Titre : La Fronde / directrice Marguerite Durand
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1899-10-12
Contributeur : Durand, Marguerite (1864-1936). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327788531
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 12 octobre 1899 12 octobre 1899
Description : 1899/10/12 (A3,N673). 1899/10/12 (A3,N673).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6703792g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-LC2-5702
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/01/2016
La Fronde
TROTSTÊME ANNfig. - R' 871 JgJDlJjMKT^^ -AINT BLPRAPINIÇ ____? LE NUMÉRO : CINQ
1
CALENDRIER RÉPUBLICltf
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tllENCRIER PROTESTUT
. Passives de !a Bible à lire et à raiditae
PROVERBES XVII, i.
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CALENDRIER ISHÂÈIITE
8 IIE3CIIVAN ANNfiB :>300
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Prix des Abonnements :
PARIS Un An 20 fr. Six Mois 10 fr. 50 Trois Mois 5 fr. 50.
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LA FRONDE, Journal quotidien,
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A 1 h. 1/2 emitscs à Compiègne.
Hibliothèqug tl'I<.:dunalion libertaire, 26, rue
Tlt')n, à 8 h. 1/2 conférence par M. P. Dcla:ia.le :
Le Mouvement syndicale et les anarchistes.
rdiversité populaire, 157, faubourg Saint-An-
toine, à M h. 1/2, coufùronce par M. Paul Des-
jardins : Le sentiment maternel interprété par
Tes grands artistes.
Musiques militaires de 4 h. à 5 h. : Square
«l'Anvers, place des Vosges, place de la Nation,
Huttes-Chaumont, Tuileries, Hanclagh. square
des UatifoÇnollcs.
Visites aux Musées dit fjyuvre, d,t Luxembourg.
de 'J h. à i h.; Cluay, de 11 h. à 4 h.; Guimet et
Gallkrtt, do midi à 4 h ; Palais ite Justice, de t 1 h.
il 4 h ; llCtel 'ie- Ville, de 2 à 3 h.; Monnaie, do
midi -t 3 h.; Trésor île Notre-Dame, Sainte-Chamelle
et Va-théon, tic 10 h. à 4 h.; Invalides, musée et
tombeau, de midi à 3 h.; Jardin des Plantes, la
ii'irnagc.ric, de 1 h. à 5 h.; galerie d'histoire na-
turelle, tle Il h. à 3 h.; Aquarium du Irocadero,
de V à 11 h. et de 1 à 3 h.; Palais de Saiut-Ger-
,mtin. de 10 b. lf2 il 4 b.; Palais de Fontaine-
• ble.iii, de il h. à 4 b.t Fortadin : le Va1a18 et les
Triarion.*, de 11 à 5 h.: Le le. de Paume, de midi
à 4 heures. Iliiso*e Carnavalet, de 10 h. à i h..
La Bonne Aventure
— Est-ce que vous croyez, vous? à la
chiromancie?
— Je ne sais pas... mais je crois aux
chiromanciennes...
— Comment cela ?
— écoutez : trois ami?, jeunes et forts
se promenaient un jour dans la campa-
gne. L'un d'eux, un garçon charmant,
peintre plein de talent, (on peut bien le
dire puisqu'il est mort) voit dans tin
champ quelque chose do rouge et de
brun. Il demande f1 un de ses compa-
gnons : qu'est ce que cela ? une fleur ou
un singe? « Les deux peut être », lui
répond l'autre, « c'est une femme... » —
* Kl c'est même une bohémienne ! » dit
le troisième.
— C'est bon, reprend le premier, nous
niions nous amuser! » Et il appelle la
femme et veut lui faire dire la bonne
aventure. C'était une belle créature vive
qui sentait bon. Le charmant garçon —
nous l'appellerons André pour simplifier
si vous voulez bien, reconnaît volontiers
ses qualités mais la traiteavec un certain
mépris ou plutôt un mépris certain. Il
discute et plaisante et ironise toutes les
prédictions de la bohémienne f1 ses deux
«•.ompagnons,et quand elle lui demande,
il son tour, sa main pour y lire, il la mit
dans sa poche en boulonnant et jurant
bien q*,.i'f-ii ne lcprendrait pas à jouer un
jeu si absurde et grotesque, et qu'il la
gardait pour une meilleure occasion.
Alors la femme se jette sur lui, saisit
son autre main qui tenait une cigarette
en arrache avec ses dents cette cigarette
clIflammée, demeure penchée deux se-
condes sur la paume ouverle tandis
flu'il riait toujours et déclare :
— Dans un an, jour pour jour. a une
heure du matin, toi. tu mourras de mort
violente... «Puis, elle disparait.., 1)
Ayant ainsi parlé, Gustave Mardochée
s'arrêta.
— Et alors? Et alors? demandèrent
uno douzaine de femmes avec intérêt.
KIICB avaient bien diné, se sentaient
jolies et désiraient avoir un peu peur.
— Alors, c'était un vingt octobre. An-
dré invite aussitôt ses camarades à sou-
per pour le 20 octobre de l'année sui-
vante afin qu'a une heure de la nuit ils
boivent tous ensemble à leurs bonnes
santés réciproques.
Ainsi fut fait.
L'année fut précisément clémente à
André. Il eut une maîtresse charmanto
qui n'était infidèle que juste ce qu'il
fallait pour animer l'amour, des succès
rapides, presque autant d'argent qu'il en
dépensa et sa santé fut parfaite.
lise sentait donc les musc:cs souples, ,
solides, lïtme sereine et légère. Des amis 1
de l'année précédente et d'autres encore .
furent conviés au jour fixé en son ate-1 ,
lier converti en salle de festin. Par un
hasard que personne ne put expliquer
plus tard. ou une malice dont nul ne se
révéla l'auteur, la grande horloge se
trouva ce soir-là avancer d'une heure.
Ainsi ce fut en réalité à minuit que
trompés par la sonnerie et se grisant de 1
paroles et de jeunesse gaie et de vin j
blond depuis une heure, les jeunes gens
portèrent joyeusement le toast à leur ,:
camarade en défi à la sinistre prédic- \
tion. , .. ]
Puis quelque temps après, ils parti- i
rent tous ensemble avec de derniers : au
revoir, à leur hôte qui du seuil du petit j
pavillon qu'il occupait au fond d'un jar-
din de la rue Lepic les éclairait, tenant (
haut une lampe allumée. Quand ils fu- ]
rent à la grille du passage, André ren- 4
tra. i
Mais avant qu'ils eussent dépassé et
refermé cette grille et comme un seul <
coup tintait clair à un carillon d'église J
dans la nuit, ils furent arrêtés net par
un cri effroyable... un hurlement de
bête égorgée — puis plus rien — le si- j
lence... <
Quand ils rentrèrent dans le pavillon, ]
ils virent leur ami étendu mort dans i
l'atelier plein de lumières, de fleurs et j
de tout If désordre du souper... 1
. — Al**< mon Dieu 1 mort 1 ^
— M'd.;s de quoi! ,
' —Mais comment 1 i
— Il s'était tué? <
— On l'avait assassiné ? . t
— Mais qui? \
— Mais pourquoi ? [
— Mais comment? # *
Elles parlaient toutes à la foig, fris-, j
nonnantes, ravies, ravissantes et pâles...
- Uu coup de poignard dans la région j
du cœur... dit Mardochée. î s
V Les interrogations reprirent t
— Je ne sais pas — et personne n'en a
jamais su davantage — mats. je vous l'ai
dit, je crois aux chiromanciennes... Et
il était content, son histoire avait plu.
On entendit dans un coin :
— Oh ! ma clière ! quelle horreur 1
Et plus loin :
— Mais non! mais non ! c'est bien fé-
minin! Et, quelqu'un de malin dans la
société ayant déclaré connaître un peu
les lignes de la main, reçut instantané-
ment en offrande une foula de mains
comme une pluie de fleur3...
MAY ARMAND-BLANC.
NOTES D'UNE
FRONDEUSE
Grallophobes !
Bruxelles, 10 octobre 1899.
i Décidément, rien ne vaut l'expérience
acquise sur place, matériellement —
l'école du fait !
Quand je lisais, chez nous, que les
Belges étaient soudain devenus gallo-
phobes; que ce peuple fraternel et hospi-
talier occupait désormais ses loisirs du
cri : « A bas la France ! » que nos compa-
triotes, habitués à y reccvoir le plus bien-
veillant des accueils, !l. rencontraient,
aûjovrfhuÇla ptm Uft- 4w HostUUit*
quand je lisais de telles choses, ma stu-
! peur, ma tristesse avaient raison de sc
tempérer de quelque incrédulité.
Car m y voici, dans « l'antre », le foyer
des haines de VEurope, soi-disant coalisée
contre nous 1
El c'cst la m'me atmosphère de sym-
pathie; ce sont les m ,mes mains tendues,
les mêmes physionomies cordiales, la
même belle humeur, le, même bonhomie
délicieuse, qui fait que Bruxelles, d'où
qu'arrive le voyageur, d'où que vienne le
proscrit, n'est jamais « l'étranger » lieu
de passage ou terre etisolement.
A tel point que la presse, m/:me, dédai-
gneuse du hideux projet de boycottage,
non patronné (bien en,tendu. 1) mais seule-
ment... indir¡w!, esquissé, Ii titre d'aver-
tissement, par M, Drumont — refuser du
travail, arracher le pain de la bouche
aux quatre cent mille prolétaires belges
employés dans nos industries — à tel
point que la presse, dans un beau mauve-
mehi de dignité qui l'honore, s'est élevée
contre la seule hypothèse de représailles.
« Nous ne mettons personne à l'index,
« ci& Helgique — pas même les juifs,
« écrivait, l'autre jour, M. Paul Sainte-
« BrigiUe, dans la forme. Nous n'expul-
« sons pas les étrangers. Quand le gou-
« vernement réactionnaire, et clérical,
« prend des arrêtés d'expulsion, toujours
« nous protestons... Nous voulons que
H notre pays reste une terre de liberté.
« Non, non, nous ne mettons pas à
m l'indejû les Français de Belgique. Jamais
« cette monstrueuse idée ne nous est
m venue. Jamais nous ne ta dllendrions.
« Nous iie permettons à personne de le
« croire. »
Ceci est net, assez formel pour que toute
accusation de gallophobic ne relève plus
que du domaine de l'invention.
Seulement, voilà. Les lielges, comme
c'est leur droit (et comme nous le prati-
toute indépendance) iie nous acceptent
pas en bloc, se réservent le droit de choisir,
de préférer qui s'accorde le mieux avec
les opinions de leur esprit ou les senti-
ments de leur cœur.
. Dreyfus leur inspire davantage con-
fiance et pitié que le brave commandant
Esterhazy; Picquart leur semble plus
estimable que le Bienheureux faussaire
Henry; la mentalité d'A uatole France
leur apparaît supérieure à celle de l'illus-
tre Carrière, et la sincérité de Labori
moins douteuse que celle de Mercier. En-
fin, çes méprisables « intellectuels » —
est-il, 6 Dieu, plus grosse injure! —
s'obstinent à considérer que l'armée de
Klobb et de Mel/nier vaut mieux que celle
de V oulet et Chanoine !
Aberration! Aveuglement !
On confoit que les nationalistes déchaî-
nent leurs foudres contre pareille audace...
mais on comprend aussi que les Français
demeurés fidèles à la tradition nationale
de Justice et de Bonté soient tout heureux
de voir que celte France-là — leur France /
— ait gardé sa place dans l'estime et
l'amitié de nos voisins.
SÉVERINE.
Ames d'Enfants
Une des joies les plus précieuses que
puisse éprouver celui — ou celle — qui, se
croyant charge d âmes,— s'est mis en rota-
tions avec le public, soit par la parole,
soit par la plume, c'est d'avoir exprimé une
pensée assez réellement humaine pour
faire vibrer des âmes ; c'est d'avoir sous
les yeux, sous la main, la preuve qu'il a
pensé juste.
Cette preuve est représentée pour moi,
aujourd'hui, par une lettre que j'ai savou-
rée, que je vais dédier aux mores de fa-
mille et au personnel des écoles, après en
avoir fait précéder l'insertion de quelques
lignes, destinées à mettre en lumière la
question que j'avais iL peine effleurée dans
mon article du 12, septembre.
Il s'agissait do l'rime des enfants,ou, pour
être plus précise : d'âmes d'enfants; c'est-à-
dire d'une chose infiniment délicate et
beaucoup plus vibrante et personnelle
qu'on ne se l'imagine ordinairement.
«Il ne comprend pas», dit-on cent fois par
jour, et l'enfant, à cheval sur une chaise,
ou sautillant par la chambre, ou déshabil-
lant sa poupée, saisit au passage, gestes,
actions, paroles, et il les juge parfois, avec
une sagacité déconcertante pour le psycho-
logue.
Ce qu'il y a de plus caractéristique, peut-
être, chez quelques-uns, c'est la pudeur du
sentiment, je ne parle pas du sentiment de
la pudeur que leur pureté les empêche de
connaître. Or, par ignorance, parétourderie
surtout, par l'habitude que nous avons de
considérer l'enfant comme une chose nous
appartenant, et non comme un individu en
substance, nous piétinons comme des sau-
vages sur ce qu'il a de plus exquis tout au
fond de ui. # .....
Cet acte brutal et inconscient est habituel,
je le répète, dans la famille, et malheureu-
sement aussi à l'école, plus spécialement
dans les écoles où fréquentent des mai-
L gonts. Le matin a lieu l'examen de pro-
i prêté. Il faudrait, àcemoment-là, déployer
5 toutes les ingéniosités d'une âme délicate
{ct d'un esprit supérieur, pour ne pas frois-
• ser l'amour-propre de celui dont le corps
et les vêtements révèlent 1 état douloureux
de la famille. Dans telle école où se fait la
visite hebdomadaire du linge dedessous, un
- certain nombre d'élèves manquent la classe
i ce jour-!à. Ils souffrent trop sans que l'on
i s'en doute de l'exhibition de leur misère. La
maîtresse fait bien tout ce qu'ellepeut, pour
. sauvegarder leur amour-propre mais la
, ' femme de service est moins discrète, enfin
les camarades sont III qui observent.
Ce que j'écris, ce n'est pas de la littéra-
" ture « de chic ", je rai vu et vécu :
Un petit garçon d'école maternelle attire
i un matin la directrice à l'écart, la force à
■ se baisser, car il veut lui parler à l'oreille
et lui dit : « Aujourd'hui, j ai une chemise
propre ».
Insisterai-jo sur ce que cette confidence,
' d'un enfant de quatre ans, révèle de souf-
" frances, non exprimées les jours où la che-
mise laissait à désirer?
? Malgré les bonnes résolutions du début
- des cantines scolaires, ici et là, beaucoup
d'enfants non payants se rendent compte
. qu'ils ne paient pas, et portent envie, au
( fond de leur cœur, aux petits camarades
qui, tous les matins, apportent ostensible-
ment leurs deux sous.
• Uno fillette — cela se passe dans un des
i* quaftierr les plu* pauvres do Parts z:t
vu tomber une broche sur le trottoir, — la
. ramasse et s'élance à la poursuite de !a
femme qui vient de la perdre. Colle-ci lui
. donne deux sous.
L'enfant rentre à l'école, prend sa mai-
tresse à part et lui dit en rougissant : fî Je
voudrais bien aujourd'hui payer mon dé-
jeuner. J)
Les exercices dits de langage oit l'on
essaie de faire parler les enfants; des cho-
ses de leur intimité les sujets de compo-
sition écrite sont une véritable mine d'in-
discrétions — inconscientes je le veux bien,
mais regrettables, et il faut se rendre
compte que les enfants en peuvent souf-
fri r :
Comment est meublée ta chambre à cou-
cher? Quelle est la couleur de tes rideaux?
Décris la façon dont ta maman met le cou-
vert? Raconte ta journée de jeudi ou (10
dimanche ? Quels cadeaux as-tu reçus le
jour de la l'été? Comment emploies-lu les
sous que l'on te donne ? Que désires-tu pour
tes étrcnncs?
Puis viennent les descriptions orales ou
écrites du milieu familial, de ses joies,
etc., etc. Beaucoup d'enfants — ceux qui
ne pensent pas—répètent cequ'ils ont lu ou
ce qu'ils ont entendu dire; les délicats se
taisent.
Mais le moment est venu de laisser la
place à ma correspondante :
Au sujet de votre article paru dens la Fronde
du lî, permettez à uuo ancienne élevé d'écolo
communale de vous dire combien elle partage
votre aversion pour « ce que doit répondre un
bon écolier u.
« Je me les rappelle, ces questions, quoique je
n'eusse quj douze ans, car cela me contrariait
fort de répondre ce qu'il fallait pour avoir une
bonne note. OS! l'cm:lloi de la pièce de 5 fr. »
la " description clt1 1 intérieur fanuti.d! » les - rc
mereiements à une parente » la « lettre à la
mi t'a absente » tout cela m'a c'np3Ch'':c, au
moins jusqu à viu-;;l ans, de dire llU façon de
nenser.'
Il La description du h,,)mc \ I\iM ne m'a jamais
paru plus cho tuutL; j'étais gênée, pour ma maî-
tresse qu'elle* nous dO,ln:ll un pireil devoir.
!'e tt.-ctt'ti était-ce la honte que j avais de décrire,
notre inférieur d'ouvriers pauvres. Certainement
ce devait être c.Ma. Kt les remerciements pour
un l',I,kall, la lettre à uno m';re absente. Dieu
que j'en ai soullert !
Je n'avais jamais fréquenté de tantes ni <1 on-
cle-, quant à iua mère je ne l'avais jamais quit-
tée et, tant petite que je me souvienne, nous
n avions jamais été d'accord nvi mère et moi,
AjPlllcz il cela que je n'étais pas très expansive
et jU;';l:Z, Madame comme je pouvais être ins-
pirée pour ce genre île eonrespondance
Le tcndcmatn. j'étais très étonnée quand on
nous lisait les rédactions les mieux faites d'en-
tendre des 1. Tante bien ainx'c, ma petite mère
chérie» et autres formules que je trouvais exa-
gérées..
Je suis absolument persuadée que ce genre de
devoirs, ainsi que l'habitude que l'on avait,
entre grandes, de vanter « ce qu'il y avait cnez
f;ji » ni a laissé assez tard dans la vie une sorto
de honte de parler de chez nni, de donner,
comme cela se fait souvent entre amies des dé-
Laits d'intérieur.
Kt pourtant, Madame, je m'empresse de vous
dire, alin que vous ne pensiez pas que cette
honte était justifiée, je m'empresse de vous dire
qu ; mes parents ont ÚtÜ Ics plus honnêtes gens
du monde, ayant J'estime de tous ceux qui les
connaissaient. Mon p'-re était un ouvrier ino-
d le, tris courageux, la sobriété même et, par
son travail, rien que par son t.rava.d. il a su se
faire une position modeste, c'est vrai, mais qui,
a sa mort, a mis ma mère à l'abri du besoin.
Il nous a élevés, mon frère et moi, en honnêtes
gens; s m souvenir seul, m'empêcherait de mal
fure, et je pleure malgré moi en y pensant,
({uniqu'il soit mort il y a quatre ans..
Vous le voy':ï. Ma(tamc, ji) n'avais aucun sujet
de honte; ja'.ais. au contraire, tout lieu d'être
lièrc et. plus tard en y réfléchissant, j'ai tou-
jours peil;;é que t'impossibitité où j étais de re-
pondre à certaine.* questions c'étail le résultat
de cette sorte d'hypocrisie qui nous était pres-
que imposée Cil classe..
Je v iu-s prie. Madame dVxsuser une aussi lon-
gue lettre. C'est l'llcurc)tL5e surprise de voir
qu'une personne comme vous, dont le nom est
une autorité dans renseignement pensât comme
moi, une simple ouvrière, qui m'a amenée a
vous faire part de mes réflexions et je crois que
beaucoup d'anciennes élèves doivent penser
comme moi.
Veuillez agréer, Madame l'assurance de mon
profond resp cet,
UNS AN :IKNNE REDOUBLANTE, a
rn tel document vécu vaut mieux que
toutes les leçons. Cette lettre ne fit-elle ré-
fléchir qu'un seul éducateur, serait encore
précieuse, car elle .aurait donne (lrl coup
~ droit il la fi convention Il qui stérilisa nos
ilforts.
PAULINE KERGOMARD.
SPORTSMAN!
Quelque surprise nue cela cause à ceux qui
croyaient le connaître, M. de Rochcfort se ré-
vèle sportsman. Il montre, en ces fonctions
nouvelles, un imprévu, uns fantaisie qui, de-
puis longtemps, faisaient défaut à sa littéra-
ture. Voyant s'éteindre son esprit, de mau-
vaises langues disaient : < Encore une étoile
qui file > et l'on pleurait sur sa vieillesse. On
se trompait, ce n'était point caducité mais se-
conde enfance. Au lieu de vieillir, le maître
muait.
Son zèle de néophyte le portait iL insulter,
hier encore, le chef de l'Etat pour n'avoir point
honorè de sa présence le Prix Municipal de
Longchamp. Dans son ardeur, il va jusqu'à
nous dire que c'est le c devoir » de M. Loubet
de présider les fêtes sportives; c qu'il n'est élu
que pour cela ». Ceux qui ont connu les sou-
verains de la troisième République, affirment
— avec des preuves — que pas un d'entre
eux ne tint les courses pour obligatoires. M.
Grévy,entre autres, n'y mit jamais les pieds.
Il fut réélu tout de même et nous présiderait
encore s'il n'avait possédé un gendre. M. Félix
Faure même, orgueil du j;arti nationaliste,.
suivait d'un monxdî distrait, les jockeys et
leurs montures ; son assiduité ne fut pas aussi
rigoureuse que parait le souhaiter M. de Ro-
chefort.
Des personnes bien informées vont jusqu'à
dire qu'imbu d'un zèle frénétique, à son tour,
le directeur de VIntransigeant conspire. Ce
n'est ni pour Déroulèdc, ni pour le prince Vic-
tor, ni pour le jeune Gamelle. Lui et quelques
amis dévoués, espoir du Jockey-Club et du
Cirque Molier, aspirent à une restauration des
sports hippiques en France. Le souverain de
leurs rêves serait l'illustre Montjarrct..Mais
le piqueur de l'Elysée oppose à ses partisans
la désespérante résistance d'une invincible mo-
destie. Pauvre marquis de Rochefort ! Il
n'aura jamais eu que des intentions de cou-
rage ; quand il a fallu en découdre, quelque
chose l'a toujours empêché. Son mauvais des-
tin fit voir une si étrange constance, qu'on
l'accuse d'avoir, comme Panurgc, « l'amour
des querclles et la peur ci 9 coups. »
Aujourd'hui, M. Rochefort descend de nou- .
veau dans l'arène— oh! métaphoriquement!
— La course de dimanche le révolte avec rai-
son. Mais ce qui la lui rend odieuse, ce n'est
pas tant le sang répandu —, dont il ne parle
que pour mémoire — ni les victimes inatten-
dues que fit le taureau, parmi les spectateurs,
ni le danger de ces exhibitions sanglantes; ce
qui la lui rend odieuse, c'est qu'elle fut ap-
prouvée par le ministère — (lui peut-être n'en
savait rien.
Oui. si MM. Millerand, Waldeck-Rousseau
et de ualliffet se sont unis, ce n'est pas p )ur
défendre la République, c'est pour autoriser
les courses de taureaux, qu'ils n'ont peut-être
jamais vues.
Us en sont capables, d'ailleurs; des gens
qui n'assistent pas aux courses !
Ainsi déraisonne M. de Rochefort-Luçav. Si
l'on suivait ses avis, Y Intransigeant devien-
drait un journal du soir, exclusivement occupé
de choses sportives. C'est la dernière fantai-
sie d'un fou qui ne sait plus faire rire.
Heureusement, dans sa maison, des amis
dévoués veillent. A côté du journal de cour-
ses, on installe un bureau de renseignements
dont l'annonce tient aujourd'hui toute une
colonne en première page.
Bientôt, de cet homme qui fut célèbre, de
son œuvre de destruction qui lut quelquefois
amusante, il restera un bureau louche où on
lira, écrit à la main sur une carte retournée :
Opérations de Courses
IlBNSRIGNIîMKNTS, CONTENTIEUX.
Le jour, peut-être, n'est pas loin où pjr-
sonne ne se souviendra du lanternier d avant
la guerre.
Priez pour le repos de l'âme du marquis
Henri de Rochefort-LUI;ay! Il fait semblant dj
vivre, mais voilà bien longtemps déjà qu 'il a
« rendu l'esprit. »
CARADOSSn.
-
POURQUOI PAS?
Nous faisons avec uac naïvet-i sans pareille
du cosmopolitisme seiitimrilt al.
(MfcLiNE. Discours du Tilillol),
On a bien fait de ne pas supprimer
celles-là. Je veux parler des manœuvres
du service de saute qui ont eu lieu l'au-
tre semaine. Elles se sont terminées par
une répétition générale très intéressante.
De l'hôpital de campagne établi il Uo-
nesse, les « blessés » ont été transportés
au quai militaire de la ligne de grande
ceinture, près du Bourget, et c'est Ifi
qu'on a procédé a leur embarquement
dans un train sanitaire, avec mille pré-
cautions quasi-maternelles.
Le chroniqueur du Figaro nous rap-
porte qu'on s'est efforcé de donner le
plus de vraisemblance possible à l'opé-
ration. « On a pii, dit-il, embarquer l'hô-
pital en serrant d] Iris près la réalité.
Il ne manquait qu'une chose à cette
reconstitution fidèle d'un épilogue de
bataille, c'étaient dans les tombereaux et
les prolonges fourragères de vrais bles-
sés étendus sur de la paille s:1.ngl:\Tlle.
Et l'on n. vivement regrette que .Nl.Ni. Vou-
let et Chanoine, « empêchés », n'aient
pu venir en faire quelques-uns.
Il a fallu se contenter de figurants. Du
moins, la Compagnie du Nord a fait tout
son possible pour représenter exacte-
ment ce que pourraient être en temps de
guerre sa maladresse et son incurie. Elle
a organisé de menus accidents avec une
compétence supérieure. Le mécanicien a
« simulé des arrêts brusques et des
coups de tampons ». Et les majors qui
surveillaient le convoi ont pris place dans
les civières et dans les appareils Bry-
Ameline pour « expérimenter l'effet des
secousses pendant la marche... »
Tout cela est fort ingénieux. Pourtant
j'imagine qu'il serait possible de rendre
l'épreuve encore plus authentique et plus
décisive, Peut-être allez-vous trouver mon
idée folle,mais vous me rendrezau moins
cette justice qu'elle part d'un bon senti-
ment. Voici. Demain, il y aura quelque
part de vrais combats, de vrais blessés...
Pourquoi notre service de santé n enver-
rait-il pas au Transvaal une délégation
pour-essayer ses civières nouveau modèle
et ses appareils de £.usl)cnsioti'?J entends
dire qu'il n'y a jamais, au lendemain des
batailles,trop d'ambulances, d'infirmiers
et de chirurgiens. Pourquoi dédaigner ce
champ d'expériences que veut bien nous
offrir M. Chamberlain?
J'entends. Ce seraient des frais consi-
dérables. Croyez-vous que les manœu-
vres comme celles du Bourget ne coÙ-
tent rien'? Quant au transport du maté-
riel, n'avons-nous pas des cuirasses qui
rouillent à Brest et à Toulon ?
Nous ne payons pas nos majors, pour
tâter le pouls aux Anglais ou auxBoi'-rs?...
Pourquoi pas? Ne trouveraient-ils pas
autour de Johannesburg d'excellentes
occasions de se faire la main? Et si quel-
que jour les blessés étaient nos fils,
croyez-vous que nos chirurgiens mili-
taires (qui mauq'ient de pratique) n'en
seraient pas plus habiles?
Mieux que toutes les conférences in-
ternationales, cette initiative généreuse
donnerait un corps à nos rêves de fra-
ternité. Et puisque, décidément, la paix
universelle reste une utopie, puisque les
hommes s'obstinent à vouloir se casser
la figure, appliquons-nous du moins à en
recueillir et à en recoller les morceaux!
L'exemple ne pourrait pas ne pas être
suivi : le cas échéant, on nous rendrait
la pareille...
Et d'ailleurs, si notre générosité n'était
pas reconnue,qu'importe !Le geste serait
si beau,si française UNE PASSANTE.
ALLEGRO
Les féministes modérées ca Allemagne
avancent avec une sage lenteur. Mainte fois,
elles ont dit qu'el'.cs désirent avant tout ne
jamais être obligées de faire un pas en ar-
rière.
Autre est. l'allure, autres sont les préoc-
cupalions des féministes raùicales, « En
avant » est leur devise, la marche dût-elle
les entraîner même très rapidement.
Le jour où les modérées clôturaient leur
réunion de Koenigsberg, le groupe radical
ouvrit son assemblée à Beriin, au Reichstag
même. (Quand les féministes françaises se
réuniront-elles au Palais Bùu rbon).La veille,
les membres de la conférence, c'est-à-dire
les déléguées de toutes les sociétés du
Fraueuivbld, fondées en Allemagne par les
I soins.de Mme Càuer, s'étaient réunies dans
le joli home du Club des Femmes allemandes
installé dans une maison historique de !a
rue Schaùow, tout près de l'avenue des
Tilleuls.
Après cette petite fête intime, le travail
commencé le 5 octobre par un rapport sur
la situation des ouvrières, fait par Mme
Jerbsl, ouvrière cHe-mème et femme d'ou-
vrier. Elle dénonça, uno fois de plus, les
dangers du travail eii chambre, le rôle né-
faste des entl'cprcneurR,la concurrence des
femmes mariées, travaillant pour des sa-
laires d'appoint. Dans la discussion, Mllo
Augspurj, docteur en droit demanda l'orga-
nisation syndicale des ouvrières, et le dé-
patÚ Hb.h'a), Jf flirsch déclara que rien
n'cmpèchail ! admission des femmes dans
la plupart des syndicats d'hommes.
L'assembléeadoptaensuite une résolution
disant que la question ouvrière ferait dé-
sormais partie du programme de toutes les
Sociétés du Fi-ii,*,téii!t, ./< que les sociétés se
chargeraiontd'éclairer t opinion publique et
les femmes en particulier sur la question
ouvrière, et favoriseraient la fondation de
syndicats professionnels de femmes.
'Dans l'après-midi, le docteur Anita Augs-
pii!-,i fit une conférence sur l'admission des
fouîmes aux emplois communaux. Les
femmes, dit-c-Uc. ii(,, doivent pas gaspiller
leurs forces dans la charité privée et dans
des ellorts individuels. Elles doivent de-
mander leur admission aux commissions
scoi.urc-., aux commissions administra-
tives de b:cn:aisance, aux conseils de tu-
telle, à ) inspection des fabriques, etc.
L'assemblée adopta une résolution dans
ce sens, se promettant d'intervenir au-
près des autorités communales dans tou-
tes les localités on se trouve une société
du Frauemeohl.
Le G O..:tJ:Il'C, dans la matinée, les délé-
guées fondèrent une F/cL,:mliotl de toutes les
Socictcs tilt Fi\iw:nit;ohl. Dans l'après-midi,
Mlle Lischnewska, unc institutrice primaire
1 au-si intelligente que vaillante, expliqua
! pourquoi la fondat.ion de cette le, .cléi-att,,Pt
s'imposait : dans la grande Fédération det
socictcs féminines aLle.'ivmdjs, les sociétés
1 du Fraueiveukl, en tant que sociétés ralli-
caics, formant la minorité et sont souvent
incapables de faire prévaloir leur opinion.
Convaincues que les lenteurs des modérées
ne sont plus aujourd'hui de mise, cHes se
coalisent afin d'agir plus efficacement au
sein même de la Fe(lÙlltÍ:nz,
Le 7 octobre, on entra dans la discussion
de la question morair;. M. le pasteur ffoffct,
de C dinar, cl Mlle J^ippritz, présidente du
groupe t)prtinois de la Fédération IÛ:o!itiOIl-
ni-te, demandèrent une seule morale pour
les doux sexes, et l'assemblés adopta une
résolution dans le sens de l abolition de
toute prostitution réglementée.
Ln rapport des plus intéressants de Mlle
Krieg, sur le bureau de placement munici-
pal pour femmes à Munich, termina la réu-
nion.
Les déléguées, dans une résolution, s en-
gagèrent à poursuivre la création de bu-
reaux analogues dans leurs villes, noLam-
ment a Ucrttn.
Mme C iu?r et les siens peuvent être con-
lcds du travail des derniers jours. Le fémi-
nisrnc bourgeois,grâce aux radicales, entre
de plus en pius dans la largo voie de l 'acti-
vité et de la discussion sociale. C'est la
bonne voie.
Qu'elles v chfm'ncnt. allègrement, les
vaillantes déléguées et représentantes du
FrawHurohl. ^ ïri'i.MA.
Chez René Luguet
Quelques lignes DI'úVeS,!lans les ecuos (JU
the:Ure, en signalant comme proche la
représentation de retraite de Reno Luguct,
ont ramené} lansle domaine de I*aotualit,ê,lc
nom de ce vieil acteur qui, pendant îO ans,
fut un des plus joyeux comiques et des plus
admirables bouffons,
M. Jules Claretiî, dans une chronique
émue, nous entretenait hier de ce solide
vieillard do quatre-vingt sept. ans, qui a
gardé, en dépit de rage, une bonne hu-
meur, une amabilité toute juvénile.
Très droit, extrêmement soigné, la phy-
sionomie spirituelle, les yeux malicieux, la
bouche sans cesse tordue d'un rire ironique
tel est le René Leguet que nous avons re-
trouvé dans le grand salon de la maison i
(Jalignani,où nous étions entrée pour serrer
la main du grand artiste.
Clair et gai, ce salon de réception com-
mun a tous tes pensionnaires, avec ses lar-
ges fenêtres, et la galerie vitrée qui le pro-
longe, laissant apercevoir le jardin bien
tenu, sablé de cailloux, et les hauts arbres
du boulevard Bineau.
C'est, un coin paisible, à peine troublé par
la corne d'appel des tramways électri-
ques.
René Luguct qui est tout heureux de re-
cevoir une visite se laisse aller volontiers il
parler de ses vieux souvenirs, nous rappe-
lant ses débuts, ses grondes créations, ses
tournées en province...
Une vraie joie l'étreint quand nous lui
apprenons qu'un grand journal du matin
lui a consacré plusieurs colonnes.
— Et c'est M. Claretie qui a écrit sur le
pauvre Luguet, ah! c'est bien cela... On
nous oublie si vite, nous autres pauvres
amuseurs de la foule quand nous quittons
la rampe. Vieillis, fourbus, nous agonisons
lentement dans un coin, sans qu'on se sou-
vienne de nous.
-r- Le public semble parfois indiffèrent,
mais qu'on t'entretienne un peu des artis-
tes qu'il a aimés, il leur revient vite.
— Oui oui, quand on fait appel à son
cœur, ainsi je suis bien sur que tous ceux
qui m'ont applaudi au Palais-Royal ne vou-
dront pas manquer à ma représentation de
retraité.
— On l'annonce comme proche.
— C'est une erreur. Je ne suis pas prêt.
L'administration du Palais-Royal a mis son
théâtre à ma disposition, mais la salle est
troo petite. Je veux organiser quelque
chose de bien, j'ai tous les éléments néces-
saires, pour composer un merveilleux spec-
tacle. De plus, mes principaux collabora-
teurs, — car moi aussi je jouerai — ne sont
pas là. néjaue est en Russie, au diable,
MOtinel, en Grèce, plusieurs autres sont et
tournée ou à la campagne. Bref, j'atten-
drai. Oh ! c'est plus difficile qu'on ne p,::ms¡
l'organisation d'un « bénéfice II.
((Jo me suis occupé,une seule foif,pendans
ma carrière, de mettre à point une repré-
sentation cie ce genre. C'était pour la veuve
de ce pauvre Ravel. Un de mes vieux amts
Have!, mort sans le sou, laissant sa feonrna
dans une grande g'ne. Mais cela ne vous
intéresse pas, sans doute.
— Au contraire, c'est avec ces menues
broutilles, ces poignées de souvenirs qu'on
retient l'ai torilion du lecteur.
— Ah! des souvenirs! des anecdotes, j'en
ai là (les tas! des Las! 70 ans de carrière,
songez dons!...
Et les yeux pétillants, emplis de joie, la
vieil acteur frappe sur son front.
— Mais je vous parlais de cette pauvre
Ravel. Un jour le directeur du Palais ttoya!
me prend à part. -- « Tu te chargerais bien
d'organiser une Icprésenlalion, L!'g-uet" —
— Oui...— c- C'est pour la femme de ton ca-
marade.» — Parfait, mais pas ici, c'est trop
étroit.
.. Je me mets à l'œuvre, je rends visita
aux arlisles,lle tous les théâtres ; je prendï
la salle de la (iaieté, et je compose un pro«
gramme étonnant.
« Le lendemain Ravel vint me trouver :
— fi Eh bien ? lit-elle d'un air inquiet. " —
Peuh! il y a eu beaucoup de frais, enfin
j vOici nets 3,000 francs. Elle joignit let
mains.— «Jésus ! tant que cela? Il Puis voilà
! encore 1,000 francs, et J ,000 autres...
Bref..ie m'amusai à lui remettre ainsi billet
par biilet 10.000 francs. Une petite fortune,
qui lui a permis de s'établir et de gagner
une largo, aisance.
Empoigné par son récit, René Luguet
laisse remonter à sa mémoire tout UII
monde de souvenirs.
11 nous parle de ses pièces de vers, de se4
chansons, dont quelques-unes obtinrent ail
vrai succès.
— J'a: toujours airné la littérature, nous
dit-il; tout jeune, je taquinais la Muse, uno
Muse badine, et j'écrivais des romances
pour Thérésa, plus tard pour Graindor,
qui n'occupe pas la place que son talent'
mériterait. Que cie feuillets peut amasser
un homme qui, comme moi, a joué près do
trois quarts de siècle. J'avais "commencé iJ.
réunir mes documents pour les l'aire éditer
sous le litre do CI Souvenirs d'un enfant du
la baile »; je ne sais pourquoi ce projet n'a
pas eu de suite. Ah ! on trouverait en par-
courant ces mémoires, de curieuses notes
sur le théâtre en province, sur la vie d'un-
acteur, la rampe franchie et le fard enlevé,
et aussi sur la guerre de 70 et l invasion.
prussienne.
< Tenez, parmi mes poésies, i! y en a uno
les Sœ/ll's de France qui me rappelle Ull'
petit fait de cette triste époque:
« Un jour — l'ennemi était aux portes do
Paris — une dame vient me demander
quelques instants d'entretien. J'ai un grand
projet me dit-eHc, je veux fonder une so-
ciété, pour secourir les blessés. Pendant
que leurs maris et leurs frères vont à la
guerre,il est honteux, pour les femmes, do
demeurer dans l'inaction. Je connais votre
bon c!l'ur, que pensez-vous de celte idée?
— ICI le est belle, madame. l'eu de temps
après mon inconnue réparait. ■« Ma so-
ciété fonctionne, nous avons déjà recueilli
des blessés et nous les soignons. Il CettL'
femme accomplissant si simplement son
devoir m'impressionna : j'ccrtVtS les So-urs
' de Fran :c et je les récitai à Cluny Oil l'on
organisait une représentation pour ache-
ter des canons,
"J'obtins un énorme succès. Toute la
salle pleurait, ah ! la belle et bonne soirée.
Mais l'heure s'avance, la nuit tombe et IL:
moment de regagner Paris est arrivé, quo
cette intéressant causeur raconte encore.
ces bonnes histoires d'autrefois.
Nous le quittons, nous promettant bien
rr>nrendre, un iour cet entretien inter-
rompu.
MARIE-LOUISE NÉRON.
La Potinière
L'aivluduciifisse Stépliauie, veuw de l'aivhi.lac lîi-
tloipiie, fille ainée du roi des Belges va épaus-'r lu
comte Kmrr Lonyav, attaché à l'aiiiba^.! le d'Autrii h:!
à Londres, et fils de l'anc'lctl premier m uislre dô
llruiiîiïp.
11 ne y'ngit nuftcm'nt d'un mariage d.* convenance."
L'archiduchesse Stéphanie après dix ans de veuvage
III' convole pas une seconde fois en jusles nace-" pont
des raisons d'Etat. Elle n'entend pas mêler ia politique
a cette atlaire. Four épouser le fiancé de son chelle a d'oies et déjà renoncé à ses droits à la cou-
ronne,
Le comte et l'archidurlrssc se sont critiiis et aimés
à Londres, it Londres où peut-être, ils iront vivre et
cacher leur anu ur.
Ainsi de nos jours, les princes et les princesses sa-
vent aussi Lien aimer que jadis les bergers et les her.
SiTlS.
Mme U'iiiT Richard, l'aimable artiste de l'Opéra, 3
repris rlnv. elle, 8, rue d'Aumalc, seb leçons LlI
chant ct de déclamation lyrique.
P:I sait avec quelle bonté le distincte professeur
s'intcivs^c à ses élèves, avec quel dévouement elle su:1
leurs progrès et dirige leurs études dans la voie du
grand art et de l'impeccable méthode.
La rein'' des i'J\s-Ha.., U'iîln linine, et la reine Kmm;»
sa mère, ont quitté Potsdam, hier matin, apivs avoir
pris très cordialement congé de l'Impératrice tl'.\l!cIUJ-
gne..
L'Empereur a reconduit '.es di?u\ reines à la garc.
Elle-; sont reparties dans leur t'uvau)!):' um sans
laisser il la cour d'Allemagne quelques regrets
On dit...
COLONNES DU TEMPLE DE KARNAK
On annonce, ces jours-ci. quo neuf co.
lonnesdu temple de Karnak, se sont écrou-
lées. .
Pourquoi; quelle est la cause (le ce très
regrettable accident?
il parait que M. Lcgrain chargé de la res-
tauration du temple connaît le mot de l'é-
nigme.
Depuis longtemps déjà il avait démontré
que les bases des colonnes, trempant cha-
que année, plusieurs mois durantdans l'eau
du Nil, dont le niveau s'est élevé depuis
les temps pharaoniques, se salpètraionl.
M. Legrain avait même déclaré, propheto
de malheur, que rongées d'humulite, ces
colonnes menaçaient ruine à brève échéance
et pourraient bien s'écrouler.
Et elles se sont écroulées au nombre de
sept, eL elles s'écrouleront sans doute,
toutes ensemble si on ne les relient.
On dit que des travaux très importants
sont déjà commencés au temple de Karnan.
sous la direction de M. Legrain.
Espérons que cette fois-ci M. Lem-ra a
ffira mieux aue do prédire.
COURS DE DESSIN
j C'est jeudi prochain,16 novemoreiH»®
TROTSTÊME ANNfig. - R' 871 JgJDlJjMKT^^ -AINT BLPRAPINIÇ ____? LE NUMÉRO : CINQ
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LA FRONDE, Journal quotidien,
politique, littéraire, est dirigé,
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ra—w—i——w—i»ww———|
Toutes les communications relatives à
la rédaction doivent être envoyées à Mme
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FRONDE.
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Jeudi 12 cctobrc
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Tlt')n, à 8 h. 1/2 conférence par M. P. Dcla:ia.le :
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«l'Anvers, place des Vosges, place de la Nation,
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des UatifoÇnollcs.
Visites aux Musées dit fjyuvre, d,t Luxembourg.
de 'J h. à i h.; Cluay, de 11 h. à 4 h.; Guimet et
Gallkrtt, do midi à 4 h ; Palais ite Justice, de t 1 h.
il 4 h ; llCtel 'ie- Ville, de 2 à 3 h.; Monnaie, do
midi -t 3 h.; Trésor île Notre-Dame, Sainte-Chamelle
et Va-théon, tic 10 h. à 4 h.; Invalides, musée et
tombeau, de midi à 3 h.; Jardin des Plantes, la
ii'irnagc.ric, de 1 h. à 5 h.; galerie d'histoire na-
turelle, tle Il h. à 3 h.; Aquarium du Irocadero,
de V à 11 h. et de 1 à 3 h.; Palais de Saiut-Ger-
,mtin. de 10 b. lf2 il 4 b.; Palais de Fontaine-
• ble.iii, de il h. à 4 b.t Fortadin : le Va1a18 et les
Triarion.*, de 11 à 5 h.: Le le. de Paume, de midi
à 4 heures. Iliiso*e Carnavalet, de 10 h. à i h..
La Bonne Aventure
— Est-ce que vous croyez, vous? à la
chiromancie?
— Je ne sais pas... mais je crois aux
chiromanciennes...
— Comment cela ?
— écoutez : trois ami?, jeunes et forts
se promenaient un jour dans la campa-
gne. L'un d'eux, un garçon charmant,
peintre plein de talent, (on peut bien le
dire puisqu'il est mort) voit dans tin
champ quelque chose do rouge et de
brun. Il demande f1 un de ses compa-
gnons : qu'est ce que cela ? une fleur ou
un singe? « Les deux peut être », lui
répond l'autre, « c'est une femme... » —
* Kl c'est même une bohémienne ! » dit
le troisième.
— C'est bon, reprend le premier, nous
niions nous amuser! » Et il appelle la
femme et veut lui faire dire la bonne
aventure. C'était une belle créature vive
qui sentait bon. Le charmant garçon —
nous l'appellerons André pour simplifier
si vous voulez bien, reconnaît volontiers
ses qualités mais la traiteavec un certain
mépris ou plutôt un mépris certain. Il
discute et plaisante et ironise toutes les
prédictions de la bohémienne f1 ses deux
«•.ompagnons,et quand elle lui demande,
il son tour, sa main pour y lire, il la mit
dans sa poche en boulonnant et jurant
bien q*,.i'f-ii ne lcprendrait pas à jouer un
jeu si absurde et grotesque, et qu'il la
gardait pour une meilleure occasion.
Alors la femme se jette sur lui, saisit
son autre main qui tenait une cigarette
en arrache avec ses dents cette cigarette
clIflammée, demeure penchée deux se-
condes sur la paume ouverle tandis
flu'il riait toujours et déclare :
— Dans un an, jour pour jour. a une
heure du matin, toi. tu mourras de mort
violente... «Puis, elle disparait.., 1)
Ayant ainsi parlé, Gustave Mardochée
s'arrêta.
— Et alors? Et alors? demandèrent
uno douzaine de femmes avec intérêt.
KIICB avaient bien diné, se sentaient
jolies et désiraient avoir un peu peur.
— Alors, c'était un vingt octobre. An-
dré invite aussitôt ses camarades à sou-
per pour le 20 octobre de l'année sui-
vante afin qu'a une heure de la nuit ils
boivent tous ensemble à leurs bonnes
santés réciproques.
Ainsi fut fait.
L'année fut précisément clémente à
André. Il eut une maîtresse charmanto
qui n'était infidèle que juste ce qu'il
fallait pour animer l'amour, des succès
rapides, presque autant d'argent qu'il en
dépensa et sa santé fut parfaite.
lise sentait donc les musc:cs souples, ,
solides, lïtme sereine et légère. Des amis 1
de l'année précédente et d'autres encore .
furent conviés au jour fixé en son ate-1 ,
lier converti en salle de festin. Par un
hasard que personne ne put expliquer
plus tard. ou une malice dont nul ne se
révéla l'auteur, la grande horloge se
trouva ce soir-là avancer d'une heure.
Ainsi ce fut en réalité à minuit que
trompés par la sonnerie et se grisant de 1
paroles et de jeunesse gaie et de vin j
blond depuis une heure, les jeunes gens
portèrent joyeusement le toast à leur ,:
camarade en défi à la sinistre prédic- \
tion. , .. ]
Puis quelque temps après, ils parti- i
rent tous ensemble avec de derniers : au
revoir, à leur hôte qui du seuil du petit j
pavillon qu'il occupait au fond d'un jar-
din de la rue Lepic les éclairait, tenant (
haut une lampe allumée. Quand ils fu- ]
rent à la grille du passage, André ren- 4
tra. i
Mais avant qu'ils eussent dépassé et
refermé cette grille et comme un seul <
coup tintait clair à un carillon d'église J
dans la nuit, ils furent arrêtés net par
un cri effroyable... un hurlement de
bête égorgée — puis plus rien — le si- j
lence... <
Quand ils rentrèrent dans le pavillon, ]
ils virent leur ami étendu mort dans i
l'atelier plein de lumières, de fleurs et j
de tout If désordre du souper... 1
. — Al**< mon Dieu 1 mort 1 ^
— M'd.;s de quoi! ,
' —Mais comment 1 i
— Il s'était tué? <
— On l'avait assassiné ? . t
— Mais qui? \
— Mais pourquoi ? [
— Mais comment? # *
Elles parlaient toutes à la foig, fris-, j
nonnantes, ravies, ravissantes et pâles...
- Uu coup de poignard dans la région j
du cœur... dit Mardochée. î s
V Les interrogations reprirent t
— Je ne sais pas — et personne n'en a
jamais su davantage — mats. je vous l'ai
dit, je crois aux chiromanciennes... Et
il était content, son histoire avait plu.
On entendit dans un coin :
— Oh ! ma clière ! quelle horreur 1
Et plus loin :
— Mais non! mais non ! c'est bien fé-
minin! Et, quelqu'un de malin dans la
société ayant déclaré connaître un peu
les lignes de la main, reçut instantané-
ment en offrande une foula de mains
comme une pluie de fleur3...
MAY ARMAND-BLANC.
NOTES D'UNE
FRONDEUSE
Grallophobes !
Bruxelles, 10 octobre 1899.
i Décidément, rien ne vaut l'expérience
acquise sur place, matériellement —
l'école du fait !
Quand je lisais, chez nous, que les
Belges étaient soudain devenus gallo-
phobes; que ce peuple fraternel et hospi-
talier occupait désormais ses loisirs du
cri : « A bas la France ! » que nos compa-
triotes, habitués à y reccvoir le plus bien-
veillant des accueils, !l. rencontraient,
aûjovrfhuÇla ptm Uft- 4w HostUUit*
quand je lisais de telles choses, ma stu-
! peur, ma tristesse avaient raison de sc
tempérer de quelque incrédulité.
Car m y voici, dans « l'antre », le foyer
des haines de VEurope, soi-disant coalisée
contre nous 1
El c'cst la m'me atmosphère de sym-
pathie; ce sont les m ,mes mains tendues,
les mêmes physionomies cordiales, la
même belle humeur, le, même bonhomie
délicieuse, qui fait que Bruxelles, d'où
qu'arrive le voyageur, d'où que vienne le
proscrit, n'est jamais « l'étranger » lieu
de passage ou terre etisolement.
A tel point que la presse, m/:me, dédai-
gneuse du hideux projet de boycottage,
non patronné (bien en,tendu. 1) mais seule-
ment... indir¡w!, esquissé, Ii titre d'aver-
tissement, par M, Drumont — refuser du
travail, arracher le pain de la bouche
aux quatre cent mille prolétaires belges
employés dans nos industries — à tel
point que la presse, dans un beau mauve-
mehi de dignité qui l'honore, s'est élevée
contre la seule hypothèse de représailles.
« Nous ne mettons personne à l'index,
« ci& Helgique — pas même les juifs,
« écrivait, l'autre jour, M. Paul Sainte-
« BrigiUe, dans la forme. Nous n'expul-
« sons pas les étrangers. Quand le gou-
« vernement réactionnaire, et clérical,
« prend des arrêtés d'expulsion, toujours
« nous protestons... Nous voulons que
H notre pays reste une terre de liberté.
« Non, non, nous ne mettons pas à
m l'indejû les Français de Belgique. Jamais
« cette monstrueuse idée ne nous est
m venue. Jamais nous ne ta dllendrions.
« Nous iie permettons à personne de le
« croire. »
Ceci est net, assez formel pour que toute
accusation de gallophobic ne relève plus
que du domaine de l'invention.
Seulement, voilà. Les lielges, comme
c'est leur droit (et comme nous le prati-
pas en bloc, se réservent le droit de choisir,
de préférer qui s'accorde le mieux avec
les opinions de leur esprit ou les senti-
ments de leur cœur.
. Dreyfus leur inspire davantage con-
fiance et pitié que le brave commandant
Esterhazy; Picquart leur semble plus
estimable que le Bienheureux faussaire
Henry; la mentalité d'A uatole France
leur apparaît supérieure à celle de l'illus-
tre Carrière, et la sincérité de Labori
moins douteuse que celle de Mercier. En-
fin, çes méprisables « intellectuels » —
est-il, 6 Dieu, plus grosse injure! —
s'obstinent à considérer que l'armée de
Klobb et de Mel/nier vaut mieux que celle
de V oulet et Chanoine !
Aberration! Aveuglement !
On confoit que les nationalistes déchaî-
nent leurs foudres contre pareille audace...
mais on comprend aussi que les Français
demeurés fidèles à la tradition nationale
de Justice et de Bonté soient tout heureux
de voir que celte France-là — leur France /
— ait gardé sa place dans l'estime et
l'amitié de nos voisins.
SÉVERINE.
Ames d'Enfants
Une des joies les plus précieuses que
puisse éprouver celui — ou celle — qui, se
croyant charge d âmes,— s'est mis en rota-
tions avec le public, soit par la parole,
soit par la plume, c'est d'avoir exprimé une
pensée assez réellement humaine pour
faire vibrer des âmes ; c'est d'avoir sous
les yeux, sous la main, la preuve qu'il a
pensé juste.
Cette preuve est représentée pour moi,
aujourd'hui, par une lettre que j'ai savou-
rée, que je vais dédier aux mores de fa-
mille et au personnel des écoles, après en
avoir fait précéder l'insertion de quelques
lignes, destinées à mettre en lumière la
question que j'avais iL peine effleurée dans
mon article du 12, septembre.
Il s'agissait do l'rime des enfants,ou, pour
être plus précise : d'âmes d'enfants; c'est-à-
dire d'une chose infiniment délicate et
beaucoup plus vibrante et personnelle
qu'on ne se l'imagine ordinairement.
«Il ne comprend pas», dit-on cent fois par
jour, et l'enfant, à cheval sur une chaise,
ou sautillant par la chambre, ou déshabil-
lant sa poupée, saisit au passage, gestes,
actions, paroles, et il les juge parfois, avec
une sagacité déconcertante pour le psycho-
logue.
Ce qu'il y a de plus caractéristique, peut-
être, chez quelques-uns, c'est la pudeur du
sentiment, je ne parle pas du sentiment de
la pudeur que leur pureté les empêche de
connaître. Or, par ignorance, parétourderie
surtout, par l'habitude que nous avons de
considérer l'enfant comme une chose nous
appartenant, et non comme un individu en
substance, nous piétinons comme des sau-
vages sur ce qu'il a de plus exquis tout au
fond de ui. # .....
Cet acte brutal et inconscient est habituel,
je le répète, dans la famille, et malheureu-
sement aussi à l'école, plus spécialement
dans les écoles où fréquentent des mai-
L gonts. Le matin a lieu l'examen de pro-
i prêté. Il faudrait, àcemoment-là, déployer
5 toutes les ingéniosités d'une âme délicate
{ct d'un esprit supérieur, pour ne pas frois-
• ser l'amour-propre de celui dont le corps
et les vêtements révèlent 1 état douloureux
de la famille. Dans telle école où se fait la
visite hebdomadaire du linge dedessous, un
- certain nombre d'élèves manquent la classe
i ce jour-!à. Ils souffrent trop sans que l'on
i s'en doute de l'exhibition de leur misère. La
maîtresse fait bien tout ce qu'ellepeut, pour
. sauvegarder leur amour-propre mais la
, ' femme de service est moins discrète, enfin
les camarades sont III qui observent.
Ce que j'écris, ce n'est pas de la littéra-
" ture « de chic ", je rai vu et vécu :
Un petit garçon d'école maternelle attire
i un matin la directrice à l'écart, la force à
■ se baisser, car il veut lui parler à l'oreille
et lui dit : « Aujourd'hui, j ai une chemise
propre ».
Insisterai-jo sur ce que cette confidence,
' d'un enfant de quatre ans, révèle de souf-
" frances, non exprimées les jours où la che-
mise laissait à désirer?
? Malgré les bonnes résolutions du début
- des cantines scolaires, ici et là, beaucoup
d'enfants non payants se rendent compte
. qu'ils ne paient pas, et portent envie, au
( fond de leur cœur, aux petits camarades
qui, tous les matins, apportent ostensible-
ment leurs deux sous.
• Uno fillette — cela se passe dans un des
i* quaftierr les plu* pauvres do Parts z:t
vu tomber une broche sur le trottoir, — la
. ramasse et s'élance à la poursuite de !a
femme qui vient de la perdre. Colle-ci lui
. donne deux sous.
L'enfant rentre à l'école, prend sa mai-
tresse à part et lui dit en rougissant : fî Je
voudrais bien aujourd'hui payer mon dé-
jeuner. J)
Les exercices dits de langage oit l'on
essaie de faire parler les enfants; des cho-
ses de leur intimité les sujets de compo-
sition écrite sont une véritable mine d'in-
discrétions — inconscientes je le veux bien,
mais regrettables, et il faut se rendre
compte que les enfants en peuvent souf-
fri r :
Comment est meublée ta chambre à cou-
cher? Quelle est la couleur de tes rideaux?
Décris la façon dont ta maman met le cou-
vert? Raconte ta journée de jeudi ou (10
dimanche ? Quels cadeaux as-tu reçus le
jour de la l'été? Comment emploies-lu les
sous que l'on te donne ? Que désires-tu pour
tes étrcnncs?
Puis viennent les descriptions orales ou
écrites du milieu familial, de ses joies,
etc., etc. Beaucoup d'enfants — ceux qui
ne pensent pas—répètent cequ'ils ont lu ou
ce qu'ils ont entendu dire; les délicats se
taisent.
Mais le moment est venu de laisser la
place à ma correspondante :
Au sujet de votre article paru dens la Fronde
du lî, permettez à uuo ancienne élevé d'écolo
communale de vous dire combien elle partage
votre aversion pour « ce que doit répondre un
bon écolier u.
« Je me les rappelle, ces questions, quoique je
n'eusse quj douze ans, car cela me contrariait
fort de répondre ce qu'il fallait pour avoir une
bonne note. OS! l'cm:lloi de la pièce de 5 fr. »
la " description clt1 1 intérieur fanuti.d! » les - rc
mereiements à une parente » la « lettre à la
mi t'a absente » tout cela m'a c'np3Ch'':c, au
moins jusqu à viu-;;l ans, de dire llU façon de
nenser.'
Il La description du h,,)mc \ I\iM ne m'a jamais
paru plus cho tuutL; j'étais gênée, pour ma maî-
tresse qu'elle* nous dO,ln:ll un pireil devoir.
!'e tt.-ctt'ti était-ce la honte que j avais de décrire,
notre inférieur d'ouvriers pauvres. Certainement
ce devait être c.Ma. Kt les remerciements pour
un l',I,kall, la lettre à uno m';re absente. Dieu
que j'en ai soullert !
Je n'avais jamais fréquenté de tantes ni <1 on-
cle-, quant à iua mère je ne l'avais jamais quit-
tée et, tant petite que je me souvienne, nous
n avions jamais été d'accord nvi mère et moi,
AjPlllcz il cela que je n'étais pas très expansive
et jU;';l:Z, Madame comme je pouvais être ins-
pirée pour ce genre île eonrespondance
Le tcndcmatn. j'étais très étonnée quand on
nous lisait les rédactions les mieux faites d'en-
tendre des 1. Tante bien ainx'c, ma petite mère
chérie» et autres formules que je trouvais exa-
gérées..
Je suis absolument persuadée que ce genre de
devoirs, ainsi que l'habitude que l'on avait,
entre grandes, de vanter « ce qu'il y avait cnez
f;ji » ni a laissé assez tard dans la vie une sorto
de honte de parler de chez nni, de donner,
comme cela se fait souvent entre amies des dé-
Laits d'intérieur.
Kt pourtant, Madame, je m'empresse de vous
dire, alin que vous ne pensiez pas que cette
honte était justifiée, je m'empresse de vous dire
qu ; mes parents ont ÚtÜ Ics plus honnêtes gens
du monde, ayant J'estime de tous ceux qui les
connaissaient. Mon p'-re était un ouvrier ino-
d le, tris courageux, la sobriété même et, par
son travail, rien que par son t.rava.d. il a su se
faire une position modeste, c'est vrai, mais qui,
a sa mort, a mis ma mère à l'abri du besoin.
Il nous a élevés, mon frère et moi, en honnêtes
gens; s m souvenir seul, m'empêcherait de mal
fure, et je pleure malgré moi en y pensant,
({uniqu'il soit mort il y a quatre ans..
Vous le voy':ï. Ma(tamc, ji) n'avais aucun sujet
de honte; ja'.ais. au contraire, tout lieu d'être
lièrc et. plus tard en y réfléchissant, j'ai tou-
jours peil;;é que t'impossibitité où j étais de re-
pondre à certaine.* questions c'étail le résultat
de cette sorte d'hypocrisie qui nous était pres-
que imposée Cil classe..
Je v iu-s prie. Madame dVxsuser une aussi lon-
gue lettre. C'est l'llcurc)tL5e surprise de voir
qu'une personne comme vous, dont le nom est
une autorité dans renseignement pensât comme
moi, une simple ouvrière, qui m'a amenée a
vous faire part de mes réflexions et je crois que
beaucoup d'anciennes élèves doivent penser
comme moi.
Veuillez agréer, Madame l'assurance de mon
profond resp cet,
UNS AN :IKNNE REDOUBLANTE, a
rn tel document vécu vaut mieux que
toutes les leçons. Cette lettre ne fit-elle ré-
fléchir qu'un seul éducateur, serait encore
précieuse, car elle .aurait donne (lrl coup
~ droit il la fi convention Il qui stérilisa nos
ilforts.
PAULINE KERGOMARD.
SPORTSMAN!
Quelque surprise nue cela cause à ceux qui
croyaient le connaître, M. de Rochcfort se ré-
vèle sportsman. Il montre, en ces fonctions
nouvelles, un imprévu, uns fantaisie qui, de-
puis longtemps, faisaient défaut à sa littéra-
ture. Voyant s'éteindre son esprit, de mau-
vaises langues disaient : < Encore une étoile
qui file > et l'on pleurait sur sa vieillesse. On
se trompait, ce n'était point caducité mais se-
conde enfance. Au lieu de vieillir, le maître
muait.
Son zèle de néophyte le portait iL insulter,
hier encore, le chef de l'Etat pour n'avoir point
honorè de sa présence le Prix Municipal de
Longchamp. Dans son ardeur, il va jusqu'à
nous dire que c'est le c devoir » de M. Loubet
de présider les fêtes sportives; c qu'il n'est élu
que pour cela ». Ceux qui ont connu les sou-
verains de la troisième République, affirment
— avec des preuves — que pas un d'entre
eux ne tint les courses pour obligatoires. M.
Grévy,entre autres, n'y mit jamais les pieds.
Il fut réélu tout de même et nous présiderait
encore s'il n'avait possédé un gendre. M. Félix
Faure même, orgueil du j;arti nationaliste,.
suivait d'un monxdî distrait, les jockeys et
leurs montures ; son assiduité ne fut pas aussi
rigoureuse que parait le souhaiter M. de Ro-
chefort.
Des personnes bien informées vont jusqu'à
dire qu'imbu d'un zèle frénétique, à son tour,
le directeur de VIntransigeant conspire. Ce
n'est ni pour Déroulèdc, ni pour le prince Vic-
tor, ni pour le jeune Gamelle. Lui et quelques
amis dévoués, espoir du Jockey-Club et du
Cirque Molier, aspirent à une restauration des
sports hippiques en France. Le souverain de
leurs rêves serait l'illustre Montjarrct..Mais
le piqueur de l'Elysée oppose à ses partisans
la désespérante résistance d'une invincible mo-
destie. Pauvre marquis de Rochefort ! Il
n'aura jamais eu que des intentions de cou-
rage ; quand il a fallu en découdre, quelque
chose l'a toujours empêché. Son mauvais des-
tin fit voir une si étrange constance, qu'on
l'accuse d'avoir, comme Panurgc, « l'amour
des querclles et la peur ci 9 coups. »
Aujourd'hui, M. Rochefort descend de nou- .
veau dans l'arène— oh! métaphoriquement!
— La course de dimanche le révolte avec rai-
son. Mais ce qui la lui rend odieuse, ce n'est
pas tant le sang répandu —, dont il ne parle
que pour mémoire — ni les victimes inatten-
dues que fit le taureau, parmi les spectateurs,
ni le danger de ces exhibitions sanglantes; ce
qui la lui rend odieuse, c'est qu'elle fut ap-
prouvée par le ministère — (lui peut-être n'en
savait rien.
Oui. si MM. Millerand, Waldeck-Rousseau
et de ualliffet se sont unis, ce n'est pas p )ur
défendre la République, c'est pour autoriser
les courses de taureaux, qu'ils n'ont peut-être
jamais vues.
Us en sont capables, d'ailleurs; des gens
qui n'assistent pas aux courses !
Ainsi déraisonne M. de Rochefort-Luçav. Si
l'on suivait ses avis, Y Intransigeant devien-
drait un journal du soir, exclusivement occupé
de choses sportives. C'est la dernière fantai-
sie d'un fou qui ne sait plus faire rire.
Heureusement, dans sa maison, des amis
dévoués veillent. A côté du journal de cour-
ses, on installe un bureau de renseignements
dont l'annonce tient aujourd'hui toute une
colonne en première page.
Bientôt, de cet homme qui fut célèbre, de
son œuvre de destruction qui lut quelquefois
amusante, il restera un bureau louche où on
lira, écrit à la main sur une carte retournée :
Opérations de Courses
IlBNSRIGNIîMKNTS, CONTENTIEUX.
Le jour, peut-être, n'est pas loin où pjr-
sonne ne se souviendra du lanternier d avant
la guerre.
Priez pour le repos de l'âme du marquis
Henri de Rochefort-LUI;ay! Il fait semblant dj
vivre, mais voilà bien longtemps déjà qu 'il a
« rendu l'esprit. »
CARADOSSn.
-
POURQUOI PAS?
Nous faisons avec uac naïvet-i sans pareille
du cosmopolitisme seiitimrilt al.
(MfcLiNE. Discours du Tilillol),
On a bien fait de ne pas supprimer
celles-là. Je veux parler des manœuvres
du service de saute qui ont eu lieu l'au-
tre semaine. Elles se sont terminées par
une répétition générale très intéressante.
De l'hôpital de campagne établi il Uo-
nesse, les « blessés » ont été transportés
au quai militaire de la ligne de grande
ceinture, près du Bourget, et c'est Ifi
qu'on a procédé a leur embarquement
dans un train sanitaire, avec mille pré-
cautions quasi-maternelles.
Le chroniqueur du Figaro nous rap-
porte qu'on s'est efforcé de donner le
plus de vraisemblance possible à l'opé-
ration. « On a pii, dit-il, embarquer l'hô-
pital en serrant d] Iris près la réalité.
Il ne manquait qu'une chose à cette
reconstitution fidèle d'un épilogue de
bataille, c'étaient dans les tombereaux et
les prolonges fourragères de vrais bles-
sés étendus sur de la paille s:1.ngl:\Tlle.
Et l'on n. vivement regrette que .Nl.Ni. Vou-
let et Chanoine, « empêchés », n'aient
pu venir en faire quelques-uns.
Il a fallu se contenter de figurants. Du
moins, la Compagnie du Nord a fait tout
son possible pour représenter exacte-
ment ce que pourraient être en temps de
guerre sa maladresse et son incurie. Elle
a organisé de menus accidents avec une
compétence supérieure. Le mécanicien a
« simulé des arrêts brusques et des
coups de tampons ». Et les majors qui
surveillaient le convoi ont pris place dans
les civières et dans les appareils Bry-
Ameline pour « expérimenter l'effet des
secousses pendant la marche... »
Tout cela est fort ingénieux. Pourtant
j'imagine qu'il serait possible de rendre
l'épreuve encore plus authentique et plus
décisive, Peut-être allez-vous trouver mon
idée folle,mais vous me rendrezau moins
cette justice qu'elle part d'un bon senti-
ment. Voici. Demain, il y aura quelque
part de vrais combats, de vrais blessés...
Pourquoi notre service de santé n enver-
rait-il pas au Transvaal une délégation
pour-essayer ses civières nouveau modèle
et ses appareils de £.usl)cnsioti'?J entends
dire qu'il n'y a jamais, au lendemain des
batailles,trop d'ambulances, d'infirmiers
et de chirurgiens. Pourquoi dédaigner ce
champ d'expériences que veut bien nous
offrir M. Chamberlain?
J'entends. Ce seraient des frais consi-
dérables. Croyez-vous que les manœu-
vres comme celles du Bourget ne coÙ-
tent rien'? Quant au transport du maté-
riel, n'avons-nous pas des cuirasses qui
rouillent à Brest et à Toulon ?
Nous ne payons pas nos majors, pour
tâter le pouls aux Anglais ou auxBoi'-rs?...
Pourquoi pas? Ne trouveraient-ils pas
autour de Johannesburg d'excellentes
occasions de se faire la main? Et si quel-
que jour les blessés étaient nos fils,
croyez-vous que nos chirurgiens mili-
taires (qui mauq'ient de pratique) n'en
seraient pas plus habiles?
Mieux que toutes les conférences in-
ternationales, cette initiative généreuse
donnerait un corps à nos rêves de fra-
ternité. Et puisque, décidément, la paix
universelle reste une utopie, puisque les
hommes s'obstinent à vouloir se casser
la figure, appliquons-nous du moins à en
recueillir et à en recoller les morceaux!
L'exemple ne pourrait pas ne pas être
suivi : le cas échéant, on nous rendrait
la pareille...
Et d'ailleurs, si notre générosité n'était
pas reconnue,qu'importe !Le geste serait
si beau,si française UNE PASSANTE.
ALLEGRO
Les féministes modérées ca Allemagne
avancent avec une sage lenteur. Mainte fois,
elles ont dit qu'el'.cs désirent avant tout ne
jamais être obligées de faire un pas en ar-
rière.
Autre est. l'allure, autres sont les préoc-
cupalions des féministes raùicales, « En
avant » est leur devise, la marche dût-elle
les entraîner même très rapidement.
Le jour où les modérées clôturaient leur
réunion de Koenigsberg, le groupe radical
ouvrit son assemblée à Beriin, au Reichstag
même. (Quand les féministes françaises se
réuniront-elles au Palais Bùu rbon).La veille,
les membres de la conférence, c'est-à-dire
les déléguées de toutes les sociétés du
Fraueuivbld, fondées en Allemagne par les
I soins.de Mme Càuer, s'étaient réunies dans
le joli home du Club des Femmes allemandes
installé dans une maison historique de !a
rue Schaùow, tout près de l'avenue des
Tilleuls.
Après cette petite fête intime, le travail
commencé le 5 octobre par un rapport sur
la situation des ouvrières, fait par Mme
Jerbsl, ouvrière cHe-mème et femme d'ou-
vrier. Elle dénonça, uno fois de plus, les
dangers du travail eii chambre, le rôle né-
faste des entl'cprcneurR,la concurrence des
femmes mariées, travaillant pour des sa-
laires d'appoint. Dans la discussion, Mllo
Augspurj, docteur en droit demanda l'orga-
nisation syndicale des ouvrières, et le dé-
patÚ Hb.h'a), Jf flirsch déclara que rien
n'cmpèchail ! admission des femmes dans
la plupart des syndicats d'hommes.
L'assembléeadoptaensuite une résolution
disant que la question ouvrière ferait dé-
sormais partie du programme de toutes les
Sociétés du Fi-ii,*,téii!t, ./< que les sociétés se
chargeraiontd'éclairer t opinion publique et
les femmes en particulier sur la question
ouvrière, et favoriseraient la fondation de
syndicats professionnels de femmes.
'Dans l'après-midi, le docteur Anita Augs-
pii!-,i fit une conférence sur l'admission des
fouîmes aux emplois communaux. Les
femmes, dit-c-Uc. ii(,, doivent pas gaspiller
leurs forces dans la charité privée et dans
des ellorts individuels. Elles doivent de-
mander leur admission aux commissions
scoi.urc-., aux commissions administra-
tives de b:cn:aisance, aux conseils de tu-
telle, à ) inspection des fabriques, etc.
L'assemblée adopta une résolution dans
ce sens, se promettant d'intervenir au-
près des autorités communales dans tou-
tes les localités on se trouve une société
du Frauemeohl.
Le G O..:tJ:Il'C, dans la matinée, les délé-
guées fondèrent une F/cL,:mliotl de toutes les
Socictcs tilt Fi\iw:nit;ohl. Dans l'après-midi,
Mlle Lischnewska, unc institutrice primaire
1 au-si intelligente que vaillante, expliqua
! pourquoi la fondat.ion de cette le, .cléi-att,,Pt
s'imposait : dans la grande Fédération det
socictcs féminines aLle.'ivmdjs, les sociétés
1 du Fraueiveukl, en tant que sociétés ralli-
caics, formant la minorité et sont souvent
incapables de faire prévaloir leur opinion.
Convaincues que les lenteurs des modérées
ne sont plus aujourd'hui de mise, cHes se
coalisent afin d'agir plus efficacement au
sein même de la Fe(lÙlltÍ:nz,
Le 7 octobre, on entra dans la discussion
de la question morair;. M. le pasteur ffoffct,
de C dinar, cl Mlle J^ippritz, présidente du
groupe t)prtinois de la Fédération IÛ:o!itiOIl-
ni-te, demandèrent une seule morale pour
les doux sexes, et l'assemblés adopta une
résolution dans le sens de l abolition de
toute prostitution réglementée.
Ln rapport des plus intéressants de Mlle
Krieg, sur le bureau de placement munici-
pal pour femmes à Munich, termina la réu-
nion.
Les déléguées, dans une résolution, s en-
gagèrent à poursuivre la création de bu-
reaux analogues dans leurs villes, noLam-
ment a Ucrttn.
Mme C iu?r et les siens peuvent être con-
lcds du travail des derniers jours. Le fémi-
nisrnc bourgeois,grâce aux radicales, entre
de plus en pius dans la largo voie de l 'acti-
vité et de la discussion sociale. C'est la
bonne voie.
Qu'elles v chfm'ncnt. allègrement, les
vaillantes déléguées et représentantes du
FrawHurohl. ^ ïri'i.MA.
Chez René Luguet
Quelques lignes DI'úVeS,!lans les ecuos (JU
the:Ure, en signalant comme proche la
représentation de retraite de Reno Luguct,
ont ramené} lansle domaine de I*aotualit,ê,lc
nom de ce vieil acteur qui, pendant îO ans,
fut un des plus joyeux comiques et des plus
admirables bouffons,
M. Jules Claretiî, dans une chronique
émue, nous entretenait hier de ce solide
vieillard do quatre-vingt sept. ans, qui a
gardé, en dépit de rage, une bonne hu-
meur, une amabilité toute juvénile.
Très droit, extrêmement soigné, la phy-
sionomie spirituelle, les yeux malicieux, la
bouche sans cesse tordue d'un rire ironique
tel est le René Leguet que nous avons re-
trouvé dans le grand salon de la maison i
(Jalignani,où nous étions entrée pour serrer
la main du grand artiste.
Clair et gai, ce salon de réception com-
mun a tous tes pensionnaires, avec ses lar-
ges fenêtres, et la galerie vitrée qui le pro-
longe, laissant apercevoir le jardin bien
tenu, sablé de cailloux, et les hauts arbres
du boulevard Bineau.
C'est, un coin paisible, à peine troublé par
la corne d'appel des tramways électri-
ques.
René Luguct qui est tout heureux de re-
cevoir une visite se laisse aller volontiers il
parler de ses vieux souvenirs, nous rappe-
lant ses débuts, ses grondes créations, ses
tournées en province...
Une vraie joie l'étreint quand nous lui
apprenons qu'un grand journal du matin
lui a consacré plusieurs colonnes.
— Et c'est M. Claretie qui a écrit sur le
pauvre Luguet, ah! c'est bien cela... On
nous oublie si vite, nous autres pauvres
amuseurs de la foule quand nous quittons
la rampe. Vieillis, fourbus, nous agonisons
lentement dans un coin, sans qu'on se sou-
vienne de nous.
-r- Le public semble parfois indiffèrent,
mais qu'on t'entretienne un peu des artis-
tes qu'il a aimés, il leur revient vite.
— Oui oui, quand on fait appel à son
cœur, ainsi je suis bien sur que tous ceux
qui m'ont applaudi au Palais-Royal ne vou-
dront pas manquer à ma représentation de
retraité.
— On l'annonce comme proche.
— C'est une erreur. Je ne suis pas prêt.
L'administration du Palais-Royal a mis son
théâtre à ma disposition, mais la salle est
troo petite. Je veux organiser quelque
chose de bien, j'ai tous les éléments néces-
saires, pour composer un merveilleux spec-
tacle. De plus, mes principaux collabora-
teurs, — car moi aussi je jouerai — ne sont
pas là. néjaue est en Russie, au diable,
MOtinel, en Grèce, plusieurs autres sont et
tournée ou à la campagne. Bref, j'atten-
drai. Oh ! c'est plus difficile qu'on ne p,::ms¡
l'organisation d'un « bénéfice II.
((Jo me suis occupé,une seule foif,pendans
ma carrière, de mettre à point une repré-
sentation cie ce genre. C'était pour la veuve
de ce pauvre Ravel. Un de mes vieux amts
Have!, mort sans le sou, laissant sa feonrna
dans une grande g'ne. Mais cela ne vous
intéresse pas, sans doute.
— Au contraire, c'est avec ces menues
broutilles, ces poignées de souvenirs qu'on
retient l'ai torilion du lecteur.
— Ah! des souvenirs! des anecdotes, j'en
ai là (les tas! des Las! 70 ans de carrière,
songez dons!...
Et les yeux pétillants, emplis de joie, la
vieil acteur frappe sur son front.
— Mais je vous parlais de cette pauvre
Ravel. Un jour le directeur du Palais ttoya!
me prend à part. -- « Tu te chargerais bien
d'organiser une Icprésenlalion, L!'g-uet" —
— Oui...— c- C'est pour la femme de ton ca-
marade.» — Parfait, mais pas ici, c'est trop
étroit.
.. Je me mets à l'œuvre, je rends visita
aux arlisles,lle tous les théâtres ; je prendï
la salle de la (iaieté, et je compose un pro«
gramme étonnant.
« Le lendemain Ravel vint me trouver :
— fi Eh bien ? lit-elle d'un air inquiet. " —
Peuh! il y a eu beaucoup de frais, enfin
j vOici nets 3,000 francs. Elle joignit let
mains.— «Jésus ! tant que cela? Il Puis voilà
! encore 1,000 francs, et J ,000 autres...
Bref..ie m'amusai à lui remettre ainsi billet
par biilet 10.000 francs. Une petite fortune,
qui lui a permis de s'établir et de gagner
une largo, aisance.
Empoigné par son récit, René Luguet
laisse remonter à sa mémoire tout UII
monde de souvenirs.
11 nous parle de ses pièces de vers, de se4
chansons, dont quelques-unes obtinrent ail
vrai succès.
— J'a: toujours airné la littérature, nous
dit-il; tout jeune, je taquinais la Muse, uno
Muse badine, et j'écrivais des romances
pour Thérésa, plus tard pour Graindor,
qui n'occupe pas la place que son talent'
mériterait. Que cie feuillets peut amasser
un homme qui, comme moi, a joué près do
trois quarts de siècle. J'avais "commencé iJ.
réunir mes documents pour les l'aire éditer
sous le litre do CI Souvenirs d'un enfant du
la baile »; je ne sais pourquoi ce projet n'a
pas eu de suite. Ah ! on trouverait en par-
courant ces mémoires, de curieuses notes
sur le théâtre en province, sur la vie d'un-
acteur, la rampe franchie et le fard enlevé,
et aussi sur la guerre de 70 et l invasion.
prussienne.
< Tenez, parmi mes poésies, i! y en a uno
les Sœ/ll's de France qui me rappelle Ull'
petit fait de cette triste époque:
« Un jour — l'ennemi était aux portes do
Paris — une dame vient me demander
quelques instants d'entretien. J'ai un grand
projet me dit-eHc, je veux fonder une so-
ciété, pour secourir les blessés. Pendant
que leurs maris et leurs frères vont à la
guerre,il est honteux, pour les femmes, do
demeurer dans l'inaction. Je connais votre
bon c!l'ur, que pensez-vous de celte idée?
— ICI le est belle, madame. l'eu de temps
après mon inconnue réparait. ■« Ma so-
ciété fonctionne, nous avons déjà recueilli
des blessés et nous les soignons. Il CettL'
femme accomplissant si simplement son
devoir m'impressionna : j'ccrtVtS les So-urs
' de Fran :c et je les récitai à Cluny Oil l'on
organisait une représentation pour ache-
ter des canons,
"J'obtins un énorme succès. Toute la
salle pleurait, ah ! la belle et bonne soirée.
Mais l'heure s'avance, la nuit tombe et IL:
moment de regagner Paris est arrivé, quo
cette intéressant causeur raconte encore.
ces bonnes histoires d'autrefois.
Nous le quittons, nous promettant bien
rompu.
MARIE-LOUISE NÉRON.
La Potinière
L'aivluduciifisse Stépliauie, veuw de l'aivhi.lac lîi-
tloipiie, fille ainée du roi des Belges va épaus-'r lu
comte Kmrr Lonyav, attaché à l'aiiiba^.! le d'Autrii h:!
à Londres, et fils de l'anc'lctl premier m uislre dô
llruiiîiïp.
11 ne y'ngit nuftcm'nt d'un mariage d.* convenance."
L'archiduchesse Stéphanie après dix ans de veuvage
III' convole pas une seconde fois en jusles nace-" pont
des raisons d'Etat. Elle n'entend pas mêler ia politique
a cette atlaire. Four épouser le fiancé de son ch
ronne,
Le comte et l'archidurlrssc se sont critiiis et aimés
à Londres, it Londres où peut-être, ils iront vivre et
cacher leur anu ur.
Ainsi de nos jours, les princes et les princesses sa-
vent aussi Lien aimer que jadis les bergers et les her.
SiTlS.
Mme U'iiiT Richard, l'aimable artiste de l'Opéra, 3
repris rlnv. elle, 8, rue d'Aumalc, seb leçons LlI
chant ct de déclamation lyrique.
P:I sait avec quelle bonté le distincte professeur
s'intcivs^c à ses élèves, avec quel dévouement elle su:1
leurs progrès et dirige leurs études dans la voie du
grand art et de l'impeccable méthode.
La rein'' des i'J\s-Ha.., U'iîln linine, et la reine Kmm;»
sa mère, ont quitté Potsdam, hier matin, apivs avoir
pris très cordialement congé de l'Impératrice tl'.\l!cIUJ-
gne..
L'Empereur a reconduit '.es di?u\ reines à la garc.
Elle-; sont reparties dans leur t'uvau)!):' um sans
laisser il la cour d'Allemagne quelques regrets
On dit...
COLONNES DU TEMPLE DE KARNAK
On annonce, ces jours-ci. quo neuf co.
lonnesdu temple de Karnak, se sont écrou-
lées. .
Pourquoi; quelle est la cause (le ce très
regrettable accident?
il parait que M. Lcgrain chargé de la res-
tauration du temple connaît le mot de l'é-
nigme.
Depuis longtemps déjà il avait démontré
que les bases des colonnes, trempant cha-
que année, plusieurs mois durantdans l'eau
du Nil, dont le niveau s'est élevé depuis
les temps pharaoniques, se salpètraionl.
M. Legrain avait même déclaré, propheto
de malheur, que rongées d'humulite, ces
colonnes menaçaient ruine à brève échéance
et pourraient bien s'écrouler.
Et elles se sont écroulées au nombre de
sept, eL elles s'écrouleront sans doute,
toutes ensemble si on ne les relient.
On dit que des travaux très importants
sont déjà commencés au temple de Karnan.
sous la direction de M. Legrain.
Espérons que cette fois-ci M. Lem-ra a
ffira mieux aue do prédire.
COURS DE DESSIN
j C'est jeudi prochain,16 novemoreiH»®
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