Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-09-29
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 29 septembre 1906 29 septembre 1906
Description : 1906/09/29 (N13350). 1906/09/29 (N13350).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine commune
Description : Collection numérique : La Commune de Paris Collection numérique : La Commune de Paris
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k75496952
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/02/2013
K-13330. - 7 V3 xJDEMt A.TRB AN 115.
CaNQ CENTIME» JLE KTOMESO
SAMEDI 29SEPTEMBRE 1908. — R. 133SO :
FONDATEUR: AUGUSTE VACQUERIE'
ABONNEMENTS
hatit iMsioi» Shatii Ol M
Paris 2fr. 5fr. 9fr. 48ffc)
Départements.. 2 - 6 - t! - 20 —
Union Postale. 3 - 9 - £ 6 32-
DIRECTEUR POUnÓUE: CifR.
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MM. CH. LAGRANGE, CERF & C° !?
o, Place de la Bourst, S
ET AUX BUREAUX DU JOURNAL1
1
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Rédacteur en Chef : HENRY MARET
ADMINISTRATION : 14, RUE DU MAIL. - TELEPHONE JoriS-a
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Dans les ruines
L'opinion paraît s'être faite presque
unanimement dans les journaux républi-
cains — depuis les premières observa-
tions que j'ai présentées,ici — que la loi
dite de Séparation était devenue inap-
plicable avant d'avoir été appliquée.
M. de Lanessan, dans le Siècle, résu-
me la situation en ces termes : « Les En-
cycliques pontificales avaient fortement
ébranlé la loi du 9 décembre 1905 : la
lettre des évêques à leurs ouailles la dé-
truit de fond en comble, car, sans asso-
ciations cultuelles, il ne saurait y avoir
ni attributions de biens à l'Eglise de
France, ni abandon des édifices cultuels
à cette même Eglise. »
Comment s'est produite cette extra-
ordinaire aventure ? De la manière la
plus simple vraiment, et ce n'est pas
une aventure, c'est la conséquence logi-
que de la loi elle-même.
La loi du 9 décembre 1905 avait été
faite dans une pensée d'accord et de
bonne entente avec l'Eglise catho'ique
et avec les pasteurs, les évêques et le
pape. La loi avait été faite contre les
schismes et dissensions, pour la paix de
tous et des catholiques en particulier,
pour l'union et l'unité de leur Eglise
dans la Séparation même.
Le sublime article 4 était le nœud de
cette union.
Cet article idéal dit que les associa-
tions seront admises au partage des ga-
ranties et bénéfices- de la loi française,
à la condition que, en se conformant aux
règles d'organisation générale de leur
culte, elles se seront formées légale-
ment, ete.
Cette terrible incidente : « En se con-
formant, etc. », cet effrayant et tragi-
que participe contenait en son sein ora-
geux l'union des deux légalités : la léga-
lité française et la légalité catholique ro-
maine, toutes deux proclamées néces-
saires, inséparables pour constituer des
associations légales, aptes à recevoir et
à administrer les biens d'église.
Cette union indissoluble des deux lé-
galités avait précisément en vue d'empê-
cher le schisme, d'écarter toute chance
de dissensions politico-religieuses, de
nous épargner tout le vacarme et le re-
mue-ménage qui accompagnent d'ordi-
naire les disputes ecclésiastiques dans
la Latinité.
C'est une pensée généreuse et patrio-
tique qui avait inspiré le législateur et
le gouvernement républicain, M. Aris-
tide Briand en particulier, notre minis-
tre des cultes, alors rapporteur de la
loi, de qui on louera toujours la largeur
d'esprit et la noblesse des sentiments-
- Le secret de cette loi, son originalité,
c'est qu'elle était une loi d'accord et
d'entente dans la Séparation même.
C'était moins une loi de Séparation
qu'une loi d'Union sous un nouveau ré-
gime. L'incidente fameuse de l'article 4
n'est rien de moins qu'un néo-ooncordat
en cinq mots.
Il ne se fait pas de « capitulations »
entre esprits libres et sincères qui dis-
cutent les problèmes les plus graves de
l'organisation politique et sociale. Mais
si l'on parle de capitulation, la capitu-
lation fut là dans l'incidente de l'arti-
cle 4. Je soutiens que ce ne fut pas ca-
pitulation, mais union mutuelle et en-
tente cordiale — pour former une large
majorité dans le Parlement, majorité
qui serait elle-même le fondement d'une
large majorité dans l'opinion.
Pour que cette politique réussît, il y
fallait le consentement des évêques et du
pape — ou tout au moins des évêques.
Il fallait que les évêques acceptassent
notre incidente de l'article 4 ; ils au-
raient dû en tirer tout le parti et les res-
sources merveilleuses qu'elle contient ;
ils devaient avoir le bon esprit de don-
ner à ce fragment de style, à ce bout de
phrase toute sa valeur.
C'était là le gage de l'avenir pour
eux, le fil concordataire tissé dans la
trame de la loi du 9 décembre 1905. Au
lieu de garder avec un soin jaloux ce fil
si précieux, les évêques l'ont brisé et la
trame de la loi s'est déchirée de part en
part.
Le pape a dit : Non. Les évêques ont
dit : Non. Et comme il fallait leur vo-
lonté à la base de cette loi. d'accord —
^d'accord dans la Séparation — la loi
est tombée par terre.
Il ne s'agit pas aujourd'hui le prati-
quer malignement ou d'empêcher pru-
demment une brèche dans l'édifice. Cet
édifice n'est qu'un monceau de décom-
bres. Est-ce qu'on fait une brèche dans
-les ruinea ?
Si vous voulez, on y fait une brèche
vers la lumière et vers l'air libre ; on
s'ouvre un chemin pour sortir des rui-
nes, pour regagner l'atmosphère lumi-
neuse et respirable.
Je ne comprends p às ce qui a pu se
passer à propos de l'association cul-
tuelle de Culey. On m'assurait de bonne
source, il y a trois 'urs oue le gou-
vernement demandait au nom de la loi,
et par les moyens dont il peut disposer,
la dissolution d'une association cultuelle
qui se plaçait en opposition directe avec
la discipline du culte qu'elle entend re-
présenter.
C'était « énorme », comme on me le
disait, mais c'était logique. Le lende-
main on annonce que cette association
est appelée aux bénéfices de la loi qui
repose tout entière sur la conformité
des associations avec la disciplina de
leur culte. J'attends un supplément de
lumière.
Le Temps et plusieurs autres, et moi
aussi, j'ai posé cette question : « Pour-
quoi le pape et les évêques ont-ils re-
poussé les avantages inestimables, les
dons généreux de la loi de 1905"? » C'est
cependant bien simple : ce n'est pas
pour l'article 4, ce n'est pas pour l'ar-
ticle 8 : ce sont là des prétextes. Mais
c'est parce que le pape de l'Infaillibiité,
du Syllabm et du Concile du Vatican
condamne et rejette en principe toute
idée de Séparation de l'Eglise et de l'E-
tat.
Si nous avions dit : c'est la dernière
de nos lois concordataires — ce qui est
la vérité — tous aurions peut-être réus-
si. Mais nous disons : c'est la première
de nos lois de Séparation. Le pape du
Syllabus n'y a pas consenti. Nous avons
été les sujets innocents de cette illusion :
faire une loi de Séparation et d'accord
en même temps ; faire une loi concorda-
taire séparatiste ou séparatiste concor-
dataire.
Ces deux termes, ces deux attributs
essentiels de la loi de 1905, n'ont pu te-
nir dans la pratique : la loi s'est trouvée
dans le vide, entre deux selles.
Quand on a vécu ensemble une longue
vie, si les deux conjoints veulent se sé-
parer, rien de plus simple ; mais si l'un
des deux ne veut pas, si l'épouse éper-
due crie, tempête, s'accroche à vos bas-
ques, dans la rue, oh ! alors, c'est très
difficile de se séparer sans bruit et sans
scandale, et l'on doit finir, coûte que
coûte, par appeler la police, au milieu
des passants attroupés qui se moquent
de vous.
Hector Depasse.
LES ONDIT
L'ENTENTE FRANCO-ANGLAISE
* Je crois qu'on lira avec plai-
sir les quelques extraits que
nous publions plus loin, d'a-
près une dépêche de Londres,
d'un article de la National
Rewiew, sur les raooorts exis-
tant respectivement entre l'Angleterre,
l'Allemagne et la France.
L'auteur anonyme, — mais on peut
se fier à la grande revue anglaise pour
s'être renseignée à bonne source — l'au-
teur, dis-je, passe en revue les avan-
tages précis de la présente entente cor-
diale; il note particulièrement ce point
qui intéresse tout autant la France que
les pays visés, car si le fort écrase nos
faibles voisins, il nous affaiblit, nous,
en s'augmentant de leur substance, et
en se ménageant de nouveaux accès à
nos frontières — l'auteur fait donc re-
marquer '< qu'un soupir de soulagement
a été poussé par toutes les petites na-
tions, qui ont senti qu'une puissante ga-
rantie venait d'être créée pour leurs li-
bertés et leur indépendance menacées.
La situation du Danemark, de la Hol-
lande et de la Belgique est bien meil-
leure aujourd'hui qu'elle ne l'était il y
a trois ans ». ,
Et l'on ne saurait rieri avancer de
plus exact. Il y a, sans que cela soit
écrit nulle part, partie liée entre les pe-
tites puissances européennes et la Fran-
ce; et toujours, en France, on sera préoc-
cupé des visées allemandes, Sur le
Luxembourg, sur la Belgique, sur la
Hollande, sur le Danemark. Cela est si
vrai, qu'avant que ne survînt le fait de
l'alliance franco-russe, beaucoup d'es-
prits en France rêvaient une ligue des
petites puissances et de la France, con-
tre les menaces d'hégémonie allemande.
LA GUERRE DE 1870.
Racontée par le 1 Rappel 8
Numéro du 30 septembre 1870
Le bon trêrc. — « Qu'il vienne ! Les
canons de Montmartre et ceux d'Auber-
villiers l'attendent. Le peuple parisien
répondra à Sa Majesté le Carnage. Mais
l'humanité tout entière, un jour, de-
mandera compte à cet homme, comme
à l'autre, son bon frère, de toute la
substance cérébrale répandue à terre,
versée, gâchée par eux, et qui consti-
tuait, il y a deux mois, un capital formi-
dable et superbe de science, d'intelli-
gence, de pensée, de sentiment, de vie
et d'amour. — JULES CLARETIE. »
Nouvelles He Tours. — « Le gouver-
nement de la Défense nationale annon-
ce qu'une nouvelle estafette a apporté
de Tours les nouvelles suivantes : « A
l'étranger, blâme absolu des préten-
bilons prussiennes, approbation com-4
plète de notre ferme confiance que l'Eu-
rope ne permettra pas le morcellement
de notre territoire. C'est en ce sens que
les négociations se poursuivent active-
ment. Les Italiens sont entrés à Rome,
à la suite 'd'une capitulation, après
quelques coups de fusil. Le pape n'a
pas quitté la ville. »
Journal du siêgg, ■= £ Rapport militai-
re, 28 septembre : « Ce matin, une re-
connaissance a été faite par un esca-
dron du 9* régiment de chasseurs à che-
val ; elle a fouillé Neuilly-sur-Marne et
le plateau d'Avron. Elle a surpris à
Neuilly Tin poste d'infanterie, et, dans
le pare de la Maison-Blanche, elle a sa-
bré les Prussiens dont six ont été tués ;
elle n'a eu qu'un cheval blessé. »
Nouvelles et faits de gthrre. — « Les
deux parlementaires qui se sont pré-
sentés avant-hier, à. Saint-Denis, n'y
sont nullement venus dans l'intention
de sommer la ville de se rendre. Ils ve-
naient seulement avertir qu'on pouvait
envoyer dans les lignes prussiennes des
membres de la Société internationale,
afin d'enterrer ceux de nos morts que
nous y avons laissés dans la reconnais-
sance de vendredi. Ils ont ajoutéVque
nos blessés étaient soignés avec les
leurs dans les mêmes ambulances. Les
habitants de Saint-Denis ont eu le tort
grave d'accueillir par des cris et des-
menaces ces parlementaires. »
Les on-dit du rempart. — « Décidé-
ment, "il ne reste plus en France âme
qui vive de la famille impériale. Mlle
Cora Pearl, elle-même, est à Londres. »
« Le ballon ne sert plus seulement de
facteur, il passe à l'état de simple vé-
hicule. Hier soir, est parti de Paris,
par la voie aérienne, un Américain que
d'urgentes affaires appelaient à Bor-
deaux. Seulement, la course est un peu
chère : 1,500 francs. M. Peper, c'est le
nom du voyageur, s'est chargé, natu-
rellement, de la correspondance de %a
famille et de ses amis. »
« On a commencé à faire cuirasser
les locomotives destinées à faire le ser-
vice du Chemin de fer de Ceinture. »
-- « Des postes ïïe guetteurs de nuit
pour les incendies sont en voie d'orga-
nisation: Ils seront installés sur tous
les monuments élevés ; le poste central
sera placé sur les tours Notre-Dame. »
« Les locataires des maisons situées
près de la formidable batterie qui cou-
ronne la Butte Montmartre viennent de
recevoir l'ordre de se tenir prêts à dé-
ménager, au premier signal de l'auto-
rité. »
UN SOUVENIR DE WISSEMBOURG
Une simple pierre rappelle, à Wis-
sembourg, la place où le général Douay
tomba, mortellement frappé, en 1870.
Par contre, à Schafbusch, la chambre
où le corps du héros fut rapporté, suivi
fidèlement, dit-on, par son petit chien,
est restée à peu près intacte. On y re-
trouve des témoins du drame du 4 août,
les mêmes bancs, les mêmes tables boi-
teuses, avec, en plus, aux murs attris-
tés, les images des vainqueurs, et l'iné-
vitable portrait-réclame de Guillaume II,
qui semble accaparer ce passé terrible.
A peu de distance du champ de bataille,
se dresse, à mi-côte, la colonne érigée
en 1871 en l'honneur du roi de Rome :
« Exiguum monumentum, dit l'inscrip-
tion, spes magna — magtius amor. »
Ouiv grands espoirs, petites réalités,
c'est la vie. Quelle leçon ressort de la
vision de ces lieux, de ces souvenirs, de
ces drames 1
Mi] huit cent onze 1 0 temps, où des peuples sans
[nombre
Attendaient, prosternés sous un nuage sombre,
Que le ciel eût dit oui,
Sentaient trembler sous eux les Etats centenaires,
E' regardaient le Louvre entouré de tonnerres,
Comme un mont Sinaï 1
CHEZ LES MASSEURS ,r
En raison de la mort de son dévoué
et regretté secrétaire général M. J. Ra-
tier, la chambre syndicale des mas-
seurs de France tiendra une assemblée
générale extraordinaire, au siège social,
151, rue Saint-Denis, le lundi 8 octobre
prochain, à neuf heures du soir, dans
le but de désigner un successeur. Les
examens pour l'obtention du grand di-
plôme de l'Ecole professionnelle supé-
rieure de cette chambre syndicale sont
fixés du 15 au 24 octobre. Le banquet et
la distribution des diplômes auront lieu
le dimanche 11 novembre.
Ce banquet sera, affirment des indis-
crets, une grandiose manifestation
scientifique. Il y aura des sénateurs,
des députés, des conseillers munici-
paux, des médecins, des journalistes
et de jolies femmes, devant lesquels
« on proclamera l'union de tous les
masseurs de France et les progrès de
la science massothérapique ».
Le prix du banquet est de 7 francs ;
jusqu'au 15 octobre, on peut envoyer
les cotisations 47, rue de Miromesnil,
à M. Tabary, directeur de l'Ecole pro-
fessionnelle supérieure de massothéra-
pie.
On peut * être assuré qu'à ce banquet
les masseurs se rendront en masse.
LES COURSES DE TAUREAUX
Les corridas de toros avec mise à
mort sévissent plus que jamais. Plus
que jamais la brutalité et la violence
triomphent, plus .que jamais les instincts
sanguinaires s'étalent impudemment
en des fêtes honteuses. On ne s'élèvera
jamais assez contre ces atroces specta-
cles et l'on ne saura jamais assez blâ-
mer ceux qui les goûtent.
Mais que penser de ceux qui, par
leur situation, donnent, en assistant à
ces courses de taureaux, une sorte d'es-
tampille officielle à des spectacles qui,
ne l'oublions pas, sont légalement in-
terdits ?
On nous avait laissé espérer que la
tolérance accordée jusqu'à ce jour se-
rait moins grande et qu'on ne permet-
trait que rarement et seulement dans
des circonstances exceptionnelles l'or-
ganisation de ces ignobles boucheries.
Et déjà nous clamions victoire.
Hélas ! il a fallu déchanter. Maires
et préfets.: ont laissé, la plupart du
temps, s'organiser des corridas de
myerte. Et ces tristes passe-temps ont
Séxd, avec leur horrible série de mise à
mort de taureaux et de chevaux t Un
bon point cependant aux chefs de mu-
nicipalités qui n'ont toléré le spectacle
qu'avec les réserves imposées, paraît-il,
par le ministre de la façon la plus for-
melle.
Mais que penser des autres qui n'ont
pas craint de donner une estampille of-
ficielle à ce genre d'exhibition ?
Le Passan,.
—
AUTOMATISME
Les fabricants de n distributeurs auto-
matiques de jetons et bons de consomma-
tion » sont en ébullition. Des circulaires
récentes du garde des Sceaux et du préfet
de police prescrivent l'enlèvement - pas
en automobile, ça devient trop banal —
de tous ces distributeurs qui sont actune-
ment déposés chez les marchands de vin.
D'o ù, fureur des dits fabricants et récri-
minations des marchands de vin. Ces der-
niers sont trop influents pour ne pas obte-
nir gain de cause en fin de compte — et
cette fois, il faut l'avouer, ce sera justice.
Pourquoi, en effet, supprimer ces machi-
nes automatiques et pas les autres ? Pas
de êemi-mesures : il ne faut rien supprimer
ou supprimer tout ce qui est automatique.
Or, rien n'est plus impossible à réaliser,
attendu que tout est devenu automatique.
Autant essayer de mettre des rayons de
lune en bouteille.
Tout se fait et s'obtient aujourd'hui d'une
façon automatique. Ce. sont des appareils
automatiques qui, en échange d'une pièce
de monnaie, vous fournissent des victuail-
les et des boissons variées, des allumettes
ou des journaux, des parfums ou des bon-
bons, des timbres-poste ou des tablettes de
chocolat, des billets de loterie ou des ciga-
res, de l'eau chaude ou votre photographie,
res, l'étectricité ou des visions folichonnes,
de
des airs d'opéra ou votre poids et la force
de votre sang.
Un pharmacien d'Amsterdam a même
imaginé le « médecin automatique ». Son
appareil représente un homme nu — un
« écorché », en terme de médecine — percé
d'autant de trous qu'il y a dans un corps
humain de régions susceptibles d'une mala-
die déterminée. Avez-vous une bronchite ?
Vous mettez deux sous dans le « trou-bron-
ches ». Croyez-vous souffrir d'une maladie
de foie ? Vous mettez deux sous dans le
« trou-foie » — et voue recevez une ordon-
nance vous indiquant le remède à appli-
quer. et l'endroit où vous pourrez l'ache-
ter.
Depuis des siècles, les Thibétams ont
leurs « moulins à prières » qui se chargent
de dévider les « oremus » pendant que les
dévots dorment, s'amusent ou vaquent à
leurs occupations.
En Amérique, il y a les « distributeurs
automatiques d'aumônes », assure-t-on : les
mendiants tournent une manivelle à tour
de bras ; au bout d'une centaine de tours
qui actionnent un petit moteur électro-dy-
namique, dont les accumulateurs sont ap-
pliqués à l'éclairage, au chauffage, etc., ils
reçoivent. un penny.
En Angleterre, il y a « l'assurance auto-
matique, un penny dans un distributeur, »
et vous recevez une petite police d'assuran-
ce sous forme d'un ticket. Vous inscrivez
votre nom et votre adresse sur un ruban de
papier, se déroulant automatiquement, tim-
bré à la date du jour, et vous êtes tranquille
pendant une semaine. Si vous mourez, vos
héritiers touchent 625 francs ; si vous n'êtes
que blessé, vous percevez 12 fr. 50 par se-
maine, tout le temps que dure votre inca-
pacité de travail.
Encore une fois, tout n'est plus qudu-
tornatisme : nous ne pouvons nous en
plaindre, puisque nous l'avons voulu.
Reste à savoir si nous serons plue heureux
et si nous nous en porterons mieux.
Il est probable que non et déjà se des-
sine une sorte de réaction contre l'inacti-
vité humaine que crée l'automatisme.
L'autre jour, un de nos confrères spor-
tifs les plus compétents, M. G. de Lafreté,
poussait un cri d'alarme. Il faut marcher !
s'écriait-il.
Avec un courage et une franchise peu
ordinaires, il osait écrire : « Les adeptes
de l'automobilisme ne tarderont pas à de-
venir, s'ils n'y prennent garde, de vérita-
bles infirmes ; j'en connais qui sont inca-
pables d'effectuer une promenade pédestre
de quelques centaines de mètres ! L'usage
trop exclusif de l'automobile finit, en effet,
par donner le dégoût de la marche et mê-
me de tout effort museulaire. Pour avoir
fait trop d'automobile et pour avoir com-
plètement cessé de marcher, certains de
nos amis sont devenus impotents et
n'ont pas tardé à ressentir des troubles
fonctionnels de toutes sortes. Qu'ils s'as-
tréignent à faire chaque jour à pied un
minimum de deux à trois kilomètres. Le
principal est de ne pas perdre l'usage de
nos jambes et de nos pieds ! »
Ne dirait-on pas que nous marchons à
grands pas vers la réhabilitation des
« vieux marcheurs » ? ','
C. de Vorney.
—__— : —
LES NOUVEAUX TARIFS ESPAGNOLS
Madrid, 26 septembre.
D'après une dépêche de Saint-Sébastien
au Heraldo, les négociations du traité de
commerce seraient rompues et les délégués
français repartiraient pour la France.
D'aufre part, le ministre des finances,
après avoir eu une conversation téléphoni-
que avec les délégués espagnols, actuelle-
ment à Saint-Sébastien, a déclaré que les
membres de la commission franco-espagno-
le avaient ajourné leurs séances pour con-
sulter leurs gouvernements respectifs sur
la seconde colonne du tarif espagnol.
, Madrid, 27 septembre.
La rupture des négociations concernant
le traité de commerce avec la France, a
causé une impression pénible dans; le mon-
de commercial, car la France est le mar-
ché le plus important de la production espa-
gnole.
g L'Imparcial dit que l'acceptation préala-
ble faite par l'Allemagne tlu tarif espagnol
n'est pas étranger à cette, rupture.
Hier,. le ministre des finances a déclaré
qu'une ; certaine alarme existait parmi les
industriels catalans dans lia crainte que le
tarif espagnol-ne subisse une réductiçopun e le
vorable à l'im s-trie cotonnièré française.
Mais le ministre a ajouté que l'alarme n'é-
tait pas justifiée, puisque le tarif rie peut
être modifié que par une loi spéciale dISCU
- et votée-par les Cortes.
L'opinion générale de la presse est pessi-
miste.
(V oir te suite en DEUXIEME BDITIONj
CHRONIQUE
Les décors et accessoires du « Chat
Noir » au temps d'Emile Coudeau.
Au beau temps de ce pauvre Emile
Goudeau, ouvrier de la première heure
dans la glorieuse, phalange montmar-
troise, le théâtre du Chat Noir rappe-
lait presque le chariot de Thespis par
la simplicité de la mise en scène, par
l'ingénuité des moyens et l'imprévu
dies effets. La sûlle était de dimensions
médiocres ; le corps humain étant émi-
nemment compressible, on y empilait
cent quatre-vingts personnes environ,
mais il faillait jucher des spectateurs
jusque sur le piano. Cette promiscuité,
ce tassement fut un élément de succès,
assura précisément la communication
contagieuse du rire ou de l'émotion.
Une électricité particulière se dégage
dee foules.
Certes, les ressources scéniques dont
disposaient les amis d'Emile Goudeau
étaient des plus restreintes ; les per-
sonnages de premier plan avaient une
taille réglementaire de quinze centimè-
tres. De par l'inflexibilité de leur os-
sature métallique, tout geste leur était
rigoureusement interdit, hormis le ges-
te grotesque, obtenu au moyen d'arti-
culations ingénieuses, ou encore le ges-
te hiératique et 'ent, celui, par exem-
ple, du prêtre qui bénit, ou enfin le
geste automatique du soldat qui pré-
sente les armes. Certains mouvements
de scène, extrêmement simples, of-
fraient des difficultés insurmontables;
c'est ainsi qu'un personnage qui entrait
par le côté cour ne pouvait sortir que
par le côté jardin.
En revanche, l'exiguité du cadre per-
mettait d'y exécuter de véritables pro-
diges de mise en scène, qui seraient
impraticables dans les théâtres de fée-
rie les plus habilement machinés. Les
changements à vue étaient, pour les ar-
tistes du Chat Noir, jeux d'enfants ;
un orage, avec les sillons fulgurants de
l'éclair, l'éruption {l'un volcan avec ses
coulées de lave rougeoyantes, le bom-
bardement d'une ville en feu, n'ef-
frayaient nullement l'ingéniosité des
décorateurs de la rue Victor-Massé.
Songez qu'il est,plus. facile de simuler
une tempête dans un bocal de poissons
rouges que sur la piste nautique du
Nouveau-Cirque. « Les bouffées de nos
pipes, m'écrivait un des amis de Gou-
deau, suffisaient à couvrir de fumée la
plaine de Marengo ; un chiffon de pa-
pier à cigarettes,, enflammé et lancé pa-
raboliquement, donnait l'illusion parfai-
te d'une bombe, un coup de grosso
caisse reproduisait le fracas de l'explo-
sion. Un verre de vitre, convenablement
peint et mû lenteme-nt devant un bec de
gaz oxydriqué, projetait sur l'écran tou-
te la magie prestigieuse d'une aurore ou
d'un coucher de soleil. »
Quelques instants après que l'obscu-
rité s'était faite dans la salle, le specta-
teur, n'ayant plus aucun point de re-
père visible pour apprécier les propor-
tions et les distances, hypnotisé par cet
écran d'un mètre carré qui seul demeu-
rait lumineux, pouvait croire qu'il assis-
tait de très loin aux scènes qui se dérou-
laient sous ses yeux et ne se rendait
plus compte de la dimension réelle des
personnages.
L'illusion était telle, qu un jour une
bombe ayant enflammé le morceau de
calicot qui servait d'écran, on crut à un
véritable incendie. Il y eut une panique
dans la salle, des crises de nerfs, et, na-
turellement, un éclat de rire général
dès que fut rallumé le bec de gaz, qui
remit toutes choses au point.
La première pièce représentée fut
FEpopee de Caran d'Ache. La science du
dessinateur avait trouvé à s'exercer
dans le long défilé de la Grande Armée
qui exigeait des milliers de personna-
ges, sans compter les masses profon-
des des régiments, figurées au dernier
plan par des bandes de zinc découpées
suivant les lois de la perspective et hé-
rissées d'une forêt d'aiguilles. Mais >
clou de la soirée était l'enlèvement
d'une redoute prussienne par un ba-
taillon du 78 légers, montant à l'assaut
sous une pluie de feu, obtenue simple-
ment au moyen d'un pétard d'un sou
qui fusait largement et couvrait d'étin-
celles tout le champ de bataille.
De graves académiciens, MM. Jules
Lemaitre et Melchior de Vogué, ont dé-
claré — et ceci fait honneur à la fraî-
cheur de leurs impressions — qu'ils
avaient senti passer le frisson de l'en-
thousiasme au moment où le drapeau
français apparaissait, troué de balles,
sur la crête de la redoute..
Le boniment était fait par Salis, au
début, et. soufflé, composé en réalité,
par Eniile Goudeau. Sa grandiloquence
empanachée s'adaptait merveilleuse-
ment au sujet. Mais il fallut, en variant
le répertoire, assurer d'une autre façon
le commentaire obligé des représenta-
tions. Ainsi, la Marche à l'Etoile fut un
véritable poème, mis en musique par
Georges FrageroIIe. On peut citer, dans
le même genre, Roland à Roncevaux,
poème de Georges d'Esparbès, avec mu-
sique de Charles de Sivry. -
C'était le poète Armand Masson, au-
jourd'hui sous-chef du rersonnel à la
Préfecture de la Séine, qui était chargé
de sonner du cor au nom du neveu de
Charlemagne. Il n'y avait qu'une note
à donner, mais il fallait qu'elle fût par-
ticulièrement puissante, afin d'attester
ta vigueur des poumons du paladin. A
cet effet, on mit à la disposition dé Mas-
son un instrument - spécial, composé
d'un tuyau d'arrosage en plomb de cinq
mètres de longueur, terminé à un bout
par une embouchure de trombone, e
à l'autre bout, donnant sur la cour de la
maison voisine, par un entonnoir de
marchand de vins formant pavillon. « Je
vous certifie, dit d'excellent, mandarin
qui rit encore à ce souvenir folâtre, que
le son du cor fut bougrement triste au
fond des bois, tellement triste et lellew
ment horrifique Tiie les voisins se plan
gnirent et qu'il fallut pratiquer une cou*
pure dans la partition. »
La forme définitive de la pièce d'onl.
bres chinoises, avec toutes les ressour-
ces qu'elle comportait, fut créée par un
jeune homme qui sortait alors de l'E.
cole centrale, le dernier venu du batail.
Ion sacré de Montmartre. C'était Mau-
rice Donnay. Il produisit successive*
ment au « Chat Noir » Phryné, une fan-*
taisie grecque adQrablement. perverse
et une sorte de revue symbolique inti-
tulée Ailleurs, critique légère du pes-
sumisme contemporain, yarodie feans
façon de l'épique promenade de Dante
à traveirs les sept cercles infernaux,-
terminée par l'alleluia des forts, qui
doivent être aussi les joyeux, car la for-
ce véritable ne va point sans l'alacrité
morale, signe évident de la santé de
1 esprit.
Et dans les cycles de l'ailleurs
J'ai vu l'au-delà salutaire ;
Et je pressens des temps meilleure,
Non dans le ciel, mais sur la terre
Pour ceux de bonne volonté.
Le succès des pièces d'ombres fut vif
auprès des artistes et des lettrés ; il en
rejaillissait une bonne1 part sur les chan-
sonniers ordinaires de la maison qui
fournissaient les intermèdes. Mais tou-
te chose a son revers. L'invasion du
gros public, venant au bruit de la pa-
rade comme à la foire, relégua au se-
cond plan les poètes délicats, habitués
au suffrage de l'élite, l'entreprise tour-
na à l'industrialisme. La chanson seule
persista à s'envoler des hauteurs de
Montmartre. Il n'y a pas d'art inférieur,
après tout, et je dois convenir que Ist
chanson était, au Chat. Noir, transfor-
mée, glissant de plus en plus vers le
café-concert, brillamment représentée,
dans les débuts surtout. C'était le temps
où Fragerolle donnait la série de ses
Chansons de France, où Paul DelmeC
modulait ses premières mélodies, oi).
renaissait la satire alerte aux couplets
cinglants, toujours mise à la dernière
mode de l'actualité, pour tomber en-
suite à la rosserie pure -et .simple, à la
gouaillerie trop facile. ,
Mais ceci dépasse les limites de cette
évocation familière.
Noël Amaudru.
LE CONSEIL DE CABINET
Les ministres et les sous-secrétaires d'E-
tat se sont réunis hier matin en conseil
de cabinet au ministère de la justice, sous
la présidence de M. Sarrien.
, MM. Etienne et Bérard n'assistaient pas
à la délibération.
Les ministres des affaires étrangères ci
du commerce ont mis le conseil au •cou-
rant des négociations commerciales qui se
poursuivent entre la France et l'Espagne.
Le conseil a décidé qu'au cas, où un ac-
cord ne serait pas intervenu à la date du
1er octobre, le modus viuendi pourrait être
prorogé pour une période d'un mois.
Les ministres ont ensuite procédé à l'ex-
pédition des affaires courantes.
Un conseil aura lieu sous la présidence
de M. Fallières dans le courant de la se-
maine prochaine.
, , — m
L'ÉQUIPEE DE L'ABBÉ DELARUE
L'ex-curé de Châtenay n'a pas disparu. -
Il reçoit des visites. — Identité confir-
mée. — A Châtenay.
Bruxelles, 27 septembre.
On dit que le curé de Châtenay est tou-
jours rue de Constantmople ; son départ
n'était qu'une feinte. L'abbé Ddarue et
Mlle Frémont n'ont pas quitté leur loge-
ment de touet la journée.
Il a reçu un grand nombre de lettres et
le calme se fait autour de se maiosn.
L'ami d'enfance
L'abbé DeJarue avait pour ami d'enfanœ
un marchand de vins du boulevard Saint-
Germain, M. Dugué. C'est chez lui qu'il
s'arrêta un moment le 24 juillet, avant de
partir pdUr Etampes et disparaître uéfmi-
tivement.
M. Dugué est parti pour Bruxenes afin
de s'assurer personnellement de 1 identité
du fugitif. Il était accompagné d'un réèao-
teur de la Patrie qui a publié le récit sui-
vant de l'entrevue des deux anciens cama-
rades
— Tu vas bien 7 dil l'abbé Dclârue en prenant
la main de M. Dugué.
- — Cest à toi qu'il faut demander cela, a toi,
malheureux que je reconnais maintenant et qui
as trahi tous tes devois et trompé tous ks amis,
joué un rôle hypocrite et honteux. :
Pourquoi n'as-tu pas écrit aux tiens pour .e®
rassurer ? Pourquoi n'as-tu pas empêché quanA
il en était temps encore ce, service de Requiem,
célébré à Châtenay pour le repos oe ton âme
Réponds à ton ancien camarade qui a le droit,
au nom de ta famille et de tes anus, de te de-
mander des comptes et des explications.
— Je me justifierai, je ferai face à ceux qui
m'insultent, je montrerai que j'ai encore une
conscience, quoi qu'on en dise.
Je suis coupable, oui, mais je ne pouvajs pas
rester plus longtemps là-bas, vous le savez
bien. La situation particuliero aie Marie — Mlle
Frémont est enceinte de six mois — ne me per-
mettait pas de dissimuler plus longtemps. J al,
perdu la tête, ie me suis enfui ; ip nai pas eu
le courage nécessaire dans la suite pour arrêter
la campagne et mettre fin à des recherches qui
devaient rester vaines. J'ai expliqué tout cela
dans la lettre écrite à mes parents.
— Qu'às-tu fait du 24 juillet au 24 sepembre t
— Je suis venu directement à Mons, puis à
Bruxelles dès le 25 juillet. Je n'ai plus bougé,
d'ici et c'est par les journaux que j'ai appris,
qu'on me recherchait. Au bout de quinze jours
je cessai de les lire ; jespérais toujours que le
si'enoe se ferait sur mon nom. Sans la presse
j'étais sauvé. Ah 1 j'ai eu tant d'angoisses t..
— Dis plutôt que sans cette presse la familta
tout entière serait dans le deuil et la douleur,
reprend M. Dugué. Cuest cette presse qui V4
CaNQ CENTIME» JLE KTOMESO
SAMEDI 29SEPTEMBRE 1908. — R. 133SO :
FONDATEUR: AUGUSTE VACQUERIE'
ABONNEMENTS
hatit iMsioi» Shatii Ol M
Paris 2fr. 5fr. 9fr. 48ffc)
Départements.. 2 - 6 - t! - 20 —
Union Postale. 3 - 9 - £ 6 32-
DIRECTEUR POUnÓUE: CifR.
ANNONCES: j
MM. CH. LAGRANGE, CERF & C° !?
o, Place de la Bourst, S
ET AUX BUREAUX DU JOURNAL1
1
Secrétaire Général : A.-F. CECCALD1
RÉDACTION : 14, RUE DU MAIL, PARIS. — TELÉPHONE 102.82
Adresser les communications au Rédacteur en Chef
Rédacteur en Chef : HENRY MARET
ADMINISTRATION : 14, RUE DU MAIL. - TELEPHONE JoriS-a
Adresser lettres et mandats à "Administrateur ---
Dans les ruines
L'opinion paraît s'être faite presque
unanimement dans les journaux républi-
cains — depuis les premières observa-
tions que j'ai présentées,ici — que la loi
dite de Séparation était devenue inap-
plicable avant d'avoir été appliquée.
M. de Lanessan, dans le Siècle, résu-
me la situation en ces termes : « Les En-
cycliques pontificales avaient fortement
ébranlé la loi du 9 décembre 1905 : la
lettre des évêques à leurs ouailles la dé-
truit de fond en comble, car, sans asso-
ciations cultuelles, il ne saurait y avoir
ni attributions de biens à l'Eglise de
France, ni abandon des édifices cultuels
à cette même Eglise. »
Comment s'est produite cette extra-
ordinaire aventure ? De la manière la
plus simple vraiment, et ce n'est pas
une aventure, c'est la conséquence logi-
que de la loi elle-même.
La loi du 9 décembre 1905 avait été
faite dans une pensée d'accord et de
bonne entente avec l'Eglise catho'ique
et avec les pasteurs, les évêques et le
pape. La loi avait été faite contre les
schismes et dissensions, pour la paix de
tous et des catholiques en particulier,
pour l'union et l'unité de leur Eglise
dans la Séparation même.
Le sublime article 4 était le nœud de
cette union.
Cet article idéal dit que les associa-
tions seront admises au partage des ga-
ranties et bénéfices- de la loi française,
à la condition que, en se conformant aux
règles d'organisation générale de leur
culte, elles se seront formées légale-
ment, ete.
Cette terrible incidente : « En se con-
formant, etc. », cet effrayant et tragi-
que participe contenait en son sein ora-
geux l'union des deux légalités : la léga-
lité française et la légalité catholique ro-
maine, toutes deux proclamées néces-
saires, inséparables pour constituer des
associations légales, aptes à recevoir et
à administrer les biens d'église.
Cette union indissoluble des deux lé-
galités avait précisément en vue d'empê-
cher le schisme, d'écarter toute chance
de dissensions politico-religieuses, de
nous épargner tout le vacarme et le re-
mue-ménage qui accompagnent d'ordi-
naire les disputes ecclésiastiques dans
la Latinité.
C'est une pensée généreuse et patrio-
tique qui avait inspiré le législateur et
le gouvernement républicain, M. Aris-
tide Briand en particulier, notre minis-
tre des cultes, alors rapporteur de la
loi, de qui on louera toujours la largeur
d'esprit et la noblesse des sentiments-
- Le secret de cette loi, son originalité,
c'est qu'elle était une loi d'accord et
d'entente dans la Séparation même.
C'était moins une loi de Séparation
qu'une loi d'Union sous un nouveau ré-
gime. L'incidente fameuse de l'article 4
n'est rien de moins qu'un néo-ooncordat
en cinq mots.
Il ne se fait pas de « capitulations »
entre esprits libres et sincères qui dis-
cutent les problèmes les plus graves de
l'organisation politique et sociale. Mais
si l'on parle de capitulation, la capitu-
lation fut là dans l'incidente de l'arti-
cle 4. Je soutiens que ce ne fut pas ca-
pitulation, mais union mutuelle et en-
tente cordiale — pour former une large
majorité dans le Parlement, majorité
qui serait elle-même le fondement d'une
large majorité dans l'opinion.
Pour que cette politique réussît, il y
fallait le consentement des évêques et du
pape — ou tout au moins des évêques.
Il fallait que les évêques acceptassent
notre incidente de l'article 4 ; ils au-
raient dû en tirer tout le parti et les res-
sources merveilleuses qu'elle contient ;
ils devaient avoir le bon esprit de don-
ner à ce fragment de style, à ce bout de
phrase toute sa valeur.
C'était là le gage de l'avenir pour
eux, le fil concordataire tissé dans la
trame de la loi du 9 décembre 1905. Au
lieu de garder avec un soin jaloux ce fil
si précieux, les évêques l'ont brisé et la
trame de la loi s'est déchirée de part en
part.
Le pape a dit : Non. Les évêques ont
dit : Non. Et comme il fallait leur vo-
lonté à la base de cette loi. d'accord —
^d'accord dans la Séparation — la loi
est tombée par terre.
Il ne s'agit pas aujourd'hui le prati-
quer malignement ou d'empêcher pru-
demment une brèche dans l'édifice. Cet
édifice n'est qu'un monceau de décom-
bres. Est-ce qu'on fait une brèche dans
-les ruinea ?
Si vous voulez, on y fait une brèche
vers la lumière et vers l'air libre ; on
s'ouvre un chemin pour sortir des rui-
nes, pour regagner l'atmosphère lumi-
neuse et respirable.
Je ne comprends p às ce qui a pu se
passer à propos de l'association cul-
tuelle de Culey. On m'assurait de bonne
source, il y a trois 'urs oue le gou-
vernement demandait au nom de la loi,
et par les moyens dont il peut disposer,
la dissolution d'une association cultuelle
qui se plaçait en opposition directe avec
la discipline du culte qu'elle entend re-
présenter.
C'était « énorme », comme on me le
disait, mais c'était logique. Le lende-
main on annonce que cette association
est appelée aux bénéfices de la loi qui
repose tout entière sur la conformité
des associations avec la disciplina de
leur culte. J'attends un supplément de
lumière.
Le Temps et plusieurs autres, et moi
aussi, j'ai posé cette question : « Pour-
quoi le pape et les évêques ont-ils re-
poussé les avantages inestimables, les
dons généreux de la loi de 1905"? » C'est
cependant bien simple : ce n'est pas
pour l'article 4, ce n'est pas pour l'ar-
ticle 8 : ce sont là des prétextes. Mais
c'est parce que le pape de l'Infaillibiité,
du Syllabm et du Concile du Vatican
condamne et rejette en principe toute
idée de Séparation de l'Eglise et de l'E-
tat.
Si nous avions dit : c'est la dernière
de nos lois concordataires — ce qui est
la vérité — tous aurions peut-être réus-
si. Mais nous disons : c'est la première
de nos lois de Séparation. Le pape du
Syllabus n'y a pas consenti. Nous avons
été les sujets innocents de cette illusion :
faire une loi de Séparation et d'accord
en même temps ; faire une loi concorda-
taire séparatiste ou séparatiste concor-
dataire.
Ces deux termes, ces deux attributs
essentiels de la loi de 1905, n'ont pu te-
nir dans la pratique : la loi s'est trouvée
dans le vide, entre deux selles.
Quand on a vécu ensemble une longue
vie, si les deux conjoints veulent se sé-
parer, rien de plus simple ; mais si l'un
des deux ne veut pas, si l'épouse éper-
due crie, tempête, s'accroche à vos bas-
ques, dans la rue, oh ! alors, c'est très
difficile de se séparer sans bruit et sans
scandale, et l'on doit finir, coûte que
coûte, par appeler la police, au milieu
des passants attroupés qui se moquent
de vous.
Hector Depasse.
LES ONDIT
L'ENTENTE FRANCO-ANGLAISE
* Je crois qu'on lira avec plai-
sir les quelques extraits que
nous publions plus loin, d'a-
près une dépêche de Londres,
d'un article de la National
Rewiew, sur les raooorts exis-
tant respectivement entre l'Angleterre,
l'Allemagne et la France.
L'auteur anonyme, — mais on peut
se fier à la grande revue anglaise pour
s'être renseignée à bonne source — l'au-
teur, dis-je, passe en revue les avan-
tages précis de la présente entente cor-
diale; il note particulièrement ce point
qui intéresse tout autant la France que
les pays visés, car si le fort écrase nos
faibles voisins, il nous affaiblit, nous,
en s'augmentant de leur substance, et
en se ménageant de nouveaux accès à
nos frontières — l'auteur fait donc re-
marquer '< qu'un soupir de soulagement
a été poussé par toutes les petites na-
tions, qui ont senti qu'une puissante ga-
rantie venait d'être créée pour leurs li-
bertés et leur indépendance menacées.
La situation du Danemark, de la Hol-
lande et de la Belgique est bien meil-
leure aujourd'hui qu'elle ne l'était il y
a trois ans ». ,
Et l'on ne saurait rieri avancer de
plus exact. Il y a, sans que cela soit
écrit nulle part, partie liée entre les pe-
tites puissances européennes et la Fran-
ce; et toujours, en France, on sera préoc-
cupé des visées allemandes, Sur le
Luxembourg, sur la Belgique, sur la
Hollande, sur le Danemark. Cela est si
vrai, qu'avant que ne survînt le fait de
l'alliance franco-russe, beaucoup d'es-
prits en France rêvaient une ligue des
petites puissances et de la France, con-
tre les menaces d'hégémonie allemande.
LA GUERRE DE 1870.
Racontée par le 1 Rappel 8
Numéro du 30 septembre 1870
Le bon trêrc. — « Qu'il vienne ! Les
canons de Montmartre et ceux d'Auber-
villiers l'attendent. Le peuple parisien
répondra à Sa Majesté le Carnage. Mais
l'humanité tout entière, un jour, de-
mandera compte à cet homme, comme
à l'autre, son bon frère, de toute la
substance cérébrale répandue à terre,
versée, gâchée par eux, et qui consti-
tuait, il y a deux mois, un capital formi-
dable et superbe de science, d'intelli-
gence, de pensée, de sentiment, de vie
et d'amour. — JULES CLARETIE. »
Nouvelles He Tours. — « Le gouver-
nement de la Défense nationale annon-
ce qu'une nouvelle estafette a apporté
de Tours les nouvelles suivantes : « A
l'étranger, blâme absolu des préten-
bilons prussiennes, approbation com-4
plète de notre ferme confiance que l'Eu-
rope ne permettra pas le morcellement
de notre territoire. C'est en ce sens que
les négociations se poursuivent active-
ment. Les Italiens sont entrés à Rome,
à la suite 'd'une capitulation, après
quelques coups de fusil. Le pape n'a
pas quitté la ville. »
Journal du siêgg, ■= £ Rapport militai-
re, 28 septembre : « Ce matin, une re-
connaissance a été faite par un esca-
dron du 9* régiment de chasseurs à che-
val ; elle a fouillé Neuilly-sur-Marne et
le plateau d'Avron. Elle a surpris à
Neuilly Tin poste d'infanterie, et, dans
le pare de la Maison-Blanche, elle a sa-
bré les Prussiens dont six ont été tués ;
elle n'a eu qu'un cheval blessé. »
Nouvelles et faits de gthrre. — « Les
deux parlementaires qui se sont pré-
sentés avant-hier, à. Saint-Denis, n'y
sont nullement venus dans l'intention
de sommer la ville de se rendre. Ils ve-
naient seulement avertir qu'on pouvait
envoyer dans les lignes prussiennes des
membres de la Société internationale,
afin d'enterrer ceux de nos morts que
nous y avons laissés dans la reconnais-
sance de vendredi. Ils ont ajoutéVque
nos blessés étaient soignés avec les
leurs dans les mêmes ambulances. Les
habitants de Saint-Denis ont eu le tort
grave d'accueillir par des cris et des-
menaces ces parlementaires. »
Les on-dit du rempart. — « Décidé-
ment, "il ne reste plus en France âme
qui vive de la famille impériale. Mlle
Cora Pearl, elle-même, est à Londres. »
« Le ballon ne sert plus seulement de
facteur, il passe à l'état de simple vé-
hicule. Hier soir, est parti de Paris,
par la voie aérienne, un Américain que
d'urgentes affaires appelaient à Bor-
deaux. Seulement, la course est un peu
chère : 1,500 francs. M. Peper, c'est le
nom du voyageur, s'est chargé, natu-
rellement, de la correspondance de %a
famille et de ses amis. »
« On a commencé à faire cuirasser
les locomotives destinées à faire le ser-
vice du Chemin de fer de Ceinture. »
-- « Des postes ïïe guetteurs de nuit
pour les incendies sont en voie d'orga-
nisation: Ils seront installés sur tous
les monuments élevés ; le poste central
sera placé sur les tours Notre-Dame. »
« Les locataires des maisons situées
près de la formidable batterie qui cou-
ronne la Butte Montmartre viennent de
recevoir l'ordre de se tenir prêts à dé-
ménager, au premier signal de l'auto-
rité. »
UN SOUVENIR DE WISSEMBOURG
Une simple pierre rappelle, à Wis-
sembourg, la place où le général Douay
tomba, mortellement frappé, en 1870.
Par contre, à Schafbusch, la chambre
où le corps du héros fut rapporté, suivi
fidèlement, dit-on, par son petit chien,
est restée à peu près intacte. On y re-
trouve des témoins du drame du 4 août,
les mêmes bancs, les mêmes tables boi-
teuses, avec, en plus, aux murs attris-
tés, les images des vainqueurs, et l'iné-
vitable portrait-réclame de Guillaume II,
qui semble accaparer ce passé terrible.
A peu de distance du champ de bataille,
se dresse, à mi-côte, la colonne érigée
en 1871 en l'honneur du roi de Rome :
« Exiguum monumentum, dit l'inscrip-
tion, spes magna — magtius amor. »
Ouiv grands espoirs, petites réalités,
c'est la vie. Quelle leçon ressort de la
vision de ces lieux, de ces souvenirs, de
ces drames 1
Mi] huit cent onze 1 0 temps, où des peuples sans
[nombre
Attendaient, prosternés sous un nuage sombre,
Que le ciel eût dit oui,
Sentaient trembler sous eux les Etats centenaires,
E' regardaient le Louvre entouré de tonnerres,
Comme un mont Sinaï 1
CHEZ LES MASSEURS ,r
En raison de la mort de son dévoué
et regretté secrétaire général M. J. Ra-
tier, la chambre syndicale des mas-
seurs de France tiendra une assemblée
générale extraordinaire, au siège social,
151, rue Saint-Denis, le lundi 8 octobre
prochain, à neuf heures du soir, dans
le but de désigner un successeur. Les
examens pour l'obtention du grand di-
plôme de l'Ecole professionnelle supé-
rieure de cette chambre syndicale sont
fixés du 15 au 24 octobre. Le banquet et
la distribution des diplômes auront lieu
le dimanche 11 novembre.
Ce banquet sera, affirment des indis-
crets, une grandiose manifestation
scientifique. Il y aura des sénateurs,
des députés, des conseillers munici-
paux, des médecins, des journalistes
et de jolies femmes, devant lesquels
« on proclamera l'union de tous les
masseurs de France et les progrès de
la science massothérapique ».
Le prix du banquet est de 7 francs ;
jusqu'au 15 octobre, on peut envoyer
les cotisations 47, rue de Miromesnil,
à M. Tabary, directeur de l'Ecole pro-
fessionnelle supérieure de massothéra-
pie.
On peut * être assuré qu'à ce banquet
les masseurs se rendront en masse.
LES COURSES DE TAUREAUX
Les corridas de toros avec mise à
mort sévissent plus que jamais. Plus
que jamais la brutalité et la violence
triomphent, plus .que jamais les instincts
sanguinaires s'étalent impudemment
en des fêtes honteuses. On ne s'élèvera
jamais assez contre ces atroces specta-
cles et l'on ne saura jamais assez blâ-
mer ceux qui les goûtent.
Mais que penser de ceux qui, par
leur situation, donnent, en assistant à
ces courses de taureaux, une sorte d'es-
tampille officielle à des spectacles qui,
ne l'oublions pas, sont légalement in-
terdits ?
On nous avait laissé espérer que la
tolérance accordée jusqu'à ce jour se-
rait moins grande et qu'on ne permet-
trait que rarement et seulement dans
des circonstances exceptionnelles l'or-
ganisation de ces ignobles boucheries.
Et déjà nous clamions victoire.
Hélas ! il a fallu déchanter. Maires
et préfets.: ont laissé, la plupart du
temps, s'organiser des corridas de
myerte. Et ces tristes passe-temps ont
Séxd, avec leur horrible série de mise à
mort de taureaux et de chevaux t Un
bon point cependant aux chefs de mu-
nicipalités qui n'ont toléré le spectacle
qu'avec les réserves imposées, paraît-il,
par le ministre de la façon la plus for-
melle.
Mais que penser des autres qui n'ont
pas craint de donner une estampille of-
ficielle à ce genre d'exhibition ?
Le Passan,.
—
AUTOMATISME
Les fabricants de n distributeurs auto-
matiques de jetons et bons de consomma-
tion » sont en ébullition. Des circulaires
récentes du garde des Sceaux et du préfet
de police prescrivent l'enlèvement - pas
en automobile, ça devient trop banal —
de tous ces distributeurs qui sont actune-
ment déposés chez les marchands de vin.
D'o ù, fureur des dits fabricants et récri-
minations des marchands de vin. Ces der-
niers sont trop influents pour ne pas obte-
nir gain de cause en fin de compte — et
cette fois, il faut l'avouer, ce sera justice.
Pourquoi, en effet, supprimer ces machi-
nes automatiques et pas les autres ? Pas
de êemi-mesures : il ne faut rien supprimer
ou supprimer tout ce qui est automatique.
Or, rien n'est plus impossible à réaliser,
attendu que tout est devenu automatique.
Autant essayer de mettre des rayons de
lune en bouteille.
Tout se fait et s'obtient aujourd'hui d'une
façon automatique. Ce. sont des appareils
automatiques qui, en échange d'une pièce
de monnaie, vous fournissent des victuail-
les et des boissons variées, des allumettes
ou des journaux, des parfums ou des bon-
bons, des timbres-poste ou des tablettes de
chocolat, des billets de loterie ou des ciga-
res, de l'eau chaude ou votre photographie,
res, l'étectricité ou des visions folichonnes,
de
des airs d'opéra ou votre poids et la force
de votre sang.
Un pharmacien d'Amsterdam a même
imaginé le « médecin automatique ». Son
appareil représente un homme nu — un
« écorché », en terme de médecine — percé
d'autant de trous qu'il y a dans un corps
humain de régions susceptibles d'une mala-
die déterminée. Avez-vous une bronchite ?
Vous mettez deux sous dans le « trou-bron-
ches ». Croyez-vous souffrir d'une maladie
de foie ? Vous mettez deux sous dans le
« trou-foie » — et voue recevez une ordon-
nance vous indiquant le remède à appli-
quer. et l'endroit où vous pourrez l'ache-
ter.
Depuis des siècles, les Thibétams ont
leurs « moulins à prières » qui se chargent
de dévider les « oremus » pendant que les
dévots dorment, s'amusent ou vaquent à
leurs occupations.
En Amérique, il y a les « distributeurs
automatiques d'aumônes », assure-t-on : les
mendiants tournent une manivelle à tour
de bras ; au bout d'une centaine de tours
qui actionnent un petit moteur électro-dy-
namique, dont les accumulateurs sont ap-
pliqués à l'éclairage, au chauffage, etc., ils
reçoivent. un penny.
En Angleterre, il y a « l'assurance auto-
matique, un penny dans un distributeur, »
et vous recevez une petite police d'assuran-
ce sous forme d'un ticket. Vous inscrivez
votre nom et votre adresse sur un ruban de
papier, se déroulant automatiquement, tim-
bré à la date du jour, et vous êtes tranquille
pendant une semaine. Si vous mourez, vos
héritiers touchent 625 francs ; si vous n'êtes
que blessé, vous percevez 12 fr. 50 par se-
maine, tout le temps que dure votre inca-
pacité de travail.
Encore une fois, tout n'est plus qudu-
tornatisme : nous ne pouvons nous en
plaindre, puisque nous l'avons voulu.
Reste à savoir si nous serons plue heureux
et si nous nous en porterons mieux.
Il est probable que non et déjà se des-
sine une sorte de réaction contre l'inacti-
vité humaine que crée l'automatisme.
L'autre jour, un de nos confrères spor-
tifs les plus compétents, M. G. de Lafreté,
poussait un cri d'alarme. Il faut marcher !
s'écriait-il.
Avec un courage et une franchise peu
ordinaires, il osait écrire : « Les adeptes
de l'automobilisme ne tarderont pas à de-
venir, s'ils n'y prennent garde, de vérita-
bles infirmes ; j'en connais qui sont inca-
pables d'effectuer une promenade pédestre
de quelques centaines de mètres ! L'usage
trop exclusif de l'automobile finit, en effet,
par donner le dégoût de la marche et mê-
me de tout effort museulaire. Pour avoir
fait trop d'automobile et pour avoir com-
plètement cessé de marcher, certains de
nos amis sont devenus impotents et
n'ont pas tardé à ressentir des troubles
fonctionnels de toutes sortes. Qu'ils s'as-
tréignent à faire chaque jour à pied un
minimum de deux à trois kilomètres. Le
principal est de ne pas perdre l'usage de
nos jambes et de nos pieds ! »
Ne dirait-on pas que nous marchons à
grands pas vers la réhabilitation des
« vieux marcheurs » ? ','
C. de Vorney.
—__— : —
LES NOUVEAUX TARIFS ESPAGNOLS
Madrid, 26 septembre.
D'après une dépêche de Saint-Sébastien
au Heraldo, les négociations du traité de
commerce seraient rompues et les délégués
français repartiraient pour la France.
D'aufre part, le ministre des finances,
après avoir eu une conversation téléphoni-
que avec les délégués espagnols, actuelle-
ment à Saint-Sébastien, a déclaré que les
membres de la commission franco-espagno-
le avaient ajourné leurs séances pour con-
sulter leurs gouvernements respectifs sur
la seconde colonne du tarif espagnol.
, Madrid, 27 septembre.
La rupture des négociations concernant
le traité de commerce avec la France, a
causé une impression pénible dans; le mon-
de commercial, car la France est le mar-
ché le plus important de la production espa-
gnole.
g L'Imparcial dit que l'acceptation préala-
ble faite par l'Allemagne tlu tarif espagnol
n'est pas étranger à cette, rupture.
Hier,. le ministre des finances a déclaré
qu'une ; certaine alarme existait parmi les
industriels catalans dans lia crainte que le
tarif espagnol-ne subisse une réductiçopun e le
vorable à l'im s-trie cotonnièré française.
Mais le ministre a ajouté que l'alarme n'é-
tait pas justifiée, puisque le tarif rie peut
être modifié que par une loi spéciale dISCU
- et votée-par les Cortes.
L'opinion générale de la presse est pessi-
miste.
(V oir te suite en DEUXIEME BDITIONj
CHRONIQUE
Les décors et accessoires du « Chat
Noir » au temps d'Emile Coudeau.
Au beau temps de ce pauvre Emile
Goudeau, ouvrier de la première heure
dans la glorieuse, phalange montmar-
troise, le théâtre du Chat Noir rappe-
lait presque le chariot de Thespis par
la simplicité de la mise en scène, par
l'ingénuité des moyens et l'imprévu
dies effets. La sûlle était de dimensions
médiocres ; le corps humain étant émi-
nemment compressible, on y empilait
cent quatre-vingts personnes environ,
mais il faillait jucher des spectateurs
jusque sur le piano. Cette promiscuité,
ce tassement fut un élément de succès,
assura précisément la communication
contagieuse du rire ou de l'émotion.
Une électricité particulière se dégage
dee foules.
Certes, les ressources scéniques dont
disposaient les amis d'Emile Goudeau
étaient des plus restreintes ; les per-
sonnages de premier plan avaient une
taille réglementaire de quinze centimè-
tres. De par l'inflexibilité de leur os-
sature métallique, tout geste leur était
rigoureusement interdit, hormis le ges-
te grotesque, obtenu au moyen d'arti-
culations ingénieuses, ou encore le ges-
te hiératique et 'ent, celui, par exem-
ple, du prêtre qui bénit, ou enfin le
geste automatique du soldat qui pré-
sente les armes. Certains mouvements
de scène, extrêmement simples, of-
fraient des difficultés insurmontables;
c'est ainsi qu'un personnage qui entrait
par le côté cour ne pouvait sortir que
par le côté jardin.
En revanche, l'exiguité du cadre per-
mettait d'y exécuter de véritables pro-
diges de mise en scène, qui seraient
impraticables dans les théâtres de fée-
rie les plus habilement machinés. Les
changements à vue étaient, pour les ar-
tistes du Chat Noir, jeux d'enfants ;
un orage, avec les sillons fulgurants de
l'éclair, l'éruption {l'un volcan avec ses
coulées de lave rougeoyantes, le bom-
bardement d'une ville en feu, n'ef-
frayaient nullement l'ingéniosité des
décorateurs de la rue Victor-Massé.
Songez qu'il est,plus. facile de simuler
une tempête dans un bocal de poissons
rouges que sur la piste nautique du
Nouveau-Cirque. « Les bouffées de nos
pipes, m'écrivait un des amis de Gou-
deau, suffisaient à couvrir de fumée la
plaine de Marengo ; un chiffon de pa-
pier à cigarettes,, enflammé et lancé pa-
raboliquement, donnait l'illusion parfai-
te d'une bombe, un coup de grosso
caisse reproduisait le fracas de l'explo-
sion. Un verre de vitre, convenablement
peint et mû lenteme-nt devant un bec de
gaz oxydriqué, projetait sur l'écran tou-
te la magie prestigieuse d'une aurore ou
d'un coucher de soleil. »
Quelques instants après que l'obscu-
rité s'était faite dans la salle, le specta-
teur, n'ayant plus aucun point de re-
père visible pour apprécier les propor-
tions et les distances, hypnotisé par cet
écran d'un mètre carré qui seul demeu-
rait lumineux, pouvait croire qu'il assis-
tait de très loin aux scènes qui se dérou-
laient sous ses yeux et ne se rendait
plus compte de la dimension réelle des
personnages.
L'illusion était telle, qu un jour une
bombe ayant enflammé le morceau de
calicot qui servait d'écran, on crut à un
véritable incendie. Il y eut une panique
dans la salle, des crises de nerfs, et, na-
turellement, un éclat de rire général
dès que fut rallumé le bec de gaz, qui
remit toutes choses au point.
La première pièce représentée fut
FEpopee de Caran d'Ache. La science du
dessinateur avait trouvé à s'exercer
dans le long défilé de la Grande Armée
qui exigeait des milliers de personna-
ges, sans compter les masses profon-
des des régiments, figurées au dernier
plan par des bandes de zinc découpées
suivant les lois de la perspective et hé-
rissées d'une forêt d'aiguilles. Mais >
clou de la soirée était l'enlèvement
d'une redoute prussienne par un ba-
taillon du 78 légers, montant à l'assaut
sous une pluie de feu, obtenue simple-
ment au moyen d'un pétard d'un sou
qui fusait largement et couvrait d'étin-
celles tout le champ de bataille.
De graves académiciens, MM. Jules
Lemaitre et Melchior de Vogué, ont dé-
claré — et ceci fait honneur à la fraî-
cheur de leurs impressions — qu'ils
avaient senti passer le frisson de l'en-
thousiasme au moment où le drapeau
français apparaissait, troué de balles,
sur la crête de la redoute..
Le boniment était fait par Salis, au
début, et. soufflé, composé en réalité,
par Eniile Goudeau. Sa grandiloquence
empanachée s'adaptait merveilleuse-
ment au sujet. Mais il fallut, en variant
le répertoire, assurer d'une autre façon
le commentaire obligé des représenta-
tions. Ainsi, la Marche à l'Etoile fut un
véritable poème, mis en musique par
Georges FrageroIIe. On peut citer, dans
le même genre, Roland à Roncevaux,
poème de Georges d'Esparbès, avec mu-
sique de Charles de Sivry. -
C'était le poète Armand Masson, au-
jourd'hui sous-chef du rersonnel à la
Préfecture de la Séine, qui était chargé
de sonner du cor au nom du neveu de
Charlemagne. Il n'y avait qu'une note
à donner, mais il fallait qu'elle fût par-
ticulièrement puissante, afin d'attester
ta vigueur des poumons du paladin. A
cet effet, on mit à la disposition dé Mas-
son un instrument - spécial, composé
d'un tuyau d'arrosage en plomb de cinq
mètres de longueur, terminé à un bout
par une embouchure de trombone, e
à l'autre bout, donnant sur la cour de la
maison voisine, par un entonnoir de
marchand de vins formant pavillon. « Je
vous certifie, dit d'excellent, mandarin
qui rit encore à ce souvenir folâtre, que
le son du cor fut bougrement triste au
fond des bois, tellement triste et lellew
ment horrifique Tiie les voisins se plan
gnirent et qu'il fallut pratiquer une cou*
pure dans la partition. »
La forme définitive de la pièce d'onl.
bres chinoises, avec toutes les ressour-
ces qu'elle comportait, fut créée par un
jeune homme qui sortait alors de l'E.
cole centrale, le dernier venu du batail.
Ion sacré de Montmartre. C'était Mau-
rice Donnay. Il produisit successive*
ment au « Chat Noir » Phryné, une fan-*
taisie grecque adQrablement. perverse
et une sorte de revue symbolique inti-
tulée Ailleurs, critique légère du pes-
sumisme contemporain, yarodie feans
façon de l'épique promenade de Dante
à traveirs les sept cercles infernaux,-
terminée par l'alleluia des forts, qui
doivent être aussi les joyeux, car la for-
ce véritable ne va point sans l'alacrité
morale, signe évident de la santé de
1 esprit.
Et dans les cycles de l'ailleurs
J'ai vu l'au-delà salutaire ;
Et je pressens des temps meilleure,
Non dans le ciel, mais sur la terre
Pour ceux de bonne volonté.
Le succès des pièces d'ombres fut vif
auprès des artistes et des lettrés ; il en
rejaillissait une bonne1 part sur les chan-
sonniers ordinaires de la maison qui
fournissaient les intermèdes. Mais tou-
te chose a son revers. L'invasion du
gros public, venant au bruit de la pa-
rade comme à la foire, relégua au se-
cond plan les poètes délicats, habitués
au suffrage de l'élite, l'entreprise tour-
na à l'industrialisme. La chanson seule
persista à s'envoler des hauteurs de
Montmartre. Il n'y a pas d'art inférieur,
après tout, et je dois convenir que Ist
chanson était, au Chat. Noir, transfor-
mée, glissant de plus en plus vers le
café-concert, brillamment représentée,
dans les débuts surtout. C'était le temps
où Fragerolle donnait la série de ses
Chansons de France, où Paul DelmeC
modulait ses premières mélodies, oi).
renaissait la satire alerte aux couplets
cinglants, toujours mise à la dernière
mode de l'actualité, pour tomber en-
suite à la rosserie pure -et .simple, à la
gouaillerie trop facile. ,
Mais ceci dépasse les limites de cette
évocation familière.
Noël Amaudru.
LE CONSEIL DE CABINET
Les ministres et les sous-secrétaires d'E-
tat se sont réunis hier matin en conseil
de cabinet au ministère de la justice, sous
la présidence de M. Sarrien.
, MM. Etienne et Bérard n'assistaient pas
à la délibération.
Les ministres des affaires étrangères ci
du commerce ont mis le conseil au •cou-
rant des négociations commerciales qui se
poursuivent entre la France et l'Espagne.
Le conseil a décidé qu'au cas, où un ac-
cord ne serait pas intervenu à la date du
1er octobre, le modus viuendi pourrait être
prorogé pour une période d'un mois.
Les ministres ont ensuite procédé à l'ex-
pédition des affaires courantes.
Un conseil aura lieu sous la présidence
de M. Fallières dans le courant de la se-
maine prochaine.
, , — m
L'ÉQUIPEE DE L'ABBÉ DELARUE
L'ex-curé de Châtenay n'a pas disparu. -
Il reçoit des visites. — Identité confir-
mée. — A Châtenay.
Bruxelles, 27 septembre.
On dit que le curé de Châtenay est tou-
jours rue de Constantmople ; son départ
n'était qu'une feinte. L'abbé Ddarue et
Mlle Frémont n'ont pas quitté leur loge-
ment de touet la journée.
Il a reçu un grand nombre de lettres et
le calme se fait autour de se maiosn.
L'ami d'enfance
L'abbé DeJarue avait pour ami d'enfanœ
un marchand de vins du boulevard Saint-
Germain, M. Dugué. C'est chez lui qu'il
s'arrêta un moment le 24 juillet, avant de
partir pdUr Etampes et disparaître uéfmi-
tivement.
M. Dugué est parti pour Bruxenes afin
de s'assurer personnellement de 1 identité
du fugitif. Il était accompagné d'un réèao-
teur de la Patrie qui a publié le récit sui-
vant de l'entrevue des deux anciens cama-
rades
— Tu vas bien 7 dil l'abbé Dclârue en prenant
la main de M. Dugué.
- — Cest à toi qu'il faut demander cela, a toi,
malheureux que je reconnais maintenant et qui
as trahi tous tes devois et trompé tous ks amis,
joué un rôle hypocrite et honteux. :
Pourquoi n'as-tu pas écrit aux tiens pour .e®
rassurer ? Pourquoi n'as-tu pas empêché quanA
il en était temps encore ce, service de Requiem,
célébré à Châtenay pour le repos oe ton âme
Réponds à ton ancien camarade qui a le droit,
au nom de ta famille et de tes anus, de te de-
mander des comptes et des explications.
— Je me justifierai, je ferai face à ceux qui
m'insultent, je montrerai que j'ai encore une
conscience, quoi qu'on en dise.
Je suis coupable, oui, mais je ne pouvajs pas
rester plus longtemps là-bas, vous le savez
bien. La situation particuliero aie Marie — Mlle
Frémont est enceinte de six mois — ne me per-
mettait pas de dissimuler plus longtemps. J al,
perdu la tête, ie me suis enfui ; ip nai pas eu
le courage nécessaire dans la suite pour arrêter
la campagne et mettre fin à des recherches qui
devaient rester vaines. J'ai expliqué tout cela
dans la lettre écrite à mes parents.
— Qu'às-tu fait du 24 juillet au 24 sepembre t
— Je suis venu directement à Mons, puis à
Bruxelles dès le 25 juillet. Je n'ai plus bougé,
d'ici et c'est par les journaux que j'ai appris,
qu'on me recherchait. Au bout de quinze jours
je cessai de les lire ; jespérais toujours que le
si'enoe se ferait sur mon nom. Sans la presse
j'étais sauvé. Ah 1 j'ai eu tant d'angoisses t..
— Dis plutôt que sans cette presse la familta
tout entière serait dans le deuil et la douleur,
reprend M. Dugué. Cuest cette presse qui V4
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