Titre : La Dépêche algérienne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1885-08-01
Contributeur : Robe, Eugène (1890-1970). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32755912k
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 01 août 1885 01 août 1885
Description : 1885/08/01 (A1,N16). 1885/08/01 (A1,N16).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t5447987
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-10449
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/04/2021
PREFECTURE . D'ALGER
DEPOT I.EGAI,
Première année. N° 16. Le numéro S centimes. Samedi, 1" août 1885.
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
Algérie .
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois
. ......... 4.50 ©
Un an
18
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
Tontes les communications relatives aux annnonces et réclames doivent, es
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, Alger.
En France, les communications sont reçues savoir :
A Marseille, chez M. Gustave ALLARD, rue du Bausset, 4 :
A Paris, chez MM. AUDBOURG et C ! «, place de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
France..
6 12
»4
La DÉPÊCHE ALGERIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, judiciaires et autres
exigées pour la validité des procédures et contrats.
Alger, le 31 juillet 1885.
Politique' du Jour
Les derniers avis parvenus du Dahomey
annoncent que les habitants de ce royaume,
où le roi prend des bains dans le sang de
ses sujets, n’ont fait aucune autre tentative
d’attaque sur les possessions françaises de
Porto-Novo.
Cette nouvelle clôt le bec d’une façon dé
finitive aux organes intransigeants qui an
nonçaient déjà dans leur style exagérée
« une grosse aventure. »
Restez en paix, braves gens, votre désir
n’est pas encore une réalité, et ne le sera
jamais, nous l’espérons.
*
* *
Toujours l’opposition malveillante et mal
informée. Ces tains journaux, nous apprend
ï’agence Havas, ont répandu le bruit que
sur les douze millions de crédits demandés
pour l’expédition de Madagascar, sept déjà
avaient été dépensés ; sur ce, commentaires
défavorables pour le ministère et pour la Ré
publique.
Nous voudrions bien savoir de quels per
sonnages les journaux en question tiennent
cette^mirifique information.
En admetiant encore, ce qui n’est pas,
que les organes en question soient dans le
vrai, qu’est-ce que cela prouverait. Cette
nouvellle dont ils font une monstruosité, est,
en réalité, toute simple.
On ne soutient pas une croisière de trois
ans avec des noyaux de pêche, ce nous sem
ble. Chacun le comprend, et si le crédit est
déjà entamé, la Chambre, juste et patriote
avant toutes chosese, se fera un devoir d’en
voter de nouveaux.
Encore une fois, ces soutiens de l’autel
verront leurs attaques se changer en eau de
boudin. Ce qui ne peut manquer de se pro
duire régulièrement maintenant, car on est
écœuré de ces agressions inqualifiables et
souverainement injustes.
*
* *
Il paraît que les sauterelles ont fait leur
apparition daus la région de Sètif. C’est
certainement un grand malheur pour l'Al
gérie. Mais les conséquences n’en seront
pas, cette année du moins, aussi considéra
bles qu’on le pense généralement, La saison
est fort avancée et l’éclosion des criquets, si
éclosion il y a, ne pourra se produire qu’au
mois d’octobre. A ce moment, la rigueur de
la température empêchera la propagation
des terribles insectes.
Le danger sera plus redoutable l’année
prochaine. Aussi, dès maintenant, il faut se
mettre en mesure de l’arrêter.
Les terres où les sauterelles se seront
abattues, devront être soigneusement exa
minées et pétrolées, si cela est nécessaire,
pour détruire toutes les larves. A cette con
dition, mais à cette condition seulement,
l’Algérie pourra éviter une terrible catas
trophe.
NOS HUISSIERS
Le Chèliff a consacré un important
article à la situation que fait aux huis
siers A,de l’intérieur l’obligation que leur
impose le décret de 1813 de remettre, en
personne, aux destinataires la copie des
exploits qui les concernent.
On ne saurait contester la valeur morale
de cette obligation. La constatation de re
mise de la copie par l’huissier est la meil
leure des garanties que le législateur pou
vait donner aux justiciables, peut-être
même la seule pratiquement possible.
Aussi comprend-on très bien que l’inexécu-
tioa de ce devoir ait été punie de peines
rigoureuses.
Toutefois, faut-il encore que cette pres
cription, bien que d’ordre public, ne ren
contre pas des obstacles matériels insur
montables, et, en 1813, on ne songeait
guère à l’Algérie. Personne ne prévoyait
que nous l’occuperions un jour et que nous-
y introduirions tout notre cortège de lois et
de règlementations.
Il est probable que si la loi était refaite
aujourd'hui, on tiendrait compte des impos-
i sibilités qui s’opposent à sa stricte applica
tion dans l’intérieur de l’Algérie.
Comme le dit avec raison notre confrère
d’O rlèansville, « dans des cantons qui ont quel
quefois 150 kilomètres de largeur,où il n’y a
pas de route, où il faut à la * fois satisfaire
au service des audiences, aux exigences de
la justice criminelle, aux ordres des parti
culiers, il est matériellement impossible
que l’huissier soit à la fois à l’audience,
dans les douars, dans les villages et à son
étude. Il ne peut pas entreprendre tous les
jours des transports qui exigent souvent 4
journées pour l’aller et le retour, et cela
avec 45 degrés de chaleur à l’ombre et 60
au soleil.
« Il est matériellement impossible que
| l’huissier le plus vigoureux, ayant les meil
leurs chevaux puisse dans l’intérieur faire
son service comme le décret de 1813 exige
qu’il soit fait. »
Cependant telle est la loi, dura lex sed
lex, et on ne peut pas plus en vouloir aux
parquets d’en exiger la stricte exécution,
qu’aux tribunaux d’appliquer les peines
qu’elle édicte, lorsqu’il est bien constaté que
la loi a été violée.
Tout ce qu’il y a à faire, c’est d’en modi
fier les dispositions inapplicables, et c’est ce
qu’avait fait le décret du 1 r septembre 1847,
en autorisant, en territoire militaire pour les
indigènes situés hors d’une certaine zône,
les significations au bureau arabe qui faisait
remettre les copies aux intéressés par les
cavaliers dont il disposait.
Mais il n’existe plus, sauf dans le Sud, ni
territoires militaires, ni bureaux arabes, et
voici les huissiers remis en présence du dé
cret de 1813.
Le Chèliff estime qu’il y aurait lieu d’au
toriser les huissiers à remettre aux commu
nes mixtes les exploits destinés aux indi
gènes, dans les mêmes conditions que la
chose avait lieu pour les bureaux arabes,
c’est-à-dire en allouant aux cavaliers
chargés de ce soin, partie des frais de trans
port attribués aux huissiers.
Nous n’y contredisons pas ; il y aurait,
d’une part, économie pour les plaideurs, et,
de l’autre, on pourrait, par une règlemen
tation bien étudiée, mettre fin aux abus trop
nombreux auxquels donnent lieu les frais
de transport. Il y aurait avantage à tuer du
coup la vache à lait, de laquelle beaucoup
d’huissiers tirent la plus grosse, part de leurs
revenus, en omettant de répartir les fra : s
entre les divers intéressés, et en comptant à
chacun d’eux le coût d’un transport col-
. lectif.
Cette concession légitime faite aux con
ditions spéciales dans lesquels se trouvent
les huissiers de l’intérieur, tant pis pour
ceux qui ne se conformeraient pas, soit dans
les campagnes, soit dans les villes, aux
prescriptions du décret de 1813. Les tribu
naux ne sauraient alors se montrer trop ri
goureux vis-à-vis des contrevenants.
Intonations algériennes
La Compagnie de l’Est-Algérien a l’hon
neur d’informer le public qu’à partir du 15
août prochain, et à titre provisoire, l’arrêt
de Fontaine-Chaude (ligne d’El-Gùerah à
Batna), sera ouvert au service des voya
geurs sans bagages.
X
Sur la réclamation de l’agent français, le
Sultan du Maroc a fait mettre en liberté
l’Algérien qui avait été arrêté illégalement,
et il a désavoué le caïd El-Hachemi, en ex
primant tous ses regrets de l’incideut.
X
A partir du 1 er août prochain, les bureaux
désignés ci-après seront mis en activité, sa
voir :
Facteurs-boîtiers : Isserville, Kherba.
Distributions auxiliaires : Ben-Chicao,
Camp-des-Chêues, Bir-Saf-Sif, Pont-du-
Caïd.
X
Dans la journée du 26, un incendie con
sidérable a éclaté dans la plaine du Chèliff,
le long des deux côtés de la route d’Inker-
mann à Renault. De deux heures après midi
à trois heures du matin, le feu s’est promené
dans les hautes herbes, mais les fermes et
les douars n’ont pas été atteints, grâce aux
secours organisés promptement et dirigés
par M. l’administrateur Cholard et M Ay~
card, adjoint, accourus de Renault.
M. Defarges, remplaçant l’adjoint muni
cipal d’Ipkermann, en voyage, se trouvait
également sur les lieux. Environ 1,500 hec
tares sont brûlés, mais il y a peu de pertes :
quelques fourrages près du Chèliff.
X
L’émission faite par l’Ouest-Algérien pour-
la construction de la ligne Tabia-Tlemcen a
déjà fait 12 francs de prime.
Cette hausse ne nous surprend pas. Dans,
le compte-rendu officiel du rendement kilo-
métrique des diverses lignes ferrées de
France et d’Algérie,la Compagnie de l’Ouest»
Algérien a été classée au numéro 2. Et
pourtant la province a été éprouvée cruel
lement au point de vue agricole depuis plu
sieurs années.
X
Une cérémonie touchante a eu lieu avant-
hier à la caserne du 2 e zouaves, à Oran.
Touriac, sergent à ce régiment, s’était
engagé dans la légion pour aller au Tonkia
où il s’est bravement conduit.
Blessé à Chu, il avait mérité la médailles,
militaire.
La remise officielle de la médaille lui a
été faite par le colonel, en présence du régi
ment.
Le père du médaillé assistait à cette fête
patriotique.
X
Le projet du railway, entre Alger et La—
ghouat, a été déposé hier sur le bureau de
| la Chambre.
X
Feuilleton de LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE
n° 15.
LA
PAR
Georges OHNET
Et le sucre, adroitement soulevé avec la
pince, sonnait au fond de la tasse, d’où s’é
chappait une vapeur brûlante et parfumée.
La tante Isabelle avait, elle, le département
de la cave à liqueurs, et c’était d’un air de
gendarme qu’elle présentait ses carafons.
Un verre de kummel, M. Malézeau ?
— Je vous suis très obligé, Mademoiselle,
mais je prendrai, si vous le permettez, Ma
demoiselle, de la fine champagne... Vieille
habitude, Mademoiselle. Mais tous vos pro
duits nouveaux ne sont pas de mon goût...
— A votre guise ! On ne vous invite pas à
déjeuner pour vous faire violence... Toi,
Robert, je ne t’ofire rien... Tu as besoin de
te modérer...
Elle adressa à son neveu un regard si
gnificatif. Mais le jeune homme enleva
lestement le carafon des mains de Mlle
de Saint-Maurice, et, s’éloignant de quel
ques pas :
— Comment, tante, vous voulez me se
vrer ? dit-il, mais j’ai passé l’âge !
— Au moins, mauvais sujet, rien qu’un
verre !
— Un tout petit !
Et le jeune comte, versant à même sa
tasse, l’emplit jusqu’au bord.
Dans sa large existence de gentilhomme
campagnard, Robert avait pris des habitu
des et des appétits violents auxquels il lui
était maintenant difficile de résister. Sa na
ture athlétique lui permettait les excès
qui suivent toujours les repas de chasse,
lorsque, las d’avoir couru les bois et les
champs, on prolonge la soirée entre hom
mes, les coudes sur la table, en fumant.
Il était connu pour un des plus solides
buveurs de la province, et en tirait vanité .
Il avait soutenu, dans l’excitation du plaisir,
des gageures absurdes, comme, par exem
ple, de boire plusieurs tasses de ce qu’on
appelle le café aux quatre couleurs, mélange
affreux de cognac, de chartreuse, de kirsch
et d’absinthe, fait pour affoler le plus solide
cerveau.
Sa tête et son estomac résistaient à ces
dangereuses épreuves. Et il éprouvait une
fierté stupide quand on lui disait : Vous,
Clairefont, qui êtes un si beau gobelet...
C’était sa gloire, à ce grand garçon, de
tenir tète sans fléchir aux plus rudes ivro
gnes du département.
Il avait commencé à boire par ostenta
tion, et, peu à peu, i’habitude aidant, il
avait fini, par y prendre du plaisir. Il ne dé
daignait pas, le dimanche, de descendre
chez Pourtois. Là il jouait aux quilles, et
s’attablait avec les jeunes gens de la ville.
On ne le traitait .pas, lui, comme ou avait
traité son père au temps de sa jeunesse,
avec une crainte respectueuse. Mais quelle
différence aussi entre ce Clairefont gigan
tesque, haut en couleur, un peu débraillé,
très bruyant, prêtant à la familiarité, et le
Clairefont petit, mince, correct, froid, d’une
politesse exquise, qui savait si bien tenir
les gens à distance ! C’était le jour et la
nuit. Et on se demandait par quel miracle
de la nature ce fils était né de ce père.
Dans les premiers temps, l’intempérance
de Robert avait inquiété le marquis. Il était
descendu des nuages de ses conceptions
scientifiques, et avait traité très gravement
cette question fort terrestre. Il adressa de
vifs reproches à son fils. Mais il se beurta à
la tante de Saint-Maurice qui arrivait à la
rescousse.
La vieille Bradamante trouva des argu
ments pour pallier les torts de son neveu.
Qnoi ! tant de bruit pour quelques rasades !
Les ancêtres s’en entonnaient bien d’autres !
Et on se souvenait de ce Clairefont qui,
sous Louis XIII, avait renchéri sur Bas-
sompierre en vidant, lui, ses deux bottes à
chaudron pleines de vin de Sicile. Les roués
de la Régence s’en privaient-ils, dans les
fêtes du Palais-Royal '? Et toute une suite
historique de bons vivants, tenant en mains
I le hanap, le gobelet ou le verre, défilait de-
| vaut les yeux du marquis, protestant contre
sa bégueulerie, et proclamant la souverai
neté aristocratique de la bombance. Il était
jeune après tout, ce garçon. Quand il s’a
muserait un peu avec ses amis, où serait le
mal ? Il fallait bien lui laisser jeter son pre
mier feu...
— Qu’il le jette! Au moins, disait Ho
noré, qu’il ne le noie pas !
— Eh ! mon cher, votre fils n’est pas un
être chétif et délicat comme vous, s’écriait
la tante Isabelle, c’est un « Goliathre ! »
Le marquis morigéna Robert, qui promit
d’être plus sobre. Mais c’était plus fort que
lui. Aussitôt qu’il se trouvait avec quelques
chasseurs devant de vieilles bouteilles, il
s’animait, parlait, criait, et les sages résolu
tions s’effaçaient de son souvenir.
Ce qu’il y avait de plus graves dans son
cas, c'est que, doux comme un mouton
dans le courant habituel de la vie, il deve
nait, quand il avait une pointe d’ivresse,
méchant comme un loup. Il tapait dur, et
les gens prudents se mettaient hors de la
portée de son bras,
Il avait eu, l’année précédente, une fâ
cheuse affaire. Après un dîner d’ouverture
où les exploits des tireurs avaient été co
pieusement célébrés, il avait à moitié as
sommé un garçon d’écurie qui, par erreur,
avait attelé à son break le cheval d’un autres,
invité.
(A suivre ,)
DEPOT I.EGAI,
Première année. N° 16. Le numéro S centimes. Samedi, 1" août 1885.
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
Algérie .
ABONNEMENTS :
Trois mois Six mois
. ......... 4.50 ©
Un an
18
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rue de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
Tontes les communications relatives aux annnonces et réclames doivent, es
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, Alger.
En France, les communications sont reçues savoir :
A Marseille, chez M. Gustave ALLARD, rue du Bausset, 4 :
A Paris, chez MM. AUDBOURG et C ! «, place de la Bourse, 10,
Et par leurs correspondants.
France..
6 12
»4
La DÉPÊCHE ALGERIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, judiciaires et autres
exigées pour la validité des procédures et contrats.
Alger, le 31 juillet 1885.
Politique' du Jour
Les derniers avis parvenus du Dahomey
annoncent que les habitants de ce royaume,
où le roi prend des bains dans le sang de
ses sujets, n’ont fait aucune autre tentative
d’attaque sur les possessions françaises de
Porto-Novo.
Cette nouvelle clôt le bec d’une façon dé
finitive aux organes intransigeants qui an
nonçaient déjà dans leur style exagérée
« une grosse aventure. »
Restez en paix, braves gens, votre désir
n’est pas encore une réalité, et ne le sera
jamais, nous l’espérons.
*
* *
Toujours l’opposition malveillante et mal
informée. Ces tains journaux, nous apprend
ï’agence Havas, ont répandu le bruit que
sur les douze millions de crédits demandés
pour l’expédition de Madagascar, sept déjà
avaient été dépensés ; sur ce, commentaires
défavorables pour le ministère et pour la Ré
publique.
Nous voudrions bien savoir de quels per
sonnages les journaux en question tiennent
cette^mirifique information.
En admetiant encore, ce qui n’est pas,
que les organes en question soient dans le
vrai, qu’est-ce que cela prouverait. Cette
nouvellle dont ils font une monstruosité, est,
en réalité, toute simple.
On ne soutient pas une croisière de trois
ans avec des noyaux de pêche, ce nous sem
ble. Chacun le comprend, et si le crédit est
déjà entamé, la Chambre, juste et patriote
avant toutes chosese, se fera un devoir d’en
voter de nouveaux.
Encore une fois, ces soutiens de l’autel
verront leurs attaques se changer en eau de
boudin. Ce qui ne peut manquer de se pro
duire régulièrement maintenant, car on est
écœuré de ces agressions inqualifiables et
souverainement injustes.
*
* *
Il paraît que les sauterelles ont fait leur
apparition daus la région de Sètif. C’est
certainement un grand malheur pour l'Al
gérie. Mais les conséquences n’en seront
pas, cette année du moins, aussi considéra
bles qu’on le pense généralement, La saison
est fort avancée et l’éclosion des criquets, si
éclosion il y a, ne pourra se produire qu’au
mois d’octobre. A ce moment, la rigueur de
la température empêchera la propagation
des terribles insectes.
Le danger sera plus redoutable l’année
prochaine. Aussi, dès maintenant, il faut se
mettre en mesure de l’arrêter.
Les terres où les sauterelles se seront
abattues, devront être soigneusement exa
minées et pétrolées, si cela est nécessaire,
pour détruire toutes les larves. A cette con
dition, mais à cette condition seulement,
l’Algérie pourra éviter une terrible catas
trophe.
NOS HUISSIERS
Le Chèliff a consacré un important
article à la situation que fait aux huis
siers A,de l’intérieur l’obligation que leur
impose le décret de 1813 de remettre, en
personne, aux destinataires la copie des
exploits qui les concernent.
On ne saurait contester la valeur morale
de cette obligation. La constatation de re
mise de la copie par l’huissier est la meil
leure des garanties que le législateur pou
vait donner aux justiciables, peut-être
même la seule pratiquement possible.
Aussi comprend-on très bien que l’inexécu-
tioa de ce devoir ait été punie de peines
rigoureuses.
Toutefois, faut-il encore que cette pres
cription, bien que d’ordre public, ne ren
contre pas des obstacles matériels insur
montables, et, en 1813, on ne songeait
guère à l’Algérie. Personne ne prévoyait
que nous l’occuperions un jour et que nous-
y introduirions tout notre cortège de lois et
de règlementations.
Il est probable que si la loi était refaite
aujourd'hui, on tiendrait compte des impos-
i sibilités qui s’opposent à sa stricte applica
tion dans l’intérieur de l’Algérie.
Comme le dit avec raison notre confrère
d’O rlèansville, « dans des cantons qui ont quel
quefois 150 kilomètres de largeur,où il n’y a
pas de route, où il faut à la * fois satisfaire
au service des audiences, aux exigences de
la justice criminelle, aux ordres des parti
culiers, il est matériellement impossible
que l’huissier soit à la fois à l’audience,
dans les douars, dans les villages et à son
étude. Il ne peut pas entreprendre tous les
jours des transports qui exigent souvent 4
journées pour l’aller et le retour, et cela
avec 45 degrés de chaleur à l’ombre et 60
au soleil.
« Il est matériellement impossible que
| l’huissier le plus vigoureux, ayant les meil
leurs chevaux puisse dans l’intérieur faire
son service comme le décret de 1813 exige
qu’il soit fait. »
Cependant telle est la loi, dura lex sed
lex, et on ne peut pas plus en vouloir aux
parquets d’en exiger la stricte exécution,
qu’aux tribunaux d’appliquer les peines
qu’elle édicte, lorsqu’il est bien constaté que
la loi a été violée.
Tout ce qu’il y a à faire, c’est d’en modi
fier les dispositions inapplicables, et c’est ce
qu’avait fait le décret du 1 r septembre 1847,
en autorisant, en territoire militaire pour les
indigènes situés hors d’une certaine zône,
les significations au bureau arabe qui faisait
remettre les copies aux intéressés par les
cavaliers dont il disposait.
Mais il n’existe plus, sauf dans le Sud, ni
territoires militaires, ni bureaux arabes, et
voici les huissiers remis en présence du dé
cret de 1813.
Le Chèliff estime qu’il y aurait lieu d’au
toriser les huissiers à remettre aux commu
nes mixtes les exploits destinés aux indi
gènes, dans les mêmes conditions que la
chose avait lieu pour les bureaux arabes,
c’est-à-dire en allouant aux cavaliers
chargés de ce soin, partie des frais de trans
port attribués aux huissiers.
Nous n’y contredisons pas ; il y aurait,
d’une part, économie pour les plaideurs, et,
de l’autre, on pourrait, par une règlemen
tation bien étudiée, mettre fin aux abus trop
nombreux auxquels donnent lieu les frais
de transport. Il y aurait avantage à tuer du
coup la vache à lait, de laquelle beaucoup
d’huissiers tirent la plus grosse, part de leurs
revenus, en omettant de répartir les fra : s
entre les divers intéressés, et en comptant à
chacun d’eux le coût d’un transport col-
. lectif.
Cette concession légitime faite aux con
ditions spéciales dans lesquels se trouvent
les huissiers de l’intérieur, tant pis pour
ceux qui ne se conformeraient pas, soit dans
les campagnes, soit dans les villes, aux
prescriptions du décret de 1813. Les tribu
naux ne sauraient alors se montrer trop ri
goureux vis-à-vis des contrevenants.
Intonations algériennes
La Compagnie de l’Est-Algérien a l’hon
neur d’informer le public qu’à partir du 15
août prochain, et à titre provisoire, l’arrêt
de Fontaine-Chaude (ligne d’El-Gùerah à
Batna), sera ouvert au service des voya
geurs sans bagages.
X
Sur la réclamation de l’agent français, le
Sultan du Maroc a fait mettre en liberté
l’Algérien qui avait été arrêté illégalement,
et il a désavoué le caïd El-Hachemi, en ex
primant tous ses regrets de l’incideut.
X
A partir du 1 er août prochain, les bureaux
désignés ci-après seront mis en activité, sa
voir :
Facteurs-boîtiers : Isserville, Kherba.
Distributions auxiliaires : Ben-Chicao,
Camp-des-Chêues, Bir-Saf-Sif, Pont-du-
Caïd.
X
Dans la journée du 26, un incendie con
sidérable a éclaté dans la plaine du Chèliff,
le long des deux côtés de la route d’Inker-
mann à Renault. De deux heures après midi
à trois heures du matin, le feu s’est promené
dans les hautes herbes, mais les fermes et
les douars n’ont pas été atteints, grâce aux
secours organisés promptement et dirigés
par M. l’administrateur Cholard et M Ay~
card, adjoint, accourus de Renault.
M. Defarges, remplaçant l’adjoint muni
cipal d’Ipkermann, en voyage, se trouvait
également sur les lieux. Environ 1,500 hec
tares sont brûlés, mais il y a peu de pertes :
quelques fourrages près du Chèliff.
X
L’émission faite par l’Ouest-Algérien pour-
la construction de la ligne Tabia-Tlemcen a
déjà fait 12 francs de prime.
Cette hausse ne nous surprend pas. Dans,
le compte-rendu officiel du rendement kilo-
métrique des diverses lignes ferrées de
France et d’Algérie,la Compagnie de l’Ouest»
Algérien a été classée au numéro 2. Et
pourtant la province a été éprouvée cruel
lement au point de vue agricole depuis plu
sieurs années.
X
Une cérémonie touchante a eu lieu avant-
hier à la caserne du 2 e zouaves, à Oran.
Touriac, sergent à ce régiment, s’était
engagé dans la légion pour aller au Tonkia
où il s’est bravement conduit.
Blessé à Chu, il avait mérité la médailles,
militaire.
La remise officielle de la médaille lui a
été faite par le colonel, en présence du régi
ment.
Le père du médaillé assistait à cette fête
patriotique.
X
Le projet du railway, entre Alger et La—
ghouat, a été déposé hier sur le bureau de
| la Chambre.
X
Feuilleton de LA DÉPÊCHE ALGÉRIENNE
n° 15.
LA
PAR
Georges OHNET
Et le sucre, adroitement soulevé avec la
pince, sonnait au fond de la tasse, d’où s’é
chappait une vapeur brûlante et parfumée.
La tante Isabelle avait, elle, le département
de la cave à liqueurs, et c’était d’un air de
gendarme qu’elle présentait ses carafons.
Un verre de kummel, M. Malézeau ?
— Je vous suis très obligé, Mademoiselle,
mais je prendrai, si vous le permettez, Ma
demoiselle, de la fine champagne... Vieille
habitude, Mademoiselle. Mais tous vos pro
duits nouveaux ne sont pas de mon goût...
— A votre guise ! On ne vous invite pas à
déjeuner pour vous faire violence... Toi,
Robert, je ne t’ofire rien... Tu as besoin de
te modérer...
Elle adressa à son neveu un regard si
gnificatif. Mais le jeune homme enleva
lestement le carafon des mains de Mlle
de Saint-Maurice, et, s’éloignant de quel
ques pas :
— Comment, tante, vous voulez me se
vrer ? dit-il, mais j’ai passé l’âge !
— Au moins, mauvais sujet, rien qu’un
verre !
— Un tout petit !
Et le jeune comte, versant à même sa
tasse, l’emplit jusqu’au bord.
Dans sa large existence de gentilhomme
campagnard, Robert avait pris des habitu
des et des appétits violents auxquels il lui
était maintenant difficile de résister. Sa na
ture athlétique lui permettait les excès
qui suivent toujours les repas de chasse,
lorsque, las d’avoir couru les bois et les
champs, on prolonge la soirée entre hom
mes, les coudes sur la table, en fumant.
Il était connu pour un des plus solides
buveurs de la province, et en tirait vanité .
Il avait soutenu, dans l’excitation du plaisir,
des gageures absurdes, comme, par exem
ple, de boire plusieurs tasses de ce qu’on
appelle le café aux quatre couleurs, mélange
affreux de cognac, de chartreuse, de kirsch
et d’absinthe, fait pour affoler le plus solide
cerveau.
Sa tête et son estomac résistaient à ces
dangereuses épreuves. Et il éprouvait une
fierté stupide quand on lui disait : Vous,
Clairefont, qui êtes un si beau gobelet...
C’était sa gloire, à ce grand garçon, de
tenir tète sans fléchir aux plus rudes ivro
gnes du département.
Il avait commencé à boire par ostenta
tion, et, peu à peu, i’habitude aidant, il
avait fini, par y prendre du plaisir. Il ne dé
daignait pas, le dimanche, de descendre
chez Pourtois. Là il jouait aux quilles, et
s’attablait avec les jeunes gens de la ville.
On ne le traitait .pas, lui, comme ou avait
traité son père au temps de sa jeunesse,
avec une crainte respectueuse. Mais quelle
différence aussi entre ce Clairefont gigan
tesque, haut en couleur, un peu débraillé,
très bruyant, prêtant à la familiarité, et le
Clairefont petit, mince, correct, froid, d’une
politesse exquise, qui savait si bien tenir
les gens à distance ! C’était le jour et la
nuit. Et on se demandait par quel miracle
de la nature ce fils était né de ce père.
Dans les premiers temps, l’intempérance
de Robert avait inquiété le marquis. Il était
descendu des nuages de ses conceptions
scientifiques, et avait traité très gravement
cette question fort terrestre. Il adressa de
vifs reproches à son fils. Mais il se beurta à
la tante de Saint-Maurice qui arrivait à la
rescousse.
La vieille Bradamante trouva des argu
ments pour pallier les torts de son neveu.
Qnoi ! tant de bruit pour quelques rasades !
Les ancêtres s’en entonnaient bien d’autres !
Et on se souvenait de ce Clairefont qui,
sous Louis XIII, avait renchéri sur Bas-
sompierre en vidant, lui, ses deux bottes à
chaudron pleines de vin de Sicile. Les roués
de la Régence s’en privaient-ils, dans les
fêtes du Palais-Royal '? Et toute une suite
historique de bons vivants, tenant en mains
I le hanap, le gobelet ou le verre, défilait de-
| vaut les yeux du marquis, protestant contre
sa bégueulerie, et proclamant la souverai
neté aristocratique de la bombance. Il était
jeune après tout, ce garçon. Quand il s’a
muserait un peu avec ses amis, où serait le
mal ? Il fallait bien lui laisser jeter son pre
mier feu...
— Qu’il le jette! Au moins, disait Ho
noré, qu’il ne le noie pas !
— Eh ! mon cher, votre fils n’est pas un
être chétif et délicat comme vous, s’écriait
la tante Isabelle, c’est un « Goliathre ! »
Le marquis morigéna Robert, qui promit
d’être plus sobre. Mais c’était plus fort que
lui. Aussitôt qu’il se trouvait avec quelques
chasseurs devant de vieilles bouteilles, il
s’animait, parlait, criait, et les sages résolu
tions s’effaçaient de son souvenir.
Ce qu’il y avait de plus graves dans son
cas, c'est que, doux comme un mouton
dans le courant habituel de la vie, il deve
nait, quand il avait une pointe d’ivresse,
méchant comme un loup. Il tapait dur, et
les gens prudents se mettaient hors de la
portée de son bras,
Il avait eu, l’année précédente, une fâ
cheuse affaire. Après un dîner d’ouverture
où les exploits des tireurs avaient été co
pieusement célébrés, il avait à moitié as
sommé un garçon d’écurie qui, par erreur,
avait attelé à son break le cheval d’un autres,
invité.
(A suivre ,)
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