Titre : Revue contemporaine
Éditeur : [s.n.?] (Saint-Pétersbourg)
Date d'édition : 1913-03-23
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328566919
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 10050 Nombre total de vues : 10050
Description : 23 mars 1913 23 mars 1913
Description : 1913/03/23 (A4,T11,N74). 1913/03/23 (A4,T11,N74).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6248059w
Source : Bibliothèque nationale de France, département Littérature et art, 8-Z-18251
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 24/06/2013
17 (j
joailliers patients nous creusent des cuvettes en
onyx, en porphyre, en agate. Craignant d'alourdir
nos goussets, d'autres orfèvres placent les méca-
nismes délicats des chronomètres dans de petits
écrins de bois rare: thuya, bois de rose et de teck.
Plus la fibre est légère, plus l'aubier est transparent
et plus il est chic. C'est à qui montrera une mon-
tre cachée dans la minceur irréelle d'une pelure
d'oignon.
Des artistes estimés encouragent ces tendances,.
et tel ciseleur réputé agrémente l'envers de nos
montres d'entailles orécieuses symbolisant des scè-
nes antiques inspirées de la fuite du temps: la Ronde
des heures, la Danse des minutes, le Tango des se-
condes.
En face du chiffre VI s'épanouit un tableautin
en relief évoquant Y Heure du Berger tandis qu'au mi-
lieu resplendit VHeure du Muletier.
Il y a aussi les Heures moroses, la Première
heure, la Dernière heure. Il y a le Quart d'heure de
Rabelais.
Ces tendances particularistes s'affirment par maints
détails charmants qui naissent chaque jour sous l'in-
fluence de la Muse, de l'Esprit et du scepticisme des
blasés.
*
* *
Nos bons chauffeurs ne perdent pas une occa-
sibn de soigner leur popularité. Au cours de cette
semaine ils ont culbuté une trentaine de paisibles
'passants qui malencontreusement gênaient leurs sa-
vants virages. Trois Don Quichottes ont voulu s'op-
poser à la marche des tramways et se sont précipi-
tés résolument à leur rencontre sans autorisation pré-
alable d'aucune sorte, de la part de leurs voyageurs.
Un professionnel du volant qui s'intitule Profes-
seur, désireux d'en imposer à ses élèves, a tenté de
franchir d'un bond la Fontanka; résultat: un blessé,
deux côtes enfoncées, un bain glacé et la voiture en
miettes.
Deux énergumènes réclament une taxe pure-
ment fantaisiste; pour calmer l'indignation de leurs
clients, ils mettent pied à terre et imposent leur ta-
rif arbitraire à coups de poings.
Un Don Juan escarpe passe à dessein par une
rue sombre, simule la panne, pénètre dans le taxi,
dévalise la voyageuse qui n'a que le temps pour
échapper à de plus expressives perquisitions de s'en-
fuir vers le premier dvornik venu qui sans vergogne
achève de la. rassurer.
Nos chauffeurs n'ont plus rien à envier à leurs
émules de Berlin, de Paris et de Londres.
Et dire, après tout cela, et bien d'autres avatars
encore, que le taxi reste le rêve doré des petites
actrices et des jeunes gens. Le tangage de ce véhicule,
peut seul autoriser cette préférence.
Jacques Chambon-Dupré
Six ans de vie politique
(Suite1)
Un autre fait, qui mérite aussi d'être pris en
considération, c'est qu'au cours de ces dernières an-
nées, le nombre de personnes, parvenues à économi-
ser, s'est augmenté dans des proportions les plus
étendues, accroissement dont il est possible de juger
d'après le nombre de livrets délivrés. Au cours de
cinq ans, de 1905 à 1910, le nombre de livrets s'est
augmenté presque de tout le chiffre de la plus-value
réalisée pendant dix ans, de 1891 à 1900, pour
constituer, en 1911, environ 71/- millions de livrets.
Or, pendant le même espace de temps, la population
a fait acquisition de grandes quantités de terres,
opération qui a drainé une partie considérable de
l'épargne.
Il est impossible de passer sous silence encore
un autre facteur, d'une incontestable influence sur
toutes ces questions: la cherté croissante de la vie au
sujet de laquelle, de tous côtés, s'élèvent des doléan-
ces. Quelles sont la nature de ce facteur, ses vraies
causes et ses conséquences économiques: ce sont là
des problèmes réfractaires à des solutions rapides.
Le seul fait indéniable, c'est qu'en comparaison avec
les autres pays la Russie se trouve dans une situa-
tion préférable. Quelques savants supposent qu'il
faut chercher la cause fondamentale du phénomène
dans l'accroissement disproportionné de l'argent et
de la rapidité de sa circulation. Cette explication
signifie que l'argent, par suite de son accroissement,
est devenu meilleur marché, et que, naturellement,
par contre coup, les marchandises sont devenues plus
chères. D'autres savants se prononcent contre l'ex-
plication précédente et se rattachent à l'idée qu'il
convient de chercher la cause essentielle de la cherté
de la vie dans la hausse de prix de la production,
principalement dans la hausse des salaires. Les
savants, dont les investigations se rapprochent le plus
près de la vérité, sont ceux qui. attribuent l'élévation
des prix à l'effet de l'action générale de toute une
série de raisons. Alors que les besoins des Etats et
des peuples augmentent, que la demande s'accroît pour
toutes les marchandises, la quantité de certains pro-
duits diminue naturellement et la fabrication des
autres exige des dépenses plus considérables que ja-
dis. La lutte menée par le travail contre le capital
oblige les capitaux de s'unir, et cette union, qui livre
le marché aux mains des monopoles, provoque tou-
jours sans exception une hausse des prix. La popu-
lation augmente, les villes se développent au préju-
dice des bourgades et des villages: les prix subissent
de ce chef une nouvelle .augmentation.
Bref, les causes sont nombreuses et chacune
exerce son action particulière. Mais, en ce qui con-
cerne spécialement la Russie, il est incontestable que
') Voir le M 7() de la "Revuc Contemporaine".
joailliers patients nous creusent des cuvettes en
onyx, en porphyre, en agate. Craignant d'alourdir
nos goussets, d'autres orfèvres placent les méca-
nismes délicats des chronomètres dans de petits
écrins de bois rare: thuya, bois de rose et de teck.
Plus la fibre est légère, plus l'aubier est transparent
et plus il est chic. C'est à qui montrera une mon-
tre cachée dans la minceur irréelle d'une pelure
d'oignon.
Des artistes estimés encouragent ces tendances,.
et tel ciseleur réputé agrémente l'envers de nos
montres d'entailles orécieuses symbolisant des scè-
nes antiques inspirées de la fuite du temps: la Ronde
des heures, la Danse des minutes, le Tango des se-
condes.
En face du chiffre VI s'épanouit un tableautin
en relief évoquant Y Heure du Berger tandis qu'au mi-
lieu resplendit VHeure du Muletier.
Il y a aussi les Heures moroses, la Première
heure, la Dernière heure. Il y a le Quart d'heure de
Rabelais.
Ces tendances particularistes s'affirment par maints
détails charmants qui naissent chaque jour sous l'in-
fluence de la Muse, de l'Esprit et du scepticisme des
blasés.
*
* *
Nos bons chauffeurs ne perdent pas une occa-
sibn de soigner leur popularité. Au cours de cette
semaine ils ont culbuté une trentaine de paisibles
'passants qui malencontreusement gênaient leurs sa-
vants virages. Trois Don Quichottes ont voulu s'op-
poser à la marche des tramways et se sont précipi-
tés résolument à leur rencontre sans autorisation pré-
alable d'aucune sorte, de la part de leurs voyageurs.
Un professionnel du volant qui s'intitule Profes-
seur, désireux d'en imposer à ses élèves, a tenté de
franchir d'un bond la Fontanka; résultat: un blessé,
deux côtes enfoncées, un bain glacé et la voiture en
miettes.
Deux énergumènes réclament une taxe pure-
ment fantaisiste; pour calmer l'indignation de leurs
clients, ils mettent pied à terre et imposent leur ta-
rif arbitraire à coups de poings.
Un Don Juan escarpe passe à dessein par une
rue sombre, simule la panne, pénètre dans le taxi,
dévalise la voyageuse qui n'a que le temps pour
échapper à de plus expressives perquisitions de s'en-
fuir vers le premier dvornik venu qui sans vergogne
achève de la. rassurer.
Nos chauffeurs n'ont plus rien à envier à leurs
émules de Berlin, de Paris et de Londres.
Et dire, après tout cela, et bien d'autres avatars
encore, que le taxi reste le rêve doré des petites
actrices et des jeunes gens. Le tangage de ce véhicule,
peut seul autoriser cette préférence.
Jacques Chambon-Dupré
Six ans de vie politique
(Suite1)
Un autre fait, qui mérite aussi d'être pris en
considération, c'est qu'au cours de ces dernières an-
nées, le nombre de personnes, parvenues à économi-
ser, s'est augmenté dans des proportions les plus
étendues, accroissement dont il est possible de juger
d'après le nombre de livrets délivrés. Au cours de
cinq ans, de 1905 à 1910, le nombre de livrets s'est
augmenté presque de tout le chiffre de la plus-value
réalisée pendant dix ans, de 1891 à 1900, pour
constituer, en 1911, environ 71/- millions de livrets.
Or, pendant le même espace de temps, la population
a fait acquisition de grandes quantités de terres,
opération qui a drainé une partie considérable de
l'épargne.
Il est impossible de passer sous silence encore
un autre facteur, d'une incontestable influence sur
toutes ces questions: la cherté croissante de la vie au
sujet de laquelle, de tous côtés, s'élèvent des doléan-
ces. Quelles sont la nature de ce facteur, ses vraies
causes et ses conséquences économiques: ce sont là
des problèmes réfractaires à des solutions rapides.
Le seul fait indéniable, c'est qu'en comparaison avec
les autres pays la Russie se trouve dans une situa-
tion préférable. Quelques savants supposent qu'il
faut chercher la cause fondamentale du phénomène
dans l'accroissement disproportionné de l'argent et
de la rapidité de sa circulation. Cette explication
signifie que l'argent, par suite de son accroissement,
est devenu meilleur marché, et que, naturellement,
par contre coup, les marchandises sont devenues plus
chères. D'autres savants se prononcent contre l'ex-
plication précédente et se rattachent à l'idée qu'il
convient de chercher la cause essentielle de la cherté
de la vie dans la hausse de prix de la production,
principalement dans la hausse des salaires. Les
savants, dont les investigations se rapprochent le plus
près de la vérité, sont ceux qui. attribuent l'élévation
des prix à l'effet de l'action générale de toute une
série de raisons. Alors que les besoins des Etats et
des peuples augmentent, que la demande s'accroît pour
toutes les marchandises, la quantité de certains pro-
duits diminue naturellement et la fabrication des
autres exige des dépenses plus considérables que ja-
dis. La lutte menée par le travail contre le capital
oblige les capitaux de s'unir, et cette union, qui livre
le marché aux mains des monopoles, provoque tou-
jours sans exception une hausse des prix. La popu-
lation augmente, les villes se développent au préju-
dice des bourgades et des villages: les prix subissent
de ce chef une nouvelle .augmentation.
Bref, les causes sont nombreuses et chacune
exerce son action particulière. Mais, en ce qui con-
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