Titre : Gil Blas / dir. A. Dumont
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1893-08-12
Contributeur : Dumont, Auguste (1816-1885). Directeur de publication
Contributeur : Gugenheim, Eugène (1857-1921). Directeur de publication
Contributeur : Mortier, Pierre (1882-1946). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 12 août 1893 12 août 1893
Description : 1893/08/12 (N5016,A15). 1893/08/12 (N5016,A15).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k7524732s
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JOD-209
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 30/07/2012
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HUIT PAGES : 5 CENTIMES
SOMMAIRE
du numéro du dimanche 13 août 1893
Tirage : 265,000 exemplaires
TEXTE «
EUGÉNIE J. Ricard
L'AMOUR DU MENSONGE Ch. Baudelaire
BouBouRocHB. G. Courteline
Ex AMOUR (suite) Jean Ajalbert
LE MORT MAUDIT Jean Bichepin
COUBIHE LAUBA (suite). Marcel Prévost
DESSINS
EUGÉNIE. Steinlen
YACHTIHG Guy do
LE MOBT MAUDIT. Balluriau
LIS BON TEMPS Steinlen
CHANSON
la BON TEMPS. Xanrof
SOMMAIRE
LES CONTES DE LA FÉE MORGAItIg. - J. Ricarù,
COMMENT ON VOTE. — Mdurice Montégut.
LE PARLOIR DES TARENTULES. — Léon Bloy.
PAR ARRÊTÉ. — Chose.
PARIS-PUNAISES. — Louis Gaillard.
A TBATEBS LA POLITIQUK. - Adrien Duvand.
COULISSES DE LA FINANCE. - Don Caprice.
NOUVELLES RÉVÈLÃ-TIONS SUR LE PARTI NAUNDOBFF.
Jean Horla.
Pnopos DE eounMM. — Gaultier-Garguille.
FEUILLETON : PEAU NEUVE, Tommy Lad.
GIL BLAS DE OErJiAIN
Contes et Chroniques par :
91 areel Prévost.
Pompon.
Lapomély.
Les Coules le la Fée Moipe
DERNIER NOCTURNE
Avant-hier soir j'ai trouvé sur ma table
un petit paquet noué d'un ruban large
où il y avait des fils d'argent et d'or dans
une soie d'un vert fané délicieux.
Le ruban défait, le paquet s'est formulé
en une lettre très longue, écrite sur de
grandes feuilles de papier glacé d'azur
pâle et qui sentait si bon.
La lettre disait :
« Ceci sera ma dernière communica-
tion. En haut lieu on a été mal satisfait
de mon service littéraire. J'ai du chan-
gement. Je ne raconterai plus d'histoi-
res pour endormir les écrivassiers né-
vropathes. Voici mon dernier conte.
C'est une histoire aux débuts de la-
quelle j'ai assisté dans des temps loin-
tains déjà, et dont la fin a quelques jours
de date. Elle m'a semblé d'allure à t'a-
muser, et comme, au fond, je t'aime as-
sez, grand serin, j'ai pris une plume
d'oiseau bleu pour te l'écrire. Suis-je
assez bonne !
Il y avait une fois — de cela nous som-
mes à vingt-cinq ans de distance — une
petite fille et un petit garçon qui jouaient
dans un jardin. La petite fille avait sept
ans, le petit garçon : dix. Elle était mai-
gre, avec un long col pliant, au front
trop bombé, au nez trop mince, une
bouche trop triste, et des yeux. des
yeux singuliers qui avaient l'air d'être
des chambres hantées. C'était une drôle
de petite fille, a la vérité. Lorsqu'on po-
sait son regard sur elle à l'improviste la
parole que l'on allait dire restait en che-
min ; on avait la secousse d'un inquié-
tant inconnu brusquement heurté. Cette
petite fille, en somme, semblait receler
une âme volée qu'elle aurait craint infi-
niment de voir découvrir. Il y avait un
peu d'angoisse toujours sur sa figure,
une expression qui, eût-on pu dire, s'é-
tait usée, avait vieilli sur d'autres figures
— des figures de gens morts depuis long-
temps peut-être. On ne savait.
Le petit garçon était grand pour son
âge, avec une peau colorée comme un
tabacd'Orient, des cheveux bleus comme
ceux des gitanos, de très grands yeux au
regard aigu, direct et violent. Et comme
la fillette avait sur sa figure des reflets
d'outre-tombe, il avait, lui, les marques
de la réalité, de la passion, de la vie vé-
hémente, inscrites sur tout son être élas-
tique et fort.
Le jardin était un vieux jardin de
prieuré, a l'ombre d,une haute église,
avec des murs mangés de mousses, des
arbres fruitiers plantés au hasard, des
violettes dans les pelouses abandonnées.
C'était une après-midi -d'Automne, et
le petit garçon et la petite fille avaient
joué longtemps. Maintenant ils s'étaient
arrêtés et regardaient un rayon de so-
(eil couché à leurs pieds, tout doré sur
l'allée brune.
— Tu sais que je pars demain, que je
rentre au collège, disait le garçon.
— Oui, répondait-elle.
Et dans ses grands yeux singuliers
remuaient des idées qui les faisaient
tour à tour tristes et joyeux — comme
si elle eût éprouvé de la douleur et dlll
soulagement tout ensemble à cette idée
qu'il s'en allait.
Brusquement le gamin reprenait :
- Tu vas me jurer que pendant que
je ne serai pas là tu ne parleras pas à
Henry. pas une seule fois, tu entends?
Il lui prenait le poignet. Avec des
rayons plus vifs d £ douleur et de joie
Lsuilije&aut. de ses veux la pAA/mait
la tete et, d'une voix très basse qui s'en-
tendait pourtant comme si elle eût crié,
elle disait
— Non.
-Tu ne veux pas jurer ?
De cette voix qui n'était qu'un souf-
fle, elle disait encore :
— Non !
Alors, avec un brusque élan de rage,
il la prenait par sa taille si étroite, la
serrait contre lui en un sauvage mouve-
ment de tendresse et de fureur, puis, se
courbant, il lui mordait l'épaule — sa pe-
tite épaule pointue au dessin délicat,
qui sortait, finement pâle, du décolletage
de sa robe de piqué. Et du sangapparais-
sait sur la peau.
Il relevait la tête et repoussait violem-
ment la fillette en disant :
— Comme je te déteste !
Et tandis qu'il s'enfuyait par le grand
vieux jardin, de la même voix basse,
timbrée, étrange, la fillette répétait :
— Non !.
C'était dans un bal. Une de ces fêtes
de ville d'eaux, bruyantes et vulgaires ;
ici claquantes de luxe réel et excessif,
là tout en clinquant.
Une jeune fille et un jeune homme ve-
naient de valser ensemble. Maintenant,
accoudés à une rampe de terrasse, ils
étaient enveloppés du velours souple de
la nuit et regardaient les molles indica-
tions d'un vaste paysage, déclamatoire
et lugubre, où il semblait qu'il y eût un
lac, des montagnes entassées, des tor-
rents lointains.
Le jeune homme : c'était l'enfant aux
cheveux noirs comme ceux des gitanos,
au regard direct et violent. La jeune
fille : c'était la petite fille dont les yeux
semblaient des chambres hantées. Ils
n'avaient changé ni l'un ni l'autre. Elle
était toujours maigre, toujours irréelle,
toujours elle semblait cacher en elle une
âme volée qu'elle craignait qu'on ne lui
reprît. Depuis un an ils étaient fiancés.
Et voici ce que disait le jeune homme:
— Pourquoi ne me parles-tu pas?
Pourquoi ai-je senti en toi, encore, tou-
jours, cet éloignement de moi?. pour-
quoi me hais-tu ? car je sens que tu me
hais. Et pourtant tu es si tendre. qu'y
a-t-il en toi qui m'attire et me fait peur,
comme si tu étais ma destinée. une
abominable destinée !
Elle soupire et ne répond rien.
Il lui prend le poignet et le lui secoue
violemment.
— Quand nous marions-nous ?. dis ?
quand ?. Je suis las d'attendre, je te
veux toute. Dis-moi que bientôt nous
allons nous marier ?
Et de cette voix qui n'est qu'un souffle,
elle répond :
— Non.
Elle pleure. De grandes larmes d'ar-
gent coulent sur ses joues, et dans ses
yeux inquiétants, ces yeux où frisson-
nent des rêves d'âmes disparues, il y a
une douleur immense. Pourtant elle
répète :
- Non.
Alors il se penche sur elle, l'étreint-
si fort que l'on entend craquer la frêle
ossature, et il lui mord la joue cruelle-
ment. Le sang coule.
Et le jeune homme s'enfuit en criant :
— Je te hais !
Tandis qu'elle secoue lentement sa
tête pensive, les larmes d'argent coulent
toujours sur ses joues.
.,.
C'était dans une chambre close et
tiède. Une jeune femme, immobile, éten-
due sur une chaise longue, regardait le
feu. Cette jeune femme : c'était l'enfant
du grand jardin ombragé par le mur de
cathédrale, la jeune fille qui pleurait
sur la terrasse.
Or voici ce que lui montrait sa son-
gerie profonde :
Des années de paix mélancolique
après le départ du sauvage compagnon
de sa jeunesse — paix partagée avec un
homme grave et doux, son mari, dont
l'affection apaisante avait peu à peu ef-
facé presque jusqu'au souvenir des trou-
bles jadis ressentis auprès de celui
qu'elle avait cru aimer. Longues, lon-
gues avaient été ces années !. Mainte-
nant elle touchait à la limite de la jeu-
nesse; il semblait qu'elle allait entrer
dans la grande sérénité des suprêmes
apaisements. Mais quelque chose était
advenu. Elle regardait toujours les
braises, absorbée en une intense songe-
rie.
Pendant ces années qui avaient coulé
si calmes, elle avait dû beaucoup chan-
ger, car les gens qu'elle avait connus
jadis ne la reconnaissaient pas tout de
suite, et toujours c'était la même excla-
mation :
— Vous avez quelque chose de telle-
ment différent!. vos yeux ont l'air d'a-
voir changé de couleur.
Elle-même sentait se dessiner sur son
visage la forme d'expressions autres
que celles qui lui étaient habituelles.
Ses traits, sans doute, s'étaient apaisés
comme son âme.
Et puis quelque chose était advenu.
Elle avait, un soir de Décembre, ren-
contré celui dont l'âme véhémente et
brutale avait troublé sa jeunesse. C'était
à Notre-Dame. L'ombre montait du sol
comme une fumée. Un chant d'orgue
traînait dans l'air. Ils s'étaient trouvés
en face l'un de l'autre devant un des ifs
triangulaires où brûlent les cierges qui
implorent et qui remercient. La rouge
lueur les avait éclairés tous deux: ils
s'étaient reconnus. Au souvenir de cette
reconnaissance elle avait un frisson. La
tête de l'homme était devenue tragique ;
d'abord elle l'avait crue sillonnée de
cicatrices profondes, mais, l'instant d'a-
r>*àa on,» comprenait que c'était seuie-
ment des plis creusés par les sensations
trop fortes, les pensers trop amers, les
regrets trop persistants. Sa face avait
l'effrayante immobilité qu'ont, au cen-
tre des plaines mornes, les grands chê-
nes foudroyés où rien ne vit plus et qui
demeurent comme un désespoir dressé
contre la face du ciel..
Ils s'étaient parlé. Il avait Mt les mi-
sères d'une vie de jouissances sans trêve,
toujours insuffisantes à calmer l'appétit
de son cœur brûlé par l'image de l'étran-
ge petite amie.
Souvent depuis ils s'étaient revus. Il
lui avait parlé d'amour avec des mots fé-
roces, des mots qui insultaient et qni
adoraient. Cela avait duré des semai-
nes. Et, à mesure que le trouble reve-
nait à son âme, elle avait senti sur son
visage revenir les expressions d'autre-
fois; et les gens qui pendant un temps la
reconnaissaient difficilement s'écriaient
maintenant à sa vue :
— Tiens ! vos yeux ont repris leur
couleur. Ils sont à présent tout a fait
comme avant votre mariage.
Un jour, il n'était pas venu à l'heure
où elle l'attendait; puis le lendemain en-
core il n'était pas venu. Sans doute il
était las de son inutile effort pour la con-
quérir, il était repris de cette haine dont
se doublait sa tendresse.
Elle lui avait été douce pourtant, pen-
dant que lui, si violent, si dur, lui disait
de ces paroles qui font saigner le cœur
irréparablement. Si douce !.Jamais elle
n'avait répondu. Elle s'était tue tou-
jours. Maintenant il était parti. Elle ne
le reverrait plus sans doute. Et, tandis
qu'elle regardait le feu, des rayons ra-
pides de douleur et de joie jaillissaient
de ses yeux — comme tant d'années au-
paravant, dans le grand jardin à l'ombre
de la cathédrale.
Brusquement elle sentit qu'il était en-
tré. Aucun bruit ne s'était fait dans la
chambre. Elle se retourna — certaine de
le voir debout devant elle.
Il était debout devant elle.
Alors les yeux fantômatiques de la
jeune femme eurent un grand jet de lu-
mière aussitôt éteint. Elle venait de
comprendre que c'était la mort qui était
là — debout devant elle.
Résignée, avec un rayonnement mer-
veilleux sur la figure, elle attendait.
L'homme était terrible. Pendant les
quelques semaines qui les séparaient de
leur dernière entrevue, un sinistre, un
hideux mal s'était abattu sur lui. Des
mèches blanches sillonnaient ses che-
veux; ses sourcils et ses cils avaient dis-
parus, laissant des marques pourpres au
front et aux paupières ; des taches bru-
nes, àla terrible signification, marquaient
le haut de son visage couronné lamenta-
blement de plaies vives. Il était mons-
trueux; il était terrifiant surtout.
Et tandis qu'il se mettait à rire d'un
rire rauque, atroce, les yeux de la jeune
femme devenaient sublimes. Ils reflé-
taient la Bonté Suprême. On eût dit que
sa douloureuse et pensive forme ne te-
nait plus à la terre. Devant cette homme
stigmatisé par le vice, répugnant et hi-
deux, elle imposait comme une évocation
de l'Idéal triomphant.
Il riait toujours.
— J'ai voulu guérir de vous, ôter votre
pensée de mon sang. et. Vous voyez !
cria-t-il.
Puis il se mit à genoux. Pendant de
longues minutes leurs yeux se croisè-
rent en un duel silencieux — les yeux
de la femme : miraculeux, bons et subli-
mes ; les yeux cyniques, ulcérés, féroces
de l'homme.
Enfin, d'une voix basse qui frémis-
sait, il dit cette fois encore :
- Ah! que je vous hais !
Et elle répondit avec un sourire :
— Non. Vous m'adorez.
Alors d'un mouvement furieux il la
saisit, sans qu'elle résistât, et de sa bou-
che empoisonnée il lui coupa la bouche
en une morsure longue.
Puis cette fois encore il s'enfuit.
Elle est morte hier de la maladie
hideuse. Quant à lui- mais qu'importe,
lui !
Adieu, mon ami, médite cette his-
toire. Il s'y cache un symbole ».
« MORGANE ».
Pour copie conforme :
J. RICARD.
(Reproduction interdite.)
4
Nouvelles & Echos
AUJOUSQ'HrjI
A deux heures, courses à Cabourg. Pro-
nostics du Gil Blas :
Oaks du demi-sang : Ecurie J. Lemon-
nier, Macta.
Prix du Gouvernement : Kaoline, Léda.
Prix des Dames : Babylas, Rapidité.
Premier Prix du Casino : Kan, Levan-
tine.
Deuxième Prix du Cercle du Casino :
Elise, Cordoue.
Prix du Conseil municipal : Zéphir,
Vezin.
C'est aux plages maintenant qu'il nous
faut demander des nouvelles.
Avant-hier, une fête charmante avait lieu
chez la comtesse de Malden, qui habite le
chalet des Clochettes, sur la route de Trou-
ville à Honfleur. Ce chalet est un véritable
palais italien, bâti dans une situation mer-
veilleuse. Le grand hall éclairé à profusion
de lanternes vénitiennes, était d'un effet
féerique. Par une innovation très heureuse,
on a commencé le bal par la fin, c'est-à-dire
par le cotillon auquel ont pris part avec en-
train un essaim de jeunes femmes et de jeu-
nes filles fort jolies.
Les clochettes semblent disposées à sou-
hait pour les fêtes d'été. De quelque côté
que le regard plonge, la vue est magnifique
et l'on aperçoit dans le lointain, comme
dans un panorama enchanté, d'un côté la
forêt de Saint-Gaticn ; de l'autre, les Ro-
ches-Noires, la falaise d'Hennequeville, la
pointe de Villerville et par les temps très
clairs le phare du Havre et la terre de Saint-
Adresse.
On annonce la mort de mademoiselle
Salaro di Borgo belle-fille du feu comte
d'Osmont, elle était âgée de vingt-six ans.
X
Nous apprenons également la mort du
commandant Molart, un des plus brillants
officiers de 71, qui sauva le livre de la Dette
publique pendant les incendies de la Com-
mune. X
La vie à Paris est tout entière hors de
Paris. A Trouville, les fêtes se succèdent.
Bal au chalet Saint-Pierre, réception à la
Villa Persane, assaut d'armes, promenade
en mail, rien ne manque ; le programme est
complet.
A l'Eden-Casino, il y a foule chaque
soir. Dans les loges et fauteuils, on remar-
quait : duc et duchesse de Morny, duc de
Massa, comte Charles de Galliffet, comte de
Contades, M. et madame Maurice Ephrussi,
Camille Saint-Saëns, etc.
Le monde des ceintures qu'on dore était
également au grand complet : Suzanne Der-
val, Emilienne d'Alençon, Irma Montigny,
Félicia Herville, Suzanne Nery, Depoix,
Marie Lacroix, Albertine Wolff, Marie Vin-
cent, Madeleine de Negen, Marion de Lor-
me, Renée Villars, Marguerite Thiébaud,
etc., etc.
Les sisters Forbes et le Russe Tscher-
noff ont eu les honneurs de la soirée.
Très applaudis aussi : les Ferest, clowns
musicaux désopilants, et mesdemoiselles
Noraly, Forny, Dumoraize et Stainville.
Médaillon :
EMMA LATOUR
Une très aphrodisiaque, callipygement
sculptée, lampyrée d'yeux mer, dentée d'o-
palines que baisent humidement des lèvres
grenadines, chevelée de mûre avoine hadi-
gnement ondulée.
Messaline di primo cartello, a fait jadis la
place; puis, sa rupture avec le vicomte de
P. l'ayant horriblement compromise, fit
l'étranger et trôna à Pétersbourg.
Vient de rentrer en France par la porte
des bains de mer et embobine en ce moment
tout le high-life d'une plage du Midi.
Recherche les bien rablés et fait une cour
assidue à Candé.
Faible très fort pour les moules, le cor-
ton, la chartreuse verte, les caniches blancs,
les jupons pailles, les voilettes blanches, les
bagues sorcières.
Rue Gambetta, près de la Conche, petit
premier rigolo tendu de mauve avec tinnée
de coquilles clouées au plafond, un vieux
sabre turc, une flûte cassée, de vieilles mé-
dailles, des guirlandes de corail.
Ouvrière consciencieuse, assagie, résolue
à de grandes concessions, enchante tous
ceux qui lui offrent la tour de Cordouan et
retriomphera certainement cet hiver à Paris.
Devise : Consolatrix spleenorum.
Couleur d'âme : Reine-claude.
Caractéristique : Douze mille francs de
rente.
Une nouvelle recrue dans] le bataillon de
Cythère : Kamouna.
Un joli filet de voix qui ne demande qu'à
grandir. Détaille à ravir ; suggestive au
possible dans sa robe bleue ; gantée de noir
du haut en bas. sous sa robe miroitante.
Signe particulier : A la fin de chaque cou-
plet, un petit coup de jambe tout à fait
c.anaille 1
Un de nos bons amis du Tarn, chez le"]
quel je suis en déplacement depuis quelques
jours, m'a conté une histoire d'huissier qui
va faire les délices de Laure de Chiffreville.
La voici :
Il y a quelques mois, un huissier se pré-
sente à Lavaur, chez un joyeux viveur,
pour procéder à une saisie. Comme notre
homme ne doit rien à personne, il songe
tout de suite à s'amuser un brin avec
cet homme noir qui vient de le déranger
sans raison.
Sans lui demander au nom de qui il se
présente pour saisir, il l'accueille avec tous
les honneurs qui lui sont dûs, et aussitôt
que l'officier ministériel a débité son boni-
ment, il lui dit : « Si vous voulez, nous al-
lons commencer par la cave. »
La proposition est acceptée et M. de L.
conduit Me X. à l'endroit indiqué. Il lui
ouvre la porte, le fait passer devant lui,
ainsi que les deux clercs, et une fois tout le
mondq, entré il ferme la porte, en laissant
les trois malheureux prisonniers dans l'obs-
curité, et il s'en va et ne s'occupe plus
d'eux. -
Comme ils poussaient tous trois des hur-
lements de sauvages, le valet de chambre
eut pitié d'eux, et après deux heures de cap-
tivité, il vint les relâcher en leur disant de
ne plus se tromper à l'avenir.
Le jeune Lionel de la Rochen., fatigué
des charmes usés de la demoiselle Irma de
B.., qu'il guerluchonnait depuis longtemps
déjà, vient de rompre avec elle pour donner
à madame W.., une des femmes les plus jo-
lies de la colonie israélite, des leçons de
beau vivre.
Comme madame W.., est une belle fem-
me et qu'elle est vibrante et qu'elle annonce
un grand fonds de tempérament, il y a lieu
de croire qu'avant peu elle sera dans la cir-
culation.
En attendant, Irma de B.., qui était fu-
rieuse d'avoir été délaissée pour une juive,
semble aujourd'hui consolée, car elle vient
de s'installerà Cabourg dans une des plus
jolies villas de cette station. Hier, elle a
donné un grand dîner auquel a été convié le
Tout-Cythère. Parmi les plus croquantes,
on remarquait : Anna Debriège, Lucile De-
lighy, Suzanne Nery, Juliette Ferny, Su-
zanne Derval, Félicia Herville, etc. Après
le dîner, on a fait un tour de valse et, com-
me les tziganes étaient de la fête, on s'en
est allé souper chez Suzanne Nery, dont on
a pris congé le lendemain à l'heure du
bain.
NOUVELLES A LA MAIN
Mystères du cœur féminin :
Une jeune veuve se lamente sur le mauso-
lée de son infidèle époux récemment dé-
cédé :
— Il me reste du moins une consolation,
fait-elle, je ksais maintenant où il passe ses
nuits.
LE DIABLE BOrmUi:
*
Comment on vote
Depuis quelques années, mon ami
Maltebrun, romancier, chroniqueur aux
grands journaux littéraires, Maltebrun
que vous connaissez tous, Maltebrun, en
un mot, a pris pour habitude d'aller se
reposer deux mois sur douze dans un
hameau perdu des côtes de Bretagne.
C'est, prétend-il, l'unique remède à la
terrible anémie cérébrale, à cette mys-
térieuse neurasthénie dont il est tant
parlé, à tous les détraquements de Da-
moclès suspendus sur la tête des ou-
vriers de la pensée.
Donc, en août et septembre, entre le
ciel et l'eau, sous le soleil ou par les
brumes, oubliant les luttes, les décep-
tions, les amertumes et l'acharné labeur
de Paris déserté, Maltebrun se délasse,
se refait et s'imprègne. Il est l'ami de la
mer, l'hôte du rocher, l'homme errant
de la grève, et fraye avec les goélands.
Comme il a toujours des sous dans ses
poches, les mômes de la mendigoterie
l'escortent ; et, dans la bourgade, on le
tient pour bon sire; bref, il est devenu
populaire et, puisqu'il fait des livres, on
croit tout ce qu'il dit.
Pour son malheur, Maltebrun, qui d'o-
pinions politiques ne possède pas l'om-
bre et subirait les rois après la répu-
blique, a, par le monde, un homonyme
fougueux, un Maltebrun encore, qui se
mêle à toutes les bagarres du pavé et
lâche ses dysenteries incendiaires dans
les journaux sang de bœuf qui bouil-
lonne ou lie de vin qui fermente.
A Paris, peu de monde s'y trompe; et
encore! mais au fond du Finistère, il
faut avouer qu'une confusion serait très
pardonnable, étant presque obligatoire.
Dire que de cette rencontre de noms le
premier Maltebrun est ravi dans son
âme serait exagéré jusqu'à l'invraisem-
blance. Il s'y résigne et voilà tout, ne
pouvant pas mieux faire, mais, chaque
fois que l'erreur se produit, il est pris
d'un petit tic nerveux qui ressemble
fort à une grimace.
Or, cet été, en arrivant à son hameau
perdu, l'accueil des habitants, pour si
flatteur qu'il fut, lui causa quelque en-
nui. Les gros bonnets du lieu, sortant
de leurs masures, en s'essuyant les
mains, chantaient tous à peu près la
même antienne :
— Comment! vous? déjà!. serviteur,
bien content. mais nous ne vous atten-
dions pas si tôt.
— Ah ! dit Maltebrun qui souriait en-
core, et pourquoi, je vous prie.?
— Dame. vous allez manquer là-bas.
- Où, la-bas ?
— A Paris, donc.
— Manquer à qui, à quoi ?.
— Aux élections, parbleu !
Maltebrun ne percevait pas à cet ins-
tant la vérité entière. Malgré tout, il fut
un peu troublé. Ces braves gens, sans
nul doute, n'admettaient point qu'on
abandonnât son arrondissement à l'heure
solennelle où l'on sortait les urnes. Ils
avaient raison en principe. mais il ne
pouvait guère leur répondre qu'il se sou-
ciait de la couleur des Chambres autant
que de sa première maîtresse, et qu'il
n'avait jamais voté, tenant les candidats
tous en pareille estime. Il répliqua à
tout hasard, pour dire quelque chose :
— Si je manque, je ne @ manquerai
guère. allez. qu'est-ce qu'un homme,
une voix, une unité, dans la masse du
nombre ?
Mais déjà un malin qui avait navigué
l'interrompait sans honte :
— Allons, ne dites pas cela. nous
vous aimons, par ici ; nous avons fait
venir votre journal, nous le lisons.
Toute l'année, vous avez troussé de la
belle besogne.Et,dame, ça nous étonne
qu'au dernier moment vous lâchiez le
poste de combat.
Patatras !. Ça y était. Maltebrun
était fixé. On le prenait une fois de
plus, lui, l'écrivain amoureux de la
forme, le caresseur d'images, pour l'au-
tre, le pseudo-politicien, révolté contre
les institutions y compris l'orthographe.
Il enragea bel et bien et grogna, en co-
lère :
— Mais, fichtre, il y a plus d'un âne
qui s'appelle Martin. ce n'est pas moi
qui.
Autour de lui, on haussait les épau-
les. Et le même malin reprit en clignant
de l'œil :
—Vous vous appelez Maltebrun ?
— Vous le savez bien.
— Vous écrivez dans les feuilles ?
-Oui.. mais.
— Allons,ne vous fichez pas de nous!.
nous avons lu vos articles. il se peut
que vous ne vouliez pas faire de politi-
que ici ; vous venez pour vous reposer
et puis vous nous trouvez trop bêtes
sans doute. mais ne niez pas qu il fait
jour. nous avons des yeux comme les
gens de Paris. Et puis vous avez tort
de vous délier, nous marchons avec
vous !
*
* *
Seul, au bord de la mer retrouvée,
Maltebrun sautait avec fureur, en mas-
sacrant des crabes.
— Nous marchons avec vous ! répétait-
il tout haut, — ils marchent avec moi !
alors les voilà tous socialistes, au mau-
vais sens du mot, communards, quoi!
démagogues, fous furieJx, tout cela par-
ce qu'il y a deux Maltebrun, et que l'au-
tre, par conviction ou intérêt, après qua-
tre ou cinq métiers, a choisi celui-là, d'a-
gitateur des foules. Ah ! je suis joli.
me voila responsable sans le vouloir, du
vote de cent imbéciles qui croient en un
moi que je ne suis pas, ont lu en toute
confiance mes articles que je n'ai pas
écrits, grâce au dieu de la prose ! tout
cela parce qu'ils ont un peu d'amitié pour
ma personnalité vraie qu'ils s'imaginent
autre. Si j en sors. ils vont voter pour
Ravachol, heureusenient qu'il est mort.
mais il a laissé après lui des cocos de son
espèce. elle va bien, la vieille Breta-
gne ! nom de Dieu! Comment faire.
comment faire ?
Il rêva quelques minutes. Autour de
lui, derrière des masses énormes de gra-
nit écroulées dans la mer, le soleil des-
cendait dans sa gloire; par bandes rouges,
cuivre, soufre, il sabrait l'horizon de ses
derniers rayons, souverain jusqu'à la
mort ; et dans l'eau, les reflets dou-
blaient sa grandeur et son apothéose;
sous lui, la mer s'étalait écarlate, d'or ;
— plus loin, dans les profondeurs enté-
nébrées déjà, elle s'endormait vio ette,
ou d'argent, avec des luisants bleuâtres;
et chaque minute modifiait l'aspect, l'en-
semble, la vision toujours intense du no-
ble paysage. Cela restait grand, cela
restait beau, dans la dégradation des
teintes, les mouvements de couleur.
Maltebrun haussa les épaules :
- Ah ça! suis-je idiot? qu'est-ce que
cela peut me faire, le vote de ces brutes?
Ce n est qu'une mystification de plus au
compte dusuffrage universel. Qu'importe
la couleur des opinions, variant avec
l'heure? la mer, le ciel aussi changent
éternellement sous l'œil qui les contem-
ple. ils changent, mais demeurent; la
patrie elle aussi garde ses grands con-
tours et les sept tons de l'arc-en-ciel se
fondent pour sa gloire. votez blanc,
votez bleu, votez rouge, mes amis. je
m'en Jave les mains et je regarde au
large !
Puis, après une courte réflexion, il
ajoutait de nouveau :
— Au fund, ce qui me vexe le plus
c'est d'être, encore une fois, pris pour
un autre ! voilà la vérité, mou petit
amour-propre.
Mais le lendemain, il était ressaisi par
les politiciens du village ; ils l'entraî-
naient à part ; chacun s'était fait fort de
l'amener à résipiscence.
- Avouez donc. voyons. pourquoi
vous cachez-vous.? disait l'un.
— Il est pourtant bien glorieux, votre
rôle, à Paris, insinuait l'autre ; et votre
campagne de cet hiver était rudement
menée. Voyez-vous ici, il n'y a pas que
des paysans ; nous, les vieux matelots,
nous avons le nez creux ; on apprend
bien des choses à voir tant de pays.
nous avons jugé les hommes, a com-
mencer par nos chefs. Tenez, l'amiral
X., c'est un traître. vendu aux An..
glais. à Madagascar.
Maltebrun levait les bras vers la voûte
éternelle, clamait désespéré :
— Jusqu'ici ! jusqu'ici ! Encore un, en-
core les Anglais. Quelle folie conta-
gieuse souffle sur toi, ma France! si les
simples s'en mêlent, on n'en sortira
plus.
Au quarantième entretien confiden-
tiel, Maltebrun furieux, avoua tout ce
qu'on voulut : qu'il était bien ce qu'il
n'était pas, qu'il avait quitté Paris, dû-
ment préparé, pour venir surveiller l'ac-
tion en province, qu'il fallait tout foutre
à bas, qu'on était trahi, vendu, par les mi-
nistres, les sénateurs, les députés, les gé-
néraux, les amiraux, les préfets, les arche-
vêques et les gardes champêtres, — qu'il
n'yavait jamais eu de bon Dieu,qu'il n'y
en aurait jamais,- que la vraie sagesse
était de rigoler ; la propriété, le vol ; le
vol, la propriété ! 11 prêcha les unions
libres, en donna tout de suite l'exemple
avec une jeune personne rencontrée à
son auberge ; il nia la patrie, la famille,
la morale, la pudeur ; recommanda le
braconnage et la prostitution, — et fut
acclamé.
— Enfin ! je vous retrouve ! lui dit un
de ses lecteurs habituels.
— Ah ! vraiment, riposta l'homme de
lettres ahuri. vous me retrouvez,
vous.? eh bien, moi, je m'y perds !
Qui suis-je en fin de compte ? votez, vo-
tez ! c'est dans huit jours. mais d'ici
là fichez-moi la paix. ou je finirai par
croire que c'est i'autre, qui a fait mes li-
vres. Le parti en souffrirait.
MA URICE MOU TÉG UI.
(Reproduction interdite.)
» -
PETIT BILLET DU MATIN
A MADEMOISELLE OTEBO
Las! belle Ocero, les temps sont passés où
les rois et les peuples chantaient en plein air
des hymnes à la Beauté libre, et aujourd'hui,
en Russie pas plus qu'en France, on ne ba-
dine avec le nu. Vous voilà donc chassée du
pays des boïards par un ukase de la pudeur
slave, pour vous être, aussi déshabillée
qu'Eve à son premier péché, fait servir sur
un plat d'argent dans un banquet militaire.
Les agences nous informent que déjà vous
avez, avec armes et bagagcs,franchi la Béré-
sina, et que vous allez bientôt revenir :
Au vrai pays de gloire
Sur les bords de la Seine ou de la verte Loire.
Gardez-vous bien alors, en ce pays où fleu'
rit le Bérenger, de sortir la grande peau-
comme on dit dans les salons de la Revue
des Deux-Moudes. Ici, charmante Otero, on
ne s'en tire pas avec une simple retraite de
corps, mais bien avec deux mois de prison.
Mu L.'H.
4
HISTOIRES DÉSOBLIGEANTES
LE
PAME DES TAitbSfDLES
Ce fut chez Barbcy-d'A'JreviJJy, en
1869, au temps de ma jeunesse radieuse,
que je rencontrai ce p.jéie. 11 m'inté-
ressa tout de suite par ses cheveux et
son coup de gueule.
C'était un hirsute blanc dont le portde
tête continuel semblait in deli à tous les
tondeurs. Bien qu'il eût à peine quarante
ans, l'épaisse toison couleur de neige
qu'tl secouait dans les vents lui don-
nait, à quelque distance, l'aspect d'un
Saturne pétulant ou d'un Jupiter de la
panclastite prématurément vieilli par un
abus incroyable des carreaux de la vo-
lupté.
La mauvaise petite figure de brique
pilée qu'il exhibait sous les flocons, se
manifestait plus bouillante et plus cuite
chaque fois qu'on la regardait.
Son agitation chronique l'étonnait lui..
même :
— Je suis le parloir des tarentules,
criait-il de sa voix de promis à la cami-
- t
Un îVuméro ï Paws, 15 cent — Départements, 20 oent
1- ëAtàEDI 11 AOUT Jan
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quant à leur teneur
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le lendemain. — J. ims, préface de GilBlas.
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HUIT PAGES : 5 CENTIMES
SOMMAIRE
du numéro du dimanche 13 août 1893
Tirage : 265,000 exemplaires
TEXTE «
EUGÉNIE J. Ricard
L'AMOUR DU MENSONGE Ch. Baudelaire
BouBouRocHB. G. Courteline
Ex AMOUR (suite) Jean Ajalbert
LE MORT MAUDIT Jean Bichepin
COUBIHE LAUBA (suite). Marcel Prévost
DESSINS
EUGÉNIE. Steinlen
YACHTIHG Guy do
LE MOBT MAUDIT. Balluriau
LIS BON TEMPS Steinlen
CHANSON
la BON TEMPS. Xanrof
SOMMAIRE
LES CONTES DE LA FÉE MORGAItIg. - J. Ricarù,
COMMENT ON VOTE. — Mdurice Montégut.
LE PARLOIR DES TARENTULES. — Léon Bloy.
PAR ARRÊTÉ. — Chose.
PARIS-PUNAISES. — Louis Gaillard.
A TBATEBS LA POLITIQUK. - Adrien Duvand.
COULISSES DE LA FINANCE. - Don Caprice.
NOUVELLES RÉVÈLÃ-TIONS SUR LE PARTI NAUNDOBFF.
Jean Horla.
Pnopos DE eounMM. — Gaultier-Garguille.
FEUILLETON : PEAU NEUVE, Tommy Lad.
GIL BLAS DE OErJiAIN
Contes et Chroniques par :
91 areel Prévost.
Pompon.
Lapomély.
Les Coules le la Fée Moipe
DERNIER NOCTURNE
Avant-hier soir j'ai trouvé sur ma table
un petit paquet noué d'un ruban large
où il y avait des fils d'argent et d'or dans
une soie d'un vert fané délicieux.
Le ruban défait, le paquet s'est formulé
en une lettre très longue, écrite sur de
grandes feuilles de papier glacé d'azur
pâle et qui sentait si bon.
La lettre disait :
« Ceci sera ma dernière communica-
tion. En haut lieu on a été mal satisfait
de mon service littéraire. J'ai du chan-
gement. Je ne raconterai plus d'histoi-
res pour endormir les écrivassiers né-
vropathes. Voici mon dernier conte.
C'est une histoire aux débuts de la-
quelle j'ai assisté dans des temps loin-
tains déjà, et dont la fin a quelques jours
de date. Elle m'a semblé d'allure à t'a-
muser, et comme, au fond, je t'aime as-
sez, grand serin, j'ai pris une plume
d'oiseau bleu pour te l'écrire. Suis-je
assez bonne !
Il y avait une fois — de cela nous som-
mes à vingt-cinq ans de distance — une
petite fille et un petit garçon qui jouaient
dans un jardin. La petite fille avait sept
ans, le petit garçon : dix. Elle était mai-
gre, avec un long col pliant, au front
trop bombé, au nez trop mince, une
bouche trop triste, et des yeux. des
yeux singuliers qui avaient l'air d'être
des chambres hantées. C'était une drôle
de petite fille, a la vérité. Lorsqu'on po-
sait son regard sur elle à l'improviste la
parole que l'on allait dire restait en che-
min ; on avait la secousse d'un inquié-
tant inconnu brusquement heurté. Cette
petite fille, en somme, semblait receler
une âme volée qu'elle aurait craint infi-
niment de voir découvrir. Il y avait un
peu d'angoisse toujours sur sa figure,
une expression qui, eût-on pu dire, s'é-
tait usée, avait vieilli sur d'autres figures
— des figures de gens morts depuis long-
temps peut-être. On ne savait.
Le petit garçon était grand pour son
âge, avec une peau colorée comme un
tabacd'Orient, des cheveux bleus comme
ceux des gitanos, de très grands yeux au
regard aigu, direct et violent. Et comme
la fillette avait sur sa figure des reflets
d'outre-tombe, il avait, lui, les marques
de la réalité, de la passion, de la vie vé-
hémente, inscrites sur tout son être élas-
tique et fort.
Le jardin était un vieux jardin de
prieuré, a l'ombre d,une haute église,
avec des murs mangés de mousses, des
arbres fruitiers plantés au hasard, des
violettes dans les pelouses abandonnées.
C'était une après-midi -d'Automne, et
le petit garçon et la petite fille avaient
joué longtemps. Maintenant ils s'étaient
arrêtés et regardaient un rayon de so-
(eil couché à leurs pieds, tout doré sur
l'allée brune.
— Tu sais que je pars demain, que je
rentre au collège, disait le garçon.
— Oui, répondait-elle.
Et dans ses grands yeux singuliers
remuaient des idées qui les faisaient
tour à tour tristes et joyeux — comme
si elle eût éprouvé de la douleur et dlll
soulagement tout ensemble à cette idée
qu'il s'en allait.
Brusquement le gamin reprenait :
- Tu vas me jurer que pendant que
je ne serai pas là tu ne parleras pas à
Henry. pas une seule fois, tu entends?
Il lui prenait le poignet. Avec des
rayons plus vifs d £ douleur et de joie
Lsuilije&aut. de ses veux la pAA/mait
la tete et, d'une voix très basse qui s'en-
tendait pourtant comme si elle eût crié,
elle disait
— Non.
-Tu ne veux pas jurer ?
De cette voix qui n'était qu'un souf-
fle, elle disait encore :
— Non !
Alors, avec un brusque élan de rage,
il la prenait par sa taille si étroite, la
serrait contre lui en un sauvage mouve-
ment de tendresse et de fureur, puis, se
courbant, il lui mordait l'épaule — sa pe-
tite épaule pointue au dessin délicat,
qui sortait, finement pâle, du décolletage
de sa robe de piqué. Et du sangapparais-
sait sur la peau.
Il relevait la tête et repoussait violem-
ment la fillette en disant :
— Comme je te déteste !
Et tandis qu'il s'enfuyait par le grand
vieux jardin, de la même voix basse,
timbrée, étrange, la fillette répétait :
— Non !.
C'était dans un bal. Une de ces fêtes
de ville d'eaux, bruyantes et vulgaires ;
ici claquantes de luxe réel et excessif,
là tout en clinquant.
Une jeune fille et un jeune homme ve-
naient de valser ensemble. Maintenant,
accoudés à une rampe de terrasse, ils
étaient enveloppés du velours souple de
la nuit et regardaient les molles indica-
tions d'un vaste paysage, déclamatoire
et lugubre, où il semblait qu'il y eût un
lac, des montagnes entassées, des tor-
rents lointains.
Le jeune homme : c'était l'enfant aux
cheveux noirs comme ceux des gitanos,
au regard direct et violent. La jeune
fille : c'était la petite fille dont les yeux
semblaient des chambres hantées. Ils
n'avaient changé ni l'un ni l'autre. Elle
était toujours maigre, toujours irréelle,
toujours elle semblait cacher en elle une
âme volée qu'elle craignait qu'on ne lui
reprît. Depuis un an ils étaient fiancés.
Et voici ce que disait le jeune homme:
— Pourquoi ne me parles-tu pas?
Pourquoi ai-je senti en toi, encore, tou-
jours, cet éloignement de moi?. pour-
quoi me hais-tu ? car je sens que tu me
hais. Et pourtant tu es si tendre. qu'y
a-t-il en toi qui m'attire et me fait peur,
comme si tu étais ma destinée. une
abominable destinée !
Elle soupire et ne répond rien.
Il lui prend le poignet et le lui secoue
violemment.
— Quand nous marions-nous ?. dis ?
quand ?. Je suis las d'attendre, je te
veux toute. Dis-moi que bientôt nous
allons nous marier ?
Et de cette voix qui n'est qu'un souffle,
elle répond :
— Non.
Elle pleure. De grandes larmes d'ar-
gent coulent sur ses joues, et dans ses
yeux inquiétants, ces yeux où frisson-
nent des rêves d'âmes disparues, il y a
une douleur immense. Pourtant elle
répète :
- Non.
Alors il se penche sur elle, l'étreint-
si fort que l'on entend craquer la frêle
ossature, et il lui mord la joue cruelle-
ment. Le sang coule.
Et le jeune homme s'enfuit en criant :
— Je te hais !
Tandis qu'elle secoue lentement sa
tête pensive, les larmes d'argent coulent
toujours sur ses joues.
.,.
C'était dans une chambre close et
tiède. Une jeune femme, immobile, éten-
due sur une chaise longue, regardait le
feu. Cette jeune femme : c'était l'enfant
du grand jardin ombragé par le mur de
cathédrale, la jeune fille qui pleurait
sur la terrasse.
Or voici ce que lui montrait sa son-
gerie profonde :
Des années de paix mélancolique
après le départ du sauvage compagnon
de sa jeunesse — paix partagée avec un
homme grave et doux, son mari, dont
l'affection apaisante avait peu à peu ef-
facé presque jusqu'au souvenir des trou-
bles jadis ressentis auprès de celui
qu'elle avait cru aimer. Longues, lon-
gues avaient été ces années !. Mainte-
nant elle touchait à la limite de la jeu-
nesse; il semblait qu'elle allait entrer
dans la grande sérénité des suprêmes
apaisements. Mais quelque chose était
advenu. Elle regardait toujours les
braises, absorbée en une intense songe-
rie.
Pendant ces années qui avaient coulé
si calmes, elle avait dû beaucoup chan-
ger, car les gens qu'elle avait connus
jadis ne la reconnaissaient pas tout de
suite, et toujours c'était la même excla-
mation :
— Vous avez quelque chose de telle-
ment différent!. vos yeux ont l'air d'a-
voir changé de couleur.
Elle-même sentait se dessiner sur son
visage la forme d'expressions autres
que celles qui lui étaient habituelles.
Ses traits, sans doute, s'étaient apaisés
comme son âme.
Et puis quelque chose était advenu.
Elle avait, un soir de Décembre, ren-
contré celui dont l'âme véhémente et
brutale avait troublé sa jeunesse. C'était
à Notre-Dame. L'ombre montait du sol
comme une fumée. Un chant d'orgue
traînait dans l'air. Ils s'étaient trouvés
en face l'un de l'autre devant un des ifs
triangulaires où brûlent les cierges qui
implorent et qui remercient. La rouge
lueur les avait éclairés tous deux: ils
s'étaient reconnus. Au souvenir de cette
reconnaissance elle avait un frisson. La
tête de l'homme était devenue tragique ;
d'abord elle l'avait crue sillonnée de
cicatrices profondes, mais, l'instant d'a-
r>*àa on,» comprenait que c'était seuie-
ment des plis creusés par les sensations
trop fortes, les pensers trop amers, les
regrets trop persistants. Sa face avait
l'effrayante immobilité qu'ont, au cen-
tre des plaines mornes, les grands chê-
nes foudroyés où rien ne vit plus et qui
demeurent comme un désespoir dressé
contre la face du ciel..
Ils s'étaient parlé. Il avait Mt les mi-
sères d'une vie de jouissances sans trêve,
toujours insuffisantes à calmer l'appétit
de son cœur brûlé par l'image de l'étran-
ge petite amie.
Souvent depuis ils s'étaient revus. Il
lui avait parlé d'amour avec des mots fé-
roces, des mots qui insultaient et qni
adoraient. Cela avait duré des semai-
nes. Et, à mesure que le trouble reve-
nait à son âme, elle avait senti sur son
visage revenir les expressions d'autre-
fois; et les gens qui pendant un temps la
reconnaissaient difficilement s'écriaient
maintenant à sa vue :
— Tiens ! vos yeux ont repris leur
couleur. Ils sont à présent tout a fait
comme avant votre mariage.
Un jour, il n'était pas venu à l'heure
où elle l'attendait; puis le lendemain en-
core il n'était pas venu. Sans doute il
était las de son inutile effort pour la con-
quérir, il était repris de cette haine dont
se doublait sa tendresse.
Elle lui avait été douce pourtant, pen-
dant que lui, si violent, si dur, lui disait
de ces paroles qui font saigner le cœur
irréparablement. Si douce !.Jamais elle
n'avait répondu. Elle s'était tue tou-
jours. Maintenant il était parti. Elle ne
le reverrait plus sans doute. Et, tandis
qu'elle regardait le feu, des rayons ra-
pides de douleur et de joie jaillissaient
de ses yeux — comme tant d'années au-
paravant, dans le grand jardin à l'ombre
de la cathédrale.
Brusquement elle sentit qu'il était en-
tré. Aucun bruit ne s'était fait dans la
chambre. Elle se retourna — certaine de
le voir debout devant elle.
Il était debout devant elle.
Alors les yeux fantômatiques de la
jeune femme eurent un grand jet de lu-
mière aussitôt éteint. Elle venait de
comprendre que c'était la mort qui était
là — debout devant elle.
Résignée, avec un rayonnement mer-
veilleux sur la figure, elle attendait.
L'homme était terrible. Pendant les
quelques semaines qui les séparaient de
leur dernière entrevue, un sinistre, un
hideux mal s'était abattu sur lui. Des
mèches blanches sillonnaient ses che-
veux; ses sourcils et ses cils avaient dis-
parus, laissant des marques pourpres au
front et aux paupières ; des taches bru-
nes, àla terrible signification, marquaient
le haut de son visage couronné lamenta-
blement de plaies vives. Il était mons-
trueux; il était terrifiant surtout.
Et tandis qu'il se mettait à rire d'un
rire rauque, atroce, les yeux de la jeune
femme devenaient sublimes. Ils reflé-
taient la Bonté Suprême. On eût dit que
sa douloureuse et pensive forme ne te-
nait plus à la terre. Devant cette homme
stigmatisé par le vice, répugnant et hi-
deux, elle imposait comme une évocation
de l'Idéal triomphant.
Il riait toujours.
— J'ai voulu guérir de vous, ôter votre
pensée de mon sang. et. Vous voyez !
cria-t-il.
Puis il se mit à genoux. Pendant de
longues minutes leurs yeux se croisè-
rent en un duel silencieux — les yeux
de la femme : miraculeux, bons et subli-
mes ; les yeux cyniques, ulcérés, féroces
de l'homme.
Enfin, d'une voix basse qui frémis-
sait, il dit cette fois encore :
- Ah! que je vous hais !
Et elle répondit avec un sourire :
— Non. Vous m'adorez.
Alors d'un mouvement furieux il la
saisit, sans qu'elle résistât, et de sa bou-
che empoisonnée il lui coupa la bouche
en une morsure longue.
Puis cette fois encore il s'enfuit.
Elle est morte hier de la maladie
hideuse. Quant à lui- mais qu'importe,
lui !
Adieu, mon ami, médite cette his-
toire. Il s'y cache un symbole ».
« MORGANE ».
Pour copie conforme :
J. RICARD.
(Reproduction interdite.)
4
Nouvelles & Echos
AUJOUSQ'HrjI
A deux heures, courses à Cabourg. Pro-
nostics du Gil Blas :
Oaks du demi-sang : Ecurie J. Lemon-
nier, Macta.
Prix du Gouvernement : Kaoline, Léda.
Prix des Dames : Babylas, Rapidité.
Premier Prix du Casino : Kan, Levan-
tine.
Deuxième Prix du Cercle du Casino :
Elise, Cordoue.
Prix du Conseil municipal : Zéphir,
Vezin.
C'est aux plages maintenant qu'il nous
faut demander des nouvelles.
Avant-hier, une fête charmante avait lieu
chez la comtesse de Malden, qui habite le
chalet des Clochettes, sur la route de Trou-
ville à Honfleur. Ce chalet est un véritable
palais italien, bâti dans une situation mer-
veilleuse. Le grand hall éclairé à profusion
de lanternes vénitiennes, était d'un effet
féerique. Par une innovation très heureuse,
on a commencé le bal par la fin, c'est-à-dire
par le cotillon auquel ont pris part avec en-
train un essaim de jeunes femmes et de jeu-
nes filles fort jolies.
Les clochettes semblent disposées à sou-
hait pour les fêtes d'été. De quelque côté
que le regard plonge, la vue est magnifique
et l'on aperçoit dans le lointain, comme
dans un panorama enchanté, d'un côté la
forêt de Saint-Gaticn ; de l'autre, les Ro-
ches-Noires, la falaise d'Hennequeville, la
pointe de Villerville et par les temps très
clairs le phare du Havre et la terre de Saint-
Adresse.
On annonce la mort de mademoiselle
Salaro di Borgo belle-fille du feu comte
d'Osmont, elle était âgée de vingt-six ans.
X
Nous apprenons également la mort du
commandant Molart, un des plus brillants
officiers de 71, qui sauva le livre de la Dette
publique pendant les incendies de la Com-
mune. X
La vie à Paris est tout entière hors de
Paris. A Trouville, les fêtes se succèdent.
Bal au chalet Saint-Pierre, réception à la
Villa Persane, assaut d'armes, promenade
en mail, rien ne manque ; le programme est
complet.
A l'Eden-Casino, il y a foule chaque
soir. Dans les loges et fauteuils, on remar-
quait : duc et duchesse de Morny, duc de
Massa, comte Charles de Galliffet, comte de
Contades, M. et madame Maurice Ephrussi,
Camille Saint-Saëns, etc.
Le monde des ceintures qu'on dore était
également au grand complet : Suzanne Der-
val, Emilienne d'Alençon, Irma Montigny,
Félicia Herville, Suzanne Nery, Depoix,
Marie Lacroix, Albertine Wolff, Marie Vin-
cent, Madeleine de Negen, Marion de Lor-
me, Renée Villars, Marguerite Thiébaud,
etc., etc.
Les sisters Forbes et le Russe Tscher-
noff ont eu les honneurs de la soirée.
Très applaudis aussi : les Ferest, clowns
musicaux désopilants, et mesdemoiselles
Noraly, Forny, Dumoraize et Stainville.
Médaillon :
EMMA LATOUR
Une très aphrodisiaque, callipygement
sculptée, lampyrée d'yeux mer, dentée d'o-
palines que baisent humidement des lèvres
grenadines, chevelée de mûre avoine hadi-
gnement ondulée.
Messaline di primo cartello, a fait jadis la
place; puis, sa rupture avec le vicomte de
P. l'ayant horriblement compromise, fit
l'étranger et trôna à Pétersbourg.
Vient de rentrer en France par la porte
des bains de mer et embobine en ce moment
tout le high-life d'une plage du Midi.
Recherche les bien rablés et fait une cour
assidue à Candé.
Faible très fort pour les moules, le cor-
ton, la chartreuse verte, les caniches blancs,
les jupons pailles, les voilettes blanches, les
bagues sorcières.
Rue Gambetta, près de la Conche, petit
premier rigolo tendu de mauve avec tinnée
de coquilles clouées au plafond, un vieux
sabre turc, une flûte cassée, de vieilles mé-
dailles, des guirlandes de corail.
Ouvrière consciencieuse, assagie, résolue
à de grandes concessions, enchante tous
ceux qui lui offrent la tour de Cordouan et
retriomphera certainement cet hiver à Paris.
Devise : Consolatrix spleenorum.
Couleur d'âme : Reine-claude.
Caractéristique : Douze mille francs de
rente.
Une nouvelle recrue dans] le bataillon de
Cythère : Kamouna.
Un joli filet de voix qui ne demande qu'à
grandir. Détaille à ravir ; suggestive au
possible dans sa robe bleue ; gantée de noir
du haut en bas. sous sa robe miroitante.
Signe particulier : A la fin de chaque cou-
plet, un petit coup de jambe tout à fait
c.anaille 1
Un de nos bons amis du Tarn, chez le"]
quel je suis en déplacement depuis quelques
jours, m'a conté une histoire d'huissier qui
va faire les délices de Laure de Chiffreville.
La voici :
Il y a quelques mois, un huissier se pré-
sente à Lavaur, chez un joyeux viveur,
pour procéder à une saisie. Comme notre
homme ne doit rien à personne, il songe
tout de suite à s'amuser un brin avec
cet homme noir qui vient de le déranger
sans raison.
Sans lui demander au nom de qui il se
présente pour saisir, il l'accueille avec tous
les honneurs qui lui sont dûs, et aussitôt
que l'officier ministériel a débité son boni-
ment, il lui dit : « Si vous voulez, nous al-
lons commencer par la cave. »
La proposition est acceptée et M. de L.
conduit Me X. à l'endroit indiqué. Il lui
ouvre la porte, le fait passer devant lui,
ainsi que les deux clercs, et une fois tout le
mondq, entré il ferme la porte, en laissant
les trois malheureux prisonniers dans l'obs-
curité, et il s'en va et ne s'occupe plus
d'eux. -
Comme ils poussaient tous trois des hur-
lements de sauvages, le valet de chambre
eut pitié d'eux, et après deux heures de cap-
tivité, il vint les relâcher en leur disant de
ne plus se tromper à l'avenir.
Le jeune Lionel de la Rochen., fatigué
des charmes usés de la demoiselle Irma de
B.., qu'il guerluchonnait depuis longtemps
déjà, vient de rompre avec elle pour donner
à madame W.., une des femmes les plus jo-
lies de la colonie israélite, des leçons de
beau vivre.
Comme madame W.., est une belle fem-
me et qu'elle est vibrante et qu'elle annonce
un grand fonds de tempérament, il y a lieu
de croire qu'avant peu elle sera dans la cir-
culation.
En attendant, Irma de B.., qui était fu-
rieuse d'avoir été délaissée pour une juive,
semble aujourd'hui consolée, car elle vient
de s'installerà Cabourg dans une des plus
jolies villas de cette station. Hier, elle a
donné un grand dîner auquel a été convié le
Tout-Cythère. Parmi les plus croquantes,
on remarquait : Anna Debriège, Lucile De-
lighy, Suzanne Nery, Juliette Ferny, Su-
zanne Derval, Félicia Herville, etc. Après
le dîner, on a fait un tour de valse et, com-
me les tziganes étaient de la fête, on s'en
est allé souper chez Suzanne Nery, dont on
a pris congé le lendemain à l'heure du
bain.
NOUVELLES A LA MAIN
Mystères du cœur féminin :
Une jeune veuve se lamente sur le mauso-
lée de son infidèle époux récemment dé-
cédé :
— Il me reste du moins une consolation,
fait-elle, je ksais maintenant où il passe ses
nuits.
LE DIABLE BOrmUi:
*
Comment on vote
Depuis quelques années, mon ami
Maltebrun, romancier, chroniqueur aux
grands journaux littéraires, Maltebrun
que vous connaissez tous, Maltebrun, en
un mot, a pris pour habitude d'aller se
reposer deux mois sur douze dans un
hameau perdu des côtes de Bretagne.
C'est, prétend-il, l'unique remède à la
terrible anémie cérébrale, à cette mys-
térieuse neurasthénie dont il est tant
parlé, à tous les détraquements de Da-
moclès suspendus sur la tête des ou-
vriers de la pensée.
Donc, en août et septembre, entre le
ciel et l'eau, sous le soleil ou par les
brumes, oubliant les luttes, les décep-
tions, les amertumes et l'acharné labeur
de Paris déserté, Maltebrun se délasse,
se refait et s'imprègne. Il est l'ami de la
mer, l'hôte du rocher, l'homme errant
de la grève, et fraye avec les goélands.
Comme il a toujours des sous dans ses
poches, les mômes de la mendigoterie
l'escortent ; et, dans la bourgade, on le
tient pour bon sire; bref, il est devenu
populaire et, puisqu'il fait des livres, on
croit tout ce qu'il dit.
Pour son malheur, Maltebrun, qui d'o-
pinions politiques ne possède pas l'om-
bre et subirait les rois après la répu-
blique, a, par le monde, un homonyme
fougueux, un Maltebrun encore, qui se
mêle à toutes les bagarres du pavé et
lâche ses dysenteries incendiaires dans
les journaux sang de bœuf qui bouil-
lonne ou lie de vin qui fermente.
A Paris, peu de monde s'y trompe; et
encore! mais au fond du Finistère, il
faut avouer qu'une confusion serait très
pardonnable, étant presque obligatoire.
Dire que de cette rencontre de noms le
premier Maltebrun est ravi dans son
âme serait exagéré jusqu'à l'invraisem-
blance. Il s'y résigne et voilà tout, ne
pouvant pas mieux faire, mais, chaque
fois que l'erreur se produit, il est pris
d'un petit tic nerveux qui ressemble
fort à une grimace.
Or, cet été, en arrivant à son hameau
perdu, l'accueil des habitants, pour si
flatteur qu'il fut, lui causa quelque en-
nui. Les gros bonnets du lieu, sortant
de leurs masures, en s'essuyant les
mains, chantaient tous à peu près la
même antienne :
— Comment! vous? déjà!. serviteur,
bien content. mais nous ne vous atten-
dions pas si tôt.
— Ah ! dit Maltebrun qui souriait en-
core, et pourquoi, je vous prie.?
— Dame. vous allez manquer là-bas.
- Où, la-bas ?
— A Paris, donc.
— Manquer à qui, à quoi ?.
— Aux élections, parbleu !
Maltebrun ne percevait pas à cet ins-
tant la vérité entière. Malgré tout, il fut
un peu troublé. Ces braves gens, sans
nul doute, n'admettaient point qu'on
abandonnât son arrondissement à l'heure
solennelle où l'on sortait les urnes. Ils
avaient raison en principe. mais il ne
pouvait guère leur répondre qu'il se sou-
ciait de la couleur des Chambres autant
que de sa première maîtresse, et qu'il
n'avait jamais voté, tenant les candidats
tous en pareille estime. Il répliqua à
tout hasard, pour dire quelque chose :
— Si je manque, je ne @ manquerai
guère. allez. qu'est-ce qu'un homme,
une voix, une unité, dans la masse du
nombre ?
Mais déjà un malin qui avait navigué
l'interrompait sans honte :
— Allons, ne dites pas cela. nous
vous aimons, par ici ; nous avons fait
venir votre journal, nous le lisons.
Toute l'année, vous avez troussé de la
belle besogne.Et,dame, ça nous étonne
qu'au dernier moment vous lâchiez le
poste de combat.
Patatras !. Ça y était. Maltebrun
était fixé. On le prenait une fois de
plus, lui, l'écrivain amoureux de la
forme, le caresseur d'images, pour l'au-
tre, le pseudo-politicien, révolté contre
les institutions y compris l'orthographe.
Il enragea bel et bien et grogna, en co-
lère :
— Mais, fichtre, il y a plus d'un âne
qui s'appelle Martin. ce n'est pas moi
qui.
Autour de lui, on haussait les épau-
les. Et le même malin reprit en clignant
de l'œil :
—Vous vous appelez Maltebrun ?
— Vous le savez bien.
— Vous écrivez dans les feuilles ?
-Oui.. mais.
— Allons,ne vous fichez pas de nous!.
nous avons lu vos articles. il se peut
que vous ne vouliez pas faire de politi-
que ici ; vous venez pour vous reposer
et puis vous nous trouvez trop bêtes
sans doute. mais ne niez pas qu il fait
jour. nous avons des yeux comme les
gens de Paris. Et puis vous avez tort
de vous délier, nous marchons avec
vous !
*
* *
Seul, au bord de la mer retrouvée,
Maltebrun sautait avec fureur, en mas-
sacrant des crabes.
— Nous marchons avec vous ! répétait-
il tout haut, — ils marchent avec moi !
alors les voilà tous socialistes, au mau-
vais sens du mot, communards, quoi!
démagogues, fous furieJx, tout cela par-
ce qu'il y a deux Maltebrun, et que l'au-
tre, par conviction ou intérêt, après qua-
tre ou cinq métiers, a choisi celui-là, d'a-
gitateur des foules. Ah ! je suis joli.
me voila responsable sans le vouloir, du
vote de cent imbéciles qui croient en un
moi que je ne suis pas, ont lu en toute
confiance mes articles que je n'ai pas
écrits, grâce au dieu de la prose ! tout
cela parce qu'ils ont un peu d'amitié pour
ma personnalité vraie qu'ils s'imaginent
autre. Si j en sors. ils vont voter pour
Ravachol, heureusenient qu'il est mort.
mais il a laissé après lui des cocos de son
espèce. elle va bien, la vieille Breta-
gne ! nom de Dieu! Comment faire.
comment faire ?
Il rêva quelques minutes. Autour de
lui, derrière des masses énormes de gra-
nit écroulées dans la mer, le soleil des-
cendait dans sa gloire; par bandes rouges,
cuivre, soufre, il sabrait l'horizon de ses
derniers rayons, souverain jusqu'à la
mort ; et dans l'eau, les reflets dou-
blaient sa grandeur et son apothéose;
sous lui, la mer s'étalait écarlate, d'or ;
— plus loin, dans les profondeurs enté-
nébrées déjà, elle s'endormait vio ette,
ou d'argent, avec des luisants bleuâtres;
et chaque minute modifiait l'aspect, l'en-
semble, la vision toujours intense du no-
ble paysage. Cela restait grand, cela
restait beau, dans la dégradation des
teintes, les mouvements de couleur.
Maltebrun haussa les épaules :
- Ah ça! suis-je idiot? qu'est-ce que
cela peut me faire, le vote de ces brutes?
Ce n est qu'une mystification de plus au
compte dusuffrage universel. Qu'importe
la couleur des opinions, variant avec
l'heure? la mer, le ciel aussi changent
éternellement sous l'œil qui les contem-
ple. ils changent, mais demeurent; la
patrie elle aussi garde ses grands con-
tours et les sept tons de l'arc-en-ciel se
fondent pour sa gloire. votez blanc,
votez bleu, votez rouge, mes amis. je
m'en Jave les mains et je regarde au
large !
Puis, après une courte réflexion, il
ajoutait de nouveau :
— Au fund, ce qui me vexe le plus
c'est d'être, encore une fois, pris pour
un autre ! voilà la vérité, mou petit
amour-propre.
Mais le lendemain, il était ressaisi par
les politiciens du village ; ils l'entraî-
naient à part ; chacun s'était fait fort de
l'amener à résipiscence.
- Avouez donc. voyons. pourquoi
vous cachez-vous.? disait l'un.
— Il est pourtant bien glorieux, votre
rôle, à Paris, insinuait l'autre ; et votre
campagne de cet hiver était rudement
menée. Voyez-vous ici, il n'y a pas que
des paysans ; nous, les vieux matelots,
nous avons le nez creux ; on apprend
bien des choses à voir tant de pays.
nous avons jugé les hommes, a com-
mencer par nos chefs. Tenez, l'amiral
X., c'est un traître. vendu aux An..
glais. à Madagascar.
Maltebrun levait les bras vers la voûte
éternelle, clamait désespéré :
— Jusqu'ici ! jusqu'ici ! Encore un, en-
core les Anglais. Quelle folie conta-
gieuse souffle sur toi, ma France! si les
simples s'en mêlent, on n'en sortira
plus.
Au quarantième entretien confiden-
tiel, Maltebrun furieux, avoua tout ce
qu'on voulut : qu'il était bien ce qu'il
n'était pas, qu'il avait quitté Paris, dû-
ment préparé, pour venir surveiller l'ac-
tion en province, qu'il fallait tout foutre
à bas, qu'on était trahi, vendu, par les mi-
nistres, les sénateurs, les députés, les gé-
néraux, les amiraux, les préfets, les arche-
vêques et les gardes champêtres, — qu'il
n'yavait jamais eu de bon Dieu,qu'il n'y
en aurait jamais,- que la vraie sagesse
était de rigoler ; la propriété, le vol ; le
vol, la propriété ! 11 prêcha les unions
libres, en donna tout de suite l'exemple
avec une jeune personne rencontrée à
son auberge ; il nia la patrie, la famille,
la morale, la pudeur ; recommanda le
braconnage et la prostitution, — et fut
acclamé.
— Enfin ! je vous retrouve ! lui dit un
de ses lecteurs habituels.
— Ah ! vraiment, riposta l'homme de
lettres ahuri. vous me retrouvez,
vous.? eh bien, moi, je m'y perds !
Qui suis-je en fin de compte ? votez, vo-
tez ! c'est dans huit jours. mais d'ici
là fichez-moi la paix. ou je finirai par
croire que c'est i'autre, qui a fait mes li-
vres. Le parti en souffrirait.
MA URICE MOU TÉG UI.
(Reproduction interdite.)
» -
PETIT BILLET DU MATIN
A MADEMOISELLE OTEBO
Las! belle Ocero, les temps sont passés où
les rois et les peuples chantaient en plein air
des hymnes à la Beauté libre, et aujourd'hui,
en Russie pas plus qu'en France, on ne ba-
dine avec le nu. Vous voilà donc chassée du
pays des boïards par un ukase de la pudeur
slave, pour vous être, aussi déshabillée
qu'Eve à son premier péché, fait servir sur
un plat d'argent dans un banquet militaire.
Les agences nous informent que déjà vous
avez, avec armes et bagagcs,franchi la Béré-
sina, et que vous allez bientôt revenir :
Au vrai pays de gloire
Sur les bords de la Seine ou de la verte Loire.
Gardez-vous bien alors, en ce pays où fleu'
rit le Bérenger, de sortir la grande peau-
comme on dit dans les salons de la Revue
des Deux-Moudes. Ici, charmante Otero, on
ne s'en tire pas avec une simple retraite de
corps, mais bien avec deux mois de prison.
Mu L.'H.
4
HISTOIRES DÉSOBLIGEANTES
LE
PAME DES TAitbSfDLES
Ce fut chez Barbcy-d'A'JreviJJy, en
1869, au temps de ma jeunesse radieuse,
que je rencontrai ce p.jéie. 11 m'inté-
ressa tout de suite par ses cheveux et
son coup de gueule.
C'était un hirsute blanc dont le portde
tête continuel semblait in deli à tous les
tondeurs. Bien qu'il eût à peine quarante
ans, l'épaisse toison couleur de neige
qu'tl secouait dans les vents lui don-
nait, à quelque distance, l'aspect d'un
Saturne pétulant ou d'un Jupiter de la
panclastite prématurément vieilli par un
abus incroyable des carreaux de la vo-
lupté.
La mauvaise petite figure de brique
pilée qu'il exhibait sous les flocons, se
manifestait plus bouillante et plus cuite
chaque fois qu'on la regardait.
Son agitation chronique l'étonnait lui..
même :
— Je suis le parloir des tarentules,
criait-il de sa voix de promis à la cami-
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