Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-05-07
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
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Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 07 mai 1852 07 mai 1852
Description : 1852/05/07 (Numéro 128). 1852/05/07 (Numéro 128).
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NOMËIIO448.
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au tableau qui sera publièdansle Jouro>);
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de chaque mois.
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1 MAI.
S'adresser, franco, 'pour-fy rédaction, à M» C uchevà .1 -C ubig KY ,
- ■ • Lerartioles déposés ce »ont pas rendu», -
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL. : £
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chef; I Oris'abome, dans Ut départeme*s, aux Messageries et aux Directions de poste,—A Londres, chu MM. C onvie et fils. |' S'adresser, franco^ pour l'adrninistration,à M. DENAiîf, dii\
I —A btiwOmrg, chez M. ALfXANDHK, vour ï'All'emagneï , , . | Le» aimo»ce8«qntrecue*aubiireau• •' , 'V ' ■ * - : : "J ! ..... ' ■ ■ • ' - - : ^ V-.r»q i"- • V • • » •• ■ ■ » ( *
PARIS, 6 MAI.
Le projet de budget pour 1852, qui Tient
d'être euvoyé ai} Corps Législatif, ne pouvait
présenter de différence notable comparative
ment au budget de 1852, établi èt publié,
n'y a pas deux mois, par le gouvernement
II repose en effet sur les mêmes bases. Les
modifications ne portent que sur quelques
chiffres, et elles se résument dans des dimi
nutions de dépenses.
Ce que nous remarquons d'abord, c'est
que les dépenses et les recettes, qui étaient
l'objet dè lois séparéês, sont maintenant réu
nies en une seule loi. Nous ne pou vons qu ! ap-
prouver cette mesure. La loi de finances y
gagne en simplicité. Il était d'ailleurs peu lo
giqued'envisager isolément les deux budgets
delarecette et delà dépense qui n'en forment
en réalité qu'un seul. On ne doit jamaisautori
ser «ne dépense sans se rendre compte de la
situation financière et sans se préoccuper
des moyens d'y pourvoir. La réunion des
deux lois en une seule est donc conforme à
l'idée d'ensemble et au principe d'unité qui
doivent dominer toutes les questions de
budget.
Le montant des'dépenses de toute sorte s'é
lève à 1,"486 millions. Mais on sait que
les dépenses réelles de l'Etat sont loin
d'atteindre un pareil ehiffre. Le gouverne
ment a conservé, dans le budget de 1853,
la distinction utile, qu'il avait déjà éta
blie dans celui de 1852, entre les recettes
et les dépenses formant les ressources et
les charges de l'Etat, et les dépenses et
les recettes qui sont" inscrites, seulement
pour ordre au budget général. Ces der
nières montent à 436 millions. Elles ren
ferment : 1" les rembourserons et les non-
valeurs qui ne sont pas réellement perçus;
2° les frais de perception, qui sont bienune
charge pour le pays, mais qui ne sont pas
une ressource pour le trésor,- 3° les centimes
dépfartementaux et communaux, qui- sont
exclusivement affectés aux besoins locaux.
Tous ces articles figurent à.la fois comme
dépenses et comme recettes ; ils se coin-'
pensent entre eux, et ils ne sont portés au
budget que pour satisfaire aux règlesMè la
comptabilité. S'il est utile, à différons points
de vue, de les maintenir dans la loi générale
des financesyii.importe cependant de ne pas
les confondre avec le budget, qu'ils grossissent
d'unemanièreartificielle.C'estpourévilerune
confusion qui trompe lespopulatiopspeu.
éclairées, et qui a été trop souven (exploitée
par les ennemis du gouvernement, queîOç
ministre des finances a placé ces articles dans
une colonne séparée. Voilà donc 436 mil
lions qui sont à déduire commese composant*
d'élémens étrangers au service de. l'Etat. De
telle sorte que le montant des-dépenses se
réduit à 1,050 millions. • -
Enfin onne doit pas perdre de vue que oes*
\ ,050 millions comprennent les dépenses or
dinaires et les dépenses extraordinaires. Les
premières sont de 981 millions, et les secon
des dç.79 millions. Or, les créditsextraordiaai-,
rcs reçoivent un emploi essentiellement re
productif; ils s'appliquent à des grands Ira-'
vaux d'utilité publique, principalement- à
destravaux de chemins de fei^^èt sont desti
nés à enrichir le pays. Il s'en suit que les
dépenses du service de l'Etat ne représentent
véritablement que 981 millions.,, - , • .
Si l'on compare le budget de 1853 à celui
de ,1852, on trouvé une diminution de près
de .27 millions.. Le gouverneojent a réalisé
cette économie- tout en maintenant d'aug
mentation des traitemens. des hauts fonc-
lionnairis, lout en accroissaat ,1a dotation
des travaux publics.Lea travaux extraorfc
naires, qui n'étaient portés .dans le bud^t
précédent, que pour 73 millions,, figurent,
comme nous venons de le dire, dans le bud
get de!8S3 pour 79 millions. Dans ce chiffre
les chemins de. fer de Paris à Cherbourg et
de Bordeaux à dette entrent pour un èré-
dït de-tmillions.;On voit donc que legoùnement s'est réservé toutes les ressources
nécessaires pour pousser activement les gran
des entreprises d'utilité publique, et pour
achever, le plus tôt possible, notre réseau de
chemins de fer. •
Les atténuations de dépenses portent d'a
bord sur le chiffre de la dette publique, ré
duite par la conversion des rentes 5 0/0 en
4 1/2. Cette réduction, opérée dans le
courant de l'exercice, ne procure qu'une
économie de 9 millions sur l'année ac
tuelle. Elle s'élèvera à 18 millions sur l'an
née prochaine. On effectue, en outre, une
diminution de 5 millions sûr le ministère
de la guerre, une autre d'environ 3 millions
sur le ministère de l'instruction publique;
cette dernière étant toutefois subordonnée à
l'adoption du projet de loi sur l'enseigne
ment qui a été envoyé au conseil d'Etat. La
suppression du ministère de l'agriculture et
du commerce doit également entraîner de
nouvelles économies en 1853.
Les voies et njoyens qui doivent permet
tre de faire face aux dépenses, s'élèvent à
1,446 millions-en totalité. Mais il y a lieu de
défalquer, pour le budget des recettes comme
pour le budget des dépensés, les services
qui ne sont portés - que pour ordre, et qui
montent à 436 millions et quelques centaines
de mille francs Restent par conséquent un
peu plus de lj009 millions.
Les estimations des impôts, rapprochées
de celles de 1852, présentent une augmenta
tion d'environ 22 millions. On calcule que le
produit des impôts et revenus indirects mon
tera de 781 millions à 803. Legouvernem ent
espère que la consolidation de l'ordre, l'af
fermissement de la tranquillité publique,
le retour de la confiance, en imprimant
un nouvel essor aux affaires et aux con
sommations de toute sorte, favoriseront
l'accroissement des diverses branches du re
venu public. Ces espérances peuvent n'ê-
pas exagérées en présence des faits constatés
pendant les derniers mois. On sait, en effet ,
que le mois de mars de cette année a présen
té un excédant de près de 5 millions sur le
mois correspondant de l'année précédente ;
et nous annoncions ce matin, que le mois
d'avril avait donné une augmentation en
core plus considérable. '• '
•Les recettes ordinaires sè ^complètent par
ës l ressources.de .là caisse d'amortissement,
dont faction resté suspendue, et par les rem-
boursemensdes compagnies-de ehemiartle;
fer. Si', l'amortissement n'agit plusi depuis
plusieurs exercices, il vient d'y être avanta
geusement suppléé par la grande mesure^
de la ..conversion des .rentes, qui.remplit le
même objet, ; et qui opère d'une manière bien
autrement efficace; Quant aux rembourse-
mens des compagnies de chemins de fer,qui
doivent être de 40 millions en 1853, il est
assez naturel qu'ils, soient comptés comme*
recettes, vis-à-vis d'une dépense en travaux
extraordinaires montant à 79 millions.
L'état des voies et moyens, mis en regard
de celui des dépenses, laisse une insuffisance
de 48 millions, Mais.,l'expérience a démon
tré que les annulations de crédits qui ont lieu
en fin d'exercice sont en moyennedeplusde
50 millions defrancs. Il est donc probable que
cette insuffisance sera couverte par les annu
lations ultérieures; pourvu cependant qu'on
soit très .sobre de crédits supplémentaires et
extraordinaires, ce qui semblé assez facile
avec ùn budget qui fait une part convenable
à tous les besoins , et à toutes les prévisions,
Ainsi, le budget de 1853 pourra, comme
celui de 1852 , v se régler sans découvert.
Parmi les dispositions diverses introduites
à Jasujiç du budget^, la plus importante est
celle qui ouvre un.crédit de 10 millions des
tiné à l'acquisition de lettres de gage des so
Piétés de crédit foncier. ■ C'est l'application
du décret de février qui a laissé à la lpi^
de finances Je soin de detcrmiûér " cha-*"
que année la somme que le trésor pour-,
rait .employer à l'achat des obligations émi- y
ses par, ces sociétés. Le crédit de 10 millions^
dit l'exposé des motifs, est un maximum qui
ne peut pas être dépassé, mais qui ne- doit
pas être nécessairement atteint. On com
prend, du reste, que, si les opérations ne
réussissent pas, le gouvernement ne ,persis
tera pas dans un système onéreux au trésor,
fet que, si elles réussissent au contraire, il
pourra vendre les lettres rte gage qu'il aura
reçues, rentrer dans ses fonds, et les em
ployer, à prendre les obligations d'autres so
ciétés qui se créeront, sans imposer une
nouvelle charge au trésor. Il n'y a donc pas
à craindre de voir ce chapitre prendre une
extension dangereuse pour les finances de
l'Etat.
Un mot, en terminant, sur la situation fi
nancière. On calcule que les découverts
peuvent être évalués ^dans leur ensemble à
630 millions qui s'accroissent des 38 mil
lions employés pour satisfaire aux deman
des de remboursement des rentes. Nous
venons de voir que les budgets de 1852 et
1853 se régleraient en équilibre. Maintenant
un chiffre de 668 millions excède-t-il les res-:
sources de la dette flottante ? nous ne le pen
sons pas. Cette dette se compose;'pour plus '
des deux tiers, de fonds que le trésor est obli
gé de recevoir, tels que fonds des communes,
des caisses d'épargne, de la caisse des dépôts et
consignations et des receveurs-généraux. Sur
la somme restaute, les 75 millions qui sont
dus à la Banque de France ne sont rembour
sables qu'en quinze années. Enfin le trésor
possède encore actuellement en dépôt à la
Banque plus de 100 millions. 11 n'y a, par
conséquent, dans la situation actuelle, au
cune cause d'embarras. > j. bura.t.
L'avertissement suivant vient d'être donné
au journal le Pays :
Vu l'art. 42 de la Constitution portant :
« Le. compte-rendu'des séances du Corps Lé--
gislatif par' les journaux ou tout autre moyen de
publication ne consistera que dans /a reproduc-'
tion du procès-verbal dressé , à l'issue de chaque
séance, par les soins du président du Corps Légis
latif.»' " V
Vu l'article 32, § .3 du déeret organique sur la'
presse, en date du 17 février 1852;
Considérant que dans les numéros "du S et 6
mai proseï^' mois, le journal le Pays a publié,
sous le tître de Discussion de la loi sur la réhabi
litation , l re et 2" séances, dtpx appréciations en,
contradiction complète avec le texte de l'article 42
deUCo.ifctitutioaprécité^. .... - ....
Lesdiies appréciatians signées : Le secrétaire de
la rédaction, j. augier ;
Arrête ; ■ ■—-«
Art. 1". Aux termes de l'article 32 du décret
du 17 février 1852, un premier avertissement est
donné au journal le Pays< danï la personne de ; îkl.
J f Baraton, l'un des propriétaires geraiis, et.dé J. r
Augier, secrétaire de k réduction.
. Art. 2.'.M. le préfet de police de Paria çst chargé
de l'exécution du présent arrêté.; :> -
Fait à Paris, le 6 mai 1852. .
. r Le ministre de la police générale,
Signé : DE MAGPAS.
Nous ne saurions dissimuler l'étonnement
jrofond que nous cause la mesure qui vient
d'atteindre le Pays. Ce journal nous avait
paru s'être soigneusement renfermé dans les
strictes limites de; la légalité. Après avoir
publié intégralement le procès-verbal de la'
séance du Corps Législatif, le Pays s'était
servi des faits portés par le procès-verbal à
a connaissance de tout le monde, et tombés
ainsi dans le domaine, public, pour émettre
une opinion personnelle et indépendante sur
une question de législation. Il avait usé d'un
droit, à notre avis, incontestable. ;
L'article 42 de ia Constitution que cite
M. le ministre de; là police générale , porte
que le compte-rendu des séances du Corps
Législatif ne consistera que dans la repro-
; duc tion du procès-verbal {officiel. Dans le
i préambule de la Constitution, le Président
^ la République explique qu'il n'a pas
') Voulu o-ifue ce compte rendu fut livré comme
autrefois à l'esprit de parti de chaque jour
nal. » Il n.'est donc plus loisible aux journaux
d'écourter ou d'étendre au gré de. leurs prédi-
i Actions particulières lapublication desdébats
; législatifs, de l'entremêler d'un commentaire
: passionné, de grossir ou d'affaiblir la viva
cité de cesdébats, d'en dénaturer le caractère.
. Tel est, d'après la circulaire de M. le garde
des sceaux, l'objet de cette publication offi
cielle, uniforme pour tous, à laquelle aucun
journal ne peut faire subir ni addition, ni
retranchement, et qu'il n'est pas plus permis
de modifier que de contrediréi
! Le Pays a-t-il rien fait de pareil? Non
i sans doute, puisqu'il a publié intégralement
le procès-verbal officiel. Seulement ce pro
cès-verbal est devenu pour lui la ba«e d'une
appréciation, c'est le mot même dont se sert
M. le ministre de la police générale. Le Pays
; a publié une appréciation^ c'est-à-dire qu'il
a porté, suivant ses lumières propres et dans
sa liberté, un jugement sur une question de
droit vivement controversée entre les juris
consultes. U a exprimé une préférence pour
. une des deux solutions 'qu'elle peut rece^
voir. S'il y avaitlà infraction à la loi, il fau
drait en conclure qu'une question, par cela
. seul qu'elle est agitée au sein du Corps Lé-
■ gt&làtif, devient un arcane inaccessible; et
que tous les citoyens perdent incontinent
le droit d'avoir et d'exprimer un avis sur
cette question du jour où elle préoccupe les
élus de la nation et, avec eux, la nation
entière. Nous n'avons pas besoin d'insister
sur ce qu'une pareille conclusion aurait d'é
trange. »
. Voilà pour le point-de droit. Nous sera-t-
il permis d'ajouter une observation sur le
point de fait. M. le ministre de la police gé
nérale n'incrimine point le caractère de l'ap
préciation à laquelle s'est livré le Pays-, il ne
lui reproche ni d'être violente, ni d'être in
juste, ni.d'être passionnée, ni d'être.dange-
reuse pour la paix publique ; c'est le. fait
même de l'appréciation qui lui paraît répré-
bensible. Or, cette appréciation, si elle n'est
pas légale constitue un délit; elle entraîne
non pas un avertissement, mais une péna
lité. Les, tribunaux,; interprètes et gardiens
de la loi , nous paraissent seuls, compé-
tens pour décider ce qui est et ce qui n'est
pas un délit. Le décret sur la presse ar
me le rninistè'fé de; la police et les pré-*
fets du droit d'ayertissement pour arrêter
r les tendances^kngereuses xles journaux, et
non pour réprimer les infractions à la loi :
autrement l'administration serait sans cesse
exposée à empiéter sur le pouvoir judiciaire,
et à déclarer criminel ce que les tribunaux
réputeraient légitime. C ucheval -C larigny.
Depuis long-temps on a reconnu la né
cessité de modifier les dispositions du Cor
d.e destruction, criminelle, relatives à la
poursuite : des crimes commis par des
Français] hors du, territoire, et par des
étrangers auteurs ou .i omplices des.mêmes
crimes, arrêtés en France ou dont le gouver
nement obtient l'extradition. M. Rouher,
pendant son passage aux affaires comme mi
nistre de la justice, avait préparé, sur cette
matière', :un.projet de loi qui a été soumis à
l'examen du conseil. d'Etat. •
, Ce projet de loi, à l'étude duquel le con
seil d'Etat a consacré plusieurs séances, .et
qui a été en grande partie adopté par lui, va
etre très prochainement porté au Corps Lé
gislatif. : -, .... ,, ,,
Aux termes de l'article'5 du Code d'ins-
tion.criminelle,.tout Français qui se.rend
coupable, hors du territoire, d'un crime
attentatoire à la. sûreté de l'Etat, de. con
trefaçon du sceau de l'Etat/ de monnaies na
tionales ayant cours, de papiers nationaux
ou de billets de banque autorisés par la loi,
peut être poursuivi, jugé et puni en France
d'après les lois françaises.'L'article 6 permet
d'étendre; "cette disposition auï * étrangers
.qui 1 , aûteurs ou complices dès mêmes cri
mes, sont arrêtés eu France ou dont le gou
vernement obtient l'extradition. Enfin l'^r«
ticle 7 dispose que tout Français, qui se sera
rendu coupable, hors du territoire au royau
me, d'un crime contre un Français, pourra,!
à son retour en France, y être poursuivi et
jugé, s'il n'a pas été poursuivi et jugé en
pays étranger, et si le Français offensé rend
plainte contre lui.
Ces dispositions, ainsi qu'on le voit, sont
restrictives; elles ne s'appliquent pas aux
délits, et, en matière de crimes, elles per
mettent à l'action publique de s'exercer seu
lement dans un certain nombre de cas'déter
minés, ou bien lorsque le Français offensé
rend plainte contre le coupable ; l'intérêt, de
la vindicte publique a paru exiger qu'elles
fussent généralisées et que, dans aucun cas,
les criminels ne pussent se soustraire à un
juste châtiment.
Le projet, drt à l'initiative de M. Rouher,
dispose que tout Français qui s'est rendu
coupable, hors du territoire de la Républi
que, d'un fait qualifié crime par la loi fran
çaise , peut à son retour en France être
poursuivi et jugé, à la requête du minis
tère public ou sur la plainte des parties
lésées, lors même qu'il a été poursuivi eu
pays étranger, à moins qu'il n'y ajt juge
ment. La même poursuite peut avoir lieu
dans les mêmes cas contre le Français qui
s'est rendu coupable de délits tels qua ceux
de faux passeport, excitation à la débauché,
coups et blessures volontaires, vols, escro
queries, etc.
La nouvelle rédaction ne distingue pas,
comme l'ancienne, si le crime ou le délit a
été commis contre des Français; elle permet
la poursuite de tous les faits qualifiés crimes
ou délits par notre loi pénale, qu'ils aient
été commis contre des Français ou contre
des étrangers. Ces innovations ne sont pas
les seules que contient le projet dont nous
parlons; il autorise, en outre, la cour de
cassation, en cas de poursuites pour crimes
ou délits commis en pays étranger, à ren
voyer l'affaire, sur la demande du ministère
public ou des parties, à l'un des tribunaux
les plus voisins du lieu où a été commis le
crime ou délit.
Les étrangers qui seraient arrêtés sur le
territoire français, comme auteurs ou com
plices des crimes de meurtre, assassinat, em-
poisonnemens; coups et blessures volontai
res, viol, attentat à la pudeur avec violences,
incendie, piraterie, faux et vols avec circons
tances aggravantes, commis en pays étran
ger, sur la personne et au préjudice d'un
Français, peuvent être poursuivis, jugés et
punis en France.
Les modifications que ce projet apporte
rait à là rédaction du Code, divisent proton- :
dément les érimihàlistes, nous les apprécie
rons plus tard ; nous nous bornons aujour
d'hui à les faire succinctement connaître. ,
Le secrétaire de la rédaction, l. boniface. : ,
Par décret du 3 mai courant, rendu sur
le rapport du ministre de "l'instruction pu
blique.et des cultes. M- Villemain, profes
seur d'éloquence française à la Faculté des
lettres de Paris, et M. Cousin, professeur
d'histoire de la philosophie ancienne à la
même Faculté, ont été admis, sur leur de
mande, à faire valoir leurs aroits à une
pension.de retraite. (Moniteur.)
Le Moniteur^ confirme ce matin, par"le
communiqué suivant, ce que nous disions
des résolutions prises au sujet des chemins
de Cherbourg et de Cette. !
«Le gouvernement a pris larésolution d'a
journer la concession des chemins de 1er de
Paris à Cherbourg et de Bordeaux à Cette.
» Mais voulant, dès à présent, assurer l'exé
cution de ces deux lignes et en commencer
les travaux, il vient d'envoyer au conseil
d'Etat : un projet de loi ayant pour objet
d'ouvrir à l'exercice 1852 un crédit de 3 mil
lions à répartir, par moitié sur chacune
d'elles. .... j ■. i
» Les travaux,qui seront éxécutés par l'Etat
au moyen de ces crédits seront ultérieure
ment remis aux compagnies concessionnai
res en déduction de la subvention qui devra
leur être accordée. » * ( Communiqué.)
:1. s ... 1 . ' • • •••! .
Les journaux anglais nous apportent les
détails du débat qui s'est terminé - par le
rejet de la motion de M. Cobden. Le vice-
président du congrès de la paix ne deman
dait rien de moins que l'ajournement de la-
; loi sur la milice. Cette' Tmotion a été rejetéè
par 209 voix contre 75. De nouveaux efforts
seront faits sans aucun doute pour entraver,
la marche de là discussion et pour retarder;
[l'adoption du bill; mais la motion de M.
' Cobden est la derniere tentative sérieuse
contre le principe même de la loi. ' -
Voilà donc les Anglais condamnés aux dou- ;
ceurs de la garde nationale; 80,000 citoyens,
devront, à certains jours, quitter leurs oc
cupations , pour aller s'exercer au ma-'
niementdu fusil, et ne faire , après bien':
du temps perdu, que de très mauvais
soldats. Le côté le plus plaisant de l'af
faire est que John -Bull s'a. aucun goût
pour le métier ridicule qu'on Và lui faire,
faire, et qu'il est ici la victime du point'
d'honneur. Il lui à convenu, au lendemain
du 2 décembre, de jouer la peur, de pousser
de grands cris, et de déclamer sur les dan-'
gers que les chasseurs de Vincennes faisaient
courir aux écus et aux filles d'Albion. U a
accusé son gouvernement de laisser la
Grande-Bretagne sans défense, et de man
quer à tous ses devoirs ; il a demandé un&
carabine et un uniforme, pour faire sen
tir à tout envahisseur la colère du lion bri
tannique. On l'a pris au mot : on va l'enrégi
menter, on lui fera faire l'exercice et mon
ter la garde. John Bull, aujourd'hui fort '
rassuré, peste en lui-mêmeet n'ose se dédire.
Il y a chance cependant pour qu'il oppose ,
une résistance passive à l'application de la '
loi et fasse tomber le nouveau bill en désué
tude comme les trois qui l'ont précédé.
Le seul incident curieux du dernier débat
a été un discours de lord John Russell, qiii
tenait à répondre à lord Palmerston, et à
justifier sa conduite des attaques très vi
ves dont elle a été l'objet. Cette apolo-,
gie assez embarrassée était la préface d'un
revirement assez surprenant. L'ancien mi
nistre a déclaré qu'il avait voté à la se-'
conde lecture contre le bill, mais que le prin
cipe de la loi ayant été adopté par la
chambre à une grande majorité, lui-même
croyait devoir consacrer désormais tous ses* '
efforts à améliorer les détails du bill. En^
conséquence, il a - combattu la motion'
de M. Cobden et il a voté contre elle."'-
C'est ce qui explique le petit nombre de
voix obtenu par la motion, et l'énorme nia-;
j orité en faveur de la loi. Il est temps que'
cette discussion sur la milice touche à son
terme, car on finirait par ne plus se reconr
naître au milieu des votes contradictoires de
lord John Russell. Il n'est du reste presque;
personne au sein du parlement qni n'ait-
changé d'avis, soit ostensiblement ' aiï<
fond du cœur, sur l'utilité de la mesure
preuve manjfeste .qu'elle ne répond à aucun '
besoin i national, et .qu'elle n'a été. entre les,
mains des partis, qu'une, amorce de popula
rité.- !'■■■ J ' :<:■ '• ... /; .!
"• ' ' ■ CCCHEVAIrCURIGNY.
LA MONNAIE DE CUIVHE.
Les chances dç contrefaçon. — La nature du
■ v , ,rnptal, y-L'empreinte.
Il n'y a pluç à revenir sur les élément a discussion qui a eu lieu devant' le Corps
Législatif, au sujet de la monnaie de bronz :.
Dansl'état présent des choses, après tout débat
épuisé, et après que,le Sénat, dans sa séance^
du 3 mai, a déclaré « ne pas s'opposer à là
promulgation de la loi », nous voulons seu
lement indiquer deux points qui nous pa- :
raissent offrir un intérêt spécial. •
. Le pirémier a trait aux chances de contre
façon qu'on pouvait avoir à craindre. Un do-
cument, que, nous trouvons aujourd'hui .
dans le Moniteur, est' de nature à faire cesser
cette inquiétude; nous y lisons ;
a Si, malgré les avantages que le cuivre rouge
possède, le gouvernement n'a pas cru devoir l'a-:
dopter pour la nouvelle monnaie, t'est que, parmi"
les découverte^ de la science, figure un art nou
veau, aussi -redotitable«quexœerv«iHeux.. L'électri
cité, opérant sans .appareil et sans iruit,.soutire
le cuivre'dë ses disÉoliitiôns, "l'oblfgë à se'déposer
sur les surfaces tes plus déliCateœefit travaillées, et
4 épouser leurs formes, qu'il reproduit avec la plus
scrupuleuse fidélité. Une pièce, eh circulation peut
donc, servir à fairé un moule qui donne à son tour;
de nombreuses imitations de la pièce primitive.
» Si, ea.vue de l'avenir, les procédés de l'élec-
trotypip excluent le cuivre rôuge, d'aigres raison 3
feraient.tout aussi impérieusement écarter un al_
FEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL, 7 MAI.
A HUIT MILLK I'IEDS
•AU-DESSUS- Ï)E LA MER.
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. PÀLMEIIIXO
" ' '(Suite). ' 1
l Le dialogue suivant s'engagea entre mes
camarades et le lieutenant.; . .
.Eh bien l Palnaérluo,, .dirent-ils, vous
vous plaisez toujours dans cet affreux.nid
de goélands? - , , 5 <■/ ;• -. ; .-.
— Toujours. .• ;
— Vous ne voulez donc jamais le quitter?
— Jamais, tant qu'on m'y laissera. . 1
-g; — Oh ! .quant à cela, vous n'avez pas à
craindre de concurrens. Vpus êtes bien sûr,
au moins, que personne n'intriguera pour
vous prendre, votre place. . , ,
— C'est déjà un avantage.
— Mais pourquoi ne. demandez-vous pas
de l'avancement?
. — A quoi bon?
Voua voulez donc mourir lieutenant?
- Pourquoi pas?
— Et ici?
— On meurt ici aussi bien qu'ailleurs.
— Vous êtes un philosophe* et les sept
sages de Ii Grèce, n'etaient auprès ^e vous
que des écoliers. Mais enfin, quels charmes
peut avoir pour vous un si triste séjour?
— Que sais-je? Le repos, la solitude, l'ha
bitude. ;.J U ; "Clï'ïl
«r Quant à nous, nous soEomes loin de vo- '
tre philosophie; tomber de Jîaples à Orbitel-
lo, quelle chute! Et pourquoi encore? Pour
quelaues fredaines de jeune homme, quel
que dette chez les usuriers.
Aussi,- comme les Juifs en. captivité,
chantons-nous soir et matin le cantique de
l'exil : Super flumina Babylonis t o
— Surtout depuis qu'on a grillé-les fenê-,
très de certain clocher. , .
— Quel clocher? demanda Palmérino.
Vous ne savez donc pas?
r Je ne sais rien. -\ . -
•. — Eh .bien L voici l'histoire. A fo.rce de
chercher quelque moyen de passer le temps
àiOrbitello.i. àOrbitello! comprenez-vous?...
nous avions fini par découvrir, un couvent.
— Un couvent? ;
— Oui, un couvent de femmes ; le cou
vent d<4Santa-Cbiara. Nous avions »des intel
ligences: dans la place,. si. bien que la nuit
nous nous introduisions par le clocher dans
les cellules de ces dames, au risque de nous
brouilier , avec l'Eglise; Mais la mine a été
éventée, et un beau jour, ou plutôt une belle
nuit, il n'y apas de cela plus d'une semaine,
nous avons, trouvé les fenêtres du clocher
défendues par une t riple grille enfer. Et voilà
comme quoi le Père-Eternel a ressaisi ses
épouses çt nous perdu les nôtres.
.Le lieutenant témoigna par son silence et
la gravité de sa physionomie, combien cette
plaisanterie impie était peu de son goût.
Elle n'avait jamais été du mien, et j'avais
toujours refusé de. m'associer à cette profa-
nation. Aussi, un des: officiers ajouta-t-il, en
me désignant : . .
; — Mais nous scandalisons Rudentz, qui
est pudibond comme un véritable enfant de
l'Helvétie, quoique, au demeurant, bon ca
marade.
. t: Ce lazzi me, fit rougir jusqu'aux oreilles,
et, pour ne pas me fâcher, je ne répondis
rien. Ptilmérino vint à mon aide. .
> —Il a raison^ Messieurs,, dit-il, et, quant
à moi, je partage ses scrupules. Le monde
est assez jp-and.sans s'attaquer au ciel, et
vous avez ait là. une mauvaise action. Je ne
suis pas plus puritain qu'un autre; mais, à
votre place, je ne m'en vanterais pas. L'a
mour est une chose sainte et sacrée aussi -
bien que la-religion ; en les dégradant l'un
et l'autre,, comme vous l'avez fait, vous
avez commis, permettez-moi de vousiedirej
un double sacrilège. Vous parlez,d'amour ;
vous ne connaissez pas même la galanterie. :
L'amour... je vais vous dire ce que c'est,
continua-t-il, en prenant un volume qui,
était;près de .lui. Ecoutez, et profitez de,1a
leçon; elle est tirée de l'histoire de Venise ;
« ; Un patricien illustre, ; nommé Agtonio Fos-
» carini, sortait la nuit sousun déguisement
», pour visiter .une dame qui lia±>itait tout
» près de l'ambassade d'Espagne. Il fut ac-
» cusé par le conseil des ,Dix , d'entretenir
» des relations clandestines avec l'ambassa-
» deur, crime capital/suivant les lois de la
» république. Arrêté immédiatement, on
» lui,fit son procès. Et comme il refusa
» constamment d'expliquer le mystère de
» ses. sorties nocturnes, de peur de com-
» promettre la dame qu'il aimait, il fut con-
» damné à mort, et pendu le 21 avr il 1622. »
Messieurs, dit Palmérino, après avoir, ter
miné sa lecture, voilà ce que c'est que l'a
mour.
Une discussion s'engagea entre les officiers
sur l'aventure de Foscarini : les nos l'admi
raient, les autres le raillaient, sous prétexte
que, les femmes ne valent pas la peine qu'un
honnête homme se sacrifie pour elles.
.; tt » Exemple pour exemple^ dit l'un d'eux,
je préfère pour mon compte celui d'un gen
tilhomme français dont j'ai lu la vie dans je
nesaisquelchrôniqueurde son pays. Ce gen
tilhomme nommé, je crois, M. de Termes,
s'introduisait la,nuit, d'un troisième étage,
dans un couvent de jitles, au moyen, d'une
échelle, absolument commenousnous intro
duisions, nous autres, dans le monastère de
Santa-Chiara. U n'y a rien de nouveau sftus
le soleil. . *
NiPalmérino ni moi ne primes aucune part
àla conversation desofficiers. Je lui savais gré
de l'appui qu'il yenài t de me prêter contre mes
camarades ; car j'étais seul contre eu* tous, e{
le remerciai par un regard plein de gratitude
et de sympathie, Il nous offrit obligeamment
de passer la nuit dans sa tour; mes compa
gnons, qui étaient de service le lendemain
matin, partirent le soir même pour Orbitello;
moi, qu'aucun devoir n'y réclamait, j'accep
tai l'hospitalité qui m'était offerte, heureux
de demeurer seul avec Palmérino et d'avoir
l'occasion de me lier avec.lui.
La soirée, cependant, ne répondit pas à
mon attente;..nous la passâmes en tête-à-
tête dans une causerie amicale, mais il m'in
timidait, par sa réserve sur tout ce qui lui
était personnel, et je n'osai jamais rompre
la glace. Quoiqu'il m'adressât beaucoup de
questions sur ma patrie, sur mon oncle le
gouverneur, sur moi, je n'eus pas le courage
de lui en adresser une seule sur lui-même.
Il m'imposait trop pour cela. Ce n'çst pas
qu'il eût rien de solennel et qu'il jouât le
personnage; loin de là, ses manières étaient
pleines'd'affabilité, de cordialité même, et
jamais, homme ne m'avait plu autant que
celui-là. J'aurais donné le plus pur de moji
sang pour être son ami ; mais il fallait qu'il
> le devinât, car, pour le lui dire, cela était au-
dessus de ses forces. N'oubliez pas que j'a
vais vingt ans, que j étais tout frais descendu
de mes .montagnes, et que dès la première
vue, Palmérino'm'était apparu comme un
être mystérieux, impénétrable, bien supé
rieur à tout ce que j'avais connu jusqu'alois.
Bref, ce soir.là je n'appris rien sur lui.
„ — Demain, me dis-je en le quittant, j'en
apprendrai davantage. ' .
' Je m'endormis au bruit des vagues qui ve
naient expirer au pied de la tour, et c'est au
" bruit des vagues que je me réveillai, La ma
tinée était splendide,etmou premier soin fut
de monter sur la plateforme pour admirer
de là.-comme du haut d'un bélvéder, le ma
gnifique panorama déroulé devant moi. ,,Du
côté de la terre, j'avais sous mes pieds les
ruines gigantesque d'Ansédonia, des marais,
des pâturages, des rivières, des bois, une so
litude immense, et, au fond de l'horizon,
par-delà la ville deSatumia, la chaîne pitto
resque des. monts'de Santa-Fibra. > Du côté
de la mer, je dominais les petites îles déser
tes d'Hercule et de Gianuti, plus .loin celle
du Lys, plus loin encore les îlots des Four
mis, plus près Orbitello au .bord.ide,.son,
grand lac salé, la presqu'île escarpée du
mont Argentale, avec ses villes, ses villages,
ses forteresses, et vers le midi serpentaient les ;
larges et gracieuses ondulations des plages
romaines de Corneto et de, Civita-Vecchia.
La Méditerranée déroulait toutantour et jus
qu'aux bornes de l'infini ses plaines bleues
. émaillées çà et là de quelques voiles blan
ches qui brillaient aux feux du soleil,levant
comme des diamans enchâssés dans le saphir.
Comme j'étais là, assis sur l'affûtd'un des
canons braqués aux créneaux de la tour, je
fus rejoint par Palmérino.
. — Monsieur Rudentz, me dit-il, en me
■ serrant cordialement la main, vous aimez
: la nature, je le devine à l'admiration muette-
qui brille dans vos yeux et au recueillement
où je vous trouve plongé.
—, La nature eut mon premier amour,
lui répondis-je avec émotion, car je suis
d'un pays où, sans faire tort à votre Italie,
elle a des grandeurs que rien n'égale. , ' _
-t -Oui, je sais que vous êtes Suisse, et
votre patrie doit être bien belle et bien atta
chante, car ou dit que le mal du pays vous
'gagne au point de vous faire déserter, lors
que vous entendez jouer à l'étranger un air
de vos montagnes. Mais puisque vous aimez
les spectacles de la nature, suivez-rnoi, je
vais vous en montrer un qui, j'en suis sûr,
vous plaira.
Nous marchâmes quelque temps sur la grè
ve, les pieds baignés par l'écume des vagues,
jusqu'à un petit promontoire où la côte se
redresse brusquement; là des rochers escar
pés et nus tombent à pic dans les flots et
sont .coupés-j d'espace eu espace , d'énor
mes fissures verticales comme si la cognée
des Titanf» ou un tremblement de terre les
<àût séparés violemment. Une de ces crevas
ses, plus large que les autres,'et où la mer
entre en bouillonnant, s'ouvre et se res
serre jusqu'à trois fois de manière, à for
mer trois chambres circulaires qui reçoivent
là lumière d'en haqt, et où là vagpe, une fois
entrée , s'apaise tout d'un coup et semble,,
.iuïjter.ai^biunopflc, ,son qalme,. sa fraîcheur
et sa limpidité. .. .
; . En ce, moment un soldat^ arrivé d'Orbi-'
teUoj apporta à Palmérino .quelques papiers
de service "parmi lesquels je réconnus la fa
meuse gazette .espagnole qu'il recevait .chaque*
semaine,, et qui arrivait directement de Mâ-
, dnd à son adresse, toute chamarrée dès tijïjsf'
bres de la poste. JJ mit le tout dans sa poche
sans y jeter 1<'S yeiix èt continua à rne faire,
les honneurs du site. Quand nous fûmes ait
sommet du rocher, il me fitasseo.ir sur une es
pèce de banc naturel où l'on, voyait qu'il .
s'asseyait souvent et d'où le regard plongeait
! au fond du gouffre, si l'on peut appekr dé'
ce nom sinistre un charmant bassin d'eau
pure et bleue comme le ciel.qu'.elle.réflé
chissait. Des chênés verts et des pins croi's-
: saierit autour de iious ; mille plantes grim
pantes pendaient aux parois intérieures du;
rocher. Quoique.moinsvàsle,la vue delà est
presque aussi belle que du haut de la tour;
on a derrière soi et assez près pour en par
courir des yeux tous les détails, les ruines de '
la ville étrusque et l'île d'Hercule presque à
ses pieds. Députe qùelques instans, la cout
versation languissait. La tête enfopeée dans
ses deux maius,, Palmérino. était tombé
dans une profondé rêverie et semblait avoir
oublié tout-à-fait qu'il n'était pas seul.
Lieutenant, lui dis-je, pour lui rappe
ler ma présence, mais sans oser lui parler
du journal, que je ne vous empêche pas de
lire les lettres qu'on vient de vous apporter. -
Faites vos affairés comme si je n'étais pas là.
— Puisque vous tn« le permettez, je vais
voir ce que c'est.
Il tira le paquet de sà poche, et la pre
mière chose qu'il fit fut d'arracher la bande
du journal et de le déplier devant lui ; mais
à peine y eut-il jeté lesveux, qu'il poussa un
cri étouffé et roula, par terre sans mouvez
ment. Je volai à son secours tout épouvanté.
Il-.revint à.lui a\i bout de quelques instan§.
vaizsa L'ABOHIUKEIfTS
PABIS..;..... .1» F.JPAa TEIMÏSTBi;
É PAJRTEyÉfiS. tÔ F. ' '
UN NUMÉRO : #0 CENTIMES.' '
Mm LES étBiNGEU „S9 TBporî Ht
au tableau qui sera publièdansle Jouro>);
Isa 1,0 et M 4s cfeaqne mois; .. , -
i ; - / : —« y>- ■
. Les abonnemew datent des 1" et 16
de chaque mois.
WiiioUt' (i*aitti<-Uoyalj} m *
1 MAI.
S'adresser, franco, 'pour-fy rédaction, à M» C uchevà .1 -C ubig KY ,
- ■ • Lerartioles déposés ce »ont pas rendu», -
JOURNAL POLITIQUE, LITTÉRAIRE, UNIVERSEL. : £
. ï . J. • : - r, ,. î - ' . , • . . ' ; - _ , t • ' - - ■ - • ' '• *. : t" '•» "■ ■ '
* • j i . ' 4 ■ •■ i * i ■ • j ' ' — ' ■■ < , , À 1 *
chef; I Oris'abome, dans Ut départeme*s, aux Messageries et aux Directions de poste,—A Londres, chu MM. C onvie et fils. |' S'adresser, franco^ pour l'adrninistration,à M. DENAiîf, dii\
I —A btiwOmrg, chez M. ALfXANDHK, vour ï'All'emagneï , , . | Le» aimo»ce8«qntrecue*aubiireau
PARIS, 6 MAI.
Le projet de budget pour 1852, qui Tient
d'être euvoyé ai} Corps Législatif, ne pouvait
présenter de différence notable comparative
ment au budget de 1852, établi èt publié,
n'y a pas deux mois, par le gouvernement
II repose en effet sur les mêmes bases. Les
modifications ne portent que sur quelques
chiffres, et elles se résument dans des dimi
nutions de dépenses.
Ce que nous remarquons d'abord, c'est
que les dépenses et les recettes, qui étaient
l'objet dè lois séparéês, sont maintenant réu
nies en une seule loi. Nous ne pou vons qu ! ap-
prouver cette mesure. La loi de finances y
gagne en simplicité. Il était d'ailleurs peu lo
giqued'envisager isolément les deux budgets
delarecette et delà dépense qui n'en forment
en réalité qu'un seul. On ne doit jamaisautori
ser «ne dépense sans se rendre compte de la
situation financière et sans se préoccuper
des moyens d'y pourvoir. La réunion des
deux lois en une seule est donc conforme à
l'idée d'ensemble et au principe d'unité qui
doivent dominer toutes les questions de
budget.
Le montant des'dépenses de toute sorte s'é
lève à 1,"486 millions. Mais on sait que
les dépenses réelles de l'Etat sont loin
d'atteindre un pareil ehiffre. Le gouverne
ment a conservé, dans le budget de 1853,
la distinction utile, qu'il avait déjà éta
blie dans celui de 1852, entre les recettes
et les dépenses formant les ressources et
les charges de l'Etat, et les dépenses et
les recettes qui sont" inscrites, seulement
pour ordre au budget général. Ces der
nières montent à 436 millions. Elles ren
ferment : 1" les rembourserons et les non-
valeurs qui ne sont pas réellement perçus;
2° les frais de perception, qui sont bienune
charge pour le pays, mais qui ne sont pas
une ressource pour le trésor,- 3° les centimes
dépfartementaux et communaux, qui- sont
exclusivement affectés aux besoins locaux.
Tous ces articles figurent à.la fois comme
dépenses et comme recettes ; ils se coin-'
pensent entre eux, et ils ne sont portés au
budget que pour satisfaire aux règlesMè la
comptabilité. S'il est utile, à différons points
de vue, de les maintenir dans la loi générale
des financesyii.importe cependant de ne pas
les confondre avec le budget, qu'ils grossissent
d'unemanièreartificielle.C'estpourévilerune
confusion qui trompe lespopulatiopspeu.
éclairées, et qui a été trop souven (exploitée
par les ennemis du gouvernement, queîOç
ministre des finances a placé ces articles dans
une colonne séparée. Voilà donc 436 mil
lions qui sont à déduire commese composant*
d'élémens étrangers au service de. l'Etat. De
telle sorte que le montant des-dépenses se
réduit à 1,050 millions. • -
Enfin onne doit pas perdre de vue que oes*
\ ,050 millions comprennent les dépenses or
dinaires et les dépenses extraordinaires. Les
premières sont de 981 millions, et les secon
des dç.79 millions. Or, les créditsextraordiaai-,
rcs reçoivent un emploi essentiellement re
productif; ils s'appliquent à des grands Ira-'
vaux d'utilité publique, principalement- à
destravaux de chemins de fei^^èt sont desti
nés à enrichir le pays. Il s'en suit que les
dépenses du service de l'Etat ne représentent
véritablement que 981 millions.,, - , • .
Si l'on compare le budget de 1853 à celui
de ,1852, on trouvé une diminution de près
de .27 millions.. Le gouverneojent a réalisé
cette économie- tout en maintenant d'aug
mentation des traitemens. des hauts fonc-
lionnairis, lout en accroissaat ,1a dotation
des travaux publics.Lea travaux extraorfc
naires, qui n'étaient portés .dans le bud^t
précédent, que pour 73 millions,, figurent,
comme nous venons de le dire, dans le bud
get de!8S3 pour 79 millions. Dans ce chiffre
les chemins de. fer de Paris à Cherbourg et
de Bordeaux à dette entrent pour un èré-
dït de-tmillions.;On voit donc que legoùnement s'est réservé toutes les ressources
nécessaires pour pousser activement les gran
des entreprises d'utilité publique, et pour
achever, le plus tôt possible, notre réseau de
chemins de fer. •
Les atténuations de dépenses portent d'a
bord sur le chiffre de la dette publique, ré
duite par la conversion des rentes 5 0/0 en
4 1/2. Cette réduction, opérée dans le
courant de l'exercice, ne procure qu'une
économie de 9 millions sur l'année ac
tuelle. Elle s'élèvera à 18 millions sur l'an
née prochaine. On effectue, en outre, une
diminution de 5 millions sûr le ministère
de la guerre, une autre d'environ 3 millions
sur le ministère de l'instruction publique;
cette dernière étant toutefois subordonnée à
l'adoption du projet de loi sur l'enseigne
ment qui a été envoyé au conseil d'Etat. La
suppression du ministère de l'agriculture et
du commerce doit également entraîner de
nouvelles économies en 1853.
Les voies et njoyens qui doivent permet
tre de faire face aux dépenses, s'élèvent à
1,446 millions-en totalité. Mais il y a lieu de
défalquer, pour le budget des recettes comme
pour le budget des dépensés, les services
qui ne sont portés - que pour ordre, et qui
montent à 436 millions et quelques centaines
de mille francs Restent par conséquent un
peu plus de lj009 millions.
Les estimations des impôts, rapprochées
de celles de 1852, présentent une augmenta
tion d'environ 22 millions. On calcule que le
produit des impôts et revenus indirects mon
tera de 781 millions à 803. Legouvernem ent
espère que la consolidation de l'ordre, l'af
fermissement de la tranquillité publique,
le retour de la confiance, en imprimant
un nouvel essor aux affaires et aux con
sommations de toute sorte, favoriseront
l'accroissement des diverses branches du re
venu public. Ces espérances peuvent n'ê-
pas exagérées en présence des faits constatés
pendant les derniers mois. On sait, en effet ,
que le mois de mars de cette année a présen
té un excédant de près de 5 millions sur le
mois correspondant de l'année précédente ;
et nous annoncions ce matin, que le mois
d'avril avait donné une augmentation en
core plus considérable. '• '
•Les recettes ordinaires sè ^complètent par
ës l ressources.de .là caisse d'amortissement,
dont faction resté suspendue, et par les rem-
boursemensdes compagnies-de ehemiartle;
fer. Si', l'amortissement n'agit plusi depuis
plusieurs exercices, il vient d'y être avanta
geusement suppléé par la grande mesure^
de la ..conversion des .rentes, qui.remplit le
même objet, ; et qui opère d'une manière bien
autrement efficace; Quant aux rembourse-
mens des compagnies de chemins de fer,qui
doivent être de 40 millions en 1853, il est
assez naturel qu'ils, soient comptés comme*
recettes, vis-à-vis d'une dépense en travaux
extraordinaires montant à 79 millions.
L'état des voies et moyens, mis en regard
de celui des dépenses, laisse une insuffisance
de 48 millions, Mais.,l'expérience a démon
tré que les annulations de crédits qui ont lieu
en fin d'exercice sont en moyennedeplusde
50 millions defrancs. Il est donc probable que
cette insuffisance sera couverte par les annu
lations ultérieures; pourvu cependant qu'on
soit très .sobre de crédits supplémentaires et
extraordinaires, ce qui semblé assez facile
avec ùn budget qui fait une part convenable
à tous les besoins , et à toutes les prévisions,
Ainsi, le budget de 1853 pourra, comme
celui de 1852 , v se régler sans découvert.
Parmi les dispositions diverses introduites
à Jasujiç du budget^, la plus importante est
celle qui ouvre un.crédit de 10 millions des
tiné à l'acquisition de lettres de gage des so
Piétés de crédit foncier. ■ C'est l'application
du décret de février qui a laissé à la lpi^
de finances Je soin de detcrmiûér " cha-*"
que année la somme que le trésor pour-,
rait .employer à l'achat des obligations émi- y
ses par, ces sociétés. Le crédit de 10 millions^
dit l'exposé des motifs, est un maximum qui
ne peut pas être dépassé, mais qui ne- doit
pas être nécessairement atteint. On com
prend, du reste, que, si les opérations ne
réussissent pas, le gouvernement ne ,persis
tera pas dans un système onéreux au trésor,
fet que, si elles réussissent au contraire, il
pourra vendre les lettres rte gage qu'il aura
reçues, rentrer dans ses fonds, et les em
ployer, à prendre les obligations d'autres so
ciétés qui se créeront, sans imposer une
nouvelle charge au trésor. Il n'y a donc pas
à craindre de voir ce chapitre prendre une
extension dangereuse pour les finances de
l'Etat.
Un mot, en terminant, sur la situation fi
nancière. On calcule que les découverts
peuvent être évalués ^dans leur ensemble à
630 millions qui s'accroissent des 38 mil
lions employés pour satisfaire aux deman
des de remboursement des rentes. Nous
venons de voir que les budgets de 1852 et
1853 se régleraient en équilibre. Maintenant
un chiffre de 668 millions excède-t-il les res-:
sources de la dette flottante ? nous ne le pen
sons pas. Cette dette se compose;'pour plus '
des deux tiers, de fonds que le trésor est obli
gé de recevoir, tels que fonds des communes,
des caisses d'épargne, de la caisse des dépôts et
consignations et des receveurs-généraux. Sur
la somme restaute, les 75 millions qui sont
dus à la Banque de France ne sont rembour
sables qu'en quinze années. Enfin le trésor
possède encore actuellement en dépôt à la
Banque plus de 100 millions. 11 n'y a, par
conséquent, dans la situation actuelle, au
cune cause d'embarras. > j. bura.t.
L'avertissement suivant vient d'être donné
au journal le Pays :
Vu l'art. 42 de la Constitution portant :
« Le. compte-rendu'des séances du Corps Lé--
gislatif par' les journaux ou tout autre moyen de
publication ne consistera que dans /a reproduc-'
tion du procès-verbal dressé , à l'issue de chaque
séance, par les soins du président du Corps Légis
latif.»' " V
Vu l'article 32, § .3 du déeret organique sur la'
presse, en date du 17 février 1852;
Considérant que dans les numéros "du S et 6
mai proseï^' mois, le journal le Pays a publié,
sous le tître de Discussion de la loi sur la réhabi
litation , l re et 2" séances, dtpx appréciations en,
contradiction complète avec le texte de l'article 42
deUCo.ifctitutioaprécité^. .... - ....
Lesdiies appréciatians signées : Le secrétaire de
la rédaction, j. augier ;
Arrête ; ■ ■—-«
Art. 1". Aux termes de l'article 32 du décret
du 17 février 1852, un premier avertissement est
donné au journal le Pays< danï la personne de ; îkl.
J f Baraton, l'un des propriétaires geraiis, et.dé J. r
Augier, secrétaire de k réduction.
. Art. 2.'.M. le préfet de police de Paria çst chargé
de l'exécution du présent arrêté.; :> -
Fait à Paris, le 6 mai 1852. .
. r Le ministre de la police générale,
Signé : DE MAGPAS.
Nous ne saurions dissimuler l'étonnement
jrofond que nous cause la mesure qui vient
d'atteindre le Pays. Ce journal nous avait
paru s'être soigneusement renfermé dans les
strictes limites de; la légalité. Après avoir
publié intégralement le procès-verbal de la'
séance du Corps Législatif, le Pays s'était
servi des faits portés par le procès-verbal à
a connaissance de tout le monde, et tombés
ainsi dans le domaine, public, pour émettre
une opinion personnelle et indépendante sur
une question de législation. Il avait usé d'un
droit, à notre avis, incontestable. ;
L'article 42 de ia Constitution que cite
M. le ministre de; là police générale , porte
que le compte-rendu des séances du Corps
Législatif ne consistera que dans la repro-
; duc tion du procès-verbal {officiel. Dans le
i préambule de la Constitution, le Président
^ la République explique qu'il n'a pas
') Voulu o-ifue ce compte rendu fut livré comme
autrefois à l'esprit de parti de chaque jour
nal. » Il n.'est donc plus loisible aux journaux
d'écourter ou d'étendre au gré de. leurs prédi-
i Actions particulières lapublication desdébats
; législatifs, de l'entremêler d'un commentaire
: passionné, de grossir ou d'affaiblir la viva
cité de cesdébats, d'en dénaturer le caractère.
. Tel est, d'après la circulaire de M. le garde
des sceaux, l'objet de cette publication offi
cielle, uniforme pour tous, à laquelle aucun
journal ne peut faire subir ni addition, ni
retranchement, et qu'il n'est pas plus permis
de modifier que de contrediréi
! Le Pays a-t-il rien fait de pareil? Non
i sans doute, puisqu'il a publié intégralement
le procès-verbal officiel. Seulement ce pro
cès-verbal est devenu pour lui la ba«e d'une
appréciation, c'est le mot même dont se sert
M. le ministre de la police générale. Le Pays
; a publié une appréciation^ c'est-à-dire qu'il
a porté, suivant ses lumières propres et dans
sa liberté, un jugement sur une question de
droit vivement controversée entre les juris
consultes. U a exprimé une préférence pour
. une des deux solutions 'qu'elle peut rece^
voir. S'il y avaitlà infraction à la loi, il fau
drait en conclure qu'une question, par cela
. seul qu'elle est agitée au sein du Corps Lé-
■ gt&làtif, devient un arcane inaccessible; et
que tous les citoyens perdent incontinent
le droit d'avoir et d'exprimer un avis sur
cette question du jour où elle préoccupe les
élus de la nation et, avec eux, la nation
entière. Nous n'avons pas besoin d'insister
sur ce qu'une pareille conclusion aurait d'é
trange. »
. Voilà pour le point-de droit. Nous sera-t-
il permis d'ajouter une observation sur le
point de fait. M. le ministre de la police gé
nérale n'incrimine point le caractère de l'ap
préciation à laquelle s'est livré le Pays-, il ne
lui reproche ni d'être violente, ni d'être in
juste, ni.d'être passionnée, ni d'être.dange-
reuse pour la paix publique ; c'est le. fait
même de l'appréciation qui lui paraît répré-
bensible. Or, cette appréciation, si elle n'est
pas légale constitue un délit; elle entraîne
non pas un avertissement, mais une péna
lité. Les, tribunaux,; interprètes et gardiens
de la loi , nous paraissent seuls, compé-
tens pour décider ce qui est et ce qui n'est
pas un délit. Le décret sur la presse ar
me le rninistè'fé de; la police et les pré-*
fets du droit d'ayertissement pour arrêter
r les tendances^kngereuses xles journaux, et
non pour réprimer les infractions à la loi :
autrement l'administration serait sans cesse
exposée à empiéter sur le pouvoir judiciaire,
et à déclarer criminel ce que les tribunaux
réputeraient légitime. C ucheval -C larigny.
Depuis long-temps on a reconnu la né
cessité de modifier les dispositions du Cor
d.e destruction, criminelle, relatives à la
poursuite : des crimes commis par des
Français] hors du, territoire, et par des
étrangers auteurs ou .i omplices des.mêmes
crimes, arrêtés en France ou dont le gouver
nement obtient l'extradition. M. Rouher,
pendant son passage aux affaires comme mi
nistre de la justice, avait préparé, sur cette
matière', :un.projet de loi qui a été soumis à
l'examen du conseil. d'Etat. •
, Ce projet de loi, à l'étude duquel le con
seil d'Etat a consacré plusieurs séances, .et
qui a été en grande partie adopté par lui, va
etre très prochainement porté au Corps Lé
gislatif. : -, .... ,, ,,
Aux termes de l'article'5 du Code d'ins-
tion.criminelle,.tout Français qui se.rend
coupable, hors du territoire, d'un crime
attentatoire à la. sûreté de l'Etat, de. con
trefaçon du sceau de l'Etat/ de monnaies na
tionales ayant cours, de papiers nationaux
ou de billets de banque autorisés par la loi,
peut être poursuivi, jugé et puni en France
d'après les lois françaises.'L'article 6 permet
d'étendre; "cette disposition auï * étrangers
.qui 1 , aûteurs ou complices dès mêmes cri
mes, sont arrêtés eu France ou dont le gou
vernement obtient l'extradition. Enfin l'^r«
ticle 7 dispose que tout Français, qui se sera
rendu coupable, hors du territoire au royau
me, d'un crime contre un Français, pourra,!
à son retour en France, y être poursuivi et
jugé, s'il n'a pas été poursuivi et jugé en
pays étranger, et si le Français offensé rend
plainte contre lui.
Ces dispositions, ainsi qu'on le voit, sont
restrictives; elles ne s'appliquent pas aux
délits, et, en matière de crimes, elles per
mettent à l'action publique de s'exercer seu
lement dans un certain nombre de cas'déter
minés, ou bien lorsque le Français offensé
rend plainte contre le coupable ; l'intérêt, de
la vindicte publique a paru exiger qu'elles
fussent généralisées et que, dans aucun cas,
les criminels ne pussent se soustraire à un
juste châtiment.
Le projet, drt à l'initiative de M. Rouher,
dispose que tout Français qui s'est rendu
coupable, hors du territoire de la Républi
que, d'un fait qualifié crime par la loi fran
çaise , peut à son retour en France être
poursuivi et jugé, à la requête du minis
tère public ou sur la plainte des parties
lésées, lors même qu'il a été poursuivi eu
pays étranger, à moins qu'il n'y ajt juge
ment. La même poursuite peut avoir lieu
dans les mêmes cas contre le Français qui
s'est rendu coupable de délits tels qua ceux
de faux passeport, excitation à la débauché,
coups et blessures volontaires, vols, escro
queries, etc.
La nouvelle rédaction ne distingue pas,
comme l'ancienne, si le crime ou le délit a
été commis contre des Français; elle permet
la poursuite de tous les faits qualifiés crimes
ou délits par notre loi pénale, qu'ils aient
été commis contre des Français ou contre
des étrangers. Ces innovations ne sont pas
les seules que contient le projet dont nous
parlons; il autorise, en outre, la cour de
cassation, en cas de poursuites pour crimes
ou délits commis en pays étranger, à ren
voyer l'affaire, sur la demande du ministère
public ou des parties, à l'un des tribunaux
les plus voisins du lieu où a été commis le
crime ou délit.
Les étrangers qui seraient arrêtés sur le
territoire français, comme auteurs ou com
plices des crimes de meurtre, assassinat, em-
poisonnemens; coups et blessures volontai
res, viol, attentat à la pudeur avec violences,
incendie, piraterie, faux et vols avec circons
tances aggravantes, commis en pays étran
ger, sur la personne et au préjudice d'un
Français, peuvent être poursuivis, jugés et
punis en France.
Les modifications que ce projet apporte
rait à là rédaction du Code, divisent proton- :
dément les érimihàlistes, nous les apprécie
rons plus tard ; nous nous bornons aujour
d'hui à les faire succinctement connaître. ,
Le secrétaire de la rédaction, l. boniface. : ,
Par décret du 3 mai courant, rendu sur
le rapport du ministre de "l'instruction pu
blique.et des cultes. M- Villemain, profes
seur d'éloquence française à la Faculté des
lettres de Paris, et M. Cousin, professeur
d'histoire de la philosophie ancienne à la
même Faculté, ont été admis, sur leur de
mande, à faire valoir leurs aroits à une
pension.de retraite. (Moniteur.)
Le Moniteur^ confirme ce matin, par"le
communiqué suivant, ce que nous disions
des résolutions prises au sujet des chemins
de Cherbourg et de Cette. !
«Le gouvernement a pris larésolution d'a
journer la concession des chemins de 1er de
Paris à Cherbourg et de Bordeaux à Cette.
» Mais voulant, dès à présent, assurer l'exé
cution de ces deux lignes et en commencer
les travaux, il vient d'envoyer au conseil
d'Etat : un projet de loi ayant pour objet
d'ouvrir à l'exercice 1852 un crédit de 3 mil
lions à répartir, par moitié sur chacune
d'elles. .... j ■. i
» Les travaux,qui seront éxécutés par l'Etat
au moyen de ces crédits seront ultérieure
ment remis aux compagnies concessionnai
res en déduction de la subvention qui devra
leur être accordée. » * ( Communiqué.)
:1. s ... 1 . ' • • •••! .
Les journaux anglais nous apportent les
détails du débat qui s'est terminé - par le
rejet de la motion de M. Cobden. Le vice-
président du congrès de la paix ne deman
dait rien de moins que l'ajournement de la-
; loi sur la milice. Cette' Tmotion a été rejetéè
par 209 voix contre 75. De nouveaux efforts
seront faits sans aucun doute pour entraver,
la marche de là discussion et pour retarder;
[l'adoption du bill; mais la motion de M.
' Cobden est la derniere tentative sérieuse
contre le principe même de la loi. ' -
Voilà donc les Anglais condamnés aux dou- ;
ceurs de la garde nationale; 80,000 citoyens,
devront, à certains jours, quitter leurs oc
cupations , pour aller s'exercer au ma-'
niementdu fusil, et ne faire , après bien':
du temps perdu, que de très mauvais
soldats. Le côté le plus plaisant de l'af
faire est que John -Bull s'a. aucun goût
pour le métier ridicule qu'on Và lui faire,
faire, et qu'il est ici la victime du point'
d'honneur. Il lui à convenu, au lendemain
du 2 décembre, de jouer la peur, de pousser
de grands cris, et de déclamer sur les dan-'
gers que les chasseurs de Vincennes faisaient
courir aux écus et aux filles d'Albion. U a
accusé son gouvernement de laisser la
Grande-Bretagne sans défense, et de man
quer à tous ses devoirs ; il a demandé un&
carabine et un uniforme, pour faire sen
tir à tout envahisseur la colère du lion bri
tannique. On l'a pris au mot : on va l'enrégi
menter, on lui fera faire l'exercice et mon
ter la garde. John Bull, aujourd'hui fort '
rassuré, peste en lui-mêmeet n'ose se dédire.
Il y a chance cependant pour qu'il oppose ,
une résistance passive à l'application de la '
loi et fasse tomber le nouveau bill en désué
tude comme les trois qui l'ont précédé.
Le seul incident curieux du dernier débat
a été un discours de lord John Russell, qiii
tenait à répondre à lord Palmerston, et à
justifier sa conduite des attaques très vi
ves dont elle a été l'objet. Cette apolo-,
gie assez embarrassée était la préface d'un
revirement assez surprenant. L'ancien mi
nistre a déclaré qu'il avait voté à la se-'
conde lecture contre le bill, mais que le prin
cipe de la loi ayant été adopté par la
chambre à une grande majorité, lui-même
croyait devoir consacrer désormais tous ses* '
efforts à améliorer les détails du bill. En^
conséquence, il a - combattu la motion'
de M. Cobden et il a voté contre elle."'-
C'est ce qui explique le petit nombre de
voix obtenu par la motion, et l'énorme nia-;
j orité en faveur de la loi. Il est temps que'
cette discussion sur la milice touche à son
terme, car on finirait par ne plus se reconr
naître au milieu des votes contradictoires de
lord John Russell. Il n'est du reste presque;
personne au sein du parlement qni n'ait-
changé d'avis, soit ostensiblement ' aiï<
fond du cœur, sur l'utilité de la mesure
preuve manjfeste .qu'elle ne répond à aucun '
besoin i national, et .qu'elle n'a été. entre les,
mains des partis, qu'une, amorce de popula
rité.- !'■■■ J ' :<:■ '• ... /; .!
"• ' ' ■ CCCHEVAIrCURIGNY.
LA MONNAIE DE CUIVHE.
Les chances dç contrefaçon. — La nature du
■ v , ,rnptal, y-L'empreinte.
Il n'y a pluç à revenir sur les élément
Législatif, au sujet de la monnaie de bronz :.
Dansl'état présent des choses, après tout débat
épuisé, et après que,le Sénat, dans sa séance^
du 3 mai, a déclaré « ne pas s'opposer à là
promulgation de la loi », nous voulons seu
lement indiquer deux points qui nous pa- :
raissent offrir un intérêt spécial. •
. Le pirémier a trait aux chances de contre
façon qu'on pouvait avoir à craindre. Un do-
cument, que, nous trouvons aujourd'hui .
dans le Moniteur, est' de nature à faire cesser
cette inquiétude; nous y lisons ;
a Si, malgré les avantages que le cuivre rouge
possède, le gouvernement n'a pas cru devoir l'a-:
dopter pour la nouvelle monnaie, t'est que, parmi"
les découverte^ de la science, figure un art nou
veau, aussi -redotitable«quexœerv«iHeux.. L'électri
cité, opérant sans .appareil et sans iruit,.soutire
le cuivre'dë ses disÉoliitiôns, "l'oblfgë à se'déposer
sur les surfaces tes plus déliCateœefit travaillées, et
4 épouser leurs formes, qu'il reproduit avec la plus
scrupuleuse fidélité. Une pièce, eh circulation peut
donc, servir à fairé un moule qui donne à son tour;
de nombreuses imitations de la pièce primitive.
» Si, ea.vue de l'avenir, les procédés de l'élec-
trotypip excluent le cuivre rôuge, d'aigres raison 3
feraient.tout aussi impérieusement écarter un al_
FEUILLETON DU CONSTITUTIONNEL, 7 MAI.
A HUIT MILLK I'IEDS
•AU-DESSUS- Ï)E LA MER.
, ,:ir . r;-.-
v _-.... wwnw-^jwpL.j
. PÀLMEIIIXO
" ' '(Suite). ' 1
l Le dialogue suivant s'engagea entre mes
camarades et le lieutenant.; . .
.Eh bien l Palnaérluo,, .dirent-ils, vous
vous plaisez toujours dans cet affreux.nid
de goélands? - , , 5 <■/ ;• -. ; .-.
— Toujours. .• ;
— Vous ne voulez donc jamais le quitter?
— Jamais, tant qu'on m'y laissera. . 1
-g; — Oh ! .quant à cela, vous n'avez pas à
craindre de concurrens. Vpus êtes bien sûr,
au moins, que personne n'intriguera pour
vous prendre, votre place. . , ,
— C'est déjà un avantage.
— Mais pourquoi ne. demandez-vous pas
de l'avancement?
. — A quoi bon?
Voua voulez donc mourir lieutenant?
- Pourquoi pas?
— Et ici?
— On meurt ici aussi bien qu'ailleurs.
— Vous êtes un philosophe* et les sept
sages de Ii Grèce, n'etaient auprès ^e vous
que des écoliers. Mais enfin, quels charmes
peut avoir pour vous un si triste séjour?
— Que sais-je? Le repos, la solitude, l'ha
bitude. ;.J U ; "Clï'ïl
«r Quant à nous, nous soEomes loin de vo- '
tre philosophie; tomber de Jîaples à Orbitel-
lo, quelle chute! Et pourquoi encore? Pour
quelaues fredaines de jeune homme, quel
que dette chez les usuriers.
Aussi,- comme les Juifs en. captivité,
chantons-nous soir et matin le cantique de
l'exil : Super flumina Babylonis t o
— Surtout depuis qu'on a grillé-les fenê-,
très de certain clocher. , .
— Quel clocher? demanda Palmérino.
Vous ne savez donc pas?
r Je ne sais rien. -\ . -
•. — Eh .bien L voici l'histoire. A fo.rce de
chercher quelque moyen de passer le temps
àiOrbitello.i. àOrbitello! comprenez-vous?...
nous avions fini par découvrir, un couvent.
— Un couvent? ;
— Oui, un couvent de femmes ; le cou
vent d<4Santa-Cbiara. Nous avions »des intel
ligences: dans la place,. si. bien que la nuit
nous nous introduisions par le clocher dans
les cellules de ces dames, au risque de nous
brouilier , avec l'Eglise; Mais la mine a été
éventée, et un beau jour, ou plutôt une belle
nuit, il n'y apas de cela plus d'une semaine,
nous avons, trouvé les fenêtres du clocher
défendues par une t riple grille enfer. Et voilà
comme quoi le Père-Eternel a ressaisi ses
épouses çt nous perdu les nôtres.
.Le lieutenant témoigna par son silence et
la gravité de sa physionomie, combien cette
plaisanterie impie était peu de son goût.
Elle n'avait jamais été du mien, et j'avais
toujours refusé de. m'associer à cette profa-
nation. Aussi, un des: officiers ajouta-t-il, en
me désignant : . .
; — Mais nous scandalisons Rudentz, qui
est pudibond comme un véritable enfant de
l'Helvétie, quoique, au demeurant, bon ca
marade.
. t: Ce lazzi me, fit rougir jusqu'aux oreilles,
et, pour ne pas me fâcher, je ne répondis
rien. Ptilmérino vint à mon aide. .
> —Il a raison^ Messieurs,, dit-il, et, quant
à moi, je partage ses scrupules. Le monde
est assez jp-and.sans s'attaquer au ciel, et
vous avez ait là. une mauvaise action. Je ne
suis pas plus puritain qu'un autre; mais, à
votre place, je ne m'en vanterais pas. L'a
mour est une chose sainte et sacrée aussi -
bien que la-religion ; en les dégradant l'un
et l'autre,, comme vous l'avez fait, vous
avez commis, permettez-moi de vousiedirej
un double sacrilège. Vous parlez,d'amour ;
vous ne connaissez pas même la galanterie. :
L'amour... je vais vous dire ce que c'est,
continua-t-il, en prenant un volume qui,
était;près de .lui. Ecoutez, et profitez de,1a
leçon; elle est tirée de l'histoire de Venise ;
« ; Un patricien illustre, ; nommé Agtonio Fos-
» carini, sortait la nuit sousun déguisement
», pour visiter .une dame qui lia±>itait tout
» près de l'ambassade d'Espagne. Il fut ac-
» cusé par le conseil des ,Dix , d'entretenir
» des relations clandestines avec l'ambassa-
» deur, crime capital/suivant les lois de la
» république. Arrêté immédiatement, on
» lui,fit son procès. Et comme il refusa
» constamment d'expliquer le mystère de
» ses. sorties nocturnes, de peur de com-
» promettre la dame qu'il aimait, il fut con-
» damné à mort, et pendu le 21 avr il 1622. »
Messieurs, dit Palmérino, après avoir, ter
miné sa lecture, voilà ce que c'est que l'a
mour.
Une discussion s'engagea entre les officiers
sur l'aventure de Foscarini : les nos l'admi
raient, les autres le raillaient, sous prétexte
que, les femmes ne valent pas la peine qu'un
honnête homme se sacrifie pour elles.
.; tt » Exemple pour exemple^ dit l'un d'eux,
je préfère pour mon compte celui d'un gen
tilhomme français dont j'ai lu la vie dans je
nesaisquelchrôniqueurde son pays. Ce gen
tilhomme nommé, je crois, M. de Termes,
s'introduisait la,nuit, d'un troisième étage,
dans un couvent de jitles, au moyen, d'une
échelle, absolument commenousnous intro
duisions, nous autres, dans le monastère de
Santa-Chiara. U n'y a rien de nouveau sftus
le soleil. . *
NiPalmérino ni moi ne primes aucune part
àla conversation desofficiers. Je lui savais gré
de l'appui qu'il yenài t de me prêter contre mes
camarades ; car j'étais seul contre eu* tous, e{
le remerciai par un regard plein de gratitude
et de sympathie, Il nous offrit obligeamment
de passer la nuit dans sa tour; mes compa
gnons, qui étaient de service le lendemain
matin, partirent le soir même pour Orbitello;
moi, qu'aucun devoir n'y réclamait, j'accep
tai l'hospitalité qui m'était offerte, heureux
de demeurer seul avec Palmérino et d'avoir
l'occasion de me lier avec.lui.
La soirée, cependant, ne répondit pas à
mon attente;..nous la passâmes en tête-à-
tête dans une causerie amicale, mais il m'in
timidait, par sa réserve sur tout ce qui lui
était personnel, et je n'osai jamais rompre
la glace. Quoiqu'il m'adressât beaucoup de
questions sur ma patrie, sur mon oncle le
gouverneur, sur moi, je n'eus pas le courage
de lui en adresser une seule sur lui-même.
Il m'imposait trop pour cela. Ce n'çst pas
qu'il eût rien de solennel et qu'il jouât le
personnage; loin de là, ses manières étaient
pleines'd'affabilité, de cordialité même, et
jamais, homme ne m'avait plu autant que
celui-là. J'aurais donné le plus pur de moji
sang pour être son ami ; mais il fallait qu'il
> le devinât, car, pour le lui dire, cela était au-
dessus de ses forces. N'oubliez pas que j'a
vais vingt ans, que j étais tout frais descendu
de mes .montagnes, et que dès la première
vue, Palmérino'm'était apparu comme un
être mystérieux, impénétrable, bien supé
rieur à tout ce que j'avais connu jusqu'alois.
Bref, ce soir.là je n'appris rien sur lui.
„ — Demain, me dis-je en le quittant, j'en
apprendrai davantage. ' .
' Je m'endormis au bruit des vagues qui ve
naient expirer au pied de la tour, et c'est au
" bruit des vagues que je me réveillai, La ma
tinée était splendide,etmou premier soin fut
de monter sur la plateforme pour admirer
de là.-comme du haut d'un bélvéder, le ma
gnifique panorama déroulé devant moi. ,,Du
côté de la terre, j'avais sous mes pieds les
ruines gigantesque d'Ansédonia, des marais,
des pâturages, des rivières, des bois, une so
litude immense, et, au fond de l'horizon,
par-delà la ville deSatumia, la chaîne pitto
resque des. monts'de Santa-Fibra. > Du côté
de la mer, je dominais les petites îles déser
tes d'Hercule et de Gianuti, plus .loin celle
du Lys, plus loin encore les îlots des Four
mis, plus près Orbitello au .bord.ide,.son,
grand lac salé, la presqu'île escarpée du
mont Argentale, avec ses villes, ses villages,
ses forteresses, et vers le midi serpentaient les ;
larges et gracieuses ondulations des plages
romaines de Corneto et de, Civita-Vecchia.
La Méditerranée déroulait toutantour et jus
qu'aux bornes de l'infini ses plaines bleues
. émaillées çà et là de quelques voiles blan
ches qui brillaient aux feux du soleil,levant
comme des diamans enchâssés dans le saphir.
Comme j'étais là, assis sur l'affûtd'un des
canons braqués aux créneaux de la tour, je
fus rejoint par Palmérino.
. — Monsieur Rudentz, me dit-il, en me
■ serrant cordialement la main, vous aimez
: la nature, je le devine à l'admiration muette-
qui brille dans vos yeux et au recueillement
où je vous trouve plongé.
—, La nature eut mon premier amour,
lui répondis-je avec émotion, car je suis
d'un pays où, sans faire tort à votre Italie,
elle a des grandeurs que rien n'égale. , ' _
-t -Oui, je sais que vous êtes Suisse, et
votre patrie doit être bien belle et bien atta
chante, car ou dit que le mal du pays vous
'gagne au point de vous faire déserter, lors
que vous entendez jouer à l'étranger un air
de vos montagnes. Mais puisque vous aimez
les spectacles de la nature, suivez-rnoi, je
vais vous en montrer un qui, j'en suis sûr,
vous plaira.
Nous marchâmes quelque temps sur la grè
ve, les pieds baignés par l'écume des vagues,
jusqu'à un petit promontoire où la côte se
redresse brusquement; là des rochers escar
pés et nus tombent à pic dans les flots et
sont .coupés-j d'espace eu espace , d'énor
mes fissures verticales comme si la cognée
des Titanf» ou un tremblement de terre les
<àût séparés violemment. Une de ces crevas
ses, plus large que les autres,'et où la mer
entre en bouillonnant, s'ouvre et se res
serre jusqu'à trois fois de manière, à for
mer trois chambres circulaires qui reçoivent
là lumière d'en haqt, et où là vagpe, une fois
entrée , s'apaise tout d'un coup et semble,,
.iuïjter.ai^biunopflc, ,son qalme,. sa fraîcheur
et sa limpidité. .. .
; . En ce, moment un soldat^ arrivé d'Orbi-'
teUoj apporta à Palmérino .quelques papiers
de service "parmi lesquels je réconnus la fa
meuse gazette .espagnole qu'il recevait .chaque*
semaine,, et qui arrivait directement de Mâ-
, dnd à son adresse, toute chamarrée dès tijïjsf'
bres de la poste. JJ mit le tout dans sa poche
sans y jeter 1<'S yeiix èt continua à rne faire,
les honneurs du site. Quand nous fûmes ait
sommet du rocher, il me fitasseo.ir sur une es
pèce de banc naturel où l'on, voyait qu'il .
s'asseyait souvent et d'où le regard plongeait
! au fond du gouffre, si l'on peut appekr dé'
ce nom sinistre un charmant bassin d'eau
pure et bleue comme le ciel.qu'.elle.réflé
chissait. Des chênés verts et des pins croi's-
: saierit autour de iious ; mille plantes grim
pantes pendaient aux parois intérieures du;
rocher. Quoique.moinsvàsle,la vue delà est
presque aussi belle que du haut de la tour;
on a derrière soi et assez près pour en par
courir des yeux tous les détails, les ruines de '
la ville étrusque et l'île d'Hercule presque à
ses pieds. Députe qùelques instans, la cout
versation languissait. La tête enfopeée dans
ses deux maius,, Palmérino. était tombé
dans une profondé rêverie et semblait avoir
oublié tout-à-fait qu'il n'était pas seul.
Lieutenant, lui dis-je, pour lui rappe
ler ma présence, mais sans oser lui parler
du journal, que je ne vous empêche pas de
lire les lettres qu'on vient de vous apporter. -
Faites vos affairés comme si je n'étais pas là.
— Puisque vous tn« le permettez, je vais
voir ce que c'est.
Il tira le paquet de sà poche, et la pre
mière chose qu'il fit fut d'arracher la bande
du journal et de le déplier devant lui ; mais
à peine y eut-il jeté lesveux, qu'il poussa un
cri étouffé et roula, par terre sans mouvez
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