Titre : La Malle : journal de l'île de La Réunion : paraissant le jeudi et le dimanche
Éditeur : [s.n.] (Saint-Denis)
Date d'édition : 1867-01-13
Contributeur : Rastoul, Alfred (1832-1905). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb328111520
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Description : 13 janvier 1867 13 janvier 1867
Description : 1867/01/13 (A8,N628). 1867/01/13 (A8,N628).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : BIPFPIG974 Collection numérique : BIPFPIG974
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6004928m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Droit, économie, politique, JO-3044
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 28/01/2020
N° 628.
Dimanche 13 Janvier 1867.
8 m '’ Année.
psix de i - ABrm»fïï
PAYABLE n’A ' l
| Pour l’année c.
I Pour six mois 27 fr.
pour trois mois 15 fr.
i Maurice (un an) 50 fr.
i n Avmrro i 1 fr.
S’adresser A M. A. I.EFORT
Directeur-Gérant,
pour tout ce qui concerne le journal.
( Affranchir .)
<»!V S’ABONNE:
■SAINT-DENIS», RUE LA BOURDONNAIS, N" 33.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE
rHIX DES INSERTIONS :
Annonces 50 c. la ligne
Réclame- 1 fr. —
. -s annnm'fii soin reçues le mercredi
-t le sa. ued jusqu'à midi.
S'adresser à M. A. LEFORT
Directeur-Gérant,
pour tout ce qui concerne le journal,
i Affranchir.)
PAR ARRÊTÉ DU 17 DÉCEMBRE 1866
Les Annonces legales et judiciaires peuvent être insérées dans tous les journaux de la Colonie.
BUREAUX
jT — — :
DIRECTION DE L’INTERIEUR
AVIS
' L’administration a reçu une caisse de graines de
vers à soie du Japon.
| Ces graines seront délivrées gratuitement aux per
sonnes qui s’adonnent à la sériciculture et qui se
présenteront à la direction de l’intérieur (bureau de
fagriculture et du commerce).
I - -■ - = —
Saint-Denis, le 12 Janvier 1867.
Uonaeil grnrrnl.
Le Journal officie' nous donne, avec une certaine
lenteur, la suite des procès-verbaux des séances du
Conseil général : nous en profitons pour continuer à
mettre sou» les yeux de nos lecteurs un résumé des
discussions et des votes du conseil.
L’aiticle S du chapitre II du budget des dépenses :
prisons, ateliers do discipline et agens de vagabon
dage, a donné lieu «à quelaues observations. Un
membre du conseil a appelé l’attention du gouverne
ment « sur la nécessité d’attacher un médecin aux
diverses brigades de l’atelier de discipline, afin de
faire diriger dans les hospices les individus malades
et surtout ceux qui sont atteints de maladies épidé
miques, contagieuses ou infectieuses. » Les règle
ments en vigueur prescrivent qu’un travailleur qui
est à l’atelier de discipline soit renvoyé, s’il tombe
malade, chez son maître, qui doit, le faire soigner.
Les prescriptions, d’ordinaire, ne»présentent pas
grand inconvénient; mais i! n’en est plus de même
en temps d’épidémie, et, pendant le typhus qui a
sévi dans la Colonie, « des hommes atteints de cette
■ maladie ont été imprudemment renvoyés chez leurs
lengagistcs et y ont propagé le typhus, qui a produit
iplns d’un vide dans les ateliers ruraux des habitants ».
"La présence d’un médecin éviterait ce danger et au
rait de plus l’avantage de « déjouer les stratagèmes
des hommes qui ne se disent quelquefois malades
que pour échapper au travail. »
I Cette proposition, quoique appuyée par quelques
'(conseillers, n’a pas donné lieu à un vote, par suite
des explications suivantes présentées parM. le direc
teur de l’intérieur :
« L’année dernière, dès que la fièvre infectieuse a fait
Invasion dans la Colonie, l’administration s’est préoccupée
des dangers que pouvait faire naître ce mode d’opérer, au
point de vue de la propagation du fléau, et des ordres ont
;; été donnés pour que tous les condamnés disciplinaires at-
■ teints de la maladie régnante fussent soignés dans des
^ambulances établies à ce 1 2 effet dans les communes.
« Ces ordres ont été rigoureusement exécutés tant que
■l’épidémie s’est fait sentir. Lorsqu’elle a cessé de sévir
ils ont été perdus de vue.. De nouveaux cas s’étant,
comme on le sait, subitement manifestés il y a quelques
semaines, l’administration a immédiatement renouvelé
ses prescriptions de l’an passé. Mais, avant que celles-ci
n’aient été reçues ou qu’on ait avisé aux moyens de les
■> mettre à exécution, quelques hommes atteints de lièvre
t ont été effectivement renvoyés à leurs engagistos. De là
la réclamation qui vient d’être produite devant le conseil.
Mais cette réclamation n’a plus d’objet aujourd’hui.
L’affaire est maintenant réglée à nouveau sur tous les
points. Le médecin en chef vient de faire, dans toutes les
communes atteintes du fléau, une inspection minutieuse.
I Les mesures prises par l’auministration sont partout
complètes et de nature à rassurer tous les esprits, »
Dans l’article 13 du même chapitre, le conserva
teur de la vaccine figure au budget pour 2,400 fr.
Il a été proposé, à cause de la s tuation gênée où se
trouve la Colonie, de réduire à 1,200 fr. cette alloca
tion. Cette proposition a été rejetée ; un conseiller a
fait «remarquer que le conservateur de la vaccine
n’était pas seulement obligé de rester ut; jour par
semaine jà l’Hôtel de ville, de deux à quatre heures,
pour vacciner ceux qui se présentent, mais encore de
conserver un approvisionnement de vaccin qui per
mette d’en envoyer dans toutes les communes qui en
manquent. » De la résulte une préoccupation inces
sante dont il doit être tenu compte.
Dans le même article, l’allocation du secrétaire du
conseil sanitaire a également donné lieu à une courte
discussion. L’administration, se fondant sur le peu
d’impcrtaucc des fonctions, demandait une indem
nité annuelle de 000 fr. M. le directeur de l’intérieur
a rappelé qu’il s’agissait « non d'un traitement com
plot, mais d’un supplément à ajouter au traitement
d’un employé chargé d’un autre service ». La com
mission demandait 1,200 fr. ; elle objectait que ce
service pouvait être très-chargé lorsque le conseil
sanitaire était obligé de se réunir souvent, comme
cela a eu lieu pendant la fièvre infectieuse. Le con
seil a adopté à une très-grande majorité la propo
sition de l’administration ; nous croyons qu’il a bien
fait ; lorsque l’administration demande une réduc
tion de traitement ou de personnel, nous sommes
convaincu que, sauf de très-rares exceptions, on doit
accepter ses réductions.
Avant dépassera la discussion des dépenses facul
tatives, deux questions ont été soulevées : l’emprunt
demandé pour payer les frais d’introduction des der
niers convois d’immigrants, etlagarantie donnée par
la Colonie au Crédit foncier, jusqu’à concurrence de
2 pour 100 des fonds prêtés par cet établissement de
( rédit.
Un conseiller demandait que l’emprunt fût voté
avant, les dépenses facultatives, parce que « le vote lu
conseil était de nature à exercer quelque influence
sur ses résolutions à l’égard desarticles de la partie du
budget concernant les dépenses facultatives ». Cette
proposition a été combattue par XI. le rapporteur
du budget 1 1 par M. le directeur de Uiutôiieur. « Si,
eu effet, a dit M. le rapporteur, ou arrive à réaliser
quelques économies d'un chiffre assi z important sur
les dépenses ta ui hâtives et pi’on crée ainsi des res
sources qui facilitent la libération de l'administration
envers la Compagnie transatlantique, l'emprunt de
vient i' utile pour cet objet; mais n'est-il pas néces
saire pour éteindre la dette contractée par le Trésor
local envers la Mé’ropole? L’ordre de la discussion
tel qu’il existe est donc logique ; on n'aperçoit aucune
raison majeure pour y déroger. »
Nous ferons ici une observation : en supposant que
l’emprunt demandé devienne inutile en tout ou en
partie, [tour un motif ou pour un autre, ce qui, du
reste, est très-improbable, l’administration aurait-
elle le droit d’affecter à un autre usage, à payer la
Métropole, par exemple, un emprunt demandé, voté
et autorisé exclusivement pour rembourser à MM.
Peulvé, Petitdidier et C" les sommes qui leur sont
dues pour frais d’introduction d’immigrants? Nous
en doutons beaucoup.
M. le directeur de l’intérieur a rappelé que les éco
nomies même les plus importantes ne pouvaient
rendre l’emprunt inutile ; qu’elles ne seraient dispo
nibles qu’après l’exercice clos et ne pouvaient'dès
lors être considérées comme une ressource pour
payer une dette actuellement exigible. Le conseil a
décidé qu'il procéderait à l’examen des dépenses fa
cultatives avant de s’occuper de l’emprunt.
La garantie donnée par la Colonie ou Crédit fon
cier et d’une toute autre importance; aussi repro-
dui ons-nous 1rs quelques paroles échangées à ce su
jet entre M. le directeur de l’intérieur et un membre
du conseil :
Un vu: mb ut. croit devoir signaler une lacune dans le
budget. I! n’a été rien prévu pour couvrir le Crédit fon
cier, aux termes de l’article 3 de la convention du 8 sep
tembre 1803, des perles qu’il pourrait éprouver dans le
cours d’un exercice, soit sur le paiement des annuités
dues par chacun des emprunteurs, soit par le rembourse
ment du capital de chacun des prêts, après la liquidation
du gage. Il serait prudent de prévoir un crédit pour cet
objet.
M. le directeur de l'intérieur répond qu’il n’existe
aucune lacune à cet égard ; à quoi, en effet, la Colonie
est-elle tenue aux termes do la convention du 8 septem
bre 1803? A pourvoir, lorsqu’il y aura lieu, au paiement
île la dette couverte par sa garantie, en inscrivant à son
plus prochain budget un crédit d’égale somme. Or, il
faut attendre que cette situation se présente ; et, si l’ad
ministration doit ayer une somme quelconque au Cré
dit foncier pour l’aimée 1807 la prévision nécessaire pour
faire face à celte obligation ne dévia et ne pourra être
portée qu’au budget de 1808.
Sans discuter l’opinion émise par M. le directeur
de l’intérieur, qu’il nous soit permis d’exprimer le
regret que la question de la garantie donnée au Cré
dit foncier n’ait pas été prise en plus sérieuse consi
dération. Il nous semble qu’il aurait été bon de s’en
occuper.
Selon toute probabilité, la Colonie aura à inscrire
à son budget de 1808 une somme assez forte pour le
Crédit foncier ; c’est cette même année qu’c nous nous
trouverons régis par le nouveau sénatus-consulte,
c’cst-à-i ire que nos dépenses seront augmentées de
t 00,00b fr. environ. Nous aurons une subvention,
il est vrai, mais quel en sera le chiffre?
Peut-être qu’en faisant valoir les charges que va
imposer à la Colonie la garantie qu’elle adonnée au
Créai! iVncier, avec approbation, bien plus avec in
vitai!.m du gouvernement métropolitain, il aurait
été possible au conseil général d’obtenir une alloca
tion plus forte. Plus que jamais nous regrettons qu’il
n’ait pas été'.unis de vœu à cet égard, et malheu
reusement il n’v a plus moyen de revenir sur cette
omission, puisque la session du corps législatif où
sera votée notre allocation pour 1868 ne doit pas
Jarder à s’ouvrir.
Les 11,230 fr. inscrits aux dépenses facultatives
pour le personnel de la direction de l’intérieur n’ont
pas passé sans discussion. Un membre du conseil,
s’appuyant sur la situation malheureuse du Pays, en
a demandé la suppression pure et simple. Un autre
conseiller a soutenu cette proposition en disant que,
dans ce moment, les employés étaient plus heureux
avec leur traitement assuré que les habitants même
les plus riches, qui se voyaient obligés de réduire
leurs dépenses. M. le directeur de l’intérieur a ré
pondu en rappelant que le conseil général avait voté
ces 11,230 fr., et qu’il ne pouvait guère revenir sur
cette décision^ parce que « ce supplément était ac
cordé à des employés laborieux et qui ne reçoivent
qu’un traitement des plus modestes. »
Tous ces arguments ne nous paraissent pas con
cluants, et la question n’est pas placée sur son vérita
ble terrain. La comparaison des habitants aux em
ployés n’es pas à faire; il n'y a aucun rapproche
ment possible entre deux positions si différentes.
Si l’emplové: est sûr de son traitement, il est certain
aussi de ne j limés av éir que de modiques revenus.
Un conseiller a mieux compris, selon nous, la ques
tion lorsqu'il a demandé si « c’était sur le traitement
des employés plutôt que sur leur nombre que de
vaient porter les réductions ». U. est sur cc terrain-là
qu’il faut se placer: il faut supprimer tous les em
ploi-;* dont l'utilité n’est pas démontré ', et non ré
duire des traitements parfois à peine suffisants. Aussi
renouvellerons-nous ici l’expression d un regret déjà
expiimé: pourquoi le conseil général n’a-t-il pas cru
devoir émettre un vœu pour *la induction du nombre
des employés, delà direction de. 1 intérieur, dont la
fixation appartient au gouvernement métropolitain,
en vertu du nouveau sénatus-consulte.
Le chiffre de 11,230 fr. a été voté par dix voix con
tre sept ; le chiffre fixé pour le personnel secondaire
des ponts et chaussées a été également adopté, après
une courte discussion sans grand intérêt.
A. Hastoll.
Dans le Commerce du II courant, XL Larserve
« dit et soutient qu’on aurait pu faire, qu’on pour
rait faire encore...., sur le budget colonial de 18o7,
une économie de huit cent soixante-deux mille
francs ».
Cette prétendue étude sur le budget n’est qu’une
reproduction fidèle de celles que publie le rédacteur
extraordinaire du Commerce deux ou trois tois par
an ; il ne se donne même pas la peine de prouver que
les économies qu'il propose sont réalisables: il dit et
soutient , cela doit suffire. 11 ne daigne même pas te
nir compte des réponses qui peuvent lui être laites;
pour lui, elles sont non avenues, quelque péremptoi
res quelles puissent être. Ce n’est pas pour ses yeux
que la discussion lait jaillir la lumière*. Quand il a
parlé, lu cause est finie.
Examinons aussi brièvement que possible quel
ques-unes des économies qu’il propose. *
Pour l’instruction publique « on trouvera une
grande source d’économies à remplacer les frères
et les sœurs par des instituteurs des deux sexes, qui
coûteront moins cher que ces religieux ». Et puis
pas d'autre explication. Un a cru jusqu ici, on a éta
bli à diverses reprises que des religieux coûtaient
moins cher que dos laïques, qui ont besoin de pen
ser à leur • famille. XI. Laserye renverse tout cela,
sans sc donner la peine d’apparter aucune preuve,
aucun argument; il dit et soutient que les laïques
coûtent moins cher; il faut s’incliner.
« En attendant, il faut diminuer l’cumônier de
3,000 francs. -> Il faut, c’est bientôt dit ; mais pour
quoi ? Pourquoi l’aumônier, qui est chargé de l'ins
truction religieuse de plus de quatre cents élèves, et
dont les fonctions sont des plus importantes, cesse
rait-il d’être assimilé aux professeurs de première
classe? Parce que XL Lascrvo trouve bon qu’il en
soit ainsi; ne lui demandez pas d'autre raison, il ne
poussera pas la condescendance jusqu à vous en don
ner.
11 faut également « supprimer l’aumônier de la
geôle et les frais de culte Le vicaire d’une paroisse
suffira largement aux besoins religieux de la geôle. »
Qu’en sait M.le rédacteur extraordinaire du Commer
ce. Les autorités compétentes déclarent que le clergé
paroissial, notoirement insu lingot, est trop occupé
pour « suffire'largement aux jbesoins religieux de la
FEUILLETON
YVON KERMARIEK
LÉGENDE BRETONNE
Dans la nuit du 2à au 25 décembre de l’an de grâce
18â2, le vent du nord-ouest soufflait avec furie sur les
côtes de Bretagne, accompagné de cette petite pluie fine
let glacée, son cortège ordinaire, dont les gouttes cinglent
la tigure comme autant de coups de fouet, transpercent
■ peu à peu les vêtements les plus épais et mouillent jus
qu’aux os le voyageur forcé par sa mauvaise fortune de
cheminer à travers les sentes et les bruyères.
Cependant les habitants du petit village de Ploumnugast
n’étaient point encore enfouis sous leurs couvertures,
dans ces lits à double et triple étage qui font l'étonne
ment des touristes, et les rideaux de serge verte, cette
étoffe chère aux Bretons, étaient encore retenus par leurs
embrasses aux baldaquins, malgré l’heure a’vancée de la
, nuit. La plupart, au contraire, bien éveillés, mettaient
la dernière main à leur toilette. Catherine Jarniquel
attachait une épingle à sa coiffe des dimanches, hwf ar
Sut ; Malburine Kerniniou effaçait, mn sans impatience,
u i pli qui dérangeait l’harn onie du sa guimpe, et Jobik
«Calvez, m coq du village, essayait en vain de rabais er
un énorme col qui lui coupait impitoyablement les oieil- j
les, grâce au quart d’amidon qui lui avait donné la rigi- j
üité du fer. In leu de sarments, qui attendait la huche de (
Noël traditionnelle, pétillait avec mille étincelles dans
Pâtre des cheminées et réjouissait de sa lueur les vieux
meubles de noyer cirés et frottés avec amour par la
ménagère, ainsi que les dressoirs chargés de vaisselle
aux fleurs rouges, jaunes’et bleues.
Une seule maison, dans ce village, formait avec les
autres un contraste frappant.
Une femme y priait, agenouillée près du berceau de
son enfant.
Affaissée sur ses talons, les mains jointes et les yeux
pleins de larmes levés vers le ciel, elle rappelait par sa
pose cette Mère de douleurs que les peintres, d’accord
avec la tradition, nous représentent en proie aux angois
ses sur le Golgolha, devant son divin Fils immolé pour
le salut des hommes.
Le tic-tac monotone de l’horloge enfermée dans sa
gaîne de sapin et les aboiements du chien, qui hurlait aux
passants, enchaîné dans la cour, troublaient seuls ses
méditations.
Comme elle paraissait triste ! comme son regard
trahissait une inquiétude douloureuse! Ali! c’est que
les joies de la vie s’étaient bien vite effënt’llées et llétiies
entre les doigts de la pauv re Madeleine, les chagrins et
la misère étaient seule restés, et, si le malheur ne déses
pérait point la lennne chrétienne, il faisait trembler la
mère. %
Je.ez d’ailleurs un regard sur cette chambre froide" et
nue.
La cheminée sans feu, le dressoir vide, les meubles
délabrés, l’armoire presque dégarnie du linge apporté en
dot | ar celle qui l’avait, lilé, jeune fille, pendant les
longues veillées d’hiver, tout, eu un mot, témoignait q >•
le désordre était entré dans celte maison, et avec lui a
désolation et la ruine.
Ce triste spectacle vous alllige et vous serre le cœur !
Plaignez alors, oh ! plaignez davantage encore la pauvre
Madeleine, car cette misère, plus lugubre, plus poignante
mille fois que celle qui nous est envoyée par Dieu comme
une épreuve et déconcerte les vains projets de la sagesse
humaine, ceile misère est celle du vice et du vice le [dus
honteux.
Mais ne cherchez pas plus longtemps quelle en est la
cause. Regardez cet homme aux yeux hagards, hébétés
>ar l’ivresse, accoudé à une table malpropre qui se tient,
à peine sur trois pieds vermoulus, et qu’il achèvera de
briser tout à l’heure, quand il ne restera plus rien dans
la bout ille, à moitié vide déjà, qui est placée devant lui.
Car, suivant l’expression vulgaire, il a le vin mauvais,
Yvon Kennariik, et, quand le ytein-ardent (1) enflamme
le sang qui se précipite et bouillonne dans *es «veines,
son cillant même, placé entre les bras de Madeleine, ést
une égide impuissante et ne la préserve pas toujours de
ses coups !
Et cependant elle l’aime encore malgré ses défauts,
malgré sa brutalité même, cet homme au front chargé de
rides pi écoces, aux membres agités par un tremblement
nerveux. Elle ne peut s’em êclier de voir en lui le j une
gars au front ouvert et franc, la terreur des paroisses
voisines au jour des Cardons (2), et dont le nom seul
la faisait rougir autrefois comme la cerise au mois
d’août.
Il a eu bien des loris envers elle, i! a brisé l’un après
l'antre tous ses rêves d'avenir, toutes ses illusions, mais
1 . F.au-de-vie. Littéralement : vin ardent, vin de feu.
2. Gn appelle ainsi, en Bretagne, d s réjouissances publiqm -
que l'on célèbre dans chaque paroi»* l'occasion vicia fête du saint
•.uns le patronage, duquel elle se trouve. Ils répondent aux uitem-
' btée' il' 1 Anjou, aux kermesses du Mord,etc., etc.
il esl le père de son enfant, et, de plus, elle a confiance
dans la miséricorde infinie do Dieu.
La cloche argentine fait entendre ses derniers earil-
■ons ( 3) ; sur le pavé de la rue résonnent les sabots des
femmes qui se rendent, bien enca lelinées, à la Messe de
minuit, et le pas lourd des hommes, aux gros souliers fer
rés, qui les accompagnent.
Mad deine part, tout chagrine, en recommandant l’en
fant à son mari. »
« Enfin ! dit Yvon, la voilà donc partie !.. Hum! les
« femm&... ! ne in’en [tariez pas. Idan boue (Y) !
« elle peut !>i n y aller s e s moi, a - a m ‘sse. Encore elle
« me laisse l’entant sur les bras, comme une sans-cœur
« quelle est ! »
F.t une nouvelle accolade à la bouteille y laissait, à
peine quelques gouttes de la brûlante Moisson.
La cloche, terminant son joyeux chant de fête, lance,
comme d regret, sa dernière note dans les airs. On
n’entend plus aucun bruit dans la rue, et, dans la vieille
église, illuminée d" mille feux, la cérémonie commence.
Y on sai-it sa bouteille pour l’achever sans doule,
mais une force invisible semble le pousser hors de sa
maison, et il marche, il marche toujours. Legrand air
éteint les dernières lueurs de raison qui lui restent ; il
murmure confusément un refrain bachique.
Tout ii coup les nuages, qui avaient laissé paraître un
moment la lune, l'obscurcissent c eiipli t inenl ; ï von se
trouve au milieu des p lis profondes ténèbres, et il chante
un peu jdus foi t, c ar il commence a avoir peur.
a. Go mot est impnipn . mai- notre langue om si pauvre ! On
appelait autrefois nd er, sonner ç elocl s a là fois. En
i, ,
; I'.\ pression qui revient à chaque inslaut dans la langue bre«
! tonne, «t qui -ignilie: > toi de Dieu. >
Dimanche 13 Janvier 1867.
8 m '’ Année.
psix de i - ABrm»fïï
PAYABLE n’A ' l
| Pour l’année c.
I Pour six mois 27 fr.
pour trois mois 15 fr.
i Maurice (un an) 50 fr.
i n Avmrro i 1 fr.
S’adresser A M. A. I.EFORT
Directeur-Gérant,
pour tout ce qui concerne le journal.
( Affranchir .)
<»!V S’ABONNE:
■SAINT-DENIS», RUE LA BOURDONNAIS, N" 33.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE
rHIX DES INSERTIONS :
Annonces 50 c. la ligne
Réclame- 1 fr. —
. -s annnm'fii soin reçues le mercredi
-t le sa. ued jusqu'à midi.
S'adresser à M. A. LEFORT
Directeur-Gérant,
pour tout ce qui concerne le journal,
i Affranchir.)
PAR ARRÊTÉ DU 17 DÉCEMBRE 1866
Les Annonces legales et judiciaires peuvent être insérées dans tous les journaux de la Colonie.
BUREAUX
jT — — :
DIRECTION DE L’INTERIEUR
AVIS
' L’administration a reçu une caisse de graines de
vers à soie du Japon.
| Ces graines seront délivrées gratuitement aux per
sonnes qui s’adonnent à la sériciculture et qui se
présenteront à la direction de l’intérieur (bureau de
fagriculture et du commerce).
I - -■ - = —
Saint-Denis, le 12 Janvier 1867.
Uonaeil grnrrnl.
Le Journal officie' nous donne, avec une certaine
lenteur, la suite des procès-verbaux des séances du
Conseil général : nous en profitons pour continuer à
mettre sou» les yeux de nos lecteurs un résumé des
discussions et des votes du conseil.
L’aiticle S du chapitre II du budget des dépenses :
prisons, ateliers do discipline et agens de vagabon
dage, a donné lieu «à quelaues observations. Un
membre du conseil a appelé l’attention du gouverne
ment « sur la nécessité d’attacher un médecin aux
diverses brigades de l’atelier de discipline, afin de
faire diriger dans les hospices les individus malades
et surtout ceux qui sont atteints de maladies épidé
miques, contagieuses ou infectieuses. » Les règle
ments en vigueur prescrivent qu’un travailleur qui
est à l’atelier de discipline soit renvoyé, s’il tombe
malade, chez son maître, qui doit, le faire soigner.
Les prescriptions, d’ordinaire, ne»présentent pas
grand inconvénient; mais i! n’en est plus de même
en temps d’épidémie, et, pendant le typhus qui a
sévi dans la Colonie, « des hommes atteints de cette
■ maladie ont été imprudemment renvoyés chez leurs
lengagistcs et y ont propagé le typhus, qui a produit
iplns d’un vide dans les ateliers ruraux des habitants ».
"La présence d’un médecin éviterait ce danger et au
rait de plus l’avantage de « déjouer les stratagèmes
des hommes qui ne se disent quelquefois malades
que pour échapper au travail. »
I Cette proposition, quoique appuyée par quelques
'(conseillers, n’a pas donné lieu à un vote, par suite
des explications suivantes présentées parM. le direc
teur de l’intérieur :
« L’année dernière, dès que la fièvre infectieuse a fait
Invasion dans la Colonie, l’administration s’est préoccupée
des dangers que pouvait faire naître ce mode d’opérer, au
point de vue de la propagation du fléau, et des ordres ont
;; été donnés pour que tous les condamnés disciplinaires at-
■ teints de la maladie régnante fussent soignés dans des
^ambulances établies à ce 1 2 effet dans les communes.
« Ces ordres ont été rigoureusement exécutés tant que
■l’épidémie s’est fait sentir. Lorsqu’elle a cessé de sévir
ils ont été perdus de vue.. De nouveaux cas s’étant,
comme on le sait, subitement manifestés il y a quelques
semaines, l’administration a immédiatement renouvelé
ses prescriptions de l’an passé. Mais, avant que celles-ci
n’aient été reçues ou qu’on ait avisé aux moyens de les
■> mettre à exécution, quelques hommes atteints de lièvre
t ont été effectivement renvoyés à leurs engagistos. De là
la réclamation qui vient d’être produite devant le conseil.
Mais cette réclamation n’a plus d’objet aujourd’hui.
L’affaire est maintenant réglée à nouveau sur tous les
points. Le médecin en chef vient de faire, dans toutes les
communes atteintes du fléau, une inspection minutieuse.
I Les mesures prises par l’auministration sont partout
complètes et de nature à rassurer tous les esprits, »
Dans l’article 13 du même chapitre, le conserva
teur de la vaccine figure au budget pour 2,400 fr.
Il a été proposé, à cause de la s tuation gênée où se
trouve la Colonie, de réduire à 1,200 fr. cette alloca
tion. Cette proposition a été rejetée ; un conseiller a
fait «remarquer que le conservateur de la vaccine
n’était pas seulement obligé de rester ut; jour par
semaine jà l’Hôtel de ville, de deux à quatre heures,
pour vacciner ceux qui se présentent, mais encore de
conserver un approvisionnement de vaccin qui per
mette d’en envoyer dans toutes les communes qui en
manquent. » De la résulte une préoccupation inces
sante dont il doit être tenu compte.
Dans le même article, l’allocation du secrétaire du
conseil sanitaire a également donné lieu à une courte
discussion. L’administration, se fondant sur le peu
d’impcrtaucc des fonctions, demandait une indem
nité annuelle de 000 fr. M. le directeur de l’intérieur
a rappelé qu’il s’agissait « non d'un traitement com
plot, mais d’un supplément à ajouter au traitement
d’un employé chargé d’un autre service ». La com
mission demandait 1,200 fr. ; elle objectait que ce
service pouvait être très-chargé lorsque le conseil
sanitaire était obligé de se réunir souvent, comme
cela a eu lieu pendant la fièvre infectieuse. Le con
seil a adopté à une très-grande majorité la propo
sition de l’administration ; nous croyons qu’il a bien
fait ; lorsque l’administration demande une réduc
tion de traitement ou de personnel, nous sommes
convaincu que, sauf de très-rares exceptions, on doit
accepter ses réductions.
Avant dépassera la discussion des dépenses facul
tatives, deux questions ont été soulevées : l’emprunt
demandé pour payer les frais d’introduction des der
niers convois d’immigrants, etlagarantie donnée par
la Colonie au Crédit foncier, jusqu’à concurrence de
2 pour 100 des fonds prêtés par cet établissement de
( rédit.
Un conseiller demandait que l’emprunt fût voté
avant, les dépenses facultatives, parce que « le vote lu
conseil était de nature à exercer quelque influence
sur ses résolutions à l’égard desarticles de la partie du
budget concernant les dépenses facultatives ». Cette
proposition a été combattue par XI. le rapporteur
du budget 1 1 par M. le directeur de Uiutôiieur. « Si,
eu effet, a dit M. le rapporteur, ou arrive à réaliser
quelques économies d'un chiffre assi z important sur
les dépenses ta ui hâtives et pi’on crée ainsi des res
sources qui facilitent la libération de l'administration
envers la Compagnie transatlantique, l'emprunt de
vient i' utile pour cet objet; mais n'est-il pas néces
saire pour éteindre la dette contractée par le Trésor
local envers la Mé’ropole? L’ordre de la discussion
tel qu’il existe est donc logique ; on n'aperçoit aucune
raison majeure pour y déroger. »
Nous ferons ici une observation : en supposant que
l’emprunt demandé devienne inutile en tout ou en
partie, [tour un motif ou pour un autre, ce qui, du
reste, est très-improbable, l’administration aurait-
elle le droit d’affecter à un autre usage, à payer la
Métropole, par exemple, un emprunt demandé, voté
et autorisé exclusivement pour rembourser à MM.
Peulvé, Petitdidier et C" les sommes qui leur sont
dues pour frais d’introduction d’immigrants? Nous
en doutons beaucoup.
M. le directeur de l’intérieur a rappelé que les éco
nomies même les plus importantes ne pouvaient
rendre l’emprunt inutile ; qu’elles ne seraient dispo
nibles qu’après l’exercice clos et ne pouvaient'dès
lors être considérées comme une ressource pour
payer une dette actuellement exigible. Le conseil a
décidé qu'il procéderait à l’examen des dépenses fa
cultatives avant de s’occuper de l’emprunt.
La garantie donnée par la Colonie ou Crédit fon
cier et d’une toute autre importance; aussi repro-
dui ons-nous 1rs quelques paroles échangées à ce su
jet entre M. le directeur de l’intérieur et un membre
du conseil :
Un vu: mb ut. croit devoir signaler une lacune dans le
budget. I! n’a été rien prévu pour couvrir le Crédit fon
cier, aux termes de l’article 3 de la convention du 8 sep
tembre 1803, des perles qu’il pourrait éprouver dans le
cours d’un exercice, soit sur le paiement des annuités
dues par chacun des emprunteurs, soit par le rembourse
ment du capital de chacun des prêts, après la liquidation
du gage. Il serait prudent de prévoir un crédit pour cet
objet.
M. le directeur de l'intérieur répond qu’il n’existe
aucune lacune à cet égard ; à quoi, en effet, la Colonie
est-elle tenue aux termes do la convention du 8 septem
bre 1803? A pourvoir, lorsqu’il y aura lieu, au paiement
île la dette couverte par sa garantie, en inscrivant à son
plus prochain budget un crédit d’égale somme. Or, il
faut attendre que cette situation se présente ; et, si l’ad
ministration doit ayer une somme quelconque au Cré
dit foncier pour l’aimée 1807 la prévision nécessaire pour
faire face à celte obligation ne dévia et ne pourra être
portée qu’au budget de 1808.
Sans discuter l’opinion émise par M. le directeur
de l’intérieur, qu’il nous soit permis d’exprimer le
regret que la question de la garantie donnée au Cré
dit foncier n’ait pas été prise en plus sérieuse consi
dération. Il nous semble qu’il aurait été bon de s’en
occuper.
Selon toute probabilité, la Colonie aura à inscrire
à son budget de 1808 une somme assez forte pour le
Crédit foncier ; c’est cette même année qu’c nous nous
trouverons régis par le nouveau sénatus-consulte,
c’cst-à-i ire que nos dépenses seront augmentées de
t 00,00b fr. environ. Nous aurons une subvention,
il est vrai, mais quel en sera le chiffre?
Peut-être qu’en faisant valoir les charges que va
imposer à la Colonie la garantie qu’elle adonnée au
Créai! iVncier, avec approbation, bien plus avec in
vitai!.m du gouvernement métropolitain, il aurait
été possible au conseil général d’obtenir une alloca
tion plus forte. Plus que jamais nous regrettons qu’il
n’ait pas été'.unis de vœu à cet égard, et malheu
reusement il n’v a plus moyen de revenir sur cette
omission, puisque la session du corps législatif où
sera votée notre allocation pour 1868 ne doit pas
Jarder à s’ouvrir.
Les 11,230 fr. inscrits aux dépenses facultatives
pour le personnel de la direction de l’intérieur n’ont
pas passé sans discussion. Un membre du conseil,
s’appuyant sur la situation malheureuse du Pays, en
a demandé la suppression pure et simple. Un autre
conseiller a soutenu cette proposition en disant que,
dans ce moment, les employés étaient plus heureux
avec leur traitement assuré que les habitants même
les plus riches, qui se voyaient obligés de réduire
leurs dépenses. M. le directeur de l’intérieur a ré
pondu en rappelant que le conseil général avait voté
ces 11,230 fr., et qu’il ne pouvait guère revenir sur
cette décision^ parce que « ce supplément était ac
cordé à des employés laborieux et qui ne reçoivent
qu’un traitement des plus modestes. »
Tous ces arguments ne nous paraissent pas con
cluants, et la question n’est pas placée sur son vérita
ble terrain. La comparaison des habitants aux em
ployés n’es pas à faire; il n'y a aucun rapproche
ment possible entre deux positions si différentes.
Si l’emplové: est sûr de son traitement, il est certain
aussi de ne j limés av éir que de modiques revenus.
Un conseiller a mieux compris, selon nous, la ques
tion lorsqu'il a demandé si « c’était sur le traitement
des employés plutôt que sur leur nombre que de
vaient porter les réductions ». U. est sur cc terrain-là
qu’il faut se placer: il faut supprimer tous les em
ploi-;* dont l'utilité n’est pas démontré ', et non ré
duire des traitements parfois à peine suffisants. Aussi
renouvellerons-nous ici l’expression d un regret déjà
expiimé: pourquoi le conseil général n’a-t-il pas cru
devoir émettre un vœu pour *la induction du nombre
des employés, delà direction de. 1 intérieur, dont la
fixation appartient au gouvernement métropolitain,
en vertu du nouveau sénatus-consulte.
Le chiffre de 11,230 fr. a été voté par dix voix con
tre sept ; le chiffre fixé pour le personnel secondaire
des ponts et chaussées a été également adopté, après
une courte discussion sans grand intérêt.
A. Hastoll.
Dans le Commerce du II courant, XL Larserve
« dit et soutient qu’on aurait pu faire, qu’on pour
rait faire encore...., sur le budget colonial de 18o7,
une économie de huit cent soixante-deux mille
francs ».
Cette prétendue étude sur le budget n’est qu’une
reproduction fidèle de celles que publie le rédacteur
extraordinaire du Commerce deux ou trois tois par
an ; il ne se donne même pas la peine de prouver que
les économies qu'il propose sont réalisables: il dit et
soutient , cela doit suffire. 11 ne daigne même pas te
nir compte des réponses qui peuvent lui être laites;
pour lui, elles sont non avenues, quelque péremptoi
res quelles puissent être. Ce n’est pas pour ses yeux
que la discussion lait jaillir la lumière*. Quand il a
parlé, lu cause est finie.
Examinons aussi brièvement que possible quel
ques-unes des économies qu’il propose. *
Pour l’instruction publique « on trouvera une
grande source d’économies à remplacer les frères
et les sœurs par des instituteurs des deux sexes, qui
coûteront moins cher que ces religieux ». Et puis
pas d'autre explication. Un a cru jusqu ici, on a éta
bli à diverses reprises que des religieux coûtaient
moins cher que dos laïques, qui ont besoin de pen
ser à leur • famille. XI. Laserye renverse tout cela,
sans sc donner la peine d’apparter aucune preuve,
aucun argument; il dit et soutient que les laïques
coûtent moins cher; il faut s’incliner.
« En attendant, il faut diminuer l’cumônier de
3,000 francs. -> Il faut, c’est bientôt dit ; mais pour
quoi ? Pourquoi l’aumônier, qui est chargé de l'ins
truction religieuse de plus de quatre cents élèves, et
dont les fonctions sont des plus importantes, cesse
rait-il d’être assimilé aux professeurs de première
classe? Parce que XL Lascrvo trouve bon qu’il en
soit ainsi; ne lui demandez pas d'autre raison, il ne
poussera pas la condescendance jusqu à vous en don
ner.
11 faut également « supprimer l’aumônier de la
geôle et les frais de culte Le vicaire d’une paroisse
suffira largement aux besoins religieux de la geôle. »
Qu’en sait M.le rédacteur extraordinaire du Commer
ce. Les autorités compétentes déclarent que le clergé
paroissial, notoirement insu lingot, est trop occupé
pour « suffire'largement aux jbesoins religieux de la
FEUILLETON
YVON KERMARIEK
LÉGENDE BRETONNE
Dans la nuit du 2à au 25 décembre de l’an de grâce
18â2, le vent du nord-ouest soufflait avec furie sur les
côtes de Bretagne, accompagné de cette petite pluie fine
let glacée, son cortège ordinaire, dont les gouttes cinglent
la tigure comme autant de coups de fouet, transpercent
■ peu à peu les vêtements les plus épais et mouillent jus
qu’aux os le voyageur forcé par sa mauvaise fortune de
cheminer à travers les sentes et les bruyères.
Cependant les habitants du petit village de Ploumnugast
n’étaient point encore enfouis sous leurs couvertures,
dans ces lits à double et triple étage qui font l'étonne
ment des touristes, et les rideaux de serge verte, cette
étoffe chère aux Bretons, étaient encore retenus par leurs
embrasses aux baldaquins, malgré l’heure a’vancée de la
, nuit. La plupart, au contraire, bien éveillés, mettaient
la dernière main à leur toilette. Catherine Jarniquel
attachait une épingle à sa coiffe des dimanches, hwf ar
Sut ; Malburine Kerniniou effaçait, mn sans impatience,
u i pli qui dérangeait l’harn onie du sa guimpe, et Jobik
«Calvez, m coq du village, essayait en vain de rabais er
un énorme col qui lui coupait impitoyablement les oieil- j
les, grâce au quart d’amidon qui lui avait donné la rigi- j
üité du fer. In leu de sarments, qui attendait la huche de (
Noël traditionnelle, pétillait avec mille étincelles dans
Pâtre des cheminées et réjouissait de sa lueur les vieux
meubles de noyer cirés et frottés avec amour par la
ménagère, ainsi que les dressoirs chargés de vaisselle
aux fleurs rouges, jaunes’et bleues.
Une seule maison, dans ce village, formait avec les
autres un contraste frappant.
Une femme y priait, agenouillée près du berceau de
son enfant.
Affaissée sur ses talons, les mains jointes et les yeux
pleins de larmes levés vers le ciel, elle rappelait par sa
pose cette Mère de douleurs que les peintres, d’accord
avec la tradition, nous représentent en proie aux angois
ses sur le Golgolha, devant son divin Fils immolé pour
le salut des hommes.
Le tic-tac monotone de l’horloge enfermée dans sa
gaîne de sapin et les aboiements du chien, qui hurlait aux
passants, enchaîné dans la cour, troublaient seuls ses
méditations.
Comme elle paraissait triste ! comme son regard
trahissait une inquiétude douloureuse! Ali! c’est que
les joies de la vie s’étaient bien vite effënt’llées et llétiies
entre les doigts de la pauv re Madeleine, les chagrins et
la misère étaient seule restés, et, si le malheur ne déses
pérait point la lennne chrétienne, il faisait trembler la
mère. %
Je.ez d’ailleurs un regard sur cette chambre froide" et
nue.
La cheminée sans feu, le dressoir vide, les meubles
délabrés, l’armoire presque dégarnie du linge apporté en
dot | ar celle qui l’avait, lilé, jeune fille, pendant les
longues veillées d’hiver, tout, eu un mot, témoignait q >•
le désordre était entré dans celte maison, et avec lui a
désolation et la ruine.
Ce triste spectacle vous alllige et vous serre le cœur !
Plaignez alors, oh ! plaignez davantage encore la pauvre
Madeleine, car cette misère, plus lugubre, plus poignante
mille fois que celle qui nous est envoyée par Dieu comme
une épreuve et déconcerte les vains projets de la sagesse
humaine, ceile misère est celle du vice et du vice le [dus
honteux.
Mais ne cherchez pas plus longtemps quelle en est la
cause. Regardez cet homme aux yeux hagards, hébétés
>ar l’ivresse, accoudé à une table malpropre qui se tient,
à peine sur trois pieds vermoulus, et qu’il achèvera de
briser tout à l’heure, quand il ne restera plus rien dans
la bout ille, à moitié vide déjà, qui est placée devant lui.
Car, suivant l’expression vulgaire, il a le vin mauvais,
Yvon Kennariik, et, quand le ytein-ardent (1) enflamme
le sang qui se précipite et bouillonne dans *es «veines,
son cillant même, placé entre les bras de Madeleine, ést
une égide impuissante et ne la préserve pas toujours de
ses coups !
Et cependant elle l’aime encore malgré ses défauts,
malgré sa brutalité même, cet homme au front chargé de
rides pi écoces, aux membres agités par un tremblement
nerveux. Elle ne peut s’em êclier de voir en lui le j une
gars au front ouvert et franc, la terreur des paroisses
voisines au jour des Cardons (2), et dont le nom seul
la faisait rougir autrefois comme la cerise au mois
d’août.
Il a eu bien des loris envers elle, i! a brisé l’un après
l'antre tous ses rêves d'avenir, toutes ses illusions, mais
1 . F.au-de-vie. Littéralement : vin ardent, vin de feu.
2. Gn appelle ainsi, en Bretagne, d s réjouissances publiqm -
que l'on célèbre dans chaque paroi»* l'occasion vicia fête du saint
•.uns le patronage, duquel elle se trouve. Ils répondent aux uitem-
' btée' il' 1 Anjou, aux kermesses du Mord,etc., etc.
il esl le père de son enfant, et, de plus, elle a confiance
dans la miséricorde infinie do Dieu.
La cloche argentine fait entendre ses derniers earil-
■ons ( 3) ; sur le pavé de la rue résonnent les sabots des
femmes qui se rendent, bien enca lelinées, à la Messe de
minuit, et le pas lourd des hommes, aux gros souliers fer
rés, qui les accompagnent.
Mad deine part, tout chagrine, en recommandant l’en
fant à son mari. »
« Enfin ! dit Yvon, la voilà donc partie !.. Hum! les
« femm&... ! ne in’en [tariez pas. Idan boue (Y) !
« elle peut !>i n y aller s e s moi, a - a m ‘sse. Encore elle
« me laisse l’entant sur les bras, comme une sans-cœur
« quelle est ! »
F.t une nouvelle accolade à la bouteille y laissait, à
peine quelques gouttes de la brûlante Moisson.
La cloche, terminant son joyeux chant de fête, lance,
comme d regret, sa dernière note dans les airs. On
n’entend plus aucun bruit dans la rue, et, dans la vieille
église, illuminée d" mille feux, la cérémonie commence.
Y on sai-it sa bouteille pour l’achever sans doule,
mais une force invisible semble le pousser hors de sa
maison, et il marche, il marche toujours. Legrand air
éteint les dernières lueurs de raison qui lui restent ; il
murmure confusément un refrain bachique.
Tout ii coup les nuages, qui avaient laissé paraître un
moment la lune, l'obscurcissent c eiipli t inenl ; ï von se
trouve au milieu des p lis profondes ténèbres, et il chante
un peu jdus foi t, c ar il commence a avoir peur.
a. Go mot est impnipn . mai- notre langue om si pauvre ! On
appelait autrefois nd er, sonner ç elocl s a là fois. En
i, ,
; I'.\ pression qui revient à chaque inslaut dans la langue bre«
! tonne, «t qui -ignilie: > toi de Dieu. >
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