Titre : France-Maroc : revue mensuelle illustrée : organe du Comité des foires du Maroc / directeur Alfred de Tarde
Auteur : Comité des foires du Maroc. Auteur du texte
Éditeur : [s.n.] (Rabat)
Date d'édition : 1922-12-01
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32777958s
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 6556 Nombre total de vues : 6556
Description : 01 décembre 1922 01 décembre 1922
Description : 1922/12/01 (A6,N73)-1922/12/31. 1922/12/01 (A6,N73)-1922/12/31.
Description : Collection numérique : Originaux conservés à... Collection numérique : Originaux conservés à l'INHA
Description : Collection numérique : Bibliothèque Francophone... Collection numérique : Bibliothèque Francophone Numérique
Description : Collection numérique : Zone géographique :... Collection numérique : Zone géographique : Afrique du Nord et Moyen-Orient
Description : Collection numérique : Thème : L'histoire partagée Collection numérique : Thème : L'histoire partagée
Description : Collection numérique : Protectorats et mandat... Collection numérique : Protectorats et mandat français
Description : Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique... Collection numérique : Bibliothèque Diplomatique Numérique
Description : Collection numérique : Arts Collection numérique : Arts
Description : Collection numérique : Littérature Collection numérique : Littérature
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k61203127
Source : Bibliothèque de l'INHA / coll. J. Doucet, 2010-103818
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 07/02/2011
MES PRISONS
315
plus le droit de regarder des chiens de chrétiens ! ! ! »
C'était tout à fait rassurant.
Enfin, après deux longues heures d'attente on nous
menait dans une écurie où se trouvaient réunis Hira,
Najem et les principaux soutiens du Mahdi, qui avec
une obséquiosité de commande nous offraient du
thé. A l'aube on nous introduisait dans une petite
chambre de 4 mètres sur 4, donnant sur une petite
cour, juste à l'entrée des appartements particuliers
du Sultan. Ce devait être notre prison pendant
3 semaines.
El Hadj Thami ne nous avait pas abandonné et
restait avec nous. Dans la matinée en venait nous
faire subir une espèce d'interrogatoire d'identité.
Thami nous quittait ainsi que Si Mohammed Desauty,
interprète du consul. Si Kouadi, sur l'observation
qu'étant musulman il pouvait s'en aller, répondait
très noblement qu'officier Français, il restait avec ses
camarades.
Ainsi commençait notre captivité.
Hira et Najem venaient le lendemain nous voir et
nous annoncer que a Sidna » allait recevoir le consul
pour lui demander d'écrire au Résident général de
faire repasser l'Oum-er-Rebia aux troupes françaises
et que ce ne serait qu'après ce retrait qu'on pourrait
parler de notre libération.
Les Glaoua nous envoyèrent des tapis, des
coussins, des couvertures, quelques objets de toilette
laissés chez eux dans nos bagages, des cartes de
bridge, du papier, de l'encre, etc. On les autorisait
aussi à nous faire apporter matin et soir la
« mouna », l'ordinaire du Mahdi, que nous avions été
obligés de subir un jour, étant peu ragoûtant.
En somme notre captivité s'annonçait très suppor-
table. Nos gardiens peu farouches, aimables même,
se liant facilement ej: aimant à nous parler de leur
pays la Mauritanie et du général Gouraud très
populaire parmi eux. Ce n'étaient pas du tout les
terribles hommes bleus que nous supposions ! Les
reliefs des mounas abondantes des Glaoua que nous
leur abandonnions et qu'ils trouvaient bien supé-
rieures à celles qu'on leur fournissait, avaient vite
fait de les apprivoiser, quoi qu'ils fussent bien
embêtants, car en temps de Ramadan ils passaient
leurs nuits à manger, à boire, à crier et à chanter
pendant des heures, d'un ton monotone et obsédant
à la fin, leur formule liturgique « La ila allah allah »,
n'ajoutant pas « Mohammed Rasoul allah » : El Hiba
étant Mahdi.
Ils s'étonnaient que Kouadi, un musulman, ne
pratiquât pas le jeûne, mais ce dernier touiours très
digne, leur répliquait non sans ironie, que de même
aue les malades et les voyageurs étaient dispensés
du jeûne, les prisonniers l'étaient aussi. Ils se
récriaient tous devant ce raisonnement, déclarant que
nous n'étions nullement des prisonniers, mais qu'au
contraire, c'était dans notre intérêt que Sidna nous
avait pris au Dar Maghzen sous sa protection, car
les gens de Marrakech nous voulaient du mal. C'était
en somme une théorie comme une autre.
Quand nous leur parlions d'El Hiba, nous
employions toujours au lieu de l'expression protoco-
laire de « Sidna » l'expression « Sid koûm » qui ne
l'était guère, à la grande terreur de Maigret qui
redoutait les pires calamités de ce peu de respect
pour le nouveau Sultan.
En causant avec nos gardiens nous avions quelques
Nous relevons, dans l'article reproduit ici, les erreurs suivantes:
1° la casbah du Glaoui est à Telouet, dans l'Atlas, et non à
Marrakech ; 2° le portrait du Colonel Mangin est celui de Mangin,
chef de la mission militaire auprès du Sultan et non le Colonel
Mangin, notre libérateur, général actuellement ; 3° le portrait du
Dr Guichard est absolument jantaisiste.
rares renseignements sur le monde extérieur, ren-
seignements souvent plus ou moins erronés ou
déformés. Ils nous apprenaient la constitution du
nouveau Maghzen, avec Aida ould Mouïs aux Affaires
étrangères, Larbi Derdouri Alaf, Mohammed El Hira
à la Justice, Mrobi Robo, frère du Sultan, géné-
ralissime, etc.
Nous entendions de vagues échos de ce qui se
passait au Dar Maghzen. Chaque matin nous par-
venaient les bruits et les acclamations de la foule
quand El Hiba faisait la Maghzenia dans la petite
construction en bois qui se trouve à l'entrée du
palais et qui sert encore au Sultan, ou quand les
tribus ralliées lui apportaient la « hedia ». A ces
cérémonies prenait souvent part la musique du
Mtougui, car en ces temps lointains le vieux baron
avait une musique personnelle qui jouait des airs
européens et de drôles de marches militaires, sans
oublier une inénarrable parodie de la Marseillaise,
sans doute en notre honneur ! ! !
Si Mohammed El Biaz, chaouri d'El Hadj Thami,
était chargé de nous apporter matin et soir notre
nourriture. Très intelligent, très dévoué aux Glaoua,
malin comme un singe, il savait nous faire passer
au nez des geôliers qui n'y voyaient goutte, soit
dans ses babouches laissées sur le seuil, soit dans
le kouskous, des notes de Fiori ou des lettres venant
de la côte. C'est ainsi que nous en parvenaient
deux, du commandant Berriau et du commandant
Poeymirau, cette dernière avec un post-scriptum du
général Lyautey nous annonçant qu'on s'occupait de
nous, le Mtougui en particulier.
2
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plus le droit de regarder des chiens de chrétiens ! ! ! »
C'était tout à fait rassurant.
Enfin, après deux longues heures d'attente on nous
menait dans une écurie où se trouvaient réunis Hira,
Najem et les principaux soutiens du Mahdi, qui avec
une obséquiosité de commande nous offraient du
thé. A l'aube on nous introduisait dans une petite
chambre de 4 mètres sur 4, donnant sur une petite
cour, juste à l'entrée des appartements particuliers
du Sultan. Ce devait être notre prison pendant
3 semaines.
El Hadj Thami ne nous avait pas abandonné et
restait avec nous. Dans la matinée en venait nous
faire subir une espèce d'interrogatoire d'identité.
Thami nous quittait ainsi que Si Mohammed Desauty,
interprète du consul. Si Kouadi, sur l'observation
qu'étant musulman il pouvait s'en aller, répondait
très noblement qu'officier Français, il restait avec ses
camarades.
Ainsi commençait notre captivité.
Hira et Najem venaient le lendemain nous voir et
nous annoncer que a Sidna » allait recevoir le consul
pour lui demander d'écrire au Résident général de
faire repasser l'Oum-er-Rebia aux troupes françaises
et que ce ne serait qu'après ce retrait qu'on pourrait
parler de notre libération.
Les Glaoua nous envoyèrent des tapis, des
coussins, des couvertures, quelques objets de toilette
laissés chez eux dans nos bagages, des cartes de
bridge, du papier, de l'encre, etc. On les autorisait
aussi à nous faire apporter matin et soir la
« mouna », l'ordinaire du Mahdi, que nous avions été
obligés de subir un jour, étant peu ragoûtant.
En somme notre captivité s'annonçait très suppor-
table. Nos gardiens peu farouches, aimables même,
se liant facilement ej: aimant à nous parler de leur
pays la Mauritanie et du général Gouraud très
populaire parmi eux. Ce n'étaient pas du tout les
terribles hommes bleus que nous supposions ! Les
reliefs des mounas abondantes des Glaoua que nous
leur abandonnions et qu'ils trouvaient bien supé-
rieures à celles qu'on leur fournissait, avaient vite
fait de les apprivoiser, quoi qu'ils fussent bien
embêtants, car en temps de Ramadan ils passaient
leurs nuits à manger, à boire, à crier et à chanter
pendant des heures, d'un ton monotone et obsédant
à la fin, leur formule liturgique « La ila allah allah »,
n'ajoutant pas « Mohammed Rasoul allah » : El Hiba
étant Mahdi.
Ils s'étonnaient que Kouadi, un musulman, ne
pratiquât pas le jeûne, mais ce dernier touiours très
digne, leur répliquait non sans ironie, que de même
aue les malades et les voyageurs étaient dispensés
du jeûne, les prisonniers l'étaient aussi. Ils se
récriaient tous devant ce raisonnement, déclarant que
nous n'étions nullement des prisonniers, mais qu'au
contraire, c'était dans notre intérêt que Sidna nous
avait pris au Dar Maghzen sous sa protection, car
les gens de Marrakech nous voulaient du mal. C'était
en somme une théorie comme une autre.
Quand nous leur parlions d'El Hiba, nous
employions toujours au lieu de l'expression protoco-
laire de « Sidna » l'expression « Sid koûm » qui ne
l'était guère, à la grande terreur de Maigret qui
redoutait les pires calamités de ce peu de respect
pour le nouveau Sultan.
En causant avec nos gardiens nous avions quelques
Nous relevons, dans l'article reproduit ici, les erreurs suivantes:
1° la casbah du Glaoui est à Telouet, dans l'Atlas, et non à
Marrakech ; 2° le portrait du Colonel Mangin est celui de Mangin,
chef de la mission militaire auprès du Sultan et non le Colonel
Mangin, notre libérateur, général actuellement ; 3° le portrait du
Dr Guichard est absolument jantaisiste.
rares renseignements sur le monde extérieur, ren-
seignements souvent plus ou moins erronés ou
déformés. Ils nous apprenaient la constitution du
nouveau Maghzen, avec Aida ould Mouïs aux Affaires
étrangères, Larbi Derdouri Alaf, Mohammed El Hira
à la Justice, Mrobi Robo, frère du Sultan, géné-
ralissime, etc.
Nous entendions de vagues échos de ce qui se
passait au Dar Maghzen. Chaque matin nous par-
venaient les bruits et les acclamations de la foule
quand El Hiba faisait la Maghzenia dans la petite
construction en bois qui se trouve à l'entrée du
palais et qui sert encore au Sultan, ou quand les
tribus ralliées lui apportaient la « hedia ». A ces
cérémonies prenait souvent part la musique du
Mtougui, car en ces temps lointains le vieux baron
avait une musique personnelle qui jouait des airs
européens et de drôles de marches militaires, sans
oublier une inénarrable parodie de la Marseillaise,
sans doute en notre honneur ! ! !
Si Mohammed El Biaz, chaouri d'El Hadj Thami,
était chargé de nous apporter matin et soir notre
nourriture. Très intelligent, très dévoué aux Glaoua,
malin comme un singe, il savait nous faire passer
au nez des geôliers qui n'y voyaient goutte, soit
dans ses babouches laissées sur le seuil, soit dans
le kouskous, des notes de Fiori ou des lettres venant
de la côte. C'est ainsi que nous en parvenaient
deux, du commandant Berriau et du commandant
Poeymirau, cette dernière avec un post-scriptum du
général Lyautey nous annonçant qu'on s'occupait de
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