Titre : Le Petit Parisien : journal quotidien du soir
Éditeur : Le Petit Parisien (Paris)
Date d'édition : 1912-04-28
Contributeur : Roujon, Jacques (1884-1971). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34419111x
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 126844 Nombre total de vues : 126844
Description : 28 avril 1912 28 avril 1912
Description : 1912/04/28 (Numéro 12965). 1912/04/28 (Numéro 12965).
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse... Collection numérique : Bibliographie de la presse française politique et d'information générale
Description : Collection numérique : Bibliographie de la presse Collection numérique : Bibliographie de la presse
Description : Collection numérique : BIPFPIG15 Collection numérique : BIPFPIG15
Description : Collection numérique : BIPFPIG33 Collection numérique : BIPFPIG33
Description : Collection numérique : BIPFPIG35 Collection numérique : BIPFPIG35
Description : Collection numérique : BIPFPIG37 Collection numérique : BIPFPIG37
Description : Collection numérique : BIPFPIG63 Collection numérique : BIPFPIG63
Description : Collection numérique : Grande collecte... Collection numérique : Grande collecte d'archives. Femmes au travail
Description : Collection numérique : La Grande Collecte Collection numérique : La Grande Collecte
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5643205
Source : Bibliothèque nationale de France, Gr Fol-Lc2-3850
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 18/06/2008
fr* Année. ~ «. izsta
winaiicfie IË KVT! >3i2.
ABONNEMENTS
?Seine et gclwtMWl»
TROIS Mots S t».
Six MOIS * tr.
lin A y 18 Ir.
Départements et ColoaÉM
TROIS MOU . tr.
Six MOB... 44 TR.
UII AR M tr.
Btrangar
TROIS Mon S tr.
Six MOU..........*.... II tr.
Un An «O tr.
jj A
JoBBP «HHR BflKjSaH BBBMM «KWflB . BMnBnnB ?MH «HHra
K2 H 18B flflv WBjjk MHf m M| Ml W| a«g V»
ODIBCTIOn
18-18, pue d'Enghien, PARIS (10')
TÉLEPBOSB
!*? m. 73 -102.73 _ lUJN-m.»
AJSKOKOnK
IN «nonces «t réclamât sent raçaM
ft ('OFFICE D'ANNONCES
TÊLiraoM* ** U7.M
10, place de la Bourse, PARIS (2«)
5> centimes
Le plus fort tirage des journaux du monde entier
5 centimes
ÉDITION DE PARIS
PROCHAINEMENT
Le Petit Parisien
r-=5==:== commencera la publication d'un
GRAND ROMAN PATRIOTIQUE INÉDIT
Coeur de Française
tout spécialement écrit pour nos lecteurs
= par le grand romancier populaire =
ARTHUR BERNÈDE
Pins s'éloignent les dates néfastes de
la guerre franco-allemande et plus les
épisodes décisif'' de cette douloureuse
époque prennent de relief dans notre
souvenir. Ils continuent à dominer, en
quelque sorte, la vie de la France, et les
difficultés internationales de 1905, de
1008, de 1911, se sont chargées de les ra-
viver. Si une enquête récente, passée à
l'arrivée des recrues, a constaté que cer-
tains conscrits ignoraient tout ou à peu
près, de cette succession d'événements
qui exercèrent une si rude action sur la
suite de l'histoire, ces illettrés sont à
coup sûr une infime minorité.
A ceux qui pourraient oublier, et à ceux
qui n'ont jamais bien su, - le grand
ouvrage que le colonel Rousset vient de
publier, restituera ou donnera, suivant
le cas, les notions nécessaires. Comment
admettre qu'un Français ne puisse, der-
rière les noms de Woerth, de Reichshof
l'en, de Coulmiers, de Rezonville, de Ba-
paume, replacer les réalités glorieuses
ou cruelles qu'ils synthétisent 7 Ce livre
arrive à son heure, sous sa forme ac-
tuelle, alors qu'il ne s'agit plus d'envi-
sager la guerre au seul point de vue stra-
tégique, abordable seulement à quelques-
uns, mais de la replacer dans son milieu
et d'en populariser toutes les scènes.
' Or, l'édition nouvelle de ce grand tra-
vail, qui a été, à juste titre, admiré outre-
Rhin comme chez nous,' qui est devenu
pour ainsi dire, classique, s'adresse à la
foule. Les chocs des masses armées y
sont décrits avec une réelle puissance
d'intérêt dramatique , on suit pas à pas
leur concentration sur le terrain, la mê-
lée de leurs éléments, les initiatives au-
dacieuses ou erronées des chefs, les tâ-
tonnements, les élans d'enthousiasme,
les retraites forcées des imités. Peu de li-
vres sont d'une lecture plus poignante.
Mais la valeur littéraire de l'oeuvre qui
la fait plus attachante, n'atténue en rien
sa Valeur scientifique, tant la documen-
tation y est exacte, précise, abondante,
et ce qui, par-dessus tout, sollicitera le
lecteur, c'est une merveilleuse série
d'illustrations, empruntées aux plus
grands maîtres de l'art contemporain.
D'innombrables reproductions des ta-
bleaux de Berne-Bellecour, de Bonnat,
de Détaillé, de Henner, de Neuville, de
Roll, de Boutigny, éclairent ces pages co-
pieuses et pressées. « L'impératrice » de
Winterhalter fait pendant au célébré gé-
néral « Prim », de Henri Regnault. Les
statues de Bartholdi s'y évoquent à côté
des panoramas jadis fameux de Poilpot,
et la peinture allemande elle-même a été
mise à contribution : témoin, le Bis-
marck, de Lembach, dont l'original est
une des toiles maîtresses de la nouvelle
Pinacothèque de Munich.
Le colonel Rousset, qui manie aussi'
habilement les délibérations des con-
seils de guerre que les mouvements des
armées, nous expose les ressorts les plus
cachés et débrouille les intrigues les plus
intimes. Il ne se borne pas à raconter, il
explique, il analyse, et en même temps,
il juge ou il détermine le jugement.
J'ajoute que s'il admire les soldats, il
est souvent dur et légitimement dur pour
ceux des généraux qui n'étaient point à
la hauteur de leur tâche.
Si dès les débuts s'affirma nôtre infé-
riorité, si de désastreux errements se ma-
nifestèrent, qui devaient ensuite rejaillir
sur toute la conduite de la guerre et pe-
ser sur l'effort héroïque de la levée en
masse, c'est qu'il n'y avait pas. réelle-
ment de plan de campagne. Depuis plu-
sieurs années, depuis Sadowa, l'Europe
était troublée par l'approche du grand
conflit et aucun programme définitif
d'opérations n'avait été élaboré a Paris.
Frossard, qui y avait été d'abord em-
ployé, disait : « Avec de bonnes posi-
tions de campagne, on peut pourvoir à
tout », et il se bornait à considérer la
défensive. Un peu plus tard, l'empereur
fit prévaloir un système qui comportait
trois armées : l'une à Strasbourg et sui-
te Rhin, pour couper l'Allemagne du
nord de l'Allemagne du sud ; une autre
à Metz, une autre en réserve à Chàlons,
?t, dont une partie, le cas échéant, eût pu
être débarquée sur les bords de la Bal-
tique.
Mais ce système demeura sur le pa-
pier. Lorsque la guerre éclata, on y re-
nonça, faute d'éléments, et l'on forma
une seule armée du Rhin, avec les sept
corps disponibles. De plus, et ceci était
une effroyable source de faiblesse, ces
corps étaient égrenés et dépourvus de
tout lien. composant un long et mince
cordon que l'ennemi pourrait toujours
trouer, par une accumulation de forces
sur un point quelconque.
Le colonel Rousset critique sévère-
ment les chefs de l'état-major et de l'in-
tendance. dont il montre l'impéritie,
l'impuissance, l'ignorance même. Non
seulement le plan fait défaut, mais f!e
quartier général ne sait même pas où se
trouvent les diverses unités. On n'a ni
riz, ni café, ni avoine, ni eau-de-vie. Les
projectiles restent en quantité prodi-
gieusement insuffisante. Les ambu-
lances sont inexistantes. Notre artil-
lerie porte moins loin que l'artillerie
allemande; notre cavalerie, avec 105 che-
vaux par escadron contre 150, se battra
admirablement à Reichshoffen et ail-
leurs, mais elle n'est pas dirigée, et son
action n'est pas reliée ù une action d'en-
semble.
En face de cette confusion, le colonel
Rousset nous signale l'ordre qui règne
outre-Rhin et la forte discipline intellec-
tuelle qu'un Moltke a imposée à l'état-
major prussien, prévoyant tout, réglant
l tout méthodiquement, dans la première
partie de la guerre. Il est vrai que dans
la seconde, il fut pris au dépourvu lors-
que des forces qu'il n'avait point devi-
nées entrèrent en lutte, et que la France,
d'un seul bond, se dressa contre l'en-
vahisseur.
Ce fut l'affaire de Sarrebruck, qui fut
la première péripétie sanglante. Le co-
lonel Rousset nous la conte avec beau-
coup de détails pittoresques et émou-
vants, mais en même temps il la réduit
'à sa juste valeur, l'entourage de Napo-
léon III ayant essayé de la grossir parce
que l'empereur et le prince impérial s'y
trouvaient. Le 28 juillet, Napoléon arri-
vait à Metz. On eût déjà dû attaquer
l'ennemi, encore en pleine formation de
marche, car Moltke avait fixé au 4 août
l'ouverture effective de la campagne. Le
2, à dix heures du matin, Frossard, avec
deux divisions, se jette sur Sarrebruck.
Trois bataillons défendaient cette ville,
dont un, sous les ordres du commandant
de place, le colonel de Pestel gardait
les quartiers intérieurs. Les patrouilles
prussiennes donnèrent l'alarme. Les
deux autres bataillons accoururent, avec
le général de Gneisenau, mais ce der-
nier avait ordre de se retirer si l'infério-
rité numérique était trop évidente. Il se
replia. Nos troupes comptaient ii morts
et 75 blessés, les Allemands 8 morts,
7 disparus et 68 blessés.
C'était un succès à coup sûr : on n'en
sut pas profiter. L'ennemi ne fut pas
poursuivi. Le pont de la Sarre, qu'on
avait tout loisir de détruire, fut laissé
intact et ainsi devait s'expliquer peu
après l'échec de Spickeren.
Les premiers coups de canon étaient
tirés. L'une des plus sanglantes luttes
du siècle s'ouvrait. Ceux qui liront le
livre du colonel Rousset en revivront les
épisodes dramatiques, où s'affirma, dans
une cruelle défaite, lame indomptable
et valeureuse de la nation française.
JEAN FROLLO
, I
La pacification du Maroc
J*. Le conseil des ministres a consacré
toute sa délibération d'hier matin à
l'examen des questions marocaines.
Nous n'avons pas dissimulé, dans ces der-
niers jours, la gravité des problèmes que
posait, à l'heure actuelle, la pacification de
l'empire chérifien. La sanglante révolte de
Fez, la sédition de Sefrou, l'agitation qui se
manifestait à la fois dans le sud autour
d'Agadir, et au nord, dans le Gharb, à proxi-
mité de Tanger r tout cet ensemble de faits
attestait un trouble profond et auquel il con-
venait de remédier au plus tôt.
M. Regnault, envoyé en mission k Fez,
avait su obtenir très rapidement la signature
du sultan, c'est-à-dire l'adhésion de l'auto-
rité traditionnelle du Maroc, au traité de
protectorat élaboré à Paris. Mais il fallait
s'attendre, pour le jour où cet acquiescement
serait connu, à un mouvement plus ou moins
ample des tribus, - réfractaires à toute dis-
cipline et hostiles à toute tutelle.
C'est ce mouvement qu'on va enrayer et
surveiller. La France a assumé une respon-
sabilité devant le monde, et il lui appartient
de sauvegarder la vie des Européens qui ont
été s'établir dans l'empire chérifien.
La nomination du général Lyautey à la
résidence de Fez, avec M. Gaillard comme
secrétaire général, sera bien accueillie de
l'opinion. Nul ne peut ignorer les services |
que le général Lyautey a rendus, durant de
longues années, dans la région des confins
algéro-marocains et dans l'extrême Sud ora-
nais, où il a patiemment et savamment
préparé, avec l'indispensable marche en
avant, la pacification d'une région inflam-
mable entre toutes. Nul ne peut oublier avec
quelle précision, quelle sûreté d'allures, il
nous a donné, au lendemain môme d'une
formidable attaque des nomades, le pays ri-
che et fertile des Beni-Snassen. Il emploiera
demain, à l'organisation du Maroc, les bril-
lantes qualités de sang-froid et de méthode
qu'il a marquées partout où il a exercé son
commandement. La collaboration de M. Gail-
lard, notre consul, qui connaît à fond les
choses du maghzen, lui sera précieuse au
suprême degre. Ces deux personnalités se
compléteront à merveille.
Cest une tâche malaisée, laborieuse -
mais une tâche de longue haleine - répé-
tons-le, et qui doit exclure les aventures et
les à-coup^, que la France entreprend au
Maroc.
Les négociations franco=espagnoles
n'avancent tonjours pas
Le gouvernement s'est préoccupé hier
des négociations franco-espagnoles, qui,
depuis quelques jours, ont semblé aboutir
à une impasse. On est loin, en effet, d'être
parvenu au compromis qu'on attendait pour
lu fin d'avril. Les événements cependant
qui se déroulent au Maroc et qui n'épargnent
point la zone espagnole, devraient inciter
nos .voisins à plus de conciliation.
Dé nouvelles instructions seront probable-
ment envoyées à bref délai à M. Geoffray
C'est toujours la vallée d'Ouergha qui est
en cause au premier plan.
Pour la question de Tanger, elle ne sera
reprise que plus tard. Le ministre des Affai-
res étrangères d'Angleterre, qui doit donner
son avis sur ce grave problème, est d'ail-
leurs absent de Tendres jusqu'au 1" mai.
RENFORTS ESPAGNOLS A LARACHE
Larache, 27 avril.
Les vapeurs espagnols Canalejas et Luis-
VivèS. de la compagnie Côrréos de Africa,
venant directement de Cadix, sont arrivés
en radj de Larache dans la soirée d'hier.
D'après mes renseignements, ils ont à
bord environ 1,500 hommes.
Le général Lyautey
est nommé
j
résident à Fez
M. GAILLARD LUI EST ADJOINT
COMME SECRÉTAIRE GÉNÉRAL
Le conseil des ministres qui s'est tenu hier
à Rambouillet a décidé de confier la résidence
de Fe: au général Lyautey, qui aura sons
ses ordres, comme secrétaire général, M.
Gaillard., actuellement consul dans la capi-
tale de l'empire chérifien.
M. Regnault quittera prochainement le-
Maroc et sera appelé à la direction d'une de
nos légations en Europe.
Le général, Lvautey est né à Nancy en
1854. Sorti de Saint-Cyr dans la cavalerie,
il servit en Afrique, puis au Tonkin. Le gé-
néral Galliéni lui confia, à. Madagascar, la
pacification de la zone du Sud, qu'il orga-
nisa en petits secteurs.
Général de brigade en 1904, il commanda
la subdivision d'Ain-Sefra, en Algérie. Gé-
néral de division, en 1907, il fut mis à la
tête de la division d'Oran.
Il commandait en dernier lieu le 10e corps
à Rennes.
Le général Lyautey conférera aujourd'hui
avec MM. Poincaré et Millerand.
UN RAPPORT DË"M. POINCARÉ
M. Poincaré a adressé hier au "Président
de la République lé ' rapport suivant :
Le 18 janvier dernier, au lendemain même
du jour où le cabinet que j'ai l'honneur de
présider est entré en fonctions, il a chargé
une commission de lui fournir d'urgence les
renseignements indispensables à l'établisse-
ment de notre protectorat au Maroc.
Cette commission s'est livrée à un travail
complet, quoique très rapide, qui a permis
au gouvernement de préparer un projet de
traité, ainsi que les éléments d'une organi-
sation administrative et financière. Muni
de ces documents, notre ministre de France
au Maroc a rejoint son poste, avant même
que fût ratifié le traité franco-allemand du
4 novembre 1911. Cette ratification, qui de-
vait forcément précéder la signature d'un
traité de protectorat, a eu lieu le 12 mars
1912. Aussitôt M. Regnault a reçu l'ordre
de partir de Tanger pour Fez.
Général Lyautey
Dès son arrivée à Fez M. Regnault ept en-
tré en relations avec le sultan ; son autorité
personnelle a triomphé, en deux jours, des
difficultés qu'il a rencontrées ; le traité de
protectorat a été signé le 30 mars.
M. Regnault aurait désiré que l'établisse-
i ment du protectorat ne fût pas publié avant
plusieurs jours pour que le sultan pût, com-
me il l'offrait, faire connaître lui-même la
nouvelle aux populations marocaines et leur
expliquer la véritable signification du régi-
me auquel elles allaient être soumises. Mais
il a été impossible de tenir secret, même
pendant vingt-quatre heures, un événement
que la presse européenne avait immédiate-
ment connu par ses correspondants et que
l'opinion française attendait, du reste, avec
impatience. M. Regnault a, par suite, été
invité, dès le l'r avril, à commencer la mise
en application du protectorat.
Il poursuivait ses études d'accord' avec le
général Moinier et aucun indice qui eût été
porté à la connaissance du gouvernement
ne leur faisait prévoir, à l'un, ou à l'autre,
la possibilité d'un trouble quelconque, lors-
que a éclaté, à Fez, l'émeute dont les consé-
quences ont été si meurtrières.
Tant que l'ordre n'a pas été rétabli dans
la capitale, on ne pouvait évidemment son-
ger à modifier un état de choses que la hau-
te compétence de M. Regnault et la valeur
du général Moinier avaient rendu possible,
mais qui, malgré tout, n'était que provi-
soire.
II convient aujourd'hui d'assurer définiti-
vement au Maroc l'unité de notre action.
L'oeuvre à entreprendre est tonte de civi-
lisation et de progrès. Mais aucune mesure
administrative, durable et féconde, ne peut
être prise que dans des régions déjà paci-
fiées. Pour préparer et étendre méthodique-
ment cette pacification nécessaire, il est in-
dispensable qu'un homme investi de la con-
fiance du gouvernement de la République :
concentre dans ses mains, sous la souverai-
neté du sultan, les pouvoirs civils et mili-
taires.
La tâche qu'il aura à remplir est difficile et
complexe.
Il faut qu'il mette notre protectorat en va-
leur, en observant nos engagements vis-à-vis
des puissances et en faisant notamment res-
pecter l'égalité économique
Il faut qu'il demeure fidèle à la conception
même du protectorat, qui est seule conforme
aux traités internationaux et qui est exclu-
sive- de gouvernement direct.
Mais il faut aussi que, par une convena-
ble disposition de nos forces, par un emploi
efficace fie nos bureaux indigènes, par l'exé-
cution rationnelle d'un programme tout à la
fois politique, économique et stratégique, il
sache préparer et. maintenir l'acceptation de
notre protectorat par les tribus marocaines, j
J'ai l'honneur de soumettre à votre appro-
bation un décret, qui confie cette importante :
mission à l'expérience-et au patriotisme du j
général Lyautey.
LA BANDE A COMMIS UN NOUVEL EXPLOIT
Soupçonné parles bandits d'avoir dénoncé Carouy
un habitant de Lozère est l'objet d'un attentat
A DÉFAUT DE BONNOT ON CONTINUE À ARRÊTER DES COMPARSES
DES PERQUISITIONS AMÈNENT D'INTÉRESSANTES DECOUVERTES
----- . . .. ,, if-i /r, ' : L. *
Bonnot, Garnier ou Valet, peut-être, en
tout cas, des affiliés de leur sinistre bande se
sont signalés vendredi soir, à Lozère, par un
nouvel exploit.
Cette fois, il s'agit d'une vengeance contre
une personne qui, dans les milieux libertai-
res, a été soupçonnée d'avoir trahi Carbuy et
de l'avoir livré au regretté M. Jouin et 9 ses
agents, qui l'appréhendèrent, on s'en sou-
vient, sans coup férir, au moment où il
pénétrait dans la gare de Lozère.
M. Victor Granghaud, vingt-huit ans, re-
lieur, 11, rue Jean-de-Beauvais, à Paris, fut
la nouvelle victime des bandits sanguinai-
res.
Il habite, en compagnie de M. et Mme
René Granghaud, ses parents, de sa femme
dont il a deux bébés, René, six ans et Valen-
tine, trois ans, un modeste pavillon, la « Villa
'des Abeilles », perdu dans les bois, à mi-
eoteau. C'est la dernière maison du pays ;
du jardin qui l'entoure on découvre le mer-
veilleux panorama de la vallée de l'Yvette.
La famille Granghaud vint s'y retirer, il
y a trois ans à peu près, au moment où le
père vendit son fonds de commerce, dans
l'espoir d'établir, tout contre sa nouvelle
habitation, un atelier de papiers coloriés
pour la reliure.
Il s'aperçut bientôt que son projet était
pratiquement irréalisable et décida son fils
à reprendre, à Paris, une maison de com-
merce.
C'est de là que, chaque soir, leur travail
quotidien accompli, les deux hommes rega-
gnaient leur paisible demeure champêtre.
En ces tempe de pleine saison, où les com-
mandes affluaient, ils arrivaient générale-
ment à Lozère par le train de huit heures.
Mais, vendredi matin, M. Granghaud fils,
ayant appris - ainsi qu'on le verra plus
loin - que sa sécurité était menacée, réso-
lut de rentrer chez lui par le train de sept
heures un quart.
A la gare, après les salutations échangées
avec ses compagnons de route, un groupe .
de voyageurs se forma pour remonter, de
concert, le chemin en pente raide qui gravit
la colline.
Il y avait là M. et Mlle Albinac, M. Dis-
sens, M. Vatrin, un jeune homme de qua-
torze ans, élève de l'école Lavoisier ; M. Vk>
tor Granghaud ouvrait la marche, plaisân-
tant avec Mme Zéo. Son père, en ce moment
souffrant, le suivait à quelques pas, s'aidant
dans sa marche de son parapluie.
Au moment où tous ces gens, parfaite-
ment gais et insoucieux arrivaient au pre-
mier carrefour du raidillon en lacets qu'ils
suivaient, le drame se déroula avec une rapi-
dité stupéfiante.
Pour en faciliter la compréhension, il
convient d'indiquer brièvement la topogra-
phie des lieux.
L'attaque
D'un côté, c'est le chemin venant de la
station et qui va se perdre dans les champs.
Une sente le coupe, qui devient la route di-
recte conduisant, par plusieurs lacets, sous
l'appellation de rue Collet, à la villa des
Abeilles.
Au carrefour, trois villas sont bâties, la
villa Rip, l'Oasis, une autre non dénommée.
Enfin, une humble bicoque, fermée d'une
barrière de bois à claire-voie mais en partie
dissimulée par un épais fourré de lilas qui
embaument, occupe la quatrième branche de
l'étoile formée par les chemins.
La clôture de la propriété sans nom con-
siste en un mur élevé de trois mètres en-
viron.
C'est derrière ce mur que s'était caché l'un
des meurtriers. Au moment ou M. Victor
Granghaud et Mme Zeo venaient de le dé-
passer, sans le voir il bondit, deux revol-
vers aux poings, appliqua ceux-ci tout
contre les reins du relieu" et, à deux repri-
ses, fît feu.
Ce fut un affolement général ; M. Gran-
ghaud fils, sans un, mot, chercha son revol-
Ver ; son père, à coups répétés de son pa-
rapluie, tenta d'empêcher l'assassin de re-
nouveler son geste. L'une des dames pré-
sentes eut uns crise de nerfs ; l'autre, sidé-
rée, alla s'appuyer contre un mur, où elle
resta muette, les yeux exorbités.
De toutes parts, au bruit des détonations,.
on accourait. Ce ne fut que pour apercevoir
le malfaiteur s'enfuyant par le sentier her-
beux qui joint la pleine campagne.
Là, il fut rejoint par un second individu,
en compagnie duquel il descendit, au galop,
vers la voie du chemin de fer.
M. Victor Granghaud, lui, était redes-
cendu en courant dans la direction de la
gare.
Au bout de quelques irstants, il se re-
tourna et, ne voyant personne derrière lui,
revint au carrefour. Il paraissait beaucoup
souffrir, n ais, avec nn sang-froid étonnant,
tint à rassurer tout le monde :
Cl. Petit Parisien
LE LIEU DE L AGRESSION
Cest à 1 angle du mur qu'on aperçoit à gauche de
la photographie que se tenait blotti un des
agresseurs.
Dans le médaillon : M. Grandghand père
- Je sais qui a fait le coup, dit-il, sans
vouloir cependant s'expliquer davantage.
Et, soutenu par plusieurs témoins de
l'agression, il remonta jusqu'à la villa des
Abeilles, où on put se rendre compte de son
état. Par un hasard miraculeux, une seule
balle l'avait éraflé, au côté droit; la plaie était
toute superficielle ; le projectile fut, d'àil-
leurs, retrouvé sur le théâtre du crime.
Après un pansement sommaire, le blessé,
dans une automobile mise à sa disposition
par M. Muret, conseiller général, regagna
Paris, où il fit sa déposition au chef de la
sûreté. A deux heures du matin, fi rentrait à
nouveau à Lozère, en compagnie de plu-
sieurs inspecteurs du service de M. Gui-
chard.
Hier matin, il revenait de nouveau à Paris
pour y compléter ses indications et rece-
voir, aprèsavoir été examiné par le docteur
Paul, médecin légiste, les soins que néces-
sitait son état.
Pour éviter toute indiscrétion, il a d'ail-
leurs été transporté dans une maison amie,
où nul ne pourra venir troubler son rétablis-
sement.
Qui est ie coupable?
Quel était le mystérieux auteur de l'atten-
tat contre M. Granghaud î II a été impossi-
ble de le savoir jusqu'ici, bien que ce der-
nier ait, à son endroit, des soupçons très
précis.
Voici le signalement que nous en avons
pu recueillir auprès des rares personnes
qui l'entrevirent :
Agé de trente à trente-cinq ans, petit, tra-
pu, les cheveux bruns ébouriffés, la mous-
tache brune, la face grimaçante, vêtu d'une
cotte bleue, manifestement passée par des-
sus un complet veston, une main envelop-
pée dans un pansement.
A peu près le physique de Bonnot, il faut
en convenir, avec ce détail troublant qu'il
porte une blessure à la main, blessure
reçue, probablement, par le sinistre chauf-
feur au cours de la lutte qu'il eut à soutenir
contre les policiers dans la chambre de
Gauzy, au Petit-Ivry.
Le malandrin n'était pas seul et tout avait
été admirablement combiné pour que M.
Granghaud restât mort sur place.
L'un de se3 acolytes, celui-là même qui fut
aperçu descendant de la colline boisée par
les champs, s'était posté presque en face de
la villa des Abeilles.
Si les détonations ne lui avaient pas fait
supposer que le coup de main avait réussi, il
eût certainement attendu, pour le tuer, le
malheureux relieur.
Ce second personnage portait un vêtement
de velours brun, de coupe élégante et était
coiffé d'un chapeau melon. Il a été aperçu
distinctement par les propriétaires de la
villa Rip et de l'Oasis.
Il est vraisemblable qu'au moins nn autre
bandit accompagnait ceux dont nous venons
de parler et les attendait au delà de la voie
du chemin de fer de Paris à Limours avec
une automobile probablement, car il ne sont
descendus ou montés dan? aucun train ve-
nant de la capitale ou du point terminus op-
posé de la ligne.
_ M. Guichard quittant la prélecture pour aller opérer une perquisition, eu Petit Parisien '
Gare de Lozère ru* Collet
C. Carrefour on eut Uni vagression
D. Villa.
O . Endroit où Us meurtrier Était,-caché
E. Villa Rip.
F. Villa l'Oasis.
G. Maisonnette aux bouquets de lilas
H. Point où se trouvait posté le î* malfaiteur
X. Point où se trouvait poste le f malfaiteur
? ? - Chemin suivi par les malfaiteur*
immmm Chemin suivi par M. Granghaud
Ont-ils guetté, dissimulés dans un bos-
quet ou tapis dans un sillon, pour savoir si
M. Granghaud avait été frappé à mort ? On
pourrait le croire d'après la rencontre étran-
ge que firent vers huit heures les enfants
d'un propriétaire de Lozère, M. Maurice et
Mlle Raymonde Houel.
Ceux-ci, venant de Paris, regagnaient la
villa familiale, lorsqu'au long de la voie du
chemin de fer, il3 virent tout à coup surgi'
deux individus menaçants, browning au
poing.
Un monsieur qui les accompagnait, domp-
tant son émotion compréhensible, leur cria :
- Qui va là 1 et tira aussitôt son revolver.
Sans rien répondre, les hommes enjam-
bèrent lestement la barrière du chemin de
fer, traversèrent les voies et rejoignirent,
dans l'ombre déjà épaisse, le troisième per-
sonnage cité plus haut. *
On n'a pu jusqu'ici, malgré les plus actives t
recherches, retrouver leur trace.
CE QUE DIT RI. GRANGHAUD PÈRE
Au moment où nous quittons la villa des
Abeilles pour regagner la gare, nous aper-
cevons M. Granghaud père, au détour du
chemin. Il vient pour chercher sa famille
afin de l'emmener à Paris et essayer de :a
soustraire ainsi à d'autres attentats.
C'est péniblement qu'il arpente la route.
M. René Granghaud est asthmatique et les
émotions qu'il vient d'éprouver ne sont pas
pour le remettre De temps à autre, il est
obligé de s'arrêter pour se reposer. Nou»
profitons d'une pause pour nous approcher
de lui et nous faire connaître.
Un visage maigre, brun, plutôt dur, daas
lequel deux larges yeux bleus jettent 'une
lueur de bonté, un front large et découvert ;
c'est une fort belle tête que celle de l'ancier
relieur, une de ce? physionomies qui vouf
intéressent et vous attirent.
- Mais oui, s'écria-t-il, sur une question
précise que nous lui posons, après qu'il nous
eut narré les circonstances de 1 attentat,
mais oui, nous nous doutons bien d'où vient
le coup. Pourquoi vous mentir ? Je vais vous
dire franchement ce qui en est.
Mon fils avait des idées avancées, très
avancées, même. En un mot, c était un liber-
taire. Il avait été séduit par l'humanitarisme
large de la doctrine. 11 en vint à fréquenter
les milieux anarchistes, à prendre nart aux
discussions philosophiques, engagées dans
les réunions Moi-même, je lisais avec plai-
sir, avec intérêt, toutes les brochures qu'il
apportait à la maison. Notre vie était en rap-
port avec nos idées. On vous a raconté,
m'avez-vous dit, que les malheureux étaient
toujours bien accueillis chez nous, que notre
porte était toujours ouverte ii ceux qui souf-
fraient. Sans nous vanter, c'est vrai. Nou>
ne faisions d'ailleurs que notre devoir
d'hommes.
Mais moD fils avait évolué. II s'était bien
tôt aperçu que les idées si belles qu'il avait
embrassées étaient singulièrement déformées
par certains de ces prétendus' libertaire?
I tion de reprise-individuelle n'était pas fait
pour lui plaire. L'assassinat encore moins.
Et lorsque les Bonnot. Garnier et O* lui
firent, ces derniers mois, demander asile,
c'est avec horreur qu'il envisagea l'hypo-
thèse de cacher de tels bandits. Anarchiste,
libertaire, oui. il l'était peut-être encore :
mais il n'avait rien de commun avec ces
monstres II réfusa énergiqnement d'entrer
en rapport avec eux.
Il était désormais condamné, !,e^ «cher 1
cousins n ne devaient >v.. 'nj me donner ce
qu'il* considéraient: .« .cc-r-
winaiicfie IË KVT! >3i2.
ABONNEMENTS
?Seine et gclwtMWl»
TROIS Mots S t».
Six MOIS * tr.
lin A y 18 Ir.
Départements et ColoaÉM
TROIS MOU . tr.
Six MOB... 44 TR.
UII AR M tr.
Btrangar
TROIS Mon S tr.
Six MOU..........*.... II tr.
Un An «O tr.
jj A
JoBBP «HHR BflKjSaH BBBMM «KWflB . BMnBnnB ?MH «HHra
K2 H 18B flflv WBjjk MHf m M| Ml W| a«g V»
ODIBCTIOn
18-18, pue d'Enghien, PARIS (10')
TÉLEPBOSB
!*? m. 73 -102.73 _ lUJN-m.»
AJSKOKOnK
IN «nonces «t réclamât sent raçaM
ft ('OFFICE D'ANNONCES
TÊLiraoM* ** U7.M
10, place de la Bourse, PARIS (2«)
5> centimes
Le plus fort tirage des journaux du monde entier
5 centimes
ÉDITION DE PARIS
PROCHAINEMENT
Le Petit Parisien
r-=5==:== commencera la publication d'un
GRAND ROMAN PATRIOTIQUE INÉDIT
Coeur de Française
tout spécialement écrit pour nos lecteurs
= par le grand romancier populaire =
ARTHUR BERNÈDE
Pins s'éloignent les dates néfastes de
la guerre franco-allemande et plus les
épisodes décisif'' de cette douloureuse
époque prennent de relief dans notre
souvenir. Ils continuent à dominer, en
quelque sorte, la vie de la France, et les
difficultés internationales de 1905, de
1008, de 1911, se sont chargées de les ra-
viver. Si une enquête récente, passée à
l'arrivée des recrues, a constaté que cer-
tains conscrits ignoraient tout ou à peu
près, de cette succession d'événements
qui exercèrent une si rude action sur la
suite de l'histoire, ces illettrés sont à
coup sûr une infime minorité.
A ceux qui pourraient oublier, et à ceux
qui n'ont jamais bien su, - le grand
ouvrage que le colonel Rousset vient de
publier, restituera ou donnera, suivant
le cas, les notions nécessaires. Comment
admettre qu'un Français ne puisse, der-
rière les noms de Woerth, de Reichshof
l'en, de Coulmiers, de Rezonville, de Ba-
paume, replacer les réalités glorieuses
ou cruelles qu'ils synthétisent 7 Ce livre
arrive à son heure, sous sa forme ac-
tuelle, alors qu'il ne s'agit plus d'envi-
sager la guerre au seul point de vue stra-
tégique, abordable seulement à quelques-
uns, mais de la replacer dans son milieu
et d'en populariser toutes les scènes.
' Or, l'édition nouvelle de ce grand tra-
vail, qui a été, à juste titre, admiré outre-
Rhin comme chez nous,' qui est devenu
pour ainsi dire, classique, s'adresse à la
foule. Les chocs des masses armées y
sont décrits avec une réelle puissance
d'intérêt dramatique , on suit pas à pas
leur concentration sur le terrain, la mê-
lée de leurs éléments, les initiatives au-
dacieuses ou erronées des chefs, les tâ-
tonnements, les élans d'enthousiasme,
les retraites forcées des imités. Peu de li-
vres sont d'une lecture plus poignante.
Mais la valeur littéraire de l'oeuvre qui
la fait plus attachante, n'atténue en rien
sa Valeur scientifique, tant la documen-
tation y est exacte, précise, abondante,
et ce qui, par-dessus tout, sollicitera le
lecteur, c'est une merveilleuse série
d'illustrations, empruntées aux plus
grands maîtres de l'art contemporain.
D'innombrables reproductions des ta-
bleaux de Berne-Bellecour, de Bonnat,
de Détaillé, de Henner, de Neuville, de
Roll, de Boutigny, éclairent ces pages co-
pieuses et pressées. « L'impératrice » de
Winterhalter fait pendant au célébré gé-
néral « Prim », de Henri Regnault. Les
statues de Bartholdi s'y évoquent à côté
des panoramas jadis fameux de Poilpot,
et la peinture allemande elle-même a été
mise à contribution : témoin, le Bis-
marck, de Lembach, dont l'original est
une des toiles maîtresses de la nouvelle
Pinacothèque de Munich.
Le colonel Rousset, qui manie aussi'
habilement les délibérations des con-
seils de guerre que les mouvements des
armées, nous expose les ressorts les plus
cachés et débrouille les intrigues les plus
intimes. Il ne se borne pas à raconter, il
explique, il analyse, et en même temps,
il juge ou il détermine le jugement.
J'ajoute que s'il admire les soldats, il
est souvent dur et légitimement dur pour
ceux des généraux qui n'étaient point à
la hauteur de leur tâche.
Si dès les débuts s'affirma nôtre infé-
riorité, si de désastreux errements se ma-
nifestèrent, qui devaient ensuite rejaillir
sur toute la conduite de la guerre et pe-
ser sur l'effort héroïque de la levée en
masse, c'est qu'il n'y avait pas. réelle-
ment de plan de campagne. Depuis plu-
sieurs années, depuis Sadowa, l'Europe
était troublée par l'approche du grand
conflit et aucun programme définitif
d'opérations n'avait été élaboré a Paris.
Frossard, qui y avait été d'abord em-
ployé, disait : « Avec de bonnes posi-
tions de campagne, on peut pourvoir à
tout », et il se bornait à considérer la
défensive. Un peu plus tard, l'empereur
fit prévaloir un système qui comportait
trois armées : l'une à Strasbourg et sui-
te Rhin, pour couper l'Allemagne du
nord de l'Allemagne du sud ; une autre
à Metz, une autre en réserve à Chàlons,
?t, dont une partie, le cas échéant, eût pu
être débarquée sur les bords de la Bal-
tique.
Mais ce système demeura sur le pa-
pier. Lorsque la guerre éclata, on y re-
nonça, faute d'éléments, et l'on forma
une seule armée du Rhin, avec les sept
corps disponibles. De plus, et ceci était
une effroyable source de faiblesse, ces
corps étaient égrenés et dépourvus de
tout lien. composant un long et mince
cordon que l'ennemi pourrait toujours
trouer, par une accumulation de forces
sur un point quelconque.
Le colonel Rousset critique sévère-
ment les chefs de l'état-major et de l'in-
tendance. dont il montre l'impéritie,
l'impuissance, l'ignorance même. Non
seulement le plan fait défaut, mais f!e
quartier général ne sait même pas où se
trouvent les diverses unités. On n'a ni
riz, ni café, ni avoine, ni eau-de-vie. Les
projectiles restent en quantité prodi-
gieusement insuffisante. Les ambu-
lances sont inexistantes. Notre artil-
lerie porte moins loin que l'artillerie
allemande; notre cavalerie, avec 105 che-
vaux par escadron contre 150, se battra
admirablement à Reichshoffen et ail-
leurs, mais elle n'est pas dirigée, et son
action n'est pas reliée ù une action d'en-
semble.
En face de cette confusion, le colonel
Rousset nous signale l'ordre qui règne
outre-Rhin et la forte discipline intellec-
tuelle qu'un Moltke a imposée à l'état-
major prussien, prévoyant tout, réglant
l tout méthodiquement, dans la première
partie de la guerre. Il est vrai que dans
la seconde, il fut pris au dépourvu lors-
que des forces qu'il n'avait point devi-
nées entrèrent en lutte, et que la France,
d'un seul bond, se dressa contre l'en-
vahisseur.
Ce fut l'affaire de Sarrebruck, qui fut
la première péripétie sanglante. Le co-
lonel Rousset nous la conte avec beau-
coup de détails pittoresques et émou-
vants, mais en même temps il la réduit
'à sa juste valeur, l'entourage de Napo-
léon III ayant essayé de la grossir parce
que l'empereur et le prince impérial s'y
trouvaient. Le 28 juillet, Napoléon arri-
vait à Metz. On eût déjà dû attaquer
l'ennemi, encore en pleine formation de
marche, car Moltke avait fixé au 4 août
l'ouverture effective de la campagne. Le
2, à dix heures du matin, Frossard, avec
deux divisions, se jette sur Sarrebruck.
Trois bataillons défendaient cette ville,
dont un, sous les ordres du commandant
de place, le colonel de Pestel gardait
les quartiers intérieurs. Les patrouilles
prussiennes donnèrent l'alarme. Les
deux autres bataillons accoururent, avec
le général de Gneisenau, mais ce der-
nier avait ordre de se retirer si l'infério-
rité numérique était trop évidente. Il se
replia. Nos troupes comptaient ii morts
et 75 blessés, les Allemands 8 morts,
7 disparus et 68 blessés.
C'était un succès à coup sûr : on n'en
sut pas profiter. L'ennemi ne fut pas
poursuivi. Le pont de la Sarre, qu'on
avait tout loisir de détruire, fut laissé
intact et ainsi devait s'expliquer peu
après l'échec de Spickeren.
Les premiers coups de canon étaient
tirés. L'une des plus sanglantes luttes
du siècle s'ouvrait. Ceux qui liront le
livre du colonel Rousset en revivront les
épisodes dramatiques, où s'affirma, dans
une cruelle défaite, lame indomptable
et valeureuse de la nation française.
JEAN FROLLO
, I
La pacification du Maroc
J*. Le conseil des ministres a consacré
toute sa délibération d'hier matin à
l'examen des questions marocaines.
Nous n'avons pas dissimulé, dans ces der-
niers jours, la gravité des problèmes que
posait, à l'heure actuelle, la pacification de
l'empire chérifien. La sanglante révolte de
Fez, la sédition de Sefrou, l'agitation qui se
manifestait à la fois dans le sud autour
d'Agadir, et au nord, dans le Gharb, à proxi-
mité de Tanger r tout cet ensemble de faits
attestait un trouble profond et auquel il con-
venait de remédier au plus tôt.
M. Regnault, envoyé en mission k Fez,
avait su obtenir très rapidement la signature
du sultan, c'est-à-dire l'adhésion de l'auto-
rité traditionnelle du Maroc, au traité de
protectorat élaboré à Paris. Mais il fallait
s'attendre, pour le jour où cet acquiescement
serait connu, à un mouvement plus ou moins
ample des tribus, - réfractaires à toute dis-
cipline et hostiles à toute tutelle.
C'est ce mouvement qu'on va enrayer et
surveiller. La France a assumé une respon-
sabilité devant le monde, et il lui appartient
de sauvegarder la vie des Européens qui ont
été s'établir dans l'empire chérifien.
La nomination du général Lyautey à la
résidence de Fez, avec M. Gaillard comme
secrétaire général, sera bien accueillie de
l'opinion. Nul ne peut ignorer les services |
que le général Lyautey a rendus, durant de
longues années, dans la région des confins
algéro-marocains et dans l'extrême Sud ora-
nais, où il a patiemment et savamment
préparé, avec l'indispensable marche en
avant, la pacification d'une région inflam-
mable entre toutes. Nul ne peut oublier avec
quelle précision, quelle sûreté d'allures, il
nous a donné, au lendemain môme d'une
formidable attaque des nomades, le pays ri-
che et fertile des Beni-Snassen. Il emploiera
demain, à l'organisation du Maroc, les bril-
lantes qualités de sang-froid et de méthode
qu'il a marquées partout où il a exercé son
commandement. La collaboration de M. Gail-
lard, notre consul, qui connaît à fond les
choses du maghzen, lui sera précieuse au
suprême degre. Ces deux personnalités se
compléteront à merveille.
Cest une tâche malaisée, laborieuse -
mais une tâche de longue haleine - répé-
tons-le, et qui doit exclure les aventures et
les à-coup^, que la France entreprend au
Maroc.
Les négociations franco=espagnoles
n'avancent tonjours pas
Le gouvernement s'est préoccupé hier
des négociations franco-espagnoles, qui,
depuis quelques jours, ont semblé aboutir
à une impasse. On est loin, en effet, d'être
parvenu au compromis qu'on attendait pour
lu fin d'avril. Les événements cependant
qui se déroulent au Maroc et qui n'épargnent
point la zone espagnole, devraient inciter
nos .voisins à plus de conciliation.
Dé nouvelles instructions seront probable-
ment envoyées à bref délai à M. Geoffray
C'est toujours la vallée d'Ouergha qui est
en cause au premier plan.
Pour la question de Tanger, elle ne sera
reprise que plus tard. Le ministre des Affai-
res étrangères d'Angleterre, qui doit donner
son avis sur ce grave problème, est d'ail-
leurs absent de Tendres jusqu'au 1" mai.
RENFORTS ESPAGNOLS A LARACHE
Larache, 27 avril.
Les vapeurs espagnols Canalejas et Luis-
VivèS. de la compagnie Côrréos de Africa,
venant directement de Cadix, sont arrivés
en radj de Larache dans la soirée d'hier.
D'après mes renseignements, ils ont à
bord environ 1,500 hommes.
Le général Lyautey
est nommé
j
résident à Fez
M. GAILLARD LUI EST ADJOINT
COMME SECRÉTAIRE GÉNÉRAL
Le conseil des ministres qui s'est tenu hier
à Rambouillet a décidé de confier la résidence
de Fe: au général Lyautey, qui aura sons
ses ordres, comme secrétaire général, M.
Gaillard., actuellement consul dans la capi-
tale de l'empire chérifien.
M. Regnault quittera prochainement le-
Maroc et sera appelé à la direction d'une de
nos légations en Europe.
Le général, Lvautey est né à Nancy en
1854. Sorti de Saint-Cyr dans la cavalerie,
il servit en Afrique, puis au Tonkin. Le gé-
néral Galliéni lui confia, à. Madagascar, la
pacification de la zone du Sud, qu'il orga-
nisa en petits secteurs.
Général de brigade en 1904, il commanda
la subdivision d'Ain-Sefra, en Algérie. Gé-
néral de division, en 1907, il fut mis à la
tête de la division d'Oran.
Il commandait en dernier lieu le 10e corps
à Rennes.
Le général Lyautey conférera aujourd'hui
avec MM. Poincaré et Millerand.
UN RAPPORT DË"M. POINCARÉ
M. Poincaré a adressé hier au "Président
de la République lé ' rapport suivant :
Le 18 janvier dernier, au lendemain même
du jour où le cabinet que j'ai l'honneur de
présider est entré en fonctions, il a chargé
une commission de lui fournir d'urgence les
renseignements indispensables à l'établisse-
ment de notre protectorat au Maroc.
Cette commission s'est livrée à un travail
complet, quoique très rapide, qui a permis
au gouvernement de préparer un projet de
traité, ainsi que les éléments d'une organi-
sation administrative et financière. Muni
de ces documents, notre ministre de France
au Maroc a rejoint son poste, avant même
que fût ratifié le traité franco-allemand du
4 novembre 1911. Cette ratification, qui de-
vait forcément précéder la signature d'un
traité de protectorat, a eu lieu le 12 mars
1912. Aussitôt M. Regnault a reçu l'ordre
de partir de Tanger pour Fez.
Général Lyautey
Dès son arrivée à Fez M. Regnault ept en-
tré en relations avec le sultan ; son autorité
personnelle a triomphé, en deux jours, des
difficultés qu'il a rencontrées ; le traité de
protectorat a été signé le 30 mars.
M. Regnault aurait désiré que l'établisse-
i ment du protectorat ne fût pas publié avant
plusieurs jours pour que le sultan pût, com-
me il l'offrait, faire connaître lui-même la
nouvelle aux populations marocaines et leur
expliquer la véritable signification du régi-
me auquel elles allaient être soumises. Mais
il a été impossible de tenir secret, même
pendant vingt-quatre heures, un événement
que la presse européenne avait immédiate-
ment connu par ses correspondants et que
l'opinion française attendait, du reste, avec
impatience. M. Regnault a, par suite, été
invité, dès le l'r avril, à commencer la mise
en application du protectorat.
Il poursuivait ses études d'accord' avec le
général Moinier et aucun indice qui eût été
porté à la connaissance du gouvernement
ne leur faisait prévoir, à l'un, ou à l'autre,
la possibilité d'un trouble quelconque, lors-
que a éclaté, à Fez, l'émeute dont les consé-
quences ont été si meurtrières.
Tant que l'ordre n'a pas été rétabli dans
la capitale, on ne pouvait évidemment son-
ger à modifier un état de choses que la hau-
te compétence de M. Regnault et la valeur
du général Moinier avaient rendu possible,
mais qui, malgré tout, n'était que provi-
soire.
II convient aujourd'hui d'assurer définiti-
vement au Maroc l'unité de notre action.
L'oeuvre à entreprendre est tonte de civi-
lisation et de progrès. Mais aucune mesure
administrative, durable et féconde, ne peut
être prise que dans des régions déjà paci-
fiées. Pour préparer et étendre méthodique-
ment cette pacification nécessaire, il est in-
dispensable qu'un homme investi de la con-
fiance du gouvernement de la République :
concentre dans ses mains, sous la souverai-
neté du sultan, les pouvoirs civils et mili-
taires.
La tâche qu'il aura à remplir est difficile et
complexe.
Il faut qu'il mette notre protectorat en va-
leur, en observant nos engagements vis-à-vis
des puissances et en faisant notamment res-
pecter l'égalité économique
Il faut qu'il demeure fidèle à la conception
même du protectorat, qui est seule conforme
aux traités internationaux et qui est exclu-
sive- de gouvernement direct.
Mais il faut aussi que, par une convena-
ble disposition de nos forces, par un emploi
efficace fie nos bureaux indigènes, par l'exé-
cution rationnelle d'un programme tout à la
fois politique, économique et stratégique, il
sache préparer et. maintenir l'acceptation de
notre protectorat par les tribus marocaines, j
J'ai l'honneur de soumettre à votre appro-
bation un décret, qui confie cette importante :
mission à l'expérience-et au patriotisme du j
général Lyautey.
LA BANDE A COMMIS UN NOUVEL EXPLOIT
Soupçonné parles bandits d'avoir dénoncé Carouy
un habitant de Lozère est l'objet d'un attentat
A DÉFAUT DE BONNOT ON CONTINUE À ARRÊTER DES COMPARSES
DES PERQUISITIONS AMÈNENT D'INTÉRESSANTES DECOUVERTES
----- . . .. ,, if-i /r, ' : L. *
Bonnot, Garnier ou Valet, peut-être, en
tout cas, des affiliés de leur sinistre bande se
sont signalés vendredi soir, à Lozère, par un
nouvel exploit.
Cette fois, il s'agit d'une vengeance contre
une personne qui, dans les milieux libertai-
res, a été soupçonnée d'avoir trahi Carbuy et
de l'avoir livré au regretté M. Jouin et 9 ses
agents, qui l'appréhendèrent, on s'en sou-
vient, sans coup férir, au moment où il
pénétrait dans la gare de Lozère.
M. Victor Granghaud, vingt-huit ans, re-
lieur, 11, rue Jean-de-Beauvais, à Paris, fut
la nouvelle victime des bandits sanguinai-
res.
Il habite, en compagnie de M. et Mme
René Granghaud, ses parents, de sa femme
dont il a deux bébés, René, six ans et Valen-
tine, trois ans, un modeste pavillon, la « Villa
'des Abeilles », perdu dans les bois, à mi-
eoteau. C'est la dernière maison du pays ;
du jardin qui l'entoure on découvre le mer-
veilleux panorama de la vallée de l'Yvette.
La famille Granghaud vint s'y retirer, il
y a trois ans à peu près, au moment où le
père vendit son fonds de commerce, dans
l'espoir d'établir, tout contre sa nouvelle
habitation, un atelier de papiers coloriés
pour la reliure.
Il s'aperçut bientôt que son projet était
pratiquement irréalisable et décida son fils
à reprendre, à Paris, une maison de com-
merce.
C'est de là que, chaque soir, leur travail
quotidien accompli, les deux hommes rega-
gnaient leur paisible demeure champêtre.
En ces tempe de pleine saison, où les com-
mandes affluaient, ils arrivaient générale-
ment à Lozère par le train de huit heures.
Mais, vendredi matin, M. Granghaud fils,
ayant appris - ainsi qu'on le verra plus
loin - que sa sécurité était menacée, réso-
lut de rentrer chez lui par le train de sept
heures un quart.
A la gare, après les salutations échangées
avec ses compagnons de route, un groupe .
de voyageurs se forma pour remonter, de
concert, le chemin en pente raide qui gravit
la colline.
Il y avait là M. et Mlle Albinac, M. Dis-
sens, M. Vatrin, un jeune homme de qua-
torze ans, élève de l'école Lavoisier ; M. Vk>
tor Granghaud ouvrait la marche, plaisân-
tant avec Mme Zéo. Son père, en ce moment
souffrant, le suivait à quelques pas, s'aidant
dans sa marche de son parapluie.
Au moment où tous ces gens, parfaite-
ment gais et insoucieux arrivaient au pre-
mier carrefour du raidillon en lacets qu'ils
suivaient, le drame se déroula avec une rapi-
dité stupéfiante.
Pour en faciliter la compréhension, il
convient d'indiquer brièvement la topogra-
phie des lieux.
L'attaque
D'un côté, c'est le chemin venant de la
station et qui va se perdre dans les champs.
Une sente le coupe, qui devient la route di-
recte conduisant, par plusieurs lacets, sous
l'appellation de rue Collet, à la villa des
Abeilles.
Au carrefour, trois villas sont bâties, la
villa Rip, l'Oasis, une autre non dénommée.
Enfin, une humble bicoque, fermée d'une
barrière de bois à claire-voie mais en partie
dissimulée par un épais fourré de lilas qui
embaument, occupe la quatrième branche de
l'étoile formée par les chemins.
La clôture de la propriété sans nom con-
siste en un mur élevé de trois mètres en-
viron.
C'est derrière ce mur que s'était caché l'un
des meurtriers. Au moment ou M. Victor
Granghaud et Mme Zeo venaient de le dé-
passer, sans le voir il bondit, deux revol-
vers aux poings, appliqua ceux-ci tout
contre les reins du relieu" et, à deux repri-
ses, fît feu.
Ce fut un affolement général ; M. Gran-
ghaud fils, sans un, mot, chercha son revol-
Ver ; son père, à coups répétés de son pa-
rapluie, tenta d'empêcher l'assassin de re-
nouveler son geste. L'une des dames pré-
sentes eut uns crise de nerfs ; l'autre, sidé-
rée, alla s'appuyer contre un mur, où elle
resta muette, les yeux exorbités.
De toutes parts, au bruit des détonations,.
on accourait. Ce ne fut que pour apercevoir
le malfaiteur s'enfuyant par le sentier her-
beux qui joint la pleine campagne.
Là, il fut rejoint par un second individu,
en compagnie duquel il descendit, au galop,
vers la voie du chemin de fer.
M. Victor Granghaud, lui, était redes-
cendu en courant dans la direction de la
gare.
Au bout de quelques irstants, il se re-
tourna et, ne voyant personne derrière lui,
revint au carrefour. Il paraissait beaucoup
souffrir, n ais, avec nn sang-froid étonnant,
tint à rassurer tout le monde :
Cl. Petit Parisien
LE LIEU DE L AGRESSION
Cest à 1 angle du mur qu'on aperçoit à gauche de
la photographie que se tenait blotti un des
agresseurs.
Dans le médaillon : M. Grandghand père
- Je sais qui a fait le coup, dit-il, sans
vouloir cependant s'expliquer davantage.
Et, soutenu par plusieurs témoins de
l'agression, il remonta jusqu'à la villa des
Abeilles, où on put se rendre compte de son
état. Par un hasard miraculeux, une seule
balle l'avait éraflé, au côté droit; la plaie était
toute superficielle ; le projectile fut, d'àil-
leurs, retrouvé sur le théâtre du crime.
Après un pansement sommaire, le blessé,
dans une automobile mise à sa disposition
par M. Muret, conseiller général, regagna
Paris, où il fit sa déposition au chef de la
sûreté. A deux heures du matin, fi rentrait à
nouveau à Lozère, en compagnie de plu-
sieurs inspecteurs du service de M. Gui-
chard.
Hier matin, il revenait de nouveau à Paris
pour y compléter ses indications et rece-
voir, aprèsavoir été examiné par le docteur
Paul, médecin légiste, les soins que néces-
sitait son état.
Pour éviter toute indiscrétion, il a d'ail-
leurs été transporté dans une maison amie,
où nul ne pourra venir troubler son rétablis-
sement.
Qui est ie coupable?
Quel était le mystérieux auteur de l'atten-
tat contre M. Granghaud î II a été impossi-
ble de le savoir jusqu'ici, bien que ce der-
nier ait, à son endroit, des soupçons très
précis.
Voici le signalement que nous en avons
pu recueillir auprès des rares personnes
qui l'entrevirent :
Agé de trente à trente-cinq ans, petit, tra-
pu, les cheveux bruns ébouriffés, la mous-
tache brune, la face grimaçante, vêtu d'une
cotte bleue, manifestement passée par des-
sus un complet veston, une main envelop-
pée dans un pansement.
A peu près le physique de Bonnot, il faut
en convenir, avec ce détail troublant qu'il
porte une blessure à la main, blessure
reçue, probablement, par le sinistre chauf-
feur au cours de la lutte qu'il eut à soutenir
contre les policiers dans la chambre de
Gauzy, au Petit-Ivry.
Le malandrin n'était pas seul et tout avait
été admirablement combiné pour que M.
Granghaud restât mort sur place.
L'un de se3 acolytes, celui-là même qui fut
aperçu descendant de la colline boisée par
les champs, s'était posté presque en face de
la villa des Abeilles.
Si les détonations ne lui avaient pas fait
supposer que le coup de main avait réussi, il
eût certainement attendu, pour le tuer, le
malheureux relieur.
Ce second personnage portait un vêtement
de velours brun, de coupe élégante et était
coiffé d'un chapeau melon. Il a été aperçu
distinctement par les propriétaires de la
villa Rip et de l'Oasis.
Il est vraisemblable qu'au moins nn autre
bandit accompagnait ceux dont nous venons
de parler et les attendait au delà de la voie
du chemin de fer de Paris à Limours avec
une automobile probablement, car il ne sont
descendus ou montés dan? aucun train ve-
nant de la capitale ou du point terminus op-
posé de la ligne.
_ M. Guichard quittant la prélecture pour aller opérer une perquisition, eu Petit Parisien '
Gare de Lozère ru* Collet
C. Carrefour on eut Uni vagression
D. Villa.
O . Endroit où Us meurtrier Était,-caché
E. Villa Rip.
F. Villa l'Oasis.
G. Maisonnette aux bouquets de lilas
H. Point où se trouvait posté le î* malfaiteur
X. Point où se trouvait poste le f malfaiteur
? ? - Chemin suivi par les malfaiteur*
immmm Chemin suivi par M. Granghaud
Ont-ils guetté, dissimulés dans un bos-
quet ou tapis dans un sillon, pour savoir si
M. Granghaud avait été frappé à mort ? On
pourrait le croire d'après la rencontre étran-
ge que firent vers huit heures les enfants
d'un propriétaire de Lozère, M. Maurice et
Mlle Raymonde Houel.
Ceux-ci, venant de Paris, regagnaient la
villa familiale, lorsqu'au long de la voie du
chemin de fer, il3 virent tout à coup surgi'
deux individus menaçants, browning au
poing.
Un monsieur qui les accompagnait, domp-
tant son émotion compréhensible, leur cria :
- Qui va là 1 et tira aussitôt son revolver.
Sans rien répondre, les hommes enjam-
bèrent lestement la barrière du chemin de
fer, traversèrent les voies et rejoignirent,
dans l'ombre déjà épaisse, le troisième per-
sonnage cité plus haut. *
On n'a pu jusqu'ici, malgré les plus actives t
recherches, retrouver leur trace.
CE QUE DIT RI. GRANGHAUD PÈRE
Au moment où nous quittons la villa des
Abeilles pour regagner la gare, nous aper-
cevons M. Granghaud père, au détour du
chemin. Il vient pour chercher sa famille
afin de l'emmener à Paris et essayer de :a
soustraire ainsi à d'autres attentats.
C'est péniblement qu'il arpente la route.
M. René Granghaud est asthmatique et les
émotions qu'il vient d'éprouver ne sont pas
pour le remettre De temps à autre, il est
obligé de s'arrêter pour se reposer. Nou»
profitons d'une pause pour nous approcher
de lui et nous faire connaître.
Un visage maigre, brun, plutôt dur, daas
lequel deux larges yeux bleus jettent 'une
lueur de bonté, un front large et découvert ;
c'est une fort belle tête que celle de l'ancier
relieur, une de ce? physionomies qui vouf
intéressent et vous attirent.
- Mais oui, s'écria-t-il, sur une question
précise que nous lui posons, après qu'il nous
eut narré les circonstances de 1 attentat,
mais oui, nous nous doutons bien d'où vient
le coup. Pourquoi vous mentir ? Je vais vous
dire franchement ce qui en est.
Mon fils avait des idées avancées, très
avancées, même. En un mot, c était un liber-
taire. Il avait été séduit par l'humanitarisme
large de la doctrine. 11 en vint à fréquenter
les milieux anarchistes, à prendre nart aux
discussions philosophiques, engagées dans
les réunions Moi-même, je lisais avec plai-
sir, avec intérêt, toutes les brochures qu'il
apportait à la maison. Notre vie était en rap-
port avec nos idées. On vous a raconté,
m'avez-vous dit, que les malheureux étaient
toujours bien accueillis chez nous, que notre
porte était toujours ouverte ii ceux qui souf-
fraient. Sans nous vanter, c'est vrai. Nou>
ne faisions d'ailleurs que notre devoir
d'hommes.
Mais moD fils avait évolué. II s'était bien
tôt aperçu que les idées si belles qu'il avait
embrassées étaient singulièrement déformées
par certains de ces prétendus' libertaire?
I
pour lui plaire. L'assassinat encore moins.
Et lorsque les Bonnot. Garnier et O* lui
firent, ces derniers mois, demander asile,
c'est avec horreur qu'il envisagea l'hypo-
thèse de cacher de tels bandits. Anarchiste,
libertaire, oui. il l'était peut-être encore :
mais il n'avait rien de commun avec ces
monstres II réfusa énergiqnement d'entrer
en rapport avec eux.
Il était désormais condamné, !,e^ «cher 1
cousins n ne devaient >v.. 'nj me donner ce
qu'il* considéraient: .« .cc-r-
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 98.5%.
- Collections numériques similaires Fonds régional : Franche-Comté Fonds régional : Franche-Comté /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "FrancComt1"Les Divertissemens de Versailles donnez par le Roy au retour de la conqueste de la Franche-Comté en l'année M. DC. LXXIV. /ark:/12148/bd6t57513788.highres Le Galatée , premierement composé en italien par J. de la Case, & depuis mis en françois, latin, allemand, & espagnol. Traicté très utile et très nécessaire pour bien dresser une jeunesse en toutes manières et façons de faire louables... /ark:/12148/bpt6k8718710v.highres
- Auteurs similaires Fonds régional : Franche-Comté Fonds régional : Franche-Comté /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "FrancComt1"Les Divertissemens de Versailles donnez par le Roy au retour de la conqueste de la Franche-Comté en l'année M. DC. LXXIV. /ark:/12148/bd6t57513788.highres Le Galatée , premierement composé en italien par J. de la Case, & depuis mis en françois, latin, allemand, & espagnol. Traicté très utile et très nécessaire pour bien dresser une jeunesse en toutes manières et façons de faire louables... /ark:/12148/bpt6k8718710v.highres
-
-
Page
chiffre de pagination vue 1/8
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k5643205/f1.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k5643205/f1.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k5643205/f1.image
- Mise en scène Mise en scène ×
Mise en scène
Créer facilement :
- Marque-page Marque-page https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/bookmark/ark:/12148/bpt6k5643205/f1.image ×
Gérer son espace personnel
Ajouter ce document
Ajouter/Voir ses marque-pages
Mes sélections ()Titre - Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k5643205
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k5643205
- Signalement d'anomalie Signalement d'anomalie https://sindbadbnf.libanswers.com/widget_standalone.php?la_widget_id=7142
- Aide Aide https://gallica.bnf.fr/services/ajax/action/aide/ark:/12148/bpt6k5643205/f1.image × Aide
Facebook
Twitter
Pinterest