Titre : Paix et droit : organe de l'Alliance israélite universelle
Auteur : Alliance israélite universelle. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1932-11-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34423561b
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 2031 Nombre total de vues : 2031
Description : 01 novembre 1932 01 novembre 1932
Description : 1932/11/01 (A12,N9)-1932/11/30. 1932/11/01 (A12,N9)-1932/11/30.
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k61417327
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-68284
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/12/2011
PAIX ET DROIT
hrutale. Non moindre l'antithèse entre les méthodes, d'ordre j
et de discipline chez le militaire, de violence tumultueuse
et sans frein chez le démagogue. Ce que von Schleicher peut
donc espérer de Hitler, c'est moins une collaboration qu'une
trêve, en échange d'avantages et de concessions consentis au
nationalisme allemand, au dedans et au dehors. Quelles
perspectives est-il permis d'entrevoir, pour les Israélites
du Reich, dans l'hypothèse de ce pacte ? N'auraient-ils pas
à craindre d'en devenir les premières victimes ? En poli-
tique, il est toujours téméraire de répondre catégorique- '
ment à une question précise par un simple oui ou par un
simple non. La réalité est plus nuancée.
Il convient d'introduire ici les distinctions nécessaires.
S'il s'agit de tolérer des persécutions actives, des excès, des
voies de fait, des tentatives de pogromes, des troubles san-
glants ou scandaleux contre les israélites, non ! En vertu
des motifs que nous énoncions plus haut, en raison de la
volonté conforme du maréchal qui s'est exprimée nettement
pour réprouver les doctrines et les violences du racisme, le
cabinet Schleicher fera respecter la loi et maintiendra
l'ordre public ; les juifs n'auront rien à redouter pour
leur sécurité personnelle, leurs biens et leurs droits essen-
tiels. Leur statut légal demeurera intangible. À cet égard
ils bénéficieront des directives de la politique générale du
nouveau ministère-
Par ailleurs, von Schleicher, qu'on ne l'oublie pas,
comme les conservateurs dont il a fait ses collègues, ne
saurait manifester des sentiments de sympathie particulière
pour un groupe ethnique dont sa naissance, son milieu social
et sa mentalité atavique l'ont toujours éloigné. Fussent-ils
même doués de l'esprit le plus large, imprégnés du libé-
ralisme le plus moderne, on peut douter qu'en l'état actuel
.. de l'opinion allemande, qu'une furieuse propagande a tra-
vaillée depuis six années, ils osent heurter de front, cette
opinion et braver l'impopularité qui rejjaillirait inévita-
blement sur les « amis des juifs ». Pour s'abandonner à une ;
semblable illusion, il faudrait une ignorance aveugle des
mobiles qui inspirent l'âme médiocre, intéressée et pusilla-
nime des pauvres humains en général et des politiciens en
particulier.
Qu'il conclue donc ou non un pacte avec Hitler, le
général von Schleicher fera, bon gré mal gré, sa part à
l'antisémitisme régnant. Sans doute, les israélites allemands
pourront se prévaloir de l'égalité devant la loi, en prin-
cipe ; mais, dans la réalité, ils retrouveront les différences
de traitement qui caractérisaient le régime antérieur
à 1914. Les carrières administrative, judiciaire, politique,
qui leur furent largement ouvertes après la guerre mondiale,
vont de nouveau se refermer devant leurs ambitions. Leurs
droits ne seront l'objet d'aucune contestation, d'aucune
restriction théorique, mais ils seront pratiquement mécon-
nus, sans phrases, par omission. Plus de promotion, plus
de nomination dans les emplois publics, sauf exception.
L'exclusion de toutes les candidatures juives au Reiehstag
récemment élu, fournit un exemple documentaire de ce
que présage l'avenir. Les fonctionnaires juifs en exercice
conserveront leurs postes, ...à titre précaire ; mais ils au-
ront la préférence sur leurs collègues chrétiens quand il
s'agira de les admettre à une retraite prématurée.
On a dit et beaucoup pensent que le gouvernement von
Schleicher préparait la restauration des Hohenzollem ;
cela est incertain. Ce qui est certain, • c'est qu'en ce qui
concerne les tendances générales aussi bien que la question
juive, même si l'Empereur n'est pas remis en possession
de sa couronne, le régime impérial est rétabli.
Le circuit antijuif
Depuis une semaine, les pays de l'Europe Centrale et
Orientaie sont retombés dans une de ces crises d'antisé-
mitisme aigu et sanglant dont ils sont coutumes. La Polo-
gne a donné le premier signal ; la Hongrie a entendu et a
fourni aussitôt sa réplique. L'Autriche est prête à se join-
dre au choeur. La Roumanie ne l'a jamais quitté. Partout,
sur le Danube comme sur la Vistule, c'est la même cause
et par le même processus qui crée sous un prétexte quel-
conque, futile ou sérieux, réel ou supposé, des incidents qui
dégénèrent en rixes, pour finir par des batailles de rue,
des pillages de magasins, des blessures et des meurtres.
C'est la même cause, ta peur de la concurrence, juive qui
jette les unes contre les autres les jeunesses universitaires,
que les mêmes études, la symbiose de travail, l'amour
commun de la science, devraient, réunir dans un même
idéal. ; qui les précipite dans les voies du plus étroit égoïsme,
à un âge qui devrait ignorer les bas calculs, et ne connaître
que l'effort désintéressé et les nobles émulations.
Contre cette concurrence, le fair play, le travail indi-
viduel ne suffisent, pas à ces jeunes gens ; ils n'ont pas
honte de faire appel au bras séculier, à l'arme de la loi, ou
plutôt à l'iniquité du numerus clausus qui handicape
désespérément leurs rivaux et leur permet d'en triompher
sans péril et sans gloire.
Aujourd'hui, ce sont les étudiants polonais qui deman-
dent l'établissement du numerus clausus, pendant que les
étudiants magyars en regrettent la disparition et en récla-
ment le retour, comme s'ils étaient inconscients du complexe
d'infériorité qu'avoue semblable revendication. Les uns, à
Debreczen, les autres à Lovf, à Craeovie, à Vilno, à Czens-
tokova et en mainte autre ville, procèdent avec le même
cynisme et la même cruauté. Les correspondances et les
informations, publiées ci-dessous, font ressortir avec évi-
dence que l'antisémitisme n'est pas seulement une doctrine
de démence et de crime, mais aussi un moyen politique,
une arme d'opposition. Le parti national-démocrate en
Pologne, comme les « Magyars éveillés » en Hongrie, s'est
fondé sur un double sentiment ; la haine ancestrale du juif
et la jalousie contre un concurrent redouté ; mais il s'y
ajoute aussi la volonté de faire échec au gouvernement de
Pilzudski, lequel encore que très peu favorable aux israé-
lites, n'a pas adopté comme sien le programme de l'exter-
mination systématique et totale. Le gouvernement de Var-
sovie laisse le fisc accabler la population juive sous le
poids d'impôts excessifs, l'évincé de toutes les coopératives,
lui ferme l'accès aux emplois publics, lui refuse toute aide
par les institutions de crédit, ruine le commerce juif par
la multiplication des monopoles d'Etat ; cette fois, par
hasard, comme son intérêt politique s'accorde avec la sécu-
rité et la protection des juifs, comme les agresseurs sont
aussi les adversaires acharnés de sa politique, il s'est décidé
à défendre les juifs en même temps que lui-même. C'est un
hasard dont ils ont eu le bénéfice, et non l'application du
droit commun que la Constitution polonaise leur promet,
mais que jusqu'à ce jour les moeurs ne leur ont pas encore
assuré.
Un exclusivisme aussi étroit, aussi irréductible,, n'est
pas sans étonner dans une nation qui a eu elle-même tant à
.souffrir de la persécution religieuse et politique et qui a
si bien su projeter l'écho de ses souffrances dans les
consciences les plus hautes et les coeurs les plus généreux
de l'Europe civilisée. On se demande quelles épreuves nou-
velles lui seront nécessaires pour lui révéler les lois supé-
rieures, non écrites, qu'invoque Antigone dans la tragédie
antique, et d'où découlent les éternels devoirs de justice et
d'humanité. Alfred BERL.
hrutale. Non moindre l'antithèse entre les méthodes, d'ordre j
et de discipline chez le militaire, de violence tumultueuse
et sans frein chez le démagogue. Ce que von Schleicher peut
donc espérer de Hitler, c'est moins une collaboration qu'une
trêve, en échange d'avantages et de concessions consentis au
nationalisme allemand, au dedans et au dehors. Quelles
perspectives est-il permis d'entrevoir, pour les Israélites
du Reich, dans l'hypothèse de ce pacte ? N'auraient-ils pas
à craindre d'en devenir les premières victimes ? En poli-
tique, il est toujours téméraire de répondre catégorique- '
ment à une question précise par un simple oui ou par un
simple non. La réalité est plus nuancée.
Il convient d'introduire ici les distinctions nécessaires.
S'il s'agit de tolérer des persécutions actives, des excès, des
voies de fait, des tentatives de pogromes, des troubles san-
glants ou scandaleux contre les israélites, non ! En vertu
des motifs que nous énoncions plus haut, en raison de la
volonté conforme du maréchal qui s'est exprimée nettement
pour réprouver les doctrines et les violences du racisme, le
cabinet Schleicher fera respecter la loi et maintiendra
l'ordre public ; les juifs n'auront rien à redouter pour
leur sécurité personnelle, leurs biens et leurs droits essen-
tiels. Leur statut légal demeurera intangible. À cet égard
ils bénéficieront des directives de la politique générale du
nouveau ministère-
Par ailleurs, von Schleicher, qu'on ne l'oublie pas,
comme les conservateurs dont il a fait ses collègues, ne
saurait manifester des sentiments de sympathie particulière
pour un groupe ethnique dont sa naissance, son milieu social
et sa mentalité atavique l'ont toujours éloigné. Fussent-ils
même doués de l'esprit le plus large, imprégnés du libé-
ralisme le plus moderne, on peut douter qu'en l'état actuel
.. de l'opinion allemande, qu'une furieuse propagande a tra-
vaillée depuis six années, ils osent heurter de front, cette
opinion et braver l'impopularité qui rejjaillirait inévita-
blement sur les « amis des juifs ». Pour s'abandonner à une ;
semblable illusion, il faudrait une ignorance aveugle des
mobiles qui inspirent l'âme médiocre, intéressée et pusilla-
nime des pauvres humains en général et des politiciens en
particulier.
Qu'il conclue donc ou non un pacte avec Hitler, le
général von Schleicher fera, bon gré mal gré, sa part à
l'antisémitisme régnant. Sans doute, les israélites allemands
pourront se prévaloir de l'égalité devant la loi, en prin-
cipe ; mais, dans la réalité, ils retrouveront les différences
de traitement qui caractérisaient le régime antérieur
à 1914. Les carrières administrative, judiciaire, politique,
qui leur furent largement ouvertes après la guerre mondiale,
vont de nouveau se refermer devant leurs ambitions. Leurs
droits ne seront l'objet d'aucune contestation, d'aucune
restriction théorique, mais ils seront pratiquement mécon-
nus, sans phrases, par omission. Plus de promotion, plus
de nomination dans les emplois publics, sauf exception.
L'exclusion de toutes les candidatures juives au Reiehstag
récemment élu, fournit un exemple documentaire de ce
que présage l'avenir. Les fonctionnaires juifs en exercice
conserveront leurs postes, ...à titre précaire ; mais ils au-
ront la préférence sur leurs collègues chrétiens quand il
s'agira de les admettre à une retraite prématurée.
On a dit et beaucoup pensent que le gouvernement von
Schleicher préparait la restauration des Hohenzollem ;
cela est incertain. Ce qui est certain, • c'est qu'en ce qui
concerne les tendances générales aussi bien que la question
juive, même si l'Empereur n'est pas remis en possession
de sa couronne, le régime impérial est rétabli.
Le circuit antijuif
Depuis une semaine, les pays de l'Europe Centrale et
Orientaie sont retombés dans une de ces crises d'antisé-
mitisme aigu et sanglant dont ils sont coutumes. La Polo-
gne a donné le premier signal ; la Hongrie a entendu et a
fourni aussitôt sa réplique. L'Autriche est prête à se join-
dre au choeur. La Roumanie ne l'a jamais quitté. Partout,
sur le Danube comme sur la Vistule, c'est la même cause
et par le même processus qui crée sous un prétexte quel-
conque, futile ou sérieux, réel ou supposé, des incidents qui
dégénèrent en rixes, pour finir par des batailles de rue,
des pillages de magasins, des blessures et des meurtres.
C'est la même cause, ta peur de la concurrence, juive qui
jette les unes contre les autres les jeunesses universitaires,
que les mêmes études, la symbiose de travail, l'amour
commun de la science, devraient, réunir dans un même
idéal. ; qui les précipite dans les voies du plus étroit égoïsme,
à un âge qui devrait ignorer les bas calculs, et ne connaître
que l'effort désintéressé et les nobles émulations.
Contre cette concurrence, le fair play, le travail indi-
viduel ne suffisent, pas à ces jeunes gens ; ils n'ont pas
honte de faire appel au bras séculier, à l'arme de la loi, ou
plutôt à l'iniquité du numerus clausus qui handicape
désespérément leurs rivaux et leur permet d'en triompher
sans péril et sans gloire.
Aujourd'hui, ce sont les étudiants polonais qui deman-
dent l'établissement du numerus clausus, pendant que les
étudiants magyars en regrettent la disparition et en récla-
ment le retour, comme s'ils étaient inconscients du complexe
d'infériorité qu'avoue semblable revendication. Les uns, à
Debreczen, les autres à Lovf, à Craeovie, à Vilno, à Czens-
tokova et en mainte autre ville, procèdent avec le même
cynisme et la même cruauté. Les correspondances et les
informations, publiées ci-dessous, font ressortir avec évi-
dence que l'antisémitisme n'est pas seulement une doctrine
de démence et de crime, mais aussi un moyen politique,
une arme d'opposition. Le parti national-démocrate en
Pologne, comme les « Magyars éveillés » en Hongrie, s'est
fondé sur un double sentiment ; la haine ancestrale du juif
et la jalousie contre un concurrent redouté ; mais il s'y
ajoute aussi la volonté de faire échec au gouvernement de
Pilzudski, lequel encore que très peu favorable aux israé-
lites, n'a pas adopté comme sien le programme de l'exter-
mination systématique et totale. Le gouvernement de Var-
sovie laisse le fisc accabler la population juive sous le
poids d'impôts excessifs, l'évincé de toutes les coopératives,
lui ferme l'accès aux emplois publics, lui refuse toute aide
par les institutions de crédit, ruine le commerce juif par
la multiplication des monopoles d'Etat ; cette fois, par
hasard, comme son intérêt politique s'accorde avec la sécu-
rité et la protection des juifs, comme les agresseurs sont
aussi les adversaires acharnés de sa politique, il s'est décidé
à défendre les juifs en même temps que lui-même. C'est un
hasard dont ils ont eu le bénéfice, et non l'application du
droit commun que la Constitution polonaise leur promet,
mais que jusqu'à ce jour les moeurs ne leur ont pas encore
assuré.
Un exclusivisme aussi étroit, aussi irréductible,, n'est
pas sans étonner dans une nation qui a eu elle-même tant à
.souffrir de la persécution religieuse et politique et qui a
si bien su projeter l'écho de ses souffrances dans les
consciences les plus hautes et les coeurs les plus généreux
de l'Europe civilisée. On se demande quelles épreuves nou-
velles lui seront nécessaires pour lui révéler les lois supé-
rieures, non écrites, qu'invoque Antigone dans la tragédie
antique, et d'où découlent les éternels devoirs de justice et
d'humanité. Alfred BERL.
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