Titre : La Fronde / directrice Marguerite Durand
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1898-09-25
Contributeur : Durand, Marguerite (1864-1936). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb327788531
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 25 septembre 1898 25 septembre 1898
Description : 1898/09/25 (A2,N291). 1898/09/25 (A2,N291).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6703410k
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, GR FOL-LC2-5702
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 04/01/2016
AUTOUR DE LA REVISION
Le Conseil de Cabinet
Les ministres se sont réunis hier ma-
tin en conseil de cabinet, au ministère de
l'Intérieur, sous la présidence de M. Bris-
son.
MM. Pcytra! et Viger, indisposés,
n'assistaient pas il la séance.
Le ministre des Affaires étrangères a
fait connaître l'état des affaires de Crète.
Le conseil a expédié les autres affaires
courantes.
Le prochain conseil de cabinet a été
Hxé 't lundi matin.
Cette séance,qui a duré près de trois
heures,a été consacrée à la décision qu'il
y a lieu de prendre sur la revision.
M. Sarrien, arrivé au ministère de
l'Intérieur, environ une demi-heure après
ses collègues, leur apportait lavis
exprimé par la commission consulta-
tive.
Sur les six membres la composant,
trois auraient émis un avis favorable, les
trois autres s'y seraient montrés opposés
par la raison que les conditions juridi-
ques requises ne seraient pas remplies.
C'est au gouvernement que revient la
responsabilité et la décision finale, aussi
1rs ministres l,nl-ils jugé la présence de
tous leurs collègues indispensable.
M. \ïger, qui est souffrant, se trouve
actuellement dans le Loiret; M. Peytral,
également indisposé, est dans les Bou-
ches-du-Hhône. Rappelés tous deux télé-
graphiquement, la décision sera prise
iundi matin.
Le Tnups rappelle qu'un cas sembla-
ble s*e-;t présenté tout récemment.
Lorsque l'affaire Jamct-Léger fut por-
tée devant le ministre de la Justice, la
commis-ion consultative du ministère
•le la Justice se partagea de même en
deux fractions égales, trois contre trois.
Le garde de* sceaux d'alors,agissant en
vertu «le -on droit propre,saisit la cour
de «îas.-ation qui admit la révision. Celle-
ci fut t»:Li le et aboutit, on le sait. à la pro-
clamation de l'innocence des deux con-
damnl!-':,
Espérons que le pays sera fixé lundi ;
cette situation est indigne de la Républi-
quc et de la France. Le gouvernement
n'en sortira il son honneur qu'en faisant
cesser les illégalités qui se succèdent et
dont la dernière est celle commise par le
gouverneur de Paris.
De srrafc. qu'on rétablisse les lois.
Le colonel Plcqnart
Le Fit/a M publiait hier la dépêche sui-
vante ile sun correspondant particu-
lier :
Berlin, 6 h. 56 soir.
La > lit- Culnc/ne et le tlerlincr Tayeblatt,
qui viennent de paraître, d- cht-.'nt savr.ôr, di,-
Sliurre auilJl"i:\¡"I', que le « petit bleu » dont on a
publié 1.' lexi,) n'i rit pas un faux. Il n'a pas été
Dcrit par 1., colonel de Schwartzknppell, mais
par l'agent !,i'I'I'd de l'ambassade d'Allemagne,
qui servait d intermédiaire à l'attaché militaire
•dlemaud dans ses rapports avec les espions.
Autre déclaration non moins commentée.
I.:t c,az- lt>* Sationale (Sattonal Zdtuny) écrit,
au sujet .Ii' ces mûmes incidents :
Il On n'a . amiis confite, en Allemagne, que
• le colop l 'il i Srh\vartzï;opr>en ait en des r.\p-
. pnrls a Vf K» riiv.ï miliàaires d'accepter les renseignements
» oîîrris par des oflici^rs comme Esterliazy.
« 1." cidoncl de Scltw;trlzk-,nppe-t a eu en
• réalité, a-.-t--- Kstcrhazv, les rapports que com-
» portait sa mission.
Ces révélai ions n'apprennen t, rien ni
nu public, ni aux ministres qui savent il
quoi s'en tenir et sur Esterliazy et sur le
Petit Uleu. Ce qu'il importe de retenir,
c'est que nous en sommes réduits il être
renseignés par l'étranger sur ce (lui se
passe chez nous.
L'Allemagne nous donne une !e';on
plutôt dure" en nous faisant remarquer,
par !'art.K'h' ci-dessus, qu'un officier
traître est connu et protégé par l'Elal-
major, alors qu'un honnête homme, qui
a refusa de s'associer aux machinations
dn ses chefs a élé jeté en prison sous la
stupide inculpation de faux.
Pour le bon renom de notre pays,
comme dirait NI. Méline, ne nous expo-
sons pas it recevoir des leçons de Gui!-
laume.
HÉLÈNE SÉE.
A LYON
Réunion à la Bourse du Travail. — La
grève de la maison André. — La pro-
pagande féministe.
LTnion syndicale des Dames réunies de
Lyon avaient organisé une réirtiion au bé-
néfice des grévistes de la maison André,
fabricant d'appareils de chaull'uge, avec le
concours (Jr la «*iloyenne Lévi.
Disons tout d'abord un mot sur les mo-
tifs qui ont amené ce conflit. M. André est,
comme nous le disons plus haut, un fabri-
cant d'appareils do chauU'ags cIaQt t'atelier
situé, 2, Montplaisir, banliea de Lyon,
renferme — renferme est bien le mot,
110 ouvriers environ. Notre patron avait
imposa 1 ces ouvriers ua règlement que
ceux-ci avaient à bon droit logé comme
attentatoire à leur dignité, et a leur liberté
de tmvailleurs. Quelques simples extraits,
pris au hasard, suffiront certainement à
convaincre tout le monde sur la valeur ma-
rale de ce règlement. Ainsi il est dit : Que
« Tout ouvrier tenant un débit de boisson
ne peut faire partie de la maison ».
Il est interdit de stationner ailleurs qu'a
la Place où les ouvriers ont Leur travail. La
sortie des paquets ou de tous autres objets
est interdite; un bon de sortie sera exigé à
l'exception du samedi où la sortie du linge
est autorisée. L'assurance est obligatoire;
une retenue de 0 fr. 30 par 100 francs do
salaires sera effectuée pour avoir droit à
l'assurance.
Une retenue de 20 francs est faite à l'ou-
vrier à raison de 2 francs par semaine, comme
garantie pour la série d'outils qui lui est con-
fiée pour l'exécution de son travail!
Ces quelques extraits forcément incom-
plets donnent déjà une idée de l'ensemble,
Les ouvriers et ouvrières forcés de subir
ces injonctions vexatoires et onéreuses re-
fusèrent, à un moment donné, de les sup-
porter plus longtemps, et une délégation
des syndicats des corporations intéressées
au nombre de six se présenta chez M.André
qui, dans son omnipotence patronale, re-
fusa toute discussion et ne voulut pas rece-
voir la délégation syndicale, prétendant
que celle-ci n'avait rien à voir dans ce qui
se passait à son atelier. C'était une nou-
velle injure infligée aux ouvriers de la
maison dont on refusait les mandataires et
aux syndicats ouvriers pour lesquels l'on
ne voulait reconnaître la compétence pour
tant indiscutable. M. André, du reste, ne se
contenla pas de ce premier exploit et le lit
suivre d'insultes collectives contre ses ou-
vriers qu'il mit en quelques sortes à la
porte, se faisant ainsi lui-même l'auteur de
la grève. _____________«
Depuis, plusieurs tentatives furent tatt.es
en vue d arrangement et les grévistes pro-
posèrent par l'entremise du juge de paix,
le recours à la conciliation et à l'arbitrage,
M: André encore une fois ne voulut rien en-
tendre et se mettant au-dessus de la loi,
refusa celte proposition légale et lùyale.
Depuis sept semaines les grévistes sont, j
par conséquent, sans travail et sans res-
sources.
L'union syndicale des Dames réunies qui
s'intéresse à toutes les revendications Oll- j
vri'''ros ou sociales, ne voulut pas rester
indifférente en cette occasion, d autant plus
qu'il y a parmi les grévistes plusieurs ci-
toyennes— car M. André occupe des femmes
pour la confection de robinets en cuivre et
les payant à plus bas salaires, trouve là en-
core bénéticcs-organisa,pour venir en aide
à ces malheureux, une réunion privée, avec
un petit prix d'entrée. Voulant aussi servir
la cause féministe, les organisatrices avait
invité la citoyenne Lévi à bien vouloir se
charger de la con fèrenee,ct celle-ci toujours
dévouée, avait accepté avec empressement
relie Í!1\'ltaIÍon,
rCest Te marclf*20" septembre que cette
réunion eut. lieu. De suite, il l'ouverture de
la séance présidée par le citoyen llaehury,
la citoyenne Lévy prend la parole pour
développer son sujet, elle le rail avec une
éloquence et des arguments qui prouvent,
d'une excellente façon, qu'elle possède tou-
tes les connaissances nécessaires. La ci-
toyenne Lévi démontre la nécessité pour la
femme d.. prendre part aux luttes sociales
et politiques, de se mêler aux affaires pu
bliques et de réclamer pour elle les droits
politiques déjà possédés par les hommes.
Kilo démontre également la nécessité de
l'alliance de la femme et de l'homme et
engage les ci toyennesà s*intéresser aux mou-
vements de revendications tancés par leurs
camarades hommes.
C'est avec une argumentation serrée que
la citoyenne Levi démontre tout cela, et
prouve par des statistiques ot'Iicielics que
toutes les fois que la femme a été appelée
à prendre part. aux études et aux examens
des prot'esstuns dites libérales elle y a ob-
tenu le même succès que les étudiants
hommes,Te qui est une négation absolue
des ineptes allégations lie certains fruits secs
de la bourgeoisie qui prétendant garder
pour eux seuls l'accès de ces protestions
insinuent que la femme n'a pas les connais-
sances et les facultés nécessaires pour
réussir dans cette l'ranche inle!lccluelle,
Le citoyen Boisson remercie ia citoyenne
Lévi ainsI que l'union syndicale des Dames
réunies, du bienveillant concours apporté
pour soulager les misères cle5 grévistes.
Les citoyens Bessel, Durousset et lla-
chury en quelques mots reprennent les ar-
guments de la citoyenne Lévi et engagent
les citoyennes militer en faveur des idées
socialistes.
Tous formulent l'espoir que de nouvelles
réunions seront organisées et que nous re-
verrons parmi nous la citoyenne Lévi ainsi
que d'autres militantes diverses qui vou-
dront bien comme elle concourir à l'avan-
cement des idées et des événements.
La réunion qui a produit pour les grévis-
tes la somme tic 10 1'1', 15 est levée à 10 heu-
res et demie.
La secrétaire de l'Cnion Syndicale,
J. GARNIER.
Politique étrangère
Angleterre. — Egypte
Le congres ae Jbernn tI. neciare que les
régions son explorées de l'Afrique appar-
tiendraient au premier occopaai. Le capi-
taine Marchand représente la France ayant
pris possession la première de ces régions '
convoitées parla grande Bretagne; aM&-
quée dans ses privilèges. dans ce que les
clauses positives d'un traité lui assignent,
elle n'a qu'une chose à faire : se défendre.
Mais nous croyons qu'il n'y aura pas be-
soin d'en arriver lil, le Foreign ofiico ne
parlant plus de mobiliser la flotte de Ports-
inouï h diLn5 le but d'appuyer la démons-
tration militaire du générât Kitchenar à
Fashoda. Il use d'un autre mode de procédé
qui consiste à. engager momentanément la ■
discussion sur le terrain diplomatique d'où
l'on n'aorait pas dû le déplacer.
Mais les ressortissants de la querelle ao-
tuelle auraient été les suivants: c'est que
si le Sirdar renonce à rédoire par la force
des armes, le commandant Marchand occu-
pant Fashoda, il traitera cette portion de
pays comme l'on procède en cas do guerre,
c'est-à-dire qu'il l'enveloppera d'un cordon
do troupes, 1 isolant complètement des au-
tres points géographiques, réussissant
ainsi à affamer la mission française.
A cela, le quai d'Orsay a fait répondre
qu'en se renfermant strictement dans les
termes du traité de Berlin, ce ne sont pas j
seulement les terres occupées par le capi-
taine Marchand qui sont françaises, mais i
aussi les régions environnantes, la portion
de pays traversée par la mission Mar-
chand. Le Sirdar en isolant Marchand, en
s'avançant de plus en plus vers le Sud,
prend quand môme possession d'une con-
trée acquise par les armes françaises et
commet malgré tout un acte agressif dont
le retentissement peul amener un conflit
que, seuls, nous avons la conscience d'a-
voir tout fait pour éviter.
Il reste l'hypothèse que ce ne soit pis la
mission Marchand qui occupe le terrain si
violemment disputé.
On n'a reçu jusqu'à présent au sujet des
choses d'Abyssinie aucune confirmation de
Id prise da Fashoda par la colonne Hon-
champs et les troupes du Négus. Cependant
le fait ne serait pas impossible :
Ménélick ne renoncera pas, nous cst-i!
dit, à revendiquer le Nil comme la frontière
naturelle de son empire, et l'on prétend
qu'il va diriger des forces importantes en
face de Fashoda.
Autriche
I L'accord n'aura pas été long entre les
Tchèques et les AHemands. '-Aucl; ,) des
deux, partis ne veut rien abdiquer de ses
prétentions: nous n'en offrirons pour preu-
ves que les deux communiqués des comités
exécutirs des partis en présence;
« Nul ne serait plus heureux que le peu-
pIe les tchèque s'il pouvait dire que désormais
es deux p 'upics vivront en paix côte à
côte, rivalisant avec les armes de l'esprit
pour le propres, la prospérité, la culture.
Mais ce sentiment naturel, si souvent ma-
nifesté par le peuple t,ch.''qac, ri3 doit pts
être exploilÚ à son pt-.'-judice; personne ne
peut lui demander de céder quoique ce soit
de ses droits, déjà si exigus JI ni qu'il re-
nonce au combat poursa position nationale
et politique. Mais quand même le peuple
tchèque y serait disposé, la paix dans 13
pays et dans la monarchie, n'en serait pas
encore rétablie : l'agitation allemande n'en
continuerait pas moins, m'un après l'abro-
galion des décrets ministériels sur les lan-
gues. Les députés tchèques prouvcrontque
les Allcn11lllls n'ont aucun motif de se
plaindre, mais qu'ils aspirent à la supré-
ma'ie. En ne demandant que le droit et la
justice nous voulons aussi la paix, mais
une paix honnête, une paix entre l'g-'lUX.
sur la base de droits égaux," su:' la ! a se de
la parité ahsoiuc. M
A ce manifeste, les progressistes alle-
mands 0'11. répondu par une déclaration
identique que « vu toutes ces circonstances
le comité du parti du peuple en Styrie, se
prononce d'accord avec ses électeurs el
avec les députés des autres partis alle-
mands, pour la résolution de continuer la
lutte contre le gouvernement avec tous les
moyens de l'obstruction tant qu;) les rég)e-
mcnts sur los langues resteront en vi-
gUClT. »
On le voit, les événements suivent leurs
cours. L'opposition est décidée à se servir
des moyens extrêmes.
Espagne
On commente beaucoup l'incident qui
s'est produit à l'arl'ivl>Í' de l'amiral r.ervera.
Au moment où il descendit do wagon le
ministre delà marine s *-'.,',.,.!itiv;iil(,.t! comme
pour l'cmll1\l::i:.i111', en fut empêché par la
froide et correcte attitude de l'amiral se re-
fusant il recevoir toute marque d'effusion.
Deux officier-. qui at.Lc!i.!;n''nt. à la. gare
dirent avec intention en désignant le mi-
nistre : IC Cet Il,);nmq est responsable de
tout; c'est vraiment incroyable qu'il reste
au pnuvoit'. "
L amira) r.ervera n. eu uns très longue
conférence avec M. Sagasta.
Anx Philippines
La tentative d'empoisonnement faite sur
Aguinaldo est con!n'm'''e. quoique l'incident
soit fort cxa.:;-0¡'ê. On prétend que le clergé
n'a pas trempé dans ce complot. Deux sol-
dats espagnols, prisonniers d'Aguinaldo,
étaient employés comme domestiques dans
sa maison d'Agninaldo, et l'un d'eux aurait
jeté du sel d'oseUSe dans la lOUpe; seule-
ment le cuisinier ayant immédiatement vu
le coup, l'acte criminel a pu étro con-
ja!é,
L'assemblée nationale est résolue à de-
mander aux Etats-Unis de reconnaître l'in-
dépendance des Philippines et d'établir un
protectorat qui viserait les relations exté-
rieJros; eann,d'amener les Etats européens
à reoonnaître cette indépendance, et de
nommer une commission composée d'Amé-
ricains et d'habitants de l'Archipel chargés
d'étudier les moyens de reconnaître les
semée» rendus par le gouvernement fédé-
rat.
IBO.
Lire deunia a la tribune de la l'HOX -,E :
« Les Bsardine-Clubs de femmes
en Amériqme »
par CLAME DE PRATZ.
CLAIRE DE PRATZ.
Assassinat de M. Olivier
M. Paulmier, que l'on avait prévenu par
dépèche,do l'attentat commis par sa femuu,
est arrivé hier matin à cinq heures, à
Paris.
1 s'est rendu aussitôt avenue Niel, à son
domicile,ofl il est reste jusqu'à huit heures,
interrogeant ses domestiques et prenant
connaissance des journaux relatant le
drame de la rue nicher.
Puis il est allé au Dépôt de la Pré-
fecture de police où il a demandé l'autori-
sation de .communiquer avec sa femme,
autorisation qui lui a été accordée.
L'entrevue a duré jusqu'à onze heures et
demie.
A deux heures et demie, M. Louiche, juge
d'insll'ucLion,chargé de suivre cette affaire,
se faisait amener Mme Paulmier, à laquelle
il faisait subir un premier interrogatoire.
M. Paulmier avait obtenu du juge l'auto-
risation d'assister il cet interrogatoire. Il
s'était fait accompagner de M° Simon-Le-
franc qui prêtait son concours comme avo-
cat-défenseur. en l'absence de M' Danct, à
Mme Pllulmier,
Très calme, la femme du député du Cal-
vados a fait au magistrat le récit du drame,
et a manifes'.é le regret qu'elle éprouvait
d'avoir frappé un innocent et do n'avoir pu
atteindra M. Millerand.
Vers quatre heures et demie, M. Paul-
micr, accompagne de la femme de chambre
do sa femme, quittait le cabinet du jll,;e,
et Mme Paulmier était conduite à la prison
de Saint-Lazare, dans un fiacre de la Com-
pagnie Générale, sous la garde de deux ins-
(lecteurs,
A l'hôpital Bichat
Mme Olivier a. passé toute la journée
d'hier à l'hôpital Bichat auprès de son mari
qu'elle n'a quitté qu'à six heures dj soir.
La journée a été relativement, bonne et si
aucune complication ne survient on espère
le sauver.
A minuit, nous avons fait prendre de ses
nouvelles, on nous a répondu qu'aucune
aggravation ne s'était produite et que le
malade venait de s'assoupir.
M. Olivier est né en ttç¡Ô;, à Lyon. Il s'était
engagé en 1870 ot avait été, ayant il l'époque
quatorze ;ms, le plus jeune volontaire de
t'r.utf'c. Il était, depuis dix-sept ans,dans le
journalisme et depuis sept ans, directeur
du supplément de la Lanterne. Il y a quel-
ques mois, M. Millerand se l'était adjoint
comme secrétaire de la rédaction.
Une lettre
MM. de Dion et Jean Beraud avaient
adressé avant-hier la lettre suivante il
M. Millerand :
Monsieur le rédacteur en chef,
Dans le numéro de ce matin, nous lisons un
article intitulé" Coups de griffe ».
En l'absence de M. Paulmier notre devoir de
témoins dans l'affaire à laquelle vous faites al-
lusion. nous oblige à rétablir les faits.
M. Paulmier. député, ayant rencontré M. Ber-
trand do Valon dans un endroit public, lui a
intimé l'ordre rio sortir sous menaces de voies
de fait. M. Bertrand de Valon est sorti. M. Paul-
mier nous a immédiatement constitués comme
témoins, mais nous avons vainement attendu
feux de M. de Valllll qui s'est contenté de pro.
pager des insinuations odieuses qu'il s'est bien
J.;:lf,Je de prouver.
Dans ces conditions, nous déclarons quo ce
n'est i>as M. Paulmier qui est disqualifié, comme
vous le prétendez, mais bien son adversaire.
K' L'INÙ'ONLÎAN - MIL
IMJTIÔ IVLRLTTILLIIU» NUOUIIUU
rétablit exactement les faits.
JEAN BÉRAUD.
DE DION.
Le Crime de la rue des Epinettes
Mme Maire, née Joséphine Dieudnnné,
âgée de 57 ans, demeurait depuis treize
ans, 21, rue des Epincttes, oÍl elle occupait
une petite chambre très proprement meu-
blée, d'un loyer annuel de 200 francs, reti-
rée an premier étage sur la cour.
Il y a dix ans, elle perdait son mari et
après quatre années de veuvage eile se
liait intimement avec un nommé Louis-
Joseph Métayer, Agé de trente ans, origi-
naire de Poiti'ers. travaillant il ses moments.
perdus, c'est-à-dire très rarement, comme
garçon de salle.
Il ne tardait pas du reste à vivre complè-
tement à la charge de Mme Maire, chez
laquelle il s'installa et qu'il maltraitait et
même battait quand elle lui refusait de
l'argent.
Il y a un mois environ, Mme Maire le fai-
sait arrêter pour un vol de divers objets et
d'une somme de 40 francs qu'il avait com-
mis à son préjudice.
Prise de pitié, elle retirait sa plainte le
lendemain et ramenait chez elle Métayer
qui avait passé une nuit au poste.
Cet acte de clémence lui fut fatale.
Lundi dernier, Métayer allait la chercher
dans la soirée à la cantine d'un dépôt de
voiture de la rue de la Jonquière, ou elle
travaille comme cuisinière et ils rentraient
ensemble rue des lipinettes.
On ne voyait sortir le lendemain que Me-
tayer.
On crut que Mme Maire, ce qui lui arri-
vait quelque foi s,était allée passer quelques
jours chez des parents habitant les envi-
rons de Paris, et on ne s'en inquiéta pas
davantage.
Hier vers deux heures, un voisin incom-
modé par une odeur nauséabonde qui s'é-
chappait de la chambre de Mme Maire, s'in-
quiéta. et prévint le concierge qui se rendit
chez M. Gilles commissaire de police.
Ce magistrat fit aussitôt ouvrir la porte
de la chambre de Mme Maire et il trouva
celte malheureuse étendue tout habillée
au milieu do la pièce, les bras en croix, le
cou étroitement serré par un mouchoir, la
bouche remplie de tampons d'étoire; son
corsage était cnLr'ouverl et une plaie
énorme, béante, faite par un couteau de
cuisine, se voyait au milieu de sa poitrine,
tout inondée de sang caillé.
M. Gilles fit aussitôt prévenir le procu-
reur de la République qui chargea M. lluh-
tand, juge d'instruction, de suivre cette af-
faire.
Ce m:¡gislrat,aceompagné de M,Cocheferl,
se rendit sur le théâtre du crime et procéda
aux constatations légales. Les économies
de Mme Maire qui devaient se trouver dans
une petite pochette disstmulée dans son
corset avaient disparu.
Les soupçons se portèrent aussitôt sur
Métayer.
M. Cochcfert s'occupait d'avoir son signa-
lement, quand le fils d'un locataire de la
maison lui raconta qu'il avait vu Métayer
enlever, la semaine dernière, ses vêtements
qui se trouvaient chez Mme Maire et les
porter dans un débit de vins de la rue Le-
mercier,
Deux agents accompagnèrent aussitôt le
gamin à ce débit de vins.
Ils trouvèrent lil, parmi les clients de
l'établissement, u%eiilliette connue sous le
nom de « III Môme Carotte )1 qui était au
mieux avec Métayer et un nommé C..., qui
avait rendez-vous avec lui à six heures de-
vant le 78 flll boulevard de Clichy,
Les azcn:s firent monter dans leur voi-
ture " la M.)meC:irotte >• et C... et partirent
au rendez-vous, où ils trouvèrent Métayer
assis sur un banc du boulevard et atten-
dant.
Le misérable se laissa arrêter sans op-
poser de résistance.
Sur lui on trouva un livret de caisse
d'épargne de 1,332 francs, au nom de Mme
Maire et tous les bijoux de celte malheu-
reuse.
Conduit à la maison du crime il fit à M.
Hulhand et à M. Cochefert des aveux com-
plets et il raconta qu'il avait vendu à un
changeur de l'avenue de Clicny deux obli-
gations de la Ville de Paris qu'il avait dé-
robé il sa m--I'cssC,
M. Lertil'on que l'on avait fait mander prit
un certain nombre u.. photographies du
cadavre et de la chamln'c,et aussitôt cette
opération faite le corps de Mm^ Maire fut
placé dans un fourgon et conduit à la Mor-
gue aux tins d'autopsie.
Métayer conduit il la Sûreté a été inter-
rogé a dix heures du soir par M. Hui itand,
dans le bureau de M. Cochefert, puis à mi-
nuit et demi, il a été écroué à la prison de la
Santé.
LE
MEETING DE LA SALLE CHAYNES
Le meeting organisé par le comité d'ac-
tion révolutionnaire communiste, avait at-
tire hier soir il la salle Chavnes 12, rue
d'Allemagne, plus de 2,000 personnes. M. do
i,re.ssuiisé présidait, ayant à ses côtés les
citoyens Cyvoct, Joindy, Charnay, Boicer-
\'oi:-;e, etc, etc.
M. de l'resscnsé a dénoncé la faiblesse
du gouvernement en termes énergiques. Il
a prédit un coup d'Etal militaire. Et les
protestations unanimes de l'assistance ont
démontré que ce coup d'Etat ne sera pas per-
pétré sans que le peuple s'insurge contre
les généraux factieux.
Une longue ovation a salué le discours de
M. de Pressensé. Les citoyens Uoiccrvoisc,
Charnay lui ont succédé à la tribune.
Le citoyen Cyvoct invite les assistants à
se retrouver aujourd'hui à la réunion orga-
nisée par 1('9 -natIOnalistes afin d'y affirmer
leur amour du droit et di la justice.
Puis l'ordre du jour suivant est adopté à
l'unanimité.
Les citoyens réunis à la salle Ctnynes;
Déclament d'abord la mise en liberté du cr!o-
nel Pic-quart. victime de machinations infâmes de
l'l-]tat-ina jor peu] lé de faussaires.
Protestent contre la prévention inventée p;lr
ces !niscr.th!cs. qui après avoir pendant deux
ans el demi dénaturé le « petit bleu Il osent incul-
per le colonel Picuuart. le niodt'fc d'honneur.
Envoient, à M. Félix Faure, s'il continue il se
faire l'instigateur des faux et le complice des
faussaires, l'expression de leur mépris. Le peu-
ple de Paris se déclare prêt à résister au coup
d'Etat que préparent les prétendants d'accord
avec les cléricaux, les réactionnaires. les mili-
taristes; ils se déclarent résolus à défendre la
République qui flétrit les généraux factieux,
leurs amis les faussaires et le traître Esterhazy,
Mettent au dé1l les nationalistes d'organiser
une réunion publique et contradictoire.
Déclarent continuer la lutte avec plus d'ar-
deur que jamais en faveur de la justice et de la
vente.
La. réunion est levée aux cris de : Vive
Picquart! Vive la Justice!
Quelques nationalistes, professionnels
de l'émeute, fondent à la sorLic sur les as-
sistants.
Un malheureux est piétiné et grièvement
blessé.
Les manifestants du droit se dirigent en
I une forte colonne vers !a rue de Flandre,
escortés par les agents. Pas de nouvel inci-
dent.
LA GRÈVE DES TERRASSIERS
Il est à craindre qu'après la réponse faito
avant-hier par les entrepreneurs. La gr-ïvo ne
rentre dans une phase aiguë, et il y a vraiment
quelque imj r.idence de la part des patrons à
exciter ainsi des ouvriers qui se sont montres
jusqu'ici tout à fait calmes.
Le but des entrepreneurs est bien simple. lia
veulent profiter de la grève pour faire réviser
des marchés qu'ils ne trouvent pas assïz avan-
tageux, et c'est sur le dos des ouvriers que cela
va encore se passer, comme toujours, du reste.
Inutile de réclamer, en faveur de ces malheu-
reux. un sentiment d'humanité; et malgré la lé-
gilimité de leurs revendications et la pondéra-
tion avec laquelle ils les ont faites, il est à
craindre et à prévoir qu'ils ne jouent encore jeu
de dupes. Néanmoins, si.comme nous le faisions
prévoir hier. la grève devenait générale, il serait
[ bien difficile d'en prévoir l'issue.
J. B.
LES JOURNAUX
DE CE MATIN
De la Petite République :
D'où qu'elle vienne, la vérité doit être aeel'eil-
lie par les esprits libres. M:iis pour l'honneur de
la France, pour la dignité de notre pays dans la
monde, nous tenions passionnément à faire la
lumière avec les seu)s éléments de vérité que la
France elle-même nous fournissait. De m,'me il
nous paraît nécessaire que ce soit la justice
française, et elle seule, qui fasse la pleine
clarté. l'lais si on ne veut pas que la vérité
nous vienne '!u dehors, si on ne veut pas que
les révélations de l'étranger devancent chez
nous la marche trop lente ne la vérité légale, il
n'y a plus une minute il perdre.
Déjà, comme il était inévitable, l'odieuse pour-
suite dirigée contre le colonel Picquart à propos
du « petit bleu - a mis en mouvement les jour-
naux étrangers. La légation militaire allemande
a écrit à Esterhnzy le « petit bleu » comme elle
lui a écrit bien d'autres lettres. Elle sait qu'Es-
terhazy était son espion ordinaire, et vraiment
il lui devient riiflkil9 de iaisser condamner le
colonel Picquart sous prétexte qu'il a écrit le
« petit bleu ».
Aussi, dès hier matin, les grands journaux
officieux allemands publiaient des notes déci-
sives oiï ils affirment que le « petit bleu » a été
écrit par raFienl de t'attache aHemand.
Evidemment, l'Allemagne ne veut pas avoir
devant le monde la responsabilité du nou veau
cri'!'!c préparé par l'Etat-MajO"# Et nos nationa-
listes, par leur aveuglement l't leur mauvaise
foi, nous acculent à cette humiliation de recevoir
la vérité du dfhors. -e
Demain, s'ils résistent encore, l'Allcmagne
publiera tout simplement le fac-similé des let-
tres et des documents qui lui étaient adressés
par le traître I:sterh.,izy.
Et au lieu de {a revision glorieuse que noua
pouvons et devons faire nous mêmes, nous au-
rons. si je puis diro une revision à la suite, dé-
\,'rminÓe parles publications de l'étranger. Quels
^ »
Jean Jaurès.
Du Radical :
Je suppose que M. Francis de Pressensé n'a
pas été fort ému par le billet doux que vient de
fui adresser M. le grand-chancelier de la Légion
d'honneur. Il n'y a. par le temps qui court, rien
de désobligeant à être mandé à comparoir de-
vant le conseil de l'ordre qui a suspendu M.
Emile Zola.
M. de Presscnsé est accusé de divers crimes,
notamment d'avoir livré à la publicité la lettre
par laquelle il envoyait sa démission de cheva-
lier de la Légion d'honneur à M. le grand-rhan-
celier et d'avoir présidé des réunions publiques
olt l'on n'a pas dit de bien du colonel Henry et
de ses camarades.
M. le ¡.rrand-rhanrelil'r induit de là, première-
ment que M. Francis de Pressensé a manqué au
respect dû à l'ordre dont le commandant Ester-
liazy est toujours le plus bel ornement, deuxiè-
mement. que ledit Pressente pourrait bien
avoir forfait à l'honneur. C'est pour exa-
miner ce second point qu'une commission d'en-
quête est nommée par M. le grand-chancelier et
entendre les explications verb iL-s ou écrites de
notre confrère, si toutefois celui-ci consent à lui
en ft)ui-nir.
Car le cas de M. de Pressensé est plutôt amu-
sant: il est chevalier de la Légion d'honneur
malgré lui, puisqu'il a envoyé une démission
qui n'a pas été acceptée. Et voici qu'on pour-
suit ce chevalier récalcitrant pour n'avoir pas
suffisamment respecte l'institution dont il a
voulu se séparer avec ec!at.
Je suppose que M. de Pressensé reconnaîtra
150n premier crime de honno j:r\ce et qu'il ré-
pondra : tl Mais parfaitement, puisque .l'! vous
ai renvoyé mon ruban, c'est que je ne iii,! trou-
vais plus digne d-' porter l'insitrne qui r uigit la
boutonnière de M. Esterhazy. Vous pensez (]lll.
cela constitue un manque de respect à I.l Lé-
gion d'honneur et au conseil de l'ordre, je veux.
bien. »
Ranc.
(3)
LA TRIBUNE
25 SEPTEMBRE 1808
A TRAVERS L'ÉDUCATION
L'enseignement secondaire des
jeunes filles.
III
coud rubrique forme un feuilleton vot&ni 1
4mf le sujet change tout les trois jours. \
Quels ont été les résultats du vote de
la loi 4je 1880 sur l'enseignement secon-
daire des jeunes filles?
Los partisans de la culture de l'esprit
féminin ont-ils piteusement échoué?
Ont-ils, au contraire, eu lieu de se ré-
jouir de leur courageuse initiative et leur
bnccL's a-t-il produit quelque cataclysme?
ils ont réussi,parce que rien n'a raison
contre la raison; parce que la justice,
(IUoiqu'clle soit boiteuse, marche et at-
teint son but.La preuve qu'ils ont réussi,
c'est que la statistique de décembre 1807
accuse 38 lycées et 25 collèges de jeunes
filles.
Les lycées sont ainsi répartis :
Paris : cinq lycées : Fénelon, Lamar-
tine, Molière, Victor Hugo, Racine.
Province : Agen, Amiens, Auxerre, Be-
sançon, Béziers, Bordeaux, Bourg, Brest,
Chambéry, Cliarlevillc, Dijon, Grenoble,
Guéret, Le Havre, Lona-le-Saulnier,
Lyon, Marseille, Mon tau ban, Montpel-
lier, Moulins, Mâcon, Nantos, Nice,
Niort, Le Puy, Heims, Rouen, Itoanne,
Baint-Elienne, Saint-Quentin, Toulouse,
Tournon,Tours, Versailles.
A la môme date, il y avait 2tJ collèges
de jeunes filles, ainsi répartis :
Abbeville, Alais, Albi. Armentiùrcs,
Avignon, Beauvais, Béziers, Cambrai,
Cahors, Castres, Carpentras, Constan-
tine, Châlons-sur-Saône, Chartres, Eper-
N«U.| A.IT«tra^ LU 1A .WMYfoE118 ^RAIL~.
Saumur, Sedan, Tarbes, Valenciennes,
Vitry-lc-François.
En tout U3 "établissements d'enseigne-
ment secondaire pour les jeune filles,
sans compter les nombreux cours secon-
daires en voie de li an--formation, c'est-
à-dire sur le point d'être transformés
en collèges ou en lyc6c3.
L'enseignement clans les lycées et col-
lèges comprend :
1° L'enseignement moral ;
2° La langue française et au moins une
tangue vivante ;
3° Les littératures anciennes et mo-
dernes;
4" La géographie;
7jo L'histoire nationale et un aperçu de
l'histoire générale;
0" Les sciences mathématiques, physi-
ques et naturelles;
7° L'hygiène;
8" L'économie domestique et les tra-
vaux à l'aiguille;
0" Des notions de droit usuel ;
10P Le dessin, le modelage;
j 11° La musique ;
i 12' La gymnastique.
Nul n'ignore qu'un programme vaut
surtout par les professeurs chargés de
l'appliquer. Par conséquent, il est rare
que la critique en soit probante. Je ne
puis cependant m'cmpcchcr de constater, :
avec regret, une lacune qui, peu impor-
tante, au premier abord, en ce qui con-
cerne l'enseignement du français dans
les lycées et les collèges, s'aggrave sin-
! gulièrcment, lorsqu'il s'agit de l'Ecole
Normale supérieure de Fontcnay, dont
le niveau est équivalent, sinon identi-
que : je veux parler du grec et du
latin, '
En somme, le programme de l'ensei-
gnement des jeunes filles correspond à
celui de l'enseignement secondaire mo- i
derne. Ce dernier vaut ce qu'il vaut, et j
ce n'est pas le moment de le discuter : I
partisans et adversaires ont, d'ailleurs 1
! dépensé assez d'encre, sans que les uns
! sOient parvenus à convaincre les autres,
i et ils en dépenseront enoore, mais ils j
sont du moins tombés d'accord sur la
nécessité des élude.v classiques pour les
futurs professeurs de lycées et des col-
lèges de garçons.
Pourquoi celle nécessité n'est-elle pas
reconnue pour les professeurs de lettres
des lycées et des collèges de jeunes filles?
Il est incontesté cependant que l'étude
du grec et du latin éclaire singulière-
ment celle de la langue française, et que
celui-là seul sait vraiemcnt le français qui
possède les deux tangues mortes. Les
supprimer pour la future maîtresse d *un
lycée de jeunes filles, c'est donc préparer
^infériorité de son enseignement.
Aurait-on, par hasard, constaté l'inca-
pacité des femmes à apprendre les lan-
gues mortes? Allons donc ! j'ai pour ma
part, dans mon entourage immédiat dix
exemples vivants du contraire!
M. C. Sée. qui, d'ailleurs, n'était pas
très ambitieux pour les femmes, et qui
n'était pas féministe, au sens que nous
donnons à ce mot, a dit dans son rap-
port : Je ne dis pas que les aptitudes de
t homme et de la femme sont identiques ;
les aptitudes difl*èretit comme les desti-
nées ; mais ce que je soutiens, cest que
pour cette culture intellectuelle qu'on ap-
pelle plus spécialement les humanités et
qui fait le fond principal de l'enseigne-
ment secondaire, je soutiens que les apti-
tudes de la femme sont égales aux nôtres,
qu'elles sont même plus précoces, On l'a,
en Suisse, admirablement compris. CeUe
instruction, dans la plupart des Cantons
est, non-seulement donnée aux jeunes
filles, mais — et c'est là ce qui choque
tant notre honorable collègue, M. Keller
— leur est donnée en commun avec les
jeunes gens.
Pourquoi, je le demande de nouveau,
les bannir de nos programmes? 1
Cette lacune est d'autant plus regretta-
ble qu'elle aggrave pour les jeunes filles, '
les difficultés des études de grammaire
comparée qui tiennent une place relati-
vement considérable dans remploi du4
temps des écoles supér ieures de Sèvres ;
et de Fontcnay. Pour avoir voulu simpli-
fier, on a tout'simplemcnt compliqué.
La question des humanités mise il part,
et nos réserves faites à ce sujet, nous
n'aurions guère qu'à louer dans les pro-
grammes. 'Leur application,au contraire,
ne nous paraît pas absolument en har-
monie avec les vues des promoteurs de
la loi.
Le but initial était, sans contredit.pour
la masse des jeunes filles de la classe
aisée, la culture désintéressée de l'es-
prit; et, pour l'élite, la préparation sé-
rieuse et profonde au professorat. Pour
les premiorcs,pas d'examens, le bacca-
lauréat stérilisant, supprimé et remplacé
par des examens de passage, aboutissant
a un « certificat d'études secondaires »;
pour les autres, la licence et l agréga-
tion.
Mais les lvcées et collèges créés, cons-
truits, ouverts, il a fallu les peupler. La
haute bourgeoisie, la magistrature et
l'armée inféodées aux idées d 'antan, la
première par snobisme, les deux autres
par esprit de domination, se sont abste-
nues d'y faire instruire leurs filles (il y a
des exceptions, c'est incontestable, mais
il faut connaître la province pour me-
surer ce qu'elles dénotent de courage de
! la part des parents qui bravent l'opinion
et se mettent au-dessus du « cant »).
C'est donc il. la petite bourgeoisie que
l'on a dû faire appel. Dès lors, un grand
nombre de jeunes filles, qui devraient
fréquenter des écoles primaires supé-
rieures ou des écoles professionnelles,
parce qu'elles seront dans la nécessité
d'utiLiscr immédiatement leur instruc-
tion, vont au lycée et, malgré les direc-
, teurs, malgré les professeurs, malgré
l'esprit de 10. loi s'y préparent aux di-
plômes de l'enseignement primaire. La
1 proportion des élèves d enseignement
secondaire qui se présentent aux exa-
mens du professorat des écoles normales,
augmen te chaq ue année. L'enseignement
primaire y gagne-t-il? L'enseignement
secondaire v perd certainement.
; Et puis. il a fallu foire un autre sacri-
fier : les uns, Paul Bert en tête, ont fait
utjlitairemcnt et...gaillardement le sacri-
fice; les autres, avec Jules Ferry l'ont
accepté la mort dans l'âme, comme un
mal nécessaire, et ont fait le possible
pour que le principe de l'externat fût
sauvegardé ; d'autres, enfin, comme M.
Michel Bréal, se sont montrés irréducti-
bles...
Mais nous étions — nous sommes en-
core hélas! — en pleine lutte, en pleine
bataille. Ou bien il fallait exclure de nos
lycées toutes les jeunes filles habitant
exira-muros, ce qui aurait été se priver
d'un contingent notable; ou bien il fal-
lait encourager, autour des lycées la
création de petits groupes d'internes,
dirigées sous le contrôle de l'adminis-
tration universitaire, par des personnes
de caractère inconteste — ce que l 'on n 'a
pas osé faire — ou bien encore essayer
du svstème tutorial... Mais il est, dit-on,
incompatible avec les mœurs françaises
et à force de le dire, on a fini par le
croire.
Bref l'internat sévit — en province —
sur les lycées de jeunes filles, comme sur
les lycées de garçons; le mouvement en
sa faveur s'accentue, et notre seule con-
solation — elle a d'ailleurs son prix —
est de savoir qu'au moins ces enfants ne
sont pas au couvent, dirigées vers la vie
par des personnes qui l'ignorent ou l'ont
désertée.
Ces élèves internes sont vraiment
nombreuses et l'on peut affirmer que
malgré les préjugés irréductibles de la
coterie cléricale, la loi de M. Camille Sée
a porté ses fruits. L'enseignement secon-
daire des jeunes filles, né viable, prend
des racines en France. Les lycées et les
collèges réussissent. La preuve c'est leur
nombre toujours grossissant.
Le grand nombre d'élèves a imprimé,
dès le début, un mouvement correspon-
dant parmi les futurs professeurs : (à
elles seules les maîtresses de Lettres et
de Sciences dûment diplômées arrivent
au chiffre respectable de 400 environ).
Tout ce personnel est jeune, peu disposé
à abandonner une profession intéres-
sante, relativement bien rétribuée, très
honorable et très honorée, et l'adminis-
tration se voit obligée d'enrayer la pous-
sée vers les examens qui deviennent,
par cela même, chaque année plus diffi-
ciles.
Pour que nulle n'en ignorât le Minis-
tère a fait distribuer cette année dans
tous les établissements d'enseignement;
secondaire de jeunes filles un tableau
comprenant :
1° Le nombre d'agrégées des Lettres et
des Sciences n'étant pourvues d'aucun
poste;
2° Le nombre d'agrégées des Lettres
et des Sciences occupant un poste au-
dessous de celui auquel leur grade leui
donnerait droit;
3° Le nombre des admissibles à l'agré-
gation;
4° Le nombre des candidates pourvues
du certificat d'aptitude se trouvant daus
les mêmes cas ;
Enfin on n'a fait à la dernière session
que cinq agrégées (ordre des lettres, sec-
tion littéraire), trois agrégées (ordre des
lettres, section historique) ; deux agré-
gées (ordre des sciences : section des
sciences mathématiques), deux agrégées
(ordre des sciences, section des sciences
physiques) etentin seize jeunes filles ont
été pourvues du certificat d'aptitude
(Lettres), et cinq du certificat d'aptitude,
ordre des sciences.
Cette statistique est de nature à faire
réfléchir les jeunes filles et leurs pa-
rents.
Un dernier mot : « Les études altèrent,
dit-on, la santé des jeunes filles. »
Le surmenage, oui ; il est, de même,
fatal aux jeunes gens; le travail mesuré,
pondéré, alternant avec les exercices
physiques, le repos et les plaisirs do la
jeunesse, est excellent, si j'en juge par
le nombre très probant de jeunes filles
qui font partie de mes relations.
PAULINE KERGOMARD.
Fllt
Le Conseil de Cabinet
Les ministres se sont réunis hier ma-
tin en conseil de cabinet, au ministère de
l'Intérieur, sous la présidence de M. Bris-
son.
MM. Pcytra! et Viger, indisposés,
n'assistaient pas il la séance.
Le ministre des Affaires étrangères a
fait connaître l'état des affaires de Crète.
Le conseil a expédié les autres affaires
courantes.
Le prochain conseil de cabinet a été
Hxé 't lundi matin.
Cette séance,qui a duré près de trois
heures,a été consacrée à la décision qu'il
y a lieu de prendre sur la revision.
M. Sarrien, arrivé au ministère de
l'Intérieur, environ une demi-heure après
ses collègues, leur apportait lavis
exprimé par la commission consulta-
tive.
Sur les six membres la composant,
trois auraient émis un avis favorable, les
trois autres s'y seraient montrés opposés
par la raison que les conditions juridi-
ques requises ne seraient pas remplies.
C'est au gouvernement que revient la
responsabilité et la décision finale, aussi
1rs ministres l,nl-ils jugé la présence de
tous leurs collègues indispensable.
M. \ïger, qui est souffrant, se trouve
actuellement dans le Loiret; M. Peytral,
également indisposé, est dans les Bou-
ches-du-Hhône. Rappelés tous deux télé-
graphiquement, la décision sera prise
iundi matin.
Le Tnups rappelle qu'un cas sembla-
ble s*e-;t présenté tout récemment.
Lorsque l'affaire Jamct-Léger fut por-
tée devant le ministre de la Justice, la
commis-ion consultative du ministère
•le la Justice se partagea de même en
deux fractions égales, trois contre trois.
Le garde de* sceaux d'alors,agissant en
vertu «le -on droit propre,saisit la cour
de «îas.-ation qui admit la révision. Celle-
ci fut t»:Li le et aboutit, on le sait. à la pro-
clamation de l'innocence des deux con-
damnl!-':,
Espérons que le pays sera fixé lundi ;
cette situation est indigne de la Républi-
quc et de la France. Le gouvernement
n'en sortira il son honneur qu'en faisant
cesser les illégalités qui se succèdent et
dont la dernière est celle commise par le
gouverneur de Paris.
De srrafc. qu'on rétablisse les lois.
Le colonel Plcqnart
Le Fit/a M publiait hier la dépêche sui-
vante ile sun correspondant particu-
lier :
Berlin, 6 h. 56 soir.
La > lit- Culnc/ne et le tlerlincr Tayeblatt,
qui viennent de paraître, d- cht-.'nt savr.ôr, di,-
Sliurre auilJl"i:\¡"I', que le « petit bleu » dont on a
publié 1.' lexi,) n'i rit pas un faux. Il n'a pas été
Dcrit par 1., colonel de Schwartzknppell, mais
par l'agent !,i'I'I'd de l'ambassade d'Allemagne,
qui servait d intermédiaire à l'attaché militaire
•dlemaud dans ses rapports avec les espions.
Autre déclaration non moins commentée.
I.:t c,az- lt>* Sationale (Sattonal Zdtuny) écrit,
au sujet .Ii' ces mûmes incidents :
Il On n'a . amiis confite, en Allemagne, que
• le colop l 'il i Srh\vartzï;opr>en ait en des r.\p-
. pnrls a Vf K
» oîîrris par des oflici^rs comme Esterliazy.
« 1." cidoncl de Scltw;trlzk-,nppe-t a eu en
• réalité, a-.-t--- Kstcrhazv, les rapports que com-
» portait sa mission.
Ces révélai ions n'apprennen t, rien ni
nu public, ni aux ministres qui savent il
quoi s'en tenir et sur Esterliazy et sur le
Petit Uleu. Ce qu'il importe de retenir,
c'est que nous en sommes réduits il être
renseignés par l'étranger sur ce (lui se
passe chez nous.
L'Allemagne nous donne une !e';on
plutôt dure" en nous faisant remarquer,
par !'art.K'h' ci-dessus, qu'un officier
traître est connu et protégé par l'Elal-
major, alors qu'un honnête homme, qui
a refusa de s'associer aux machinations
dn ses chefs a élé jeté en prison sous la
stupide inculpation de faux.
Pour le bon renom de notre pays,
comme dirait NI. Méline, ne nous expo-
sons pas it recevoir des leçons de Gui!-
laume.
HÉLÈNE SÉE.
A LYON
Réunion à la Bourse du Travail. — La
grève de la maison André. — La pro-
pagande féministe.
LTnion syndicale des Dames réunies de
Lyon avaient organisé une réirtiion au bé-
néfice des grévistes de la maison André,
fabricant d'appareils de chaull'uge, avec le
concours (Jr la «*iloyenne Lévi.
Disons tout d'abord un mot sur les mo-
tifs qui ont amené ce conflit. M. André est,
comme nous le disons plus haut, un fabri-
cant d'appareils do chauU'ags cIaQt t'atelier
situé, 2, Montplaisir, banliea de Lyon,
renferme — renferme est bien le mot,
110 ouvriers environ. Notre patron avait
imposa 1 ces ouvriers ua règlement que
ceux-ci avaient à bon droit logé comme
attentatoire à leur dignité, et a leur liberté
de tmvailleurs. Quelques simples extraits,
pris au hasard, suffiront certainement à
convaincre tout le monde sur la valeur ma-
rale de ce règlement. Ainsi il est dit : Que
« Tout ouvrier tenant un débit de boisson
ne peut faire partie de la maison ».
Il est interdit de stationner ailleurs qu'a
la Place où les ouvriers ont Leur travail. La
sortie des paquets ou de tous autres objets
est interdite; un bon de sortie sera exigé à
l'exception du samedi où la sortie du linge
est autorisée. L'assurance est obligatoire;
une retenue de 0 fr. 30 par 100 francs do
salaires sera effectuée pour avoir droit à
l'assurance.
Une retenue de 20 francs est faite à l'ou-
vrier à raison de 2 francs par semaine, comme
garantie pour la série d'outils qui lui est con-
fiée pour l'exécution de son travail!
Ces quelques extraits forcément incom-
plets donnent déjà une idée de l'ensemble,
Les ouvriers et ouvrières forcés de subir
ces injonctions vexatoires et onéreuses re-
fusèrent, à un moment donné, de les sup-
porter plus longtemps, et une délégation
des syndicats des corporations intéressées
au nombre de six se présenta chez M.André
qui, dans son omnipotence patronale, re-
fusa toute discussion et ne voulut pas rece-
voir la délégation syndicale, prétendant
que celle-ci n'avait rien à voir dans ce qui
se passait à son atelier. C'était une nou-
velle injure infligée aux ouvriers de la
maison dont on refusait les mandataires et
aux syndicats ouvriers pour lesquels l'on
ne voulait reconnaître la compétence pour
tant indiscutable. M. André, du reste, ne se
contenla pas de ce premier exploit et le lit
suivre d'insultes collectives contre ses ou-
vriers qu'il mit en quelques sortes à la
porte, se faisant ainsi lui-même l'auteur de
la grève. _____________«
Depuis, plusieurs tentatives furent tatt.es
en vue d arrangement et les grévistes pro-
posèrent par l'entremise du juge de paix,
le recours à la conciliation et à l'arbitrage,
M: André encore une fois ne voulut rien en-
tendre et se mettant au-dessus de la loi,
refusa celte proposition légale et lùyale.
Depuis sept semaines les grévistes sont, j
par conséquent, sans travail et sans res-
sources.
L'union syndicale des Dames réunies qui
s'intéresse à toutes les revendications Oll- j
vri'''ros ou sociales, ne voulut pas rester
indifférente en cette occasion, d autant plus
qu'il y a parmi les grévistes plusieurs ci-
toyennes— car M. André occupe des femmes
pour la confection de robinets en cuivre et
les payant à plus bas salaires, trouve là en-
core bénéticcs-organisa,pour venir en aide
à ces malheureux, une réunion privée, avec
un petit prix d'entrée. Voulant aussi servir
la cause féministe, les organisatrices avait
invité la citoyenne Lévi à bien vouloir se
charger de la con fèrenee,ct celle-ci toujours
dévouée, avait accepté avec empressement
relie Í!1\'ltaIÍon,
rCest Te marclf*20" septembre que cette
réunion eut. lieu. De suite, il l'ouverture de
la séance présidée par le citoyen llaehury,
la citoyenne Lévy prend la parole pour
développer son sujet, elle le rail avec une
éloquence et des arguments qui prouvent,
d'une excellente façon, qu'elle possède tou-
tes les connaissances nécessaires. La ci-
toyenne Lévi démontre la nécessité pour la
femme d.. prendre part aux luttes sociales
et politiques, de se mêler aux affaires pu
bliques et de réclamer pour elle les droits
politiques déjà possédés par les hommes.
Kilo démontre également la nécessité de
l'alliance de la femme et de l'homme et
engage les ci toyennesà s*intéresser aux mou-
vements de revendications tancés par leurs
camarades hommes.
C'est avec une argumentation serrée que
la citoyenne Levi démontre tout cela, et
prouve par des statistiques ot'Iicielics que
toutes les fois que la femme a été appelée
à prendre part. aux études et aux examens
des prot'esstuns dites libérales elle y a ob-
tenu le même succès que les étudiants
hommes,Te qui est une négation absolue
des ineptes allégations lie certains fruits secs
de la bourgeoisie qui prétendant garder
pour eux seuls l'accès de ces protestions
insinuent que la femme n'a pas les connais-
sances et les facultés nécessaires pour
réussir dans cette l'ranche inle!lccluelle,
Le citoyen Boisson remercie ia citoyenne
Lévi ainsI que l'union syndicale des Dames
réunies, du bienveillant concours apporté
pour soulager les misères cle5 grévistes.
Les citoyens Bessel, Durousset et lla-
chury en quelques mots reprennent les ar-
guments de la citoyenne Lévi et engagent
les citoyennes militer en faveur des idées
socialistes.
Tous formulent l'espoir que de nouvelles
réunions seront organisées et que nous re-
verrons parmi nous la citoyenne Lévi ainsi
que d'autres militantes diverses qui vou-
dront bien comme elle concourir à l'avan-
cement des idées et des événements.
La réunion qui a produit pour les grévis-
tes la somme tic 10 1'1', 15 est levée à 10 heu-
res et demie.
La secrétaire de l'Cnion Syndicale,
J. GARNIER.
Politique étrangère
Angleterre. — Egypte
Le congres ae Jbernn tI. neciare que les
régions son explorées de l'Afrique appar-
tiendraient au premier occopaai. Le capi-
taine Marchand représente la France ayant
pris possession la première de ces régions '
convoitées parla grande Bretagne; aM&-
quée dans ses privilèges. dans ce que les
clauses positives d'un traité lui assignent,
elle n'a qu'une chose à faire : se défendre.
Mais nous croyons qu'il n'y aura pas be-
soin d'en arriver lil, le Foreign ofiico ne
parlant plus de mobiliser la flotte de Ports-
inouï h diLn5 le but d'appuyer la démons-
tration militaire du générât Kitchenar à
Fashoda. Il use d'un autre mode de procédé
qui consiste à. engager momentanément la ■
discussion sur le terrain diplomatique d'où
l'on n'aorait pas dû le déplacer.
Mais les ressortissants de la querelle ao-
tuelle auraient été les suivants: c'est que
si le Sirdar renonce à rédoire par la force
des armes, le commandant Marchand occu-
pant Fashoda, il traitera cette portion de
pays comme l'on procède en cas do guerre,
c'est-à-dire qu'il l'enveloppera d'un cordon
do troupes, 1 isolant complètement des au-
tres points géographiques, réussissant
ainsi à affamer la mission française.
A cela, le quai d'Orsay a fait répondre
qu'en se renfermant strictement dans les
termes du traité de Berlin, ce ne sont pas j
seulement les terres occupées par le capi-
taine Marchand qui sont françaises, mais i
aussi les régions environnantes, la portion
de pays traversée par la mission Mar-
chand. Le Sirdar en isolant Marchand, en
s'avançant de plus en plus vers le Sud,
prend quand môme possession d'une con-
trée acquise par les armes françaises et
commet malgré tout un acte agressif dont
le retentissement peul amener un conflit
que, seuls, nous avons la conscience d'a-
voir tout fait pour éviter.
Il reste l'hypothèse que ce ne soit pis la
mission Marchand qui occupe le terrain si
violemment disputé.
On n'a reçu jusqu'à présent au sujet des
choses d'Abyssinie aucune confirmation de
Id prise da Fashoda par la colonne Hon-
champs et les troupes du Négus. Cependant
le fait ne serait pas impossible :
Ménélick ne renoncera pas, nous cst-i!
dit, à revendiquer le Nil comme la frontière
naturelle de son empire, et l'on prétend
qu'il va diriger des forces importantes en
face de Fashoda.
Autriche
I L'accord n'aura pas été long entre les
Tchèques et les AHemands. '-Aucl; ,) des
deux, partis ne veut rien abdiquer de ses
prétentions: nous n'en offrirons pour preu-
ves que les deux communiqués des comités
exécutirs des partis en présence;
« Nul ne serait plus heureux que le peu-
pIe les tchèque s'il pouvait dire que désormais
es deux p 'upics vivront en paix côte à
côte, rivalisant avec les armes de l'esprit
pour le propres, la prospérité, la culture.
Mais ce sentiment naturel, si souvent ma-
nifesté par le peuple t,ch.''qac, ri3 doit pts
être exploilÚ à son pt-.'-judice; personne ne
peut lui demander de céder quoique ce soit
de ses droits, déjà si exigus JI ni qu'il re-
nonce au combat poursa position nationale
et politique. Mais quand même le peuple
tchèque y serait disposé, la paix dans 13
pays et dans la monarchie, n'en serait pas
encore rétablie : l'agitation allemande n'en
continuerait pas moins, m'un après l'abro-
galion des décrets ministériels sur les lan-
gues. Les députés tchèques prouvcrontque
les Allcn11lllls n'ont aucun motif de se
plaindre, mais qu'ils aspirent à la supré-
ma'ie. En ne demandant que le droit et la
justice nous voulons aussi la paix, mais
une paix honnête, une paix entre l'g-'lUX.
sur la base de droits égaux," su:' la ! a se de
la parité ahsoiuc. M
A ce manifeste, les progressistes alle-
mands 0'11. répondu par une déclaration
identique que « vu toutes ces circonstances
le comité du parti du peuple en Styrie, se
prononce d'accord avec ses électeurs el
avec les députés des autres partis alle-
mands, pour la résolution de continuer la
lutte contre le gouvernement avec tous les
moyens de l'obstruction tant qu;) les rég)e-
mcnts sur los langues resteront en vi-
gUClT. »
On le voit, les événements suivent leurs
cours. L'opposition est décidée à se servir
des moyens extrêmes.
Espagne
On commente beaucoup l'incident qui
s'est produit à l'arl'ivl>Í' de l'amiral r.ervera.
Au moment où il descendit do wagon le
ministre delà marine s *-'.,',.,.!itiv;iil(,.t! comme
pour l'cmll1\l::i:.i111', en fut empêché par la
froide et correcte attitude de l'amiral se re-
fusant il recevoir toute marque d'effusion.
Deux officier-. qui at.Lc!i.!;n''nt. à la. gare
dirent avec intention en désignant le mi-
nistre : IC Cet Il,);nmq est responsable de
tout; c'est vraiment incroyable qu'il reste
au pnuvoit'. "
L amira) r.ervera n. eu uns très longue
conférence avec M. Sagasta.
Anx Philippines
La tentative d'empoisonnement faite sur
Aguinaldo est con!n'm'''e. quoique l'incident
soit fort cxa.:;-0¡'ê. On prétend que le clergé
n'a pas trempé dans ce complot. Deux sol-
dats espagnols, prisonniers d'Aguinaldo,
étaient employés comme domestiques dans
sa maison d'Agninaldo, et l'un d'eux aurait
jeté du sel d'oseUSe dans la lOUpe; seule-
ment le cuisinier ayant immédiatement vu
le coup, l'acte criminel a pu étro con-
ja!é,
L'assemblée nationale est résolue à de-
mander aux Etats-Unis de reconnaître l'in-
dépendance des Philippines et d'établir un
protectorat qui viserait les relations exté-
rieJros; eann,d'amener les Etats européens
à reoonnaître cette indépendance, et de
nommer une commission composée d'Amé-
ricains et d'habitants de l'Archipel chargés
d'étudier les moyens de reconnaître les
semée» rendus par le gouvernement fédé-
rat.
IBO.
Lire deunia a la tribune de la l'HOX -,E :
« Les Bsardine-Clubs de femmes
en Amériqme »
par CLAME DE PRATZ.
CLAIRE DE PRATZ.
Assassinat de M. Olivier
M. Paulmier, que l'on avait prévenu par
dépèche,do l'attentat commis par sa femuu,
est arrivé hier matin à cinq heures, à
Paris.
1 s'est rendu aussitôt avenue Niel, à son
domicile,ofl il est reste jusqu'à huit heures,
interrogeant ses domestiques et prenant
connaissance des journaux relatant le
drame de la rue nicher.
Puis il est allé au Dépôt de la Pré-
fecture de police où il a demandé l'autori-
sation de .communiquer avec sa femme,
autorisation qui lui a été accordée.
L'entrevue a duré jusqu'à onze heures et
demie.
A deux heures et demie, M. Louiche, juge
d'insll'ucLion,chargé de suivre cette affaire,
se faisait amener Mme Paulmier, à laquelle
il faisait subir un premier interrogatoire.
M. Paulmier avait obtenu du juge l'auto-
risation d'assister il cet interrogatoire. Il
s'était fait accompagner de M° Simon-Le-
franc qui prêtait son concours comme avo-
cat-défenseur. en l'absence de M' Danct, à
Mme Pllulmier,
Très calme, la femme du député du Cal-
vados a fait au magistrat le récit du drame,
et a manifes'.é le regret qu'elle éprouvait
d'avoir frappé un innocent et do n'avoir pu
atteindra M. Millerand.
Vers quatre heures et demie, M. Paul-
micr, accompagne de la femme de chambre
do sa femme, quittait le cabinet du jll,;e,
et Mme Paulmier était conduite à la prison
de Saint-Lazare, dans un fiacre de la Com-
pagnie Générale, sous la garde de deux ins-
(lecteurs,
A l'hôpital Bichat
Mme Olivier a. passé toute la journée
d'hier à l'hôpital Bichat auprès de son mari
qu'elle n'a quitté qu'à six heures dj soir.
La journée a été relativement, bonne et si
aucune complication ne survient on espère
le sauver.
A minuit, nous avons fait prendre de ses
nouvelles, on nous a répondu qu'aucune
aggravation ne s'était produite et que le
malade venait de s'assoupir.
M. Olivier est né en ttç¡Ô;, à Lyon. Il s'était
engagé en 1870 ot avait été, ayant il l'époque
quatorze ;ms, le plus jeune volontaire de
t'r.utf'c. Il était, depuis dix-sept ans,dans le
journalisme et depuis sept ans, directeur
du supplément de la Lanterne. Il y a quel-
ques mois, M. Millerand se l'était adjoint
comme secrétaire de la rédaction.
Une lettre
MM. de Dion et Jean Beraud avaient
adressé avant-hier la lettre suivante il
M. Millerand :
Monsieur le rédacteur en chef,
Dans le numéro de ce matin, nous lisons un
article intitulé" Coups de griffe ».
En l'absence de M. Paulmier notre devoir de
témoins dans l'affaire à laquelle vous faites al-
lusion. nous oblige à rétablir les faits.
M. Paulmier. député, ayant rencontré M. Ber-
trand do Valon dans un endroit public, lui a
intimé l'ordre rio sortir sous menaces de voies
de fait. M. Bertrand de Valon est sorti. M. Paul-
mier nous a immédiatement constitués comme
témoins, mais nous avons vainement attendu
feux de M. de Valllll qui s'est contenté de pro.
pager des insinuations odieuses qu'il s'est bien
J.;:lf,Je de prouver.
Dans ces conditions, nous déclarons quo ce
n'est i>as M. Paulmier qui est disqualifié, comme
vous le prétendez, mais bien son adversaire.
K' L'INÙ'ONLÎAN - MIL
IMJTIÔ IVLRLTTILLIIU» NUOUIIUU
rétablit exactement les faits.
JEAN BÉRAUD.
DE DION.
Le Crime de la rue des Epinettes
Mme Maire, née Joséphine Dieudnnné,
âgée de 57 ans, demeurait depuis treize
ans, 21, rue des Epincttes, oÍl elle occupait
une petite chambre très proprement meu-
blée, d'un loyer annuel de 200 francs, reti-
rée an premier étage sur la cour.
Il y a dix ans, elle perdait son mari et
après quatre années de veuvage eile se
liait intimement avec un nommé Louis-
Joseph Métayer, Agé de trente ans, origi-
naire de Poiti'ers. travaillant il ses moments.
perdus, c'est-à-dire très rarement, comme
garçon de salle.
Il ne tardait pas du reste à vivre complè-
tement à la charge de Mme Maire, chez
laquelle il s'installa et qu'il maltraitait et
même battait quand elle lui refusait de
l'argent.
Il y a un mois environ, Mme Maire le fai-
sait arrêter pour un vol de divers objets et
d'une somme de 40 francs qu'il avait com-
mis à son préjudice.
Prise de pitié, elle retirait sa plainte le
lendemain et ramenait chez elle Métayer
qui avait passé une nuit au poste.
Cet acte de clémence lui fut fatale.
Lundi dernier, Métayer allait la chercher
dans la soirée à la cantine d'un dépôt de
voiture de la rue de la Jonquière, ou elle
travaille comme cuisinière et ils rentraient
ensemble rue des lipinettes.
On ne voyait sortir le lendemain que Me-
tayer.
On crut que Mme Maire, ce qui lui arri-
vait quelque foi s,était allée passer quelques
jours chez des parents habitant les envi-
rons de Paris, et on ne s'en inquiéta pas
davantage.
Hier vers deux heures, un voisin incom-
modé par une odeur nauséabonde qui s'é-
chappait de la chambre de Mme Maire, s'in-
quiéta. et prévint le concierge qui se rendit
chez M. Gilles commissaire de police.
Ce magistrat fit aussitôt ouvrir la porte
de la chambre de Mme Maire et il trouva
celte malheureuse étendue tout habillée
au milieu do la pièce, les bras en croix, le
cou étroitement serré par un mouchoir, la
bouche remplie de tampons d'étoire; son
corsage était cnLr'ouverl et une plaie
énorme, béante, faite par un couteau de
cuisine, se voyait au milieu de sa poitrine,
tout inondée de sang caillé.
M. Gilles fit aussitôt prévenir le procu-
reur de la République qui chargea M. lluh-
tand, juge d'instruction, de suivre cette af-
faire.
Ce m:¡gislrat,aceompagné de M,Cocheferl,
se rendit sur le théâtre du crime et procéda
aux constatations légales. Les économies
de Mme Maire qui devaient se trouver dans
une petite pochette disstmulée dans son
corset avaient disparu.
Les soupçons se portèrent aussitôt sur
Métayer.
M. Cochcfert s'occupait d'avoir son signa-
lement, quand le fils d'un locataire de la
maison lui raconta qu'il avait vu Métayer
enlever, la semaine dernière, ses vêtements
qui se trouvaient chez Mme Maire et les
porter dans un débit de vins de la rue Le-
mercier,
Deux agents accompagnèrent aussitôt le
gamin à ce débit de vins.
Ils trouvèrent lil, parmi les clients de
l'établissement, u%eiilliette connue sous le
nom de « III Môme Carotte )1 qui était au
mieux avec Métayer et un nommé C..., qui
avait rendez-vous avec lui à six heures de-
vant le 78 flll boulevard de Clichy,
Les azcn:s firent monter dans leur voi-
ture " la M.)meC:irotte >• et C... et partirent
au rendez-vous, où ils trouvèrent Métayer
assis sur un banc du boulevard et atten-
dant.
Le misérable se laissa arrêter sans op-
poser de résistance.
Sur lui on trouva un livret de caisse
d'épargne de 1,332 francs, au nom de Mme
Maire et tous les bijoux de celte malheu-
reuse.
Conduit à la maison du crime il fit à M.
Hulhand et à M. Cochefert des aveux com-
plets et il raconta qu'il avait vendu à un
changeur de l'avenue de Clicny deux obli-
gations de la Ville de Paris qu'il avait dé-
robé il sa m--I'cssC,
M. Lertil'on que l'on avait fait mander prit
un certain nombre u.. photographies du
cadavre et de la chamln'c,et aussitôt cette
opération faite le corps de Mm^ Maire fut
placé dans un fourgon et conduit à la Mor-
gue aux tins d'autopsie.
Métayer conduit il la Sûreté a été inter-
rogé a dix heures du soir par M. Hui itand,
dans le bureau de M. Cochefert, puis à mi-
nuit et demi, il a été écroué à la prison de la
Santé.
LE
MEETING DE LA SALLE CHAYNES
Le meeting organisé par le comité d'ac-
tion révolutionnaire communiste, avait at-
tire hier soir il la salle Chavnes 12, rue
d'Allemagne, plus de 2,000 personnes. M. do
i,re.ssuiisé présidait, ayant à ses côtés les
citoyens Cyvoct, Joindy, Charnay, Boicer-
\'oi:-;e, etc, etc.
M. de l'resscnsé a dénoncé la faiblesse
du gouvernement en termes énergiques. Il
a prédit un coup d'Etal militaire. Et les
protestations unanimes de l'assistance ont
démontré que ce coup d'Etat ne sera pas per-
pétré sans que le peuple s'insurge contre
les généraux factieux.
Une longue ovation a salué le discours de
M. de Pressensé. Les citoyens Uoiccrvoisc,
Charnay lui ont succédé à la tribune.
Le citoyen Cyvoct invite les assistants à
se retrouver aujourd'hui à la réunion orga-
nisée par 1('9 -natIOnalistes afin d'y affirmer
leur amour du droit et di la justice.
Puis l'ordre du jour suivant est adopté à
l'unanimité.
Les citoyens réunis à la salle Ctnynes;
Déclament d'abord la mise en liberté du cr!o-
nel Pic-quart. victime de machinations infâmes de
l'l-]tat-ina jor peu] lé de faussaires.
Protestent contre la prévention inventée p;lr
ces !niscr.th!cs. qui après avoir pendant deux
ans el demi dénaturé le « petit bleu Il osent incul-
per le colonel Picuuart. le niodt'fc d'honneur.
Envoient, à M. Félix Faure, s'il continue il se
faire l'instigateur des faux et le complice des
faussaires, l'expression de leur mépris. Le peu-
ple de Paris se déclare prêt à résister au coup
d'Etat que préparent les prétendants d'accord
avec les cléricaux, les réactionnaires. les mili-
taristes; ils se déclarent résolus à défendre la
République qui flétrit les généraux factieux,
leurs amis les faussaires et le traître Esterhazy,
Mettent au dé1l les nationalistes d'organiser
une réunion publique et contradictoire.
Déclarent continuer la lutte avec plus d'ar-
deur que jamais en faveur de la justice et de la
vente.
La. réunion est levée aux cris de : Vive
Picquart! Vive la Justice!
Quelques nationalistes, professionnels
de l'émeute, fondent à la sorLic sur les as-
sistants.
Un malheureux est piétiné et grièvement
blessé.
Les manifestants du droit se dirigent en
I une forte colonne vers !a rue de Flandre,
escortés par les agents. Pas de nouvel inci-
dent.
LA GRÈVE DES TERRASSIERS
Il est à craindre qu'après la réponse faito
avant-hier par les entrepreneurs. La gr-ïvo ne
rentre dans une phase aiguë, et il y a vraiment
quelque imj r.idence de la part des patrons à
exciter ainsi des ouvriers qui se sont montres
jusqu'ici tout à fait calmes.
Le but des entrepreneurs est bien simple. lia
veulent profiter de la grève pour faire réviser
des marchés qu'ils ne trouvent pas assïz avan-
tageux, et c'est sur le dos des ouvriers que cela
va encore se passer, comme toujours, du reste.
Inutile de réclamer, en faveur de ces malheu-
reux. un sentiment d'humanité; et malgré la lé-
gilimité de leurs revendications et la pondéra-
tion avec laquelle ils les ont faites, il est à
craindre et à prévoir qu'ils ne jouent encore jeu
de dupes. Néanmoins, si.comme nous le faisions
prévoir hier. la grève devenait générale, il serait
[ bien difficile d'en prévoir l'issue.
J. B.
LES JOURNAUX
DE CE MATIN
De la Petite République :
D'où qu'elle vienne, la vérité doit être aeel'eil-
lie par les esprits libres. M:iis pour l'honneur de
la France, pour la dignité de notre pays dans la
monde, nous tenions passionnément à faire la
lumière avec les seu)s éléments de vérité que la
France elle-même nous fournissait. De m,'me il
nous paraît nécessaire que ce soit la justice
française, et elle seule, qui fasse la pleine
clarté. l'lais si on ne veut pas que la vérité
nous vienne '!u dehors, si on ne veut pas que
les révélations de l'étranger devancent chez
nous la marche trop lente ne la vérité légale, il
n'y a plus une minute il perdre.
Déjà, comme il était inévitable, l'odieuse pour-
suite dirigée contre le colonel Picquart à propos
du « petit bleu - a mis en mouvement les jour-
naux étrangers. La légation militaire allemande
a écrit à Esterhnzy le « petit bleu » comme elle
lui a écrit bien d'autres lettres. Elle sait qu'Es-
terhazy était son espion ordinaire, et vraiment
il lui devient riiflkil9 de iaisser condamner le
colonel Picquart sous prétexte qu'il a écrit le
« petit bleu ».
Aussi, dès hier matin, les grands journaux
officieux allemands publiaient des notes déci-
sives oiï ils affirment que le « petit bleu » a été
écrit par raFienl de t'attache aHemand.
Evidemment, l'Allemagne ne veut pas avoir
devant le monde la responsabilité du nou veau
cri'!'!c préparé par l'Etat-MajO"# Et nos nationa-
listes, par leur aveuglement l't leur mauvaise
foi, nous acculent à cette humiliation de recevoir
la vérité du dfhors. -e
Demain, s'ils résistent encore, l'Allcmagne
publiera tout simplement le fac-similé des let-
tres et des documents qui lui étaient adressés
par le traître I:sterh.,izy.
Et au lieu de {a revision glorieuse que noua
pouvons et devons faire nous mêmes, nous au-
rons. si je puis diro une revision à la suite, dé-
\,'rminÓe parles publications de l'étranger. Quels
^ »
Jean Jaurès.
Du Radical :
Je suppose que M. Francis de Pressensé n'a
pas été fort ému par le billet doux que vient de
fui adresser M. le grand-chancelier de la Légion
d'honneur. Il n'y a. par le temps qui court, rien
de désobligeant à être mandé à comparoir de-
vant le conseil de l'ordre qui a suspendu M.
Emile Zola.
M. de Presscnsé est accusé de divers crimes,
notamment d'avoir livré à la publicité la lettre
par laquelle il envoyait sa démission de cheva-
lier de la Légion d'honneur à M. le grand-rhan-
celier et d'avoir présidé des réunions publiques
olt l'on n'a pas dit de bien du colonel Henry et
de ses camarades.
M. le ¡.rrand-rhanrelil'r induit de là, première-
ment que M. Francis de Pressensé a manqué au
respect dû à l'ordre dont le commandant Ester-
liazy est toujours le plus bel ornement, deuxiè-
mement. que ledit Pressente pourrait bien
avoir forfait à l'honneur. C'est pour exa-
miner ce second point qu'une commission d'en-
quête est nommée par M. le grand-chancelier et
entendre les explications verb iL-s ou écrites de
notre confrère, si toutefois celui-ci consent à lui
en ft)ui-nir.
Car le cas de M. de Pressensé est plutôt amu-
sant: il est chevalier de la Légion d'honneur
malgré lui, puisqu'il a envoyé une démission
qui n'a pas été acceptée. Et voici qu'on pour-
suit ce chevalier récalcitrant pour n'avoir pas
suffisamment respecte l'institution dont il a
voulu se séparer avec ec!at.
Je suppose que M. de Pressensé reconnaîtra
150n premier crime de honno j:r\ce et qu'il ré-
pondra : tl Mais parfaitement, puisque .l'! vous
ai renvoyé mon ruban, c'est que je ne iii,! trou-
vais plus digne d-' porter l'insitrne qui r uigit la
boutonnière de M. Esterhazy. Vous pensez (]lll.
cela constitue un manque de respect à I.l Lé-
gion d'honneur et au conseil de l'ordre, je veux.
bien. »
Ranc.
(3)
LA TRIBUNE
25 SEPTEMBRE 1808
A TRAVERS L'ÉDUCATION
L'enseignement secondaire des
jeunes filles.
III
coud rubrique forme un feuilleton vot&ni 1
4mf le sujet change tout les trois jours. \
Quels ont été les résultats du vote de
la loi 4je 1880 sur l'enseignement secon-
daire des jeunes filles?
Los partisans de la culture de l'esprit
féminin ont-ils piteusement échoué?
Ont-ils, au contraire, eu lieu de se ré-
jouir de leur courageuse initiative et leur
bnccL's a-t-il produit quelque cataclysme?
ils ont réussi,parce que rien n'a raison
contre la raison; parce que la justice,
(IUoiqu'clle soit boiteuse, marche et at-
teint son but.La preuve qu'ils ont réussi,
c'est que la statistique de décembre 1807
accuse 38 lycées et 25 collèges de jeunes
filles.
Les lycées sont ainsi répartis :
Paris : cinq lycées : Fénelon, Lamar-
tine, Molière, Victor Hugo, Racine.
Province : Agen, Amiens, Auxerre, Be-
sançon, Béziers, Bordeaux, Bourg, Brest,
Chambéry, Cliarlevillc, Dijon, Grenoble,
Guéret, Le Havre, Lona-le-Saulnier,
Lyon, Marseille, Mon tau ban, Montpel-
lier, Moulins, Mâcon, Nantos, Nice,
Niort, Le Puy, Heims, Rouen, Itoanne,
Baint-Elienne, Saint-Quentin, Toulouse,
Tournon,Tours, Versailles.
A la môme date, il y avait 2tJ collèges
de jeunes filles, ainsi répartis :
Abbeville, Alais, Albi. Armentiùrcs,
Avignon, Beauvais, Béziers, Cambrai,
Cahors, Castres, Carpentras, Constan-
tine, Châlons-sur-Saône, Chartres, Eper-
N«U.| A.IT«tra^ LU 1A .WMYfoE118 ^RAIL~.
Saumur, Sedan, Tarbes, Valenciennes,
Vitry-lc-François.
En tout U3 "établissements d'enseigne-
ment secondaire pour les jeune filles,
sans compter les nombreux cours secon-
daires en voie de li an--formation, c'est-
à-dire sur le point d'être transformés
en collèges ou en lyc6c3.
L'enseignement clans les lycées et col-
lèges comprend :
1° L'enseignement moral ;
2° La langue française et au moins une
tangue vivante ;
3° Les littératures anciennes et mo-
dernes;
4" La géographie;
7jo L'histoire nationale et un aperçu de
l'histoire générale;
0" Les sciences mathématiques, physi-
ques et naturelles;
7° L'hygiène;
8" L'économie domestique et les tra-
vaux à l'aiguille;
0" Des notions de droit usuel ;
10P Le dessin, le modelage;
j 11° La musique ;
i 12' La gymnastique.
Nul n'ignore qu'un programme vaut
surtout par les professeurs chargés de
l'appliquer. Par conséquent, il est rare
que la critique en soit probante. Je ne
puis cependant m'cmpcchcr de constater, :
avec regret, une lacune qui, peu impor-
tante, au premier abord, en ce qui con-
cerne l'enseignement du français dans
les lycées et les collèges, s'aggrave sin-
! gulièrcment, lorsqu'il s'agit de l'Ecole
Normale supérieure de Fontcnay, dont
le niveau est équivalent, sinon identi-
que : je veux parler du grec et du
latin, '
En somme, le programme de l'ensei-
gnement des jeunes filles correspond à
celui de l'enseignement secondaire mo- i
derne. Ce dernier vaut ce qu'il vaut, et j
ce n'est pas le moment de le discuter : I
partisans et adversaires ont, d'ailleurs 1
! dépensé assez d'encre, sans que les uns
! sOient parvenus à convaincre les autres,
i et ils en dépenseront enoore, mais ils j
sont du moins tombés d'accord sur la
nécessité des élude.v classiques pour les
futurs professeurs de lycées et des col-
lèges de garçons.
Pourquoi celle nécessité n'est-elle pas
reconnue pour les professeurs de lettres
des lycées et des collèges de jeunes filles?
Il est incontesté cependant que l'étude
du grec et du latin éclaire singulière-
ment celle de la langue française, et que
celui-là seul sait vraiemcnt le français qui
possède les deux tangues mortes. Les
supprimer pour la future maîtresse d *un
lycée de jeunes filles, c'est donc préparer
^infériorité de son enseignement.
Aurait-on, par hasard, constaté l'inca-
pacité des femmes à apprendre les lan-
gues mortes? Allons donc ! j'ai pour ma
part, dans mon entourage immédiat dix
exemples vivants du contraire!
M. C. Sée. qui, d'ailleurs, n'était pas
très ambitieux pour les femmes, et qui
n'était pas féministe, au sens que nous
donnons à ce mot, a dit dans son rap-
port : Je ne dis pas que les aptitudes de
t homme et de la femme sont identiques ;
les aptitudes difl*èretit comme les desti-
nées ; mais ce que je soutiens, cest que
pour cette culture intellectuelle qu'on ap-
pelle plus spécialement les humanités et
qui fait le fond principal de l'enseigne-
ment secondaire, je soutiens que les apti-
tudes de la femme sont égales aux nôtres,
qu'elles sont même plus précoces, On l'a,
en Suisse, admirablement compris. CeUe
instruction, dans la plupart des Cantons
est, non-seulement donnée aux jeunes
filles, mais — et c'est là ce qui choque
tant notre honorable collègue, M. Keller
— leur est donnée en commun avec les
jeunes gens.
Pourquoi, je le demande de nouveau,
les bannir de nos programmes? 1
Cette lacune est d'autant plus regretta-
ble qu'elle aggrave pour les jeunes filles, '
les difficultés des études de grammaire
comparée qui tiennent une place relati-
vement considérable dans remploi du4
temps des écoles supér ieures de Sèvres ;
et de Fontcnay. Pour avoir voulu simpli-
fier, on a tout'simplemcnt compliqué.
La question des humanités mise il part,
et nos réserves faites à ce sujet, nous
n'aurions guère qu'à louer dans les pro-
grammes. 'Leur application,au contraire,
ne nous paraît pas absolument en har-
monie avec les vues des promoteurs de
la loi.
Le but initial était, sans contredit.pour
la masse des jeunes filles de la classe
aisée, la culture désintéressée de l'es-
prit; et, pour l'élite, la préparation sé-
rieuse et profonde au professorat. Pour
les premiorcs,pas d'examens, le bacca-
lauréat stérilisant, supprimé et remplacé
par des examens de passage, aboutissant
a un « certificat d'études secondaires »;
pour les autres, la licence et l agréga-
tion.
Mais les lvcées et collèges créés, cons-
truits, ouverts, il a fallu les peupler. La
haute bourgeoisie, la magistrature et
l'armée inféodées aux idées d 'antan, la
première par snobisme, les deux autres
par esprit de domination, se sont abste-
nues d'y faire instruire leurs filles (il y a
des exceptions, c'est incontestable, mais
il faut connaître la province pour me-
surer ce qu'elles dénotent de courage de
! la part des parents qui bravent l'opinion
et se mettent au-dessus du « cant »).
C'est donc il. la petite bourgeoisie que
l'on a dû faire appel. Dès lors, un grand
nombre de jeunes filles, qui devraient
fréquenter des écoles primaires supé-
rieures ou des écoles professionnelles,
parce qu'elles seront dans la nécessité
d'utiLiscr immédiatement leur instruc-
tion, vont au lycée et, malgré les direc-
, teurs, malgré les professeurs, malgré
l'esprit de 10. loi s'y préparent aux di-
plômes de l'enseignement primaire. La
1 proportion des élèves d enseignement
secondaire qui se présentent aux exa-
mens du professorat des écoles normales,
augmen te chaq ue année. L'enseignement
primaire y gagne-t-il? L'enseignement
secondaire v perd certainement.
; Et puis. il a fallu foire un autre sacri-
fier : les uns, Paul Bert en tête, ont fait
utjlitairemcnt et...gaillardement le sacri-
fice; les autres, avec Jules Ferry l'ont
accepté la mort dans l'âme, comme un
mal nécessaire, et ont fait le possible
pour que le principe de l'externat fût
sauvegardé ; d'autres, enfin, comme M.
Michel Bréal, se sont montrés irréducti-
bles...
Mais nous étions — nous sommes en-
core hélas! — en pleine lutte, en pleine
bataille. Ou bien il fallait exclure de nos
lycées toutes les jeunes filles habitant
exira-muros, ce qui aurait été se priver
d'un contingent notable; ou bien il fal-
lait encourager, autour des lycées la
création de petits groupes d'internes,
dirigées sous le contrôle de l'adminis-
tration universitaire, par des personnes
de caractère inconteste — ce que l 'on n 'a
pas osé faire — ou bien encore essayer
du svstème tutorial... Mais il est, dit-on,
incompatible avec les mœurs françaises
et à force de le dire, on a fini par le
croire.
Bref l'internat sévit — en province —
sur les lycées de jeunes filles, comme sur
les lycées de garçons; le mouvement en
sa faveur s'accentue, et notre seule con-
solation — elle a d'ailleurs son prix —
est de savoir qu'au moins ces enfants ne
sont pas au couvent, dirigées vers la vie
par des personnes qui l'ignorent ou l'ont
désertée.
Ces élèves internes sont vraiment
nombreuses et l'on peut affirmer que
malgré les préjugés irréductibles de la
coterie cléricale, la loi de M. Camille Sée
a porté ses fruits. L'enseignement secon-
daire des jeunes filles, né viable, prend
des racines en France. Les lycées et les
collèges réussissent. La preuve c'est leur
nombre toujours grossissant.
Le grand nombre d'élèves a imprimé,
dès le début, un mouvement correspon-
dant parmi les futurs professeurs : (à
elles seules les maîtresses de Lettres et
de Sciences dûment diplômées arrivent
au chiffre respectable de 400 environ).
Tout ce personnel est jeune, peu disposé
à abandonner une profession intéres-
sante, relativement bien rétribuée, très
honorable et très honorée, et l'adminis-
tration se voit obligée d'enrayer la pous-
sée vers les examens qui deviennent,
par cela même, chaque année plus diffi-
ciles.
Pour que nulle n'en ignorât le Minis-
tère a fait distribuer cette année dans
tous les établissements d'enseignement;
secondaire de jeunes filles un tableau
comprenant :
1° Le nombre d'agrégées des Lettres et
des Sciences n'étant pourvues d'aucun
poste;
2° Le nombre d'agrégées des Lettres
et des Sciences occupant un poste au-
dessous de celui auquel leur grade leui
donnerait droit;
3° Le nombre des admissibles à l'agré-
gation;
4° Le nombre des candidates pourvues
du certificat d'aptitude se trouvant daus
les mêmes cas ;
Enfin on n'a fait à la dernière session
que cinq agrégées (ordre des lettres, sec-
tion littéraire), trois agrégées (ordre des
lettres, section historique) ; deux agré-
gées (ordre des sciences : section des
sciences mathématiques), deux agrégées
(ordre des sciences, section des sciences
physiques) etentin seize jeunes filles ont
été pourvues du certificat d'aptitude
(Lettres), et cinq du certificat d'aptitude,
ordre des sciences.
Cette statistique est de nature à faire
réfléchir les jeunes filles et leurs pa-
rents.
Un dernier mot : « Les études altèrent,
dit-on, la santé des jeunes filles. »
Le surmenage, oui ; il est, de même,
fatal aux jeunes gens; le travail mesuré,
pondéré, alternant avec les exercices
physiques, le repos et les plaisirs do la
jeunesse, est excellent, si j'en juge par
le nombre très probant de jeunes filles
qui font partie de mes relations.
PAULINE KERGOMARD.
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