Titre : La Dépêche algérienne : journal politique quotidien
Éditeur : [s.n.] (Alger)
Date d'édition : 1885-08-02
Contributeur : Robe, Eugène (1890-1970). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32755912k
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 02 août 1885 02 août 1885
Description : 1885/08/02 (A1,N17). 1885/08/02 (A1,N17).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bd6t544799k
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-10449
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/04/2021
VftEKEüTUliE 0 ALGER
r *Kf‘OT [.EGAL
Première année. — N" 17. I .e numéro S centimes. ^À Jy Dimanche, 2 août 1885.
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
AT.ftéttTR . .
ABONNEMENTS :
Trois mois Sii mois
4.50 9
Un an
18
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rne de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
Tontes les communications relatives aux annnonces et réclames doivent, e*
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, Alger.
En France, les communications sont reçues savoir :
A Marseille, chez M. Gustave ALLARD, rue du Bausset, 4 ;
A Paris, chez MM. AUDBOURG et G'», place de la Bourse, 10,
Francvr
6 12
34
La DÉPÊCHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, j udiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats.
Alger, le 1 er Août 1885.
Politique du Jour
M. Clémenceau a répondu hier à M. Ju
les Ferry. Le député de Montmartre, fidèle
à la politique qu’il soutient avec tant d’acri
monie depuis trois années, a reproché à M.
Jules Ferry de n’avoir pas prévenu plus tôt
le pays, reproche qui n’en est pas un, puis
que cent fois pour une, l’ex-président du
conseil a exposé, soit comme ministre, soit
comme député, ses théories sur la politique
coloniale.
M. Clémenceau s’est ensuite étonné que
M. Ferry ait parlé des peuples supérieurs
et des peuples inférieurs. De pareilles pa -
rôles n’auraient pas dû être prononcées dans
un pays libre, s’est écrié dans un beau mou
vement de lyrisme le député de Montmar
tre.
Nous regrettons de ne pas être de l’avis
de M. Clémenceau, mais il n’y a pas à le
cacher, il faut Men reconnaître qu’il existe
des nations civilisées et des peuplades abru
ties. Or, le devoir des peuples éclairés est
de civiliser les ignorants. Tous les moyens
légaux sont bons, n’en déplaise au chef de
l’extrême gauche, pour arriver à ce résul
tat.
M. Clémenceau a quitté la tribune en
mettant en demeure M. Brissou de s’expli
quer. Que! est le ministre ou de M Ferry
ou de M. Brisson, a dit M. Clémenceau.
Avec une grande dignité et un à-propos
hors de pair, M. Brisson a répondu à ce
ce point d’interrogation, tant soit peu spé
cieux. Les crédits ont été votés à une écra
sante majorité en dépit de MM. Lanjuinais,
Guillot et autres opposants.
Une fois de plus, les partisans de la poli
tique mesquine et terre à terre restent sur le
carreau, une fois de plus la Chambre ap
prouve M. Jules Ferry, car il n’y a pas à se
le dissimuler, ce vote de créditsest un blanc-
seing donné au député des Vosges.
Au cours du discours de M. Clémenceau,
un incident des plus pénibles s’e*t pro
duit.
L’extrême gauche, fidèle à ses habitudes,
a donné au public une triste opinion de son
patriotisme, et s’est fait rappeler à la pu
deur par M. Brissou.
Le sinistre farceur, qui a nom Paul de
Cassagnac, s’est conduit en paltoquet et s’est
fait censurer ; tant qu’à M Clovis Hugues,
qui a grossièrement insulté plusieurs de ses
collègues, c’est un personnage remuant et
incapable, dont les électeurs de Marseille
nous débarrasseront bientôt, il faut l’espé
rer.
Et ce sont ces gens qui voudraient pren
dre le pouvoir. Ce serait trop drôle, eu vé
rité.
Les Filés de Coton
La Chambre en se rangeant du côté de
M. Pierre LegraEd, ministre du commerce,
lors de l’interpellation Ballue sur l'admission
en France des filés de coton, a marqué sou
intention de ne pas se créer un embarras.
Comme l’a fort judicieusement dit dureste
M. Pierre Legrand, cet ajournement est ré
clamé par le Gouvernent surtout parce que
nous sommes près des élections et qu’une
pareille mesure serait en ce moment inop
portune, peut-être môme dangereuse.
Cependant les débats de cette question
ont donné lieu à la Chambre, à maintes
contradictions. Les porte-paroles, MM. Bal
lue et Richard Waddington, nous ont
parlé de leurs mandataires, les Lyonnais,
mais ils se sont bien gardés de faire entrer
en cause les ouvriers du Nord. Ceux-là ré
clament de toutes leurs forces, le maintien
des droits qui pèsent sur les produits de
leurs concurrents étrangers Les tisseurs
lyonnais pour lesquels les filés de coton
constituent une indispensable matière pre
mière, réclament l’admission au moins tem
poraire en franchise, des filés anglais moins
chers et disent-ils de meilleur qualité que
les filés français.
Ainsi, dès aujourd’hui, avec le régime
protecteur, les industriels lyonnais souffrent
justement de ce qui profits aux industriels
rouennais ou lillois.
L’admission temporaire de M. Ballue,
renverserait la proposition et les tisseurs du
Nord se plaindraient d’être ruinés par ce
qui ferait la fortune des tisseurs du Midi.
Voilà une de ces contradictions qui peu
vent paraître intéressantes au statiscien, à
l’économiste, mais qui embarrasse certai
nement l’homme d’Etah
En faveur de qui se décider ? FauMl sa
crifier le Nord au Midi. Grave dificulté que
le gouvernemeut actuel a cru sage de ne
pas trancher. Le problème existe toujours
et la prochaine Chambre aura à en trouver
la solution.
La Compagnie de l’Est-Algérien a l’hon
neur d’informer le publie que l’ouverture de
la section de Titen-Yaya à Ras-el-Mâ au
service des voyageurs, bagages et marchan
dises de grande et de petite vitesse, aura
lieu le samedi, f r août 1885.
X
Nous apprenons que le Conseil supérieur
de l’instruction publique vient de décider
qu’à d’avenir, la médaille d’argent serait
accordée aux instituteurs algériens, au mê
me titre qu’à leurs collègues de la métro
pole. Jusqu’à ce jour cette récompense avait
été réservée au personnel enseignant des
écoles de France. Le Conseil supérieur fait
disparaître une inégalité flagrante en accor
dant les mêmes prérogatives aux institu
teurs algériens. Cette médaille aura une
valeur de 200 francs.
X
M. Sturla, directeur de la Compagnie Al
gérienne à Mostaganem, est appelé à diri
ger l’agence de Bel-Abbès.
X
A la suite d’une altercation survenue di
manche dernier et dans laquelle des coups
ont été échangés entre MM. Henri Perez et
Faucon, ce dernier a cru devoir envoyer à
M. Perez deux témoins, MM. Mattéi et
Grassmück, pour lui demander réparation
par les armes de l’offense qu’il prétend avoir
reçue.
Les témoins ont été constitués, mais le
duel n’a pas abouti.
X
On nous communique le décret qui érige
le centre de Bosquet en commune de plein
exercice et le sépare de la commune mixte
de Oassaigne.
X
Les nommés Palonfi, Catalano et Apelli,
soldats à la légion étrangère, qui avaient
déserté le 11 janvier dernier et tiré à Aïn-
el-Arba 15 balles sur des gendarmes, ont
comparu aujourd’hui devaut le Conseil de
guerre. Catalano a été condamné à mort et
ses deux complices chacun à deux ans de
prison.
X
Le premier concours annuel agricole
d’Aïn-Bessem aura lieu les 12, 13 et 14 sep
tembre 1885.
X
Par décret, le Président de la République
a approuvé la délibération du 6 juin der
nier, par laquelle le Conseil municipal de
Souk-Ahras a proposé de donner, à titre
d’hommage public, le nom de go » à la rue de cette ville portant le nom
de rue de Bône.
Correspondance oranaise
Oran, le 29 juillet 1885.
C’est le niveau de l’instruction publique
qui, dans tout pays, détermine celui du pro
grès social.
Aussi, à la fin de l’année scolaire, pen
sons-nous utile de jeter un coup d’oeil sur
la situation de l'enseignement dans notre
département ou plutôt pour ne pas sortir de
notre modeste cadre, de la situation de l’ins
truction dans notre ville.
On sait que l’enseignement a trois degrés :
Il est primaire, secondaire et supérieur. Ce
dernier seul manque chez nous, mais nous
ne tarderons pas à le voir s’organiser dès
que notre lycée en construction sera ter
miné, et que le collège actuel des garçons
sera transformé en établissement d’ensei
gnement secondaire pour les jeunes filles.
Le Conseil municipal, dans sa dernière
séance, a souscrit aux obligations exigées
d’une commune pour cette dernière trans
formation.
Il faut reconnaître à la louange de tous
les conseils municipaux de l’Algérie, que
tous se sont appliqués à propager et à dé
velopper l'instruction et qu’ils n’ont jamais
repoussé les crédits demandés pour cette
grande œuvre d’émancipation intellectuelle.
Vous savez qu’à la suite de l’application
à l’Algérie du décret du 13 février 1883, de
nombreux instituteurs qui touchaient 1,500
et 1,800 francs ont vu leurs traitements ré
duits à 12 et 1,500 fr.
Il y avait là un changement de choses
préjudiciable à de nombreux et intéressants,
fonctionnaires, beaucoup pères de famille et
la plupart ayant quitté la France pour l’Al
gérie où ils espéraient toucher de meilleurs
émoluments.
D un autre côté, il était à craindre que
l’Algérie ne se suffisant pas à elle-même
pour le recrutement de ses instituteurs, 1 on
ne pût en faire 'tenir du continent où le trai
tement étant le môme, la vie est moins chère
et le climat plus tempéré.
Les communes algériennes ont donc pensé*
autant pou>- éviter cette dernière hypoihè-e
que pour obéir à un sentiment de sympathie
à i’égard du corps enseignant qu’il fallait
voter des indemnités qui vaudraient aux
maîtres atteints par le décret de février leur
traitement primitif.
Mais le résultat ne paraît pas avoir ré
pondu aux louables efforts de la commune..
Il nous a été donné de constater avec peine:
que les écoles des frères ont obtenu relati
vement plus de succès que nos écoles laï
ques de garçons, bien entendu
A quoi attribuer cette infériorité? On ne
peut certes mettre en parallèle l’instituteur
laïque et le frère ignorantin tant au point
de vue des connaissances personnel es que
Feuilleton de L.V DEPECHE ALGÉRIENNE
N° 17.
LA
PAR
Georges OHNET
L’homme était resté six semaines sur
flanc. Le comte, dégrisé, s’était montré
; au désespoir, et avait pris vis-à-vis de lui-
même l’engagement formel de fuir les
réunions dangereuses.
Depuis un an il se tenait parole, et la
4anie Isabelle, fièrs de la sagesse de son ne
veu autant qu’elle avait été indulgente
pour sa folie, l'aidait par ses objurgations à
persévérer dans sa louable conduite.
Cette vieille fille, idolâtre de l’unique re
jeton mâle de la noble maison, eût mis le
monde à l’envers pour l’amour de Robert.
Elle le regardait frappant à petits coups
avec sa cuiller sur le sucre qui s’obstinait à
ne pas fondre dans l’eau-de-vie, et admirait
sa robuste prestance. Il avait les épaules
larges et la taille fine, de petites mains au
bout de ses bras d’acier, et une figure éner
gique, rougie par le grand air, éclairée par
des yeux bleus. Ses cheveux et ses sourcils
étaient châtain très foncé, et ses mousta
ches d’un blond très pâle, ce qui donnait à
sa figure une singulière douceur.
Sa sœur formait avec lui un contraste
complet. En elle tout était finesse et grâce.
Lf s deux races dont ils étaient issus se trou
vaient incarnées en eux d’une façon bien
tranchée. L’un était un Saint-Maurice gi
gantesque, aux appétits matériels et vio
lents. L’autre était une Clairefont, délicate,
rêveuse et un peu chimérique. C’est pour
quoi elle aimait tant sou père.
Depuis un instant le notaire piétinait avec
une impatience visible. Le sable criait sous
ses pieds, et il allait de la tonnelle à la ba
lustrade de ia terrasse, agité, nerveux, com
me s’il sentait le désir de brusquer une si
tuation difficile, et cependant n’en avait
pas la hardiesse.
Le marquis, les yeux dans ie vide, sem
blait suivre une vision attrayante. Il sou
riait et, distraitement, ses doigts battaient
une marche sur la table de pierre à laquelle
il s’était accoudé. Quels souvenirs heureux
ou quelle radieuse espérance captivaient
ainsi la pensée du vieillard? Dans quelles
sphères éthêrées, dans quel domaine du bleu
avait-il été transporté par un rêve ?
Il fit soudain un geste brusque, frappa
sur son genou du plat de sa main, et, les
joues colorées par une rougeur joyeuse :
Mon four à courants circulaires don
nera quatre-vingts pour cent d’économie
sur le chauffage actuel, s’écria-t-il d’une
voix triomphante, et il brûlera tous les rési -
dus, toutes les substances inutilisées jus
qu’ici... Ah! ah! Malézeau, vous m’eu
direz des nouvelles... Il y a là une mine
( d'or !
I a figure de Mlle de Saint-Maurice se
rembrunit, elle croisa les bras, et, marchant
avec une désinvolture de gendarme :
— Mon frère, c’est la dixième rois, depuis
quelque temps, que vous découvrez le Pé
rou !
— Oh ! celte fois, c’est la bonne, répliqua
vivement l'inventeur. La découverte que j’ai
faite répond à un besoin impérieux. Toutes
les usines souffrent du prix sans cesse gran
dissant du combustible. Avec mon système,
le charbon devient, sinon inutile, au moins
facile à remplacer. On peut brûler des co
peaux, de la paille mouillée, des débris de
betteraves, des cannes à sucre... Vous com
prenez l’importance du procédé... Les
grèves, dans les bassins houillers, seront
inefficaces, et ne mettront plus en danger
l’industrie universelle. Aussitôt mes brevets
pris, j’aurai des traités avec les grandes usi
nes du monde. C’est un revenu formidable,
vous dis-je, et assuré... Je suis tellement
certain du succès que je risquerais mon
nom, s’il le fallait, dans cette entreprise.
— Mon frère, un gentilhomme n’a pas le
droit de disposer de son nom, interrompit
rudement la vieille fille
— C’est vrai, dit gravement Je marquis.
Ce nom est à tous ceux qui l’ont porté avant
moi, et je dois le transmettre intact à ceux
qui|me suivront... Mais croyez, tante, qu’il
ne serait pas diminué si j’y attachais l’hon
neur d’une si belle conquête industrielle,
— Vous savez depuis longtemps ce que
je pense de vos recherches. Dn homme tel
que vous n’a rien à gagner et a tout à per
dre dans ces besognes d’ouvrier.
Mais, interrompit le marquis en sou
riant. le roi Louis XVI faisait de la serru
rerie. ,
— Aussi vous voyez comme cela lui a
réussi ! s’écria triomphalement Mlle de Saint--
Maurice.
— Vous ne pensez pas, au moins, que je
mourrai sur l’échafaujci ?
— Non ! mais vous mourez sur la paille l
Antoinette s’était approchée : elle prit Lau
tante Isabelle par le cou .
— Allons, soyez bonne, murmura-t-ell©
tout bas... ménagez mon père
— Ta ta ta ! Te voilà bien, toi, enjôleuse^
dit la vieille fille, dont la barbe se hérissa-
Tu es p >ur moitié dans les folies de mon
sieur ton père!... Au lieu de le critiquer*
tu l’encourages... Et j’en suis pour ce que
je dis : Nous le verrons sur le fumier, com
me « Jacob »... Au reste, mou cher, Dites
ce que vous voudrez .. Voilà M. Malézeau
qui a sans doute à vous parler de vos affai
res... Ecoulez-le et tâchez de profiler d*
ses avis.
Au mot « affaires », Robert avait fait un
pas dans la direction du perron. Le mar
quis jeta à son notaire un regard pieia-
d’une tranquillité souriante, et, s’appuyant
sur les bras de sa fille avec une caressante
paresse :
— Eh bien ' mon cher Malézeau, je suis
à vous... Désirez-vous que nous renu-inn-.?
— Monsieur le marquis, je le préférerais ;
j’ai certains relevés de compte à vous sou.-
mettre, Monsieur le marquis... Et je crois
J
r *Kf‘OT [.EGAL
Première année. — N" 17. I .e numéro S centimes. ^À Jy Dimanche, 2 août 1885.
JOURNAL POLITIQUE QUOTIDIEN
AT.ftéttTR . .
ABONNEMENTS :
Trois mois Sii mois
4.50 9
Un an
18
ADMINISTRATION ET RÉDACTION :
Rne de la Marine, n° 9, ancien hôtel Bazin.
Tontes les communications relatives aux annnonces et réclames doivent, e*
Algérie, être adressées à l’AGENCE HAVAS, boulevard de la République, Alger.
En France, les communications sont reçues savoir :
A Marseille, chez M. Gustave ALLARD, rue du Bausset, 4 ;
A Paris, chez MM. AUDBOURG et G'», place de la Bourse, 10,
Francvr
6 12
34
La DÉPÊCHE ALGÉRIENNE est désignée pour l’insertion des annonces légales, j udiciaires et autres exigées pour la validité des procédures et contrats.
Alger, le 1 er Août 1885.
Politique du Jour
M. Clémenceau a répondu hier à M. Ju
les Ferry. Le député de Montmartre, fidèle
à la politique qu’il soutient avec tant d’acri
monie depuis trois années, a reproché à M.
Jules Ferry de n’avoir pas prévenu plus tôt
le pays, reproche qui n’en est pas un, puis
que cent fois pour une, l’ex-président du
conseil a exposé, soit comme ministre, soit
comme député, ses théories sur la politique
coloniale.
M. Clémenceau s’est ensuite étonné que
M. Ferry ait parlé des peuples supérieurs
et des peuples inférieurs. De pareilles pa -
rôles n’auraient pas dû être prononcées dans
un pays libre, s’est écrié dans un beau mou
vement de lyrisme le député de Montmar
tre.
Nous regrettons de ne pas être de l’avis
de M. Clémenceau, mais il n’y a pas à le
cacher, il faut Men reconnaître qu’il existe
des nations civilisées et des peuplades abru
ties. Or, le devoir des peuples éclairés est
de civiliser les ignorants. Tous les moyens
légaux sont bons, n’en déplaise au chef de
l’extrême gauche, pour arriver à ce résul
tat.
M. Clémenceau a quitté la tribune en
mettant en demeure M. Brissou de s’expli
quer. Que! est le ministre ou de M Ferry
ou de M. Brisson, a dit M. Clémenceau.
Avec une grande dignité et un à-propos
hors de pair, M. Brisson a répondu à ce
ce point d’interrogation, tant soit peu spé
cieux. Les crédits ont été votés à une écra
sante majorité en dépit de MM. Lanjuinais,
Guillot et autres opposants.
Une fois de plus, les partisans de la poli
tique mesquine et terre à terre restent sur le
carreau, une fois de plus la Chambre ap
prouve M. Jules Ferry, car il n’y a pas à se
le dissimuler, ce vote de créditsest un blanc-
seing donné au député des Vosges.
Au cours du discours de M. Clémenceau,
un incident des plus pénibles s’e*t pro
duit.
L’extrême gauche, fidèle à ses habitudes,
a donné au public une triste opinion de son
patriotisme, et s’est fait rappeler à la pu
deur par M. Brissou.
Le sinistre farceur, qui a nom Paul de
Cassagnac, s’est conduit en paltoquet et s’est
fait censurer ; tant qu’à M Clovis Hugues,
qui a grossièrement insulté plusieurs de ses
collègues, c’est un personnage remuant et
incapable, dont les électeurs de Marseille
nous débarrasseront bientôt, il faut l’espé
rer.
Et ce sont ces gens qui voudraient pren
dre le pouvoir. Ce serait trop drôle, eu vé
rité.
Les Filés de Coton
La Chambre en se rangeant du côté de
M. Pierre LegraEd, ministre du commerce,
lors de l’interpellation Ballue sur l'admission
en France des filés de coton, a marqué sou
intention de ne pas se créer un embarras.
Comme l’a fort judicieusement dit dureste
M. Pierre Legrand, cet ajournement est ré
clamé par le Gouvernent surtout parce que
nous sommes près des élections et qu’une
pareille mesure serait en ce moment inop
portune, peut-être môme dangereuse.
Cependant les débats de cette question
ont donné lieu à la Chambre, à maintes
contradictions. Les porte-paroles, MM. Bal
lue et Richard Waddington, nous ont
parlé de leurs mandataires, les Lyonnais,
mais ils se sont bien gardés de faire entrer
en cause les ouvriers du Nord. Ceux-là ré
clament de toutes leurs forces, le maintien
des droits qui pèsent sur les produits de
leurs concurrents étrangers Les tisseurs
lyonnais pour lesquels les filés de coton
constituent une indispensable matière pre
mière, réclament l’admission au moins tem
poraire en franchise, des filés anglais moins
chers et disent-ils de meilleur qualité que
les filés français.
Ainsi, dès aujourd’hui, avec le régime
protecteur, les industriels lyonnais souffrent
justement de ce qui profits aux industriels
rouennais ou lillois.
L’admission temporaire de M. Ballue,
renverserait la proposition et les tisseurs du
Nord se plaindraient d’être ruinés par ce
qui ferait la fortune des tisseurs du Midi.
Voilà une de ces contradictions qui peu
vent paraître intéressantes au statiscien, à
l’économiste, mais qui embarrasse certai
nement l’homme d’Etah
En faveur de qui se décider ? FauMl sa
crifier le Nord au Midi. Grave dificulté que
le gouvernemeut actuel a cru sage de ne
pas trancher. Le problème existe toujours
et la prochaine Chambre aura à en trouver
la solution.
La Compagnie de l’Est-Algérien a l’hon
neur d’informer le publie que l’ouverture de
la section de Titen-Yaya à Ras-el-Mâ au
service des voyageurs, bagages et marchan
dises de grande et de petite vitesse, aura
lieu le samedi, f r août 1885.
X
Nous apprenons que le Conseil supérieur
de l’instruction publique vient de décider
qu’à d’avenir, la médaille d’argent serait
accordée aux instituteurs algériens, au mê
me titre qu’à leurs collègues de la métro
pole. Jusqu’à ce jour cette récompense avait
été réservée au personnel enseignant des
écoles de France. Le Conseil supérieur fait
disparaître une inégalité flagrante en accor
dant les mêmes prérogatives aux institu
teurs algériens. Cette médaille aura une
valeur de 200 francs.
X
M. Sturla, directeur de la Compagnie Al
gérienne à Mostaganem, est appelé à diri
ger l’agence de Bel-Abbès.
X
A la suite d’une altercation survenue di
manche dernier et dans laquelle des coups
ont été échangés entre MM. Henri Perez et
Faucon, ce dernier a cru devoir envoyer à
M. Perez deux témoins, MM. Mattéi et
Grassmück, pour lui demander réparation
par les armes de l’offense qu’il prétend avoir
reçue.
Les témoins ont été constitués, mais le
duel n’a pas abouti.
X
On nous communique le décret qui érige
le centre de Bosquet en commune de plein
exercice et le sépare de la commune mixte
de Oassaigne.
X
Les nommés Palonfi, Catalano et Apelli,
soldats à la légion étrangère, qui avaient
déserté le 11 janvier dernier et tiré à Aïn-
el-Arba 15 balles sur des gendarmes, ont
comparu aujourd’hui devaut le Conseil de
guerre. Catalano a été condamné à mort et
ses deux complices chacun à deux ans de
prison.
X
Le premier concours annuel agricole
d’Aïn-Bessem aura lieu les 12, 13 et 14 sep
tembre 1885.
X
Par décret, le Président de la République
a approuvé la délibération du 6 juin der
nier, par laquelle le Conseil municipal de
Souk-Ahras a proposé de donner, à titre
d’hommage public, le nom de
de rue de Bône.
Correspondance oranaise
Oran, le 29 juillet 1885.
C’est le niveau de l’instruction publique
qui, dans tout pays, détermine celui du pro
grès social.
Aussi, à la fin de l’année scolaire, pen
sons-nous utile de jeter un coup d’oeil sur
la situation de l'enseignement dans notre
département ou plutôt pour ne pas sortir de
notre modeste cadre, de la situation de l’ins
truction dans notre ville.
On sait que l’enseignement a trois degrés :
Il est primaire, secondaire et supérieur. Ce
dernier seul manque chez nous, mais nous
ne tarderons pas à le voir s’organiser dès
que notre lycée en construction sera ter
miné, et que le collège actuel des garçons
sera transformé en établissement d’ensei
gnement secondaire pour les jeunes filles.
Le Conseil municipal, dans sa dernière
séance, a souscrit aux obligations exigées
d’une commune pour cette dernière trans
formation.
Il faut reconnaître à la louange de tous
les conseils municipaux de l’Algérie, que
tous se sont appliqués à propager et à dé
velopper l'instruction et qu’ils n’ont jamais
repoussé les crédits demandés pour cette
grande œuvre d’émancipation intellectuelle.
Vous savez qu’à la suite de l’application
à l’Algérie du décret du 13 février 1883, de
nombreux instituteurs qui touchaient 1,500
et 1,800 francs ont vu leurs traitements ré
duits à 12 et 1,500 fr.
Il y avait là un changement de choses
préjudiciable à de nombreux et intéressants,
fonctionnaires, beaucoup pères de famille et
la plupart ayant quitté la France pour l’Al
gérie où ils espéraient toucher de meilleurs
émoluments.
D un autre côté, il était à craindre que
l’Algérie ne se suffisant pas à elle-même
pour le recrutement de ses instituteurs, 1 on
ne pût en faire 'tenir du continent où le trai
tement étant le môme, la vie est moins chère
et le climat plus tempéré.
Les communes algériennes ont donc pensé*
autant pou>- éviter cette dernière hypoihè-e
que pour obéir à un sentiment de sympathie
à i’égard du corps enseignant qu’il fallait
voter des indemnités qui vaudraient aux
maîtres atteints par le décret de février leur
traitement primitif.
Mais le résultat ne paraît pas avoir ré
pondu aux louables efforts de la commune..
Il nous a été donné de constater avec peine:
que les écoles des frères ont obtenu relati
vement plus de succès que nos écoles laï
ques de garçons, bien entendu
A quoi attribuer cette infériorité? On ne
peut certes mettre en parallèle l’instituteur
laïque et le frère ignorantin tant au point
de vue des connaissances personnel es que
Feuilleton de L.V DEPECHE ALGÉRIENNE
N° 17.
LA
PAR
Georges OHNET
L’homme était resté six semaines sur
flanc. Le comte, dégrisé, s’était montré
; au désespoir, et avait pris vis-à-vis de lui-
même l’engagement formel de fuir les
réunions dangereuses.
Depuis un an il se tenait parole, et la
4anie Isabelle, fièrs de la sagesse de son ne
veu autant qu’elle avait été indulgente
pour sa folie, l'aidait par ses objurgations à
persévérer dans sa louable conduite.
Cette vieille fille, idolâtre de l’unique re
jeton mâle de la noble maison, eût mis le
monde à l’envers pour l’amour de Robert.
Elle le regardait frappant à petits coups
avec sa cuiller sur le sucre qui s’obstinait à
ne pas fondre dans l’eau-de-vie, et admirait
sa robuste prestance. Il avait les épaules
larges et la taille fine, de petites mains au
bout de ses bras d’acier, et une figure éner
gique, rougie par le grand air, éclairée par
des yeux bleus. Ses cheveux et ses sourcils
étaient châtain très foncé, et ses mousta
ches d’un blond très pâle, ce qui donnait à
sa figure une singulière douceur.
Sa sœur formait avec lui un contraste
complet. En elle tout était finesse et grâce.
Lf s deux races dont ils étaient issus se trou
vaient incarnées en eux d’une façon bien
tranchée. L’un était un Saint-Maurice gi
gantesque, aux appétits matériels et vio
lents. L’autre était une Clairefont, délicate,
rêveuse et un peu chimérique. C’est pour
quoi elle aimait tant sou père.
Depuis un instant le notaire piétinait avec
une impatience visible. Le sable criait sous
ses pieds, et il allait de la tonnelle à la ba
lustrade de ia terrasse, agité, nerveux, com
me s’il sentait le désir de brusquer une si
tuation difficile, et cependant n’en avait
pas la hardiesse.
Le marquis, les yeux dans ie vide, sem
blait suivre une vision attrayante. Il sou
riait et, distraitement, ses doigts battaient
une marche sur la table de pierre à laquelle
il s’était accoudé. Quels souvenirs heureux
ou quelle radieuse espérance captivaient
ainsi la pensée du vieillard? Dans quelles
sphères éthêrées, dans quel domaine du bleu
avait-il été transporté par un rêve ?
Il fit soudain un geste brusque, frappa
sur son genou du plat de sa main, et, les
joues colorées par une rougeur joyeuse :
Mon four à courants circulaires don
nera quatre-vingts pour cent d’économie
sur le chauffage actuel, s’écria-t-il d’une
voix triomphante, et il brûlera tous les rési -
dus, toutes les substances inutilisées jus
qu’ici... Ah! ah! Malézeau, vous m’eu
direz des nouvelles... Il y a là une mine
( d'or !
I a figure de Mlle de Saint-Maurice se
rembrunit, elle croisa les bras, et, marchant
avec une désinvolture de gendarme :
— Mon frère, c’est la dixième rois, depuis
quelque temps, que vous découvrez le Pé
rou !
— Oh ! celte fois, c’est la bonne, répliqua
vivement l'inventeur. La découverte que j’ai
faite répond à un besoin impérieux. Toutes
les usines souffrent du prix sans cesse gran
dissant du combustible. Avec mon système,
le charbon devient, sinon inutile, au moins
facile à remplacer. On peut brûler des co
peaux, de la paille mouillée, des débris de
betteraves, des cannes à sucre... Vous com
prenez l’importance du procédé... Les
grèves, dans les bassins houillers, seront
inefficaces, et ne mettront plus en danger
l’industrie universelle. Aussitôt mes brevets
pris, j’aurai des traités avec les grandes usi
nes du monde. C’est un revenu formidable,
vous dis-je, et assuré... Je suis tellement
certain du succès que je risquerais mon
nom, s’il le fallait, dans cette entreprise.
— Mon frère, un gentilhomme n’a pas le
droit de disposer de son nom, interrompit
rudement la vieille fille
— C’est vrai, dit gravement Je marquis.
Ce nom est à tous ceux qui l’ont porté avant
moi, et je dois le transmettre intact à ceux
qui|me suivront... Mais croyez, tante, qu’il
ne serait pas diminué si j’y attachais l’hon
neur d’une si belle conquête industrielle,
— Vous savez depuis longtemps ce que
je pense de vos recherches. Dn homme tel
que vous n’a rien à gagner et a tout à per
dre dans ces besognes d’ouvrier.
Mais, interrompit le marquis en sou
riant. le roi Louis XVI faisait de la serru
rerie. ,
— Aussi vous voyez comme cela lui a
réussi ! s’écria triomphalement Mlle de Saint--
Maurice.
— Vous ne pensez pas, au moins, que je
mourrai sur l’échafaujci ?
— Non ! mais vous mourez sur la paille l
Antoinette s’était approchée : elle prit Lau
tante Isabelle par le cou .
— Allons, soyez bonne, murmura-t-ell©
tout bas... ménagez mon père
— Ta ta ta ! Te voilà bien, toi, enjôleuse^
dit la vieille fille, dont la barbe se hérissa-
Tu es p >ur moitié dans les folies de mon
sieur ton père!... Au lieu de le critiquer*
tu l’encourages... Et j’en suis pour ce que
je dis : Nous le verrons sur le fumier, com
me « Jacob »... Au reste, mou cher, Dites
ce que vous voudrez .. Voilà M. Malézeau
qui a sans doute à vous parler de vos affai
res... Ecoulez-le et tâchez de profiler d*
ses avis.
Au mot « affaires », Robert avait fait un
pas dans la direction du perron. Le mar
quis jeta à son notaire un regard pieia-
d’une tranquillité souriante, et, s’appuyant
sur les bras de sa fille avec une caressante
paresse :
— Eh bien ' mon cher Malézeau, je suis
à vous... Désirez-vous que nous renu-inn-.?
— Monsieur le marquis, je le préférerais ;
j’ai certains relevés de compte à vous sou.-
mettre, Monsieur le marquis... Et je crois
J
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