurions eu Clairefont
pour prix de la liberté de ce butor, dont la
condamnation ne sera pour moi qu’uue
bien mince satisfaction... Je me suis cou*-
duit comme une bête î (A suivre)^
DEPOT
Première année.
N° 70.
Le numéro £5 oentinaies
D‘AÏ.(ÏER
F G A L
Jeudi, 24 septembre 1885.
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois Un an
ALGÉRIE 4.50 O 18
Frange O 12 24
ADMINISTRATION ST RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin
Tontes les communications relatives aux annnonees et réclames dolvut,
Algérie, être adressées à l'AGENCE HAVAS, boulevard de la Republions.,, idg® s
En France, les communications sont régnés savoir :
A Marseille, chez M. Gustave ALLARD, rue du Bansset, 4
A Paris, chez MM. AUDBOURG et G 1 », place de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
La DÉPÊCHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, judiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats.
Alger, . le 23 Septembre 1885.
Élections législatives du 4 octobre 1885.
DÉPUTÉ SORTANT.
CONSEILLER GÉNÉRAL
Notre feuilleton, LA GRANDE
MARNIÈRE, tirant à sa fin, nous
commencerons après-demain :
Les tas è Hieor
Roman dû à la plume autorisée de
MM. Racot et Georges Pradel qui
occupent actuellement une haute place
dans le journalisme parisien. -
Nous ne préjugeons pas en affirmant
que nos lecteurs feront un excellent
accueil à ce livre aussi élégamment
écrit qu’intéressant.
Les radicaux « d’Alger » ou soi-disant
tels, ont une tactique qui doit être excel
lente, car ils ne négligent pas une occasion
de l’appliquer. Elle consiste à prêter à
leurs adversaires tous les actes de nature
à les déconsidérer qu’iis ont pu commettre,
et à donner ensuite le signal du haro.
C’est ainsi qu’à propos de la réunion de
samedi, le Petit Colon, par la plume de
son rédacteur en chef, traite les assistants
qui n’appartenaient pas à son parti, d’a-
boyeurs de l’opportunisme.
La chose peut sembler quelque peu auda
cieuse aux personnes qui assistaient à cette
soirée ; on leur fera difficilement croire que
les huées adressées à deux de nos collègues
de la presse, aux candidats absents et à
l’honorable M. Mauguin, ne partaient pas
du clan radical ; mais à l’extérieur, on n’est
pas si bien placé pour connaître la vérité,
et si l’on peut persuader à quelques-uns
que tout ce qui n’est pas radical est grossier
et mal élevé, ce sera toujours cela de gagné.
Très curieux à lire et à étudier d’ailleurs
l’article auquel nous faisons allusion et dans
lequel le candidat Marchai exulte de joie.
Tout relatif qu’il soit, ce demi-succès rem
porté lui fait perdre toute mesure.
Après s’ôtre ménagé, en cas d’échec trop
éclatant, une retraite honorable en se désis
tant au profit du citoyen Le Lièvre, il s’ima
gine avoir déjà bataille gagnée, et le voilà
tout prêt à entrer dans la lutte casque en
tête et dague au poing, alors même qu’il
sait devoir y rencontrer les deux hommes
qu’il saluait naguère comme ses maîtres
vénérés: Le citoyen Le Lièvre déjà nommé
et le citoyen Trolard.
Franchement, ce n’est pas avoir de chance
que de se déclarer prêt à se retirer devant
deux ^candidatures éventuelles, et da
les voir tout à coup surgir devant soi
double spectre de Banco, prêtes à vous re
procher votre ingratitude et votre manque
de foi.
C’est là sans doute le commencement du
châtiment et nous sommes curieux de voir
comment le rédacteur du Petit Colon fera
pour concilier les nécessités de la lutte avec
le respect dont il ne peut plus, sans se cou
vrir de honte et de ridicule, se départir
visrà-vis de ses nouveaux adversaires.
Quant au prétexte qui consiste à se cou
vrir de la volonté persistante de ses amis et
à se poser soi-même en victime du devoir,
il est usé, archi-usè et ne peut plus servir ;
on l’a bien vu samedi soir à la réunion du
Théâtre où, lorsque M. Marchai a eniaœé ce
couplet, ses amis mêmes ne se sont pas
gênés pour manifester leur incrédulité.
Il faut trouver autre-chose et ,ce n’est pas
facile.
Ah ! comme la haine que le parti radical
porte à M. Mauguin s’explique ! N’est-ce
pas, en effet, l’échec infligé au citoyen Le
Lièvre, lors de l’élection sénatoriale, qui est
la cause des difficultés d’aujourd’hui?
Si le patriarche de la démocratie avait
été réélu, non-seulement il ne serait pas
devenu un gros embarras, et on ne serait
pas conduit à chercher à le récuser, mais il
protégerait de son influence les candidatures
amies !
En ce qui le concerne personnellement, le
citoyen Marchai n’aurait à combattre que
les députés sortants et non ses prétendus
maîtres vénérés !
C’est là, nous le répétons, le commen
cement du châtiment.
-s*
Quand les intransigeants combattent des
candidats républicains, ils ne manquent
jamais, après les avoir accusés de clérica
lisme, de les traiter de bonapartistes ou
d’orléanistes, selon les époques.
Après les premières années qui suivirent
la chute de l’empire, tous les candidats qui
n’étaient pas intransigeants ou ne. voulaient
pas feindre de l’être étaient des bonapartis
tes.
On craignait encore le bonapartisme ; au
jourd’hui, c’est l’orléanisme qui tient la
corde dans le parti conservateur, et les
candidats simplement républicains, voire
même radicaux, sont traités d’orléanistes.
J’ai lu dans le journal de Rochefort et
dans celui, du citoyen Basset que Gambetta,
Jules Ferry et tous les membres de l’union
rêpublica.ne étaient des orléanistes plus ou
moins déguisés. Ii n’y a donc pas lieu de
s’étonner que l’honorable M. Bourli r soit
traité d’orléaniste par le Radical algérien.
Demandez-lui pourquoi. Il n’en sait trop
rien. Il l’avance, à tout hasard. Il reconnaît
bien que M. Bourlier n’en a jamais fait
l’aveu.
Mais, dit-il, son passé l’affirme.
— Comment cela, s’il vous plaît ?
On se garde bien de le dire.
— La seule preuve qu’on en donne, est
que M. Bourlier n’a pas fait de grands
efforts pour détruire cette ridicule accusa
tion.
Et, en eflV t, m quoi pourrait-on l’ap
puyer pour ét b m- l’orléanisme de cet hono
rable candidat ?
En 1848, lorsque la révolution de février
éclata, M. Bourlier avait 17 ans; il était bien
jeune pour avoir une opinion politique et
s’il en avait une, je ne crois pas qu’à ce mo
ment il Tait f rit connaître à M. Basset et
encore moins à M. Marchai.
Médecin militaire sous l’empire, il fit son
devoir devant l’ennemi et je me suis laissé
dire que Tors‘de l’épidémie cholérique qui
sévit avec tant de rigueur sur la colonne
espèditionnàiie du Maroc en 1859, il fit
preuve d’assez de courage et de dévouement
pour mériter la croix des braves. Ce n’était
fà, je crois, ni du bonapartisme ni de l’or
léanisme, mais tout simplement du patrio
tisme.
La vérité et, que la carrière politique de
M. Bourlier n’a commencé qu’en 1872 et il a
bien fallu qu'à cette époque, il se soit mon
tré républicain dans ses actes et dans ses
paroles, puisque c’est en cette qualité qu’il
fut élu en octobre 1872 membre du Conseil
général d’Alger.
N’oublions pas qu’il fut nommé à Marsa,
lancé contre le baron de Schonen, candidat
réactionnaire, et qu’il était porté sur la listé
de la Solidarité journal qui, à cette époque,
était rédigé par MM. Basset et Marchai.
On était bien près de l’empire en ce
temps-là, comme on en est loin aujourd’hui;
si donc M. Bourlier était républicain aux
yeux de MM. Basset et Marchai, pourquoi
serait-il orléaniste aujourd’hui ? Quel que
soit le mal que ces messieurs aient fait et
fassent encore à la République, je ne crois
pas qu’ils aient réussi à en dégoûter les
hommes intelligents et honnêtes,
— 1 — - —»
L’ENTREPRIS^ OEIZÉRA
Le candidat Marchai continua la campa
gne diffamatoire, contre son concurrent
Bourlier.
C’est à propos de l’entreprise de M’zéra
qu’il attaque aujourd’hui l’honorable candi
dat.
§
Feuilleton de LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE
N° 70.
LA
PAR
Georges OHNET
Mlle de Cia ire font baissa le front en signe
d’assentiment, et se perdit dans une rêverie
profonde. Au bout d’un instant, elle sou-
? ira, et ses yeux s’emplirent de larmes.
ascal pâlit et fit un mouvement vers elle ;
©lie sourit et dit :
Pardonnez-moi... J’ai tant de chagrin.
Je m’oublie...
Elle reprit sa sérénité un peu hautaine :
— Il faudra, Monsieur, que vous ayez la
bonté de venir souvent ici. Nous serons
certainement calomniés : il faut que vous
appreniez à nous connaître, que vous viviez
de notre existence, afin de pouvoir nous
défendre. C’est un sacrifice que je vous im
pose, en vous demandant de fréquenter as
sidûment une maison où vous ne trouverez
qu’un vieillard malade et des femmes attris
tées. J’espère que vous voudrez bien vous y
résigner ?
Il s’inclina sans répondre. Il tremblait à
la fois de crainte et de joie, ravi de voir les
portes du château s’ouvrir devant lui, ef
frayé en pensant au trouble que celte inti
mité allait jeter dans son cœur. Ils se diri
gèrent vers le salon. En entrant, Pascal en
tendit Mlle de Saint-Maurice qui disait à
Malézeau d’une voix furieuse :
— Mais il n’a pas ouvert la bouche ! Ja
mais un avocat aussi peu bavard ne pourra
sauver l’enfant ! Non, vous ne me ferez pas
entrer dans la tête qu’un avocat puisse faire
acquitter son client, s’il ne parle pas deux
heures de suite 1
Et le marquis de répondre, avec sa petite
voix grelottante et vide :
— C’est moi qui ai eu l’idée !... Ne crai
gnez rien, tante Elle est de moi
Elle est bonne !
Pascal rejoignit Malézeau, salua le vieil
lard, la tante Isabelle, et, reconduit par An
toinette jusqu’à la grille, s’éloigna. Il se
présenta chaque jour à Clairefont, à partir
de cette visite et, dès le lendemain, rencon
tra M. de Croix-Mesnil.
Il appréhendait vivement de se trouver en
rapport avec le jeune officier. Il revint bien
vite de scs préventions. Il vit dans le baron
un homme courtois, réservé, un peu froid,
dont il apprécia promptement le réel mérite.
Il se sentit d’autant plus vivement entraîné
vers lui qu’il reconnut, dans celui en qui il
redoutait un rival heureux, un compagnon
de tristesse. L’indifférence charmante avec
là quel lé Antoinette traitait M. de Croix-
Mesnil parut à Pascal le dernier degré du
malheur. Son âme ardente eût préféré de la
haine à cette exquise insensibilité. Il com
prit que le baron aimait Mlle de Clairefont
et ne conservait aucun espoir. Le danger de
Robert était le dernier lien qui l’attachait à
cette maison où il avait rêvé de vivre heu
reux. Il y souffrait maintenant, et n’y venait
que par devoir. Il sut trouver des paroles
louangeuses et délicates à l'adres=e du dé
fenseur de sou ami, et se conduisit avec un
tact raffiné qui lui conquit définitivement
Pascal.
C’était un curieux spectacle que celui de
ces jeunes gens auprès d’Antoinette. Tous
deux passionnément épris et résolus à n’en
rieniaisser voir : l’un, aimable, fin, léger,
dissimulant ses sentiments avec une grâce
aisée et correcte ; l’autre, sévère, âpre, gla
cé, avec des éclats soudains qui illuminaient
ses yeux d’une rayonnante inspiration.
Lorsque Pascal lâchait ainsi, involontai
rement, la bride à sa fougue, un battement
singulier de la paupière, un plissement su
bit de la lèvre donnaient au visage de Mlle
de Clairefont une gravité recueillie. Elle ne
.semblait plus entendre ce qui se passait au
tour d’elle ; on eût dit qu’elle écoutait une
voix intérieure qui lui parlait, impérieuse.
Puis, le jeune homme reprenantson ton me
suré, la physionomie d’Antoinette redeve
nait calme. Ces sensations fugitives n’avaient
peut-être été remarquées que par Malézeau
qui, avec ses yeux tourbillonnant derrière
ses lunettes d’or, voyait fort clair.
Pendant qu’à Clairefont la vie se traînait
ainsi dans l’attente, rue du Marché l’agita
tion ne faisait qu’augmenter. La haine dé
çue, la convoitise trompée, avaient jeté Car-
vajan dans un état de fureur qui faisait
craindre pour sa raison. Dans la ville, une
réaction se produisait ea faveur des victi
mes contre le bourreau.
L’oppression matérielle qu’exerçait le
banquier sur ses tributaires les laissait li
bres de leurs impressions morales. S’il pou
vait les contraindre à agir dans tel sens, il
ne pouvait les forcer à penser telle chose.
Et la majorité se déclarait décidément en
faveur du fils contre le père. Carvajan, sans
sortir de chez lui, avec l’admirable instinct
qui le guidait toujours, se rendait un compte
parfaitement exact de l'état des esprits. Il
se faisait en lui une sorte de répercus-Ton
de l’opinion publique. Il pesait, il compa
raît, et, avec fureur, il était obligé de s’a
vouer qu’entre ce jeune homme, qui n’avait
jamais fait de mal à personne, et lui, le ty
ran de La Neuville, oa n’hésitait pas. Lors
que Fleury, pour essayer de le calmer, lui
disait le contraire, il l’interrompait avec
violence :
— Taisez vous, imbécile, vous ne savez
point de quoi vous parlez ! C’est Pascal qui
nous perd ! Vous ne le connaissez pas...
Je n’aurais pas dû le laisser revenir. Il re
tournera comme un gant tous ceux qui l’en-
tendrcnt... Triple brute que j’ai été de me
brouiller avec lui ! C’est la passion qui m’a
emporté!... La passion ne fait faire que
des sottises ! Si j’avais raisonné, au lieu de
m’emporter, nous aurions eu Clairefont
pour prix de la liberté de ce butor, dont la
condamnation ne sera pour moi qu’uue
bien mince satisfaction... Je me suis cou*-
duit comme une bête î (A suivre)^
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