Titre : Comoedia / rédacteur en chef : Gaston de Pawlowski
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1907-10-06
Contributeur : Pawlowski, Gaston de (1874-1933). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32745939d
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 06 octobre 1907 06 octobre 1907
Description : 1907/10/06 (A1,N6). 1907/10/06 (A1,N6).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k76453046
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-123
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 13/04/2015
-- Première n.ï;;;ée. — H° 6 (Quotidien).
lue Numéro : - S centîmes".
,- t" l'
! -, - ., --
Dimanche 6 Octobre 1907. k
♦ Rédacteur en Chef : G. de PAWLOWSKI
RÉDACTION & ADMINISTRATION :
27, Boulevard Poissonnière, PARIS
TÉLÉPHONE : 288-07
Adresse Télégraphique : C0MŒDlA*PARIS
ABONNEMENTS-:
UN AN 6 MOIS
Pa ris et Départements 24t fr. 12 fr. »
Ranger 40 » 20 »
RÉDACTION & ADMINISTRATION .! ':
27,. Boulevard Poissonnière, PARfà
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Adresse Téfëferapbique COMŒDIA=PARIS
ABONNEMENTS :
UN AN 6 MOIS
Paris et Départements 24 fr. 12 fr»
Étranger. 40 » 20 »
Le dernier
Guignol
bans l'été de 1897, fit Jean Lemer-
e je séjournais dans mon manoir de
er ili , à quelques milles de Caen.
e manoir ne paye pas de mine. C'est
e vieille bâtisse rectangulaire, dont la
açade est trouée par la pluie, le gel, les
Ruepes maçonnes et le lichen. Mais il est
Confortable. Les chambres vastes et clai-
,es> aux boiseries de chêne, plafonnées
e rudes poutres, - sont fraîches en été
se chauffent facilement eh lyver. Puis,
le Paysage est robuste, paysage de vieille
France où alternent les herbages, les
1Srgers, les emblavures, les jachères, les
,autes futaies mystérieuses, et qu'arro-
p.rit de merveilleuses fontaines. L'eau
laillit partout, eau de fées, eau de sorciè-
es, eau d'elfes et de naïades-couleuvres
argentines, lames de cristal, étangs où
Semble dormir l'âme de la « Belle »,
^ares redoutables et charmantes.
Un matin que je rêvais, après avoir
l'histoire de ce Phélipau, qui préten-
dit au nom de Charles de Navarre, et
s: disait fils de Louis XVI, je vis s'ar-
r a la grille un attelage maupiteux.
i ç» e.tai.t une charrette à claire-voie, que
traIt un âne cacochyme, au poil râpé
ommc un vieux tapis et au museau sé-
Ché par l'âge. Sur le siège se tenait un
JpPquagénaire, à la barbe fauve poti-
dree de sel, aux cheveux trop longs qui
Pendaient sur un collet de panne verte.
Cet homme avait quelque air d'artiste
et de saltimbanque, la face d'ailleurs
honnête jusqu'à la candeur et toute cris-
pe de tristesse. Dans la charrette, on
percevait les éléments d'un guignol,
Dois, rideaux, marionnettes apparues
Par les trous d'une caisse, étoffes bario-
les, et aussi une jeune personne vêtue
d'un costume couleur coquelicot, un peu
mangé par le soleil. Elle était parfaite-
ment blonde, comme un champ d'épeau-
tre vers la moisson, fort maigre, le vi-
Sa§e plus blanc que la fleur du liseron
des yeux si vastes, si pathétiques,
d'un si beau feu violet, que j'en fus tout
remUé. Au reste, elle avait de la grâce,
es traits sculptés au fin ciseau et que ne
déparait une bouche quelque peu
^_anôe^Tnsts' qu'attrisIaient le cerné des
Paupières et le creux desàjoues.
Vêtait un de ces jours où l'on a l'âme
onéreuse ; puis cette fille singulière
hypnotisait. Je m'en fus dônc à la
grIlle et j'interrogeai doucement l'homme :
r, - C'est l'âne qui est à bout de souf-
e! fit-il d'une voix rauque.
h Mais son visage disait d'autres choses,
nagrines et suppliantes :
- Entrez! dis-je, vous ferez reposer
ane et vous vous reposerez. vous-
meme.
il me salua très bas, d'une façon su-
année, théâtrale et pourtant naturelle.
L - Ah! monsieur. Ah! monsieur,
balbutiait-il. en guise de remerciement,
avec un pli de la bouche comme s'il al-
ait pleurer.
,, Mais il sut bien se contenir et, avec
l,aide de mon valet d'écurie, il logea
ane, tandis que je faisais conduire la
Jeune personne au manoir par ma ser-
ante, la grosse Catherine,
Il se trouva que le vieux était aussi
Drave homme que l'annonçait son vi-
saçe. Il promenait par les provinces un
que lui avait transmis son père ;
J faisait vivoter honorablement sa fille
JI anine et son âne de l'agrément qu'il
Pror-urait à des contemporains simples,
Car les aventures de 'Polichinelle, de
.«ssandre, d'Arlequin, de Colombine,
commissaire et de quelques seigneurs
b e moindre importance. Comme il avait
bon œil, le pied leste et l'estomac indul-
gent, il ne trouvait pas l'existence amère.
Tout changea du jour où le destin
frappa Janine. Il le fit sournoisement.
abord, la jeune fille ne sentit qu'un
peu- de lassitude, puis sa joue perdit sa
lueur d'éghntine, ses muscles se rétré-
* "'rent, la fièvre se mit à brûler le sang,
çnnn la Mort montra qu'elle ne lâche-
nt pas sa proie. Cette aventure m'é-
t.Ouvait étrangement. Après mon méde-
,ti, je fis venir un guérisseur de Caen
a un autre du Havre. Ils ne laissèrent
aucune espérance. Ces yeux magnifiques
devaient s'éteindre ainsi que les feuilles
à l'automne, cette grande chevelure al-
la^ cesser de croître. Nous attendîmes,
e vieux et moi, pleins d'horreur.
j'errais autour de la moribonde avec
un tremblement intérieur et une rage se-
crète ; la nature me paraissait odieuse d'a-
voir donné à cette fille la lumière et la
beauté les dons qui enchantent l'amour,
et de l'écraser dans sa 'grâce. Pourtant,
elle n'avait pas été absolument implaca-
bl e: la fille du Guignol conservait l'es-
rance; elle la répandait sur des jours
rnbreux et sur des événements loin-
tains. Et c'est ainsi qu'arriva l'heure du
Roi des Epouvantements.
Ce fut par un de ces crépuscules où
le firmament se pare de fabuleux men-
songes. Cent nuages avaient revêtu leurs
robes d'hyacinthe, de jonquille, de bro-
cart, de pourpre ; il se creusait continuel-
lement des contrées de soufre, des lacs
turquin, des fleuves améthyste et des
ernes où l'on croyait apercevoir la
îoUrnaise des cyclopes. Janine, étendue
%U,r une chaise longue, au bord de la
terrasse, buvait l'air baigné d'essences,
ainsi qu'une eau d'éternité. Soudain, elle
mu mura. les veux olus vastes encore,
émue des souvenirs de sa vie errante:
— Oh! que je voudrais voir le ma-
riage de Colombine !
Le vieux vit là un ordre suprême et
sans appel. Il se leva, il alla chercher la
charpente, les marionnettes, l'humble
décor et, silencieusement, monta le gui-
gnol. Le rideau miteux se leva; dans la
lueur orange, on vit s'agiter les grêles
symboles : Pierrot et Cassandre, Poli-
chinelle et le commissaire, Arlequin et
Colombine.
Ah! ce spectacle! Le vieux, fou de
douleur, gardant toutefois la lucidité de
son pauvre art, enfiévré par le désir de
plaire à la mourante, doué aussi de quel-
que poésie native, joua de toute son
âme. La longue lueur tantôt écarlate,
tantôt mauve, parfois aussi tournant à
l'aiguë marine, jetait une magie sur la
scène minuscule. Et les marionnettes fa-
lotes jouaient, après tout, l'essentiel du
conte humain : la joie, la douleur, 4e
songe, l'action et l'espérance invain-
cue !. Quand survint le dénouement,
quand Arlequin, tout glorieux et plus
diapré qu'un parterre, sanglota son
amour à Colombine, quelle émotion mer-
veilleuse palpita aux prunelles violettes
de la jeune fille. Tous les souhaits des
êtres parurent sur son visage maigre,
toute la douceur des illusions agita la
poitrine presque éteinte, et nos regards
se rencontrèrent. Comme il n'y avait
là qu'un amour possible, ce fut cet
amour qui naquit. Janine m'aima pour
tous les jours qu'elle avait vécus et pour
tous les jours qu'elle ne pourrait pas vi-
vre; je l'aimai au nom de la pitié pro-
fonde et de la mort. Et, saisissant la pe-
tite main défaillante dans la mienne, je
dis, à mi-voix, le mot qu'il fallait dire.
Alors, elle crut au terrible bonheur qu'at-
tendent les créatures périssables, et dans
une palpitation d'extase, en plein amour,
en pleine foi, dans l'immense crépuscule
de cuivre, elle auitta le Rêve de la Vie.
J.-H. ROSNY.
(Traduction réservée.)
BAGNES ROULANTS
Les assassins se divisent en deux ca-
tégories: .,:..
Ceux qui, grâciés par M. Fallières,
coulent à la Quyane des jours heureux à
l'ombre des palmiers;
Ceux qui conduisent des fiacres à la
sortie des théâtres.
Ces derniers sont évidemment les plus
féroces et, tout en même temps, les plus
malheureux. ,
Ils sont, en effet, sans cesse en butte
aux appels d'un public ignorant qui, les
voyant sur le siège d'une voiture de
place, les prend pour des cochers.
L'erreur cependant n'est guère excu-
sable. Lorsque l'on regarde ce singulier
attelage, il est évident, en effet, que les
ossements de cheval qui pendent au bout
des brancards ne sauraient fournir un
travail quelconque, et que la voiture elle-
même n'est là que pour servir de pilori
à l'infortuné bagnard qui y est attaché.
A l'intérieur, des coussins imperméabi-
lisés à la pommade et piqués de scarla-
tine démontrent l'usage séculaire que
l'on fit de ce corbillard pour le service
des hôpitaux. Quant aux lanternes, elles
ont l'air d'être mises autour de cet as-
semblage de vieille ferraille, de mor-
ceaux de bois et de ficelles, par les soins
de l'édilité parisienne, pour avertir les
passants qu'un insurmontable obstacle
se trouve en travers du chemin.
Quand on songe qu'il se rencontre en-
core d'infortunés bourgeois pour héler ces
ruines et leur demander de les transpor-
ter, on demeure quelque peu stupéfait.
Ces excellentes gens devraient pour-
tant savoir que, pour arrêter des véhi-
cules de cette espèce, un mandat d'ame-
ner seul est efficace.
Cette constatation, je le sais bien, ne so-
lutionne pas la question et il n'en demeure
pas moins fort regrettable qu'il soit im-
possible à Paris de trouver, à la sortie
des théâtres, un véhicule conduit ne se-
rait-ce tout au moins que par un libéré.
Quant aux exhibitions des voitures-ba-
gnes, on aurait tout intérêt, comme pour
les exécutions capitales, à ne plus les
faire qu'à l'intérieur des prisons.
G. DE PAWLOWSKI.
Échos
c
'était à l'une des premières répétitions
des Plumes de paon. Les mémoires
étaient hésitantes et les intonations encore
incertaines. L'un des auteurs cependant se
prodiguait. Suivant pas à pas les acteurs
sur le plateau, il commentait, il indiquait, il
expliquait phrase par phrase.
— Çà! dans un sourire, hein!. -Ici, un
peu pincé, un peu raide. Le public doit
tout de suite comprendre.
Alors, M. Dumény, qui connaissait la
pièce, puisqu'il avait été chargé de la lec-
ture aux artistes, M. Dumény, sur qui tom-
baient aussi les indications, s'arrête et dit,
courtois mais énervé :
— Oui. oui. plus tard. je cherche.
Faut pas me traiter comme un élève du
Conservatoire. Y a trop longtemps que j'ai
perdu l'habitude!. Çà me trouble.
M
éprise !
Le jour de la répétition générale de
lAmour veille, M. de Fiers, naturellement
très érrra, se dirigeait vers la scène anrès 1*5
second acte, quand Coquelin aîné arrive
vers ltfi, lui prend les mains, les lui serre
chaleureusement et s'écrie r
—Ah ! mon cher enfant, que je suis heu-
reux ! Que je suis heureux !
— Vraiment! monsieur Coquelin, vous
me faites un grand plaisir.
— Pensez-donc, moi qui vous ai vu haut
comme ça. enfin un bébé. Ah! oui, je
suis bien heureux?
— Vous me comblez! L'avis d'un homme
de votre valeur! Alors, vraiment, vous êtes
satisfait?
— Satisfait, enchanté, vous entendez, en-
chanté; d'ailleurs, je l'ai dit hier à Sardou.
- Hier?
— Oui! J'étais hier chez lui et j'y ai vu
votre petit garçon, je l'ai trouvé, je vous
le répète, délicieux!
— Ah ! vous avez.
Coquelin parlait du fils de M. de Fiers
et non de sa pièce. On a beau être père et
bon père, il y a des méprises crispantes.
s
avez-vous ce que vient de répondre un
tragédien moderne à l'un de nos con-
frères qui lui recommandait l'œuvre d'un
jeune poète d'avenir ?
Ce tragédien, à la voix particulièrement
timbrée, s'écria:
- Oui, vous me signalez de beaux vers.
Mais l'auteur n'est pas intéressant: il garde
sa moustache. Je ne protège que les gens
rasés..
N
ous avons reçu, hier, de nos collabo-
rateurs Max et Alex Fischer, la lettre
amusante que voici :
Mon cher rédacteur en chef,
Comœdia veut-il ouvrir un grand concours, dit :
« Concours des coquilles ? »
Voici quelles seraient les conditions du con-
cours: .,
Dans le conte de Max et Alex Fischer, paru à
Comœdia dans le numéro du 5 octobre.
10 Ligne 90: Trouver quel est le mot que les
typographes ont oublié;
2° -Liune 101: Rétablir les sept mots. sautés;
3° Ligne 130: Par quel mot importe-t-il de
remplaceriez
Voici quels seraient les prix, qui se trouvent
dès à présent à votre disposition chez notre édi-
teur:' , ,
Premier prix : Un exemplaire de Pour s'amu-
ser en ménage; un exemplaire de Y Amant de
la petite Dubois, et un exemplaire de la Dame
très blonde. 1 - 1
Deuxième prix : Un exemplaire de Pour s'amu-
ser en ménage, et un exemplaire de l'Amant de
la petite Dubois;
Troisième prix : Un exemplaire de Pour s'amu-
ser en ménage.
Sympathiques poignées de mains. -
MAX et ALEX FISCHER.
Sont-elles donc si nombreuses les coquilles
dans les livres de nos deux émis, qu'il faille
instituer un concours de perspicacité pour
recruter leurs lecteurs ? Si oui, c'est enten-
du. Nous attendons les réponses.
D
es avantages et inconvénients de l'ho-
monymie. 1
Une jolie personne qui s'exhibe parfois
dans les music-halls, pour la plus grande joie
des yeux masculins, mais qui ne prétend
pas à la moindre' notoriété artistique, reçoit
depuis trois jours force « coupures » des
journaux où l'on célèbre ses talents de co-
médienne.
Par contre, la première interprète d'une
pièce représentée avec succès sur une scène
des boulevards, se désespère de la conspi-
ration du silence qu'elle imagine ourdie con-
tre elle. L'Argus n'apporte rien! Il faut à
cela une explication.
Mlle Alice Clairville, des Nouveautés,
est celle qui, légitimement, a droit aux cou-
pures.
Mais si Mlle Jeanne Clairville les reçoit,
ce n'est pas de sa faute?.
L
'imprésario Frohman projette de donner
des représentations sur les paquebots
de la Compagnie Cunard, pour distraire les
Européens qui vont chercher fortune à New-
York, et les Américains, qui viennent nous
apporter leurs dollars. C'est là une idée qui
doit réussir, malgré vents et marées.
Il est possible que l'on puisse constater
un peu de flottement dans l'interprétation,
mais, quand bien .même certains artistes du
bateau de Thespis « boiraient une goutte »,
le public fera le meilleur accueil au réper-
toire maritime qui, probablement, se com-
posera des Transatlantiques, d'Abel Her-
mant, des opéras classiques : le Vaisseau-
Fantôme, J'Africaine et la Tempête, sans
préjudice de Y Amiral, confectionné par M.
Jacques Normand, du H. 'M. S. Pinajore, de
Sullivan; enfin, de deux à-propos intitulés :
Pierre qui roule n'amasse pas mousse et A
bon vin, pas d' « enseigne ».
Le régisseur général sera M. Duflot.
A
mendes: T • -. -
- Un bizarre motif d'amende cueilli au
tableau de service d un théâtre du boulevard.
M. D., pour avoir joué en blond, avec
une perruque brune. -'
L
e tout est de savoir tirer parti de la
concurrence.
Nous avons entendu certains directeurs
de théâtre se plaindre avec amertume du
tort que portaient aux spectacles lyriques,
comiques, dramatiques, la multiplicité et la
vogue des cinématographes.
Tout le monde ne doit pas ainsi se la-
menter. Nous pourrions citer un grand
théâtre qui a fort habilement profité du goût
que porte en ce moment le public aux
séances cinématographiques. La caisse pré-
sentait un déficit assez respectable, trop res-
pectable même, hélas! On parle de trois
cent mille francs.
En très peu de temps, le cinématographe
fut installé et fonctionna devant des foules
populaires mais copieuses et, à l'heure ac-
tuelle, non seulement le trou est comblé,
mais encore on a quelque argent devant soi.
T
rès académique, l'Opéra se recouvre,
progressivement, d'un habit vert. Au-
tour ae la statue désarmer, l herbe pousse
petit à petit et commence à recouvrir entiè-
rement le pavage.
.1 Quelques palmes maintenant et l'officia-
lité serait complète. -
L
e vieux Bjœrnsterne Bjœrnson vient
de partir en guerre contre son fils qui
dirige le Théâtre National de Christiania.
Dans une lettre qu'il adresse aux journaux,
Bjœrnson père reproche à Bjœrnson fils
d'avoir cédé, pour toute la saison d'hiver,
au « Nouveau Théâtre » de Berlin, Jo-
hanna Dybwad, une actrice bien connue. et
quatre acteurs de sa troupe.
« C'est déshonorer.une scène, dit-il, c'est
la priver de tout son attrait que permettre
aux meilleurs sujets de s'absenter pendant
plusieurs mois. De plus, c'est établir un fâ-
cheux précédent, car, s'il est permis à une
partie des artistes de se promener quand il
leur plaît, à travers le monde, tandis que
les autres restent, au théâtre et supportent
tout le travail, il se créera une sorte d'aris-
tocratie parmi les comédiens et l'envie naî-
tra parmi les camarades ». -
NOUVELLE A LA MAIN
u
n jeune homme se présente au direc-
teur d'un théâtre, en manifestant le
'1 '1
désira avoir un emploi aans la procname
pièce.
— Vous avez déjà tenu un rôle? fait le
directeur.
— Oui, monsieur.
- Où cela? ■
- Aux contributions!
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain une nouvelle
de
GEORGES LECOMTE
Au Yaudeville : Reprise "d'Education de Prince"
M. MAURICE DONNAT -. Mme JEANNE GRANIER
1
Edmond Rostand' opéré
Le poète atteint d'appendicite a été opéré hier à Baronne
U Tout Va bien! dit le professeur Pozzi.
Dans les profondeurs ombreuses de
Cambo, Edmond Rostand, qui a fui Pa-
ris, revisait Chantecler. Il en lut deux
actes à Jean Coquelin, en mai dernier,
avant que la noble Compagnie de Co-
quelin aîné, son père. ne partît pour
l'Amérique du Sud-
: M. EDMOND ROSTAND - -*- Cliché REUTLINGER,
Quelque temps après, le poète souf-
frait d'intolérables douleurs à l'abdomen.
Il avait la fièvre. Le professeur Pozzi,
qui villégiaturait en Dordogne, fut ap-
pelé auprès du malade par sa femme,
et, de concert avec les docteurs Lasserre
et Lafourcade, diagnostiqua une appen-
dicite. On décida qu'une opération était
nécessaire, mais qu'on la pratiquerait
« à froid » quand le moment favorable
serait venu. -
Depuis, Edmond Rostand recevait les
soins éclairés du docteur Lafourcade
qui, assidûment, quittait sa clinique de
Bayonne pour venir suivre pas à pas,
chez l'auteur de Cyrano, la marche de.
l'appendicite et guetter l'heure oppor-
tune où se peut produire, dans ces sor-
tes d'affections, l'entrée en scène du bis-
touri..
Ces jours derniers, Mme Edmond
Rostand et le médecin traitant préve-
naient le professeur Pozzi que l'éclair-
cie s'était produite. L'habile chirurgien
quittait Paris aussitôt et se rendait à
Cambo.
Après examen, il décida de faire trans-
porter M. Rostand à Bayonne, à la cli-
nique du docteur Lafourcade, rue. Jac-
ques-Laffitte.
C'est là que, dans une chambre du
premier étage, le poète fut opère hier
matin par le docteur Pozzi, assisté des
docteurs Lasserre, Lafourcade et Darti-
gues. rédi-
Dans l'après-nfiidi, le ~hlrurglen ,redl-
geait un rassurant bulletin de santé. Le
voici :
« L'opération a été faite; le malade
l'a parfaitement supportée. Tout va 1
bien. — Dr Pozzi. »
Notre correspondant de Bayonne
nous télégraphie, d'autre part, à dix i
heures du soir, des nouvelles tout parti-
culièrement satisfaisantes.
« Dans l'entourage de M. Edmond
Rostand, nous annonce-t-il, on se mon-
tre plein de confiance.
« On ne redoute, pas de complications
et si les choses se passent normalement,
comme on l'espère, le poète entrera
bientôt en convalescence. Il demeurera
chez le docteur Lafourcade — qui est à
la fois son médecin et son ami — le
temps nécessaire à la cicatrisation de la
plaie, et sera ensuite transporté' à Cambo
pour achever de s'y rétablir.
« Mme Edmond Rostand, qui a tenu
à accompagner son mari à Bayonne, se
tient à son chevet.
« Dès que l'opération a été connue, un
grand nombre de personnes sont venues
aux nouvelles. Les télégrammes com-
mencent à affluer, prouvant tout l'intérêt
que l'on porte au poète. »
Comœdia a tenu à être un des pre-
miers à assurer M. Edmond Rostand dès-
vœux qu'il formait pour son prompt ré.
tablissement. Aussi a-t-il chargé, par dé-
pêche, son correspondant de Bayonne
d'aller porter, à la clinique du docteur
Lafourcade, les sincères souhaits de no..
tre journal.
Tous les admirateurs du poète — tous
les publics, par conséquent - seront
avec nous dans cette pensée, et bientôt,
nous n en doutons pas, nous verrons
un Edmond Rostand, revenu à la vie,
nous donner son œuvre nouvelle qui ne
.manquera pas de suivre, sur les* routes
les plus admirables de l'Art Dramatique,
la carrière triomphale de ses aînées.
1 ROUZIER-DORCIEPES.
L'ART DU DÉCOR
Le temps de Shakespeare n'est plus.. Les grincheux s'itia
quiètent. == Nos modernes décorateurs. == Une visite chez
Bertin. == La toile de fond de Terre d'Epouvante#
d'André de Lorde.
Il est loin le temps où\le théâtre de
Shakespeare se jouait sans le moindre
décor; un simple écriteau indiquait où
se passait l'action ; pour le reste, on s'en
remettait à l'imagination des spectateurs.
Les décors, aujourd'hui, ont pris une
place considérable, pour ne pas dire la
première place, dans le succès de nos
modernes pièces de théâtre. Il est des
amis de l'art dramatique, les purs, vous
savez, pour s'insurger contre cette im-
portance excessive accordée aux acces-
soires. Ont-ils tort? Ont-ils raison? Per-
mettez-moi de ne pas avoir d'opinion,
et de reconnaître simplement'à ces grin-
cheux le droit de prétendre que l'acces-
soire ne doit jamais prendre la place de
l'essentiel, et que rien ne peut être plus
néfaste à l'art dramatique que l'habitude
de suppléer à l'insuffisance des œuvres
par le faste de la mise en scène et des
décors Ils sont bien libres n'—t-cc ;:3,
ces maniaques, de préféra Hamlet ou
le Roi Lear, ioués aux c » aeltes cians
une salle nue, aux drames de tous nos
modernes Ohnet, montés avec le luXe
dont se montrent si prodigues les direc-
teurs.
Pour moi je me borne à constater que
le public, à force d'être gâté, est devenu
très exigeant, et que maintenant, pour le
moindre lever de rideau, il lui faut non
seulement des meubles de style, mais en-
core des toiles de fond ou des décors sw
gnés de grands- maîtres.
L'époque des barbouilleurs pour théâ-
très est bien finie. Il n'y a plus place
aujourd'hui que pour des Amable, des
Jambon et des Bertin. i
Ce dernier, pour être le plus jeune —'
il n'a que trente ans — n'est pas le
moins goûté. Il a d'ailleurs été l'élève
a Amable lui-même, après avoir travaillé
dans l'atelier d'Eugène Carrière. - Je
pourrais m'appliquer à relever, dans
l' ceL d. Je Bertin, les traits qui rappel-
lent l'influence de ses maîtres. Ce serait
bien mûrie, et bien puéril. Emile Beiv
lue Numéro : - S centîmes".
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Le dernier
Guignol
bans l'été de 1897, fit Jean Lemer-
e je séjournais dans mon manoir de
er ili , à quelques milles de Caen.
e manoir ne paye pas de mine. C'est
e vieille bâtisse rectangulaire, dont la
açade est trouée par la pluie, le gel, les
Ruepes maçonnes et le lichen. Mais il est
Confortable. Les chambres vastes et clai-
,es> aux boiseries de chêne, plafonnées
e rudes poutres, - sont fraîches en été
se chauffent facilement eh lyver. Puis,
le Paysage est robuste, paysage de vieille
France où alternent les herbages, les
1Srgers, les emblavures, les jachères, les
,autes futaies mystérieuses, et qu'arro-
p.rit de merveilleuses fontaines. L'eau
laillit partout, eau de fées, eau de sorciè-
es, eau d'elfes et de naïades-couleuvres
argentines, lames de cristal, étangs où
Semble dormir l'âme de la « Belle »,
^ares redoutables et charmantes.
Un matin que je rêvais, après avoir
l'histoire de ce Phélipau, qui préten-
dit au nom de Charles de Navarre, et
s: disait fils de Louis XVI, je vis s'ar-
r a la grille un attelage maupiteux.
i ç» e.tai.t une charrette à claire-voie, que
traIt un âne cacochyme, au poil râpé
ommc un vieux tapis et au museau sé-
Ché par l'âge. Sur le siège se tenait un
JpPquagénaire, à la barbe fauve poti-
dree de sel, aux cheveux trop longs qui
Pendaient sur un collet de panne verte.
Cet homme avait quelque air d'artiste
et de saltimbanque, la face d'ailleurs
honnête jusqu'à la candeur et toute cris-
pe de tristesse. Dans la charrette, on
percevait les éléments d'un guignol,
Dois, rideaux, marionnettes apparues
Par les trous d'une caisse, étoffes bario-
les, et aussi une jeune personne vêtue
d'un costume couleur coquelicot, un peu
mangé par le soleil. Elle était parfaite-
ment blonde, comme un champ d'épeau-
tre vers la moisson, fort maigre, le vi-
Sa§e plus blanc que la fleur du liseron
des yeux si vastes, si pathétiques,
d'un si beau feu violet, que j'en fus tout
remUé. Au reste, elle avait de la grâce,
es traits sculptés au fin ciseau et que ne
déparait une bouche quelque peu
^_anôe^Tnsts' qu'attrisIaient le cerné des
Paupières et le creux desàjoues.
Vêtait un de ces jours où l'on a l'âme
onéreuse ; puis cette fille singulière
hypnotisait. Je m'en fus dônc à la
grIlle et j'interrogeai doucement l'homme :
r, - C'est l'âne qui est à bout de souf-
e! fit-il d'une voix rauque.
h Mais son visage disait d'autres choses,
nagrines et suppliantes :
- Entrez! dis-je, vous ferez reposer
ane et vous vous reposerez. vous-
meme.
il me salua très bas, d'une façon su-
année, théâtrale et pourtant naturelle.
L - Ah! monsieur. Ah! monsieur,
balbutiait-il. en guise de remerciement,
avec un pli de la bouche comme s'il al-
ait pleurer.
,, Mais il sut bien se contenir et, avec
l,aide de mon valet d'écurie, il logea
ane, tandis que je faisais conduire la
Jeune personne au manoir par ma ser-
ante, la grosse Catherine,
Il se trouva que le vieux était aussi
Drave homme que l'annonçait son vi-
saçe. Il promenait par les provinces un
que lui avait transmis son père ;
J faisait vivoter honorablement sa fille
JI anine et son âne de l'agrément qu'il
Pror-urait à des contemporains simples,
Car les aventures de 'Polichinelle, de
.«ssandre, d'Arlequin, de Colombine,
commissaire et de quelques seigneurs
b e moindre importance. Comme il avait
bon œil, le pied leste et l'estomac indul-
gent, il ne trouvait pas l'existence amère.
Tout changea du jour où le destin
frappa Janine. Il le fit sournoisement.
abord, la jeune fille ne sentit qu'un
peu- de lassitude, puis sa joue perdit sa
lueur d'éghntine, ses muscles se rétré-
* "'rent, la fièvre se mit à brûler le sang,
çnnn la Mort montra qu'elle ne lâche-
nt pas sa proie. Cette aventure m'é-
t.Ouvait étrangement. Après mon méde-
,ti, je fis venir un guérisseur de Caen
a un autre du Havre. Ils ne laissèrent
aucune espérance. Ces yeux magnifiques
devaient s'éteindre ainsi que les feuilles
à l'automne, cette grande chevelure al-
la^ cesser de croître. Nous attendîmes,
e vieux et moi, pleins d'horreur.
j'errais autour de la moribonde avec
un tremblement intérieur et une rage se-
crète ; la nature me paraissait odieuse d'a-
voir donné à cette fille la lumière et la
beauté les dons qui enchantent l'amour,
et de l'écraser dans sa 'grâce. Pourtant,
elle n'avait pas été absolument implaca-
bl e: la fille du Guignol conservait l'es-
rance; elle la répandait sur des jours
rnbreux et sur des événements loin-
tains. Et c'est ainsi qu'arriva l'heure du
Roi des Epouvantements.
Ce fut par un de ces crépuscules où
le firmament se pare de fabuleux men-
songes. Cent nuages avaient revêtu leurs
robes d'hyacinthe, de jonquille, de bro-
cart, de pourpre ; il se creusait continuel-
lement des contrées de soufre, des lacs
turquin, des fleuves améthyste et des
ernes où l'on croyait apercevoir la
îoUrnaise des cyclopes. Janine, étendue
%U,r une chaise longue, au bord de la
terrasse, buvait l'air baigné d'essences,
ainsi qu'une eau d'éternité. Soudain, elle
mu mura. les veux olus vastes encore,
émue des souvenirs de sa vie errante:
— Oh! que je voudrais voir le ma-
riage de Colombine !
Le vieux vit là un ordre suprême et
sans appel. Il se leva, il alla chercher la
charpente, les marionnettes, l'humble
décor et, silencieusement, monta le gui-
gnol. Le rideau miteux se leva; dans la
lueur orange, on vit s'agiter les grêles
symboles : Pierrot et Cassandre, Poli-
chinelle et le commissaire, Arlequin et
Colombine.
Ah! ce spectacle! Le vieux, fou de
douleur, gardant toutefois la lucidité de
son pauvre art, enfiévré par le désir de
plaire à la mourante, doué aussi de quel-
que poésie native, joua de toute son
âme. La longue lueur tantôt écarlate,
tantôt mauve, parfois aussi tournant à
l'aiguë marine, jetait une magie sur la
scène minuscule. Et les marionnettes fa-
lotes jouaient, après tout, l'essentiel du
conte humain : la joie, la douleur, 4e
songe, l'action et l'espérance invain-
cue !. Quand survint le dénouement,
quand Arlequin, tout glorieux et plus
diapré qu'un parterre, sanglota son
amour à Colombine, quelle émotion mer-
veilleuse palpita aux prunelles violettes
de la jeune fille. Tous les souhaits des
êtres parurent sur son visage maigre,
toute la douceur des illusions agita la
poitrine presque éteinte, et nos regards
se rencontrèrent. Comme il n'y avait
là qu'un amour possible, ce fut cet
amour qui naquit. Janine m'aima pour
tous les jours qu'elle avait vécus et pour
tous les jours qu'elle ne pourrait pas vi-
vre; je l'aimai au nom de la pitié pro-
fonde et de la mort. Et, saisissant la pe-
tite main défaillante dans la mienne, je
dis, à mi-voix, le mot qu'il fallait dire.
Alors, elle crut au terrible bonheur qu'at-
tendent les créatures périssables, et dans
une palpitation d'extase, en plein amour,
en pleine foi, dans l'immense crépuscule
de cuivre, elle auitta le Rêve de la Vie.
J.-H. ROSNY.
(Traduction réservée.)
BAGNES ROULANTS
Les assassins se divisent en deux ca-
tégories: .,:..
Ceux qui, grâciés par M. Fallières,
coulent à la Quyane des jours heureux à
l'ombre des palmiers;
Ceux qui conduisent des fiacres à la
sortie des théâtres.
Ces derniers sont évidemment les plus
féroces et, tout en même temps, les plus
malheureux. ,
Ils sont, en effet, sans cesse en butte
aux appels d'un public ignorant qui, les
voyant sur le siège d'une voiture de
place, les prend pour des cochers.
L'erreur cependant n'est guère excu-
sable. Lorsque l'on regarde ce singulier
attelage, il est évident, en effet, que les
ossements de cheval qui pendent au bout
des brancards ne sauraient fournir un
travail quelconque, et que la voiture elle-
même n'est là que pour servir de pilori
à l'infortuné bagnard qui y est attaché.
A l'intérieur, des coussins imperméabi-
lisés à la pommade et piqués de scarla-
tine démontrent l'usage séculaire que
l'on fit de ce corbillard pour le service
des hôpitaux. Quant aux lanternes, elles
ont l'air d'être mises autour de cet as-
semblage de vieille ferraille, de mor-
ceaux de bois et de ficelles, par les soins
de l'édilité parisienne, pour avertir les
passants qu'un insurmontable obstacle
se trouve en travers du chemin.
Quand on songe qu'il se rencontre en-
core d'infortunés bourgeois pour héler ces
ruines et leur demander de les transpor-
ter, on demeure quelque peu stupéfait.
Ces excellentes gens devraient pour-
tant savoir que, pour arrêter des véhi-
cules de cette espèce, un mandat d'ame-
ner seul est efficace.
Cette constatation, je le sais bien, ne so-
lutionne pas la question et il n'en demeure
pas moins fort regrettable qu'il soit im-
possible à Paris de trouver, à la sortie
des théâtres, un véhicule conduit ne se-
rait-ce tout au moins que par un libéré.
Quant aux exhibitions des voitures-ba-
gnes, on aurait tout intérêt, comme pour
les exécutions capitales, à ne plus les
faire qu'à l'intérieur des prisons.
G. DE PAWLOWSKI.
Échos
c
'était à l'une des premières répétitions
des Plumes de paon. Les mémoires
étaient hésitantes et les intonations encore
incertaines. L'un des auteurs cependant se
prodiguait. Suivant pas à pas les acteurs
sur le plateau, il commentait, il indiquait, il
expliquait phrase par phrase.
— Çà! dans un sourire, hein!. -Ici, un
peu pincé, un peu raide. Le public doit
tout de suite comprendre.
Alors, M. Dumény, qui connaissait la
pièce, puisqu'il avait été chargé de la lec-
ture aux artistes, M. Dumény, sur qui tom-
baient aussi les indications, s'arrête et dit,
courtois mais énervé :
— Oui. oui. plus tard. je cherche.
Faut pas me traiter comme un élève du
Conservatoire. Y a trop longtemps que j'ai
perdu l'habitude!. Çà me trouble.
M
éprise !
Le jour de la répétition générale de
lAmour veille, M. de Fiers, naturellement
très érrra, se dirigeait vers la scène anrès 1*5
second acte, quand Coquelin aîné arrive
vers ltfi, lui prend les mains, les lui serre
chaleureusement et s'écrie r
—Ah ! mon cher enfant, que je suis heu-
reux ! Que je suis heureux !
— Vraiment! monsieur Coquelin, vous
me faites un grand plaisir.
— Pensez-donc, moi qui vous ai vu haut
comme ça. enfin un bébé. Ah! oui, je
suis bien heureux?
— Vous me comblez! L'avis d'un homme
de votre valeur! Alors, vraiment, vous êtes
satisfait?
— Satisfait, enchanté, vous entendez, en-
chanté; d'ailleurs, je l'ai dit hier à Sardou.
- Hier?
— Oui! J'étais hier chez lui et j'y ai vu
votre petit garçon, je l'ai trouvé, je vous
le répète, délicieux!
— Ah ! vous avez.
Coquelin parlait du fils de M. de Fiers
et non de sa pièce. On a beau être père et
bon père, il y a des méprises crispantes.
s
avez-vous ce que vient de répondre un
tragédien moderne à l'un de nos con-
frères qui lui recommandait l'œuvre d'un
jeune poète d'avenir ?
Ce tragédien, à la voix particulièrement
timbrée, s'écria:
- Oui, vous me signalez de beaux vers.
Mais l'auteur n'est pas intéressant: il garde
sa moustache. Je ne protège que les gens
rasés..
N
ous avons reçu, hier, de nos collabo-
rateurs Max et Alex Fischer, la lettre
amusante que voici :
Mon cher rédacteur en chef,
Comœdia veut-il ouvrir un grand concours, dit :
« Concours des coquilles ? »
Voici quelles seraient les conditions du con-
cours: .,
Dans le conte de Max et Alex Fischer, paru à
Comœdia dans le numéro du 5 octobre.
10 Ligne 90: Trouver quel est le mot que les
typographes ont oublié;
2° -Liune 101: Rétablir les sept mots. sautés;
3° Ligne 130: Par quel mot importe-t-il de
remplaceriez
Voici quels seraient les prix, qui se trouvent
dès à présent à votre disposition chez notre édi-
teur:' , ,
Premier prix : Un exemplaire de Pour s'amu-
ser en ménage; un exemplaire de Y Amant de
la petite Dubois, et un exemplaire de la Dame
très blonde. 1 - 1
Deuxième prix : Un exemplaire de Pour s'amu-
ser en ménage, et un exemplaire de l'Amant de
la petite Dubois;
Troisième prix : Un exemplaire de Pour s'amu-
ser en ménage.
Sympathiques poignées de mains. -
MAX et ALEX FISCHER.
Sont-elles donc si nombreuses les coquilles
dans les livres de nos deux émis, qu'il faille
instituer un concours de perspicacité pour
recruter leurs lecteurs ? Si oui, c'est enten-
du. Nous attendons les réponses.
D
es avantages et inconvénients de l'ho-
monymie. 1
Une jolie personne qui s'exhibe parfois
dans les music-halls, pour la plus grande joie
des yeux masculins, mais qui ne prétend
pas à la moindre' notoriété artistique, reçoit
depuis trois jours force « coupures » des
journaux où l'on célèbre ses talents de co-
médienne.
Par contre, la première interprète d'une
pièce représentée avec succès sur une scène
des boulevards, se désespère de la conspi-
ration du silence qu'elle imagine ourdie con-
tre elle. L'Argus n'apporte rien! Il faut à
cela une explication.
Mlle Alice Clairville, des Nouveautés,
est celle qui, légitimement, a droit aux cou-
pures.
Mais si Mlle Jeanne Clairville les reçoit,
ce n'est pas de sa faute?.
L
'imprésario Frohman projette de donner
des représentations sur les paquebots
de la Compagnie Cunard, pour distraire les
Européens qui vont chercher fortune à New-
York, et les Américains, qui viennent nous
apporter leurs dollars. C'est là une idée qui
doit réussir, malgré vents et marées.
Il est possible que l'on puisse constater
un peu de flottement dans l'interprétation,
mais, quand bien .même certains artistes du
bateau de Thespis « boiraient une goutte »,
le public fera le meilleur accueil au réper-
toire maritime qui, probablement, se com-
posera des Transatlantiques, d'Abel Her-
mant, des opéras classiques : le Vaisseau-
Fantôme, J'Africaine et la Tempête, sans
préjudice de Y Amiral, confectionné par M.
Jacques Normand, du H. 'M. S. Pinajore, de
Sullivan; enfin, de deux à-propos intitulés :
Pierre qui roule n'amasse pas mousse et A
bon vin, pas d' « enseigne ».
Le régisseur général sera M. Duflot.
A
mendes: T • -. -
- Un bizarre motif d'amende cueilli au
tableau de service d un théâtre du boulevard.
M. D., pour avoir joué en blond, avec
une perruque brune. -'
L
e tout est de savoir tirer parti de la
concurrence.
Nous avons entendu certains directeurs
de théâtre se plaindre avec amertume du
tort que portaient aux spectacles lyriques,
comiques, dramatiques, la multiplicité et la
vogue des cinématographes.
Tout le monde ne doit pas ainsi se la-
menter. Nous pourrions citer un grand
théâtre qui a fort habilement profité du goût
que porte en ce moment le public aux
séances cinématographiques. La caisse pré-
sentait un déficit assez respectable, trop res-
pectable même, hélas! On parle de trois
cent mille francs.
En très peu de temps, le cinématographe
fut installé et fonctionna devant des foules
populaires mais copieuses et, à l'heure ac-
tuelle, non seulement le trou est comblé,
mais encore on a quelque argent devant soi.
T
rès académique, l'Opéra se recouvre,
progressivement, d'un habit vert. Au-
tour ae la statue désarmer, l herbe pousse
petit à petit et commence à recouvrir entiè-
rement le pavage.
.1 Quelques palmes maintenant et l'officia-
lité serait complète. -
L
e vieux Bjœrnsterne Bjœrnson vient
de partir en guerre contre son fils qui
dirige le Théâtre National de Christiania.
Dans une lettre qu'il adresse aux journaux,
Bjœrnson père reproche à Bjœrnson fils
d'avoir cédé, pour toute la saison d'hiver,
au « Nouveau Théâtre » de Berlin, Jo-
hanna Dybwad, une actrice bien connue. et
quatre acteurs de sa troupe.
« C'est déshonorer.une scène, dit-il, c'est
la priver de tout son attrait que permettre
aux meilleurs sujets de s'absenter pendant
plusieurs mois. De plus, c'est établir un fâ-
cheux précédent, car, s'il est permis à une
partie des artistes de se promener quand il
leur plaît, à travers le monde, tandis que
les autres restent, au théâtre et supportent
tout le travail, il se créera une sorte d'aris-
tocratie parmi les comédiens et l'envie naî-
tra parmi les camarades ». -
NOUVELLE A LA MAIN
u
n jeune homme se présente au direc-
teur d'un théâtre, en manifestant le
'1 '1
désira avoir un emploi aans la procname
pièce.
— Vous avez déjà tenu un rôle? fait le
directeur.
— Oui, monsieur.
- Où cela? ■
- Aux contributions!
Le Masque de Verre.
Nous publierons demain une nouvelle
de
GEORGES LECOMTE
Au Yaudeville : Reprise "d'Education de Prince"
M. MAURICE DONNAT -. Mme JEANNE GRANIER
1
Edmond Rostand' opéré
Le poète atteint d'appendicite a été opéré hier à Baronne
U Tout Va bien! dit le professeur Pozzi.
Dans les profondeurs ombreuses de
Cambo, Edmond Rostand, qui a fui Pa-
ris, revisait Chantecler. Il en lut deux
actes à Jean Coquelin, en mai dernier,
avant que la noble Compagnie de Co-
quelin aîné, son père. ne partît pour
l'Amérique du Sud-
: M. EDMOND ROSTAND - -*- Cliché REUTLINGER,
Quelque temps après, le poète souf-
frait d'intolérables douleurs à l'abdomen.
Il avait la fièvre. Le professeur Pozzi,
qui villégiaturait en Dordogne, fut ap-
pelé auprès du malade par sa femme,
et, de concert avec les docteurs Lasserre
et Lafourcade, diagnostiqua une appen-
dicite. On décida qu'une opération était
nécessaire, mais qu'on la pratiquerait
« à froid » quand le moment favorable
serait venu. -
Depuis, Edmond Rostand recevait les
soins éclairés du docteur Lafourcade
qui, assidûment, quittait sa clinique de
Bayonne pour venir suivre pas à pas,
chez l'auteur de Cyrano, la marche de.
l'appendicite et guetter l'heure oppor-
tune où se peut produire, dans ces sor-
tes d'affections, l'entrée en scène du bis-
touri..
Ces jours derniers, Mme Edmond
Rostand et le médecin traitant préve-
naient le professeur Pozzi que l'éclair-
cie s'était produite. L'habile chirurgien
quittait Paris aussitôt et se rendait à
Cambo.
Après examen, il décida de faire trans-
porter M. Rostand à Bayonne, à la cli-
nique du docteur Lafourcade, rue. Jac-
ques-Laffitte.
C'est là que, dans une chambre du
premier étage, le poète fut opère hier
matin par le docteur Pozzi, assisté des
docteurs Lasserre, Lafourcade et Darti-
gues. rédi-
Dans l'après-nfiidi, le ~hlrurglen ,redl-
geait un rassurant bulletin de santé. Le
voici :
« L'opération a été faite; le malade
l'a parfaitement supportée. Tout va 1
bien. — Dr Pozzi. »
Notre correspondant de Bayonne
nous télégraphie, d'autre part, à dix i
heures du soir, des nouvelles tout parti-
culièrement satisfaisantes.
« Dans l'entourage de M. Edmond
Rostand, nous annonce-t-il, on se mon-
tre plein de confiance.
« On ne redoute, pas de complications
et si les choses se passent normalement,
comme on l'espère, le poète entrera
bientôt en convalescence. Il demeurera
chez le docteur Lafourcade — qui est à
la fois son médecin et son ami — le
temps nécessaire à la cicatrisation de la
plaie, et sera ensuite transporté' à Cambo
pour achever de s'y rétablir.
« Mme Edmond Rostand, qui a tenu
à accompagner son mari à Bayonne, se
tient à son chevet.
« Dès que l'opération a été connue, un
grand nombre de personnes sont venues
aux nouvelles. Les télégrammes com-
mencent à affluer, prouvant tout l'intérêt
que l'on porte au poète. »
Comœdia a tenu à être un des pre-
miers à assurer M. Edmond Rostand dès-
vœux qu'il formait pour son prompt ré.
tablissement. Aussi a-t-il chargé, par dé-
pêche, son correspondant de Bayonne
d'aller porter, à la clinique du docteur
Lafourcade, les sincères souhaits de no..
tre journal.
Tous les admirateurs du poète — tous
les publics, par conséquent - seront
avec nous dans cette pensée, et bientôt,
nous n en doutons pas, nous verrons
un Edmond Rostand, revenu à la vie,
nous donner son œuvre nouvelle qui ne
.manquera pas de suivre, sur les* routes
les plus admirables de l'Art Dramatique,
la carrière triomphale de ses aînées.
1 ROUZIER-DORCIEPES.
L'ART DU DÉCOR
Le temps de Shakespeare n'est plus.. Les grincheux s'itia
quiètent. == Nos modernes décorateurs. == Une visite chez
Bertin. == La toile de fond de Terre d'Epouvante#
d'André de Lorde.
Il est loin le temps où\le théâtre de
Shakespeare se jouait sans le moindre
décor; un simple écriteau indiquait où
se passait l'action ; pour le reste, on s'en
remettait à l'imagination des spectateurs.
Les décors, aujourd'hui, ont pris une
place considérable, pour ne pas dire la
première place, dans le succès de nos
modernes pièces de théâtre. Il est des
amis de l'art dramatique, les purs, vous
savez, pour s'insurger contre cette im-
portance excessive accordée aux acces-
soires. Ont-ils tort? Ont-ils raison? Per-
mettez-moi de ne pas avoir d'opinion,
et de reconnaître simplement'à ces grin-
cheux le droit de prétendre que l'acces-
soire ne doit jamais prendre la place de
l'essentiel, et que rien ne peut être plus
néfaste à l'art dramatique que l'habitude
de suppléer à l'insuffisance des œuvres
par le faste de la mise en scène et des
décors Ils sont bien libres n'—t-cc ;:3,
ces maniaques, de préféra Hamlet ou
le Roi Lear, ioués aux c » aeltes cians
une salle nue, aux drames de tous nos
modernes Ohnet, montés avec le luXe
dont se montrent si prodigues les direc-
teurs.
Pour moi je me borne à constater que
le public, à force d'être gâté, est devenu
très exigeant, et que maintenant, pour le
moindre lever de rideau, il lui faut non
seulement des meubles de style, mais en-
core des toiles de fond ou des décors sw
gnés de grands- maîtres.
L'époque des barbouilleurs pour théâ-
très est bien finie. Il n'y a plus place
aujourd'hui que pour des Amable, des
Jambon et des Bertin. i
Ce dernier, pour être le plus jeune —'
il n'a que trente ans — n'est pas le
moins goûté. Il a d'ailleurs été l'élève
a Amable lui-même, après avoir travaillé
dans l'atelier d'Eugène Carrière. - Je
pourrais m'appliquer à relever, dans
l' ceL d. Je Bertin, les traits qui rappel-
lent l'influence de ses maîtres. Ce serait
bien mûrie, et bien puéril. Emile Beiv
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