Titre : Le Matin : derniers télégrammes de la nuit
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1906-01-03
Contributeur : Edwards, Alfred (1856-1914). Directeur de publication
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Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
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Description : 03 janvier 1906 03 janvier 1906
Description : 1906/01/03 (Numéro 7983). 1906/01/03 (Numéro 7983).
Description : Note : 3ème édition. Note : 3ème édition.
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Source : Bibliothèque nationale de France
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 29/04/2008
Vingt-Troisième Année, -r NO
SIX PAGES Paris et Départements CINQ CENTIMES
Mercredi 3 Janvier 1906
DERNIERS TÉLÉGRAMMES DE LA NUIT
SEUL JOURNAL FRANÇAIS RECEVANT PAR FILS SPECIAUX LES DERNIÈRES NOUVELLES DU MONDE ENTIER
LE PARTI DE Là GUERRE
EH ALLEMAGNE
-Y a-t-il un parti de la guerre en Alle-
magne Faut-il voir dans l'action de
Guillaume II au Maroc un geste sponta-
né et la recherche d'une illustre aven-
ture ? Faut-il y découvrir, au contraire,
le dessein continu d'un homme qui re-
présente des aspirations précises et qui
s'appuie sur un parti constitué ?
Il semble certain aujourd'hui que,
quoi que l'on ait voulu dire de l'indiffé-
rence populaire, il, y avait en Allemagne
un parti prêt à sacrifier la paix à ses re-
vendications en Afrique. Lorsque survint
l'équipée de Guillaume à Tanger, il y
avait un an déjà qu'une campagne se me-
rtait en faveur de la colonisation maro-
caine. Des statistiques ingénieuses s'ef-
forçaient de démontrer que l'Allemagne
4 tait la! première nation intéressée à la
prospérité commerciale du Maroc, et
L'on avait vu un ancien gouverneur gé-
néral de colonie, M. von Liebert; prêcher
officiellement, dès décembre 1903, à l'u-
de Leipsig, l'expansion vérs le
Maroc, qui devait être un champ d'ac-
tion nouveau pour la tuUut'e
Enfin, le dernier Livre Jaune nous a
révélé de façon indiscutable les préten-
tions très nettes du parti colonial alle-
mand sur l'empire du maghzen.
Le 30 mai 1904, M. Bihourd rendait
compte à notre ministre des affaires
étrangères d'une manifestation de la
« Société coloniale allemande » en fa-
veur du Maroc, et, le 3 juin, il signalait
une décision unanime de l' « Union pan-
germanique » de Lûbeck, réclamant « au
rom des intérêts politiques et économi-
ques de l'Allemagne n l'acquisition de la
côte atlantique du Maroc et se déclarant
blessée de l' « humiliation subie par l'em-
pire, qui n'a pas été consulté au moment
des négociations franco-anglaises ».
Le parttcolonial allemand, qui compte
à peine quelques années de vie, semble
ainsi avoir pris une influence prépon-
dérante sur la politique allemande, soit
qu'il s'érige en apôtre de la « plus grande
Allemagne », soit qu'il prépare l'opinion
aux manifestations tumultueuses de
Guillaume IL
•Ce parti se compose non pas seule-
ment des partisans convaincus de la co-
lonisation, mais aussi de tous les pan-
germanistes et de ces commerçantes des
villes maritimes, qui, se voyant fermé,
par des traités de commerce presque
prohibitifs, une partie du marché mon-
dial, cherchent dans les pays de protec-
torat un champ d'exploitation directe.
C'est ainsi que ce parti colonel con-
tinue l'histoire de cette antique -fc Hanse
germanique » qui put essayer, à un mo-
ment donné, de disputer à l'Angleterre
et à la Hollande l'empire des mers.
Depuis vingt ans que l'Allemagne
s'est jetée, malgré Bismarck. dans les
aventures coloniales, elle n'a tiré de son
effort que des déboires et des faillites..
La moindre de ses opérations com-
porte des conséquences ruineuses. L'a-
chat des îles Caroline et Marianne, en
1899, a coûté plus de 20 millions. Les
chemins de fer africains de l'est et du
sud-ouest allemand en ont coûté 30, et
né présentent chaque année que des bi-
lans de détresse. Kiao-Tcheou coûte, à
l'heure présente, plus de cent millions
et ne rapporte à l'empire que des inquié-
tudes, en face de la Chine qui s'éveille.
Enfin, la révolte des Herreros, dans le
Sud-ouest africain, se solde, cette an-
née, par un déficit de 130 millions.
Fn dehors de ces dépenses extraQrdi-
haiff?, l'empiré contribue annuellement
pour près de 40 millions aux dépenses de
ses colonies, sans compter les subven-
tions diverses qui sont inscrites aux bud-
gèis de- la guerre et de la marine.
n'ailleurs,. ces dépenses s'accroissent
de jour en jour. L'Allemagne vient de
s'offrir, voici cinq semaines, le luxe d'un
ministère dés colonies, et la Gazette de
[Cologne a signalé que ce nouvel organe
possédait déjà, en naissant, un plus
arand nombre de fonctionnaires que le
Foreign Office de Londres.
Le nouveau secrétaire d'Etat a fait en-
trevoir au Reichstag la. nécessité de dé-
penses nouvelles pour la construction
d'un chemin de fer de Lüderitz à Kubul,
et l'on agite la question de créer des li-
gnes nouvelles à Togo, dans le Came-
roun, et dans l'Afrique orientale.
Tout cela pour un commerce qui ne
dépasse pas 70 à 80 millions de francs,
dont la moitié seulement se fait au profit
«le l'Allemagne.
v* '̃̃
C'est ainsi que le parti colonial alle-
mand assiste à sa propre faillite. Aucune
protection ne lui a manqué pourtant il
a bénéficié des subventions gouverne-
mentales et de l'appui des industriels, il
a possédé des voyageurs de commerce
uniques au monde Waldersee a placé
ses produits en Chine, et Guillaume II a
rait connaître sa firme en Paléstine.
Aujourd'hui, ce parti, que ni la grande
industrie ni l'empereur ne suffisent à
faire vivre, est comme un commerçant
rlue la faillite menace et qui cherche son
salut dans les aventures.
A chaque instant, la nouvelle nous ar-
rive d'incidents de frontière survenus
dans les colonies allemandes. Il y a quel-
quels mois, c'était sur la frontière du Ca-
meroun et du Congo, un officier alle-
mand faisant massacrer, Missoum-
Missoum, des miliciens au service de la
France; il y a quelques jours, c'était,
dans le Sud Africain, un sujet anglais as-
bassiné par des réguliers allemands.
Puis ce sont des tentatives de main-
mise sur les dernières terres indépen-
dantes de l'Afrique. L'Allemagne veille
jalousement sur la République de Libe-
ria, dont elle prévoit déjà le partage. La
maison allemande Woermann, qui dé-
tient les deux tiers du commerce de cet
Etat, proteste contre toute mesure qui
pourrait en assurer là durée elle incite
même la république africaine à deman-
dera la France une délimitation de fron-
tières, qui comporterait en même temps,
de notre part, une abdication de nos
droits éventuels.
La colonisation allemande, ruinée par-
tout où elle se trouvé et réduite à la
pire-détresse, cherche dans tout l'univers
des débouchés quand même et des spé
culations à tout prix.
L'occupation de Kiao-Tcheou, qui fut,
dit-on, une des grandes idées du règne,
n'a comporté pour l'Allemagne que des
déceptions, et il semble que Guillaume
lui-même soit sur le point de renoncer à
l'Asie, qui se ferme.
La colonisation allemande a tourné ses
espérances vers l'Afrique. Là encore,
les, colonies de l'est et du sud-ouest ne
lui ont procuré que des révôltes il sem-
ble que le Cameroun soit un pays pau-
vre Togo est une petite colonie Liberia
n'est qu'une espérance indécise.
C'est alors que le parti colonial a voulu
le Maroc c'est là qu'il tente aujourd'hui
un suprême effort, c'est là que Guillaume
a porté la dernière espérance de sa
La colonisation allemande va-t-elle
trouver au Maroc sa revanche, va-t-elle
remporter à Algésiras sa première vic-
toire ?
Jean d'Orsay.
Les tableaux d'avancement pour 1906.
DE MIDI A MINUIT
Les MU d'hier– En France et à l'étranger.
Clôture de la Bourse, férme 3 99 20
Extérieure, 93 S£> Russe Consolidé, 85
Turc, 91 60 Rio, 1,695 Rand Mines, 185.
M. Etienne, ministre de la guerre, et M.
Dujardin-Beaumëtz, sous-secrétaire d'Etat,
ont, Nice, déposé une couronne, sur la
tombe du Gambetta.
La tempête, continue dans la Manche. La
mer est démontée. On a sauvé l'équipage du
dundee Emile-Georges, venant de La Ro-
chelle avec un chargement de chaux et qui
a sombré à la pointe de Kermovan, près du
Conquet.
On mande de Tunis que 1 état du bey s'est
sérieusement aggravé.
Le secrétaire de l'Association de la ré-
îortrie ââ^t3otijgo à Londres a reçu une Jet-
tre de sir, Edward Grey, lui annonçant que
le gouvernement anglais allait appeler 1 at-
tention du gouvernement du Congo sur la
non-publication par ce gouvernement des
témoignages recueillis par la commission
d'enquêté du Congo.
Le vapeur espagnol Pepin, allant de Bil-
bao à Cardiff, a fait naufrage sur le bas-
fonds de Sberwàlther (Angleterre).
La Gazette de l'Allemagne du Nord a pu-
blié une note démentant que des fonction-
naires ou des officiers allemands fussent
compromis dans l'affaire d'espionnage de
Toulon.
On a ressenti à Agram (Autriche-Hongrie)
et dans les localités situées au sud, une se-
cousse de tremblement de terre qui a duré
quelques secondes, sans causer toutefois de
dommages importants.
Le gouvernement roumain a publié un
Livre Vert sur le conflit entre la Grèce et
la Roumanie.
L'apaisement est presque complet à Mos-
cou. La lutte s'est poursuivie dans les pro-
vinces de la Baltique. La police a saisi des
bombes à Varsovie. Le .lieutenant général
Kriechivitski a été nommé gouverneur gé-
néral à Vilna-Grodno. Un décret impérial a
été publié, ordonnant des mesures pour as-
surer le fonctionnement normal des che-
mins de fer.
Le sultan du Maroc a accepté la date du
16 janvier pouf, l'ouverture des travaux de
la conférence d'Algésir.as.
Le président Roosevelt a signé un décret
par lequel certaines réductions sont appor-
tées aux droits sur les importations de
Suisse aux Etats-Unis..
La-Touraine est arrivée à New-York avec
trois jours de retard, par suite de la tem-
Le Congrès de la République de. Saint-Do-
mingue s'est réuni pour juger le président
Morales, en fuite.
Une révolution a éclaté dans la Républi-
que de l'Equateur.
PROPOS D'UN PARISIEN
On sait quelle opinion professe le clergé
catholique à l'endroit de la séparation des
Eglises et de l'Etat.
Il ést intéressant de savoir ce qu'en pense
le clergé protestant.
Un document que m'envoie un lecteur
nous renseigne. Ce document est un appel
adressé aux protestants de Saint-Etienne,
Clermont-Ferrand, Firminy, Saint-Chamond
et Rive-de-Gier, par le consistoire de ces dif-
férentes régions.
L'appel dit
La séparation des Eglises et de l'Etat est
un fait accompli;
Cette mesure est trop conforme aux princi-
pes de l'Evangile^ qui fait de la religion une
affaire essentiellement personnelle, pour que
nous ayons la regretter.
Puisque cette réforme est faite dans un
esprit de justice et qu'elle garantit la liberté
de conscience de la façon la plus absolue.
nous n'avons qu'à nous féliciter de voir enfin
lés vérités religieuses soutenues par ceux-là
1 seuls qui les professent, et le'culte entretenu
par les chrétiens qui éprouvent le besoin de
prier et de s'édifier en commun.
Pourquoi les chrétiens protestants accueil-
lent-ils avec satisfaction une réforme que
les chrétiens catholiques repoussent ? Pour-
quoi, les premiers se félicitent-ils qu'elle ait
été adoptée, alors que les autres crient à la
Clirétiens catholiques et chrétiens protes-
tants ont le même Dieu, la même loi, qui
est l'Evangile, le même but, qui est le salut
des âmes.
Donc, ce qui convient aux uns devrait con-
venir aux autres.
Et le contraire se produit. Je constate !e
fait sans me charger de l'expliquer.
H. Habduik. ̃'̃̃̃
L'arrestation d'un avoéat
M. Cavaillon juge suppléant à Marseille, ar-
rête et inculpe de complicité Mc Emile
Destrez, du barreau de Paris, dé-
fenseur du chef de bande Mira-
bel Une enquête est ou-
verte par le garde des
sceaux.
Un fait, unique et sans précédent dans les
annales judiciaires, et qui eut récemment
pour théâtre le parquet de Marseille, cause
en ce moment un profond émoi dans le
monde des avocats. A la suite de perquisi-
tions opérées chez des inculpés, perquisition
ayant amené la découverte de nombreuses
lettres où le nom d'un avocat parisien était
prononcé à diverses reprises, un juge d'ins-
truction, à défaut des accusés qu'il recher-
chait, a cru devoir arrêter cet avocat, alors
qu'il se présentait au parquet comme défen-
seur d'un des individus poursuivis.
Ce juge d'instruction extraordinaire est M.
Cavaillon, juge suppléant depuis trois ans au
parquet de Marseille,' et chargé en ce mo-
ment d'instruire contre les voleurs inter-
L'avocat est Me Emile Destrez, du barreau
de Paris, défenseur du chef de bande Mira-
bel, dont nous avons annoncé l'arrestation
il. Neuilly-sur-Seine.
Hier:soir, MI Emite Destrez, qui a été re-
lâché après quelques heures de détention,
s'est présenté au ministère de la justice avec
Me Chenu, bâtonnier de l'ordre des avocats,
afin de protester contre l'arrestation dont il
a été victime.
Voici à la suite de quels événements
s'est produite cette affaire, dont on s'est ef-
forcé jusqu'ici de tenir cachés les divers dé-
t iils. Elle est appelée néanmoins à un grand
retentissement.
Me Emile Destrez, qui avait été déjà, dans
un précédent procès, l'avocat d'un des in-
culpés de l'affair· des voleurs internatio.
naux, un nommé Baudoin, fut demanda
comme défenseur, il y a quelques jours,
par Mirabel, arrêté dans les circonstances
que l'on connaît. Il accepta et se rendit aus-
sitôt à Marseille, afin d'assister son nouveau
client devant le magistrat instructeur, M.
Cavaillon
Il vint se présenter à M. Cavaillon
Il me faut, lui dit le juge, après quel-
ques politesses échangées, l'adresse d'un
de vos anciens clients, nommé Bau-
doin, inculpé en ce moment dans l'affaire
des voieurs internationaux. le sais que
vous connaissez cette adresse. Donnez-la-
moi.
Ce n'est pas mon métier, répondit Me
Destrez. Les avocats défendent les inculpés,
ils ne les livrent pas.
En ce cas, dit le juge d'instruction, je
me vois obligé de vous mettre en état d'ar-
restation.
Il fit conduire MI Destrez, sous tonne es-
corte, chez le commissaire aux délégations,
et s'en fut aussitôt opérer une perquisition à
l'hôtel où il était descendu. Les valises de
L'ordre règne à Moscou
NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL SUR LES DÉCOMBRES
ARRIVÉE, DE RENFORTS' A MOSCOU
La révolution à Moscou expire sous
la mitraille. Notre envoyé spécial, qui a
assisté aux derniers râles de l'émeute,
li noûs adresse ce rapide croquis de la ville
sainte, où les ruines baignent dans le
sang
Moscou, 2 janvier, 9 h. 5 matin.
Dépêche de notre envoyé spécial.
Dans le quartier de Presnaïa, les derniers
révolutionnaires qui luttaient encore se
sont rendus ce matin. Ceux qui ont juré
de mourir quand même finissent une
lutte' désespérée au delà du Jardin zoo-
logique. Je reuiens de visiter Le quartier
Presnaïa, qui n'est qu'un amas de décom-
bres furnants les obus et la mitraille ont
incendié^ détruit quantité de maisons
sur la voie pubLique, les oddavres, réu-
nis par groupes, sur, lesquels on a jeté
dés toiles- et des bâches, sont gardés par
Les soldats, debout autour de grands
feux, à chaque carrefour, car it, fait 20
degrés de froid autour des usines, tou-
tes les maisons encore debout dressent
un drapeau blanc, demandant à être
épargnées par le canon.
J'ai été touillé trois fois. Ici. on fouille
MB Desprez furent ouvertes le juge fit sai-
¥!r,ttous les papiers qu'elles renfermaient
et qui ne contenaient, paraïf-îï, rîën' qui put
fournir à 1'instruction les éléments complé-
mentaires que le magistrat pensait y trou-
ver. Puis, au bout de cinq heures, il faisait
relâcher. le défenseur.
Le procédé, on le conçoit, était tout au
moins étrange.
Aussi, M» Destrez, dépouillé de son dossier,
s'empressa de quitter Marseille pour venir
à Paris, oùil raconta sa mésaventure à.son
bâtonnier, Me Chenu, qui décida de saisir
sur-le-champ le garde des sceaux de cette,
fantastique affaire.
Une enquête à été ouverte par les soins du
ministère de la justice.
Nous avons pu joindre hier M. Destrez,
mais il s'est refusé à toute interview.
Je ne puis rien vous dire pour l'instant,
nous a-t-il déclaré j'ai promis à mon bâton-
nier; 1148 Chenu, de ne me prêter à aucune
interview. M° Chenu a saisi régulièrement
te garde des sceaux de l'incident dans ces
conditions, ma personnalité disparaît et je
me retranche d'une façon absolue derrière
mon bâtonnier, qui est seul qualifié en l'es-
pèce pour faire respecter l'intégrité de la
défense.
M. de Possel clora son instruction vers fin
janvier il est convaincu de la culpabi-
lité de Féraud, qui reste seul en
cause avec Wolf et Wieger
Trucs de morphinomane.
Marseille, 2 janvier. Dépêche particu-
Hère du « Matin ». -,L'instruction de l'af-
faire d'espionnage est décidément limitée à
Wolf, Wieger et Féraud c'est, du moins,
ce que m'a.formellement affirmé M. de Pos-
sel, qui se décide à se départir de sa si-
lencieuse réserve
Le magistrat croit pouvoir clore son ins-
truction dans les derniers jours de janvier
les inculpés comparaîtraient donc devant le
tribunal correctionnel dans la première
'quinzaine de février. Inutile d'ajouter que,
étaht donné le caractère de l'affaire, les dé-
bats auront lieu à huis clos.
M. de Possel est absolument convaincu
de la culpabilité de Féraud, malgré le mou-
vement qui s'est produit à Toulon en faveur
de l'ancien membre du comité ouvrier de
l'arsenal. Le juge instructeur affirme que
les charges qui pèsent sur l'inculpé sont gra-
ves.
Wolf a demandé qu'un avocat d'office lui
fût donné, et MI Charles Goirand a été dé-
signé.
Quant à Wieger, il se défendra lui-même.
Le docteur Wieger, qui se donnait un air
ahuri après son arrestation, a depuis chan-
gé d'attitude, et il a fait preuve, au cours de
ses interrogatoires, d'une intelligence et
d'une habileté remarquables. Wieger est un
morphinomane impénitent, et, par mesure
d'humanité, le médecin de la prison lui a
permis de se faire deux piqûres par jour
mais Wieger profite de cette autorisation
pour faire chanter le juge d'instruction
quand M. de Possel veut l'interroger, il
exige, une piqûre supplémentaire, où il ne
répond pas aux questions qu'on lui pose.
On arrête, on relâche.
Toulon, 2 janvier. Dépêche particulière',
du Matin )). Le sujet allemand, Ludwig!
tout le monde. MaLheur à qui porte une
arme Le centre de Moscou renait à Ia
vze, pendant que, dans le faubourg, on
procède aux dernières exécutions som-
maires et que se termine, de façon si tra-
gique, ce rouge épisode de la révolution
en Russie. Il m'est impossible de vous
rapporter ici toutes les sombres anecdo-
tes qui déjà courent dans la ville. Cha-
que rue à la sienne
GASTON LEROUX.
En face de la révolution qui succombe,
le parti réactionnaire retrouve son cou-
rage. Des comités s'organisent qui de-
mandent au gouvernement d'achever les
grévistes épuisés.
Moscou, 1OT Janvier. Le comité ouvriers
d'lvanovo. (Vosnessensk) a adressé aux tra-
vailleurs de toutes les gares de Moscou une
proclamation dans laquelle il est dit que tes
paysans sont prêts à se soulever pour la
défense -dit trône et de leurs droits foulés
aux pieds par les révolutionna'ires et qu'ils
n'attendent pour cela 'qu'un- signal. En con-
séquence^ le comité invite l'armée d ne pas
épargner la vie des grévistes il déclare que
la Russie entière a maintenant les regards
tournés du côté de l'armée. aue les vaitsans
W.i dont je vous ai annoncé l'arrestation,
a été remis en liberté.
€et étranger est un voyageur
d'une importante maison allemande." 11 n'est
nullement suspect, et c'est par erreur qu'il
a été arrété.
Une note allemande.
Berlin, 2 janvier. L'officieuse Gazelle
de V Allemagne du Nord dit que, en ce qui
concerne les tentatives qui sont faites pour
établir un rapport entre le gouvernement al-
lemand et les cas des affaires d'espionnage
signalés à Toulon et à Marseille, elle est au-
torisée à déclarer qu'aucune autorité alle-
mande, ni aucune personne au service de
l'armée ou de la marine allemande n'est,
d'aucune façon, intéressée dans les événe-
ments dont il a été question dans la'presse
française. (Reuter.)
DES SOLDATS,
PAS DE COURTISANS
A PROPOS D'UN TABLEAU D'AVANCEMENT
Nous publions aujourd'hui la pre-
mière partie du tableau d'avancement
de l'armée.
Mardi prochain, lorsqu'il sera com-
plet, il comprendra six cents noms en
tout. ̃-?'
Le ministre de la guerre, au moment
où ce tableau se préparait, a reçu neuf
mille six cents recommandations.
On dirait que l'armée n'a plus de
chefs, que les officiers, renonçant à. se
prévaloir des propositions hiérarchi-
ques, découragés de montrer qu'ils ont
de la valeur, se croient uniquement te-
nus de montrer qu'ils ont des relations.
Ne perdons pas de temps chercher
quels sont ceux qui ont intronisé ces ha-
bitudes militaires récriminer n'est pas
réformer. Or, il faut réformer avant qu'il
soit trop tard.
Une armée où, de bas en haut, dans
tous les grades, à tous les moments, cha-
cun n'a pas dans celui qui lui commande
une confiance absolue, n'est plus une
armée elle devient une administration
mal tenue, où le sentiment du devoir na-
tional s'efface.
Les partis, au lieu de respecter l'ar-
mée, essaient de la tirer à eux, et les li-
gues de gauche la disputent aux ligues
de droite.
Depuis quelques années, ces tendan-
ces ne se sont que trop manifestées les
parlementaires les ont encouragées. Ils
devraient cependant, en repassant leur
histoire, apprendre que le pire des dan-
gers pou r -un pays c'est d'avoir une àr;
méé politicienne. • .-̃
Des deux hommes qui ont réalisé le
plus parfaitement le type de l'officier po-
l'un s'appelait Bazaine et l'au-
tre Boulanger.
Le ministee dé la guerre, lui, soucieux
.de ses responsabilités, s'est inquiété de
voir de pareilles mœurs s'acclimater
dans notre: armée. Nous croyons savoir
qu'il s'occupe d'y mettre un terme,.
11 n'y aura pas un Français qui ne l'en,
applaudisse et qui ne dise « Enfin »
sont prêts à soutenir. Le comité prie les di-
recteurs des chénains de fer aboutissant à
Moscou de déclarer à leurs employés, gré-
vistes ou non .grévistes, que le peuple est
irrévocablement décidé à se soulever au dé-
but de la nouvelle année, et; si la circula-
tion n'est pas rétablie sur les chemins de
fer avant le 6 janvier, à réprimer la grève
et proclamer la paix au Kremlin de Mos-
cou. Les paysans ont déclaré qu'iIs aimenf,
mieua périr en défendant la patrie que de
mourir de faim chez eux ou de succomber
victimes de la grève. (Havas.)
Saint-Pétersbourg, 2 danvier. Dans les
cercles compétents, on se montre satisfait
de ce que les troupes chargées d'étouffer le
mouvement révolutionnaire de Moscou
soient restées fidèles à leur devoir. C'est là,
estime-t'On, le résultat le plus important
de l'affaire. Les troupes ont écrasé l'émeute
avec conviction. Du reste, connaissant le
dévouement traditionnel des troupes russes
leur empereur, on ne pouvait pas croire
à des actes de désobéissance de leur part.
{Havas.)
Et maintenant qu'à Moscou l'ordre est
rétabli, c'est vers un autre point de l'em-
pire que la révolte éclate :Vains les pro-
vinces baltiques, où le sang encore va
couler.
B. B.
UN HABITANT DE L'AU-DELA?
C'est le'nôm du fantôme dont M. Charles Ri-
chet a constaté l'existence par des expé-
riences décisives, que l'illustre sa-
vant offre de recommencer sous
les yeux des professeur
Giard et Curie.
Croyez-vous aux fantômes ? Je gage que
non, et, vous avez bien raison de ny pas
croire. Saint Thomas, le véritable inventeur
de la méthode expérimentale, nous a juste-
ment enseigné, bien avant Descàrtes'et
Claude Bernard, qu'il ne faut rien recevoir
en sa créance qui ne soit vérifiable et dû-
ment vérifié. Voilà pourquoi, hier, je né
croyais pas aux fantômes voilà aussi pour-
quoi j'y crois aujourd'hui sans réserve, com-
nie je crois à l'existence de M. Cliarles Ri-
chet.
J'avoue que son article sur les apparitions
de la villa Carmen m'avait déjà quelque peu
troublé: Comment ne pas prendre au sé-
rieux le témoignage d'un homme de cette
valeur, dont l'autorité scientifique n'a d'é-
gale que l'autorité morale ? Si vous insinue/.
qu'en pareille matière l' « autorité » n'a rien
à voir, je vous invite à lire les Annales des
sciences psychiques, et vous constaterex
avec l'illustre savant qu'il est impossible de
prendre plus de précautions pour empêcher
la fraude. Oui, après cette simple lecture. j^
l'esprit le plus exigeant doit se tenir pour
satisfait.Et pourtant.
Pourtant,.il y avait, dans le récit des ex-
périences. d'Alger, tant de détails extraonli-
naires abracadabrants » Ce fantôme qui'
se baptise lui-même B. B. et qui s'exerce ;i
« faire glouglou » en soufflant dans une bou-
teille, ce fantôme que l'on applaudit quîui'.i
il a réussi son tour et qui, « disparu
le rideau, nous dit M. Richet, reparaît à
trois reprises en montrant sa tête et sa-
luant ainsi qu'un acteur'qui revient sur la
'scène ce cabotin de fantôme (va-t-il se
fâcher aussi, celui-là ?) m'avait donné sin-
gulièrement à réfléchir. Si bien que, pour
en avoir l'esprit net, je suis allé ce matin
faire part de mes réflexions au vénéré mal-
Il a souri de mes doutes..
Moi aussi, me dit-il, j'ai douté et je
doute encore. N'imaginez point que je sois
naïf et crédule. D'abord, je ne crois pas au
spiritisme je m'en tiens à noter scrupuleu-
sement des faits indéniables.
Les objections d'un incrédule.
Nul ne suspecta jamais votre bonne
foi, cher mettre mais vous avez
vous-même l'hypothèse d'une supercherie.
Et, d'après le docteur Valentin, votre fan-
tôme ne serait qu'un mannequin fabriqué
par d'habiles mystificateurs un masque
japonais avec une fausse barbe, au bout
d'un manche à balai que dissimule une dra-
perie. M. Valenlin .prétend même aperce-
voir nettement le manche à balai sur les
.photographies que vous avez publiées.
M. ltichet hausse les épaules sans cesser
de sourire.
7– Si ce docteur était plus au courant de
nos recherches, il saurait que le corps des
fantômes, lorsqu'il commence à se maté-
rialiser, d'abord l'apparence rigide d'un
morceau de bois. Il y a mieux je pourrais
vous citer une expérience, où j'ai vu comme
un manche à balai sortir de la hanche fin
médium, et, au bout, il y avait une main-
vivante. C'est ce que j'appelle :un « ecti-
plasme ». Mais venez vous allez voir
,vous-même.
M. Richet va-t-il me faire l'honneur de
me présenter à B. B. en personne ?. Je ne
puis·me défendre d'un léger émoi.
Mais non, il ne s'agit que de regarder sa
photographie dans un stéréoscope. Il n'y a
pas dire l'hypothèse du masque japonais
totpbe au premier regard. C'est ;bien une fi-
gure de chair qui est là, mais d'une chair
étrange. Le visage est flou, non .pas in-
consistant il est blafard et grumeleux,
comme s'il' entrait eh décomposition (ou en
recomposition, d'après- la théorie des spi».
rites).
J'insiste
Le docteur Valentin estime que votre
expérience n'a pas eu lieu dans des condi-
tions irréprochables, car dans la pièce il y
avait des fauteuils, un bahut, un baldaquin,
une baignoire.
Et puis après ? J'ai soigneusement ex- ̃̃
ploré tous les meubles, comme ceci, tenez
Le maître ouvre le tiroir d'un chiffonnier
-4- Personne n'est caché dans ce tiroir,
n'est-ce pas ?
M. Richet avise un pupitre il s'agenouille.
le regarde par-dessous et frappe à droite et
8:gauche de,petits coups secs, comme pour
ausculter chaque planche.
Une foi fortement étayée.
Pas un clou, pas une épingle ne m'ont
échappé, poursuit-il en se relevant et je ne
suis pas moins sûr de la sincérité du mé-
dium. Un mannequin ?. Où Mile Marth<> r
l'aurait-elle four'ré ? Comment cette jeune
fille menue l'aurait-elle dissimulé sous sa
chemisette, qui dessinait très précisément
la forme de son buste, ou sous sa robe
courte et très aiustée ? Je suis d'ailleurs as.
SIX PAGES Paris et Départements CINQ CENTIMES
Mercredi 3 Janvier 1906
DERNIERS TÉLÉGRAMMES DE LA NUIT
SEUL JOURNAL FRANÇAIS RECEVANT PAR FILS SPECIAUX LES DERNIÈRES NOUVELLES DU MONDE ENTIER
LE PARTI DE Là GUERRE
EH ALLEMAGNE
-Y a-t-il un parti de la guerre en Alle-
magne Faut-il voir dans l'action de
Guillaume II au Maroc un geste sponta-
né et la recherche d'une illustre aven-
ture ? Faut-il y découvrir, au contraire,
le dessein continu d'un homme qui re-
présente des aspirations précises et qui
s'appuie sur un parti constitué ?
Il semble certain aujourd'hui que,
quoi que l'on ait voulu dire de l'indiffé-
rence populaire, il, y avait en Allemagne
un parti prêt à sacrifier la paix à ses re-
vendications en Afrique. Lorsque survint
l'équipée de Guillaume à Tanger, il y
avait un an déjà qu'une campagne se me-
rtait en faveur de la colonisation maro-
caine. Des statistiques ingénieuses s'ef-
forçaient de démontrer que l'Allemagne
4 tait la! première nation intéressée à la
prospérité commerciale du Maroc, et
L'on avait vu un ancien gouverneur gé-
néral de colonie, M. von Liebert; prêcher
officiellement, dès décembre 1903, à l'u-
de Leipsig, l'expansion vérs le
Maroc, qui devait être un champ d'ac-
tion nouveau pour la tuUut'e
Enfin, le dernier Livre Jaune nous a
révélé de façon indiscutable les préten-
tions très nettes du parti colonial alle-
mand sur l'empire du maghzen.
Le 30 mai 1904, M. Bihourd rendait
compte à notre ministre des affaires
étrangères d'une manifestation de la
« Société coloniale allemande » en fa-
veur du Maroc, et, le 3 juin, il signalait
une décision unanime de l' « Union pan-
germanique » de Lûbeck, réclamant « au
rom des intérêts politiques et économi-
ques de l'Allemagne n l'acquisition de la
côte atlantique du Maroc et se déclarant
blessée de l' « humiliation subie par l'em-
pire, qui n'a pas été consulté au moment
des négociations franco-anglaises ».
Le parttcolonial allemand, qui compte
à peine quelques années de vie, semble
ainsi avoir pris une influence prépon-
dérante sur la politique allemande, soit
qu'il s'érige en apôtre de la « plus grande
Allemagne », soit qu'il prépare l'opinion
aux manifestations tumultueuses de
Guillaume IL
•Ce parti se compose non pas seule-
ment des partisans convaincus de la co-
lonisation, mais aussi de tous les pan-
germanistes et de ces commerçantes des
villes maritimes, qui, se voyant fermé,
par des traités de commerce presque
prohibitifs, une partie du marché mon-
dial, cherchent dans les pays de protec-
torat un champ d'exploitation directe.
C'est ainsi que ce parti colonel con-
tinue l'histoire de cette antique -fc Hanse
germanique » qui put essayer, à un mo-
ment donné, de disputer à l'Angleterre
et à la Hollande l'empire des mers.
Depuis vingt ans que l'Allemagne
s'est jetée, malgré Bismarck. dans les
aventures coloniales, elle n'a tiré de son
effort que des déboires et des faillites..
La moindre de ses opérations com-
porte des conséquences ruineuses. L'a-
chat des îles Caroline et Marianne, en
1899, a coûté plus de 20 millions. Les
chemins de fer africains de l'est et du
sud-ouest allemand en ont coûté 30, et
né présentent chaque année que des bi-
lans de détresse. Kiao-Tcheou coûte, à
l'heure présente, plus de cent millions
et ne rapporte à l'empire que des inquié-
tudes, en face de la Chine qui s'éveille.
Enfin, la révolte des Herreros, dans le
Sud-ouest africain, se solde, cette an-
née, par un déficit de 130 millions.
Fn dehors de ces dépenses extraQrdi-
haiff?, l'empiré contribue annuellement
pour près de 40 millions aux dépenses de
ses colonies, sans compter les subven-
tions diverses qui sont inscrites aux bud-
gèis de- la guerre et de la marine.
n'ailleurs,. ces dépenses s'accroissent
de jour en jour. L'Allemagne vient de
s'offrir, voici cinq semaines, le luxe d'un
ministère dés colonies, et la Gazette de
[Cologne a signalé que ce nouvel organe
possédait déjà, en naissant, un plus
arand nombre de fonctionnaires que le
Foreign Office de Londres.
Le nouveau secrétaire d'Etat a fait en-
trevoir au Reichstag la. nécessité de dé-
penses nouvelles pour la construction
d'un chemin de fer de Lüderitz à Kubul,
et l'on agite la question de créer des li-
gnes nouvelles à Togo, dans le Came-
roun, et dans l'Afrique orientale.
Tout cela pour un commerce qui ne
dépasse pas 70 à 80 millions de francs,
dont la moitié seulement se fait au profit
«le l'Allemagne.
v* '̃̃
C'est ainsi que le parti colonial alle-
mand assiste à sa propre faillite. Aucune
protection ne lui a manqué pourtant il
a bénéficié des subventions gouverne-
mentales et de l'appui des industriels, il
a possédé des voyageurs de commerce
uniques au monde Waldersee a placé
ses produits en Chine, et Guillaume II a
rait connaître sa firme en Paléstine.
Aujourd'hui, ce parti, que ni la grande
industrie ni l'empereur ne suffisent à
faire vivre, est comme un commerçant
rlue la faillite menace et qui cherche son
salut dans les aventures.
A chaque instant, la nouvelle nous ar-
rive d'incidents de frontière survenus
dans les colonies allemandes. Il y a quel-
quels mois, c'était sur la frontière du Ca-
meroun et du Congo, un officier alle-
mand faisant massacrer, Missoum-
Missoum, des miliciens au service de la
France; il y a quelques jours, c'était,
dans le Sud Africain, un sujet anglais as-
bassiné par des réguliers allemands.
Puis ce sont des tentatives de main-
mise sur les dernières terres indépen-
dantes de l'Afrique. L'Allemagne veille
jalousement sur la République de Libe-
ria, dont elle prévoit déjà le partage. La
maison allemande Woermann, qui dé-
tient les deux tiers du commerce de cet
Etat, proteste contre toute mesure qui
pourrait en assurer là durée elle incite
même la république africaine à deman-
dera la France une délimitation de fron-
tières, qui comporterait en même temps,
de notre part, une abdication de nos
droits éventuels.
La colonisation allemande, ruinée par-
tout où elle se trouvé et réduite à la
pire-détresse, cherche dans tout l'univers
des débouchés quand même et des spé
culations à tout prix.
L'occupation de Kiao-Tcheou, qui fut,
dit-on, une des grandes idées du règne,
n'a comporté pour l'Allemagne que des
déceptions, et il semble que Guillaume
lui-même soit sur le point de renoncer à
l'Asie, qui se ferme.
La colonisation allemande a tourné ses
espérances vers l'Afrique. Là encore,
les, colonies de l'est et du sud-ouest ne
lui ont procuré que des révôltes il sem-
ble que le Cameroun soit un pays pau-
vre Togo est une petite colonie Liberia
n'est qu'une espérance indécise.
C'est alors que le parti colonial a voulu
le Maroc c'est là qu'il tente aujourd'hui
un suprême effort, c'est là que Guillaume
a porté la dernière espérance de sa
La colonisation allemande va-t-elle
trouver au Maroc sa revanche, va-t-elle
remporter à Algésiras sa première vic-
toire ?
Jean d'Orsay.
Les tableaux d'avancement pour 1906.
DE MIDI A MINUIT
Les MU d'hier– En France et à l'étranger.
Clôture de la Bourse, férme 3 99 20
Extérieure, 93 S£> Russe Consolidé, 85
Turc, 91 60 Rio, 1,695 Rand Mines, 185.
M. Etienne, ministre de la guerre, et M.
Dujardin-Beaumëtz, sous-secrétaire d'Etat,
ont, Nice, déposé une couronne, sur la
tombe du Gambetta.
La tempête, continue dans la Manche. La
mer est démontée. On a sauvé l'équipage du
dundee Emile-Georges, venant de La Ro-
chelle avec un chargement de chaux et qui
a sombré à la pointe de Kermovan, près du
Conquet.
On mande de Tunis que 1 état du bey s'est
sérieusement aggravé.
Le secrétaire de l'Association de la ré-
îortrie ââ^t3otijgo à Londres a reçu une Jet-
tre de sir, Edward Grey, lui annonçant que
le gouvernement anglais allait appeler 1 at-
tention du gouvernement du Congo sur la
non-publication par ce gouvernement des
témoignages recueillis par la commission
d'enquêté du Congo.
Le vapeur espagnol Pepin, allant de Bil-
bao à Cardiff, a fait naufrage sur le bas-
fonds de Sberwàlther (Angleterre).
La Gazette de l'Allemagne du Nord a pu-
blié une note démentant que des fonction-
naires ou des officiers allemands fussent
compromis dans l'affaire d'espionnage de
Toulon.
On a ressenti à Agram (Autriche-Hongrie)
et dans les localités situées au sud, une se-
cousse de tremblement de terre qui a duré
quelques secondes, sans causer toutefois de
dommages importants.
Le gouvernement roumain a publié un
Livre Vert sur le conflit entre la Grèce et
la Roumanie.
L'apaisement est presque complet à Mos-
cou. La lutte s'est poursuivie dans les pro-
vinces de la Baltique. La police a saisi des
bombes à Varsovie. Le .lieutenant général
Kriechivitski a été nommé gouverneur gé-
néral à Vilna-Grodno. Un décret impérial a
été publié, ordonnant des mesures pour as-
surer le fonctionnement normal des che-
mins de fer.
Le sultan du Maroc a accepté la date du
16 janvier pouf, l'ouverture des travaux de
la conférence d'Algésir.as.
Le président Roosevelt a signé un décret
par lequel certaines réductions sont appor-
tées aux droits sur les importations de
Suisse aux Etats-Unis..
La-Touraine est arrivée à New-York avec
trois jours de retard, par suite de la tem-
Le Congrès de la République de. Saint-Do-
mingue s'est réuni pour juger le président
Morales, en fuite.
Une révolution a éclaté dans la Républi-
que de l'Equateur.
PROPOS D'UN PARISIEN
On sait quelle opinion professe le clergé
catholique à l'endroit de la séparation des
Eglises et de l'Etat.
Il ést intéressant de savoir ce qu'en pense
le clergé protestant.
Un document que m'envoie un lecteur
nous renseigne. Ce document est un appel
adressé aux protestants de Saint-Etienne,
Clermont-Ferrand, Firminy, Saint-Chamond
et Rive-de-Gier, par le consistoire de ces dif-
férentes régions.
L'appel dit
La séparation des Eglises et de l'Etat est
un fait accompli;
Cette mesure est trop conforme aux princi-
pes de l'Evangile^ qui fait de la religion une
affaire essentiellement personnelle, pour que
nous ayons la regretter.
Puisque cette réforme est faite dans un
esprit de justice et qu'elle garantit la liberté
de conscience de la façon la plus absolue.
nous n'avons qu'à nous féliciter de voir enfin
lés vérités religieuses soutenues par ceux-là
1 seuls qui les professent, et le'culte entretenu
par les chrétiens qui éprouvent le besoin de
prier et de s'édifier en commun.
Pourquoi les chrétiens protestants accueil-
lent-ils avec satisfaction une réforme que
les chrétiens catholiques repoussent ? Pour-
quoi, les premiers se félicitent-ils qu'elle ait
été adoptée, alors que les autres crient à la
Clirétiens catholiques et chrétiens protes-
tants ont le même Dieu, la même loi, qui
est l'Evangile, le même but, qui est le salut
des âmes.
Donc, ce qui convient aux uns devrait con-
venir aux autres.
Et le contraire se produit. Je constate !e
fait sans me charger de l'expliquer.
H. Habduik. ̃'̃̃̃
L'arrestation d'un avoéat
M. Cavaillon juge suppléant à Marseille, ar-
rête et inculpe de complicité Mc Emile
Destrez, du barreau de Paris, dé-
fenseur du chef de bande Mira-
bel Une enquête est ou-
verte par le garde des
sceaux.
Un fait, unique et sans précédent dans les
annales judiciaires, et qui eut récemment
pour théâtre le parquet de Marseille, cause
en ce moment un profond émoi dans le
monde des avocats. A la suite de perquisi-
tions opérées chez des inculpés, perquisition
ayant amené la découverte de nombreuses
lettres où le nom d'un avocat parisien était
prononcé à diverses reprises, un juge d'ins-
truction, à défaut des accusés qu'il recher-
chait, a cru devoir arrêter cet avocat, alors
qu'il se présentait au parquet comme défen-
seur d'un des individus poursuivis.
Ce juge d'instruction extraordinaire est M.
Cavaillon, juge suppléant depuis trois ans au
parquet de Marseille,' et chargé en ce mo-
ment d'instruire contre les voleurs inter-
L'avocat est Me Emile Destrez, du barreau
de Paris, défenseur du chef de bande Mira-
bel, dont nous avons annoncé l'arrestation
il. Neuilly-sur-Seine.
Hier:soir, MI Emite Destrez, qui a été re-
lâché après quelques heures de détention,
s'est présenté au ministère de la justice avec
Me Chenu, bâtonnier de l'ordre des avocats,
afin de protester contre l'arrestation dont il
a été victime.
Voici à la suite de quels événements
s'est produite cette affaire, dont on s'est ef-
forcé jusqu'ici de tenir cachés les divers dé-
t iils. Elle est appelée néanmoins à un grand
retentissement.
Me Emile Destrez, qui avait été déjà, dans
un précédent procès, l'avocat d'un des in-
culpés de l'affair· des voleurs internatio.
naux, un nommé Baudoin, fut demanda
comme défenseur, il y a quelques jours,
par Mirabel, arrêté dans les circonstances
que l'on connaît. Il accepta et se rendit aus-
sitôt à Marseille, afin d'assister son nouveau
client devant le magistrat instructeur, M.
Cavaillon
Il vint se présenter à M. Cavaillon
Il me faut, lui dit le juge, après quel-
ques politesses échangées, l'adresse d'un
de vos anciens clients, nommé Bau-
doin, inculpé en ce moment dans l'affaire
des voieurs internationaux. le sais que
vous connaissez cette adresse. Donnez-la-
moi.
Ce n'est pas mon métier, répondit Me
Destrez. Les avocats défendent les inculpés,
ils ne les livrent pas.
En ce cas, dit le juge d'instruction, je
me vois obligé de vous mettre en état d'ar-
restation.
Il fit conduire MI Destrez, sous tonne es-
corte, chez le commissaire aux délégations,
et s'en fut aussitôt opérer une perquisition à
l'hôtel où il était descendu. Les valises de
L'ordre règne à Moscou
NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL SUR LES DÉCOMBRES
ARRIVÉE, DE RENFORTS' A MOSCOU
La révolution à Moscou expire sous
la mitraille. Notre envoyé spécial, qui a
assisté aux derniers râles de l'émeute,
li noûs adresse ce rapide croquis de la ville
sainte, où les ruines baignent dans le
sang
Moscou, 2 janvier, 9 h. 5 matin.
Dépêche de notre envoyé spécial.
Dans le quartier de Presnaïa, les derniers
révolutionnaires qui luttaient encore se
sont rendus ce matin. Ceux qui ont juré
de mourir quand même finissent une
lutte' désespérée au delà du Jardin zoo-
logique. Je reuiens de visiter Le quartier
Presnaïa, qui n'est qu'un amas de décom-
bres furnants les obus et la mitraille ont
incendié^ détruit quantité de maisons
sur la voie pubLique, les oddavres, réu-
nis par groupes, sur, lesquels on a jeté
dés toiles- et des bâches, sont gardés par
Les soldats, debout autour de grands
feux, à chaque carrefour, car it, fait 20
degrés de froid autour des usines, tou-
tes les maisons encore debout dressent
un drapeau blanc, demandant à être
épargnées par le canon.
J'ai été touillé trois fois. Ici. on fouille
MB Desprez furent ouvertes le juge fit sai-
¥!r,ttous les papiers qu'elles renfermaient
et qui ne contenaient, paraïf-îï, rîën' qui put
fournir à 1'instruction les éléments complé-
mentaires que le magistrat pensait y trou-
ver. Puis, au bout de cinq heures, il faisait
relâcher. le défenseur.
Le procédé, on le conçoit, était tout au
moins étrange.
Aussi, M» Destrez, dépouillé de son dossier,
s'empressa de quitter Marseille pour venir
à Paris, oùil raconta sa mésaventure à.son
bâtonnier, Me Chenu, qui décida de saisir
sur-le-champ le garde des sceaux de cette,
fantastique affaire.
Une enquête à été ouverte par les soins du
ministère de la justice.
Nous avons pu joindre hier M. Destrez,
mais il s'est refusé à toute interview.
Je ne puis rien vous dire pour l'instant,
nous a-t-il déclaré j'ai promis à mon bâton-
nier; 1148 Chenu, de ne me prêter à aucune
interview. M° Chenu a saisi régulièrement
te garde des sceaux de l'incident dans ces
conditions, ma personnalité disparaît et je
me retranche d'une façon absolue derrière
mon bâtonnier, qui est seul qualifié en l'es-
pèce pour faire respecter l'intégrité de la
défense.
M. de Possel clora son instruction vers fin
janvier il est convaincu de la culpabi-
lité de Féraud, qui reste seul en
cause avec Wolf et Wieger
Trucs de morphinomane.
Marseille, 2 janvier. Dépêche particu-
Hère du « Matin ». -,L'instruction de l'af-
faire d'espionnage est décidément limitée à
Wolf, Wieger et Féraud c'est, du moins,
ce que m'a.formellement affirmé M. de Pos-
sel, qui se décide à se départir de sa si-
lencieuse réserve
Le magistrat croit pouvoir clore son ins-
truction dans les derniers jours de janvier
les inculpés comparaîtraient donc devant le
tribunal correctionnel dans la première
'quinzaine de février. Inutile d'ajouter que,
étaht donné le caractère de l'affaire, les dé-
bats auront lieu à huis clos.
M. de Possel est absolument convaincu
de la culpabilité de Féraud, malgré le mou-
vement qui s'est produit à Toulon en faveur
de l'ancien membre du comité ouvrier de
l'arsenal. Le juge instructeur affirme que
les charges qui pèsent sur l'inculpé sont gra-
ves.
Wolf a demandé qu'un avocat d'office lui
fût donné, et MI Charles Goirand a été dé-
signé.
Quant à Wieger, il se défendra lui-même.
Le docteur Wieger, qui se donnait un air
ahuri après son arrestation, a depuis chan-
gé d'attitude, et il a fait preuve, au cours de
ses interrogatoires, d'une intelligence et
d'une habileté remarquables. Wieger est un
morphinomane impénitent, et, par mesure
d'humanité, le médecin de la prison lui a
permis de se faire deux piqûres par jour
mais Wieger profite de cette autorisation
pour faire chanter le juge d'instruction
quand M. de Possel veut l'interroger, il
exige, une piqûre supplémentaire, où il ne
répond pas aux questions qu'on lui pose.
On arrête, on relâche.
Toulon, 2 janvier. Dépêche particulière',
du Matin )). Le sujet allemand, Ludwig!
tout le monde. MaLheur à qui porte une
arme Le centre de Moscou renait à Ia
vze, pendant que, dans le faubourg, on
procède aux dernières exécutions som-
maires et que se termine, de façon si tra-
gique, ce rouge épisode de la révolution
en Russie. Il m'est impossible de vous
rapporter ici toutes les sombres anecdo-
tes qui déjà courent dans la ville. Cha-
que rue à la sienne
GASTON LEROUX.
En face de la révolution qui succombe,
le parti réactionnaire retrouve son cou-
rage. Des comités s'organisent qui de-
mandent au gouvernement d'achever les
grévistes épuisés.
Moscou, 1OT Janvier. Le comité ouvriers
d'lvanovo. (Vosnessensk) a adressé aux tra-
vailleurs de toutes les gares de Moscou une
proclamation dans laquelle il est dit que tes
paysans sont prêts à se soulever pour la
défense -dit trône et de leurs droits foulés
aux pieds par les révolutionna'ires et qu'ils
n'attendent pour cela 'qu'un- signal. En con-
séquence^ le comité invite l'armée d ne pas
épargner la vie des grévistes il déclare que
la Russie entière a maintenant les regards
tournés du côté de l'armée. aue les vaitsans
W.i dont je vous ai annoncé l'arrestation,
a été remis en liberté.
€et étranger est un voyageur
d'une importante maison allemande." 11 n'est
nullement suspect, et c'est par erreur qu'il
a été arrété.
Une note allemande.
Berlin, 2 janvier. L'officieuse Gazelle
de V Allemagne du Nord dit que, en ce qui
concerne les tentatives qui sont faites pour
établir un rapport entre le gouvernement al-
lemand et les cas des affaires d'espionnage
signalés à Toulon et à Marseille, elle est au-
torisée à déclarer qu'aucune autorité alle-
mande, ni aucune personne au service de
l'armée ou de la marine allemande n'est,
d'aucune façon, intéressée dans les événe-
ments dont il a été question dans la'presse
française. (Reuter.)
DES SOLDATS,
PAS DE COURTISANS
A PROPOS D'UN TABLEAU D'AVANCEMENT
Nous publions aujourd'hui la pre-
mière partie du tableau d'avancement
de l'armée.
Mardi prochain, lorsqu'il sera com-
plet, il comprendra six cents noms en
tout. ̃-?'
Le ministre de la guerre, au moment
où ce tableau se préparait, a reçu neuf
mille six cents recommandations.
On dirait que l'armée n'a plus de
chefs, que les officiers, renonçant à. se
prévaloir des propositions hiérarchi-
ques, découragés de montrer qu'ils ont
de la valeur, se croient uniquement te-
nus de montrer qu'ils ont des relations.
Ne perdons pas de temps chercher
quels sont ceux qui ont intronisé ces ha-
bitudes militaires récriminer n'est pas
réformer. Or, il faut réformer avant qu'il
soit trop tard.
Une armée où, de bas en haut, dans
tous les grades, à tous les moments, cha-
cun n'a pas dans celui qui lui commande
une confiance absolue, n'est plus une
armée elle devient une administration
mal tenue, où le sentiment du devoir na-
tional s'efface.
Les partis, au lieu de respecter l'ar-
mée, essaient de la tirer à eux, et les li-
gues de gauche la disputent aux ligues
de droite.
Depuis quelques années, ces tendan-
ces ne se sont que trop manifestées les
parlementaires les ont encouragées. Ils
devraient cependant, en repassant leur
histoire, apprendre que le pire des dan-
gers pou r -un pays c'est d'avoir une àr;
méé politicienne. • .-̃
Des deux hommes qui ont réalisé le
plus parfaitement le type de l'officier po-
l'un s'appelait Bazaine et l'au-
tre Boulanger.
Le ministee dé la guerre, lui, soucieux
.de ses responsabilités, s'est inquiété de
voir de pareilles mœurs s'acclimater
dans notre: armée. Nous croyons savoir
qu'il s'occupe d'y mettre un terme,.
11 n'y aura pas un Français qui ne l'en,
applaudisse et qui ne dise « Enfin »
sont prêts à soutenir. Le comité prie les di-
recteurs des chénains de fer aboutissant à
Moscou de déclarer à leurs employés, gré-
vistes ou non .grévistes, que le peuple est
irrévocablement décidé à se soulever au dé-
but de la nouvelle année, et; si la circula-
tion n'est pas rétablie sur les chemins de
fer avant le 6 janvier, à réprimer la grève
et proclamer la paix au Kremlin de Mos-
cou. Les paysans ont déclaré qu'iIs aimenf,
mieua périr en défendant la patrie que de
mourir de faim chez eux ou de succomber
victimes de la grève. (Havas.)
Saint-Pétersbourg, 2 danvier. Dans les
cercles compétents, on se montre satisfait
de ce que les troupes chargées d'étouffer le
mouvement révolutionnaire de Moscou
soient restées fidèles à leur devoir. C'est là,
estime-t'On, le résultat le plus important
de l'affaire. Les troupes ont écrasé l'émeute
avec conviction. Du reste, connaissant le
dévouement traditionnel des troupes russes
leur empereur, on ne pouvait pas croire
à des actes de désobéissance de leur part.
{Havas.)
Et maintenant qu'à Moscou l'ordre est
rétabli, c'est vers un autre point de l'em-
pire que la révolte éclate :Vains les pro-
vinces baltiques, où le sang encore va
couler.
B. B.
UN HABITANT DE L'AU-DELA?
C'est le'nôm du fantôme dont M. Charles Ri-
chet a constaté l'existence par des expé-
riences décisives, que l'illustre sa-
vant offre de recommencer sous
les yeux des professeur
Giard et Curie.
Croyez-vous aux fantômes ? Je gage que
non, et, vous avez bien raison de ny pas
croire. Saint Thomas, le véritable inventeur
de la méthode expérimentale, nous a juste-
ment enseigné, bien avant Descàrtes'et
Claude Bernard, qu'il ne faut rien recevoir
en sa créance qui ne soit vérifiable et dû-
ment vérifié. Voilà pourquoi, hier, je né
croyais pas aux fantômes voilà aussi pour-
quoi j'y crois aujourd'hui sans réserve, com-
nie je crois à l'existence de M. Cliarles Ri-
chet.
J'avoue que son article sur les apparitions
de la villa Carmen m'avait déjà quelque peu
troublé: Comment ne pas prendre au sé-
rieux le témoignage d'un homme de cette
valeur, dont l'autorité scientifique n'a d'é-
gale que l'autorité morale ? Si vous insinue/.
qu'en pareille matière l' « autorité » n'a rien
à voir, je vous invite à lire les Annales des
sciences psychiques, et vous constaterex
avec l'illustre savant qu'il est impossible de
prendre plus de précautions pour empêcher
la fraude. Oui, après cette simple lecture. j^
l'esprit le plus exigeant doit se tenir pour
satisfait.Et pourtant.
Pourtant,.il y avait, dans le récit des ex-
périences. d'Alger, tant de détails extraonli-
naires abracadabrants » Ce fantôme qui'
se baptise lui-même B. B. et qui s'exerce ;i
« faire glouglou » en soufflant dans une bou-
teille, ce fantôme que l'on applaudit quîui'.i
il a réussi son tour et qui, « disparu
le rideau, nous dit M. Richet, reparaît à
trois reprises en montrant sa tête et sa-
luant ainsi qu'un acteur'qui revient sur la
'scène ce cabotin de fantôme (va-t-il se
fâcher aussi, celui-là ?) m'avait donné sin-
gulièrement à réfléchir. Si bien que, pour
en avoir l'esprit net, je suis allé ce matin
faire part de mes réflexions au vénéré mal-
Il a souri de mes doutes..
Moi aussi, me dit-il, j'ai douté et je
doute encore. N'imaginez point que je sois
naïf et crédule. D'abord, je ne crois pas au
spiritisme je m'en tiens à noter scrupuleu-
sement des faits indéniables.
Les objections d'un incrédule.
Nul ne suspecta jamais votre bonne
foi, cher mettre mais vous avez
vous-même l'hypothèse d'une supercherie.
Et, d'après le docteur Valentin, votre fan-
tôme ne serait qu'un mannequin fabriqué
par d'habiles mystificateurs un masque
japonais avec une fausse barbe, au bout
d'un manche à balai que dissimule une dra-
perie. M. Valenlin .prétend même aperce-
voir nettement le manche à balai sur les
.photographies que vous avez publiées.
M. ltichet hausse les épaules sans cesser
de sourire.
7– Si ce docteur était plus au courant de
nos recherches, il saurait que le corps des
fantômes, lorsqu'il commence à se maté-
rialiser, d'abord l'apparence rigide d'un
morceau de bois. Il y a mieux je pourrais
vous citer une expérience, où j'ai vu comme
un manche à balai sortir de la hanche fin
médium, et, au bout, il y avait une main-
vivante. C'est ce que j'appelle :un « ecti-
plasme ». Mais venez vous allez voir
,vous-même.
M. Richet va-t-il me faire l'honneur de
me présenter à B. B. en personne ?. Je ne
puis·me défendre d'un léger émoi.
Mais non, il ne s'agit que de regarder sa
photographie dans un stéréoscope. Il n'y a
pas dire l'hypothèse du masque japonais
totpbe au premier regard. C'est ;bien une fi-
gure de chair qui est là, mais d'une chair
étrange. Le visage est flou, non .pas in-
consistant il est blafard et grumeleux,
comme s'il' entrait eh décomposition (ou en
recomposition, d'après- la théorie des spi».
rites).
J'insiste
Le docteur Valentin estime que votre
expérience n'a pas eu lieu dans des condi-
tions irréprochables, car dans la pièce il y
avait des fauteuils, un bahut, un baldaquin,
une baignoire.
Et puis après ? J'ai soigneusement ex- ̃̃
ploré tous les meubles, comme ceci, tenez
Le maître ouvre le tiroir d'un chiffonnier
-4- Personne n'est caché dans ce tiroir,
n'est-ce pas ?
M. Richet avise un pupitre il s'agenouille.
le regarde par-dessous et frappe à droite et
8:gauche de,petits coups secs, comme pour
ausculter chaque planche.
Une foi fortement étayée.
Pas un clou, pas une épingle ne m'ont
échappé, poursuit-il en se relevant et je ne
suis pas moins sûr de la sincérité du mé-
dium. Un mannequin ?. Où Mile Marth<> r
l'aurait-elle four'ré ? Comment cette jeune
fille menue l'aurait-elle dissimulé sous sa
chemisette, qui dessinait très précisément
la forme de son buste, ou sous sa robe
courte et très aiustée ? Je suis d'ailleurs as.
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