Titre : Marianne : grand hebdomadaire littéraire illustré
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1938-02-23
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328116004
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 23 février 1938 23 février 1938
Description : 1938/02/23 (A6,N279). 1938/02/23 (A6,N279).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7642224p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-127
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 23/03/2015
CETTE SEMAINE Jean Giono, Jean Mistler, André Philip, J.-M. Renaitour, Marcelle Tinayre, Erich-Maria Remarque,
Marcel Achard, Abel Hermant, Jacques Kayser, André David. Georges Auric, Henry Bidou.
6e Année — No 279
1 FRANC 25
Mercredi 23 Février 1938
GRAND HEBDOMADAIRE POLITIQUE ET LITTÉRAIRE ILLUSTRÉ
Rédaction. Administration : 44, av. des Champs-Éiysées (Élysées 49-26) — Publicité : 92; Av. des Champs-Elysées (Balzac 27-04)
J~ à
La « eollade ».
nu.' Í;¡ do Bernard Aldebcrt.
1 1 , 1
La politique de l'autr.iche.
AMERIQUE, JURY DES DICTATURES
Les excès des régimes totalitaires provoquent aux Etats-Unis, position avancée
de la démocratie, de vives réactions. A Philadelphie a défilé un cortège portant
des panneaux significatifs.
MMemagne et Autriche
L'Allemagne et l'Autriche
par Jean MISTLER, 'député, Président de !a Commission
des Affaires Étrangères de la Chambre
La question d'Autriche, dis-
cutée depuis la fin de la guer-
re par les chancelleries, vient
d'être de nouveau placée au
premier plan de l'actualité eu-
ropéenne par l'entrevue du
12 février à Berchtesgaden, et
le rattachement de l'Autriche à
l'Allemagne, plusieurs fois évi-
té, apparaît désormais, aux
yeux de certains, comme chose
faite, aux yeux des autres,
comme en voie de prochaine
réalisation.
Jatn Mi*Ilci
Les querelles rétrospectives ont pour
moi peu d'attrait, et nos partis poli-
tiques, au lieu de se reprocher mu-
tuellement leurs hésitations successives
et leurs fautes, feraient mieux de tirer
du passé les leçons dont nous aurions
grand besoin. En effet, que l'on con-
sidère l'Anschluss comme achevé ou
simplement comme amorcé, il faut
avouer que jamais geste politique n'a
été plus souvent prédit et plus cons-
tamment prévu. En 1918 déjà, au mo-
ment de l'effondrement de la monar-
chie des Habsbourg, le Conseil natio-
nal autrichien proclamait le rattache-
ment du pays à l'Allemagne,
et, longtemps, l'expression
O.eutschoesterreich, Autriche-
Allemande, a figuré sur les
timbres-poste. Les traités de
paix, loin de passer sous si-
lence le danger, s'efforçaient
d'y parer en termes formels.
L'article 80 du Traité de Ver-
sailles stipulait que l'Allema-
gne « reconnaît et respectera
strictement l'indépendance de
l'Autriche dans les frontières
qui seront fixées ». Cependant
1 Allemagne, dans la constitution repu-
blicaine de Weimar, prévoyait la réu-
nion de l'Autriche à l'Allemagne, et la
représentation de sa population au
Reichsrat, si bien que, pour plus de
précaution, les Alliés lui imposaient
la modification de l'article 61 de cette
constitution, et que l'interdiction du
rattachement était introduite dans le
traité de Saint-Germain, à l'article 88,
ainsi conçu : « L'indépendance de
l'Autriche est inaliénable, si ce n'est
du consentement de la Société des Na-
tions. »
(Lire la suite page 3.)
AU-DESSUS DE LA BAIE MIROITANTE DE SAN-FRANCISCO
Durant son vol de San-Francisco à Hongkong, l'avion China Clipper auréole
1 île des Trésors et semble inspecter les travaux de la colossale exposition
américaine. *
Puissance
de l'Individu
par Jean GIONO
.!umG/f,IlU
Solitude : une des
plus grandes joies^ de
l'homme. Exercice
voluptueux du courage.
Seul combat qui me
soit permis. Affronté
aux conditions de ma
race biologique ; que je
suis obligé de com-
battre par-dessus tous
les autres combats.
? Joie de me sentir continuer à vivre ;
chaque seconde qui s'écoule est une vic-
toire. Transformer mon temps en vic-
toires. N'avoir avec les autres que des
rapports de générosité ; parce que c'est
la position la plus haute et la plus soli-
taire.
Générosité : arme la plus puissante ;
possession à l'état pur, bien au-delà de
tous les comptes et de toutes les me-
sures ; commandement de soi-même.
Avoir en face de soi la solitude :
l'adversaire qui voit fuir le plus de
lâches. Et ne pas fuir.
Et vivre! C'est-à-dire déjà vaincre ;
mais, trouver brusquement dans cette
vie les vraies raisons de vivre, et les
éternelles.
Au moment où l'intelligence des
choses frappe devant nos pieds comme
un éclair ; quand le monde n'est plus
une voûte de cave mais que la lumière
vole brusquement dans les ténèbres
cassées. Pendant que nous enrichit
le chuchotement des. morts admi-
rables.
Je ne cherche pas à éteindre cette ar-
deur au combat qui habite chaque
homme. Je dis qu'elle a été donnée pour
servir à ce combat impitoyable et non
pour s'engager dans les délires de la
force.
La lance de la solitude vous atteint
où que vous soyez, dans un chemin sou-
dain débarrassé de prêtres. Quelqu'un
d'autre que vous-même peut-il entendre
vos hurlements ? C'est votre compte
personnel qui se règle. Au milieu de vos
camarades, la soudaine intelligence de
votre véritable condition vous glace. Il
n'y a plus rien qui puisse communiquer
avec votre douleur. La masse dont vous
croyiez faire partie, elle est d'un côté
de votre douleur et vous de l'autre. Et
ainsi pour tous ceux qui composent la
masse : pouvez-vous dire encore qu'elle
existe ?
Qu'elle existe ailleurs que dans votre
imagination ?
Eternellement seul, homme qui n'as
jamais osé regarder en face ta véri-
table condition, mais toujours au mo-
ment même où tu parles de courage,
ne trouves que des remèdes de lâcheté ;
maintenant que sans te guérir tu t'es
successivement marié aux dieux et
marié aux hommes, ne vas-tu pas, à la
fin, admettre que tu es seul ?
Et enfin l'accepter ?
Le sauvetage de ta liberté et de ta
grandeur est à ce prix.
(Lire la suite page 3.)
Le Monde comme il va.
Dates.
M* FLAftDIM
l'
Si personne ne s'est fait
d'illusions sur l'intérêt capi.
tal de l'exposé de M. P.-E.
JFlandin, mercredi dernier, à
la Commission des Affaires
étrangères, personne ne s'en
est fai* non plus sur le dou-
ble motif qui avait incité
l'ancien président du Con.
seil à intervenir.
Tout d'abordy certes, il y
avait le désir de dénoncer
ce que M. Flandin, dans la politique extérieure
menée par la France depuis dix-huit mois, consi-
dère comme de lourdes erreurs — notamment
notre éloignement de l'Italie.
Mais il y avait aussi le désir de porter un
coup direct à la majorité actuelle.
— Nous ne remonterons le courant à l'exté-
rieur, dit en substance, M. Flandin, que si nous
nous ressaisissons à l'intérieur
Mais M. Grumbach protesta :
— Vous reprochez au Front populaire sa poli.
tique d'abandons et de capitulations. Cela date
du mois de juin 1936. Or, il est une autre date
que vous devriez ne pas avoir oubliée. C'est celle
du 9 mars 1936. Ce jour-là, nous avons capitulé
devant ce coup de force hitlérien, qui était la
remilitarisation de la zoi 9 rhénane. Reprocherez-
vous à l'homme d'Etat (lui était alors ministre
des Affaires étrangères de n'avoir rien fait ?
Pessimisme.
En bref, M. Fland'n a exprimé l'opini-n qu'au
point où nous en sommes, notre faiblesse est
telle que nous ne pouvons rien faire, et que
nous ne pouvons qu'assister en spectateurs aux
faits et gestes des nations plus énergiques, ou
plus fortes. Souhaitons simplement de rester à
l'abri de leurs coups.
— Mais enfin, s'écria, lorsque eut terminé
l'ancien président du Conseil, un commissaire
■iégèréf^ent. mxcétfé^ si ','VÚs étÙ,zi:,\i-!,âu' ftwt 0'1;-
nement et si une nation étrangère envahissait nos
colonies, que feriez-vous ?
M. Flandin fit un geste évasif :
— Bah ! je consulterais le peuple, dit-il, d'un
ton désabusé.
Et ce fut toute sa réponse.
The right man.
L'un des députés les plus bruyants et les plus
turbulents d? l'opposition est sans doute M. Poi-
tou-Duplessy, qui a d'ailleurs toujours soin, lors-
qu'il prend place dans Thémicycle, de s'installer
à proximité d'une plaque de chauffage. Ainsi, en
cas de tumulte général, M. Poitou-Duplessy, pour
participer au concert, ne se contente pas de don-
ner de la voix, mais il martèle la plaque à coups
de pieds et produit ainA un bruit de coulisse
du plus heureux effet.
Durant tout ce débat, sur la conciliation et
l'arbitrage, le député de la Charente se montra
particulièrement exubérant ; il faut d'ailleurs
avouer que son exemple fut suivi par nombre de
ses collègues. Lorsqu'on en arriva à la question
— l'une des plus épineuses — de l'échelle mo-
bile, la température devint orageuse et l'ordre
du débat s'en ressentit. Tout le monde criait à
la fois. Soudain, un bruit de ferraille domina le
vacarme et une voix formidable s'écria :
— C'est ici qu'il faudrait commencer par insti-
tuer la conciliation et l'arbitrage !
Et M. Poitou-Duplessy, qui s'était sans doute
cru spécialement qualifié pour lancer une pa-
rei!le invitation à ses collègues, retomba pour
quelques instants derrière son pupitre.
« Douzièmes sociaux ».
Vendredi après-midi, le
débat sembla, à un moment,
devoir s'éterniser. M. Chau-
temps traversait les couloirs,
se dirigeant vers l'hémicycle.
On ile mit ad courani :
— Nos collègues, dit-il,
oublient que les textes sur
l'arbitrage et sur les conven.
tions collectives, doivent être
rotes avant le 1er mars. Déjà
on avait - dû, le 31 décem-
bre, les « i '-e » pour deux mois, sous leur
forme défectueuse. C'est assez. La paix sociale
est comme le budget : elle ne s'accommode pas
de continuels douzièmes provisoires.
Et le président du Conseil reprit son chemin
en annonçant «• qu'il allait mettre un peu de
charbon dans la machine ».
cc Gagner son avoine ».
M. Camille Chautemps, dont on connaît l'art
nuancé, délicat et subtil, n'hésite pourtant pas,
lorsqu'il l'estime nécessaire, à avoir recours à
des formules rudes, voire brutales, qui frappent
d'autant plus que le président du Conseil n'en
est pas coutumier.
C'est ainsi qu'intervenant sur le fameux arti-
cle 8 — réajustement des salaires en cas de hausse
du coût de la vie — M. Chautemps s'efforça de
démontrer à l'opposition qu'on n'a pas le droit
de refuser aux travailleurs le « minimum vital ».
— Ne serons-nous pas d'accord, s'écria-t-il, sur
la nécessité d'un salaire de base, de ce minimum
vital au-dessous duquel on n'a pas le droit de
descendre, au-dessous duquel on ne descend pas
pour les chevaux ?
Cet appel, pathétique dans sa brutalité, souleva
les bravos et entraîna le vote de l'article.
LE MARTYRE DE LA PAIX
Le supportera-t-elle
encore longtemps ?
Le Contrôle
des Changes
par André PHILIP
député du Rhône
A ii d ri' riulin.
Le problème du
contrôle des changes,
d'une brûlante actuali-
té, soulève aujourd'hui
dans notre pays de vi-
ves discussions, où se
mêlent de façon inex-
tricable les considéra-
tions économiques, les
passions politiques, et
la curieuse mystiaue
de la « liberté monétaire ». Je voudrais,
en quelques lignes, essayer de préciser
la question.
a) Le contrôle des changes n'est
pas nécessairement l'épouvantail que
certains dressent devant nous. A côté
du contrôle rigide, encadré comme en
Allemagne par une politique générale
d'autarcie et de restrictions économi-
ques, il existe un contrôle souple dont
un des meilleurs exemples nous a été
fourni par le Brésil. Il comporte :
1° L'interdiction de tout achat d'or,
de devises ou de titres, non justifié par
des opérations commerciales, afin de
juguler la spéculation et d'arrêter les
évasions de capitaux; c'est ce qu'a dé-
cidé, le 22 septembre 1931, la trésorerie
britannique en interdisant « tous achats
de devises étrangères et de transferts
de fonds ayant pour objet l'acquisition
de devises faites directement ou indi-
rectement par des citoyens britanni-
ques, à moins qu'elles ne soient desti-
nées au financement des besoins nor-
maux du commerce, aux dépenses rai-
sonnables en vue d'un voyage ou autres
besoins personnels ».
2° La déclaration obligatoire de
toute opération de vente ou d'achat
d'or, de devises, d'importation et d'ex-
portation, de toute créance sur l'étran-
ger.
3° La possibilité, pour le fonds d'éga-
lisation, d'exercer un droit de préemp-
tion sur un pourcentage variable des
exportations, de façon' à fournir au
cours légal les devises nécessaires aux
importations présentant un intérêt par- ,
ticulier pour l'économie du pays. Les
autres devises des exportateurs et celles
provenant des rentrées de créances se-
raient vendues sur le marché libre à
un cours probablement supérieur, cor-
respondant à une plus large déprécia-
tion de notre monnaie.
(Lire la suite page 4.)
A NOS ABONNÉS
ET RÉABONNÉS
Toute personne qui souscrira ou
renouvellera un abonnement d'un
an (France, colonies, étranger) re-
cevra franco un cadeau-souvenir,
aussi utile qu'agréable, d'une va-
leur de 20 francs.
Marcel Achard, Abel Hermant, Jacques Kayser, André David. Georges Auric, Henry Bidou.
6e Année — No 279
1 FRANC 25
Mercredi 23 Février 1938
GRAND HEBDOMADAIRE POLITIQUE ET LITTÉRAIRE ILLUSTRÉ
Rédaction. Administration : 44, av. des Champs-Éiysées (Élysées 49-26) — Publicité : 92; Av. des Champs-Elysées (Balzac 27-04)
J~ à
La « eollade ».
nu.' Í;¡ do Bernard Aldebcrt.
1 1 , 1
La politique de l'autr.iche.
AMERIQUE, JURY DES DICTATURES
Les excès des régimes totalitaires provoquent aux Etats-Unis, position avancée
de la démocratie, de vives réactions. A Philadelphie a défilé un cortège portant
des panneaux significatifs.
MMemagne et Autriche
L'Allemagne et l'Autriche
par Jean MISTLER, 'député, Président de !a Commission
des Affaires Étrangères de la Chambre
La question d'Autriche, dis-
cutée depuis la fin de la guer-
re par les chancelleries, vient
d'être de nouveau placée au
premier plan de l'actualité eu-
ropéenne par l'entrevue du
12 février à Berchtesgaden, et
le rattachement de l'Autriche à
l'Allemagne, plusieurs fois évi-
té, apparaît désormais, aux
yeux de certains, comme chose
faite, aux yeux des autres,
comme en voie de prochaine
réalisation.
Jatn Mi*Ilci
Les querelles rétrospectives ont pour
moi peu d'attrait, et nos partis poli-
tiques, au lieu de se reprocher mu-
tuellement leurs hésitations successives
et leurs fautes, feraient mieux de tirer
du passé les leçons dont nous aurions
grand besoin. En effet, que l'on con-
sidère l'Anschluss comme achevé ou
simplement comme amorcé, il faut
avouer que jamais geste politique n'a
été plus souvent prédit et plus cons-
tamment prévu. En 1918 déjà, au mo-
ment de l'effondrement de la monar-
chie des Habsbourg, le Conseil natio-
nal autrichien proclamait le rattache-
ment du pays à l'Allemagne,
et, longtemps, l'expression
O.eutschoesterreich, Autriche-
Allemande, a figuré sur les
timbres-poste. Les traités de
paix, loin de passer sous si-
lence le danger, s'efforçaient
d'y parer en termes formels.
L'article 80 du Traité de Ver-
sailles stipulait que l'Allema-
gne « reconnaît et respectera
strictement l'indépendance de
l'Autriche dans les frontières
qui seront fixées ». Cependant
1 Allemagne, dans la constitution repu-
blicaine de Weimar, prévoyait la réu-
nion de l'Autriche à l'Allemagne, et la
représentation de sa population au
Reichsrat, si bien que, pour plus de
précaution, les Alliés lui imposaient
la modification de l'article 61 de cette
constitution, et que l'interdiction du
rattachement était introduite dans le
traité de Saint-Germain, à l'article 88,
ainsi conçu : « L'indépendance de
l'Autriche est inaliénable, si ce n'est
du consentement de la Société des Na-
tions. »
(Lire la suite page 3.)
AU-DESSUS DE LA BAIE MIROITANTE DE SAN-FRANCISCO
Durant son vol de San-Francisco à Hongkong, l'avion China Clipper auréole
1 île des Trésors et semble inspecter les travaux de la colossale exposition
américaine. *
Puissance
de l'Individu
par Jean GIONO
.!umG/f,IlU
Solitude : une des
plus grandes joies^ de
l'homme. Exercice
voluptueux du courage.
Seul combat qui me
soit permis. Affronté
aux conditions de ma
race biologique ; que je
suis obligé de com-
battre par-dessus tous
les autres combats.
? Joie de me sentir continuer à vivre ;
chaque seconde qui s'écoule est une vic-
toire. Transformer mon temps en vic-
toires. N'avoir avec les autres que des
rapports de générosité ; parce que c'est
la position la plus haute et la plus soli-
taire.
Générosité : arme la plus puissante ;
possession à l'état pur, bien au-delà de
tous les comptes et de toutes les me-
sures ; commandement de soi-même.
Avoir en face de soi la solitude :
l'adversaire qui voit fuir le plus de
lâches. Et ne pas fuir.
Et vivre! C'est-à-dire déjà vaincre ;
mais, trouver brusquement dans cette
vie les vraies raisons de vivre, et les
éternelles.
Au moment où l'intelligence des
choses frappe devant nos pieds comme
un éclair ; quand le monde n'est plus
une voûte de cave mais que la lumière
vole brusquement dans les ténèbres
cassées. Pendant que nous enrichit
le chuchotement des. morts admi-
rables.
Je ne cherche pas à éteindre cette ar-
deur au combat qui habite chaque
homme. Je dis qu'elle a été donnée pour
servir à ce combat impitoyable et non
pour s'engager dans les délires de la
force.
La lance de la solitude vous atteint
où que vous soyez, dans un chemin sou-
dain débarrassé de prêtres. Quelqu'un
d'autre que vous-même peut-il entendre
vos hurlements ? C'est votre compte
personnel qui se règle. Au milieu de vos
camarades, la soudaine intelligence de
votre véritable condition vous glace. Il
n'y a plus rien qui puisse communiquer
avec votre douleur. La masse dont vous
croyiez faire partie, elle est d'un côté
de votre douleur et vous de l'autre. Et
ainsi pour tous ceux qui composent la
masse : pouvez-vous dire encore qu'elle
existe ?
Qu'elle existe ailleurs que dans votre
imagination ?
Eternellement seul, homme qui n'as
jamais osé regarder en face ta véri-
table condition, mais toujours au mo-
ment même où tu parles de courage,
ne trouves que des remèdes de lâcheté ;
maintenant que sans te guérir tu t'es
successivement marié aux dieux et
marié aux hommes, ne vas-tu pas, à la
fin, admettre que tu es seul ?
Et enfin l'accepter ?
Le sauvetage de ta liberté et de ta
grandeur est à ce prix.
(Lire la suite page 3.)
Le Monde comme il va.
Dates.
M* FLAftDIM
l'
Si personne ne s'est fait
d'illusions sur l'intérêt capi.
tal de l'exposé de M. P.-E.
JFlandin, mercredi dernier, à
la Commission des Affaires
étrangères, personne ne s'en
est fai* non plus sur le dou-
ble motif qui avait incité
l'ancien président du Con.
seil à intervenir.
Tout d'abordy certes, il y
avait le désir de dénoncer
ce que M. Flandin, dans la politique extérieure
menée par la France depuis dix-huit mois, consi-
dère comme de lourdes erreurs — notamment
notre éloignement de l'Italie.
Mais il y avait aussi le désir de porter un
coup direct à la majorité actuelle.
— Nous ne remonterons le courant à l'exté-
rieur, dit en substance, M. Flandin, que si nous
nous ressaisissons à l'intérieur
Mais M. Grumbach protesta :
— Vous reprochez au Front populaire sa poli.
tique d'abandons et de capitulations. Cela date
du mois de juin 1936. Or, il est une autre date
que vous devriez ne pas avoir oubliée. C'est celle
du 9 mars 1936. Ce jour-là, nous avons capitulé
devant ce coup de force hitlérien, qui était la
remilitarisation de la zoi 9 rhénane. Reprocherez-
vous à l'homme d'Etat (lui était alors ministre
des Affaires étrangères de n'avoir rien fait ?
Pessimisme.
En bref, M. Fland'n a exprimé l'opini-n qu'au
point où nous en sommes, notre faiblesse est
telle que nous ne pouvons rien faire, et que
nous ne pouvons qu'assister en spectateurs aux
faits et gestes des nations plus énergiques, ou
plus fortes. Souhaitons simplement de rester à
l'abri de leurs coups.
— Mais enfin, s'écria, lorsque eut terminé
l'ancien président du Conseil, un commissaire
■iégèréf^ent. mxcétfé^ si ','VÚs étÙ,zi:,\i-!,âu' ftwt 0'1;-
nement et si une nation étrangère envahissait nos
colonies, que feriez-vous ?
M. Flandin fit un geste évasif :
— Bah ! je consulterais le peuple, dit-il, d'un
ton désabusé.
Et ce fut toute sa réponse.
The right man.
L'un des députés les plus bruyants et les plus
turbulents d? l'opposition est sans doute M. Poi-
tou-Duplessy, qui a d'ailleurs toujours soin, lors-
qu'il prend place dans Thémicycle, de s'installer
à proximité d'une plaque de chauffage. Ainsi, en
cas de tumulte général, M. Poitou-Duplessy, pour
participer au concert, ne se contente pas de don-
ner de la voix, mais il martèle la plaque à coups
de pieds et produit ainA un bruit de coulisse
du plus heureux effet.
Durant tout ce débat, sur la conciliation et
l'arbitrage, le député de la Charente se montra
particulièrement exubérant ; il faut d'ailleurs
avouer que son exemple fut suivi par nombre de
ses collègues. Lorsqu'on en arriva à la question
— l'une des plus épineuses — de l'échelle mo-
bile, la température devint orageuse et l'ordre
du débat s'en ressentit. Tout le monde criait à
la fois. Soudain, un bruit de ferraille domina le
vacarme et une voix formidable s'écria :
— C'est ici qu'il faudrait commencer par insti-
tuer la conciliation et l'arbitrage !
Et M. Poitou-Duplessy, qui s'était sans doute
cru spécialement qualifié pour lancer une pa-
rei!le invitation à ses collègues, retomba pour
quelques instants derrière son pupitre.
« Douzièmes sociaux ».
Vendredi après-midi, le
débat sembla, à un moment,
devoir s'éterniser. M. Chau-
temps traversait les couloirs,
se dirigeant vers l'hémicycle.
On ile mit ad courani :
— Nos collègues, dit-il,
oublient que les textes sur
l'arbitrage et sur les conven.
tions collectives, doivent être
rotes avant le 1er mars. Déjà
on avait - dû, le 31 décem-
bre, les « i '-e » pour deux mois, sous leur
forme défectueuse. C'est assez. La paix sociale
est comme le budget : elle ne s'accommode pas
de continuels douzièmes provisoires.
Et le président du Conseil reprit son chemin
en annonçant «• qu'il allait mettre un peu de
charbon dans la machine ».
cc Gagner son avoine ».
M. Camille Chautemps, dont on connaît l'art
nuancé, délicat et subtil, n'hésite pourtant pas,
lorsqu'il l'estime nécessaire, à avoir recours à
des formules rudes, voire brutales, qui frappent
d'autant plus que le président du Conseil n'en
est pas coutumier.
C'est ainsi qu'intervenant sur le fameux arti-
cle 8 — réajustement des salaires en cas de hausse
du coût de la vie — M. Chautemps s'efforça de
démontrer à l'opposition qu'on n'a pas le droit
de refuser aux travailleurs le « minimum vital ».
— Ne serons-nous pas d'accord, s'écria-t-il, sur
la nécessité d'un salaire de base, de ce minimum
vital au-dessous duquel on n'a pas le droit de
descendre, au-dessous duquel on ne descend pas
pour les chevaux ?
Cet appel, pathétique dans sa brutalité, souleva
les bravos et entraîna le vote de l'article.
LE MARTYRE DE LA PAIX
Le supportera-t-elle
encore longtemps ?
Le Contrôle
des Changes
par André PHILIP
député du Rhône
A ii d ri' riulin.
Le problème du
contrôle des changes,
d'une brûlante actuali-
té, soulève aujourd'hui
dans notre pays de vi-
ves discussions, où se
mêlent de façon inex-
tricable les considéra-
tions économiques, les
passions politiques, et
la curieuse mystiaue
de la « liberté monétaire ». Je voudrais,
en quelques lignes, essayer de préciser
la question.
a) Le contrôle des changes n'est
pas nécessairement l'épouvantail que
certains dressent devant nous. A côté
du contrôle rigide, encadré comme en
Allemagne par une politique générale
d'autarcie et de restrictions économi-
ques, il existe un contrôle souple dont
un des meilleurs exemples nous a été
fourni par le Brésil. Il comporte :
1° L'interdiction de tout achat d'or,
de devises ou de titres, non justifié par
des opérations commerciales, afin de
juguler la spéculation et d'arrêter les
évasions de capitaux; c'est ce qu'a dé-
cidé, le 22 septembre 1931, la trésorerie
britannique en interdisant « tous achats
de devises étrangères et de transferts
de fonds ayant pour objet l'acquisition
de devises faites directement ou indi-
rectement par des citoyens britanni-
ques, à moins qu'elles ne soient desti-
nées au financement des besoins nor-
maux du commerce, aux dépenses rai-
sonnables en vue d'un voyage ou autres
besoins personnels ».
2° La déclaration obligatoire de
toute opération de vente ou d'achat
d'or, de devises, d'importation et d'ex-
portation, de toute créance sur l'étran-
ger.
3° La possibilité, pour le fonds d'éga-
lisation, d'exercer un droit de préemp-
tion sur un pourcentage variable des
exportations, de façon' à fournir au
cours légal les devises nécessaires aux
importations présentant un intérêt par- ,
ticulier pour l'économie du pays. Les
autres devises des exportateurs et celles
provenant des rentrées de créances se-
raient vendues sur le marché libre à
un cours probablement supérieur, cor-
respondant à une plus large déprécia-
tion de notre monnaie.
(Lire la suite page 4.)
A NOS ABONNÉS
ET RÉABONNÉS
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