Titre : Le Constitutionnel : journal du commerce, politique et littéraire
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1852-11-26
Contributeur : Véron, Louis (1798-1867). Rédacteur
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32747578p
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 26 novembre 1852 26 novembre 1852
Description : 1852/11/26 (Numéro 331). 1852/11/26 (Numéro 331).
Description : Collection numérique : Grande collecte... Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail
Description : Collection numérique : La Grande Collecte Collection numérique : La Grande Collecte
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6698434
Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 06/02/2011
NUMÉRO 551.
BOtËlUl : me de Valois, (Palais-Royal),fn* i© 4
B l'CT ^ VENDREDI 26 NOVEMBRE.
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S'adresser, franco, pour la rédaction, à M. CucHEVU-CLAfi^i
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JOURNAL POLITIQUE, LITTEMIRE, UNIVERSEL.
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chef, j On. s' abonne, dans les département, aux Messageries et aux Directions de poste,—A Londres, chez MJV C owie et fils, j Les annonces sont reçues chez M. PANIS, régisseur, 10, place de la Bour:
— A Strasbourg, chez M. A lexandre , pour l'Allemagne,
et au bureau du journaL
PARIS, 25 NOVEMBRE.
MESSAGE..
Du Prince- Président au Corps-Législatif.
Voici le texte du Message dont M. Fould,
ministre d'Etat, a donné lecture au Corps-
Législatif, à l'ouverture de la séance- de ce
jour :
- Messieurs les députés,
'Je vous ai rappelés de vos départemens.
pour vous associer au grand acte qui va
s'accomplir. Quoique le Sénat, et le peuple
aient seuls le droit de modifier la Consti
tution, j'ai voulu qué le. corps politique,
issu comme moi du suffrage universel, vînt
attester au monde la spontanéité du mou'
vement national qui me porte à l'Empire
Je" tieus à ce que xe soit vous qui, en cons
tatant la liberté du vote et le nombre des
suffrages, fassiez sortir de.votre déclara
tion toute la légitimité de "mon pouvoir .
Aujourd'hui, en effet, déclarer que l'au
torité repose sur un droit incontestable,
c'est lui donner la force nécessaire pour fon
der quelque chose de durable et assurer la
prospérité du pays.
Le gouvernement, vous le savez, ne fera
que changer de forme. Dévoué aux grands
intérêts que l'intelligence enfante, il sa coa-,
tiendra, comme par le passé, dans les limites
delamodération, car le succès n'enfle, jamais
d'orgueil l'âme de ceux qui ne voient dans
leur élévation, nouvelle qu'un -devoir plu»
grand imposé par le peuple, qu'une mission
plus élevée confiée pur la Providence.
Fait au palais de Saint-Cloud, le 25 no
vembre 1832. . ' m
-Signé ; Louis-Napoléon.
Le vote est terminé. Les résultats du scru
tin- ont dépassé toutes les prévisions. Non-
seùlement une immense majorité s'est pro
noncée partout pour. le rétablissement de
l'Empire ; mais le chiffre des adhésions égale
ra; s'il ne lui est même supérieur, le nombre
des votes aflirmatifs de 1851. Le nombre des
opposans, qui a diminué de moitié à Paris, a
décru dans une proportion bien plus forte en
province. Dans le Var, dans l'Hérault, dans la
Dordogne, dans la Haute-Vienhe, les victi
mes, aujourd'hui désabusées,du socialisme,
sont venues voter à bulletin ouvert. Les élé-
mens eux-mêmes ont été vaincus par l'ar
deur des populations, jalouses de donner un
décisif témoignage de gratitude et de con
fiance à l'élu de la nation.
Le Corps Législatif s'est réuni aujourd'hui
pour contrôler les résultats du vote et leur
imprimer le cachet d'une inattaquable au
thenticité. Le gra"hd changement que de
mandait la France est donc aujourd'hui un
fait accompli. Avant que soit revenu l'anni-
vérsaire du & décembre, la République aura
disparu, l'hérédité aura repris sa place à
la base de nos institutions, et, parla volonté
du peuple, un Empereur aura succédé à un
Président dans la conduite de nos destinées.
Ainsi l'année qui, dans quelques jours, va
finir, aura vu passer la France par les
deux extrêmes de l'anarchie et de l'ordre,
de la crainte et de la confiance , de la
misère et de la prospérité. Elle s'ouvre par
l'initiative hardie d'un prince énergique qui.
se lève au milieu" d'un pays consterné, at
taque de front \es ennemis de la civilisa
tion, "et brise leur puûjSafhce factice; Ell0.se
termine, au sein d'un -.calme protond„-pat
LjeHthousiâsme d'u^ey^reconnaissait et?
satisfait j qui récompense par tfoe couron
ne des services dont chaque, jour lui fait
mieux apprécier le prix. . . .
. Gette année marquera» dans l'histoire*
Tous les grands événemens de notre pays
ont leur place fixée d'avance dans les an
uales du monde. Ce n'est pas d'ailleurs
à la France seule qu'a profité la révolu
tion dont nous avons été témoins; l'Eu
rope,. qui a salué comme une délivrance le
coup d'Etat du2 décembre, salue aujour
d'hui, le rétablissement de l'Empire com
me le gage d'une ère de paix et d'universelle
tranquillité. Mais cette année comptera aussi
parmi les plus heureuses -et les plus pros
pères de notre pays. Nous en appelons avec
confiance à tous ces ouvriers qui ont retrou
vé du travail, à tous ces laboureurs rassurés
sur leur patrimoine, à tous ces chefs d'in
•dustrie, à tous ces commerçans dont le cré
dit s'est relevé, et dont les affaires ont repris
une activité nouvelle.
.C'est cette prospérité générale.et éclatante
qui est la cause et l'explication du grand
mouvement d'opinion que nous voyons écla
ter avec une irrésistible puissance. C'est cette
prospérité qui - est aussi, nous en somme sûrs,
la plus dpuce et plus complète récompense
pour Louis-Napoléon. Avoir donné à.un pays
comme la France uue année de calme, de tra
vail et de bonheur, et en être payé par l'a
mour d'un peuple : peut-il être une plus eni
vrante satisfaction pour un grand cœur !
CUCIIEVAL-CLARIGNY. '
Njpûs croyons savoir que les opérations'de
recensement des.votes auxquellesle Corps Lé
gislatif à commencé à se livrer aujourd'hui,
doivent, comme n.ous l'avions prévu hier,
être positivement, closes dans la journée
de mercredi, l or -décembre. Le soir de ce
jour, 1" décembre, le Corps Législatif tout
entier se transporterait à Saint-Cloud pour
porter au prince-Président le résultat du
recensement des votes.
Le lendemain, 2 décembre, le prince' se
rendrait aux Tuileries, o.ù il sèrait reçu par
les trois grands corps de l'Etat.
Recensement des voies de la Seine.
Les mêmes dispositions qu'aux réunions
habituelles, pour le dépouillement général
des votes, avaient été prises dans la salle
Saint-Jean. Dès huit heures et demie, .une
foule nombreuse occupait la place réservée
au public dans cette salle. Au.dehors, une
grândequantité de personnes attendaient4e
résultat du dépouillement.
Un peu avant neuf heures, MM. les mem
bres du conseil général'désignés pour assis
ter au recensement des votes, sont arrivés
au bureau. Cette commission était composée
"de MM. Périer, pr-ésident; Riant et Possoz,
secrétaires, tous trois en costumé. Bientôt
après, M. le préfet dQ la Seine, les sous-pré
fets des arrondisâemens de Sceaux et de
Saint-Denis, sont venus prendre place der-*
rière le bureau. '
La séance a été ouverte à neuf heures vingt
minutes. Le président a d'abord donné lec
ture des décrets sur les collèges électoraux
et de l'arrêté qui ordonnait la réunion de ce
jour; puis M»:le.secrétaire a fait l'appel de
MM. les mair8S;-des. arrondissemens de Paris
et des comiritméè'_rurales du département.
Presque tous cés'ïiiaftiés étaieut en costume.
Après cet app,el;'j.fe>recensement a com
mencé par le 1 er ^îJSïdissement de Paris, et
ainsi de suite pour J^douze arrondissemens;
puis toutes les come&bes rurales, par ordre
alphabétique, dans chacun des deux arron
dissemens de Sceaux et Saint-Denis, ont fait
connaître leurs résultats* Parmi ces commu--
nés, on remarque celles de .Bonneuil, Cbe-
vilty Yilletaneuse, Orly, où le nombre des
adhésions" a égalé celui* des votans.
, La récapitulation dés nombres adonné les
tbt,au3f suivans:
~ *" inscrits. vWns.
^ w"•"r* reserves.
Paris.... 221,793 188,730 137.425 44,434 6,£21
Sceaux et ' , /r:*/
St-Denis. 93,617 81,971 71,233 9,269 , fiitSS"'
Total gên. 31SU10 270,701 208,658 53,753 .*$,290
A ce moment la commission a susj^oidu-la
séance pour rédiger le procès-verbal>»etM. le
préfet s'est approché du'bureau et a pro
noncé leslj^les suivantes :
« Messieurs les maires,
» J'ai à vous adresser tous mes remercimens
» pour le zèle et le dévoûment que vous avpz
» montrés pendant tout lé cours de ces. opéra-
» tions électorales, que le nombre très çonsidéra-
» ble des électeurs du département rend déliça-
» tes et difficiles; vous avez révisé les listes par
» un recensement rapide, avec,une scrupuleuse
» sincérité; vous avez distribué les cartes aux
» domiciles des électeurs "en temps utile et en
» leur évitant touf déplacement. Enfin, tous avez
m surveillé la tenue des assemblées électorales, en
» présidant vous-mêmes là première section, de
» telle sorte que toutes les opérations du scrutin
» se sont accomplies sous les yeux du public,
» conformément à la loi, avec calme, liberté et
»- exactitude.-
» Le chef de l'Etat m'a chargé lui-même de
» vous en témoigner ses remercimens. " .
» Maintenant que les sentimens et la volonté '
» des électeurs du département de la Seine se .
» manifestent avec tant d'éclat et par des chiffres
» .si éloquens, p®rmettez-nrord»'!i» 1 1éstiuiei d'utr-
» seul mot : - • ' '
» Vive l'Empereur ! » • •
Ce cri est répété, à plusieurs reprises, par
•les maires et par le nombreux jpublic qui
assiste à cette séance, et les memes accla
mations se font presque aussitôt entendre
sur la place de l'Hôtel-de-Ville. ' '
• Peu d'instans après, la commission est-
rentrée, et M. Périer, président, après avoir
proclamé le résultat général du scrutin don
né ci-dessus, a terminé en s'associant, au
nom de la commission, aux paroles de
M. le préfet et en répétant de nouveau 1» cri
de : Vive l'Empereur ! qui a été salué des mê
mes acclamations par tous les assistans. •
Les procès-verbaux d'élections ont été
aussitôt réunis pour être -immédiatement
adressés au Corpâ-Législatif.
VOTE DES 21 ET 22 NOV EMBRE
Inscrits
Votans
Oui
Non
Ain
»
»
81.43i
1.241
Aisne
»
»
91.092
6.434
Aliier
»
. »
18.071
-107
Alpes (Basses-)..
. »
»
34 827
' 370
Alpes (Hautes-) .
, ».
»
26.350
»
Ardèthe
* »-
»
27.06?
20?
Ardennes
»
»
73.540
2.686 I
Ariège
■ »
»
65.5*2
392 -i"
Au! e
82.831
72.946
69.9414
2.335
Aude
»
»
73.016
576
Aveyron,.
»
»
»
» .
Bnuc.-d.u-IUiône»_..
».
51.806
2.457
Calvados
132.578
103.831
99.617
3.6*0
Cantal.. i
62.758
45.187
44.739
323
Charente.. ;
115.555
86 838
84.956
1 211
Charente-Inf.
»
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Cher.. i.
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67.866
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75.400
79.310
103.851
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94.032
73.830
216.446
101.161
96.062
157.212
126.041
91.378
59.446
37.005.
95.441
114.549
92.740
118.261
- 8-t. 6.36
108.449
208.658
80.292
113.762
163.745
63.803
138.150
83.938
54.924
71.367
56.289
59.423
63.785
58,417
96 .,564
89.772
2.709
1.035
3.907
1.833
2.949
2.251
3-à3i
125
1.681
- 720
7.303
3.275
2.594
3.847
444
744
306
247
9.709
3.811
2 841
2.076
341
2.601
53.753
3.727
6.U4
8.570
1.179
3.741
1.594
776'
868
»
1.430
762
659
2 497
3.473
Armée de terre..
Armée de mer..,
6.329.776 »
» 241.423 230.508 *10.915
» 50.383 47.376 1.991
Totul connu » » 6.607.660 »
Les votes pour 83 dépari emens , dont un
certain nombre sôntinçomplets,donnent, en-
: y «eàiprenant les votés connus de l'armée"
et de la marine :
Si quelques départemens ont vu dimjnuer le
nombre des votes aflirmatifs pour l'Empire com
parativement au vote pour la présidence décen
nale, d'autres présentent des résultats tout con
traires.
Sans parler du département de la Seine, qui
donne un chiffre supérieur de plus de 11,000 voix,
la Loire-Inférieure a vu s'augmenter de 13,972 le
mbmbre des suffrages affirmatifs. Dans l'Isère,
l'arrondissement de La Tour-du-Pin, donne 2,344
oiii de plus qu'ay 20 4écembre.
La Sartlie a vu diminuer de 7,000 le nombre
dei'suffrages exprimés et a maintenu le nombre
des suffrages afflrmâtifs. Dans le Jura le nombre
des oui s'est augmenté de plus de 10,000.
A Boussac, département de la Creuse, cet an
cien foyer du socialismef sur 7,908 votans, il y a
eu 7,793 oui; c'est 400 de plus qu'en 1831, mal
gré l'absence d'un grand nombre de maçons que
la continuation des travaux retient à Paris;
— On lït dans le Moniteur :
« Le vote qui vient d'avoir lieu a été signalé à
. Paris par des circonstances du plus touchant in-
îtérèt". ■_
| » Des malades, des infirmes, des paralytiques
se sont fait transporter dans la salle du scrutin ;
un ouvrier de la rue des Vinaigriers (ancien foyer'
de socialisme), affaissé sous le poids de la mala
die, s'est fait porter auprès de l'urne, et, en dé
posant sou vote, a; répondu à une question bien-r..
veillante du président : « On ne saurait trop faire
ppur celui qui a sauvé la France. » \
» Des aveugles, en grand nombre (sept dans
une seule section), sont venus voter, conduits par
leurs femmes et leurs enfans.
» Dans le 8° arrondissement, le général Des-
paùx, vieillard de quatre-vingt-onze ans,-,est arri-
,vé en voiture pour déposer son vote; il a essayé^
de monter dans la salle du scrutin, située au pre-
•mier étage,- mais' se5 forces ont trahi son-coura
ge, et il a été contraint -dfc js'asaeoi r dans le vesti
bule. Le bureau, informé de ce fait, s'est trans
porté; ên corps auprès du général, avëc l'urne
destinée à recueillir ce vote; cette scène touchan
te a ému tous les assistans.
» Daùâ ,îô 7 e arrondissement, M. Ménier, fabri
cant de chocolat, frappé d'une attaque d'apoplexie
qui a menacé gravement ses jour»; s'est fait por
ter dans un fauteuil, de Passy jusqu'auprès du
.bureau. Dans lejnêine arrondissement, un vieux
soldat de l'Empire, âgé de quatre-vingt-dix-neuf
ans, est venu voter, porté dans les bras de son
aïs. . v s • ;
» On dit aussi que le général Cavaignac, oncle
ou cousin de l'ancien chef du pouvoir exécutif, a
déposé un vote affirmatif, en disant: «Jevote,
parce qiie c'est ma conviction.» •
* Ce chiffre représente- non seulement les non,
mais aussi les nuls ou douteux.
— Nous pouvons annoncer, dit lé Mémorial
.d'Amiens, que sur 832 communes qui composent
le département de la Somme, 362 ont voté oui à
l'unanimité.
La gendarmerie de la Somme .a voté à l'unani-
mité.pour le .rétablissement djs l'Ewpire.
— On nous écrit de Saint-Ilizier ; "
« Les ouvriers de la Forge-Neuve et ceux de la
forge de Clos-Mortier, se sont rendus au scrutin
sous la direction de chefs .qu'ils s'étaient choisis,
tambour et drapeau en téte, aux cris de Vive l'Em
pereur! vive Napoléon! Le drapeau de la Forge-
Neuve portait cotte inscription : Forge-Neuve à
Napoléon III! Vive l'Empereur ! Le 'drapeau de
Clos-Mortier, portait Vive Napoléon III! , . 1
' - » Ce dernier drapeau était porté par un ancien
militaire de la campagne de Russie. »
— On nous écrit dé Saint-Gerraain-du-Bois :
« Pour vous donner une idée de l'enthousiasme
qui animait nos populations, je vais vous citer un
fait qui stest passé dans notre commune (Saint-
Germain-du-Bois)'. Un vieux soldat de la levée de
dix-huit à vingt-cinq ans, aujourd'hui octogénai
re, alité depuis huit mois par suite d'une chute
qui le prive de l'usage de ses jambes, s'est fait
conduire en voiture à la salle du vote, et a déposé
son bulletin en pleurant de bonheur, et répétant :
Oui! oui ' à plusieurs reprises. Ce vieux brave, a
fait entre autres les premières campagnes d'Italie,
celles d'Espagne et de Russie; il est sorti comme
sous-lieutenant du 7S" de ligne avec la croix d'hon
neur. » ■ . ,
— Voici une des gracieusetés'de MM. les rouges,
trouvée dans une des urnes, à Reims : « Peuple,
encore un trône à renverser, un empereur à fu
siller; les prêtres à crucifier. »
— Dimanche dernier, entre sept et huit heures
du matin', la cloche de Montigné sonnait le glas
funèbre et semblait annoncer à la,petite commune
la mort de l'un de ses membres. Personne cepen-
, dant n'était malade; aussi, grande était la sur
prise des jiabitans, lorsque le-8«e«6tain vintéclair-
cir le mystère, en disant : a MM. les sénateurs ont
tué dernièrement la République, et je sonne aur
jourd'hui ses funâfailles.» Cette explication a été ac
cueillie aux cris enthousiastes de : Vive l'Empe- .
reur! ».
• —Une fête avait été improvisée mardi à Blois,
à l'occasion du dépouillement officiel des scrutins
du département. j '. •
Dans la journée, une salve de vingt-un coups de
canon avait annoncé la solennité.
Le soir, vers huit heures, cinquante-six «coups
d.e canon annonçaient aux populations, à plusieurs
lieues à . la ronde, que le Prince avait obtenu
56,000 voix dans le département. Les édifices pu
blics et un grand nombre de maisons étaient illu
minés, et des transparens à la préfecture et à la
mairie- annonçaient le chiffre obtenu dans le dé
partement et dans la ville.. Malheureusement une
pluie abondante et un vent violent ont empêché
les illuminations de produire leur effet.
' La musique de la' garde nationale, réunie à la
mairie, a joué des'morceaux d'harmonie pendant
toute la soirée. ~ " .
.11 est probable que l'Herald veut fair .
lusion au bruit qui commence à se rép:
dr'e dans le monde des affaires, que lîAnglè*
terre songerait à réduire les consolidés à
% 1/2 d'intérêt. ' x. boniface. i
" i ~ ■■■r "! in fr
h'Indépendance Belge, publie ce qui suit : ,
« Les rentiers et les capitalistes semblent
deplus.-en plus considérer la conversion du
5 p.- 0/0 comme inévitable et prochaine. Le
cours des obligations des emprunts dé 1840, ;
1842 et 1848 est descendu au pair, tandis
que le 4 -1/2 p. c. a monté ,et est resté • de
mandée 99 1/2 à la. bourse de Bruxelles
d'hier.»
Nous avons parlé hier du protocole signé
à Londres, d'après lequel le trône de la '
Grèce ne pourra être occupé que par un
prince professant le culte catholique grec.
On écrit d'Athènes, le '17'septembre :
• « Le protocole de Londres concernant
l'ordre de succession au trône, a-été apporté '
a Athènes par trois courriers qui ont suivi
trois voies différentes. Le gouvërnemeuf grec
a envoy-é son assentimeni au protocole par
le bateau à vapeur français ordinaire. » '
M. le ministre de l'instruction publique
vient d'adresser à S. A. 1. le prince-Prési- '
dent le rapport suivant :
Monseigneur,
Quelques-unes des chaires de la Faculté des
lettres de Paris ont été créées pour donner place
dans l'enseignement de l'Etat à "des hommes qui.
par l'éclat de leurs travaux particuliers, avaient '
"conquis un rang honorable dans l'opinion des
savans et dans l'estime du monde. C'est ainsi
que des cours qui, par leur nature, sem
blaient n'exiger qu'un seul professeur, ont été di
visés. Pour fournir à un penseur éminent l'ob-
casion de se produire, le cours "d'histoire de la
Les nouvelles de Londres d'hiér soir faous
apprennent qu'unè réunion nombreuse de
membres de là chambre des communes,
amis de l'administration actuelle, avait eu
lieu à deux heures, à la résidence officielle^,
du premier lord de la trésorerie. Il y avait
environ 214 membres; le comte de Derby,
le ministre de l'intérieur Walpole, sir John
Pakington et d'autres membres du gouver
nement assistaient à cette réunion.
Les journaux anglais d'hier considèrent
la position du cabinet comme raffermie par
le débat de la veille j . 1
« On n'entend plus aujourd'hui parler, dit le
Morning-Herald, des bruits qui ont couru ces
jours derniers, au sujet de la position critique
du . ministère. On . croit que tout le mal qui
pouvait advenir de la motion factieuse de M.
.yïliiers a été détourné par la marche sage
Te&.jmideiite du gouvernement. On a été enr
enanté" de voir le pays continuer à être gouver
né: par une administration éclairée, en dépit
dès efforts de quelques hommes très avancés
dé. l'école de Manchester, et le meilleur
Indicateur de l'opinion publique, la bourse,
fait voir clairement que le danger est passé.
Quant aux* affaires extérieures, l'opiniçn semble
favorable au maintien du bon accord entre tou
tes les grandes puissances de l'Europe, et, com
me- depuis longtemps on ne doute, en aucune fa
çon du verdict des Français au sujet du rétablis
sement de l'Empire, il n'y a rien à craindre de
ce côté. Enfin, à l'aspect favorable, de l'atmos
phère politique, au dedans comme au dehors, de
la prospérité générale du pays , et à l'augmen
tation presque journalière des ressources natio
nales, par 1 arrivée de l'or de l'Australie et de la
Californie, on croit que nous touchons à une
grande commotion financière. »
philosophie mo
derne.'La chaire d'histoire dé la philosophie an
cienne se trouvant aujourd'hui , vacante, sans que
l'illustration des candidats ni les besoins de l'en
seignement commandent qu'on la remplisse, j'ai
l'honneur de vous proposer de confier à un seul
professeur le cours d'histoirè de la philosophie
ancienne et moderne. v >* ' .*
Cétte mesure permettrait de transformer très
utilement la chaire actuellement vacante.
La grammaire comparée n'est point encore en
seignée dans les Facultés des lettres, quoique fa
comparaison de la grammaire^des trois langues
classiques que l'université de France r |Jrofesse,
soit en réalité la base de son enseignement, et
dsive être le but de ses investigations les plus sé
rieuses. Dans un temps où les études orientales
ont mis à découvert la racine commune de ces
grammaires différentes, il semble que le moment
soit venu d'ouvrir une carrière nouvelle aux hom
mes laborieux qui, cherchent dang les langues,
dans leurs rapports, dans leur filiation, le secret
du caractère divers des peuples et le dépôt même
du génie de l'humanité. Il appartient à la pre
mière de nos'Facultés des lettres d'inaugurer ren
seignement de la grammaire comparée, et de po-,
ser ainsi les principes d'une sciencé destinée à
donner une vie nouvelle à l'instrùetion secondaire.
Au nombre dés réformes prescrites par votre dé
cret du 10 avril 1852, celle des études gramma- *
ticales dans lés lycées a une importance propor- ■
tionnée au nombre considérable d^élèves qu'elle
intéresse. •-
Les professeurs chargés désormais 'de cet en
seignement renouvelé ont besoin d'une direction
qui vienne de haut. Il faiit ' qu'ils-puissent pren
dre pour guide des doctrines éprouvées par
j sophi-
pertes l
grettables que l'érudition française a faites de
puis quelques années, nous avons eu le bonheur
de,conserver le savant éminent qui, par Ja pro- .
'fondeur de ses connaissances étendues à tous les
âges 4e la civilisation, et par la précision de son
bon senâ,«élevé à la hauteur de toutes les grandes
pensées, est le plus capable de rendre à la fois
imposant et utile l'enseignement que j'ai l'hon
neur de vous proposer dé fonder. Les doctrines
que son autorité consacrera ne tarderont pas à se
répandre. Elles pénétreront peu à peu dans l'es
prit des maîtres et finiront par arriver sous une. "
lorme pratique et élémentaire jusqu'aux enfans
qui peuplent nos collèges:
Daignez agréer, etc.,
Le ministre de l'instruction publique
et des cultes, h. fortoul.
A la suite de ce rapport, le prince-Prési-
FEUILLETOH DU CQNSTITUTIONKEL, 26 NOVEMBRE. 1
mjnée dé yaryille:
XIII..
r ' LA VIE' INTIME.
Théodore aussi, avait repris toute la tran
quillité de son ame, avec la résolution de se
rapprocher de Renée .et l'espérance de la
revoir chaque jour.î
La certitude qu'elle n'irait plus dans le
monde des fetes et des plaisirs, avait tout à
coup calmé si violente agitation et il s'ap
plaudissait de eet apaisement;
Toujours ainsi, les passions semblent se
calmer au moment où 1 on fait quelques con
cessions pour les satisfaire. Alors, on s'en
croit maître, on s'imagine qu'on les arrêtera
à volonté, et ce sont elles qui, maîtresses
d'un cœur, veulent bien accorder un instant
de trêve avant d'exiger autre chose;
Cependant Théodore gardait au fond de
sa pensée le projet de se consacrer à Dieu ;
il s était repris à cette idée le jour où il avait-
vu que Renée était "la femme de' Maurice.
Mais son projet restait vague, sans époque
déterminée, sans commencement de retour
matériel à ses anciennes habitudes. Son
ame était encore comme une eau qu'un vin-
lent orage agita, qui ne peut reprendre son
c.oùrs tranquille, et'dont les vagues tour
mentées ne savent plus ni réflédir le ciel,
ni laisser apercevoir au fond de leurs- ondes
le sable pur et fin qu'où voyait clairement
lorsque rien ne l'avait encore troublé,e.
Théodore rentra donc chez lui plein de
joie : il avait revu Renée avec toute' sa ra
vissante beauté; sa grâce naïve et distinguée;,
il avait retrouvé' ses maniérés simples,, ses
idées élevées qui. le charmaient ; il avait'Te-
trpmé plus que cela... et son ame sefon-
dait de leudresse en pensant à ces paroles,
où Renée lui avait laissé voir qu'il/était tout
pour elle, comme /'lie tout pour lui.
L'intimité de chaque jour peut seule don-
' ner l'occasion de montrer mille grâces de la
* La reproduction est interdite.?
Personne, mille délicatesses du cœur, jl'y a j
es mots qui échappent, des regardv*des '
mouvemens imperceptibles, qui dév<#ient
mieux le caractère ou l'afFection que rie le
pourraient faire des années pendant les
quelles on ne se voit que dans le monde, et
qui attachent mille fois plus encore que la
beauté et l'esprit. Si les circonstances sépa
rent deux personnes qui se sont aimées ; si
la mort, celte irrévocable séparation, vient
rompre les nœuds du cœur, ce qui attendrit
le plus dans les souvenirs, ce sont quelques
mots, quelques inflexions de voix, quelque,
geste de l'intimité. On vous a dit telle pà-
role , de telle manière ; cela s'esj, peint
dans votre ame, et c'est ce rien qui fait fon
dre en larmes. '
Renée était charmantedansl'intimité, com
me^ toutes les personnes qui sont naturelles.
'Elle était remplie d'attention pour les autres ;
elle les faisait valoir par sa naïve admiration
pour tout ce " qui était bien; elle avait des
molspiquansparlerapprbchementingénieux
de ses idées, et des mots profonds, parce"
qu'ils venaient du cœur, qui est plus subli
me dans sa spontanéité quand il est noble
et pur, que ne peut l'être toute la réflexion
de l'esprit. •
Dés le premier moment où Rènée-se trou
va entre sa cousine pour qui elle avait une
réelle amitié, Fernand dont elle estimait
sincèrement le caractère,,et Théodore, le
culte et l'amour de sa vie, Renée se sentit
tellement heureuse, qu'elle reprit toute sa
joie expansive et qu'èlle disait en riant :
• — Au milieu de ces immenses salons, j'é
tais comme un prisonnier au cachot et ga-
rotté. Dans ce petit boudoir, je suis comme
' un oiseau qui déploie ses ailes dans un ho
rizon sans limites.'Ah! c'est-qu'en effet je
.puis vivre-ici de cette vie de la pensée etdu
cœur, qui est l'infini ! -
Parfois aussi quelques mélodies chantées
par Renée, quelques douces et suaves im
provisations qu'elle trouvait sur le piano
mêlaient leurs délicieuses harmonies*à i'en-
tretien. On causait après plus intimement,
On parlait même de soi, de ses impressions,
de ses idées; puis l'on parlait aussi des li
vres, des tableaux, des objets d'art de tout
génie. G'était ingénieuxj raisonnable, ori-
•r ■* '
. On ne disait de mal de personne;, on était-
parfaitement heureux. -
Cela dufa-peu de jours. ■ ' ■
Mme de Savigny accourut pour s'infor
mer des motifs qui éloignaient la marquise
de "Varvillè du monde au milieu de l'hiver.
Mme de llebel et. Mme de Saint-Erain arri
vèrent curieuses, et insistèrent pour rame
ner Mme de Varville'à leur-suite. Le monde,
quand on y est une fois entré, ne lâche pas
sa proie facilement. On est devenu sa pro
priété ; il ne vous laisse pas le droit d'être à
vous-même, à vos amis, à votre chez vous.
Et quand on prend ce droit-là sans un mo-,
tif bien connu, le monde en invente de tou
tes sortes, des plu 3 ridicules ou des plus
coupables, pour se venger de cet abandon.
—'Pourtant, 'disait Renée en riant, on a
l'air de prendre si peu d'intérêt à vous quand
vous êtes flans un salon, qu'on ne devrait
pas s'apercevoir de votre absence quand vous
n'y êtes plus. r
Chaque jour on vint ainsi se jeter au mi
lieu de leur intimité pour la.troubler et non
pour la partager ; il y a des gens qui ne peu
vent pas même vous laisser un bonheur
dont ils ne voudraient.point.
L'un des cousins de Maurice, le comte
Adolphe de Melcy, crut Convenable pour lui
.de faire la cour à la marquise deVa'rville;
son frère donnait chez les lorettes; il aurait,
lui, trouvé bon d'afficher sa cousine; il eût
peut-être ainsi gagné ses éperons de cheva
lier de' la faskion. Il était dans sa destinée
d'être toujours un fat mal réussi. Du reste
il était du nombre de ces hommes qui détes
tent les femmes d'esprit... Il sentait qu'elles
devaient se moquer de- ses prétentions, et
qu'il ne pouvait être impunément un sot de
vant elles.
Quelque insignifiantes que_ fussent ses
assiduités, elles, déplaisaient à Théodore :
H'homme l'ennuyait, et ■ sa présence gênait"
j la conversation. Un ennuyeux:glace tout, et
\ un prétentieux apporte la gène, qui est un
i degré de plus à l'ennui. Il devint insuppor-
I table, et ne s'en douta seulement pas.Quand
la conversation languissait à cause dè lui, il
essayait de" la ranimer paV quelque anec
dote de coulisse, quelque bon mot de lorette
en vogue; mais la liberté du propos^ et son
inopportunité daps cette chaste reunion,im
primaient un malaise général, dont il ne de-
vinait-pas la cause; car lès jeunes gens de'
notre temps se sont habitués à un travers
qui n'avait jamais exisfé jusqu'à ce mo
ment : c'est d'apporter, dans la bonne com
pagnie, jusqu'au rebut de l'esprit de la mau
vaise.; .
, M. Adolphe de Melcy connaissait Théodore
«..peér l'avoir rencontré chez son cousin Mau
rice. Sa vue l'avait même déjà déconcerté
plus d'une fois, et il éprouvait en sa présen
ce ce respect involontaire que la friyolité su
bit malgré elle en face du mérite, et dont
. elle sé venge ensuite en le dénigrant;
Parfois aussi M. de Melcy se révoltait con
tre cette influence de Théodore, et essayait
de s'en venger par ces ironiques sarcasmes
et ces plaisanteries voltairiennes» tant usées
contre le fanatisme des idées religieuses';
mais quelques mots simples et calmes pro
noncés par Théodore le réduisaient vite au
silence. .
Valentin venait aussi quelquefois le soir;
mais on lui permettait d'avoir mauvais ton
et de dire des choses inconvenantes. Il était
si gai, si amusant, et il promettait si vive
ment d'aider Fernand dang ses ambitions lit
téraires, qu'on le voyait avec plaisir.
Il riait lui-même de bon cœur en disant à
« Fernand :
I — Mais personne ne parlera pi de vous,
ni de vos ouvrages, si vous n'en parlez pas
le premier; qui donc apprendrait au public
qu'ils existent? Ceux- qui écrivent n'en diront
rien' et surtout ne vous loueront pas. Ce se
rait se faire un rival, ils s'en garderont bien/
Fernand répondait tranquillement :
—Vous voyez en m al.' Vous valez tous mieux
que vous ne dites; d'ailleurs, moi je l'avoue,
si j'ai des ambitions, si j'aimé la gloire, c'est
celle-là seulement qui naît d'une reconnais
sance durable et méritée çfe la part de mes
semblables, pour de bons et utiles ouvragés;
non celle qui viendrait de bruits momenta
nés et provoqués par moi.
Et Valentjn riait encore en s'écriant : '
— Vous avez le temps d'attendre avec vos
vertus, mon bon Monsieur Fernand ! Qujnd
nous, qui crions tous les matins au publié :
Nous sommes des gens de génie T.ne liséz
que nous ! ne croyez que nous ! il nous ar
rive souvent de n attrapper que l'attentiôii
des sots, et de voir les geiis de mérite ne
pas même lire n*os ouvrages!... Au reste,
ajoutait-il, toujours' riant et joyeux, c'est
peut-être ce que les gens raisonnables peu
vent faire de mieux pour eux et pour nous.
Ce charlatanisme cartes sur table en se
moquant de soi-même, comme des autres,
et qui a été très fréquent de nos jours, cau
sait à la bonne et honnête conscience de
Fernand une inexprimable surprise. Et Va-
lentïn, animé par le succès d'étonnement
qu'il obtenait, ajouta : .
— Mais ce n'est pas assez de dire du biea
de soi, il faut encore dire du mal des autres.
Oh s'adrèsse ainsi aux mauvais sentimens,
qui ne sont pas difficiles sur la qualité de
ce qu'on leur sért; et quand vous blâmez
ayee moitié moins d'esprit, vous avez deux
fois plus de succès que si vous donniez un
éloge. Je sais bien qu'avec tout cela, il y en
a qui parlent de vertu, qui vantent leur
conscience ; mais ne serait-ce pas comme ces
marchands qui vantent de mauvaises mar
chandises dont ils voudraient se défaire à un
bon prix ?
v Quand, il y a dix ans, j'arrivai à Paris,
j'avais une lettre pouf le patriarche de la
littérature, M. de Chateaubriand, et, bien
qu'on m'eût dit qu'il ne prenait plus aucun
intérêt à-ce qui se passait autour de lui et
ne se souciait plus de rien, je visbi'enlôtque
cette ame, qu'on croyait usée, n'était que dé
goûtée, et qu'elle cachait sous le dédain une'
profonde sensibilité blessée , mais non pas
eteinte. -- -
; Il vit, à mon émotion et à quelques mots
qui m'échappèrent, qu'il était compris, et
son ame s'ouvrit. Alors, toutes ses paroles
furent admirables. • •
Après une assez longue conversation, il
termina ainsi :
— Vous voulez écrire, dit-il, et je pense
que c'est pour exprimer des pensées élevées
et des inspirations délicates. Vous, livrerez
donc de belles fleurs à des mains malfaisan
tes, qui les souilleront; car c'est tout ce
qu'on peut attendre de la société dans la
quelle nous vivons, ou plutôt vous vivez,
car moi je ne vis plus, j'assiste encore, sans
y prendre part, a ce. monder.quife décom-'
pose et tend, comme moy fin, - -,
,3e ne pus m'erppécher 'dè.'faire, un- mou^
vement. qui l'interrompit., mais il reprit
ainsi :
. — Quand une société ou un e doctrine réu
nit les suffrages de tous, c'est à qui soutien-
,dra l'édifice moral dont chacun attend sa sé
curité. Alors, si vçus publiez" un livre utile,
noble dans ses sen timens, généreux dans ses
idées, et d'une haute beauté morale, vous
arrive^, par la sympathie, a une gloire véri
table, darls cette société qui'se fortifie de
tout ce qui est bien, ét accorde en renom
mée à l'écrivain à proportion de ce qu'elle
reçoit en dignité, en puissance'ou en force
de ses ouvrages. Maïs il n'elr est point
ainsi dans nos jours de baine, de dis
corde ët de révolutions. Toute œuvre
honnête,, et par conséquent amie et sou
tien de l'ordre, est déclarée stupide, et
, son ,auteur poursuivi d'outrages et de sar
casmes; tandis que l'ouvrage insensé, n'ayant
ni talent, ni mérite, mais attaquant quelques
lois ou quelques principes, force vitale de la
société, est prôné, par l'espoir qu'il peut
contribuer à la détruire.
Comme je voulais réclamer contre un ju
gement si sévère, Chateaubriand ajouta :
Si j'avais un conseil à donner à un jeune*
homme, je lui dirais : Retirez-vous de cette
mêlée qui vous écraserait, et gardez dans la
retraite un saint amour du bien, pour le
jour où l'on reconnaîtra'qu'il, est temps d'ar
rêter la France sur le penchant où elle va"
rouler, de révolutions en révolutions, dans,
cet abîme- au fond duquel se sont englou
ties tant de sociétés disparues au milieu des
ruines.
Le poète "se montrait dans ces paroles de
Chateaubriand; et il m'emportait dans la
sphère de ses idées. Peut-être eussé-je bien
fait de m'y tenir.... mais... mais... il y adix
ans, et les révolutions alors ne semblaient
pas près de finir ! J'étais impatient d'écrire
et je ne voulais par être martyr- de ma
vertu.
Alors, ma foi, continua-t-il avec'un g^ste <
de gaîté et d'insouciance, je ne voulus écri
re ni pour desagesnipour de folles pensées,
et je me décidai à faire comme bien d'autres
de la littérature ïrfecs.
Cela "réussit bien, je me suis £ait un nom,
une fortune, des amis; et je me moque du
reste,
BOtËlUl : me de Valois, (Palais-Royal),fn* i© 4
B l'CT ^ VENDREDI 26 NOVEMBRE.
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chef, j On. s' abonne, dans les département, aux Messageries et aux Directions de poste,—A Londres, chez MJV C owie et fils, j Les annonces sont reçues chez M. PANIS, régisseur, 10, place de la Bour:
— A Strasbourg, chez M. A lexandre , pour l'Allemagne,
et au bureau du journaL
PARIS, 25 NOVEMBRE.
MESSAGE..
Du Prince- Président au Corps-Législatif.
Voici le texte du Message dont M. Fould,
ministre d'Etat, a donné lecture au Corps-
Législatif, à l'ouverture de la séance- de ce
jour :
- Messieurs les députés,
'Je vous ai rappelés de vos départemens.
pour vous associer au grand acte qui va
s'accomplir. Quoique le Sénat, et le peuple
aient seuls le droit de modifier la Consti
tution, j'ai voulu qué le. corps politique,
issu comme moi du suffrage universel, vînt
attester au monde la spontanéité du mou'
vement national qui me porte à l'Empire
Je" tieus à ce que xe soit vous qui, en cons
tatant la liberté du vote et le nombre des
suffrages, fassiez sortir de.votre déclara
tion toute la légitimité de "mon pouvoir .
Aujourd'hui, en effet, déclarer que l'au
torité repose sur un droit incontestable,
c'est lui donner la force nécessaire pour fon
der quelque chose de durable et assurer la
prospérité du pays.
Le gouvernement, vous le savez, ne fera
que changer de forme. Dévoué aux grands
intérêts que l'intelligence enfante, il sa coa-,
tiendra, comme par le passé, dans les limites
delamodération, car le succès n'enfle, jamais
d'orgueil l'âme de ceux qui ne voient dans
leur élévation, nouvelle qu'un -devoir plu»
grand imposé par le peuple, qu'une mission
plus élevée confiée pur la Providence.
Fait au palais de Saint-Cloud, le 25 no
vembre 1832. . ' m
-Signé ; Louis-Napoléon.
Le vote est terminé. Les résultats du scru
tin- ont dépassé toutes les prévisions. Non-
seùlement une immense majorité s'est pro
noncée partout pour. le rétablissement de
l'Empire ; mais le chiffre des adhésions égale
ra; s'il ne lui est même supérieur, le nombre
des votes aflirmatifs de 1851. Le nombre des
opposans, qui a diminué de moitié à Paris, a
décru dans une proportion bien plus forte en
province. Dans le Var, dans l'Hérault, dans la
Dordogne, dans la Haute-Vienhe, les victi
mes, aujourd'hui désabusées,du socialisme,
sont venues voter à bulletin ouvert. Les élé-
mens eux-mêmes ont été vaincus par l'ar
deur des populations, jalouses de donner un
décisif témoignage de gratitude et de con
fiance à l'élu de la nation.
Le Corps Législatif s'est réuni aujourd'hui
pour contrôler les résultats du vote et leur
imprimer le cachet d'une inattaquable au
thenticité. Le gra"hd changement que de
mandait la France est donc aujourd'hui un
fait accompli. Avant que soit revenu l'anni-
vérsaire du & décembre, la République aura
disparu, l'hérédité aura repris sa place à
la base de nos institutions, et, parla volonté
du peuple, un Empereur aura succédé à un
Président dans la conduite de nos destinées.
Ainsi l'année qui, dans quelques jours, va
finir, aura vu passer la France par les
deux extrêmes de l'anarchie et de l'ordre,
de la crainte et de la confiance , de la
misère et de la prospérité. Elle s'ouvre par
l'initiative hardie d'un prince énergique qui.
se lève au milieu" d'un pays consterné, at
taque de front \es ennemis de la civilisa
tion, "et brise leur puûjSafhce factice; Ell0.se
termine, au sein d'un -.calme protond„-pat
LjeHthousiâsme d'u^ey^reconnaissait et?
satisfait j qui récompense par tfoe couron
ne des services dont chaque, jour lui fait
mieux apprécier le prix. . . .
. Gette année marquera» dans l'histoire*
Tous les grands événemens de notre pays
ont leur place fixée d'avance dans les an
uales du monde. Ce n'est pas d'ailleurs
à la France seule qu'a profité la révolu
tion dont nous avons été témoins; l'Eu
rope,. qui a salué comme une délivrance le
coup d'Etat du2 décembre, salue aujour
d'hui, le rétablissement de l'Empire com
me le gage d'une ère de paix et d'universelle
tranquillité. Mais cette année comptera aussi
parmi les plus heureuses -et les plus pros
pères de notre pays. Nous en appelons avec
confiance à tous ces ouvriers qui ont retrou
vé du travail, à tous ces laboureurs rassurés
sur leur patrimoine, à tous ces chefs d'in
•dustrie, à tous ces commerçans dont le cré
dit s'est relevé, et dont les affaires ont repris
une activité nouvelle.
.C'est cette prospérité générale.et éclatante
qui est la cause et l'explication du grand
mouvement d'opinion que nous voyons écla
ter avec une irrésistible puissance. C'est cette
prospérité qui - est aussi, nous en somme sûrs,
la plus dpuce et plus complète récompense
pour Louis-Napoléon. Avoir donné à.un pays
comme la France uue année de calme, de tra
vail et de bonheur, et en être payé par l'a
mour d'un peuple : peut-il être une plus eni
vrante satisfaction pour un grand cœur !
CUCIIEVAL-CLARIGNY. '
Njpûs croyons savoir que les opérations'de
recensement des.votes auxquellesle Corps Lé
gislatif à commencé à se livrer aujourd'hui,
doivent, comme n.ous l'avions prévu hier,
être positivement, closes dans la journée
de mercredi, l or -décembre. Le soir de ce
jour, 1" décembre, le Corps Législatif tout
entier se transporterait à Saint-Cloud pour
porter au prince-Président le résultat du
recensement des votes.
Le lendemain, 2 décembre, le prince' se
rendrait aux Tuileries, o.ù il sèrait reçu par
les trois grands corps de l'Etat.
Recensement des voies de la Seine.
Les mêmes dispositions qu'aux réunions
habituelles, pour le dépouillement général
des votes, avaient été prises dans la salle
Saint-Jean. Dès huit heures et demie, .une
foule nombreuse occupait la place réservée
au public dans cette salle. Au.dehors, une
grândequantité de personnes attendaient4e
résultat du dépouillement.
Un peu avant neuf heures, MM. les mem
bres du conseil général'désignés pour assis
ter au recensement des votes, sont arrivés
au bureau. Cette commission était composée
"de MM. Périer, pr-ésident; Riant et Possoz,
secrétaires, tous trois en costumé. Bientôt
après, M. le préfet dQ la Seine, les sous-pré
fets des arrondisâemens de Sceaux et de
Saint-Denis, sont venus prendre place der-*
rière le bureau. '
La séance a été ouverte à neuf heures vingt
minutes. Le président a d'abord donné lec
ture des décrets sur les collèges électoraux
et de l'arrêté qui ordonnait la réunion de ce
jour; puis M»:le.secrétaire a fait l'appel de
MM. les mair8S;-des. arrondissemens de Paris
et des comiritméè'_rurales du département.
Presque tous cés'ïiiaftiés étaieut en costume.
Après cet app,el;'j.fe>recensement a com
mencé par le 1 er ^îJSïdissement de Paris, et
ainsi de suite pour J^douze arrondissemens;
puis toutes les come&bes rurales, par ordre
alphabétique, dans chacun des deux arron
dissemens de Sceaux et Saint-Denis, ont fait
connaître leurs résultats* Parmi ces commu--
nés, on remarque celles de .Bonneuil, Cbe-
vilty Yilletaneuse, Orly, où le nombre des
adhésions" a égalé celui* des votans.
, La récapitulation dés nombres adonné les
tbt,au3f suivans:
~ *" inscrits. vWns.
^ w"•"r* reserves.
Paris.... 221,793 188,730 137.425 44,434 6,£21
Sceaux et ' , /r:*/
St-Denis. 93,617 81,971 71,233 9,269 , fiitSS"'
Total gên. 31SU10 270,701 208,658 53,753 .*$,290
A ce moment la commission a susj^oidu-la
séance pour rédiger le procès-verbal>»etM. le
préfet s'est approché du'bureau et a pro
noncé leslj^les suivantes :
« Messieurs les maires,
» J'ai à vous adresser tous mes remercimens
» pour le zèle et le dévoûment que vous avpz
» montrés pendant tout lé cours de ces. opéra-
» tions électorales, que le nombre très çonsidéra-
» ble des électeurs du département rend déliça-
» tes et difficiles; vous avez révisé les listes par
» un recensement rapide, avec,une scrupuleuse
» sincérité; vous avez distribué les cartes aux
» domiciles des électeurs "en temps utile et en
» leur évitant touf déplacement. Enfin, tous avez
m surveillé la tenue des assemblées électorales, en
» présidant vous-mêmes là première section, de
» telle sorte que toutes les opérations du scrutin
» se sont accomplies sous les yeux du public,
» conformément à la loi, avec calme, liberté et
»- exactitude.-
» Le chef de l'Etat m'a chargé lui-même de
» vous en témoigner ses remercimens. " .
» Maintenant que les sentimens et la volonté '
» des électeurs du département de la Seine se .
» manifestent avec tant d'éclat et par des chiffres
» .si éloquens, p®rmettez-nrord»'!i» 1 1éstiuiei d'utr-
» seul mot : - • ' '
» Vive l'Empereur ! » • •
Ce cri est répété, à plusieurs reprises, par
•les maires et par le nombreux jpublic qui
assiste à cette séance, et les memes accla
mations se font presque aussitôt entendre
sur la place de l'Hôtel-de-Ville. ' '
• Peu d'instans après, la commission est-
rentrée, et M. Périer, président, après avoir
proclamé le résultat général du scrutin don
né ci-dessus, a terminé en s'associant, au
nom de la commission, aux paroles de
M. le préfet et en répétant de nouveau 1» cri
de : Vive l'Empereur ! qui a été salué des mê
mes acclamations par tous les assistans. •
Les procès-verbaux d'élections ont été
aussitôt réunis pour être -immédiatement
adressés au Corpâ-Législatif.
VOTE DES 21 ET 22 NOV EMBRE
Inscrits
Votans
Oui
Non
Ain
»
»
81.43i
1.241
Aisne
»
»
91.092
6.434
Aliier
»
. »
18.071
-107
Alpes (Basses-)..
. »
»
34 827
' 370
Alpes (Hautes-) .
, ».
»
26.350
»
Ardèthe
* »-
»
27.06?
20?
Ardennes
»
»
73.540
2.686 I
Ariège
■ »
»
65.5*2
392 -i"
Au! e
82.831
72.946
69.9414
2.335
Aude
»
»
73.016
576
Aveyron,.
»
»
»
» .
Bnuc.-d.u-IUiône»_..
».
51.806
2.457
Calvados
132.578
103.831
99.617
3.6*0
Cantal.. i
62.758
45.187
44.739
323
Charente.. ;
115.555
86 838
84.956
1 211
Charente-Inf.
»
»
»
»
Cher.. i.
»
»
67.866
1.049
Corrcze
» . »
9
69.292
407
Corse
u
»
15.099
4
Côto-d'Or
»
».
99.100
3..510
Côtes-du-iSord...
»
))
54.930.-
541
Creuse...'
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43.259
1 52* '
Dordogne.......
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56.95».
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Doubs.
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Drôme..'
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Eure-et-Loir.....
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Finistère...
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'183.528
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Garonne (Haute-)
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•110.924
2.175
Gers....
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... .3>V
78.055
1.344
Gironde
»
% v n ..
114."651
3.531
Hérault. .
»
•'»
33.333
1.350
Iniire
70.778
61.001
59.745
904
Indre-et-Loire...
94.000
76.500
74.837
1.332
Isère -—
»
»
4t.889
1.348
Ille •et-Vilaine...
»
»
23.729-
543
Jura
»
»
73.287
2.770 .
Lapdcs
»
' »
69:532
558 '
Loiio
125,000
»
• 92.:<83
1.390 .
Loire-Inférieure^
141.781
»
76.066
3.477 "
Loir-et-Cher
»
»
56.316
2.352
Loire. (Haute-)...
»
57.868
214
Loiret —
96.132
78.368
74x>l'0
2.911
t(ltr
-»
»
•2.453
263
Lot-fet-Gartmae.'.
»
»
83.967
2.770
Lozère.... *7....
»
»
33;Qt>4
291
Maine-et-Loire.;,,
Manche. ■*..
•Marne
Marne (Haute-) . .
Mayenne.,,.;. „. . j
Meus;-;.
• Meurtrie. .
Morbihan
Moselle
Nievre
Nord
Oise
Orne
l'as-de-Culais
' Puy-de-Dôme ..-.
jPyrenées» (Basses)
|Pyrénées(Hautes)
'I'yrénées-Orient. '
jKhdne
I Rhin (Bas-)
i Khin (Haut-)...,
Saôue-et-Loire. .
Saône (Haute-)...
Sarthe....
Seine.
. Seine-et-Marne..
Seine-et-Oise ...
■ Seine-Inférieure.
| Sèvres (Deux-)..
: Sonfme
' Tarn
! Tarn-et-Garomie
i Var ; .
. Vaucluse
_ Vendée...;
' Vienne .
Vienne (Haute)..
>Vosges
Yonne...
101.000
82 20.0
w
-91.193
118.329
78.99G
(jy.878
82.230
J08.255
113.5G9 ' 97.458
395.345
120.734
225.446
105,423
183,405 162.149
»
»
»
149.068
* : ■ »
■ »
»
».
106.930
91.760
134.754
314.410
97.866
137.526
206.227
»
165.647
86.339
112.027
270.701
84.777
121.847
»
83.627
116.523
112.159
142.178
»
59.. 366
99.879
95.786
86.912
48.925
90.223
67 .404
75.400
79.310
103.851
4; 476
94.032
73.830
216.446
101.161
96.062
157.212
126.041
91.378
59.446
37.005.
95.441
114.549
92.740
118.261
- 8-t. 6.36
108.449
208.658
80.292
113.762
163.745
63.803
138.150
83.938
54.924
71.367
56.289
59.423
63.785
58,417
96 .,564
89.772
2.709
1.035
3.907
1.833
2.949
2.251
3-à3i
125
1.681
- 720
7.303
3.275
2.594
3.847
444
744
306
247
9.709
3.811
2 841
2.076
341
2.601
53.753
3.727
6.U4
8.570
1.179
3.741
1.594
776'
868
»
1.430
762
659
2 497
3.473
Armée de terre..
Armée de mer..,
6.329.776 »
» 241.423 230.508 *10.915
» 50.383 47.376 1.991
Totul connu » » 6.607.660 »
Les votes pour 83 dépari emens , dont un
certain nombre sôntinçomplets,donnent, en-
: y «eàiprenant les votés connus de l'armée"
et de la marine :
Si quelques départemens ont vu dimjnuer le
nombre des votes aflirmatifs pour l'Empire com
parativement au vote pour la présidence décen
nale, d'autres présentent des résultats tout con
traires.
Sans parler du département de la Seine, qui
donne un chiffre supérieur de plus de 11,000 voix,
la Loire-Inférieure a vu s'augmenter de 13,972 le
mbmbre des suffrages affirmatifs. Dans l'Isère,
l'arrondissement de La Tour-du-Pin, donne 2,344
oiii de plus qu'ay 20 4écembre.
La Sartlie a vu diminuer de 7,000 le nombre
dei'suffrages exprimés et a maintenu le nombre
des suffrages afflrmâtifs. Dans le Jura le nombre
des oui s'est augmenté de plus de 10,000.
A Boussac, département de la Creuse, cet an
cien foyer du socialismef sur 7,908 votans, il y a
eu 7,793 oui; c'est 400 de plus qu'en 1831, mal
gré l'absence d'un grand nombre de maçons que
la continuation des travaux retient à Paris;
— On lït dans le Moniteur :
« Le vote qui vient d'avoir lieu a été signalé à
. Paris par des circonstances du plus touchant in-
îtérèt". ■_
| » Des malades, des infirmes, des paralytiques
se sont fait transporter dans la salle du scrutin ;
un ouvrier de la rue des Vinaigriers (ancien foyer'
de socialisme), affaissé sous le poids de la mala
die, s'est fait porter auprès de l'urne, et, en dé
posant sou vote, a; répondu à une question bien-r..
veillante du président : « On ne saurait trop faire
ppur celui qui a sauvé la France. » \
» Des aveugles, en grand nombre (sept dans
une seule section), sont venus voter, conduits par
leurs femmes et leurs enfans.
» Dans le 8° arrondissement, le général Des-
paùx, vieillard de quatre-vingt-onze ans,-,est arri-
,vé en voiture pour déposer son vote; il a essayé^
de monter dans la salle du scrutin, située au pre-
•mier étage,- mais' se5 forces ont trahi son-coura
ge, et il a été contraint -dfc js'asaeoi r dans le vesti
bule. Le bureau, informé de ce fait, s'est trans
porté; ên corps auprès du général, avëc l'urne
destinée à recueillir ce vote; cette scène touchan
te a ému tous les assistans.
» Daùâ ,îô 7 e arrondissement, M. Ménier, fabri
cant de chocolat, frappé d'une attaque d'apoplexie
qui a menacé gravement ses jour»; s'est fait por
ter dans un fauteuil, de Passy jusqu'auprès du
.bureau. Dans lejnêine arrondissement, un vieux
soldat de l'Empire, âgé de quatre-vingt-dix-neuf
ans, est venu voter, porté dans les bras de son
aïs. . v s • ;
» On dit aussi que le général Cavaignac, oncle
ou cousin de l'ancien chef du pouvoir exécutif, a
déposé un vote affirmatif, en disant: «Jevote,
parce qiie c'est ma conviction.» •
* Ce chiffre représente- non seulement les non,
mais aussi les nuls ou douteux.
— Nous pouvons annoncer, dit lé Mémorial
.d'Amiens, que sur 832 communes qui composent
le département de la Somme, 362 ont voté oui à
l'unanimité.
La gendarmerie de la Somme .a voté à l'unani-
mité.pour le .rétablissement djs l'Ewpire.
— On nous écrit de Saint-Ilizier ; "
« Les ouvriers de la Forge-Neuve et ceux de la
forge de Clos-Mortier, se sont rendus au scrutin
sous la direction de chefs .qu'ils s'étaient choisis,
tambour et drapeau en téte, aux cris de Vive l'Em
pereur! vive Napoléon! Le drapeau de la Forge-
Neuve portait cotte inscription : Forge-Neuve à
Napoléon III! Vive l'Empereur ! Le 'drapeau de
Clos-Mortier, portait Vive Napoléon III! , . 1
' - » Ce dernier drapeau était porté par un ancien
militaire de la campagne de Russie. »
— On nous écrit dé Saint-Gerraain-du-Bois :
« Pour vous donner une idée de l'enthousiasme
qui animait nos populations, je vais vous citer un
fait qui stest passé dans notre commune (Saint-
Germain-du-Bois)'. Un vieux soldat de la levée de
dix-huit à vingt-cinq ans, aujourd'hui octogénai
re, alité depuis huit mois par suite d'une chute
qui le prive de l'usage de ses jambes, s'est fait
conduire en voiture à la salle du vote, et a déposé
son bulletin en pleurant de bonheur, et répétant :
Oui! oui ' à plusieurs reprises. Ce vieux brave, a
fait entre autres les premières campagnes d'Italie,
celles d'Espagne et de Russie; il est sorti comme
sous-lieutenant du 7S" de ligne avec la croix d'hon
neur. » ■ . ,
— Voici une des gracieusetés'de MM. les rouges,
trouvée dans une des urnes, à Reims : « Peuple,
encore un trône à renverser, un empereur à fu
siller; les prêtres à crucifier. »
— Dimanche dernier, entre sept et huit heures
du matin', la cloche de Montigné sonnait le glas
funèbre et semblait annoncer à la,petite commune
la mort de l'un de ses membres. Personne cepen-
, dant n'était malade; aussi, grande était la sur
prise des jiabitans, lorsque le-8«e«6tain vintéclair-
cir le mystère, en disant : a MM. les sénateurs ont
tué dernièrement la République, et je sonne aur
jourd'hui ses funâfailles.» Cette explication a été ac
cueillie aux cris enthousiastes de : Vive l'Empe- .
reur! ».
• —Une fête avait été improvisée mardi à Blois,
à l'occasion du dépouillement officiel des scrutins
du département. j '. •
Dans la journée, une salve de vingt-un coups de
canon avait annoncé la solennité.
Le soir, vers huit heures, cinquante-six «coups
d.e canon annonçaient aux populations, à plusieurs
lieues à . la ronde, que le Prince avait obtenu
56,000 voix dans le département. Les édifices pu
blics et un grand nombre de maisons étaient illu
minés, et des transparens à la préfecture et à la
mairie- annonçaient le chiffre obtenu dans le dé
partement et dans la ville.. Malheureusement une
pluie abondante et un vent violent ont empêché
les illuminations de produire leur effet.
' La musique de la' garde nationale, réunie à la
mairie, a joué des'morceaux d'harmonie pendant
toute la soirée. ~ " .
.11 est probable que l'Herald veut fair .
lusion au bruit qui commence à se rép:
dr'e dans le monde des affaires, que lîAnglè*
terre songerait à réduire les consolidés à
% 1/2 d'intérêt. ' x. boniface. i
" i ~ ■■■r "! in fr
h'Indépendance Belge, publie ce qui suit : ,
« Les rentiers et les capitalistes semblent
deplus.-en plus considérer la conversion du
5 p.- 0/0 comme inévitable et prochaine. Le
cours des obligations des emprunts dé 1840, ;
1842 et 1848 est descendu au pair, tandis
que le 4 -1/2 p. c. a monté ,et est resté • de
mandée 99 1/2 à la. bourse de Bruxelles
d'hier.»
Nous avons parlé hier du protocole signé
à Londres, d'après lequel le trône de la '
Grèce ne pourra être occupé que par un
prince professant le culte catholique grec.
On écrit d'Athènes, le '17'septembre :
• « Le protocole de Londres concernant
l'ordre de succession au trône, a-été apporté '
a Athènes par trois courriers qui ont suivi
trois voies différentes. Le gouvërnemeuf grec
a envoy-é son assentimeni au protocole par
le bateau à vapeur français ordinaire. » '
M. le ministre de l'instruction publique
vient d'adresser à S. A. 1. le prince-Prési- '
dent le rapport suivant :
Monseigneur,
Quelques-unes des chaires de la Faculté des
lettres de Paris ont été créées pour donner place
dans l'enseignement de l'Etat à "des hommes qui.
par l'éclat de leurs travaux particuliers, avaient '
"conquis un rang honorable dans l'opinion des
savans et dans l'estime du monde. C'est ainsi
que des cours qui, par leur nature, sem
blaient n'exiger qu'un seul professeur, ont été di
visés. Pour fournir à un penseur éminent l'ob-
casion de se produire, le cours "d'histoire de la
Les nouvelles de Londres d'hiér soir faous
apprennent qu'unè réunion nombreuse de
membres de là chambre des communes,
amis de l'administration actuelle, avait eu
lieu à deux heures, à la résidence officielle^,
du premier lord de la trésorerie. Il y avait
environ 214 membres; le comte de Derby,
le ministre de l'intérieur Walpole, sir John
Pakington et d'autres membres du gouver
nement assistaient à cette réunion.
Les journaux anglais d'hier considèrent
la position du cabinet comme raffermie par
le débat de la veille j . 1
« On n'entend plus aujourd'hui parler, dit le
Morning-Herald, des bruits qui ont couru ces
jours derniers, au sujet de la position critique
du . ministère. On . croit que tout le mal qui
pouvait advenir de la motion factieuse de M.
.yïliiers a été détourné par la marche sage
Te&.jmideiite du gouvernement. On a été enr
enanté" de voir le pays continuer à être gouver
né: par une administration éclairée, en dépit
dès efforts de quelques hommes très avancés
dé. l'école de Manchester, et le meilleur
Indicateur de l'opinion publique, la bourse,
fait voir clairement que le danger est passé.
Quant aux* affaires extérieures, l'opiniçn semble
favorable au maintien du bon accord entre tou
tes les grandes puissances de l'Europe, et, com
me- depuis longtemps on ne doute, en aucune fa
çon du verdict des Français au sujet du rétablis
sement de l'Empire, il n'y a rien à craindre de
ce côté. Enfin, à l'aspect favorable, de l'atmos
phère politique, au dedans comme au dehors, de
la prospérité générale du pays , et à l'augmen
tation presque journalière des ressources natio
nales, par 1 arrivée de l'or de l'Australie et de la
Californie, on croit que nous touchons à une
grande commotion financière. »
philosophie mo
derne.'La chaire d'histoire dé la philosophie an
cienne se trouvant aujourd'hui , vacante, sans que
l'illustration des candidats ni les besoins de l'en
seignement commandent qu'on la remplisse, j'ai
l'honneur de vous proposer de confier à un seul
professeur le cours d'histoirè de la philosophie
ancienne et moderne. v >* ' .*
Cétte mesure permettrait de transformer très
utilement la chaire actuellement vacante.
La grammaire comparée n'est point encore en
seignée dans les Facultés des lettres, quoique fa
comparaison de la grammaire^des trois langues
classiques que l'université de France r |Jrofesse,
soit en réalité la base de son enseignement, et
dsive être le but de ses investigations les plus sé
rieuses. Dans un temps où les études orientales
ont mis à découvert la racine commune de ces
grammaires différentes, il semble que le moment
soit venu d'ouvrir une carrière nouvelle aux hom
mes laborieux qui, cherchent dang les langues,
dans leurs rapports, dans leur filiation, le secret
du caractère divers des peuples et le dépôt même
du génie de l'humanité. Il appartient à la pre
mière de nos'Facultés des lettres d'inaugurer ren
seignement de la grammaire comparée, et de po-,
ser ainsi les principes d'une sciencé destinée à
donner une vie nouvelle à l'instrùetion secondaire.
Au nombre dés réformes prescrites par votre dé
cret du 10 avril 1852, celle des études gramma- *
ticales dans lés lycées a une importance propor- ■
tionnée au nombre considérable d^élèves qu'elle
intéresse. •-
Les professeurs chargés désormais 'de cet en
seignement renouvelé ont besoin d'une direction
qui vienne de haut. Il faiit ' qu'ils-puissent pren
dre pour guide des doctrines éprouvées par
j sophi-
pertes l
grettables que l'érudition française a faites de
puis quelques années, nous avons eu le bonheur
de,conserver le savant éminent qui, par Ja pro- .
'fondeur de ses connaissances étendues à tous les
âges 4e la civilisation, et par la précision de son
bon senâ,«élevé à la hauteur de toutes les grandes
pensées, est le plus capable de rendre à la fois
imposant et utile l'enseignement que j'ai l'hon
neur de vous proposer dé fonder. Les doctrines
que son autorité consacrera ne tarderont pas à se
répandre. Elles pénétreront peu à peu dans l'es
prit des maîtres et finiront par arriver sous une. "
lorme pratique et élémentaire jusqu'aux enfans
qui peuplent nos collèges:
Daignez agréer, etc.,
Le ministre de l'instruction publique
et des cultes, h. fortoul.
A la suite de ce rapport, le prince-Prési-
FEUILLETOH DU CQNSTITUTIONKEL, 26 NOVEMBRE. 1
mjnée dé yaryille:
XIII..
r ' LA VIE' INTIME.
Théodore aussi, avait repris toute la tran
quillité de son ame, avec la résolution de se
rapprocher de Renée .et l'espérance de la
revoir chaque jour.î
La certitude qu'elle n'irait plus dans le
monde des fetes et des plaisirs, avait tout à
coup calmé si violente agitation et il s'ap
plaudissait de eet apaisement;
Toujours ainsi, les passions semblent se
calmer au moment où 1 on fait quelques con
cessions pour les satisfaire. Alors, on s'en
croit maître, on s'imagine qu'on les arrêtera
à volonté, et ce sont elles qui, maîtresses
d'un cœur, veulent bien accorder un instant
de trêve avant d'exiger autre chose;
Cependant Théodore gardait au fond de
sa pensée le projet de se consacrer à Dieu ;
il s était repris à cette idée le jour où il avait-
vu que Renée était "la femme de' Maurice.
Mais son projet restait vague, sans époque
déterminée, sans commencement de retour
matériel à ses anciennes habitudes. Son
ame était encore comme une eau qu'un vin-
lent orage agita, qui ne peut reprendre son
c.oùrs tranquille, et'dont les vagues tour
mentées ne savent plus ni réflédir le ciel,
ni laisser apercevoir au fond de leurs- ondes
le sable pur et fin qu'où voyait clairement
lorsque rien ne l'avait encore troublé,e.
Théodore rentra donc chez lui plein de
joie : il avait revu Renée avec toute' sa ra
vissante beauté; sa grâce naïve et distinguée;,
il avait retrouvé' ses maniérés simples,, ses
idées élevées qui. le charmaient ; il avait'Te-
trpmé plus que cela... et son ame sefon-
dait de leudresse en pensant à ces paroles,
où Renée lui avait laissé voir qu'il/était tout
pour elle, comme /'lie tout pour lui.
L'intimité de chaque jour peut seule don-
' ner l'occasion de montrer mille grâces de la
* La reproduction est interdite.?
Personne, mille délicatesses du cœur, jl'y a j
es mots qui échappent, des regardv*des '
mouvemens imperceptibles, qui dév<#ient
mieux le caractère ou l'afFection que rie le
pourraient faire des années pendant les
quelles on ne se voit que dans le monde, et
qui attachent mille fois plus encore que la
beauté et l'esprit. Si les circonstances sépa
rent deux personnes qui se sont aimées ; si
la mort, celte irrévocable séparation, vient
rompre les nœuds du cœur, ce qui attendrit
le plus dans les souvenirs, ce sont quelques
mots, quelques inflexions de voix, quelque,
geste de l'intimité. On vous a dit telle pà-
role , de telle manière ; cela s'esj, peint
dans votre ame, et c'est ce rien qui fait fon
dre en larmes. '
Renée était charmantedansl'intimité, com
me^ toutes les personnes qui sont naturelles.
'Elle était remplie d'attention pour les autres ;
elle les faisait valoir par sa naïve admiration
pour tout ce " qui était bien; elle avait des
molspiquansparlerapprbchementingénieux
de ses idées, et des mots profonds, parce"
qu'ils venaient du cœur, qui est plus subli
me dans sa spontanéité quand il est noble
et pur, que ne peut l'être toute la réflexion
de l'esprit. •
Dés le premier moment où Rènée-se trou
va entre sa cousine pour qui elle avait une
réelle amitié, Fernand dont elle estimait
sincèrement le caractère,,et Théodore, le
culte et l'amour de sa vie, Renée se sentit
tellement heureuse, qu'elle reprit toute sa
joie expansive et qu'èlle disait en riant :
• — Au milieu de ces immenses salons, j'é
tais comme un prisonnier au cachot et ga-
rotté. Dans ce petit boudoir, je suis comme
' un oiseau qui déploie ses ailes dans un ho
rizon sans limites.'Ah! c'est-qu'en effet je
.puis vivre-ici de cette vie de la pensée etdu
cœur, qui est l'infini ! -
Parfois aussi quelques mélodies chantées
par Renée, quelques douces et suaves im
provisations qu'elle trouvait sur le piano
mêlaient leurs délicieuses harmonies*à i'en-
tretien. On causait après plus intimement,
On parlait même de soi, de ses impressions,
de ses idées; puis l'on parlait aussi des li
vres, des tableaux, des objets d'art de tout
génie. G'était ingénieuxj raisonnable, ori-
•r ■* '
. On ne disait de mal de personne;, on était-
parfaitement heureux. -
Cela dufa-peu de jours. ■ ' ■
Mme de Savigny accourut pour s'infor
mer des motifs qui éloignaient la marquise
de "Varvillè du monde au milieu de l'hiver.
Mme de llebel et. Mme de Saint-Erain arri
vèrent curieuses, et insistèrent pour rame
ner Mme de Varville'à leur-suite. Le monde,
quand on y est une fois entré, ne lâche pas
sa proie facilement. On est devenu sa pro
priété ; il ne vous laisse pas le droit d'être à
vous-même, à vos amis, à votre chez vous.
Et quand on prend ce droit-là sans un mo-,
tif bien connu, le monde en invente de tou
tes sortes, des plu 3 ridicules ou des plus
coupables, pour se venger de cet abandon.
—'Pourtant, 'disait Renée en riant, on a
l'air de prendre si peu d'intérêt à vous quand
vous êtes flans un salon, qu'on ne devrait
pas s'apercevoir de votre absence quand vous
n'y êtes plus. r
Chaque jour on vint ainsi se jeter au mi
lieu de leur intimité pour la.troubler et non
pour la partager ; il y a des gens qui ne peu
vent pas même vous laisser un bonheur
dont ils ne voudraient.point.
L'un des cousins de Maurice, le comte
Adolphe de Melcy, crut Convenable pour lui
.de faire la cour à la marquise deVa'rville;
son frère donnait chez les lorettes; il aurait,
lui, trouvé bon d'afficher sa cousine; il eût
peut-être ainsi gagné ses éperons de cheva
lier de' la faskion. Il était dans sa destinée
d'être toujours un fat mal réussi. Du reste
il était du nombre de ces hommes qui détes
tent les femmes d'esprit... Il sentait qu'elles
devaient se moquer de- ses prétentions, et
qu'il ne pouvait être impunément un sot de
vant elles.
Quelque insignifiantes que_ fussent ses
assiduités, elles, déplaisaient à Théodore :
H'homme l'ennuyait, et ■ sa présence gênait"
j la conversation. Un ennuyeux:glace tout, et
\ un prétentieux apporte la gène, qui est un
i degré de plus à l'ennui. Il devint insuppor-
I table, et ne s'en douta seulement pas.Quand
la conversation languissait à cause dè lui, il
essayait de" la ranimer paV quelque anec
dote de coulisse, quelque bon mot de lorette
en vogue; mais la liberté du propos^ et son
inopportunité daps cette chaste reunion,im
primaient un malaise général, dont il ne de-
vinait-pas la cause; car lès jeunes gens de'
notre temps se sont habitués à un travers
qui n'avait jamais exisfé jusqu'à ce mo
ment : c'est d'apporter, dans la bonne com
pagnie, jusqu'au rebut de l'esprit de la mau
vaise.; .
, M. Adolphe de Melcy connaissait Théodore
«..peér l'avoir rencontré chez son cousin Mau
rice. Sa vue l'avait même déjà déconcerté
plus d'une fois, et il éprouvait en sa présen
ce ce respect involontaire que la friyolité su
bit malgré elle en face du mérite, et dont
. elle sé venge ensuite en le dénigrant;
Parfois aussi M. de Melcy se révoltait con
tre cette influence de Théodore, et essayait
de s'en venger par ces ironiques sarcasmes
et ces plaisanteries voltairiennes» tant usées
contre le fanatisme des idées religieuses';
mais quelques mots simples et calmes pro
noncés par Théodore le réduisaient vite au
silence. .
Valentin venait aussi quelquefois le soir;
mais on lui permettait d'avoir mauvais ton
et de dire des choses inconvenantes. Il était
si gai, si amusant, et il promettait si vive
ment d'aider Fernand dang ses ambitions lit
téraires, qu'on le voyait avec plaisir.
Il riait lui-même de bon cœur en disant à
« Fernand :
I — Mais personne ne parlera pi de vous,
ni de vos ouvrages, si vous n'en parlez pas
le premier; qui donc apprendrait au public
qu'ils existent? Ceux- qui écrivent n'en diront
rien' et surtout ne vous loueront pas. Ce se
rait se faire un rival, ils s'en garderont bien/
Fernand répondait tranquillement :
—Vous voyez en m al.' Vous valez tous mieux
que vous ne dites; d'ailleurs, moi je l'avoue,
si j'ai des ambitions, si j'aimé la gloire, c'est
celle-là seulement qui naît d'une reconnais
sance durable et méritée çfe la part de mes
semblables, pour de bons et utiles ouvragés;
non celle qui viendrait de bruits momenta
nés et provoqués par moi.
Et Valentjn riait encore en s'écriant : '
— Vous avez le temps d'attendre avec vos
vertus, mon bon Monsieur Fernand ! Qujnd
nous, qui crions tous les matins au publié :
Nous sommes des gens de génie T.ne liséz
que nous ! ne croyez que nous ! il nous ar
rive souvent de n attrapper que l'attentiôii
des sots, et de voir les geiis de mérite ne
pas même lire n*os ouvrages!... Au reste,
ajoutait-il, toujours' riant et joyeux, c'est
peut-être ce que les gens raisonnables peu
vent faire de mieux pour eux et pour nous.
Ce charlatanisme cartes sur table en se
moquant de soi-même, comme des autres,
et qui a été très fréquent de nos jours, cau
sait à la bonne et honnête conscience de
Fernand une inexprimable surprise. Et Va-
lentïn, animé par le succès d'étonnement
qu'il obtenait, ajouta : .
— Mais ce n'est pas assez de dire du biea
de soi, il faut encore dire du mal des autres.
Oh s'adrèsse ainsi aux mauvais sentimens,
qui ne sont pas difficiles sur la qualité de
ce qu'on leur sért; et quand vous blâmez
ayee moitié moins d'esprit, vous avez deux
fois plus de succès que si vous donniez un
éloge. Je sais bien qu'avec tout cela, il y en
a qui parlent de vertu, qui vantent leur
conscience ; mais ne serait-ce pas comme ces
marchands qui vantent de mauvaises mar
chandises dont ils voudraient se défaire à un
bon prix ?
v Quand, il y a dix ans, j'arrivai à Paris,
j'avais une lettre pouf le patriarche de la
littérature, M. de Chateaubriand, et, bien
qu'on m'eût dit qu'il ne prenait plus aucun
intérêt à-ce qui se passait autour de lui et
ne se souciait plus de rien, je visbi'enlôtque
cette ame, qu'on croyait usée, n'était que dé
goûtée, et qu'elle cachait sous le dédain une'
profonde sensibilité blessée , mais non pas
eteinte. -- -
; Il vit, à mon émotion et à quelques mots
qui m'échappèrent, qu'il était compris, et
son ame s'ouvrit. Alors, toutes ses paroles
furent admirables. • •
Après une assez longue conversation, il
termina ainsi :
— Vous voulez écrire, dit-il, et je pense
que c'est pour exprimer des pensées élevées
et des inspirations délicates. Vous, livrerez
donc de belles fleurs à des mains malfaisan
tes, qui les souilleront; car c'est tout ce
qu'on peut attendre de la société dans la
quelle nous vivons, ou plutôt vous vivez,
car moi je ne vis plus, j'assiste encore, sans
y prendre part, a ce. monder.quife décom-'
pose et tend, comme moy fin, - -,
,3e ne pus m'erppécher 'dè.'faire, un- mou^
vement. qui l'interrompit., mais il reprit
ainsi :
. — Quand une société ou un e doctrine réu
nit les suffrages de tous, c'est à qui soutien-
,dra l'édifice moral dont chacun attend sa sé
curité. Alors, si vçus publiez" un livre utile,
noble dans ses sen timens, généreux dans ses
idées, et d'une haute beauté morale, vous
arrive^, par la sympathie, a une gloire véri
table, darls cette société qui'se fortifie de
tout ce qui est bien, ét accorde en renom
mée à l'écrivain à proportion de ce qu'elle
reçoit en dignité, en puissance'ou en force
de ses ouvrages. Maïs il n'elr est point
ainsi dans nos jours de baine, de dis
corde ët de révolutions. Toute œuvre
honnête,, et par conséquent amie et sou
tien de l'ordre, est déclarée stupide, et
, son ,auteur poursuivi d'outrages et de sar
casmes; tandis que l'ouvrage insensé, n'ayant
ni talent, ni mérite, mais attaquant quelques
lois ou quelques principes, force vitale de la
société, est prôné, par l'espoir qu'il peut
contribuer à la détruire.
Comme je voulais réclamer contre un ju
gement si sévère, Chateaubriand ajouta :
Si j'avais un conseil à donner à un jeune*
homme, je lui dirais : Retirez-vous de cette
mêlée qui vous écraserait, et gardez dans la
retraite un saint amour du bien, pour le
jour où l'on reconnaîtra'qu'il, est temps d'ar
rêter la France sur le penchant où elle va"
rouler, de révolutions en révolutions, dans,
cet abîme- au fond duquel se sont englou
ties tant de sociétés disparues au milieu des
ruines.
Le poète "se montrait dans ces paroles de
Chateaubriand; et il m'emportait dans la
sphère de ses idées. Peut-être eussé-je bien
fait de m'y tenir.... mais... mais... il y adix
ans, et les révolutions alors ne semblaient
pas près de finir ! J'étais impatient d'écrire
et je ne voulais par être martyr- de ma
vertu.
Alors, ma foi, continua-t-il avec'un g^ste <
de gaîté et d'insouciance, je ne voulus écri
re ni pour desagesnipour de folles pensées,
et je me décidai à faire comme bien d'autres
de la littérature ïrfecs.
Cela "réussit bien, je me suis £ait un nom,
une fortune, des amis; et je me moque du
reste,
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