Titre : Le Rappel / directeur gérant Albert Barbieux
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1909-07-11
Contributeur : Barbieux, Albert. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328479063
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 79956 Nombre total de vues : 79956
Description : 11 juillet 1909 11 juillet 1909
Description : 1909/07/11 (N14366). 1909/07/11 (N14366).
Description : Collection numérique : Commun Patrimoine:... Collection numérique : Commun Patrimoine: bibliothèque numérique du réseau des médiathèques de Plaine Commune
Description : Collection numérique : Commune de Paris de 1871 Collection numérique : Commune de Paris de 1871
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7545099d
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-43
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 07/01/2013
N 14366 - 21 Messidor An 117. CINQ CENTIMES LE NUMÉRO Dimanche 11 Juillet leOA. — Nil 14!
PaMatonri - --
AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Oiaw IMi mb liswii eau
Paris 2 fr. 5 fr. 0 fr. 18 fr.
: Départements 2 — e - 41 — 20 -
Union Postale -
Union Postale 3- 9- 16- 32 -
r
Adresser toutes les Communications an Directeur
AUGUSTE VACQUERIE
ANNONCESi
MJTI. LAGRANGB, CERF & CRT
6, Place de la Bourse
fil cax BUREAUX DU JOURNAL 1.
Adresser Lettres et Mandats au Directeur
ADMINISTRATION & REDACTION : 53, rue du Château-d'Eau : Téléphone 438-14. — De 9 heures du soir à 2 heures du matin, 123, rue Montmartre : Téléphone 143-93
TRIBUNE LIBRE
i '<'
France - -
!" France' et Russie
'tt.' ;,
La semaine qui s'est écou-
lée fut une « semaine rus-
se )). Manifestations de pres-
se ou de tribune contre le
voyage du tsar en France,
incidents Harting-Landesen
concernant la police russe chez nous,
-enfin, arrivée à Paris d'une délégation
parlementaire de la Douma comprenant
.des membres de tous les groupes, sauf
ceux d'extrême droite et ceux d'extrê-
me gauche.
[ Pour les groupes d'extrême droite
russe, la France et l'Angleterre sont
des pays suspects en raison de leurs
institutions libérales. Les tenants de
l'absolutisme autocratique etthooora-
tîque ne tiennent pas du tout, et cela
-s'entend, à prendre contact avec des
nations qui s'honorent d'avoir déve-
loppé la liberté politique et assuré la
liberté religieuse. Leur abstention n'a
; étonné personne.
i A leur tour, les membres des groupes
'd'extrême gauche sont retenus par des
.préventions de même nature, sinon
semblables ; ceux-ci reprochent à la
France et à l'Angleterre d'avoir pactisé
.avec le tsarisme. Leurs amis français
et anglais font valoir chez nous et de
l'autre côté de la Manche que le gou-
vernemcnt de Saint-Pétersbourg nra pas
manqué une minute de pratiquer les
arrestations arbitraires, les exécutions
capitales, les déportations, les tracas-
series policières et administratives ;
ils allèguent que les persécutions de
Juifs et les Saint-Barthélémy dirigées
contre eux ont été encouragées officiel-
lement, bref,- les partis russes révolu-
tionnaires voudraient voir les puissan-
ces occidentales et libérales mettre le
gouvernement de Saint-Pétersbourg,
comme on disait naguère, « au ban de
l'humanité. »
Tandis que les partis 'd'extrêmes
gauches de Russie, de France, d'Angle-
terre, adoptaient une même ligne de
-conduite tsarophobe, les partis de gou-
vernement russe, français et anglais
décidaient de manifester leur sympa-
thie réciproque et les représentants de
- la troisième Douma se montrent en-
chantés de leur pélerinage à Westmins-
- ter, au Palais-Bourbon et au Luxem-
fcourg. ,
; Il est facile rde comprendre les rai-
sons de leur contentement. D'abord,
ils considèrent que ce contact direct
de la Douma avec les assemblées re-
* présentatives de la France et de l'An-
gleterre est une consécration de leur
existence et que le tsar ne saurait plus
porter atteinte à la représentation na-
tionale russe depuis qu'elle a communié
avec les mandataires des deux autres
nations de la Triple Entente, l'amie et
l'alliée. -
Ce sentiment, M. Mylioukof, le leader
des K. D. ou constitutionnels démocra-
tes (qui sont dans l'opposition 'de la
Douma), l'a très nettement exprimé :
« Ce voyage, a-t-il dit, marque une
idate importante dans ) 'histJÎ.Je de no-
lîre jeune Parlement russe. Il a consa-
cré son autorité morale, il lui a, en
quelque sorte, donné une existence eu
sorte, donné ;0 eu.
Pour notre part, nous sero is cn-
chantés aussi que ce voyage puisse
Servir au développement et à h! conso-
lidation des libertés publiques russes,
qui seules assureront à l'avenir une ère
de sécurité pour les personnes dans
l'immense empire, quand les forcenés
,(le la violence et les agents irresponsa-
bles de la bureauratie auront fléchi
sous le parlementarisme.
Les parlementaires russes ont, d'ail-
leurs, une seconde raison de se montrer
satisfaits : c'est qu'ils considèrent leur
- voyage, et celui du tsar, comme un
gage du maintien actuel des forces di-
plomatiques en Europe.
Il y a, en effet, en Allemagne, une
école de diplomates qui voudrait ra-
mener la Russie dans le giron d'une
Triple Alliance qui fonctionna réguliè-
rement pendant la plus grande partie
..(Iu 19e siècle, la Triple Alliance de l'AI-
lemagoo, de l'Autriche et de la Russie.
Cette' combinaison, ce rapproche-
ment des Etats les plus arriérés au
point de vue politique, serait apprécié
dans toute l'Europe centrale et dans
l'Europe orientale par ceux qui redou-
tent l'avènement, de nouvelles couches,
le triomphe de nouveaux partis : cette
- Triple Alliance là se souviendrait fort
bien qu'elle est la fille ou la petite-fille
tie la Sainte Alliance et elle userait vo-
lontiers de sa formidable force mili-
taire pour faire en Europe une police
internationale destinée à pourchasser
• les partisans des idées démocratiques
et SOCiales.
Les parlementaires russes sentent
fort bien ce qu'ils perdraient dans une
orientation semblable de la diplomatie
de leur pays ; ils préfèrent de beaucoup
une entente très serrée avec l'Angleter-
re et la France : nul doute qu'ils ne
soient ainsi d'accord avec leur intérêt
particulier et les intérêts généraux ae
la civilisation.
D'autre part, ils sont russes et il
n'est pas de russe qui n'ait été meurtri
dans son amour-propre de la reculade
que le cabinet de Berlin a imposée au
cabinet de Saint-Pétersbourg dans l'af-
faire de Bosnie-Herzégovine. Si l'Alle-
magne a voulu amener à elle la Russie.
sa caresse a été un peu rude et soagant
de fer n'était point enveloppé de ve-
- lours. -
Les voyageurs parlementaires de
Saint-Pétersbourg sont venus nous dire
qu'ils espéraient en une renaissance
de la cordialité franco-russe. Ils ont
-rappelé Toulon, Cronstadt, l'amiral
Avelan, les jours de grand enthousias-
me, et aussi la période de refroidisse-
ment. Ils espèrent un renouveau de
sympathie cordiale et chaude.
Il est facile aux hommes qui se con-
finent dans l'opposition doctrinaire et
théorique de répondre non possumus et
pe baser leur refus sur un réquisitoire
à l'adresse du tsarisme. C'est d'autant
plus facile qu'au bénéfice d'une oppo-
sition de « groupe » on joindra le bé-
néfice du consentement national à la
thèse opposée. Les démocrates français
qui envisagent le problème avec le sou-
ci de le résoudre comme ils feraient
s'ils avaient à engager leur responsabi-
lité, ne peuvent chercher ni à rompre
une entente, considérée comme utile à
l'équilibre européen, ni à refuser leur
sympathie à des libéraux ou à des dé-
mocrates russes qui manœuvrent pé-
niblement au milieu des écueils.
Il faut souhaiter que la Triple En-
tente serve la cause de la paix en Eu-
rope, comme la cause de l'humanité et
de la liberté en Russie. Mais tout cela
n'est pas, pratiquement, irréalisable.
Albert AIILHAUD.
LA POLITIQUE
MAUVAISE METHODE
Entre une tranche du débat
sur la Marine et une autre
trancKe de débat sur la révi-
sion .douanière, l'ordre des dé-
libérations de la Chambre a
- glissé hier une tranche suc-
culente de 1 interpellation sur la politi-
que générale.
Ce savoureux sandwicn paraît du
goût de nos parlementaires. La façon
dont ils panachent leur:, menus dénote
des estomacs délicats et qu'il faut sti-
muler par la variété.
fiant pis ! Au moment où la session
prend fin, le bilan est facile à faire et il
se - résume à peu de chces pour ne pas
dire rien. Quelques-uns de nos pubiici-s-
fes parlementaires auront beau s'escri-
mer contre la malveillance des adversai-
res de droite, ils auront beau prouver
qu'on s'attaque, en les combattant, plus à
leur place qu'à l'honneur de leur dispu-
ter un mandat, la démocratie élèvera le
débat au-dessus de ces misères de con-
currents et elle cherchpn. si ses-, affaires
ont été bien faites et à quelles mains
stires elle les doit conter à l'avenir
La responsabilité de la majorité sera
lourde ; elle aura l'apparence d'avoir
voulu simplement amuser la galerie et
le tapis. En quête de résultats réels, sé-
rieux, on ne la vit jamais passionnée.
Elle éluda les débats, gagna les fins de
sessions, esquiva les difficultés, et sa
formule sembla être : « Avoir l'air
d'avoir l'air. fi
• Cepeildant, nul député n'ignorait que
c'était d'une très fâcheuse méthode que
de diviser les tiV.Ubératic ns, de ne point
les pousser à bout, les unes après les au-
tres. Nul député-ne pouvait ignorer que
ce n'est pas la même chose, mêler et con-
fondre, juxtaposer les questions, d'une
part et sérier les questions, d'autre part.
Il faut sérier les questions, disait
Gambetfa, qui lut un grand instituteur
de la démocratie, dans ses beaux jours.
Il faut embrouiller les questions et
s a bstenir de les résoudie, pensent la
plupart des radicaux tellement impré-
gnés de clemencisme qu'ils ont laissé le
maître instituer l'incohérence, la confu-
sion et Je désordre en méthode do gou-
vernement
00
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
!Auiowd'hui samedi :
Lever du soleil à 4 h. 9 du matin ; cou-
oher à 8 h. 1 du soir.
Courses au Trerablay. (Prix- daller On).
AUTREFOIS
Le Rappel du 11 juillet 1873 1.
En Prusse. les conseils municipaux
n'ont qu'un droit de présentation. Si le
maire qu'ils présentent est refusé par le
gouvernement, ils en présentent un se-
cond. Si le second a le sort du premier,
alors leur droit est épuisé, et le gouverne-
ment nomme qui lui plaît.
C'est, comme on le voit, la nomination
livrée au bon plaisir du gouvernement. Tel
est le projet que les larouches décentrali-
sateurs du centre droit vont déposer sur
le bureau de la Chambre en réclamant
rU1'gence.
l'urgence..
une question va être adressée au mi-
nistre des finances par un député de la
gauche pour lui demander de faire cannat-
tre quels sont ses projets pour le règle-
ment de la partie du budget qui presse.
Il est nécessaire que la Chambre statue
avant la prorogation sur les contributions
directes, les conseils généraux devant,
dans leur session d'août, régler l'emplot
des centimes additionnels d'après le. vote
de la Chambre.
Tous les budgets municipaux sont en
suspens par suite du mutisme financier du
gouvernement.
— Le jury international des beaux-arts
de l'Exposition de Vienne a terminé ses
travaux. La France a obtenu 247 médail-
les, dont 138 pour la peinture, 34 pour la
sculpture, 26 pour l'architecture et 49 pour
la gravure.
* C'est te pays le mieux partagéi.
IiEDUEkejUIiW-30S
A la suite d'un .envoi de témoins par M.
Caiillaux à M. Charles Bos, le ministre des
finances et l'ancien député sont al'lés hier
« sur le pré ».
Jeudi, dans la cour d'honneur du Luxem-
bourg, M. Charles Bos avait violemment
pris à parti M. Caillaux à raison d'un dis-
cours prononcé à la tribune de la Chambre.
Le ministre, menacé par « l'interpellateur »
extra parlementaire, avait d'un geste fait
mine de se défendre de la canne, puis il
s'était ressaisi et lança cette riposte:
« Frappé par vous ! Bah ! »
La questure du Sénat voulait poursuivre
M. Charles Bos pour attaque à un magis-
trat dans une enceinte parlementaire, maïs
avec sa crânerie ordinaire, M. le ministre
des finances a préféré régler son affaire
lui-même. Il a prié MM. Dalstein, gouver-
neur de Paris et Le Hérissé de lui servir
de témoins et de s'aboucher avec M. Char-
les Bos.
La rencontre a eu lieu hier, à quatre heu.
res, au polygone ide VinoonnP'!'l. deux balles
ont été échangées sans résultat.
DU calme
—
Les terrassiers de Draveil-Vigneux sont
de nouveau en grève.
Jusqu'ici, dans ce nouveau conflit, ils font
preuve d'une sage modération.
Ils re&pectent pleinement la liberté du
travail de -ceux de leurs camarades qui sont
payés au tarif syndical et qui apportent
une cotisation quotidienne de un franc pour
les chômeurs.
A part quelques incidents regrettables,
mais isolés et ne procédant pas d'un état
d'esprit général, il semble bien que le con-
flit actuel puisse se terminer sans trop de
déployables violences. -
Les terrassiers n'ont qu'à conserver à
leurs revendications un caractère exclusive-
ment corporatif et à tenir soigneusement
éloignés de leur mouvement certains agita-
teurs professionnels, qui sous prétexte de
propagande et de solidarité, font le jeu de
ceux qui sont partisans du désordre pour
avoir l'occasion de rétablir l'ordre.
l --- -----
« L'EMFSE DES ftBS »
-+-
Il ne se passe pas de jours où M. Cle-
menceau ne soit pris en llagrant délit.
Voici la lettre ouverte que vient d'adres-
ser à « l'Empereur des Flics » une des yic.
Urnes de ses policiers :
A la séance d'interpellation du vendredi
2 juillet courant, vous avez affirmé à M. Fer-
dinand Buisson — Journal o/liciel. p. 18 — que
la réunion du personnel des postes a Quimper,
le 2 mai, étiit une réunion privée où la porte
était ouverte à tout venant. Vous avez affirmé
également que les rapports de police dont on
a fait état pour incriminer les orateurs qui ont
pris part aux diverses réunions sont des rap-
ports des commissaires de police, ayant assisté,
ceints de leur écharpe, à ces réunions.
J'ai le devoir. M. le président du conseil, de
déclarer que vos affirmations sont formellement
inexactes et que vous avez été mal renseigné,
ce qui est plus que regrettable.
La réunion de Quimper, dont vous a parlé
M. Ferdinand Buisson, était, une réunion ex.
clusivement privée. Par faveur spéciale, deux
instituteurs y assistaient en dehors du perron-
nod des P. T. T. La porte avait été soigneuse-
ment fermée et gardée ; le commissaire de po-
lice n'assistait pas a la reunion. mais nous
avons appris,, et nous avons la certitude qu'un
mouchard était dissimulé dans l'orchestre.
Et le lendemain 3 mai, j'étais suspendu de
fonctions avec mes camarades Le Tfeïs, Masson
et Hily, parce que le rapport du.caounissaire,
de police signalait que nous avions tenu des
propos antimilitaristes et que nous avions pré-
conisé la grève générale des postes, ce qui était
rigoureusement faux.
Monsieur le président du conseil, je vous de-
mande instamment, au nom de la liberté et de
la justice, que votre nom devrait symboliser,
de vouloir bien faire une enquête très précise
au sujet de la réunion du 2 mai, iL Quimper,
qui a coûté la révocation à trois agents des
costes et la rétrogradation à un quatrième, au
sujet de la réunion du 9 mai à Bordeaux, a, la-
Quelle j'ai également pris la parole. Vous ac-
Querrez ainsi la certitude que ces deux réunions
étaient privées, que le commissaire de police
n'v assistait pas, et que c'est cependant d'après
les seuls renseignements fournis par ce magis-
trat que le conseil de discipline a prononcé plu-
sieurs révocations.
CFRVIÈRE,
Ancien rédacteur à la direction des Ser-
vices télégraphiques de Paris, révoqué
par ordre.
Ce qui n'empêchera d'ailleurs pas M. Cle-
menceau de continuer à affirmer avec sa
superbe ordinaire que la police politique
n'existe pas.
♦ ———————————
ta Statuomanie
.8.
Il est toujours agréable de se rencontrer
avec un esprit aussi avisé que M. Lucien
Descaves
Dans un article publié par le Journal,
M. Lucien Descaves proteste, à son tour,
contre la manie que nous avons de subs-
tituer à nos fontaines ou bosquets d'agré-
ments, d'affreuses statues qui finiront par
convertir petit à petit, nos places publi-
ques en succursales du Père-Lachaise.
M. Descaves revient, à ce propos, à une
idée que nous avons maintes fois dévelop*
pé dans le Rappel.
Nous avons, en effet, signalé 'des empla-
cements qui pourraient satisfaire notre sta-
tuomanie sans nuire à la beauté de 4a ca-
pitale. Nous avons fcité notamment les
nombreuses niches vides qui, des guichets
du Carrousel, jusqu'au Pavillon Marsan
donnent un si étrange aspect à cette partie
de la façade du nouveau Louvre.
M. Desoaves signale également ces ni-
ches et se demande pourquoi on ne les
peuple pas de tous les bonhommes qui va-
lent, à Paris, la disparition des fontaines
et des corbeilles de fleurs.
Nous reprenons la question avec notre
émineht confrère et nous appelons sur ces
vilaines niches vides, toute l'attention ai
avertie de M. Dujardin-Beaumetz.
Nous espérons également que le Conseil
municipal fera disparaître les statues par-
tout où elles ont si mabheureusement rem-
placé des massifs de fleurs ou le plus mince
filet d'eau.
Paris manque de fleurs. Sa décoration
urbaine est d'une banalité désespérante.
Noua avons les plus habiles jardiniers,
nous possédons des architectes incompara-
bles et nous conservons aux grandes artè-
res de Paris, un cachet antiartistique vrai-
ment incompatible avec notre réputation
de bon goût, *
M. Lucien Descaves devrait s'atteler fi
la besogne et venir avec nous à la res-
cousse pour combattre la statuomanie et
prôner l'embellissement de Paris par les
fleurs..
Il y a une cinquantaine de niefies vi-
des sur la façade du Louvre. Mettez-y des
statues de généraux et d'hommes 'illus-
tres ; mais, laissez aux places publiques
leur ravissante parure de verdure, leurs
charmantes fontainettes chantant leur
fraîche chanson au milieu des roses et des
œillets.
Au diable les redingotes en pain de su-
cre, les jaquettes en bronze et les vestons
en granit ! les fleurs ! Vive '?aris ra-
ieuni et magnifié par la Nature !
Jean Clerval.
Un Impôt nécessaire
Les nouveaux impôts proposés par l'é-
minent M. Caillaux sont assez battus en
brèche. Il y en a pourtant un. parmi eux,
qui est non seulement un impôt juste mais
un impôt nécessaire. Nous voulons parler
de la taxe sur les huiles destinées aux au-
tomobiles.
Si on ne veut pas de cet impôt, il faudra
en trouver un autre qui atteigne les auto-
mobiles à grande vitesse. Il est démontré
aujourd'hui que les automobiles coûtent
plus au Trésor qu'elles ne lui rapportent
Consultez, à ce propos, le premier canton-
nier venu et il vous prouvera que les au-
tomobiles pneus » dérapants, détériorent
les routes les plus solides au bout d'un
mois. Ce fait est tellement exact qu'il sert
même de réclame à des fabriques de roues.
Ces fabriques se vantent, sur des affiches
que tout le monde peut lire, que leurs
« pneus usent la route » et « boivent l'obs-
tacle ».
Tout cela est très joli et très alléchant ;
mais ce qui l'est moins, c'est la carte à
payer qui est soldée par les piétons, les
cyclistes et les voituriers qui, eux n'usent
pas la route et, en fait d'obstacle, ne boi-
vent que la poussière des autos.
La taxe actuelle, qui pèse sur les auto-
mobiles, est insuffisante pour couvrir la
dépense supplémentaire provoquée car les
« buveurs d'obstacles et les ravageurs de
routes ».
Est-il juste de faire payer ce supplément
de charges à ceux qui en sont plutôt les
victimes que les auteurs ?
Nous posons la question à tout homme
de bonne foi.
Un impôt complémentaire est donc néces-
saire. Si IOn ne veut pas le mettre sur les
huiles spéciales, qu'on le mette sur le
nombre de chevaux-vapeur.
Pourquoi ne frappe-t-on pas d'une taxe
supplémentaire -pttr cheval-vapeur toute
automobile de plus de vingt chevaux ?
Ce sont précisément eux qui dégradent
nos routes et les rendent vite impratica-
bles. Il est donc juste de leur faire payer
une partie des frais qu'ils occasionnent.
Nlous ne parlons pas ici d'un impôt
somptuaare mais d'un impôt nécessaire.
Quclle est, .en ce cas, la Chambre républi-
Quelle qui hésiterait à sanctionner un véri-
table acte de justice ?
- Jean Clerval.
A LA CHAMBRE ,,:
I ■>>!■ | NI
Révision Douanière
Crédits Supplémentaires
Politique Générale
01) achève la discussion générale de la première
Oq vote les seconds
- Et oq poursuit le débat sur la troisième
-—-——
Pour de longues semaines ils vont bien-
tôt s'en aller dans leurs circonscription —
mais avant de se séparer, les députés en-
tendent travailler sans répit — ou du moins
ceux qui viennent assister. aux séances.
Matin et soir ils siègent.
Dès neuf heures, sous ta présidence de
M. Berteaux, Ils se remettent avec achar-
nement à la révision douanière.
Et c'est l'occasion d"une très remarqua-
ble.e't lort éloquente controverse entre MM.
Jaurès et Aynard. Des idées sont échan-
gées ; des conceptions sont exposéas ; —
ce sont là des débats qui prouvent que le
parlementarisme '— quand il entend dé-
laisser les mesquines personnalités et les
petites ambitions pour discuter des grands
problèmes et des intérêts généraux — est
le rouage essentiel d'une démocratie.
Libre échangisme
M. Jaurès désire que la révision doua-
nière ne puisse, en aucun cas, soulever de
difficultés internationales, et, dans ce but,
il dépose l'amendement suivant :
La Ghamv invite le gouvernement à provo.
quer une co. rence internationale de toutes les
puissances adressées, en vue d'une réduction
graduelle et simultanée des tarifs des douanes,
et décide le renvoi des propositions de loi à la
ommissioD.
C'est, pour le leader socialiste, prétexte
à exposer, de magistrale façon, les théo-
ries économiques de son parti.
Inutile de dire que le protectionnisme
: passe un mauvais quart d'heure. Quand on
s'engage' dans sa voie, il est impossible de
savoir, affirme M. Jaurès, où on s'arrê-
tera — chaque pays élevant ses droits de
douane en proportion croissante de l'aug-
mentation décidée par les nations voisines.
Si la motion qu'il présente semble, à
première vue théorique, elle aura néan-
moins un avenir pratique prochain.
U y a dans tous ces pays une poussée d'orga-
nisation sociale analogue, il existe entre eux une
homogénéité économique suffisante pour que
des accords puissent se conclure et des échan-
ges "e produire sans que l'équilibre vital de
chacun d'eux soit menacé.
On nous objecte les Etats-Unis, vaste monde
fermé qui aspire à se suffire à lui-même. Pre-
nons garde, ce n'est qu'une apparence. Si nous
aggravons notre politique de protection doua-
nière, nous courons deux risques : écarter défi-
nitivement du libre-échange l'Angleterré décou-
ragée par le protectionnisme universel, et en.
foncer davantage, les Etats-Unis dans le protec-
tionnisme auquel ils ne sont pas aussi -attachés
au'on le prétend.
: Ce que nous proposons est la sagesse même.
Il ne s'agit pas d'une aventure, mais d'une poli-
tique prudente, conciliante, graduelle. L'initia-
tive de la France rencontrera dans le monde,
i'en suis convaincu, une grande sympathie.
Et à mesure que vous faciliterez davantage
les échanges entre nations dans l'ampleur du
marché moderne, vous ferez disparaître cet es-
nrit de défiance qu'engendre la guerre de tarifs,
et vous aurez ainsi préparé la réalisation d'un
autre rêve, qui a été celui de nos grands ancê-
tres, le régime de la paix durable entre les na-
tions. (Vifs applaudissements.)
M. Aynard
M. Jaurès est vigoureusement applaudi,
non seulement par ses amis, mais aussi
par tous les libre-échangistes sans distinc-
tion de partie.
M. Aynard en est tout ennuyé.
Aussi l'honorable député du Rhône inter-
vient-il longuement pour prouver qu'il va
faire « le même geste » que M. Jaurès,
mais dans des vues différentes.
Son exposé ne va pas sans un certain
tumulte — il eut même mieux valu qu'il y
en eût un petit peu moins.
MM. Jules Guesde, Thierry er. Paul Cons-
tants ont une at.titude étrange. Enfin !.
n'insistons pas. La péroraison du discours
de M. Aynard n'est pas sans valeur. D'ail-
leurs, la voici :
Nous repoussons avec la dermcrc cnorgie tout
ce qui pourrait confondre les questions douaniè-
res. matérielles, avec les nécessités qui s'impo-
sent pour garder la patrie grande et glorieuse.
(Applaudissements au centre.)
Votons ensemble, monsieur Jaurès, UJaisr.
fléchissez à tout ce que fait votre parti à ren-
contre du but que vous poursuivez.
Poursuivre une œuvre de paix, c'est bien ;
Doursuivre une œuvre de liberté, c'est encore
miux, si vous mettez véritablement en pratique
les prinfl^èS de notre école. Mais ce jour-là il
niy aura plus de socialisme. (Applaudissements
au centre.)
Cherchons ensemble cette vérité, cherchons à
rapprocher les peuples, sans rien sacrifier tou-
tefois de l'idée de patrie ; mettons entre eux
un peu plus de charité; pour employer un mot
d'autrefois, appuyons leurs intérêts sur la scien-
ce et l'intelligence ; je crois que pour aujour-
d'hui c'est poursuivre une chimère, mais
poursuite de cette chimère est encore ce qu'il y
a de plus noble dans l'humanité ; elle nous
achemine vers des jours meilleurs et j'espère
crue, dans les siècles futurs, les Jaurès colla-
boreront avec les Aynard. (Vifs applaudisse-
ments au centre.)
Le mariage de la carpe et du lapin î
Il ne déplaît pas toutefois à M. Cruppi,
qui en profite pour se procurer un réel suc-
ces.
L'honorable 'ministre du commerce "ac-
cepte dans difficulté la première partie de
la proposition de M. Jaurès.
Dans celle-ci, il y a, dit-il, la motion en elle-
même et le commentaire éblouissant d'éloquen-
ce que M. Jaurès en a donné à la tribune.
Il a développé plusieurs idées fécondes et pra-
tiques que j'approuve entièrement : par exem-
ple, il a parlé, avec faste ruison, 'de la néces-
sité de l'expansion fi l'étranger de notre com-
merce agricole.
Mais re dois ajouter que nos agriculteurs font
déilà des efforts considérables en ce sens que
notamment nos exportations de beurra aii-j-
.mentent chaque année, et nos populations ru-
rales, de plus en plus laborieuses et intelligentes
savent parfaitement développer leurs rela-
tions commerciales avec l'extérieur.
Après le commentaire, je reviens fi la molion.
M. ItŸ"fitlrd, dans un Tangage exguis; a dit
jpy'clie est peut-être chimérique, mais certaine-
ment généreuse. Comment le gouvernement
pourrait-il s'opposer à cet effort international
en vue d'une détente universelle douanière t
(Applaudissements.)
A la demande de M. Klotz, la Chambre
consent à statuer sur ce projet par divi.
sion, après avoir subi MM. Nectoux, d'E-
lissagaxey, Vaillant, Easies et Camuzet.
Au demeurant, la première partie de 1,1
motion Jaurès est votée par *i(î2 voix co!),>!!
tre 79.
M Jaurès, satisfaitdoe cet intércssaîil
succès, renonce à la seconde partie de sa
motion.
Il avait compté sans M. Vaillant, qui la
reprend.
Or, elle est particulièrement grave, puis.
qu elle aurait pour objet d'empêcher le
passage aux articles du projet.
M. Vaillant est battu par 488 voix con;..
Ire 65 — et, dès la rentrée, les tarifs se-
ront révisés.
Il faut souligner, en passant, que ces vio4
tes sont un succès considérable et pour le
ministre du commerce et pour la commis-
sion. Et c'est justice, car le ministre, com-
me les commissaires, ont fourni une som-
me considérable d'efforts et de désintéres.
sement.
» «■
1 Séance de l'après-midi
Crédits supplémentaires
A la séance de l'après-midi, la Chambre
discute un assez gros cahier de crédits
supplémentaires.
Sur les 1,800,000 francs dlstinés aux vic-
times des tremblemenfs de terre du Midi,
M. Pelletan intervient pour que le projet
soit voté avant les vacances et élargi.
M. Doumer, rapporteur général, est d'ac-
cord.
M. Paul Conetans critique la pratique dw
crédits supplémentaires et charge à fond
contre le Maroc — si ce n'est' contre les
Marocains.
M. Georges Rerry se prononce contre le
transfert du Conservatoire, du moins con-
tre le transfert immédiat. M. Tournade vou-
drait, au contraire, qu'il fut déplacé..,
mais plus tard !
Tout de suite, dit la majorité, qui adopte
les crédits par 409 voix contre 69.
«♦»
Politip générale
Il est' cinq heures. Il est temps, esliwe.
t-on, d'en revenir à l'ordre du jour et de
discuter autour de la politique générale.
M. Joseph Reinach déclare que son in-
tervention n'a pas pour but de critiquer le
passé — on s'en doutait un peu — imis
de savoir quelle sera l'attitude du gouver-
nement d'ici les élections.
Le statut des fonctionnaires aboutara.
t-ii ? Et la réforme électorale ? Que devient-
elle ?
A diverses reprises, cette discussion a été
ajournée et nous ne croyons pas que le SOu.
vernement fasse obstacle à ce qu'elle vienne en
tête de la prochaine session. Mais une note hl-
lure officielle parue ces jours derniers nous sem-
ble motiver quelques réflexions.
Nous demandons s'i! est possible que le gou-
vernement, après s'être en principe prononcé
en faveur du scrutin de listé, accepte que tes
prochaines élections générales aient lipu au
scrutin d'arrondissement. (Très bien ! sur divers
bancs.)
M. Charles Benois.t, grand-père de la re-
présentation proportionnelle, exulte.
La désaffectation
du parlementarisme
Il y a, constate M. Reinach, un mouve-
ment générai de lassitude, de décourage-
ment contre la représentation parlemen-
taire. C'est pour le régime lui-même un
gros danger qu'il est urglnt de dissiper.
C'est aujourd'hui, constate M. Reinach, un më-
contentement profond, qui s'affirme tantôt par
des doléances, tantôt par des réclamations plus
vives, tantôt enfin par une lassitude qui cons-
titue selon moi le symptôme le plus grave 21
le plus alarmant.
Dans toutes les parties de l'opin'on, cormne
dans le monde de la jeunesse et cc-!ui de la
science dont parlait l'autre jour M. Jaurès, le
détachemrit du régime se manifeste.
Le malaise s'accentue dans le parti républi-
cain lui-même et il n'irait plus à la bataille
avec le même entrain, fa même allégresse
qu'en 1906.
La gouvernement sans doute a sa large part
dans cette situation. J'ai connu un éminent his-
torien qui disait : « Depuis Clovis, la Chambre
a toujours été mal gouvernée. » (Rires,) Le gou-,
vernement actuel ne doit pas faire exception, et
M. Clemenceau, qui disait jadis, après avcHr
renversé tant de minisres. n'en avoir renversé
qu'un seul parce que c'était toujours le même
(Rires.), reconnaîtrait lui-même que le sien con-
tinue les autres.
Favoritisme
et fonctionnarisme
Un des plus graves défauts de la situa-
tion actuelle — et qui a b plus contribué
à la crise traversée — est le favoritisme.
C'est un lieu commun de prétendre au-
jourd'hui que le « piston" est souverain
maître et que les recommandations d'hom-
mes oplitiques décident seules des avance-
ments. Mais le ronclioonnrm présente
des dangers autrement graves; il risque
do constituer un état dans l'Etal. Ecoutez
M Hoinacii :
il y a un mat en effet pire que le favoritisme
îttjVmêmc, c'est le fonctionnarisme qui déjAIb-
sorbe tent de forces vives du pays.
Le fonctionnaire, alors surtout, serait un ci-
toyen 'Pri'tii&¡i, et voit-on que: «S»or nouveau
prendrait fonctionnarisme ?
Il fout, peur pQ'tii°lr lutter contre un dé'v
PaMatonri - --
AUGUSTE VACQUERIE
ABONNEMENTS
Oiaw IMi mb liswii eau
Paris 2 fr. 5 fr. 0 fr. 18 fr.
: Départements 2 — e - 41 — 20 -
Union Postale -
Union Postale 3- 9- 16- 32 -
r
Adresser toutes les Communications an Directeur
AUGUSTE VACQUERIE
ANNONCESi
MJTI. LAGRANGB, CERF & CRT
6, Place de la Bourse
fil cax BUREAUX DU JOURNAL 1.
Adresser Lettres et Mandats au Directeur
ADMINISTRATION & REDACTION : 53, rue du Château-d'Eau : Téléphone 438-14. — De 9 heures du soir à 2 heures du matin, 123, rue Montmartre : Téléphone 143-93
TRIBUNE LIBRE
i '<'
France - -
!" France' et Russie
'tt.' ;,
La semaine qui s'est écou-
lée fut une « semaine rus-
se )). Manifestations de pres-
se ou de tribune contre le
voyage du tsar en France,
incidents Harting-Landesen
concernant la police russe chez nous,
-enfin, arrivée à Paris d'une délégation
parlementaire de la Douma comprenant
.des membres de tous les groupes, sauf
ceux d'extrême droite et ceux d'extrê-
me gauche.
[ Pour les groupes d'extrême droite
russe, la France et l'Angleterre sont
des pays suspects en raison de leurs
institutions libérales. Les tenants de
l'absolutisme autocratique etthooora-
tîque ne tiennent pas du tout, et cela
-s'entend, à prendre contact avec des
nations qui s'honorent d'avoir déve-
loppé la liberté politique et assuré la
liberté religieuse. Leur abstention n'a
; étonné personne.
i A leur tour, les membres des groupes
'd'extrême gauche sont retenus par des
.préventions de même nature, sinon
semblables ; ceux-ci reprochent à la
France et à l'Angleterre d'avoir pactisé
.avec le tsarisme. Leurs amis français
et anglais font valoir chez nous et de
l'autre côté de la Manche que le gou-
vernemcnt de Saint-Pétersbourg nra pas
manqué une minute de pratiquer les
arrestations arbitraires, les exécutions
capitales, les déportations, les tracas-
series policières et administratives ;
ils allèguent que les persécutions de
Juifs et les Saint-Barthélémy dirigées
contre eux ont été encouragées officiel-
lement, bref,- les partis russes révolu-
tionnaires voudraient voir les puissan-
ces occidentales et libérales mettre le
gouvernement de Saint-Pétersbourg,
comme on disait naguère, « au ban de
l'humanité. »
Tandis que les partis 'd'extrêmes
gauches de Russie, de France, d'Angle-
terre, adoptaient une même ligne de
-conduite tsarophobe, les partis de gou-
vernement russe, français et anglais
décidaient de manifester leur sympa-
thie réciproque et les représentants de
- la troisième Douma se montrent en-
chantés de leur pélerinage à Westmins-
- ter, au Palais-Bourbon et au Luxem-
fcourg. ,
; Il est facile rde comprendre les rai-
sons de leur contentement. D'abord,
ils considèrent que ce contact direct
de la Douma avec les assemblées re-
* présentatives de la France et de l'An-
gleterre est une consécration de leur
existence et que le tsar ne saurait plus
porter atteinte à la représentation na-
tionale russe depuis qu'elle a communié
avec les mandataires des deux autres
nations de la Triple Entente, l'amie et
l'alliée. -
Ce sentiment, M. Mylioukof, le leader
des K. D. ou constitutionnels démocra-
tes (qui sont dans l'opposition 'de la
Douma), l'a très nettement exprimé :
« Ce voyage, a-t-il dit, marque une
idate importante dans ) 'histJÎ.Je de no-
lîre jeune Parlement russe. Il a consa-
cré son autorité morale, il lui a, en
quelque sorte, donné une existence eu
sorte, donné ;0 eu.
Pour notre part, nous sero is cn-
chantés aussi que ce voyage puisse
Servir au développement et à h! conso-
lidation des libertés publiques russes,
qui seules assureront à l'avenir une ère
de sécurité pour les personnes dans
l'immense empire, quand les forcenés
,(le la violence et les agents irresponsa-
bles de la bureauratie auront fléchi
sous le parlementarisme.
Les parlementaires russes ont, d'ail-
leurs, une seconde raison de se montrer
satisfaits : c'est qu'ils considèrent leur
- voyage, et celui du tsar, comme un
gage du maintien actuel des forces di-
plomatiques en Europe.
Il y a, en effet, en Allemagne, une
école de diplomates qui voudrait ra-
mener la Russie dans le giron d'une
Triple Alliance qui fonctionna réguliè-
rement pendant la plus grande partie
..(Iu 19e siècle, la Triple Alliance de l'AI-
lemagoo, de l'Autriche et de la Russie.
Cette' combinaison, ce rapproche-
ment des Etats les plus arriérés au
point de vue politique, serait apprécié
dans toute l'Europe centrale et dans
l'Europe orientale par ceux qui redou-
tent l'avènement, de nouvelles couches,
le triomphe de nouveaux partis : cette
- Triple Alliance là se souviendrait fort
bien qu'elle est la fille ou la petite-fille
tie la Sainte Alliance et elle userait vo-
lontiers de sa formidable force mili-
taire pour faire en Europe une police
internationale destinée à pourchasser
• les partisans des idées démocratiques
et SOCiales.
Les parlementaires russes sentent
fort bien ce qu'ils perdraient dans une
orientation semblable de la diplomatie
de leur pays ; ils préfèrent de beaucoup
une entente très serrée avec l'Angleter-
re et la France : nul doute qu'ils ne
soient ainsi d'accord avec leur intérêt
particulier et les intérêts généraux ae
la civilisation.
D'autre part, ils sont russes et il
n'est pas de russe qui n'ait été meurtri
dans son amour-propre de la reculade
que le cabinet de Berlin a imposée au
cabinet de Saint-Pétersbourg dans l'af-
faire de Bosnie-Herzégovine. Si l'Alle-
magne a voulu amener à elle la Russie.
sa caresse a été un peu rude et soagant
de fer n'était point enveloppé de ve-
- lours. -
Les voyageurs parlementaires de
Saint-Pétersbourg sont venus nous dire
qu'ils espéraient en une renaissance
de la cordialité franco-russe. Ils ont
-rappelé Toulon, Cronstadt, l'amiral
Avelan, les jours de grand enthousias-
me, et aussi la période de refroidisse-
ment. Ils espèrent un renouveau de
sympathie cordiale et chaude.
Il est facile aux hommes qui se con-
finent dans l'opposition doctrinaire et
théorique de répondre non possumus et
pe baser leur refus sur un réquisitoire
à l'adresse du tsarisme. C'est d'autant
plus facile qu'au bénéfice d'une oppo-
sition de « groupe » on joindra le bé-
néfice du consentement national à la
thèse opposée. Les démocrates français
qui envisagent le problème avec le sou-
ci de le résoudre comme ils feraient
s'ils avaient à engager leur responsabi-
lité, ne peuvent chercher ni à rompre
une entente, considérée comme utile à
l'équilibre européen, ni à refuser leur
sympathie à des libéraux ou à des dé-
mocrates russes qui manœuvrent pé-
niblement au milieu des écueils.
Il faut souhaiter que la Triple En-
tente serve la cause de la paix en Eu-
rope, comme la cause de l'humanité et
de la liberté en Russie. Mais tout cela
n'est pas, pratiquement, irréalisable.
Albert AIILHAUD.
LA POLITIQUE
MAUVAISE METHODE
Entre une tranche du débat
sur la Marine et une autre
trancKe de débat sur la révi-
sion .douanière, l'ordre des dé-
libérations de la Chambre a
- glissé hier une tranche suc-
culente de 1 interpellation sur la politi-
que générale.
Ce savoureux sandwicn paraît du
goût de nos parlementaires. La façon
dont ils panachent leur:, menus dénote
des estomacs délicats et qu'il faut sti-
muler par la variété.
fiant pis ! Au moment où la session
prend fin, le bilan est facile à faire et il
se - résume à peu de chces pour ne pas
dire rien. Quelques-uns de nos pubiici-s-
fes parlementaires auront beau s'escri-
mer contre la malveillance des adversai-
res de droite, ils auront beau prouver
qu'on s'attaque, en les combattant, plus à
leur place qu'à l'honneur de leur dispu-
ter un mandat, la démocratie élèvera le
débat au-dessus de ces misères de con-
currents et elle cherchpn. si ses-, affaires
ont été bien faites et à quelles mains
stires elle les doit conter à l'avenir
La responsabilité de la majorité sera
lourde ; elle aura l'apparence d'avoir
voulu simplement amuser la galerie et
le tapis. En quête de résultats réels, sé-
rieux, on ne la vit jamais passionnée.
Elle éluda les débats, gagna les fins de
sessions, esquiva les difficultés, et sa
formule sembla être : « Avoir l'air
d'avoir l'air. fi
• Cepeildant, nul député n'ignorait que
c'était d'une très fâcheuse méthode que
de diviser les tiV.Ubératic ns, de ne point
les pousser à bout, les unes après les au-
tres. Nul député-ne pouvait ignorer que
ce n'est pas la même chose, mêler et con-
fondre, juxtaposer les questions, d'une
part et sérier les questions, d'autre part.
Il faut sérier les questions, disait
Gambetfa, qui lut un grand instituteur
de la démocratie, dans ses beaux jours.
Il faut embrouiller les questions et
s a bstenir de les résoudie, pensent la
plupart des radicaux tellement impré-
gnés de clemencisme qu'ils ont laissé le
maître instituer l'incohérence, la confu-
sion et Je désordre en méthode do gou-
vernement
00
LES ON-DIT
NOTRE AGENDA
!Auiowd'hui samedi :
Lever du soleil à 4 h. 9 du matin ; cou-
oher à 8 h. 1 du soir.
Courses au Trerablay. (Prix- daller On).
AUTREFOIS
Le Rappel du 11 juillet 1873 1.
En Prusse. les conseils municipaux
n'ont qu'un droit de présentation. Si le
maire qu'ils présentent est refusé par le
gouvernement, ils en présentent un se-
cond. Si le second a le sort du premier,
alors leur droit est épuisé, et le gouverne-
ment nomme qui lui plaît.
C'est, comme on le voit, la nomination
livrée au bon plaisir du gouvernement. Tel
est le projet que les larouches décentrali-
sateurs du centre droit vont déposer sur
le bureau de la Chambre en réclamant
rU1'gence.
l'urgence..
une question va être adressée au mi-
nistre des finances par un député de la
gauche pour lui demander de faire cannat-
tre quels sont ses projets pour le règle-
ment de la partie du budget qui presse.
Il est nécessaire que la Chambre statue
avant la prorogation sur les contributions
directes, les conseils généraux devant,
dans leur session d'août, régler l'emplot
des centimes additionnels d'après le. vote
de la Chambre.
Tous les budgets municipaux sont en
suspens par suite du mutisme financier du
gouvernement.
— Le jury international des beaux-arts
de l'Exposition de Vienne a terminé ses
travaux. La France a obtenu 247 médail-
les, dont 138 pour la peinture, 34 pour la
sculpture, 26 pour l'architecture et 49 pour
la gravure.
* C'est te pays le mieux partagéi.
IiEDUEkejUIiW-30S
A la suite d'un .envoi de témoins par M.
Caiillaux à M. Charles Bos, le ministre des
finances et l'ancien député sont al'lés hier
« sur le pré ».
Jeudi, dans la cour d'honneur du Luxem-
bourg, M. Charles Bos avait violemment
pris à parti M. Caillaux à raison d'un dis-
cours prononcé à la tribune de la Chambre.
Le ministre, menacé par « l'interpellateur »
extra parlementaire, avait d'un geste fait
mine de se défendre de la canne, puis il
s'était ressaisi et lança cette riposte:
« Frappé par vous ! Bah ! »
La questure du Sénat voulait poursuivre
M. Charles Bos pour attaque à un magis-
trat dans une enceinte parlementaire, maïs
avec sa crânerie ordinaire, M. le ministre
des finances a préféré régler son affaire
lui-même. Il a prié MM. Dalstein, gouver-
neur de Paris et Le Hérissé de lui servir
de témoins et de s'aboucher avec M. Char-
les Bos.
La rencontre a eu lieu hier, à quatre heu.
res, au polygone ide VinoonnP'!'l. deux balles
ont été échangées sans résultat.
DU calme
—
Les terrassiers de Draveil-Vigneux sont
de nouveau en grève.
Jusqu'ici, dans ce nouveau conflit, ils font
preuve d'une sage modération.
Ils re&pectent pleinement la liberté du
travail de -ceux de leurs camarades qui sont
payés au tarif syndical et qui apportent
une cotisation quotidienne de un franc pour
les chômeurs.
A part quelques incidents regrettables,
mais isolés et ne procédant pas d'un état
d'esprit général, il semble bien que le con-
flit actuel puisse se terminer sans trop de
déployables violences. -
Les terrassiers n'ont qu'à conserver à
leurs revendications un caractère exclusive-
ment corporatif et à tenir soigneusement
éloignés de leur mouvement certains agita-
teurs professionnels, qui sous prétexte de
propagande et de solidarité, font le jeu de
ceux qui sont partisans du désordre pour
avoir l'occasion de rétablir l'ordre.
l --- -----
« L'EMFSE DES ftBS »
-+-
Il ne se passe pas de jours où M. Cle-
menceau ne soit pris en llagrant délit.
Voici la lettre ouverte que vient d'adres-
ser à « l'Empereur des Flics » une des yic.
Urnes de ses policiers :
A la séance d'interpellation du vendredi
2 juillet courant, vous avez affirmé à M. Fer-
dinand Buisson — Journal o/liciel. p. 18 — que
la réunion du personnel des postes a Quimper,
le 2 mai, étiit une réunion privée où la porte
était ouverte à tout venant. Vous avez affirmé
également que les rapports de police dont on
a fait état pour incriminer les orateurs qui ont
pris part aux diverses réunions sont des rap-
ports des commissaires de police, ayant assisté,
ceints de leur écharpe, à ces réunions.
J'ai le devoir. M. le président du conseil, de
déclarer que vos affirmations sont formellement
inexactes et que vous avez été mal renseigné,
ce qui est plus que regrettable.
La réunion de Quimper, dont vous a parlé
M. Ferdinand Buisson, était, une réunion ex.
clusivement privée. Par faveur spéciale, deux
instituteurs y assistaient en dehors du perron-
nod des P. T. T. La porte avait été soigneuse-
ment fermée et gardée ; le commissaire de po-
lice n'assistait pas a la reunion. mais nous
avons appris,, et nous avons la certitude qu'un
mouchard était dissimulé dans l'orchestre.
Et le lendemain 3 mai, j'étais suspendu de
fonctions avec mes camarades Le Tfeïs, Masson
et Hily, parce que le rapport du.caounissaire,
de police signalait que nous avions tenu des
propos antimilitaristes et que nous avions pré-
conisé la grève générale des postes, ce qui était
rigoureusement faux.
Monsieur le président du conseil, je vous de-
mande instamment, au nom de la liberté et de
la justice, que votre nom devrait symboliser,
de vouloir bien faire une enquête très précise
au sujet de la réunion du 2 mai, iL Quimper,
qui a coûté la révocation à trois agents des
costes et la rétrogradation à un quatrième, au
sujet de la réunion du 9 mai à Bordeaux, a, la-
Quelle j'ai également pris la parole. Vous ac-
Querrez ainsi la certitude que ces deux réunions
étaient privées, que le commissaire de police
n'v assistait pas, et que c'est cependant d'après
les seuls renseignements fournis par ce magis-
trat que le conseil de discipline a prononcé plu-
sieurs révocations.
CFRVIÈRE,
Ancien rédacteur à la direction des Ser-
vices télégraphiques de Paris, révoqué
par ordre.
Ce qui n'empêchera d'ailleurs pas M. Cle-
menceau de continuer à affirmer avec sa
superbe ordinaire que la police politique
n'existe pas.
♦ ———————————
ta Statuomanie
.8.
Il est toujours agréable de se rencontrer
avec un esprit aussi avisé que M. Lucien
Descaves
Dans un article publié par le Journal,
M. Lucien Descaves proteste, à son tour,
contre la manie que nous avons de subs-
tituer à nos fontaines ou bosquets d'agré-
ments, d'affreuses statues qui finiront par
convertir petit à petit, nos places publi-
ques en succursales du Père-Lachaise.
M. Descaves revient, à ce propos, à une
idée que nous avons maintes fois dévelop*
pé dans le Rappel.
Nous avons, en effet, signalé 'des empla-
cements qui pourraient satisfaire notre sta-
tuomanie sans nuire à la beauté de 4a ca-
pitale. Nous avons fcité notamment les
nombreuses niches vides qui, des guichets
du Carrousel, jusqu'au Pavillon Marsan
donnent un si étrange aspect à cette partie
de la façade du nouveau Louvre.
M. Desoaves signale également ces ni-
ches et se demande pourquoi on ne les
peuple pas de tous les bonhommes qui va-
lent, à Paris, la disparition des fontaines
et des corbeilles de fleurs.
Nous reprenons la question avec notre
émineht confrère et nous appelons sur ces
vilaines niches vides, toute l'attention ai
avertie de M. Dujardin-Beaumetz.
Nous espérons également que le Conseil
municipal fera disparaître les statues par-
tout où elles ont si mabheureusement rem-
placé des massifs de fleurs ou le plus mince
filet d'eau.
Paris manque de fleurs. Sa décoration
urbaine est d'une banalité désespérante.
Noua avons les plus habiles jardiniers,
nous possédons des architectes incompara-
bles et nous conservons aux grandes artè-
res de Paris, un cachet antiartistique vrai-
ment incompatible avec notre réputation
de bon goût, *
M. Lucien Descaves devrait s'atteler fi
la besogne et venir avec nous à la res-
cousse pour combattre la statuomanie et
prôner l'embellissement de Paris par les
fleurs..
Il y a une cinquantaine de niefies vi-
des sur la façade du Louvre. Mettez-y des
statues de généraux et d'hommes 'illus-
tres ; mais, laissez aux places publiques
leur ravissante parure de verdure, leurs
charmantes fontainettes chantant leur
fraîche chanson au milieu des roses et des
œillets.
Au diable les redingotes en pain de su-
cre, les jaquettes en bronze et les vestons
en granit ! les fleurs ! Vive '?aris ra-
ieuni et magnifié par la Nature !
Jean Clerval.
Un Impôt nécessaire
Les nouveaux impôts proposés par l'é-
minent M. Caillaux sont assez battus en
brèche. Il y en a pourtant un. parmi eux,
qui est non seulement un impôt juste mais
un impôt nécessaire. Nous voulons parler
de la taxe sur les huiles destinées aux au-
tomobiles.
Si on ne veut pas de cet impôt, il faudra
en trouver un autre qui atteigne les auto-
mobiles à grande vitesse. Il est démontré
aujourd'hui que les automobiles coûtent
plus au Trésor qu'elles ne lui rapportent
Consultez, à ce propos, le premier canton-
nier venu et il vous prouvera que les au-
tomobiles pneus » dérapants, détériorent
les routes les plus solides au bout d'un
mois. Ce fait est tellement exact qu'il sert
même de réclame à des fabriques de roues.
Ces fabriques se vantent, sur des affiches
que tout le monde peut lire, que leurs
« pneus usent la route » et « boivent l'obs-
tacle ».
Tout cela est très joli et très alléchant ;
mais ce qui l'est moins, c'est la carte à
payer qui est soldée par les piétons, les
cyclistes et les voituriers qui, eux n'usent
pas la route et, en fait d'obstacle, ne boi-
vent que la poussière des autos.
La taxe actuelle, qui pèse sur les auto-
mobiles, est insuffisante pour couvrir la
dépense supplémentaire provoquée car les
« buveurs d'obstacles et les ravageurs de
routes ».
Est-il juste de faire payer ce supplément
de charges à ceux qui en sont plutôt les
victimes que les auteurs ?
Nous posons la question à tout homme
de bonne foi.
Un impôt complémentaire est donc néces-
saire. Si IOn ne veut pas le mettre sur les
huiles spéciales, qu'on le mette sur le
nombre de chevaux-vapeur.
Pourquoi ne frappe-t-on pas d'une taxe
supplémentaire -pttr cheval-vapeur toute
automobile de plus de vingt chevaux ?
Ce sont précisément eux qui dégradent
nos routes et les rendent vite impratica-
bles. Il est donc juste de leur faire payer
une partie des frais qu'ils occasionnent.
Nlous ne parlons pas ici d'un impôt
somptuaare mais d'un impôt nécessaire.
Quclle est, .en ce cas, la Chambre républi-
Quelle qui hésiterait à sanctionner un véri-
table acte de justice ?
- Jean Clerval.
A LA CHAMBRE ,,:
I ■>>!■ | NI
Révision Douanière
Crédits Supplémentaires
Politique Générale
01) achève la discussion générale de la première
Oq vote les seconds
- Et oq poursuit le débat sur la troisième
-—-——
Pour de longues semaines ils vont bien-
tôt s'en aller dans leurs circonscription —
mais avant de se séparer, les députés en-
tendent travailler sans répit — ou du moins
ceux qui viennent assister. aux séances.
Matin et soir ils siègent.
Dès neuf heures, sous ta présidence de
M. Berteaux, Ils se remettent avec achar-
nement à la révision douanière.
Et c'est l'occasion d"une très remarqua-
ble.e't lort éloquente controverse entre MM.
Jaurès et Aynard. Des idées sont échan-
gées ; des conceptions sont exposéas ; —
ce sont là des débats qui prouvent que le
parlementarisme '— quand il entend dé-
laisser les mesquines personnalités et les
petites ambitions pour discuter des grands
problèmes et des intérêts généraux — est
le rouage essentiel d'une démocratie.
Libre échangisme
M. Jaurès désire que la révision doua-
nière ne puisse, en aucun cas, soulever de
difficultés internationales, et, dans ce but,
il dépose l'amendement suivant :
La Ghamv invite le gouvernement à provo.
quer une co. rence internationale de toutes les
puissances adressées, en vue d'une réduction
graduelle et simultanée des tarifs des douanes,
et décide le renvoi des propositions de loi à la
ommissioD.
C'est, pour le leader socialiste, prétexte
à exposer, de magistrale façon, les théo-
ries économiques de son parti.
Inutile de dire que le protectionnisme
: passe un mauvais quart d'heure. Quand on
s'engage' dans sa voie, il est impossible de
savoir, affirme M. Jaurès, où on s'arrê-
tera — chaque pays élevant ses droits de
douane en proportion croissante de l'aug-
mentation décidée par les nations voisines.
Si la motion qu'il présente semble, à
première vue théorique, elle aura néan-
moins un avenir pratique prochain.
U y a dans tous ces pays une poussée d'orga-
nisation sociale analogue, il existe entre eux une
homogénéité économique suffisante pour que
des accords puissent se conclure et des échan-
ges "e produire sans que l'équilibre vital de
chacun d'eux soit menacé.
On nous objecte les Etats-Unis, vaste monde
fermé qui aspire à se suffire à lui-même. Pre-
nons garde, ce n'est qu'une apparence. Si nous
aggravons notre politique de protection doua-
nière, nous courons deux risques : écarter défi-
nitivement du libre-échange l'Angleterré décou-
ragée par le protectionnisme universel, et en.
foncer davantage, les Etats-Unis dans le protec-
tionnisme auquel ils ne sont pas aussi -attachés
au'on le prétend.
: Ce que nous proposons est la sagesse même.
Il ne s'agit pas d'une aventure, mais d'une poli-
tique prudente, conciliante, graduelle. L'initia-
tive de la France rencontrera dans le monde,
i'en suis convaincu, une grande sympathie.
Et à mesure que vous faciliterez davantage
les échanges entre nations dans l'ampleur du
marché moderne, vous ferez disparaître cet es-
nrit de défiance qu'engendre la guerre de tarifs,
et vous aurez ainsi préparé la réalisation d'un
autre rêve, qui a été celui de nos grands ancê-
tres, le régime de la paix durable entre les na-
tions. (Vifs applaudissements.)
M. Aynard
M. Jaurès est vigoureusement applaudi,
non seulement par ses amis, mais aussi
par tous les libre-échangistes sans distinc-
tion de partie.
M. Aynard en est tout ennuyé.
Aussi l'honorable député du Rhône inter-
vient-il longuement pour prouver qu'il va
faire « le même geste » que M. Jaurès,
mais dans des vues différentes.
Son exposé ne va pas sans un certain
tumulte — il eut même mieux valu qu'il y
en eût un petit peu moins.
MM. Jules Guesde, Thierry er. Paul Cons-
tants ont une at.titude étrange. Enfin !.
n'insistons pas. La péroraison du discours
de M. Aynard n'est pas sans valeur. D'ail-
leurs, la voici :
Nous repoussons avec la dermcrc cnorgie tout
ce qui pourrait confondre les questions douaniè-
res. matérielles, avec les nécessités qui s'impo-
sent pour garder la patrie grande et glorieuse.
(Applaudissements au centre.)
Votons ensemble, monsieur Jaurès, UJaisr.
fléchissez à tout ce que fait votre parti à ren-
contre du but que vous poursuivez.
Poursuivre une œuvre de paix, c'est bien ;
Doursuivre une œuvre de liberté, c'est encore
miux, si vous mettez véritablement en pratique
les prinfl^èS de notre école. Mais ce jour-là il
niy aura plus de socialisme. (Applaudissements
au centre.)
Cherchons ensemble cette vérité, cherchons à
rapprocher les peuples, sans rien sacrifier tou-
tefois de l'idée de patrie ; mettons entre eux
un peu plus de charité; pour employer un mot
d'autrefois, appuyons leurs intérêts sur la scien-
ce et l'intelligence ; je crois que pour aujour-
d'hui c'est poursuivre une chimère, mais
poursuite de cette chimère est encore ce qu'il y
a de plus noble dans l'humanité ; elle nous
achemine vers des jours meilleurs et j'espère
crue, dans les siècles futurs, les Jaurès colla-
boreront avec les Aynard. (Vifs applaudisse-
ments au centre.)
Le mariage de la carpe et du lapin î
Il ne déplaît pas toutefois à M. Cruppi,
qui en profite pour se procurer un réel suc-
ces.
L'honorable 'ministre du commerce "ac-
cepte dans difficulté la première partie de
la proposition de M. Jaurès.
Dans celle-ci, il y a, dit-il, la motion en elle-
même et le commentaire éblouissant d'éloquen-
ce que M. Jaurès en a donné à la tribune.
Il a développé plusieurs idées fécondes et pra-
tiques que j'approuve entièrement : par exem-
ple, il a parlé, avec faste ruison, 'de la néces-
sité de l'expansion fi l'étranger de notre com-
merce agricole.
Mais re dois ajouter que nos agriculteurs font
déilà des efforts considérables en ce sens que
notamment nos exportations de beurra aii-j-
.mentent chaque année, et nos populations ru-
rales, de plus en plus laborieuses et intelligentes
savent parfaitement développer leurs rela-
tions commerciales avec l'extérieur.
Après le commentaire, je reviens fi la molion.
M. ItŸ"fitlrd, dans un Tangage exguis; a dit
jpy'clie est peut-être chimérique, mais certaine-
ment généreuse. Comment le gouvernement
pourrait-il s'opposer à cet effort international
en vue d'une détente universelle douanière t
(Applaudissements.)
A la demande de M. Klotz, la Chambre
consent à statuer sur ce projet par divi.
sion, après avoir subi MM. Nectoux, d'E-
lissagaxey, Vaillant, Easies et Camuzet.
Au demeurant, la première partie de 1,1
motion Jaurès est votée par *i(î2 voix co!),>!!
tre 79.
M Jaurès, satisfaitdoe cet intércssaîil
succès, renonce à la seconde partie de sa
motion.
Il avait compté sans M. Vaillant, qui la
reprend.
Or, elle est particulièrement grave, puis.
qu elle aurait pour objet d'empêcher le
passage aux articles du projet.
M. Vaillant est battu par 488 voix con;..
Ire 65 — et, dès la rentrée, les tarifs se-
ront révisés.
Il faut souligner, en passant, que ces vio4
tes sont un succès considérable et pour le
ministre du commerce et pour la commis-
sion. Et c'est justice, car le ministre, com-
me les commissaires, ont fourni une som-
me considérable d'efforts et de désintéres.
sement.
» «■
1 Séance de l'après-midi
Crédits supplémentaires
A la séance de l'après-midi, la Chambre
discute un assez gros cahier de crédits
supplémentaires.
Sur les 1,800,000 francs dlstinés aux vic-
times des tremblemenfs de terre du Midi,
M. Pelletan intervient pour que le projet
soit voté avant les vacances et élargi.
M. Doumer, rapporteur général, est d'ac-
cord.
M. Paul Conetans critique la pratique dw
crédits supplémentaires et charge à fond
contre le Maroc — si ce n'est' contre les
Marocains.
M. Georges Rerry se prononce contre le
transfert du Conservatoire, du moins con-
tre le transfert immédiat. M. Tournade vou-
drait, au contraire, qu'il fut déplacé..,
mais plus tard !
Tout de suite, dit la majorité, qui adopte
les crédits par 409 voix contre 69.
«♦»
Politip générale
Il est' cinq heures. Il est temps, esliwe.
t-on, d'en revenir à l'ordre du jour et de
discuter autour de la politique générale.
M. Joseph Reinach déclare que son in-
tervention n'a pas pour but de critiquer le
passé — on s'en doutait un peu — imis
de savoir quelle sera l'attitude du gouver-
nement d'ici les élections.
Le statut des fonctionnaires aboutara.
t-ii ? Et la réforme électorale ? Que devient-
elle ?
A diverses reprises, cette discussion a été
ajournée et nous ne croyons pas que le SOu.
vernement fasse obstacle à ce qu'elle vienne en
tête de la prochaine session. Mais une note hl-
lure officielle parue ces jours derniers nous sem-
ble motiver quelques réflexions.
Nous demandons s'i! est possible que le gou-
vernement, après s'être en principe prononcé
en faveur du scrutin de listé, accepte que tes
prochaines élections générales aient lipu au
scrutin d'arrondissement. (Très bien ! sur divers
bancs.)
M. Charles Benois.t, grand-père de la re-
présentation proportionnelle, exulte.
La désaffectation
du parlementarisme
Il y a, constate M. Reinach, un mouve-
ment générai de lassitude, de décourage-
ment contre la représentation parlemen-
taire. C'est pour le régime lui-même un
gros danger qu'il est urglnt de dissiper.
C'est aujourd'hui, constate M. Reinach, un më-
contentement profond, qui s'affirme tantôt par
des doléances, tantôt par des réclamations plus
vives, tantôt enfin par une lassitude qui cons-
titue selon moi le symptôme le plus grave 21
le plus alarmant.
Dans toutes les parties de l'opin'on, cormne
dans le monde de la jeunesse et cc-!ui de la
science dont parlait l'autre jour M. Jaurès, le
détachemrit du régime se manifeste.
Le malaise s'accentue dans le parti républi-
cain lui-même et il n'irait plus à la bataille
avec le même entrain, fa même allégresse
qu'en 1906.
La gouvernement sans doute a sa large part
dans cette situation. J'ai connu un éminent his-
torien qui disait : « Depuis Clovis, la Chambre
a toujours été mal gouvernée. » (Rires,) Le gou-,
vernement actuel ne doit pas faire exception, et
M. Clemenceau, qui disait jadis, après avcHr
renversé tant de minisres. n'en avoir renversé
qu'un seul parce que c'était toujours le même
(Rires.), reconnaîtrait lui-même que le sien con-
tinue les autres.
Favoritisme
et fonctionnarisme
Un des plus graves défauts de la situa-
tion actuelle — et qui a b plus contribué
à la crise traversée — est le favoritisme.
C'est un lieu commun de prétendre au-
jourd'hui que le « piston" est souverain
maître et que les recommandations d'hom-
mes oplitiques décident seules des avance-
ments. Mais le ronclioonnrm présente
des dangers autrement graves; il risque
do constituer un état dans l'Etal. Ecoutez
M Hoinacii :
il y a un mat en effet pire que le favoritisme
îttjVmêmc, c'est le fonctionnarisme qui déjAIb-
sorbe tent de forces vives du pays.
Le fonctionnaire, alors surtout, serait un ci-
toyen 'Pri'tii&¡i, et voit-on que: «S»or nouveau
prendrait fonctionnarisme ?
Il fout, peur pQ'tii°lr lutter contre un dé'v
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
- Collections numériques similaires La Grande Collecte La Grande Collecte /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "GCGen1"
- Auteurs similaires Véron Louis Véron Louis /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Véron Louis" or dc.contributor adj "Véron Louis")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/4
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k7545099d/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k7545099d/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k7545099d/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k7545099d/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k7545099d
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k7545099d
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k7545099d/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest