Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1908-04-07
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 07 avril 1908 07 avril 1908
Description : 1908/04/07 (A2,N190). 1908/04/07 (A2,N190).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7646574v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
r Année. « 190 (Quotidteil) 1* Numéro i S centimes Mardi 7 Avril 190B.
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Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKt
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Étranger. 40 J) 20 »
André Antoine
ou
FHistoi re de France
Racontée à nos petits enfants
II y a sept ou huit ans, un très vieux
*< routier de théâtre» chez qui j'avais dé-
jeune, me disait en parlant d'Antoine :
— Vous savez que cet homme n'a
"ien inventé. Un tel et Un tel et Un tel
ont fait ce qu'il fait bien avant lui !
Je ne répondis rien à ce vieux mon-
sieur: nous étions d'avis trop différents
pour des gens qui déjeunent ensemble.
Et puis, comme il n'était plus assez
jeune pour changer sa manière de voir,
à quoi bon le chagriner par une inutile
contradiction.
Je hochai donc la tête et ce fut en
moi-même que je lui répondis ces pa-
roles sévères:
-— Mon pauvre vieux, tu es né trop
tôt, vois-tu! Ce n'est pas pour toi, c'est
pour d'autres plus jeunes que cette es-
pèce de messie, André Antoine, est venu
:rénover le monde!
» Il n'a rien fait, dis-tu, qui, ayant
lui, n'ait été fait par d'autres. Mais, si
nous l'admirons, ce n'est pas pour avoir
fait des choses que vous n'aviez pas su
faire.
» C'est surtout parce qu'il n'a plus
fait des choses que vous faisiez!
» II n'a rien inventé: on n'invente pas
la vérité. Et, à ce compte, sans doute,
Flaubert, Zola, Maupassant n'ont rien
inventé non plus.
» .Nous ne te demandons pas, vieil-
lard, de renier, pour admirer Antoine,
toute une vie impossible à recommencer.
Mais tu ne nous empêcheras pas, nous,
de le considérercomme un phénomène.
» Chaque fois, pour ma part, que je
me suis trouvé en sa présence, j'ai eu
l'impression étrange d'approcher un
personnage historique. Il y a bien des
gens à qui l'on dit : t( Vous viviez dans
la mémoire des hommes. La Postérité
vous recueillera. » Assurances +out de
même un peu vagues. Ces gens-là seront
peut-être reçus dans l'histoire; nous
n'en savons rien. Mais Antoine peut être
tranquille : il y a, lui, sa place numéro-
tée. »
j'af trouvé, dans un livre, cette lé-
gende mythologique, que j'ai lue à mes
enfants :
« Il y a une vingtaine d'années, au
temps, je crois, où les théâtres, du
moins certains théâtres encore, étaient
éclairés au gaz, un employé de la Com-
pagnie traversait un « plateau », celui
où deux des neuf sœurs immortelles,
plus spécialement affectées à l'art dra-
matique, ont coutume de fréquenter.
« L'employé du gaz se trouva en pré-
sence de l'austère Melpomène et de l'ai-
mable Thalie. Il n'eut pas plutôt regar-
dé ces deux sœurs, qu'il acquit sur elle
une influence quasi-magique.
« Et il se mit incontinent à les empoi-
gner, avec son énergie ordinaire :
— Voulez-vous, leur dit-il,-me f. le
camp dans votre loge, et me retirer tout
ce maquillage que vous avez sur la g. !
« Le visage de Thalie et celui de Mel-
pomène disparaissaient, en effet, sous
des couches renforcées de blanc gras et
de rouge. Leurs traits étaient noyés,
fleurs muscles faciaux jouaient à peine:
Melpomène et Thalie n'avaient plus fi-
gure humaine.
« Comme, tout en étant disposées à
obéir, elles s'en allaient trop lentement,
au gré d'Antoine, celui-ci les poussa aux
épaules et les conduisit sous la pompe,
oui, sous la pompe; là, il leur rinça le
visage, comme à des petites mies mal-
propres. Blessées, indignées, mais con-
quises, elles pleuraient de vraies larmes
et poussaient des cris qui étaient des
cris.
« Antoine alors les embrassa et leur
dit :
— « Sœurs adorables, je suis celui qui
vous aime le mieux. Mais je veux que
vous vous rappeliez constamment que
vous êtes des demi-déesses (je ne sais
pas si c'est conforme à la classification
mythologique, mais c'est mon avis). De-
mi-déesses, vous valez mieux que des
déesses, parce qu'à la grâce souveraine,
vous alliez la faiblesse tout humaine des
femmes!. Je ne vous empêcherai pas
d'être belles, comme des personnes na-
turelles ; mais gardez-vous, ô demi-
déesses, de la moindre tentative de « chi-
qué » !
Quand j'ai eu fait apprendre par
cœur à mes enfants cette légende, je leur
tai raconté tout ce que je savais d'An-
toine.
Je n'ai pas hésité à leur dire que pres-
que tous les auteurs de ce temps ne se-
raient presque rien de ce qu'ils sont, si
Antoine n'avait pas existé.
Il y a sans doute moins de pièces
« bien faites» qu'au temps où Antoine
n'existait pas. Cela tient peut-être à ce
qu'il est plus difficile d'établir une pièce
bien faite quand on veut qu'elle soit hu-
maine et vraie. Il est moins aisé de jus-
tifier les actions d'un homme vivant, que
celles d'un fantoche.
A une reprise d'un grand succès d'il
y a trente ans, qui nous sembla un peu
puéril, je rencontrai, dans les couloirs,
nion vieux routier.
- Eh bien! en voilà du métrer.
C'en était.
le me dis à part moi ou'il n'est cas
très-difficile d'en faire, du théâtre,
quand on n'a rien à dire.
Seulement, Antoine, qui, au Théâtre
Libre, nous a révélé Lé Canard Sau-
vage, et a su mettre en lumière des hom-
mes comme Georges Ancey et François
de Curel, le dangereux Antoine a donné
au public français le besoin d'entendre
quelque chose.
Grâce à Antoine, toujours à Antoine,
on s'est aperçu que cet art du théâtre,
dit inférieur, n'était inférieur que lors-
qu'il n'était pas pratiqué par des gens
supérieurs.
Encouragés, des écrivains, que rebu-
tait la terreur du Métier, se mirent à
écrire des pièces, parce qu'Antoine avait
su leur montrer que le métier soi-disant
nécessaire était, pour faire de belles piè-
ces, moins nécessaire que le talent.
Ayant ainsi parlé d'Antoine à nos
petits enfants, il faut leur dire, pour
continuer leur instruction, que cet
homme extraordinaire a été, il n'y
a pas longtemps, sur le point de faire
naufrage.
Il n'y a pas d'homme, si extraordi-
naire qu'il soit, qui puisse être à l'abri
de la mauvaise fortune. « Nous ne som-
mes pas les premiers, disait Cordelia
au roi Lear, qui, avec la meilleure in-
tention, aient encouru malheur! »
Et il faudra raconter aussi aux petits
enfants que Henry Irving — qui fut un
homme considérable, mais pas plus con-
sidérable qu'Antoine — qu'-Irving s'était
trouvé, au moins une fois, dans une très
mauvaise passe. Alors, trois ou quatre
Anglais avaient réuni vingt mille livres
— cinq cent mille francs — et avaient
donné simplement cet argent à Irving,
comme un hommage reconnaissant à
une de leurs gloires nationales.
J'admire assez, pour ma part, ce na-
tionalisme-là.
Tristan BERNARD.
Nous publierons demain un article de -
CALIBAN
Au rapport !
Il nous faut donc revenir, une fois de
plus, en quelques mots, sur la représenta-
tion rf'Ubu-Rol ; c'est le prêtas M. Brisson
qui, dans le Temps, nous y contraint. Evi-
demment, il eût été trop facile de s'échap-
per ainsi sans autre explication. Aussi bien,
M. Brisson en demande-t-il très catégori-
quement à Tristan Bernard, le délicieux
conférencier dUbu-Roi; il m'en demande à
moi-même, il en demande aux échos de
Comoedia, et l'on sent très bien que toute
dérobade serait impossible.
J'ai ressenti déjà la même impression de
gêne au régiment, durant - les manœuvres
d'ensemble, lorsqu'il m'arrivait de tourner
légèrement la tête à droite ou à gauche
pour regarder, sans y penser, un petit
nùage qui passait; il importait ensuite de
fournir une justification précise de ce geste,
sous peine de passer pour un tau ou pour
une mauvaise tête, et c'est alors qu'il me
fallait recourir à toutes les ressources de
l'imagination pour trouver une explication
militaire et plausible: « J'avais tourné la
tête à droite parce que j'avais cru qu'au
commandant de: « Guides sur la ligne In
les trois premiers hommes du second rang
dédoublé devaient s'aligner à trois pas sur
le front comme dans la formation en co*
lonne de compagnie. » -
Je dois dire, du reste, que; neuf fois sur
dix, cette explication marécageuse ne sou-
levait aucune protestation et qu'elle me va-
lait plutôt la sympathie cœ mes chefs.
M. Brisson étant d'un esprit beaucoup
plus subtil, il me faudrait au moins six ou
huit colonnes de Comœdia pour obtenir le
même résultat. Entre nous, j'aurais même
bon espoir de m'en sortir une fois encore,
seulement je ne sais trop ce qu'en pense-
raient nos lecteurs.
Et puis, quels termes faudrait-il employer
pour convaincre M. Brisson? Comment lui
expliquer que l'argument écrit par Jarry
lui-même n'est qu'une nouvelle parodie,
qu'un amusement — dois-je le dire? -
sans utilité apparente, qu'il n'est, par
cela même, lui aussi, qu'une de ces
idées mobiles et insaisissables qui se
forment à chaque moment dans l'esprit hu-
main comme les nuées sur la mer qui, par-
fois, ne fournissent qu'un petit brouillard
et parfois de monstrueux orages sans que
personne ait jamais pu en discerner les cau-
ses profondes, si ce n'est dans les mémoi-
res académiques ou dans des Traités de
Physique à l'usage des écoles?
Sans doute avons-nous eu le tort de sou-
rire sous les armes à ces évocations qui
passaient. Que M. Brisson qui, lui, n'a point
désarmé, veuille bien excuser cette marque
extérieure d'irrespect pour notre belle et
grande armée de producteurs contempo-
rains et nous dispenser de toute explication.
G. DE PAWLOWSKI.
Echos
Ce soir, à huit heures et demie, au théâ-
tre Sarah-Bernhardt, répétition générale de
La Courtisane de Corinthe.
L
homme heureux est celui qui n'a pas
de chemise.
11 y a quelques jours, au banquet qui fut
donné pour fêter la décoration d'Alexandre
Georges, la présidence avait été dévolue
à M. Enoch; l'éditeur de l'excellent musi-
cien.
Après le dessert, pn servit le café er
toute une tasse se répandit sur la chemise
de M. Enoch. L'éditeur était désolé,
Alexandre Georges s'approcha de lui e-
lui demanda la permission d'écrire su-
cette chemise. Il écrivit les premières me
, sures de Si l'eau qui court pouvait parler?
avec cette variante pour les paroles :
Si le café qui court pouvait parler.
Et tous les convives, notre illustre col-
laborateur Jean Richepin le premier, s'im-
provisèrent collaborateurs par les autogra-
phes dont ils illustrèrent le plastron.
M. Enoch conserve cette chemise désor-
mais historique; il va la faire mettre sous
verre.
p
our s'amuser dans les salons.
Pour combattre l'abus du bridge et
du poker, on cherche d autres distractions.
On compose des bouts-rimés, on joue aux
petits papiers et on fait des dictées diffi-
ciles.
Voici celle qui fut donnée, l'autre jour,
à quelques hommes de théâtre éminents.
Comme chacun d'eux y fit des fautes nom-
breuses, nous ne vous disons pas leurs
noms. Cette dictée est d'ailleurs historique,
elle fut inventée par Mérimée et donnée en
exemple — en exemple difficile — aux
habitués de la Cour de Napoléon III.
Quelles que soient ou quelque exiguës que
t'aient paru les arrhes qu'étaient censés avoir
données la douairière ainsi que le margufllïer
muni d'un annulette à maint et maint fusilier
subtil, bien que lui ou elle soit censée les leur
avoir refusées, va t'en les réclamer à telle ou
telle bru jolie, quoiqu'il ne siée pas de dire
qu'elle les laïur aurait suppléées pour quelque au-
tre motif. -
u
n directeur bien parisien.
Honfleur, sa ville natale, va, on le
sait, élever à Alphonse Allais un monu-
ment dont Maurice Donnay, de l'ex-Chat
Noir, fera la présentation.
Alphonse Allais — ne vous désespérez
pas, jeunes gens — avait beau tenir, dans
les grands quotidiens, une place presque
prépondérante, il avait toutes les peines du
monde à faire jouer ses pièces. Son Père
la Pudeur, créé à Cluny par Valot, décida,
trop tardivement, hélas! les directeurs.
Il nous souvient qu'en 1903, notre con-
frère Camille Audigier, ayant tiré un amu-
sant vaudeville du Coup du Bottin des dé-
partements combiné avec le COUP de l'ab-
sinthe blanche, alla trouver un directeur
qui, jadis, lui avait joué trois actes. Le
directeur feuilleta le manuscrit, puis:
— Au fait, qu'est-ce que c'est que cet
Alphonse Allais?
^— Comment! Vous ne connaissez pas
l'auteur du Parapluie de l'Escouade, le cé-
lèbre humoriste dont tous les journaux.
— Pardon ! Dans quel théâtre s'est-il dé-
jà fait jouer? Il peut être fameux dans le
journalisme, mais tout ça ne me garantit
pas mes frais! Voyez plutôt Rostand avec
son Gant Rouget Ça ne fit pas un radis !
Et dire que ce perspicace directeur n'a
pas encore fait fortune. Il est vrai qu'au-
jourd'hui, il opère. en province.
Œ
uvre anthume.
Que le radieux barde de Cambo
veuille bien. une minute, plonger dans ses
souvenirs de toute première jeunesse.
Edmond Rostand a-t-il gardé quelque mé-
moire d'une pièce en prose — oui, en
prose! — qu'il écrivit jadis: une manière
de saynète à trois personnages, dont deux
de premier plan, et qu'il intitula: Dans
l'Antichambre ?
Précisons: il commit cet acte de très lit-
téraire — déjà! — et de très aimable al-
lure, alors qu'il usait encore ses fonds de
culotte sur les bancs du collège.
Comment Dans l'Antichambre fut-il pré-
cieusement mis de côté par des mains pré-
voyantes et exhumé d'un tiroir à l'heure où
Rostand triompha avec Cyrano?
Comment Dans l'Antichambre fut-il con-
fié sous le manteau à de jeunes artistes qui
l'étudient fébrilement pour le donner, dans
un avenir prochain, en représentation ultra-
privée?
Répondre à ces questions nous entraîne-
rait par delà les limites de la discrétion ju-
rée.
C'est égal, nous nous imaginions bien
que Chantecler serait la prochaine pièce
inédite d'Edmond Rostand qui serait repré-
sentée.
Il ne faut jurer de rien'
H
enako, Mme Carré, Sada-Yacco et la
Duse.
Mme Hanako, l'actrice japonaise, a,
dans une interview accordée à un journa-
liste autrichien, fait plusieurs déclarations
intéressantes ou amusantes.
Les pièces de Shakespeare, qu'on joue
au Japon : Othello, Hamlet, Macbeth, ne
plaisent' guère. On s'y intéresse comme à
des nouveautés, parce qu'on sait qu'elles
viennent d'Europe.
Le théâtre européen n'enthousiasme pas
Mme Hanako. « Je sais qu'il y a en Eu-
rope d'excellents artistes, et j'admire leur
art, mais quant à leur mimique seulement,
car le reste, je ne le comprends pas. Nous
exprimons différemment tous les senti-
ments. Nous pleurons autrement, par
exemple. Mme Carré, qui joue Madame
Butterfly, m'a prié de lui donner quelques
indications, et je l'ai fait volontiers. La scè-
ne finale, dans laquelle Madame Butterfly
se sépare de son enfant, serait joué par tou-
te véritable Japonaise de façon complète-
ment différente qu'elle ne l'est en Europe.
L'amour maternel de cette scène serait
montré avec plus de netteté et de détail.
Nous mourons autrement sur la scène,
nous mourons longuement, car ainsi seule-
ment nous pouvons faire apparaître la
cruauté de l'adieu à la vie et l'effroi qu'ins-
pire la mort! »
De l'exquise Sada- Yacco, Mme Hanako
parle avec désinvolture: « Ce n'est qu'une
danseuse, mais son mari, Kavakami, est un
grand artiste. Personne, au Japon, ne joue
les intrigants, les détectives et les espions
comme lui. » *
La Duse a eu le don de séduire la diffi-
cile Hanako. Elle l'a vue jouer Hedda Ga-
hier. De la pièce, bien entendu, elle ne dit
mot, et pour cause, mais elle se déclara ra-
vie de la « voix harmonieuse de la Duse »
et surtout de sa « démarche musicale, ma-
gnifique ». ,
Mme Hanako est une petite personne
difficile, encore que peu intellectuelle.
Ainsi que le dit an vers un critique ber-
linois connu M. Alfred Kerr, qui a des
amis à Paris:
J'ai toujours aimé l'art japonais.
Son souffle passe avec Hanako.
Des plantes, certes, il est plus près
Que nous et, certes, aussi des animaux.
s
ouffler n'est pas jouer.
Dans le passé aussi il y eut des souf-
fleurs qui oublièrent la mission dont ils
étaient chargés. Mais ce ne fut pas toujours
par lassitude ou distraction. Et l'on cite,
par exemple, ce souffleur de la Gaîté qui,
pas une fois dans sa longue carrière de
souffleur, n'avait manqué sa réplique et
qui, le jour de la première de VIdiot, fut
pris d'une telle admiration pour Laferrière
qu'il ne se souvint plus qu'il n'était point
seulement auditeur et spectateur. Et le
grand artiste ayant toussé, frappé du pied
et attiré, par tous les moyens à sa disposi-
tion, l'attention de l'aide-mémoire, dut se
tirer d'affaire tout, seul.
A l'entr'acte, le malheureux, retombé
des sommets où il avait plané un instant,
vint offrir des excuses à Laferrière, qui
n'en voulut point, déclarant qu'il était trop
flatté d'avoir pu intéresser à ce point un
homme- aus^j blasé, aussi consciencieux,
aussi connaisseur que le souffleur, pour
conserver de l'incident autre chose qu'un
souvenir agréable et flatteur.
LA JOURNEE DE DEUX ARTISTES
EUes sont célèbres toutes les deux, mais leur
célébrité est différente. Tout de même, le public
connaît leur nom, les journaux vous renseignent
sur leurs moindres gestes; elles sont ce qu'on
a coutume d'appeler deux physionomies bien
parisiennes.
C'est à ce titre qae nous avons tenir à rensei-
gner nos lecteurs sur l'emploi de leur temps, et
nous avons prié deux de nos plus habiles repor-
ters de les « filer » et de nous apporter le compte
rendu de leur « journée ».
Sar le premier carnet, nous lisons:
Ma « cliente » s'est levée à neuf heures du
matin. Elle a reçu la manucure (1), le coiffeur (2).
Après quoi, elle est sortie à onze heures en au-
tomobile. Elle s'est promenée au Bois jusqu'à
midi. A midi un quart, elle est allée déjeuner
dans un restaurant du quartier de la Madelei-
ne (3). Des convives de marque, parmi lesquels
j'ai reconnu deux ministres, un académicien, des
officiers et des comédiennes charmantes l'atten-
daient déjà. Menu succulent.
Elle a quitté le restaurant à trois heures et
est allée visiter une exposition de peinture (4). A
cinq heures, goûter dans un « afteraoon tea » (5)
du quartier de la place Vendôme.
A six heures, essayage chez le couturier (6).
Rentrée s'habiller à sept heures, en raison d'un
grand dîner qu'elle donnait à huit heures et de-
mie. Invités de choix. Petit comité. Après le
dîner, bridge et intermède, avec le gracieux con-
coïifs des artiste* de Paris. — - - -
Ma « cUente » s'est couchée à thto heure du
matin..
Sur le deuxième carnet, nous lisons:
Ma « cliente n s'est levée à sept heures du
matin. Coiffeur, manucure, masseuse. Puis, à
huit heures et demie, le professeur de chant.
Elle a travaillé avec lui jusqu'à dix heures. A
dix heures un quart, visite de l'auteur. Il a lu
son dernier acte et l'on a répété jusqu'à midi.
Midi, « lunch », thé, toasts, œufs et grillade.
Une heure à deux, elle a travaillé son rôle. Deux
heures à six, elle a été répéter au théâtre. Six
heures, essayage chez le costumier. Sept heures,
elle est rentrée dîner en hâte : dîner léger et fru-
gal. Elle est-retournée, à huit heures, au théâ-
tre. Elle a joué jusqu'à minuit. A minuit et
demi, elle a été donner représentation privée
chez grande comédienne (7).
Ma « cliente » s'est couchée à deux heures
du matin.
Quelle différence entre ces deux carrières, ces
deux emplois du temps, — et ces deux artistes.
Ajoutons que la première est Mme Julia Bar-
tet; la seconde, Mme Carolina Otero.
ASMODEE.
c
'est dimanche que, pour la plus grande
joie des Parisiens, Enghien a effec-
tué sa réouverture.
L'établissement thermal a fait son habi-
tuelle toilette ; le Jardin de Roses a déjà ses
corbeilles prêtes. Quant au Casino, on y
aura, cette saison, la surprise de superbes
salons nouveaux dignes de l'élégante clien-
tèle qui fréquente Enghien et a fait de ce
bel établissement son séjour préféré.
D
Regner, 4, rue des Capucines, paye
cher bijoux, diamants, perles, auto-
mobiles, reconnaissances du Mont-de-Piété,
100 %, les dégage sans frais, même chez
des tiers.
D
ans une luxueuse Clément-Bayard
mtse au point avec le soin conscien-
cieux qui caractérise la célèbre maison,
nous avons aperçu hier, se rendant à la
première des Capucines, un de nos plus
jeunes ministres, récemment converti à
l'automobilisme. -
c
'est aujourd'hui, à quatre heures, que
commence, à l'hôtel Drouot, la vente
des tableaux et études dus à l'éminent ar-
tiste G., de son vivant grand amateur de
Quinquina Dubonnet tonique et réparateur.
D
écidément, toutes les voitures de
grand luxe sont montées en Gau-
lois. L'automobile du prince et de la prin-
pesse de Galles, avec laquelle ils ont. visité
incognito" la grande ville, avait, en effet,
des pneus blancs Bergougnan, à bande de
roulement plate. -
NOUVELLE A LA MAIN
c
hez le costumier, 1 mterprete de la
prochaine revue vient essayer son
costume.
— Il m'en faut trois, vous ne m'en avez
livré que deux!
— Mais votre rôle n'en comporte ef-
fectivement que deux!
— Pardon. J'ai trois entrées. L'une en
Chinois, l'autre en sergent de ville, et la
troisième en tapinois. *
Le Masque de Verre.
(1) Pour les noms et adresse s'adresser à l'administration.
(2) - -
(3) - -
— —
(4) - -
—
(5) - -
-
(6) - .1
(7j Voir pins haut.
OPINIONS D'ARTISTES
Mademoiselle Cécile Sorel
Sociétaire de la Comédie-Française
Mlle Sorel n'est pas seulement l'artiste
de grand talent si souvent applaudie. Rien
de ce qui touche à la vie ne la laisse indif-
férente. Elle partage les courts loisirs que
lui laisse le théâtre entre la Politique et les
Belles-Lettres.
A la suite d'un de nos échos dans lequel
nous annoncions que la belle Célimène pré-
sidait. des agapes politiques, elle fut inter-
viewée par Le Matin.
(Henri M.:i.nue1.. phot.!
Et voici ce qu'a écrit à notre grand con-
frère l'éminente sociétaire:
Pourquoi je vais aux séances du Parlement ?
Mais, parce que c'est du théâtre vivant. Je con-
viens que la pièce est fréquemment mauvaise,
que les acteurs ne savent pas bien leur rôle.
Mais, dans l'ensemble, malgré l'absence d'élo-
quence, malgré la trivialité de certains gau-
chiers, malgré la correction parfois horripilante
de la droite, qui se défend avec l'inertie du dé-
dain, malgré les entrées manquées et les fausses
sorties, il y a quelque chose de prenant, qui
m'enchante, moi femme, moi artiste, parce que
j'y trompe mon aspiration d'une vie plus ar"
dente.
* • k
Si dans ces agapes, je prends la parole pour
exalter le goût ces combats ardents pour des
idées chevaleresques et la poésie des gestes bra-
ves, je t\. tose espérer que cela puisse avoir etf
France la moindre conséquence. Cependant, t
ne me déplairait pas — avec tome la flamme quo
j'y mets — de susciter des héros dans moi au-*
ditoire:
Dans ce siècle d'aveulissement il est ré-
confortant de lire de si virils propos tenus
par une grande artiste — personnification
de la Beauté, de l'Intelligence et de 1%
Volonté.
G. A.
THÉÂTRE DES CAPUCINES
LE COU D'INDE
Opérette en 2 actes, de M. Rip
o Musique de M. Claude Terrasse
DE CINQ A SIX
Comédie en 1 acte
de M. Cloquemin
(Henri Manuel, r'&c't~
Mlle Renée Jameson
Je ne dirai pas à l'auteur du Coq d'Inde:
« Grand Rip, cesse de vaincre ou je cesse
d'écrire », d'abord parce que mon humilité
ne tutoie pas les illustrations, ensuite parce
Mlle Polaire
que les succès d autrui ne m empecheront
jamais de pondre de la copie; mais enfin,
tel Boileau relatant les victoires remportées
oar le Roi-Soleil, il me faut constater que
Rio vient de triompher une fois de plus, aux
Capucines, avec le concours du brave Clau-
de Terrasse, qui a autant de talent que de
cheveux.
Il nous conte l'histoire d'un prince in-
dien, d'un prince charmant, blasé avant de
connaître la vie et qui, en dépit de fa ré-
putation d homme à femmes, demeure vier-
ge comme la neige intacte de la junglirau.
Ali n'apprécie, dans l'Amour, les pré-
paratifs du début, les bagatelles de la porte;
ce qu'il aime le mieux, c'est le commence-
ment; loin d'épuiser une matière, il n'en
veut prendre que la fleur ; disons, pour em-
ployer une métaphore typographiqué, quil
s'intéresse uniquement à la mise en train,
sans jamais utiliser son Bon à tirer.
Ainsi qu'il l'explique, en des couplets
délicieusement soupirés par * MUe Polaire,
il allume, mais il ne se' brûle pas. Une fois
sa partenaire étourdie d'aveux savants, gri-
sée de préliminaires affolants à faire ou-
blier ceux de Leoben, Ali la pousse dans
une chambre sans lumière où le domesti-
que Bengali, nature d'élite, achève la be-
sogne commencée. à la faveur de l'ombre
nuptiale, trompeuse et solennelle.
Tandis que Bengali fait le gros ouvrage,
AAU I- s'abandonne à des rêvasseries dépri-
mantes. délectations moroses on ne peut
plus mauvaises pour la moelle épinière ce-
pendant que son renom menteur d'homme
à bonnes fortunes se propage, dans tout
l'Indoustan.
Mais voici qu'un vilain jour l'infaisable
surhomme de confiance refuse de marcher,
soit pour jouer un tour pendable à son en-
nemi, son maître; soit parce qu'il se fano-
che et entend s'établir à son compte; en
tout cas, il ne consulte que son intérêt, do-
cile aux enseignements de Locke, ce n'esi
pas lui qui proclamerait le « Locke » -out l
Laissant Ali se reposer, imprudemment,
sur son divan et sur la robustesse tari de
fois éprouvée de son valet cour amoureu-
,,-
VMaL Éfl w«P H? ** ^k?BL 3&i 13 ^^EM BBjpw ^BKâBr B^-.» ^KK
Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKt
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Étranger. 40 J) 20 »
André Antoine
ou
FHistoi re de France
Racontée à nos petits enfants
II y a sept ou huit ans, un très vieux
*< routier de théâtre» chez qui j'avais dé-
jeune, me disait en parlant d'Antoine :
— Vous savez que cet homme n'a
"ien inventé. Un tel et Un tel et Un tel
ont fait ce qu'il fait bien avant lui !
Je ne répondis rien à ce vieux mon-
sieur: nous étions d'avis trop différents
pour des gens qui déjeunent ensemble.
Et puis, comme il n'était plus assez
jeune pour changer sa manière de voir,
à quoi bon le chagriner par une inutile
contradiction.
Je hochai donc la tête et ce fut en
moi-même que je lui répondis ces pa-
roles sévères:
-— Mon pauvre vieux, tu es né trop
tôt, vois-tu! Ce n'est pas pour toi, c'est
pour d'autres plus jeunes que cette es-
pèce de messie, André Antoine, est venu
:rénover le monde!
» Il n'a rien fait, dis-tu, qui, ayant
lui, n'ait été fait par d'autres. Mais, si
nous l'admirons, ce n'est pas pour avoir
fait des choses que vous n'aviez pas su
faire.
» C'est surtout parce qu'il n'a plus
fait des choses que vous faisiez!
» II n'a rien inventé: on n'invente pas
la vérité. Et, à ce compte, sans doute,
Flaubert, Zola, Maupassant n'ont rien
inventé non plus.
» .Nous ne te demandons pas, vieil-
lard, de renier, pour admirer Antoine,
toute une vie impossible à recommencer.
Mais tu ne nous empêcheras pas, nous,
de le considérercomme un phénomène.
» Chaque fois, pour ma part, que je
me suis trouvé en sa présence, j'ai eu
l'impression étrange d'approcher un
personnage historique. Il y a bien des
gens à qui l'on dit : t( Vous viviez dans
la mémoire des hommes. La Postérité
vous recueillera. » Assurances +out de
même un peu vagues. Ces gens-là seront
peut-être reçus dans l'histoire; nous
n'en savons rien. Mais Antoine peut être
tranquille : il y a, lui, sa place numéro-
tée. »
j'af trouvé, dans un livre, cette lé-
gende mythologique, que j'ai lue à mes
enfants :
« Il y a une vingtaine d'années, au
temps, je crois, où les théâtres, du
moins certains théâtres encore, étaient
éclairés au gaz, un employé de la Com-
pagnie traversait un « plateau », celui
où deux des neuf sœurs immortelles,
plus spécialement affectées à l'art dra-
matique, ont coutume de fréquenter.
« L'employé du gaz se trouva en pré-
sence de l'austère Melpomène et de l'ai-
mable Thalie. Il n'eut pas plutôt regar-
dé ces deux sœurs, qu'il acquit sur elle
une influence quasi-magique.
« Et il se mit incontinent à les empoi-
gner, avec son énergie ordinaire :
— Voulez-vous, leur dit-il,-me f. le
camp dans votre loge, et me retirer tout
ce maquillage que vous avez sur la g. !
« Le visage de Thalie et celui de Mel-
pomène disparaissaient, en effet, sous
des couches renforcées de blanc gras et
de rouge. Leurs traits étaient noyés,
fleurs muscles faciaux jouaient à peine:
Melpomène et Thalie n'avaient plus fi-
gure humaine.
« Comme, tout en étant disposées à
obéir, elles s'en allaient trop lentement,
au gré d'Antoine, celui-ci les poussa aux
épaules et les conduisit sous la pompe,
oui, sous la pompe; là, il leur rinça le
visage, comme à des petites mies mal-
propres. Blessées, indignées, mais con-
quises, elles pleuraient de vraies larmes
et poussaient des cris qui étaient des
cris.
« Antoine alors les embrassa et leur
dit :
— « Sœurs adorables, je suis celui qui
vous aime le mieux. Mais je veux que
vous vous rappeliez constamment que
vous êtes des demi-déesses (je ne sais
pas si c'est conforme à la classification
mythologique, mais c'est mon avis). De-
mi-déesses, vous valez mieux que des
déesses, parce qu'à la grâce souveraine,
vous alliez la faiblesse tout humaine des
femmes!. Je ne vous empêcherai pas
d'être belles, comme des personnes na-
turelles ; mais gardez-vous, ô demi-
déesses, de la moindre tentative de « chi-
qué » !
Quand j'ai eu fait apprendre par
cœur à mes enfants cette légende, je leur
tai raconté tout ce que je savais d'An-
toine.
Je n'ai pas hésité à leur dire que pres-
que tous les auteurs de ce temps ne se-
raient presque rien de ce qu'ils sont, si
Antoine n'avait pas existé.
Il y a sans doute moins de pièces
« bien faites» qu'au temps où Antoine
n'existait pas. Cela tient peut-être à ce
qu'il est plus difficile d'établir une pièce
bien faite quand on veut qu'elle soit hu-
maine et vraie. Il est moins aisé de jus-
tifier les actions d'un homme vivant, que
celles d'un fantoche.
A une reprise d'un grand succès d'il
y a trente ans, qui nous sembla un peu
puéril, je rencontrai, dans les couloirs,
nion vieux routier.
- Eh bien! en voilà du métrer.
C'en était.
le me dis à part moi ou'il n'est cas
très-difficile d'en faire, du théâtre,
quand on n'a rien à dire.
Seulement, Antoine, qui, au Théâtre
Libre, nous a révélé Lé Canard Sau-
vage, et a su mettre en lumière des hom-
mes comme Georges Ancey et François
de Curel, le dangereux Antoine a donné
au public français le besoin d'entendre
quelque chose.
Grâce à Antoine, toujours à Antoine,
on s'est aperçu que cet art du théâtre,
dit inférieur, n'était inférieur que lors-
qu'il n'était pas pratiqué par des gens
supérieurs.
Encouragés, des écrivains, que rebu-
tait la terreur du Métier, se mirent à
écrire des pièces, parce qu'Antoine avait
su leur montrer que le métier soi-disant
nécessaire était, pour faire de belles piè-
ces, moins nécessaire que le talent.
Ayant ainsi parlé d'Antoine à nos
petits enfants, il faut leur dire, pour
continuer leur instruction, que cet
homme extraordinaire a été, il n'y
a pas longtemps, sur le point de faire
naufrage.
Il n'y a pas d'homme, si extraordi-
naire qu'il soit, qui puisse être à l'abri
de la mauvaise fortune. « Nous ne som-
mes pas les premiers, disait Cordelia
au roi Lear, qui, avec la meilleure in-
tention, aient encouru malheur! »
Et il faudra raconter aussi aux petits
enfants que Henry Irving — qui fut un
homme considérable, mais pas plus con-
sidérable qu'Antoine — qu'-Irving s'était
trouvé, au moins une fois, dans une très
mauvaise passe. Alors, trois ou quatre
Anglais avaient réuni vingt mille livres
— cinq cent mille francs — et avaient
donné simplement cet argent à Irving,
comme un hommage reconnaissant à
une de leurs gloires nationales.
J'admire assez, pour ma part, ce na-
tionalisme-là.
Tristan BERNARD.
Nous publierons demain un article de -
CALIBAN
Au rapport !
Il nous faut donc revenir, une fois de
plus, en quelques mots, sur la représenta-
tion rf'Ubu-Rol ; c'est le prêtas M. Brisson
qui, dans le Temps, nous y contraint. Evi-
demment, il eût été trop facile de s'échap-
per ainsi sans autre explication. Aussi bien,
M. Brisson en demande-t-il très catégori-
quement à Tristan Bernard, le délicieux
conférencier dUbu-Roi; il m'en demande à
moi-même, il en demande aux échos de
Comoedia, et l'on sent très bien que toute
dérobade serait impossible.
J'ai ressenti déjà la même impression de
gêne au régiment, durant - les manœuvres
d'ensemble, lorsqu'il m'arrivait de tourner
légèrement la tête à droite ou à gauche
pour regarder, sans y penser, un petit
nùage qui passait; il importait ensuite de
fournir une justification précise de ce geste,
sous peine de passer pour un tau ou pour
une mauvaise tête, et c'est alors qu'il me
fallait recourir à toutes les ressources de
l'imagination pour trouver une explication
militaire et plausible: « J'avais tourné la
tête à droite parce que j'avais cru qu'au
commandant de: « Guides sur la ligne In
les trois premiers hommes du second rang
dédoublé devaient s'aligner à trois pas sur
le front comme dans la formation en co*
lonne de compagnie. » -
Je dois dire, du reste, que; neuf fois sur
dix, cette explication marécageuse ne sou-
levait aucune protestation et qu'elle me va-
lait plutôt la sympathie cœ mes chefs.
M. Brisson étant d'un esprit beaucoup
plus subtil, il me faudrait au moins six ou
huit colonnes de Comœdia pour obtenir le
même résultat. Entre nous, j'aurais même
bon espoir de m'en sortir une fois encore,
seulement je ne sais trop ce qu'en pense-
raient nos lecteurs.
Et puis, quels termes faudrait-il employer
pour convaincre M. Brisson? Comment lui
expliquer que l'argument écrit par Jarry
lui-même n'est qu'une nouvelle parodie,
qu'un amusement — dois-je le dire? -
sans utilité apparente, qu'il n'est, par
cela même, lui aussi, qu'une de ces
idées mobiles et insaisissables qui se
forment à chaque moment dans l'esprit hu-
main comme les nuées sur la mer qui, par-
fois, ne fournissent qu'un petit brouillard
et parfois de monstrueux orages sans que
personne ait jamais pu en discerner les cau-
ses profondes, si ce n'est dans les mémoi-
res académiques ou dans des Traités de
Physique à l'usage des écoles?
Sans doute avons-nous eu le tort de sou-
rire sous les armes à ces évocations qui
passaient. Que M. Brisson qui, lui, n'a point
désarmé, veuille bien excuser cette marque
extérieure d'irrespect pour notre belle et
grande armée de producteurs contempo-
rains et nous dispenser de toute explication.
G. DE PAWLOWSKI.
Echos
Ce soir, à huit heures et demie, au théâ-
tre Sarah-Bernhardt, répétition générale de
La Courtisane de Corinthe.
L
homme heureux est celui qui n'a pas
de chemise.
11 y a quelques jours, au banquet qui fut
donné pour fêter la décoration d'Alexandre
Georges, la présidence avait été dévolue
à M. Enoch; l'éditeur de l'excellent musi-
cien.
Après le dessert, pn servit le café er
toute une tasse se répandit sur la chemise
de M. Enoch. L'éditeur était désolé,
Alexandre Georges s'approcha de lui e-
lui demanda la permission d'écrire su-
cette chemise. Il écrivit les premières me
, sures de Si l'eau qui court pouvait parler?
avec cette variante pour les paroles :
Si le café qui court pouvait parler.
Et tous les convives, notre illustre col-
laborateur Jean Richepin le premier, s'im-
provisèrent collaborateurs par les autogra-
phes dont ils illustrèrent le plastron.
M. Enoch conserve cette chemise désor-
mais historique; il va la faire mettre sous
verre.
p
our s'amuser dans les salons.
Pour combattre l'abus du bridge et
du poker, on cherche d autres distractions.
On compose des bouts-rimés, on joue aux
petits papiers et on fait des dictées diffi-
ciles.
Voici celle qui fut donnée, l'autre jour,
à quelques hommes de théâtre éminents.
Comme chacun d'eux y fit des fautes nom-
breuses, nous ne vous disons pas leurs
noms. Cette dictée est d'ailleurs historique,
elle fut inventée par Mérimée et donnée en
exemple — en exemple difficile — aux
habitués de la Cour de Napoléon III.
Quelles que soient ou quelque exiguës que
t'aient paru les arrhes qu'étaient censés avoir
données la douairière ainsi que le margufllïer
muni d'un annulette à maint et maint fusilier
subtil, bien que lui ou elle soit censée les leur
avoir refusées, va t'en les réclamer à telle ou
telle bru jolie, quoiqu'il ne siée pas de dire
qu'elle les laïur aurait suppléées pour quelque au-
tre motif. -
u
n directeur bien parisien.
Honfleur, sa ville natale, va, on le
sait, élever à Alphonse Allais un monu-
ment dont Maurice Donnay, de l'ex-Chat
Noir, fera la présentation.
Alphonse Allais — ne vous désespérez
pas, jeunes gens — avait beau tenir, dans
les grands quotidiens, une place presque
prépondérante, il avait toutes les peines du
monde à faire jouer ses pièces. Son Père
la Pudeur, créé à Cluny par Valot, décida,
trop tardivement, hélas! les directeurs.
Il nous souvient qu'en 1903, notre con-
frère Camille Audigier, ayant tiré un amu-
sant vaudeville du Coup du Bottin des dé-
partements combiné avec le COUP de l'ab-
sinthe blanche, alla trouver un directeur
qui, jadis, lui avait joué trois actes. Le
directeur feuilleta le manuscrit, puis:
— Au fait, qu'est-ce que c'est que cet
Alphonse Allais?
^— Comment! Vous ne connaissez pas
l'auteur du Parapluie de l'Escouade, le cé-
lèbre humoriste dont tous les journaux.
— Pardon ! Dans quel théâtre s'est-il dé-
jà fait jouer? Il peut être fameux dans le
journalisme, mais tout ça ne me garantit
pas mes frais! Voyez plutôt Rostand avec
son Gant Rouget Ça ne fit pas un radis !
Et dire que ce perspicace directeur n'a
pas encore fait fortune. Il est vrai qu'au-
jourd'hui, il opère. en province.
Œ
uvre anthume.
Que le radieux barde de Cambo
veuille bien. une minute, plonger dans ses
souvenirs de toute première jeunesse.
Edmond Rostand a-t-il gardé quelque mé-
moire d'une pièce en prose — oui, en
prose! — qu'il écrivit jadis: une manière
de saynète à trois personnages, dont deux
de premier plan, et qu'il intitula: Dans
l'Antichambre ?
Précisons: il commit cet acte de très lit-
téraire — déjà! — et de très aimable al-
lure, alors qu'il usait encore ses fonds de
culotte sur les bancs du collège.
Comment Dans l'Antichambre fut-il pré-
cieusement mis de côté par des mains pré-
voyantes et exhumé d'un tiroir à l'heure où
Rostand triompha avec Cyrano?
Comment Dans l'Antichambre fut-il con-
fié sous le manteau à de jeunes artistes qui
l'étudient fébrilement pour le donner, dans
un avenir prochain, en représentation ultra-
privée?
Répondre à ces questions nous entraîne-
rait par delà les limites de la discrétion ju-
rée.
C'est égal, nous nous imaginions bien
que Chantecler serait la prochaine pièce
inédite d'Edmond Rostand qui serait repré-
sentée.
Il ne faut jurer de rien'
H
enako, Mme Carré, Sada-Yacco et la
Duse.
Mme Hanako, l'actrice japonaise, a,
dans une interview accordée à un journa-
liste autrichien, fait plusieurs déclarations
intéressantes ou amusantes.
Les pièces de Shakespeare, qu'on joue
au Japon : Othello, Hamlet, Macbeth, ne
plaisent' guère. On s'y intéresse comme à
des nouveautés, parce qu'on sait qu'elles
viennent d'Europe.
Le théâtre européen n'enthousiasme pas
Mme Hanako. « Je sais qu'il y a en Eu-
rope d'excellents artistes, et j'admire leur
art, mais quant à leur mimique seulement,
car le reste, je ne le comprends pas. Nous
exprimons différemment tous les senti-
ments. Nous pleurons autrement, par
exemple. Mme Carré, qui joue Madame
Butterfly, m'a prié de lui donner quelques
indications, et je l'ai fait volontiers. La scè-
ne finale, dans laquelle Madame Butterfly
se sépare de son enfant, serait joué par tou-
te véritable Japonaise de façon complète-
ment différente qu'elle ne l'est en Europe.
L'amour maternel de cette scène serait
montré avec plus de netteté et de détail.
Nous mourons autrement sur la scène,
nous mourons longuement, car ainsi seule-
ment nous pouvons faire apparaître la
cruauté de l'adieu à la vie et l'effroi qu'ins-
pire la mort! »
De l'exquise Sada- Yacco, Mme Hanako
parle avec désinvolture: « Ce n'est qu'une
danseuse, mais son mari, Kavakami, est un
grand artiste. Personne, au Japon, ne joue
les intrigants, les détectives et les espions
comme lui. » *
La Duse a eu le don de séduire la diffi-
cile Hanako. Elle l'a vue jouer Hedda Ga-
hier. De la pièce, bien entendu, elle ne dit
mot, et pour cause, mais elle se déclara ra-
vie de la « voix harmonieuse de la Duse »
et surtout de sa « démarche musicale, ma-
gnifique ». ,
Mme Hanako est une petite personne
difficile, encore que peu intellectuelle.
Ainsi que le dit an vers un critique ber-
linois connu M. Alfred Kerr, qui a des
amis à Paris:
J'ai toujours aimé l'art japonais.
Son souffle passe avec Hanako.
Des plantes, certes, il est plus près
Que nous et, certes, aussi des animaux.
s
ouffler n'est pas jouer.
Dans le passé aussi il y eut des souf-
fleurs qui oublièrent la mission dont ils
étaient chargés. Mais ce ne fut pas toujours
par lassitude ou distraction. Et l'on cite,
par exemple, ce souffleur de la Gaîté qui,
pas une fois dans sa longue carrière de
souffleur, n'avait manqué sa réplique et
qui, le jour de la première de VIdiot, fut
pris d'une telle admiration pour Laferrière
qu'il ne se souvint plus qu'il n'était point
seulement auditeur et spectateur. Et le
grand artiste ayant toussé, frappé du pied
et attiré, par tous les moyens à sa disposi-
tion, l'attention de l'aide-mémoire, dut se
tirer d'affaire tout, seul.
A l'entr'acte, le malheureux, retombé
des sommets où il avait plané un instant,
vint offrir des excuses à Laferrière, qui
n'en voulut point, déclarant qu'il était trop
flatté d'avoir pu intéresser à ce point un
homme- aus^j blasé, aussi consciencieux,
aussi connaisseur que le souffleur, pour
conserver de l'incident autre chose qu'un
souvenir agréable et flatteur.
LA JOURNEE DE DEUX ARTISTES
EUes sont célèbres toutes les deux, mais leur
célébrité est différente. Tout de même, le public
connaît leur nom, les journaux vous renseignent
sur leurs moindres gestes; elles sont ce qu'on
a coutume d'appeler deux physionomies bien
parisiennes.
C'est à ce titre qae nous avons tenir à rensei-
gner nos lecteurs sur l'emploi de leur temps, et
nous avons prié deux de nos plus habiles repor-
ters de les « filer » et de nous apporter le compte
rendu de leur « journée ».
Sar le premier carnet, nous lisons:
Ma « cliente » s'est levée à neuf heures du
matin. Elle a reçu la manucure (1), le coiffeur (2).
Après quoi, elle est sortie à onze heures en au-
tomobile. Elle s'est promenée au Bois jusqu'à
midi. A midi un quart, elle est allée déjeuner
dans un restaurant du quartier de la Madelei-
ne (3). Des convives de marque, parmi lesquels
j'ai reconnu deux ministres, un académicien, des
officiers et des comédiennes charmantes l'atten-
daient déjà. Menu succulent.
Elle a quitté le restaurant à trois heures et
est allée visiter une exposition de peinture (4). A
cinq heures, goûter dans un « afteraoon tea » (5)
du quartier de la place Vendôme.
A six heures, essayage chez le couturier (6).
Rentrée s'habiller à sept heures, en raison d'un
grand dîner qu'elle donnait à huit heures et de-
mie. Invités de choix. Petit comité. Après le
dîner, bridge et intermède, avec le gracieux con-
coïifs des artiste* de Paris. — - - -
Ma « cUente » s'est couchée à thto heure du
matin..
Sur le deuxième carnet, nous lisons:
Ma « cliente n s'est levée à sept heures du
matin. Coiffeur, manucure, masseuse. Puis, à
huit heures et demie, le professeur de chant.
Elle a travaillé avec lui jusqu'à dix heures. A
dix heures un quart, visite de l'auteur. Il a lu
son dernier acte et l'on a répété jusqu'à midi.
Midi, « lunch », thé, toasts, œufs et grillade.
Une heure à deux, elle a travaillé son rôle. Deux
heures à six, elle a été répéter au théâtre. Six
heures, essayage chez le costumier. Sept heures,
elle est rentrée dîner en hâte : dîner léger et fru-
gal. Elle est-retournée, à huit heures, au théâ-
tre. Elle a joué jusqu'à minuit. A minuit et
demi, elle a été donner représentation privée
chez grande comédienne (7).
Ma « cliente » s'est couchée à deux heures
du matin.
Quelle différence entre ces deux carrières, ces
deux emplois du temps, — et ces deux artistes.
Ajoutons que la première est Mme Julia Bar-
tet; la seconde, Mme Carolina Otero.
ASMODEE.
c
'est dimanche que, pour la plus grande
joie des Parisiens, Enghien a effec-
tué sa réouverture.
L'établissement thermal a fait son habi-
tuelle toilette ; le Jardin de Roses a déjà ses
corbeilles prêtes. Quant au Casino, on y
aura, cette saison, la surprise de superbes
salons nouveaux dignes de l'élégante clien-
tèle qui fréquente Enghien et a fait de ce
bel établissement son séjour préféré.
D
Regner, 4, rue des Capucines, paye
cher bijoux, diamants, perles, auto-
mobiles, reconnaissances du Mont-de-Piété,
100 %, les dégage sans frais, même chez
des tiers.
D
ans une luxueuse Clément-Bayard
mtse au point avec le soin conscien-
cieux qui caractérise la célèbre maison,
nous avons aperçu hier, se rendant à la
première des Capucines, un de nos plus
jeunes ministres, récemment converti à
l'automobilisme. -
c
'est aujourd'hui, à quatre heures, que
commence, à l'hôtel Drouot, la vente
des tableaux et études dus à l'éminent ar-
tiste G., de son vivant grand amateur de
Quinquina Dubonnet tonique et réparateur.
D
écidément, toutes les voitures de
grand luxe sont montées en Gau-
lois. L'automobile du prince et de la prin-
pesse de Galles, avec laquelle ils ont. visité
incognito" la grande ville, avait, en effet,
des pneus blancs Bergougnan, à bande de
roulement plate. -
NOUVELLE A LA MAIN
c
hez le costumier, 1 mterprete de la
prochaine revue vient essayer son
costume.
— Il m'en faut trois, vous ne m'en avez
livré que deux!
— Mais votre rôle n'en comporte ef-
fectivement que deux!
— Pardon. J'ai trois entrées. L'une en
Chinois, l'autre en sergent de ville, et la
troisième en tapinois. *
Le Masque de Verre.
(1) Pour les noms et adresse s'adresser à l'administration.
(2) - -
(3) - -
— —
(4) - -
—
(5) - -
-
(6) - .1
(7j Voir pins haut.
OPINIONS D'ARTISTES
Mademoiselle Cécile Sorel
Sociétaire de la Comédie-Française
Mlle Sorel n'est pas seulement l'artiste
de grand talent si souvent applaudie. Rien
de ce qui touche à la vie ne la laisse indif-
férente. Elle partage les courts loisirs que
lui laisse le théâtre entre la Politique et les
Belles-Lettres.
A la suite d'un de nos échos dans lequel
nous annoncions que la belle Célimène pré-
sidait. des agapes politiques, elle fut inter-
viewée par Le Matin.
(Henri M.:i.nue1.. phot.!
Et voici ce qu'a écrit à notre grand con-
frère l'éminente sociétaire:
Pourquoi je vais aux séances du Parlement ?
Mais, parce que c'est du théâtre vivant. Je con-
viens que la pièce est fréquemment mauvaise,
que les acteurs ne savent pas bien leur rôle.
Mais, dans l'ensemble, malgré l'absence d'élo-
quence, malgré la trivialité de certains gau-
chiers, malgré la correction parfois horripilante
de la droite, qui se défend avec l'inertie du dé-
dain, malgré les entrées manquées et les fausses
sorties, il y a quelque chose de prenant, qui
m'enchante, moi femme, moi artiste, parce que
j'y trompe mon aspiration d'une vie plus ar"
dente.
* • k
Si dans ces agapes, je prends la parole pour
exalter le goût ces combats ardents pour des
idées chevaleresques et la poésie des gestes bra-
ves, je t\. tose espérer que cela puisse avoir etf
France la moindre conséquence. Cependant, t
ne me déplairait pas — avec tome la flamme quo
j'y mets — de susciter des héros dans moi au-*
ditoire:
Dans ce siècle d'aveulissement il est ré-
confortant de lire de si virils propos tenus
par une grande artiste — personnification
de la Beauté, de l'Intelligence et de 1%
Volonté.
G. A.
THÉÂTRE DES CAPUCINES
LE COU D'INDE
Opérette en 2 actes, de M. Rip
o Musique de M. Claude Terrasse
DE CINQ A SIX
Comédie en 1 acte
de M. Cloquemin
(Henri Manuel, r'&c't~
Mlle Renée Jameson
Je ne dirai pas à l'auteur du Coq d'Inde:
« Grand Rip, cesse de vaincre ou je cesse
d'écrire », d'abord parce que mon humilité
ne tutoie pas les illustrations, ensuite parce
Mlle Polaire
que les succès d autrui ne m empecheront
jamais de pondre de la copie; mais enfin,
tel Boileau relatant les victoires remportées
oar le Roi-Soleil, il me faut constater que
Rio vient de triompher une fois de plus, aux
Capucines, avec le concours du brave Clau-
de Terrasse, qui a autant de talent que de
cheveux.
Il nous conte l'histoire d'un prince in-
dien, d'un prince charmant, blasé avant de
connaître la vie et qui, en dépit de fa ré-
putation d homme à femmes, demeure vier-
ge comme la neige intacte de la junglirau.
Ali n'apprécie, dans l'Amour, les pré-
paratifs du début, les bagatelles de la porte;
ce qu'il aime le mieux, c'est le commence-
ment; loin d'épuiser une matière, il n'en
veut prendre que la fleur ; disons, pour em-
ployer une métaphore typographiqué, quil
s'intéresse uniquement à la mise en train,
sans jamais utiliser son Bon à tirer.
Ainsi qu'il l'explique, en des couplets
délicieusement soupirés par * MUe Polaire,
il allume, mais il ne se' brûle pas. Une fois
sa partenaire étourdie d'aveux savants, gri-
sée de préliminaires affolants à faire ou-
blier ceux de Leoben, Ali la pousse dans
une chambre sans lumière où le domesti-
que Bengali, nature d'élite, achève la be-
sogne commencée. à la faveur de l'ombre
nuptiale, trompeuse et solennelle.
Tandis que Bengali fait le gros ouvrage,
AAU I- s'abandonne à des rêvasseries dépri-
mantes. délectations moroses on ne peut
plus mauvaises pour la moelle épinière ce-
pendant que son renom menteur d'homme
à bonnes fortunes se propage, dans tout
l'Indoustan.
Mais voici qu'un vilain jour l'infaisable
surhomme de confiance refuse de marcher,
soit pour jouer un tour pendable à son en-
nemi, son maître; soit parce qu'il se fano-
che et entend s'établir à son compte; en
tout cas, il ne consulte que son intérêt, do-
cile aux enseignements de Locke, ce n'esi
pas lui qui proclamerait le « Locke » -out l
Laissant Ali se reposer, imprudemment,
sur son divan et sur la robustesse tari de
fois éprouvée de son valet cour amoureu-
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