Titre : Le Journal
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1896-01-05
Contributeur : Xau, Fernand (1852-1899). Directeur de publication
Contributeur : Letellier, Henri (1867-1960). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34473289x
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 05 janvier 1896 05 janvier 1896
Description : 1896/01/05 (A5,N1195). 1896/01/05 (A5,N1195).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG87 Collection numérique : BIPFPIG87
Description : Collection numérique : BIPFPIG13 Collection numérique : BIPFPIG13
Description : Collection numérique : BIPFPIG69 Collection numérique : BIPFPIG69
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7620282z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-220
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/08/2014
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DIMANCHE 5 JANVIER 1S36
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Quotidien, Littéraire, Artistique et Politique
FERNAND XAU
Directeur
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10e, RUE RICHELIEU, PARIS
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LIRE A LA DEUXIÈME PAGE :
ROME
PAR
, ÉMILE ZOLA
LE TRONC
On parlait, l'autre soir, des médecins
militaires, qui sont fort à la mode, en ce
moment, et chacun racontait sa petite
histoire. Naturellement, elle était épou-
vantable, et jamais, je crois bien, je
n'avais entendu, en une seule fois, tant
3'horreurs. Comme on dit vulgairement,
le cœur finissait par me tourner. Je dois
confesser que cela se passait à un ban-
quet de jardiniers, lesquels, par nature,
sont enclins à l'enthousiasme et même à
l'exagération. Je ne vous expliquerai pas
(es raisons de ce phénomène psycholo-
gique, car elles me mèneraient trop loin.
Léon Bloy n'a-t-il pas parlé quelque
part de « l'âme compliquée des horticul-
teurs M ?
— Oui, Messieurs, j'ai vu cela, moi.
affirmait un grand diable de pépinié-
riste. J'ai vu un chirurgien, le soir,
dans une charrette de meunier, amputer
un blessé avec un sabre de dragon. car
il avait égaré sa trousse, Dieu sait
où!.
— Pourquoi ne lui as-tu pas prêté ton
greffoir? dit quelqu'un.
L'on s'esclaffa de rire. Car si les horti-
culteurs ont l'âme compliquée, ils ont,
,en revanche, le rire facile et bruyant.
Lorsque la gaieté suscitée par cette plai-
santerie professionnelle fut un peu cal-
mée :
— Eh bien 1 moi, j'ai vu plus fort que
ça !. déclara un semeur de bégonias
qui, jusqu'à ce moment, était resté si-
lencieux, à mâchonner un cigare éteint
entre les crocs jaunis de sa mâchoire.
C'était un petit bonhomme, de peau
r glabre et ridée, de front obstiné, de che-
veux rudes, et dont les gros doigts bou-
dinés ne semblaient pas faits pour ma-
nier les graines légères et mystérieuses,
et pour jouer avec les pistils des
fleurs.
Il y eut, tout à coup, un silence reli-
gieux. Le petit bonhomme était une des
lumières de l'horticulture française, et
on l'admirait beaucoup pour ce que, à
force de semis judicieux et de sélections
raisonnées, il avait su ajouter à la natu-
relle laideur du bégonia, une laideur ar-
tificielle et composite que tous ceux qui
étaient là sentaient ne pouvoir être sur-
passée, désormais. Tous sentaient aussi
que le récit qu'il allait faire devait dé-
passer les autres en horreur, car le petit
bonhomme ne parlait jamais en vain,
••et lorsqu'il n'avait rien à dire qui fût
plus fort que ce que l'on avait déjà dit,
il se taisait, songeant sans doute à de
plus effarantes hybridations.
— Oui, j'ai vu plus fort que ça I. ré-
péta-t-il. J'ai vu, moi qui vous parle.
mais commençons par le commence-
ment.
Quelques-uns, parmi les horticulteurs,
se levèrent de table et vinrent se grou-
per, respectueusement, derrière le nar-
rateur, a ai Darla ainsi
— C'était pendant la guerre de 70.
J'étais, à ce moment, horticulteur à Ven-
dôme. et je n'avais pas encore obtenu
mon fameux bégonia :le Deuil de M.
Thiers.. pour une bonne raison, d'ail-
leurs, c'esJ que M. Thiers n'était pas
mort.
L'un des jardiniers groupés derrière
te vieux semeur, dont les gestes, je dois
le dire, n'étaient nullement augustes —
interrompit :
— Oui, ce fut un rude gain que le
Deuil de M. Thiers. Ç'a été le point de
départ de toute une rude série. Et,
sans lui, nous n'aurions pas eu le Triom-
phe du Président Faure, qui, dame!.
Et il acheva sa pensée dans un geste
ample et circulaire.
Cet hommage rendu à l'habileté du
vieux - dirai-je : bégoniacole, — celui-
ci reprit:
— Mon établissement était situé, à
deux cents mètres en dehors de la ville,
sur la route de Lorges. Ah 1 quelle
époque ! seigneur mon Dieu !. Des sol-
dats, des soldats, des soldats 1 Durant
plus de deux mois, ils ne cessèrent de
passer sur la route. Et comme ils n'a-
vaient rien à manger, ils se répandaient
dans la campagne, dans les jardins,
dans les maisons, demandant quelque-
fois. prenant souvent. car il faut bien
Vivre, après tout, quoique soldat !. Al-
lez donc faire des semis dans ces condi-
tions-là !. Tenez,^noi qui vous parle,
* - eh ! bien, des francs-tireurs, qui par-
laient espagnol, envahirent un soir mon
établissement et me prirent mes bulbes
de bégonias qu'ils firent cuire, dans
une marmite,, sur la route, avec du bis-
cuit. Ali lquelleépoquc !. queUeépo.
aue cour les semis, seigneur Jésus t
Un jour, par des fuyards, on apprit qu'on
se battait à Lorges,à Marchenoir, à Beau-
gency, partout, quoi!. Ça n'avait pas
l'air d'aller très bien., car les fuyards,
chaque jour, devenaient plus nom-
breux. Et puis, on voyait passer, chas-
sés à coups de sabre, des bandes de
bœufs, des troupeaux de moutons. et
les voitures de l'intendance ne cessaient
de se replier vers Le Mans. Enfin, on
entendait le canon qui se rapprochait.
La situation était vraiment affreuse, car
il , n'y avait plus de vivres dans Ven-
dôme : on n'eût pas trouvé, à cette épo-
que, le moindre bout de saucisson chez
les charcutiers. Quant à mes provi-
vions, elles étaient épuisées, et j'enta-
mai mon dernier pot de rillettes. Na-
turellement, mes serres étaient éteintes,
et je n'avais même plus de quoi renou-
veler le réchaud de mes châssis. Allez
donc faire des semis dans ces conditions-
là.
— Pour sûr ! approuva un horticul-
teur. C'est comme moi avec mes glaïeuls
Les Prussiens me les boulottèrent. plus
de trois cents variétés, avec noms, avec
quoi ils firent la soupe ! Ah! vrai!.
— Sans doute. sentencia un chrysan-
thémiste. Mais qu'est-ce que vous vou-
lez?. La guerre est la guerre.
Le semeur de bégonias poursuivit :
— Un matin, on sonna à la grille de
mon établissement. Une charrette était
arrêtée devant, une pauvre charrette,
réquisitionnée, toute disloquée, et recou-
verte d'une bâche en loques. Un vieux
cheval étique, que conduisait un soldat
plus étique encore que le cheval, y était
attelé. J'allai ouvrir. Je demandai au
soldat ce qu'il y avait pour son service.
Il me répondit: « Je vous amène un
blessé. C'est un gars qui prétend vous
connaître, et qui dit qu'il a été employé
chez vous. » — « Comment s'appelle-
t-il? » — « Il s'appelle Delard, Joseph
Delard. Mais il n'en a plus guère, de
lard, le pauvre diable ! » dit le soldat, en
hochant la tête. Je fis entrer la charrette
dans la cour, devant la porte de la mai-
son, et, ayant appelé ma femme, ma fille, je
m'apprêtai, aidé parle soldat, à descendre
le blessé qui, couché dans la charrette
sur un mince lit de paille et enve-
loppé de couvertures, geignait : « Ah !
patron, patron, patron ! » Mais quelle ne
fut pas ma stupéfaction, lorsque je l'eus
découvert, pour le manier plus commo-
dément : « — Tes bras, qu'est-ce que tu
as fait de tes bras ? » criai-je. — « On
me les a coupés? » répondit Delard. —
« Mais tes jambes?. Où sont tes jam-
bes?. » — « On me les a coupées,
aussi », gémit le pauvre diable. Je crus
d'abord que c'était une blague. Mais il
me fallut bien me rendre à l'évidence.
Delard n'avait plus ni bras, ni jambes ;
c'était un tronc, un tronc vivant et gei-
gnant, que je ne savais plus par quel
bout prendre. Le saisissement que j'é-
prouvai, devant ce corps, si horriblement
mutilé, fut tel que je m'évanouis comme
une bête, à côté de Delard, dans la lu-
gubre charrette. Dieu sait, pourtant, si
je suis tendre!. Eh! bien, mes amis,
Delard a vécu quatre jours, chez moi,
dans cet état!. Ce qui l'embêtait le
plus, c'est qu'il ne pouvait plus faire de
gestes. Et cependant, il parlait de ses
bras et de ses jambes comme s'il les eût
eus encore attachés à son corps. Quel-
quefois, il me désignait quelque chose
avec son bras absent, et il me disait :
« Là. là. patron! » Enfin, savez-vous
quel a été son dernier mot ? « Comment
ferai-je, maintenant, pour arroser les se-
mis? » Puis la fièvre l'a pris. et il est
mort, dans une horrible agonie. A trois,
nous avions peine à maintenir ce pauvre
corps sans bras et sans jambes, et qui
se tortillait et bondissait sur le lit, comme
un gros ver. J'ai donné son nom à un
bégonia, une espèce de monstre que
j'ai obtenu, il y a trois ans, et qui n'a
que trois pétales. vous comprenez.
J'ai appelé ce bégonia : le Triomphe du
mutilé Delard. Seulement, voilà, il ne
se reproduit pas par le semis. c'est
embêtant:
Je regardai attentivement le vieux se-
meur de bégonias, quand il eut terminé
son récit; et si compliquée est l'âme des
horticulteurs, que je ne pus pas savoir
s'il se moquait de nous, ou si, réelle-
ment; l'aventure était arrivée. Je fus,
d'ailleurs, vite arraché à mon observa-
tion, par un rosiériste barbu et ventri-
potent qui se concilia l'attention univer-
selle, en disant :
— Eh bien ! moi, j'ai vu plus fort que
ça encore. J'ai vu.
OCTAVE MIRBEAU.
NOS ÉCHOS
LA TEMPÉRATURE
Paris.--La plus basse de la
nuit, à 8 h. o5 matin. e 2 au-dessus
A 7 h. du matin.18 6 —
A 2 h. du soir. 5* 5 -
A 9 h. du soir. 3° 5 —
La lus élevée du our à h. - 6° 8 -
Direction du vent : Nord-Nord-Est.
Baromètre : En hausse le soir — A 9 heures
du soir : 769 m/m 9.
Temps probable pour aujourd'hui: Nuageux,
brumeux. Température fraîche.
Arcachon, 4 janv. - Très beau. i3*.
Aujourd'hui, courses mixtes à Marseille.
NOS FAVORIS
Prix du Président de la République. — Thé
Vert, La Do Ré. - - Fabuitste, Lagar-
Prix de Massilia. - Fabuliste, Lagap"-
dêre.
Prix du Château. — Mousquetaire, Ouistre-
ham. 1
POUR LES SOLDATS DE MADAGASCAR.
D
ans la séance qu'il a tenue, hier, sous la
présidence de M. Fernand Xau, le Co-
mité - des Fêtes organisées par la Presse
parisienne au profit des soldats rapatriés de
Madagascar, a décidé d'effectuer un nouveau
versement de 10,000 francs à chacune des
Œuvres suivantes :
Société de secours aux Blessés militaires ;
Association des Dames Françaises ;
Union des Femmes de France;
Société de secours aux militaires celo-
niaur.
- -Gef -40,0
francs le total des sommes jusqu'ici distri-
buées par le Comité.
Au début de la séance, le président a
donné connaissance de la lettre par laquelle
M. le président du Conseil municipal a re-
mercié le Comité du don de 10,000 francs fait
aux pauvres de Paris sur le produit de la
représentation de gala de l'Opéra.
Le Comité a exprimé ses plus vifs remer-
ciements à M. Bouvard, inspecteur général
des services d'architecture de la Ville de
Paris, pour le concours aimable et précieux
qu'il a bien voulu prêter à l'organisation des
fêtes si réussies qui ont permis de secourir
tant de malheureux soldats.
L'ARMEE
L
a dernière promotion au généralat
compte quatre généraux de division et
sept généraux de brigade.
Pour. les premiers, l'âge moyen est de cin-
quante-huit ans et demi; pour les seconds,
de cinquante-sept ans.
Comme il faut au moins quatre années de
grade de général de brigade pour obtenir
celui de général de division, c'est donc "'ers
soixante et un ans que les brigadiers, pro-
mus hier, pourront devenir divisionnaires.
C'est, il faut le reconnaître, une étrange
manière d'obtenir le rajeunissement des
cadres.
LE MONDE
M
me Félix Faure, qui a repris ses récep-
tions hebdomadaires, a reçu, hier
après-midi, près de trois cents personnes.
L
e duc de Leuchtenberg a rendu visite,
hier après-midi, à cinq heures, au Pré-
sident de la République. -
Le poste de l'Elysee lui a rendu les hon-
neurs habituels.
Quelques minutes après son départ, le
Président a rendu sa visite au prince, des-
cendu, comme d'habitude, à l'Hôtel Conti-
nental.
Aujourd'hui dimanche, dîner chez Mme la
jT princesse Mathilde, en l'honneur de sa
nièce, Mme la duchesse d'Aoste, qui repart
nièce, l'Italie la semaine prochaine.
pour
Après le dîner, réception.
L
e nouvel ambassadeur de Turquie,
S. Exc. Munir-Bey, a tenu, dès son ar-
rivée, à offrir ses hommages à Mm8 r élix
Faure. Cette visite a eu lieu, hier, samedi, à
deux heures. M. Mollard a présenté l'en-
voyé du sultan à Mm0 Faure.
Dans cet entretien, S. Exc. Munir-Bey a
exprimé les sentiments d'estime et de sym-
pathie que l'empereur de Turquie professe
pour le Président de la République française
et pour sa famille.
L
'impératrice Eugénie est attendue, très
prochainement, dans sa villa du Cap
Martin. Elle se rendra, cette semaine, à Os-
borne, pour faire à la reine d'Angleterre sa
visite d'adieu. ,.
M.
Colmet Daage, l'éminent juriscon-
sulte, ancien doyen de la Faculté de
Droit de Paris, officier de la Légion d hon-
neur, vient de mourir.
M. Gabriel-Frédéric Colmet Daage était
né à Paris le 7 janvier 1813. Il avait donc,
presque jour pour jour, quatre-vingt-croîS
ans. Sa famille le destinait au barreau. Mais
il se sentait attiré-vers les études de droit
pur, et prit la robe du professeur au lieu de
celle de l'avocat. Il fut nommé, en 1841, pro-
fesseur suppléant à la Faculté de Paris, dont
il devait être nommé doyen en 1868.
Ses obsèques seront célébrées mardi ma-
tin, à dix heures.
Le conseil général des facultés y assis-
tera.
u
ne des plus charmantes femmes de la
colonie étrangère, la marquise deCasa-
Fuerta-Alvarez-Toleda, veuve du ministre
espagnol et belle-sœur du duc de Bivona,
ancien gouverneur de Madrid, s'installe défi-
nitivement à Paris.
L
e comte Frisch de Fels quitte son habi-
tation de la rue Montchanin, pour une
installation vraiment princière dans le tau-
bourg Saint-Honoré. Les salons sont du
plus pur style Louis XV, et constituent une
rarissime collection de meubles, de bronzes,
de peintures et de porcelaines d'art de cette
époque, un peu délaissée, aujourd'hui, au
bénéfice du style Louis XVI et même du
style Empire.
L
e duc de Cambridge est attendu à
t Cannes.
Le baron David Leonino quitte Paris pour
Nice, où il va prendre ses quartiers d'hiver.
Il paraît que' Mme la vicomtesse de Janzé
JL n'a pas dédaigné de demander à notre
gouvernement démocratique les palmes aca-
démiques et que le ruban violet lui a été très
galamment accordé par celui-ci.
Voilà — n'est-ce pas ? — pour relever,
s'il en était besoin, la qualité d'une décora-
tion de nos jours tant soit peu tombée en
discrédit.
Au milieu d'un assez fort paquet de très
honorables délégués cantonaux, le nom de
Mme la vicomtesse de Janzé brille sur la liste
d'une façon assez inattendue. Ce nom, très
illustre, sera suivi à l'Officiel de cette men-
tion justificative : Reconstitutions historiques.
On sait que Mme la vicomtesse de Janzé,
née Choiseul, possède, dans la rue Mari-
o gnan, un hôtel dont, grâce à un goût très
sûr, elle a fait une véritable merveille d'art,
et où le sobre dix-huitième siècle a retrouvé
son style le plus parfaitement pur.
Et puis, les études écrites par la vicom-
tesse sur Berryer, sur Musset et sur les
Finances sous l'ancien régime, ne suffiraient-
elles point à justifier le désir qu'elle a ex-
primé au ministre de l'instruction publique,
et la satisfaction qui lui a été donnée ?
LES LETTRES ET LES ARTS
L
'Académie des sciences morales et poli-
tiques a tenu, hier. sa séance hebdoma-
daire. M. Léon Say, président sortant, a
prononcé le discours d'usage et installé au
bureau MM. Ravaisson et Glasson, les pré-
sident et vice-président pour 1896. Ce der-
nier, absent, s'était fait excuser, par suite de
la mort de son beau-père, M. Colmet-
Daage. sua c4@_ ltctufe -a été dôù-
Au cours de la sénace, lecture a été don-
née des lettres par lesquelles MM. Stourm,
de Foville,Cheysson et Le Roy de Kéraniou
posent leurs candidatures au fauteuil vacant,
dans la section d'économie politique, par
suite du décès de M. Cucheval-Clangny.
M.
Alfred Jacquemart, le sculpteur ani-
malier, a succombé subitement, au
cours de la nuit .derniere, en son apparte-
ment de la rue de Babylone. La domestique,
en entrant daiis sa chambre, l'a trouvé mort
sur son lit. Il était âgé de soixante-douze
ans. -
M. Jacquemart était un ancien élève de
l'école des Beaux-Arts, où il avait étudié
sous Delaroche. Il avait été médaillé à di-
vers Salons. Sa réputation date d'un voyage
qu'il fit en Egypte, où il sculpta la statue de
Mehemet-Ali et les lions de la place Lesbe-
kieh.
ÇA ET LA
L
a chicane mise à la portée de tous.
Rappelons au monde des petits plai-
deurs qu'un bureau de consultations gra-
tuites, dont l'organisation est due à l'initia-
tive de M. le bâtonnier Pouillet, fonctionne,
depuis hier, au Palais.
C'est Me Pouillet en personne qui a inau-
guré les audiences, assisté de Me André
Paillet et de M" Taillefer, fils du conseiller à
la cour.
Il y a eu, malheureusement, beaucoup plus
d'appelés que d'élus, car sur les cinquante
personnes qui se sont présentées pour la,
première journée, quinze seulement ont pu'
être reçues.
L
a seconde représentation de la revue
les Dessous de Paris, au Nouveau-
Théâtre, a été très. brillante. Le gai com-
père Regnard et la charmante commère
Aimée Eymard ont remporté un très gros
succès. Chantés avec la plus amusante fan-
taisie, la plupart de leurs couplets ont été
l'occasion d'un bis enthousiaste.
NOUVELLE A LN MAIN
s
ur le boulevard :
— Comment, diable ! ce Desroziers a-t-il
fait pour passer vingt-quatre heures à Paris
sans être pincé?
— Mon cher, quand on s'appelle Desro-
ziers, on ne craint pas Lépine,
LE DOMINO ROSE.
Les Fillcs fie t'Otfre
« IL »
Je l'ai vu trois fois.
Dans le sommeil? Dans un vitrail d'é-
glise? En rêve devant les temps? Entre
les pagres d'un livre? Dans le miroir in-
térieur? -,
Je me souviens de la* lumière qurie
baignait. Ce n'était ni le soleil,ni la luue,
mais cette lueur diffuse, sans saison,
sans heure, qui éclaire les bosquets des
Champs-Elyséens,les batailles des temps
passés, les supplices des saints, aux
jours de la Légende Dorée, toutes les
aventures des poèmes et les fastes de
l'Histoire ; une lueur, blême comme un
brouillard, irréelle comme une auréole,
clarté de tableau où les gestes ne font
point de bruit, où la parole, les cris, les
chants de triomphe se figent dans l'ex-
pression des bouches — clarté du passé,
où le mouvement et la pensée sont fixés
pour toujours par la magie de l'Immo-
bile.
La première fois, IL s'élançait d'une
tourelle comme un enfant que l'on pour-
suit dans une partie de cache-cache. En
courant, il traversa une terrasse de châ-
teau. Il se rua contre une petite porte qui
ouvrait sur quelque galerie. Il semblait
furieux de la trouver fermée. Il la battit
de la pointe de ses pieds, de son genou,
,de tout son corps. Il n'acceptait point
qu'elle résistât à sa volonté. Mais la porte
était de chêne ancien, fortifiée par des
clous et par des ferrures. L'enfant avait
beau heurter de toutes ses forces, elle ne
cédait point, nul ne répondait à l'appel.
Et, au-dessus de la toque de velours, plus
haut que l'atteinte du bras au linteau
ogival de la porte, un démon raillait
ce désespoir du sourire fixe des sculp-
tures.
Je ne me souviens plus si l'enfant s'é-
vapora ou si une main vint lui ouvrir,
mais seulement que je me promenais,
moi-même, sur la terrasse vide.
Elle était suspendue entre deux abî-
mes, au-dessus des nuages, qui faisaient
un fond mouvant aux précipices. Les
faîtes du donjon et des tourelles se per-
daient, par en haut, dans le brouillard.
Les dalles que je foulais étaient étroite-
ment scellées comme dans les églises.
Nulle herbe, nulle rouille de mousse ne
poussait entre leurs jointures, entre les
créneaux des parapets.
Comme je collais mon visage aux vi-
traux qui donnaient du jour à quelque
galerie intérieure, une grue à trois têtes
vola au-dessus delà terrasse. A son tri-
ple cri je me retournai ainsi qu'un hom-
me pris en criminelle flagrance. Mais
ce n'est pas de mon angoisse qu'il s'agit
- pourquoi, d'ailleurs, décrire ce qui
n'exista jamais ?
La seconde fois que je le vis, IL était
encore vêtu à la mode des pages. Ses
cheveux blonds roulaient sur ses épaules
sous une toque du même velours que
sa trousse. Un livre, qui semblait un
missel, bâillait sur ses genoux; mais,
depuis longtemps, ses yeux avaient
quitté l'antienne commencée. Ils regar-
daient par la fenêtre ouverte ; ils épe-
laient la première rêverie qu'un invisible
do:gt écrit sur la ligne d'horizon. Ses
yeux très longs, très écartés du nez, lui
donnaient l'angélique expression des
jeunes gens de lumière qui soulèvent les
Maries dans la gloire des Assomptions.
Soudain, il tressaillit.
Sa mère venait de luitoucher l'épaule.
Elle souriait en prononçant des paroles
que je n'entendis point.
Sans doute, elle lui disait qu'il faut te-
nir notre âme en laisse ; qu'il vaut mieux
lire les antiennes dans les missels que
les rêveries écrites sur la ligne d'ho-
mdn. • v.. —
La noble. dame était blanche comme
son hennin; la bourse des aumônes
était suspendue à sa ceinture, à-côté du
trousseau de clefs qui enfermait sa pro-
vision. Si fine, si élancée, si immaté-
rielle, elle ressemblait aux abbesses qui
prient dans l'or des enluminures. Elle
avait donné à son fils ses yeux tout en
âme, la grâce exquise et longue de ses
doigte. Sur les boucles blondes elle posa
une de ses mains au ton d'ivoire. Lon-
guement, elle la tint appuyée, comme si
un charme plus 'puissant que les paroles
sortait pour le bien du fils de cette ma-
ternelle caresse. Et, en effet, l'enfant
leva les yeux vers elle, et, tous les deux,
ils sourirent.
Voici comment je le vis pour la troi-
sième fois.
IL était devenu un beau fils. Dans la
cour des écuries, il montait un ardent
destrier. Les naseaux de l'étalon souf-
flaient le feu de l'amour. Il se dressait
debout, sur ses robustes cuisses ; alors,
ses sabots, par devant, frappaient le vide
de l'air, et le cavalier, en riant, se pen-
chait sur l'encolure.
Derrière les volets des écuries closes,
toute la jumenterie répondait à ces ap-
pels par des hennissements de désir. Le
beau fils se divertissait de cette tempête
déchaînée, de l'impuissance des femelles,
des révoltes de l'étalon contre le mors.
Soudain,il tourna la tête. ,
Son père venait d'entrer dans la cour.
Et sans doute le vieux seigneur interpella
le dompteur de destriers d'une voix impé-
rieuse, car le jeune homme sauta à terre
et remit l'étalon écumant entre les mains
des valets. "'jf-'. - r -
Je vis le père. et le fils causer grave-
ment, l'un avec des t gestes emportés,
l'autre le front incliné, les yeux à terre.
Le noble seigneur expliquait sans
doute qu'il ne faut pas jouer avec cette
force obscure qui fait bondir les étalons,
bramer les jumenteries. Il disait que le
désir cabré écrase ceux qui excitent ses
fougues. Peut-être il ajouta que l'amour
est une souffrance dont nul ne doit faire
un jeu cruel. - --
C'était un baron rude. Il avait reçu
dans un assaut un éclat d'arquebusade.
La balle avait sillonné son front d'une
horizontale cicatrice ; il semblait que le
coup, tiré à bout-portant, l'eût laissé
tout noirci de poudre. Son couteau de
chasse lui battait la hanche. Comme il
venait de trancher des différends sous
quelque chêne vénérable, il tenait en-
core entre ses doigts une main de jus-
tice.
Ce père avait donné à ce fils sa poi-
trine ouverte comme un vol de faucon,
son torse d'écuyer, ses passions d'amour
et de guerre, maintenant refroidies.
Quand il eut fini de parler, il croisa ses
bras sur sa poitrine ; et, longtemps, en-
tre les yeux, il fixa son enfant, comme
si ce regard paternel enfermait quelque
vertu que la volonté pût transmettre d'un
cerveau à l'autre. Le jeune homme sou-
tint ce regard avec respect; mais, im-
perceptiblement, du bout de son fouet,
il effleurait les revers de ses bottes.;
De quel nom l'avait-on appelé, ce fils
unique, de quel nom que je n'entendis
point?
Ses yeux le disaient: il était celui que
les mères attendent pendant des années,
celui auquel elles rêvent de forger une
âme pareille à leurs délicatesses, pour
mettra les femmes futures à l'abri des
déceptions de l'amour.
Il avait été celui dont une mère
songe: -
— Mon fils aimera Dieu et la justice.
Il me préférera à toutes les femmes du
monde parce que je l'ai aimé avant les
autres, parce que nulle autre femme ne
pourra jamais l'aimer autant que j'ai fait.
Il aura une décision virile, mais il aimera
plus avec son cœur qu'avec sa force. Il
ne se moquera pas des rêves, ni des
pressentiments. Il comprendra que
l'amour est comme le feu du tabernacle
qui jamais ne doit s'éteindre.
Il avait été celui dont un père décide :
— Mon fils sera plus fort, plus habile,
plus redouté, plus glorieux que moi. Je
ne souffrirai pas qu'il perde des années
de jeunesse dans d'inutiles passades. Je
veux qu'avec mon armure d'autrefois, il
revête non expérience d'aujourd'hui.
Alors il pourra espérer la royauté du
monde et porter notre nom si haut que
j'entendrai l'écho de ses actions jusque
dans le paradis.
Père et mère, tous deux étaient d'ac-
cord que leur fils serait grand parmi les
hommes. Avant que l'enfant fût né, l'un
comme l'autre, déjà, se contaient ses
prouesses ; sans le désigner par aucun
nom, l'un comme l'autre disaient : « IL .»
— IL aimera sa mère.
— IL honorera son père. --
Dès le soir du baptême, ses parents
oublièrent son nom et l'appelèrent IL.
HUGUES LE ROUX..
LA VIE DROLE i
CANARD EN WAGON
Dans le compartiment où nous montâmes,
à Rouen, un monsieur se trouvait déjà installé.
Cet homme, arrivant sans doute du Havre,
dormait d'un bon sommeil que je devinai —
j'en ai tant vu — un bon sommeil de pochard
ayant bu, plus copieusement qu'il n'était utile,
à la santé de la nouvelle année.
En face de lui, un superbe épagneul, al-
longé confortablement sur les coussins de la
Compagnie, dormait aussi.
La fermeture un peu brusque de la porte
réveilla les deux voyageurs.
L'être humain sursauta, frotta ses yeux, re-
garda autour de lui d'un œil effaré, rassembla
ses souvenirs, débrouilla la réalité et, satis-
fait, se rassit. -
Un bon sourire d'heureux poivrot lui plissa
les yeux et il nous salua d'une voix en-
rouée :
— Madame, Monsieur, soyez les bienve-
nus dans cette enceinte, si j ose m'exprimer
ainsi.
Alors, il vit son épagneul et feignit de 1 in-
dignation à le voir si luxueusement cou-
ché.
— Je t'en prie, Canard, ne te gêne pas!
Mets-toi bien à ton aisel Veux-tu un oreiller,
une couverture?
Canard ne daigna point répondre à ces iro-
nies. Ayant sua» doute a$&et dormi, il awdi-
fia légèrement son attitude dans 1- sens de 1%
position du chien assis.
Le monsieur intempérant con iaua à se
moquer.
- Ah! monsieur Canard voyage en pre.
n-iière ! Monsieur Canard est donc bien riche!
Montrez-moi votre ticket, monsieur Canard.
- Mais M. Canard persévérait da is son m..
pris pour les propos du maître.
Peut-être le savait-il en ébriété.'
Le pochard se tourna vers nous st s'informa
poliment si la présence de son cpagneul ne
nous incommodait pas.
- Pas le moins du monde! fûmes-nl.¡.
unanimes à répondre.
- C'est que rien ne serait plus Impie de
le faire descendre. Il est habitué à suivre les
voitures.. - -
— Les voitures, peut-être, mass-les rapi-
des ?
— Les rapides ? Pfttt ! Ah!' on voit bien que
vous ne connaissez pas Canard ! Canard suit
les rapides en se jouant et en butinant comme
les abeilles.
— Tous nos compliments ?
— N'est-ce pas, mon vieux Canard, que ta
suis un rapide, sans te presser, en cueillant
des petites fleurs dans les champs pour ton
bon mériiaître.
Canard répondit par quelques w -~ *
sympathiques.
, Le maître de Canard sortit une pipe de son
étui.
C'était une longue pipe en terre, infini-
ment jolie de forme, mais d'une gracilité in-
quiétante, à la voir entre les mains d'un
homme qui a bu !
La tenant par l'extrême bout du tuyau, il la
tapotait suf la pa-ume de sa main pour en
extirper de petits corps étrangers qui ne s'y
trouvaient, d'ailleurs, pas.
Il tapotait, il tapotait de plus en plus fort.
S'inclinant vers son chien : -
- La fumée de la pipe n'incommode pas
monsieur Canard ?. Monsieur Canard ne ré-
pond pas ?. C'est que monsieur Canard m'au-
torisa à fumer. <
L'homme continuait à tapoter sa pipe.
- Hein ! mon vieux canard, toi aussi, à
voudrais fumer une bonne pipe, dis ? Msis tit
ne fumeras rien du tout, tu entends, rien du"
tout!' Voilà ce que tu fumeras! Rien du
tout!. Qu'est-ce que diraient Madame et
Monsieur en voyant un chien fumer la pipe
en chemin de fer! C'est à peine si Madame
et Monsieur veulent bien m'autoriser à fu-
mer, moi, qui suis un électeur! N'est-ce pas,
Madame, n est-ce pas, Monsieur t
— Mais, comment donc ?
Ce que nous prévoyions arriva. la pire,
trop énergiquement tapotée, se cassa en deux
morceaux, le tuyau d'un côté, le fourneau de
l'autre. ,.'
Le pauvre monsieur poivrot contempla le
désastre d'un air stupéfié, puis ses yavy <-%
portèrent sur le nommé Canard.
— Ah ! tu ris, toi, espèce de cochon de Ca-
nard ! Ne pouvant fumer .toi-même, ça te tait
rigoler que je fume pa,; non P.lus' (s: adres.
sant à nous.) Regardez-le ! Est-il permis de se
f. du monde à ce point-là?
Le fait est que Canard avait positivement
l'air de rire.
Ses lèvres,en manifestation de gaieté, se re-
troussaient aux commissures : Canard rigolait
comme une baleine. ,
— Canard, mon petit CaimW^rtt
nues à te f. de moi, je te )ure que ça va
tourner mal! -
Canard se dressa sur ses quatre pattes et
secoua ses puces.
La fureur de l'autre ne connut plus de bor-
nes.
Il ouvrit la porte du wagon, et d'un corp
de pied dans le derrière, invita poliment l'e-
pagneul à se retirer.
Canard roula sur la voie, mais la pauvre
bête, à notre grand soulagement, se releva
tout de suite et se mit à nous galoper parailè»
lement.
Au bout d'une minute, nous l'avions perde
de vue. -
Le pochard prenait maintenant une figure
de justicier. - -- - —
- J'adore Canard, nous déclara-t-il, mais
je ne supporterai jamais qu'il se f.;. de m0i
devant le monde, comme il vient de le fair*,* 1
— Pauvre bête ! -'
— Je lui en ncherai.moi, des f îuvrè bête ! Et
puis, vous savez, s'il se permet de rentrer à lit
maison avant moi, je lut casserai les rem » à
coups de parapluie.
En arrivant à la gare Saint-Lazare, Thonv ie
sauta vivement sur le trottoir, et quand nous
sortîmes, nous l'entendions encore appeler :
— Pstt ! Canard ! Canard ! comt along
Gânâiw l
ALPHONSE ALLAIS.
AUX-INVALÎEES
Par RENÉ MAIZEHOY
LA REMISE DU DRAPEAU DU 200e
L'immense cour d'hinn ar ~&
bordent de solennelles façades. usin ées
et que domine l'Homme de Gloire dans
sa légendaire redingote grise com-
mence à s'éveiller, tressl; • co-ame
après quelque lourd som.neil léthar-
gique sous un doux ciel d'hiver clément
dont les. brumes se déchirent, ont des
teintes changeantes de vieille manto
jaune et bleue. Le dôme d'or semble au-
loin une tiare énorme et somnt""us^
A travers les corridors, it_ 2 ;~u<~
des Invalides, les petits tapins aux joues
roses d'enfant, aux mains alertes et
prestes; et qui dans leurs vieux, unifor-
mes évoquent les fifres de jadis, battent
le rappel, emplissent l'antique et silen-
cieuse demeure du Souvenir d'une ru- •
meur d'échos qui s'affaiblit peu à peu,
qu'étouffent bientôt des strideurs allè-
gres de fanfares.
Clopin-clopinant, astiqués de frais, la
lance au poing et le brique* ; 1 3
invalides accourent, s'aligne..w, -,-Iuts
que les drapeaux des régiments arrivent
un à un, que les sous-offîc ers qui les
escortent forment les faisceaux, battent
la semelle sur les p&vés* - - -
0 ces bonnes figures * passives d'an-
ciens soldats, avec leurs rides profondes
qui s'emmêlent parmi les cicatrice de
blessures, leur barbiche blanche ~u<5
jaunirent les culots de pipe qui fait son-
ger à l'armée d'il y a vingt-cinq ans, aux
jours de deuil et de sang où le Destia
faucha les Aigles jusque-le invaincues,
leurs nez bulbeux de soldes buveurs
qui se complaisent à parler âu nasat' V
verre en main! 0 ces pauvre qu:
ressemblent à des épaves -le navire oil
s'acharna la colère démente de l'Océan,
ces torses déjetés qui ballottent dans leS'
plis des longues capotes birues, ces man-
ches flasques qui couvrent quelque moi-
gnon informe, ces jambes d bois et les
chapelets de médailles, lf3 rubans d*
toutes couleurs qui pavoiseat leurs pok*
trinesessoufflée»! -.,' - -
« -
*
Cinq Oexxtlxxtes
* * , --.-~ .-.. -~v ~-~~*~ -.
*
!
DIMANCHE 5 JANVIER 1S36
•. , ,x!. •• ;
Quotidien, Littéraire, Artistique et Politique
FERNAND XAU
Directeur
IR-ÉD^CTIOISr *
10e, RUE RICHELIEU, PARIS
JPrix des Abonnements
Gala Six Htis TrtUIns OiKti*
PARis. 20. » 10.50 5.50 2. 9
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FERNAND XAU
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■ *
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aux bureaux du JOURNAL, 106, ru Ricbelien
LIRE A LA DEUXIÈME PAGE :
ROME
PAR
, ÉMILE ZOLA
LE TRONC
On parlait, l'autre soir, des médecins
militaires, qui sont fort à la mode, en ce
moment, et chacun racontait sa petite
histoire. Naturellement, elle était épou-
vantable, et jamais, je crois bien, je
n'avais entendu, en une seule fois, tant
3'horreurs. Comme on dit vulgairement,
le cœur finissait par me tourner. Je dois
confesser que cela se passait à un ban-
quet de jardiniers, lesquels, par nature,
sont enclins à l'enthousiasme et même à
l'exagération. Je ne vous expliquerai pas
(es raisons de ce phénomène psycholo-
gique, car elles me mèneraient trop loin.
Léon Bloy n'a-t-il pas parlé quelque
part de « l'âme compliquée des horticul-
teurs M ?
— Oui, Messieurs, j'ai vu cela, moi.
affirmait un grand diable de pépinié-
riste. J'ai vu un chirurgien, le soir,
dans une charrette de meunier, amputer
un blessé avec un sabre de dragon. car
il avait égaré sa trousse, Dieu sait
où!.
— Pourquoi ne lui as-tu pas prêté ton
greffoir? dit quelqu'un.
L'on s'esclaffa de rire. Car si les horti-
culteurs ont l'âme compliquée, ils ont,
,en revanche, le rire facile et bruyant.
Lorsque la gaieté suscitée par cette plai-
santerie professionnelle fut un peu cal-
mée :
— Eh bien 1 moi, j'ai vu plus fort que
ça !. déclara un semeur de bégonias
qui, jusqu'à ce moment, était resté si-
lencieux, à mâchonner un cigare éteint
entre les crocs jaunis de sa mâchoire.
C'était un petit bonhomme, de peau
r glabre et ridée, de front obstiné, de che-
veux rudes, et dont les gros doigts bou-
dinés ne semblaient pas faits pour ma-
nier les graines légères et mystérieuses,
et pour jouer avec les pistils des
fleurs.
Il y eut, tout à coup, un silence reli-
gieux. Le petit bonhomme était une des
lumières de l'horticulture française, et
on l'admirait beaucoup pour ce que, à
force de semis judicieux et de sélections
raisonnées, il avait su ajouter à la natu-
relle laideur du bégonia, une laideur ar-
tificielle et composite que tous ceux qui
étaient là sentaient ne pouvoir être sur-
passée, désormais. Tous sentaient aussi
que le récit qu'il allait faire devait dé-
passer les autres en horreur, car le petit
bonhomme ne parlait jamais en vain,
••et lorsqu'il n'avait rien à dire qui fût
plus fort que ce que l'on avait déjà dit,
il se taisait, songeant sans doute à de
plus effarantes hybridations.
— Oui, j'ai vu plus fort que ça I. ré-
péta-t-il. J'ai vu, moi qui vous parle.
mais commençons par le commence-
ment.
Quelques-uns, parmi les horticulteurs,
se levèrent de table et vinrent se grou-
per, respectueusement, derrière le nar-
rateur, a ai Darla ainsi
— C'était pendant la guerre de 70.
J'étais, à ce moment, horticulteur à Ven-
dôme. et je n'avais pas encore obtenu
mon fameux bégonia :le Deuil de M.
Thiers.. pour une bonne raison, d'ail-
leurs, c'esJ que M. Thiers n'était pas
mort.
L'un des jardiniers groupés derrière
te vieux semeur, dont les gestes, je dois
le dire, n'étaient nullement augustes —
interrompit :
— Oui, ce fut un rude gain que le
Deuil de M. Thiers. Ç'a été le point de
départ de toute une rude série. Et,
sans lui, nous n'aurions pas eu le Triom-
phe du Président Faure, qui, dame!.
Et il acheva sa pensée dans un geste
ample et circulaire.
Cet hommage rendu à l'habileté du
vieux - dirai-je : bégoniacole, — celui-
ci reprit:
— Mon établissement était situé, à
deux cents mètres en dehors de la ville,
sur la route de Lorges. Ah 1 quelle
époque ! seigneur mon Dieu !. Des sol-
dats, des soldats, des soldats 1 Durant
plus de deux mois, ils ne cessèrent de
passer sur la route. Et comme ils n'a-
vaient rien à manger, ils se répandaient
dans la campagne, dans les jardins,
dans les maisons, demandant quelque-
fois. prenant souvent. car il faut bien
Vivre, après tout, quoique soldat !. Al-
lez donc faire des semis dans ces condi-
tions-là !. Tenez,^noi qui vous parle,
* - eh ! bien, des francs-tireurs, qui par-
laient espagnol, envahirent un soir mon
établissement et me prirent mes bulbes
de bégonias qu'ils firent cuire, dans
une marmite,, sur la route, avec du bis-
cuit. Ali lquelleépoquc !. queUeépo.
aue cour les semis, seigneur Jésus t
Un jour, par des fuyards, on apprit qu'on
se battait à Lorges,à Marchenoir, à Beau-
gency, partout, quoi!. Ça n'avait pas
l'air d'aller très bien., car les fuyards,
chaque jour, devenaient plus nom-
breux. Et puis, on voyait passer, chas-
sés à coups de sabre, des bandes de
bœufs, des troupeaux de moutons. et
les voitures de l'intendance ne cessaient
de se replier vers Le Mans. Enfin, on
entendait le canon qui se rapprochait.
La situation était vraiment affreuse, car
il , n'y avait plus de vivres dans Ven-
dôme : on n'eût pas trouvé, à cette épo-
que, le moindre bout de saucisson chez
les charcutiers. Quant à mes provi-
vions, elles étaient épuisées, et j'enta-
mai mon dernier pot de rillettes. Na-
turellement, mes serres étaient éteintes,
et je n'avais même plus de quoi renou-
veler le réchaud de mes châssis. Allez
donc faire des semis dans ces conditions-
là.
— Pour sûr ! approuva un horticul-
teur. C'est comme moi avec mes glaïeuls
Les Prussiens me les boulottèrent. plus
de trois cents variétés, avec noms, avec
quoi ils firent la soupe ! Ah! vrai!.
— Sans doute. sentencia un chrysan-
thémiste. Mais qu'est-ce que vous vou-
lez?. La guerre est la guerre.
Le semeur de bégonias poursuivit :
— Un matin, on sonna à la grille de
mon établissement. Une charrette était
arrêtée devant, une pauvre charrette,
réquisitionnée, toute disloquée, et recou-
verte d'une bâche en loques. Un vieux
cheval étique, que conduisait un soldat
plus étique encore que le cheval, y était
attelé. J'allai ouvrir. Je demandai au
soldat ce qu'il y avait pour son service.
Il me répondit: « Je vous amène un
blessé. C'est un gars qui prétend vous
connaître, et qui dit qu'il a été employé
chez vous. » — « Comment s'appelle-
t-il? » — « Il s'appelle Delard, Joseph
Delard. Mais il n'en a plus guère, de
lard, le pauvre diable ! » dit le soldat, en
hochant la tête. Je fis entrer la charrette
dans la cour, devant la porte de la mai-
son, et, ayant appelé ma femme, ma fille, je
m'apprêtai, aidé parle soldat, à descendre
le blessé qui, couché dans la charrette
sur un mince lit de paille et enve-
loppé de couvertures, geignait : « Ah !
patron, patron, patron ! » Mais quelle ne
fut pas ma stupéfaction, lorsque je l'eus
découvert, pour le manier plus commo-
dément : « — Tes bras, qu'est-ce que tu
as fait de tes bras ? » criai-je. — « On
me les a coupés? » répondit Delard. —
« Mais tes jambes?. Où sont tes jam-
bes?. » — « On me les a coupées,
aussi », gémit le pauvre diable. Je crus
d'abord que c'était une blague. Mais il
me fallut bien me rendre à l'évidence.
Delard n'avait plus ni bras, ni jambes ;
c'était un tronc, un tronc vivant et gei-
gnant, que je ne savais plus par quel
bout prendre. Le saisissement que j'é-
prouvai, devant ce corps, si horriblement
mutilé, fut tel que je m'évanouis comme
une bête, à côté de Delard, dans la lu-
gubre charrette. Dieu sait, pourtant, si
je suis tendre!. Eh! bien, mes amis,
Delard a vécu quatre jours, chez moi,
dans cet état!. Ce qui l'embêtait le
plus, c'est qu'il ne pouvait plus faire de
gestes. Et cependant, il parlait de ses
bras et de ses jambes comme s'il les eût
eus encore attachés à son corps. Quel-
quefois, il me désignait quelque chose
avec son bras absent, et il me disait :
« Là. là. patron! » Enfin, savez-vous
quel a été son dernier mot ? « Comment
ferai-je, maintenant, pour arroser les se-
mis? » Puis la fièvre l'a pris. et il est
mort, dans une horrible agonie. A trois,
nous avions peine à maintenir ce pauvre
corps sans bras et sans jambes, et qui
se tortillait et bondissait sur le lit, comme
un gros ver. J'ai donné son nom à un
bégonia, une espèce de monstre que
j'ai obtenu, il y a trois ans, et qui n'a
que trois pétales. vous comprenez.
J'ai appelé ce bégonia : le Triomphe du
mutilé Delard. Seulement, voilà, il ne
se reproduit pas par le semis. c'est
embêtant:
Je regardai attentivement le vieux se-
meur de bégonias, quand il eut terminé
son récit; et si compliquée est l'âme des
horticulteurs, que je ne pus pas savoir
s'il se moquait de nous, ou si, réelle-
ment; l'aventure était arrivée. Je fus,
d'ailleurs, vite arraché à mon observa-
tion, par un rosiériste barbu et ventri-
potent qui se concilia l'attention univer-
selle, en disant :
— Eh bien ! moi, j'ai vu plus fort que
ça encore. J'ai vu.
OCTAVE MIRBEAU.
NOS ÉCHOS
LA TEMPÉRATURE
Paris.--La plus basse de la
nuit, à 8 h. o5 matin. e 2 au-dessus
A 7 h. du matin.18 6 —
A 2 h. du soir. 5* 5 -
A 9 h. du soir. 3° 5 —
La lus élevée du our à h. - 6° 8 -
Direction du vent : Nord-Nord-Est.
Baromètre : En hausse le soir — A 9 heures
du soir : 769 m/m 9.
Temps probable pour aujourd'hui: Nuageux,
brumeux. Température fraîche.
Arcachon, 4 janv. - Très beau. i3*.
Aujourd'hui, courses mixtes à Marseille.
NOS FAVORIS
Prix du Président de la République. — Thé
Vert, La Do Ré. - - Fabuitste, Lagar-
Prix de Massilia. - Fabuliste, Lagap"-
dêre.
Prix du Château. — Mousquetaire, Ouistre-
ham. 1
POUR LES SOLDATS DE MADAGASCAR.
D
ans la séance qu'il a tenue, hier, sous la
présidence de M. Fernand Xau, le Co-
mité - des Fêtes organisées par la Presse
parisienne au profit des soldats rapatriés de
Madagascar, a décidé d'effectuer un nouveau
versement de 10,000 francs à chacune des
Œuvres suivantes :
Société de secours aux Blessés militaires ;
Association des Dames Françaises ;
Union des Femmes de France;
Société de secours aux militaires celo-
niaur.
- -Gef -40,0
francs le total des sommes jusqu'ici distri-
buées par le Comité.
Au début de la séance, le président a
donné connaissance de la lettre par laquelle
M. le président du Conseil municipal a re-
mercié le Comité du don de 10,000 francs fait
aux pauvres de Paris sur le produit de la
représentation de gala de l'Opéra.
Le Comité a exprimé ses plus vifs remer-
ciements à M. Bouvard, inspecteur général
des services d'architecture de la Ville de
Paris, pour le concours aimable et précieux
qu'il a bien voulu prêter à l'organisation des
fêtes si réussies qui ont permis de secourir
tant de malheureux soldats.
L'ARMEE
L
a dernière promotion au généralat
compte quatre généraux de division et
sept généraux de brigade.
Pour. les premiers, l'âge moyen est de cin-
quante-huit ans et demi; pour les seconds,
de cinquante-sept ans.
Comme il faut au moins quatre années de
grade de général de brigade pour obtenir
celui de général de division, c'est donc "'ers
soixante et un ans que les brigadiers, pro-
mus hier, pourront devenir divisionnaires.
C'est, il faut le reconnaître, une étrange
manière d'obtenir le rajeunissement des
cadres.
LE MONDE
M
me Félix Faure, qui a repris ses récep-
tions hebdomadaires, a reçu, hier
après-midi, près de trois cents personnes.
L
e duc de Leuchtenberg a rendu visite,
hier après-midi, à cinq heures, au Pré-
sident de la République. -
Le poste de l'Elysee lui a rendu les hon-
neurs habituels.
Quelques minutes après son départ, le
Président a rendu sa visite au prince, des-
cendu, comme d'habitude, à l'Hôtel Conti-
nental.
Aujourd'hui dimanche, dîner chez Mme la
jT princesse Mathilde, en l'honneur de sa
nièce, Mme la duchesse d'Aoste, qui repart
nièce, l'Italie la semaine prochaine.
pour
Après le dîner, réception.
L
e nouvel ambassadeur de Turquie,
S. Exc. Munir-Bey, a tenu, dès son ar-
rivée, à offrir ses hommages à Mm8 r élix
Faure. Cette visite a eu lieu, hier, samedi, à
deux heures. M. Mollard a présenté l'en-
voyé du sultan à Mm0 Faure.
Dans cet entretien, S. Exc. Munir-Bey a
exprimé les sentiments d'estime et de sym-
pathie que l'empereur de Turquie professe
pour le Président de la République française
et pour sa famille.
L
'impératrice Eugénie est attendue, très
prochainement, dans sa villa du Cap
Martin. Elle se rendra, cette semaine, à Os-
borne, pour faire à la reine d'Angleterre sa
visite d'adieu. ,.
M.
Colmet Daage, l'éminent juriscon-
sulte, ancien doyen de la Faculté de
Droit de Paris, officier de la Légion d hon-
neur, vient de mourir.
M. Gabriel-Frédéric Colmet Daage était
né à Paris le 7 janvier 1813. Il avait donc,
presque jour pour jour, quatre-vingt-croîS
ans. Sa famille le destinait au barreau. Mais
il se sentait attiré-vers les études de droit
pur, et prit la robe du professeur au lieu de
celle de l'avocat. Il fut nommé, en 1841, pro-
fesseur suppléant à la Faculté de Paris, dont
il devait être nommé doyen en 1868.
Ses obsèques seront célébrées mardi ma-
tin, à dix heures.
Le conseil général des facultés y assis-
tera.
u
ne des plus charmantes femmes de la
colonie étrangère, la marquise deCasa-
Fuerta-Alvarez-Toleda, veuve du ministre
espagnol et belle-sœur du duc de Bivona,
ancien gouverneur de Madrid, s'installe défi-
nitivement à Paris.
L
e comte Frisch de Fels quitte son habi-
tation de la rue Montchanin, pour une
installation vraiment princière dans le tau-
bourg Saint-Honoré. Les salons sont du
plus pur style Louis XV, et constituent une
rarissime collection de meubles, de bronzes,
de peintures et de porcelaines d'art de cette
époque, un peu délaissée, aujourd'hui, au
bénéfice du style Louis XVI et même du
style Empire.
L
e duc de Cambridge est attendu à
t Cannes.
Le baron David Leonino quitte Paris pour
Nice, où il va prendre ses quartiers d'hiver.
Il paraît que' Mme la vicomtesse de Janzé
JL n'a pas dédaigné de demander à notre
gouvernement démocratique les palmes aca-
démiques et que le ruban violet lui a été très
galamment accordé par celui-ci.
Voilà — n'est-ce pas ? — pour relever,
s'il en était besoin, la qualité d'une décora-
tion de nos jours tant soit peu tombée en
discrédit.
Au milieu d'un assez fort paquet de très
honorables délégués cantonaux, le nom de
Mme la vicomtesse de Janzé brille sur la liste
d'une façon assez inattendue. Ce nom, très
illustre, sera suivi à l'Officiel de cette men-
tion justificative : Reconstitutions historiques.
On sait que Mme la vicomtesse de Janzé,
née Choiseul, possède, dans la rue Mari-
o gnan, un hôtel dont, grâce à un goût très
sûr, elle a fait une véritable merveille d'art,
et où le sobre dix-huitième siècle a retrouvé
son style le plus parfaitement pur.
Et puis, les études écrites par la vicom-
tesse sur Berryer, sur Musset et sur les
Finances sous l'ancien régime, ne suffiraient-
elles point à justifier le désir qu'elle a ex-
primé au ministre de l'instruction publique,
et la satisfaction qui lui a été donnée ?
LES LETTRES ET LES ARTS
L
'Académie des sciences morales et poli-
tiques a tenu, hier. sa séance hebdoma-
daire. M. Léon Say, président sortant, a
prononcé le discours d'usage et installé au
bureau MM. Ravaisson et Glasson, les pré-
sident et vice-président pour 1896. Ce der-
nier, absent, s'était fait excuser, par suite de
la mort de son beau-père, M. Colmet-
Daage. sua c4@_ ltctufe -a été dôù-
Au cours de la sénace, lecture a été don-
née des lettres par lesquelles MM. Stourm,
de Foville,Cheysson et Le Roy de Kéraniou
posent leurs candidatures au fauteuil vacant,
dans la section d'économie politique, par
suite du décès de M. Cucheval-Clangny.
M.
Alfred Jacquemart, le sculpteur ani-
malier, a succombé subitement, au
cours de la nuit .derniere, en son apparte-
ment de la rue de Babylone. La domestique,
en entrant daiis sa chambre, l'a trouvé mort
sur son lit. Il était âgé de soixante-douze
ans. -
M. Jacquemart était un ancien élève de
l'école des Beaux-Arts, où il avait étudié
sous Delaroche. Il avait été médaillé à di-
vers Salons. Sa réputation date d'un voyage
qu'il fit en Egypte, où il sculpta la statue de
Mehemet-Ali et les lions de la place Lesbe-
kieh.
ÇA ET LA
L
a chicane mise à la portée de tous.
Rappelons au monde des petits plai-
deurs qu'un bureau de consultations gra-
tuites, dont l'organisation est due à l'initia-
tive de M. le bâtonnier Pouillet, fonctionne,
depuis hier, au Palais.
C'est Me Pouillet en personne qui a inau-
guré les audiences, assisté de Me André
Paillet et de M" Taillefer, fils du conseiller à
la cour.
Il y a eu, malheureusement, beaucoup plus
d'appelés que d'élus, car sur les cinquante
personnes qui se sont présentées pour la,
première journée, quinze seulement ont pu'
être reçues.
L
a seconde représentation de la revue
les Dessous de Paris, au Nouveau-
Théâtre, a été très. brillante. Le gai com-
père Regnard et la charmante commère
Aimée Eymard ont remporté un très gros
succès. Chantés avec la plus amusante fan-
taisie, la plupart de leurs couplets ont été
l'occasion d'un bis enthousiaste.
NOUVELLE A LN MAIN
s
ur le boulevard :
— Comment, diable ! ce Desroziers a-t-il
fait pour passer vingt-quatre heures à Paris
sans être pincé?
— Mon cher, quand on s'appelle Desro-
ziers, on ne craint pas Lépine,
LE DOMINO ROSE.
Les Fillcs fie t'Otfre
« IL »
Je l'ai vu trois fois.
Dans le sommeil? Dans un vitrail d'é-
glise? En rêve devant les temps? Entre
les pagres d'un livre? Dans le miroir in-
térieur? -,
Je me souviens de la* lumière qurie
baignait. Ce n'était ni le soleil,ni la luue,
mais cette lueur diffuse, sans saison,
sans heure, qui éclaire les bosquets des
Champs-Elyséens,les batailles des temps
passés, les supplices des saints, aux
jours de la Légende Dorée, toutes les
aventures des poèmes et les fastes de
l'Histoire ; une lueur, blême comme un
brouillard, irréelle comme une auréole,
clarté de tableau où les gestes ne font
point de bruit, où la parole, les cris, les
chants de triomphe se figent dans l'ex-
pression des bouches — clarté du passé,
où le mouvement et la pensée sont fixés
pour toujours par la magie de l'Immo-
bile.
La première fois, IL s'élançait d'une
tourelle comme un enfant que l'on pour-
suit dans une partie de cache-cache. En
courant, il traversa une terrasse de châ-
teau. Il se rua contre une petite porte qui
ouvrait sur quelque galerie. Il semblait
furieux de la trouver fermée. Il la battit
de la pointe de ses pieds, de son genou,
,de tout son corps. Il n'acceptait point
qu'elle résistât à sa volonté. Mais la porte
était de chêne ancien, fortifiée par des
clous et par des ferrures. L'enfant avait
beau heurter de toutes ses forces, elle ne
cédait point, nul ne répondait à l'appel.
Et, au-dessus de la toque de velours, plus
haut que l'atteinte du bras au linteau
ogival de la porte, un démon raillait
ce désespoir du sourire fixe des sculp-
tures.
Je ne me souviens plus si l'enfant s'é-
vapora ou si une main vint lui ouvrir,
mais seulement que je me promenais,
moi-même, sur la terrasse vide.
Elle était suspendue entre deux abî-
mes, au-dessus des nuages, qui faisaient
un fond mouvant aux précipices. Les
faîtes du donjon et des tourelles se per-
daient, par en haut, dans le brouillard.
Les dalles que je foulais étaient étroite-
ment scellées comme dans les églises.
Nulle herbe, nulle rouille de mousse ne
poussait entre leurs jointures, entre les
créneaux des parapets.
Comme je collais mon visage aux vi-
traux qui donnaient du jour à quelque
galerie intérieure, une grue à trois têtes
vola au-dessus delà terrasse. A son tri-
ple cri je me retournai ainsi qu'un hom-
me pris en criminelle flagrance. Mais
ce n'est pas de mon angoisse qu'il s'agit
- pourquoi, d'ailleurs, décrire ce qui
n'exista jamais ?
La seconde fois que je le vis, IL était
encore vêtu à la mode des pages. Ses
cheveux blonds roulaient sur ses épaules
sous une toque du même velours que
sa trousse. Un livre, qui semblait un
missel, bâillait sur ses genoux; mais,
depuis longtemps, ses yeux avaient
quitté l'antienne commencée. Ils regar-
daient par la fenêtre ouverte ; ils épe-
laient la première rêverie qu'un invisible
do:gt écrit sur la ligne d'horizon. Ses
yeux très longs, très écartés du nez, lui
donnaient l'angélique expression des
jeunes gens de lumière qui soulèvent les
Maries dans la gloire des Assomptions.
Soudain, il tressaillit.
Sa mère venait de luitoucher l'épaule.
Elle souriait en prononçant des paroles
que je n'entendis point.
Sans doute, elle lui disait qu'il faut te-
nir notre âme en laisse ; qu'il vaut mieux
lire les antiennes dans les missels que
les rêveries écrites sur la ligne d'ho-
mdn. • v.. —
La noble. dame était blanche comme
son hennin; la bourse des aumônes
était suspendue à sa ceinture, à-côté du
trousseau de clefs qui enfermait sa pro-
vision. Si fine, si élancée, si immaté-
rielle, elle ressemblait aux abbesses qui
prient dans l'or des enluminures. Elle
avait donné à son fils ses yeux tout en
âme, la grâce exquise et longue de ses
doigte. Sur les boucles blondes elle posa
une de ses mains au ton d'ivoire. Lon-
guement, elle la tint appuyée, comme si
un charme plus 'puissant que les paroles
sortait pour le bien du fils de cette ma-
ternelle caresse. Et, en effet, l'enfant
leva les yeux vers elle, et, tous les deux,
ils sourirent.
Voici comment je le vis pour la troi-
sième fois.
IL était devenu un beau fils. Dans la
cour des écuries, il montait un ardent
destrier. Les naseaux de l'étalon souf-
flaient le feu de l'amour. Il se dressait
debout, sur ses robustes cuisses ; alors,
ses sabots, par devant, frappaient le vide
de l'air, et le cavalier, en riant, se pen-
chait sur l'encolure.
Derrière les volets des écuries closes,
toute la jumenterie répondait à ces ap-
pels par des hennissements de désir. Le
beau fils se divertissait de cette tempête
déchaînée, de l'impuissance des femelles,
des révoltes de l'étalon contre le mors.
Soudain,il tourna la tête. ,
Son père venait d'entrer dans la cour.
Et sans doute le vieux seigneur interpella
le dompteur de destriers d'une voix impé-
rieuse, car le jeune homme sauta à terre
et remit l'étalon écumant entre les mains
des valets. "'jf-'. - r -
Je vis le père. et le fils causer grave-
ment, l'un avec des t gestes emportés,
l'autre le front incliné, les yeux à terre.
Le noble seigneur expliquait sans
doute qu'il ne faut pas jouer avec cette
force obscure qui fait bondir les étalons,
bramer les jumenteries. Il disait que le
désir cabré écrase ceux qui excitent ses
fougues. Peut-être il ajouta que l'amour
est une souffrance dont nul ne doit faire
un jeu cruel. - --
C'était un baron rude. Il avait reçu
dans un assaut un éclat d'arquebusade.
La balle avait sillonné son front d'une
horizontale cicatrice ; il semblait que le
coup, tiré à bout-portant, l'eût laissé
tout noirci de poudre. Son couteau de
chasse lui battait la hanche. Comme il
venait de trancher des différends sous
quelque chêne vénérable, il tenait en-
core entre ses doigts une main de jus-
tice.
Ce père avait donné à ce fils sa poi-
trine ouverte comme un vol de faucon,
son torse d'écuyer, ses passions d'amour
et de guerre, maintenant refroidies.
Quand il eut fini de parler, il croisa ses
bras sur sa poitrine ; et, longtemps, en-
tre les yeux, il fixa son enfant, comme
si ce regard paternel enfermait quelque
vertu que la volonté pût transmettre d'un
cerveau à l'autre. Le jeune homme sou-
tint ce regard avec respect; mais, im-
perceptiblement, du bout de son fouet,
il effleurait les revers de ses bottes.;
De quel nom l'avait-on appelé, ce fils
unique, de quel nom que je n'entendis
point?
Ses yeux le disaient: il était celui que
les mères attendent pendant des années,
celui auquel elles rêvent de forger une
âme pareille à leurs délicatesses, pour
mettra les femmes futures à l'abri des
déceptions de l'amour.
Il avait été celui dont une mère
songe: -
— Mon fils aimera Dieu et la justice.
Il me préférera à toutes les femmes du
monde parce que je l'ai aimé avant les
autres, parce que nulle autre femme ne
pourra jamais l'aimer autant que j'ai fait.
Il aura une décision virile, mais il aimera
plus avec son cœur qu'avec sa force. Il
ne se moquera pas des rêves, ni des
pressentiments. Il comprendra que
l'amour est comme le feu du tabernacle
qui jamais ne doit s'éteindre.
Il avait été celui dont un père décide :
— Mon fils sera plus fort, plus habile,
plus redouté, plus glorieux que moi. Je
ne souffrirai pas qu'il perde des années
de jeunesse dans d'inutiles passades. Je
veux qu'avec mon armure d'autrefois, il
revête non expérience d'aujourd'hui.
Alors il pourra espérer la royauté du
monde et porter notre nom si haut que
j'entendrai l'écho de ses actions jusque
dans le paradis.
Père et mère, tous deux étaient d'ac-
cord que leur fils serait grand parmi les
hommes. Avant que l'enfant fût né, l'un
comme l'autre, déjà, se contaient ses
prouesses ; sans le désigner par aucun
nom, l'un comme l'autre disaient : « IL .»
— IL aimera sa mère.
— IL honorera son père. --
Dès le soir du baptême, ses parents
oublièrent son nom et l'appelèrent IL.
HUGUES LE ROUX..
LA VIE DROLE i
CANARD EN WAGON
Dans le compartiment où nous montâmes,
à Rouen, un monsieur se trouvait déjà installé.
Cet homme, arrivant sans doute du Havre,
dormait d'un bon sommeil que je devinai —
j'en ai tant vu — un bon sommeil de pochard
ayant bu, plus copieusement qu'il n'était utile,
à la santé de la nouvelle année.
En face de lui, un superbe épagneul, al-
longé confortablement sur les coussins de la
Compagnie, dormait aussi.
La fermeture un peu brusque de la porte
réveilla les deux voyageurs.
L'être humain sursauta, frotta ses yeux, re-
garda autour de lui d'un œil effaré, rassembla
ses souvenirs, débrouilla la réalité et, satis-
fait, se rassit. -
Un bon sourire d'heureux poivrot lui plissa
les yeux et il nous salua d'une voix en-
rouée :
— Madame, Monsieur, soyez les bienve-
nus dans cette enceinte, si j ose m'exprimer
ainsi.
Alors, il vit son épagneul et feignit de 1 in-
dignation à le voir si luxueusement cou-
ché.
— Je t'en prie, Canard, ne te gêne pas!
Mets-toi bien à ton aisel Veux-tu un oreiller,
une couverture?
Canard ne daigna point répondre à ces iro-
nies. Ayant sua» doute a$&et dormi, il awdi-
fia légèrement son attitude dans 1- sens de 1%
position du chien assis.
Le monsieur intempérant con iaua à se
moquer.
- Ah! monsieur Canard voyage en pre.
n-iière ! Monsieur Canard est donc bien riche!
Montrez-moi votre ticket, monsieur Canard.
- Mais M. Canard persévérait da is son m..
pris pour les propos du maître.
Peut-être le savait-il en ébriété.'
Le pochard se tourna vers nous st s'informa
poliment si la présence de son cpagneul ne
nous incommodait pas.
- Pas le moins du monde! fûmes-nl.¡.
unanimes à répondre.
- C'est que rien ne serait plus Impie de
le faire descendre. Il est habitué à suivre les
voitures.. - -
— Les voitures, peut-être, mass-les rapi-
des ?
— Les rapides ? Pfttt ! Ah!' on voit bien que
vous ne connaissez pas Canard ! Canard suit
les rapides en se jouant et en butinant comme
les abeilles.
— Tous nos compliments ?
— N'est-ce pas, mon vieux Canard, que ta
suis un rapide, sans te presser, en cueillant
des petites fleurs dans les champs pour ton
bon mériiaître.
Canard répondit par quelques w -~ *
sympathiques.
, Le maître de Canard sortit une pipe de son
étui.
C'était une longue pipe en terre, infini-
ment jolie de forme, mais d'une gracilité in-
quiétante, à la voir entre les mains d'un
homme qui a bu !
La tenant par l'extrême bout du tuyau, il la
tapotait suf la pa-ume de sa main pour en
extirper de petits corps étrangers qui ne s'y
trouvaient, d'ailleurs, pas.
Il tapotait, il tapotait de plus en plus fort.
S'inclinant vers son chien : -
- La fumée de la pipe n'incommode pas
monsieur Canard ?. Monsieur Canard ne ré-
pond pas ?. C'est que monsieur Canard m'au-
torisa à fumer. <
L'homme continuait à tapoter sa pipe.
- Hein ! mon vieux canard, toi aussi, à
voudrais fumer une bonne pipe, dis ? Msis tit
ne fumeras rien du tout, tu entends, rien du"
tout!' Voilà ce que tu fumeras! Rien du
tout!. Qu'est-ce que diraient Madame et
Monsieur en voyant un chien fumer la pipe
en chemin de fer! C'est à peine si Madame
et Monsieur veulent bien m'autoriser à fu-
mer, moi, qui suis un électeur! N'est-ce pas,
Madame, n est-ce pas, Monsieur t
— Mais, comment donc ?
Ce que nous prévoyions arriva. la pire,
trop énergiquement tapotée, se cassa en deux
morceaux, le tuyau d'un côté, le fourneau de
l'autre. ,.'
Le pauvre monsieur poivrot contempla le
désastre d'un air stupéfié, puis ses yavy <-%
portèrent sur le nommé Canard.
— Ah ! tu ris, toi, espèce de cochon de Ca-
nard ! Ne pouvant fumer .toi-même, ça te tait
rigoler que je fume pa,; non P.lus' (s: adres.
sant à nous.) Regardez-le ! Est-il permis de se
f. du monde à ce point-là?
Le fait est que Canard avait positivement
l'air de rire.
Ses lèvres,en manifestation de gaieté, se re-
troussaient aux commissures : Canard rigolait
comme une baleine. ,
— Canard, mon petit CaimW^rtt
nues à te f. de moi, je te )ure que ça va
tourner mal! -
Canard se dressa sur ses quatre pattes et
secoua ses puces.
La fureur de l'autre ne connut plus de bor-
nes.
Il ouvrit la porte du wagon, et d'un corp
de pied dans le derrière, invita poliment l'e-
pagneul à se retirer.
Canard roula sur la voie, mais la pauvre
bête, à notre grand soulagement, se releva
tout de suite et se mit à nous galoper parailè»
lement.
Au bout d'une minute, nous l'avions perde
de vue. -
Le pochard prenait maintenant une figure
de justicier. - -- - —
- J'adore Canard, nous déclara-t-il, mais
je ne supporterai jamais qu'il se f.;. de m0i
devant le monde, comme il vient de le fair*,* 1
— Pauvre bête ! -'
— Je lui en ncherai.moi, des f îuvrè bête ! Et
puis, vous savez, s'il se permet de rentrer à lit
maison avant moi, je lut casserai les rem » à
coups de parapluie.
En arrivant à la gare Saint-Lazare, Thonv ie
sauta vivement sur le trottoir, et quand nous
sortîmes, nous l'entendions encore appeler :
— Pstt ! Canard ! Canard ! comt along
Gânâiw l
ALPHONSE ALLAIS.
AUX-INVALÎEES
Par RENÉ MAIZEHOY
LA REMISE DU DRAPEAU DU 200e
L'immense cour d'hinn ar ~&
bordent de solennelles façades. usin ées
et que domine l'Homme de Gloire dans
sa légendaire redingote grise com-
mence à s'éveiller, tressl; • co-ame
après quelque lourd som.neil léthar-
gique sous un doux ciel d'hiver clément
dont les. brumes se déchirent, ont des
teintes changeantes de vieille manto
jaune et bleue. Le dôme d'or semble au-
loin une tiare énorme et somnt""us^
A travers les corridors, it_ 2 ;~u<~
des Invalides, les petits tapins aux joues
roses d'enfant, aux mains alertes et
prestes; et qui dans leurs vieux, unifor-
mes évoquent les fifres de jadis, battent
le rappel, emplissent l'antique et silen-
cieuse demeure du Souvenir d'une ru- •
meur d'échos qui s'affaiblit peu à peu,
qu'étouffent bientôt des strideurs allè-
gres de fanfares.
Clopin-clopinant, astiqués de frais, la
lance au poing et le brique* ; 1 3
invalides accourent, s'aligne..w, -,-Iuts
que les drapeaux des régiments arrivent
un à un, que les sous-offîc ers qui les
escortent forment les faisceaux, battent
la semelle sur les p&vés* - - -
0 ces bonnes figures * passives d'an-
ciens soldats, avec leurs rides profondes
qui s'emmêlent parmi les cicatrice de
blessures, leur barbiche blanche ~u<5
jaunirent les culots de pipe qui fait son-
ger à l'armée d'il y a vingt-cinq ans, aux
jours de deuil et de sang où le Destia
faucha les Aigles jusque-le invaincues,
leurs nez bulbeux de soldes buveurs
qui se complaisent à parler âu nasat' V
verre en main! 0 ces pauvre qu:
ressemblent à des épaves -le navire oil
s'acharna la colère démente de l'Océan,
ces torses déjetés qui ballottent dans leS'
plis des longues capotes birues, ces man-
ches flasques qui couvrent quelque moi-
gnon informe, ces jambes d bois et les
chapelets de médailles, lf3 rubans d*
toutes couleurs qui pavoiseat leurs pok*
trinesessoufflée»! -.,' - -
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