Titre : La Rue : Paris pittoresque et populaire / rédacteur en chef Jules Vallès ; directeur Daniel Lévy
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1867-08-24
Contributeur : Vallès, Jules (1832-1885). Directeur de publication
Contributeur : Lévy, Daniel. Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32863356f
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 258 Nombre total de vues : 258
Description : 24 août 1867 24 août 1867
Description : 1867/08/24 (A1,N13). 1867/08/24 (A1,N13).
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k5458165h
Source : Bibliothèque nationale de France, département Réserve des livres rares, RES FOL-LC2-3093
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 03/12/2008
Première année. — N° 13.
20 CENTIMES
24 Août 1867.
SOMMAIREj^,
La Rue — JULES VALLÈS ;
La Sorbonne — A.-E. GARNIER;
Les Avocats s'en vont — EDOUARD DANCIN;
Montmartre — FRANCIS MAGNARD;
Le Nouvel Opéra — P. A.;
Le Typo — IL LENEVEUX ;
Une visite — A. DE STAMIR.
LA RUE
A partir d'aujourd'hui la Hue change de domicile et de direc-
teur.
Elle transporte ses Lurcaux rue Diouot, 13, près l'Opéra, le
71) de la ruo Richelieu devant être démoli au mois d'octobre.
Elle n'a plus qu'un propriétaire-gérant, M. S. Limozin, et un
rédacteur en chef, votre serviteur.
M. Daniel Lévy, après m'avoir aidé à lancer la Hue, se retire; la
direction de la Lune le réclame tout entier ; il obéit aussi à des
scrupules de conscience qui ne lui permettent pas d'accepter la
responsabilité de certaines opinions que la Hue n'a pas le droit
d'affirmer, mais qu'elle laisse bien voir.
M. Daniel Lévy emporte avec lui tous nos regrets. Mais l'ad-
ministration ne tombe pas en quenouille. Je m'étais dit, il y a
bien longtemps, en voyant aux bureaux du Figaro certain em-
ployé toujours au travail, donnant un renseignement à celui-ci,
des instructions à celui-là, que si jamais j'avais besoin d'un ad-
ministrateur actif et intelligent, c'était lui que je choisirais.
Je suis allé trouver M. Mercier; je lui ai montré les livres de
la Hue, ce qu'elle valait et lui ai demandé s'il voulait s'occuper
d'e-le. Il a accepté. M. Mercier dirigera désormais l'administra-
tion du journal; et c'est à son ordre que devront être adressés
les mandats. Ce nouveau collaborateur — le plus utile de tous
— a passé cinq ans au Figaro ; espérons qu'il en passera dix à
la Hue.
La-dessus, chers lecteurs, vous m'excuserez de ne pas vous en
dire plus long. Que voulez-vous? on ne va pas en ballon tous
les jours ! Mais je puis vous assurer que si la Hue ne marche
pas, ce ne sera ni ma faute ni celle des collaborateurs.
Le succès nous porte — et puis nous avons tous la foi.
Le rédaeteur en chef,
JULES VALLÈS.
LA SORBONNE
NOTRE DERNIER MOT SUR PET-PE-LOUP.
Il y eut jadis un bonhomme appelé Sorbon qui avait trop d'ar-
gent : il bâtit l'édifice vénérable, mais complètement démodé
qu'on peut voir au quartier Latin... si l'on a du temps à perdre.
La Sorbonne aVennui d'être tout près du Panthéon : ces deux
bonnets decoton qui coillentla montagne Sainte Gencvièvresem-
blent tristes tout le long de la journée. Encore le Panthéon a-t-il
pour lui les premiers rayons du soleil, le grand air et l'espace.
La Sorbonne est plantée profondément parmi les maisons voisi-
nes comme un durillon dans le petit doigt du pied gauche... Ce
sera dur à extirper !
Pauvre boîte ! toute noircie de la lèpre hideuse que lui ont
inoculée les années et l'explication des auteurs latins ! Tout hu-
mide de la moisissure de la Grèce et de Home ! Toute pleine de
vers et de ces vieux parchemins dont les Egyptiens bourraient le
ventre de leurs momies !
Ouvrons-la, pourtant 1
Pouah! quelle odeur et quelle poussière en sortent! Cette
odeur, c'est l'odeur de tous les livres que la Sorbonne a condam-
nés jadis et que la main du bourreau brûlait en place de Grève,
devant la populace ignorante qui applaudissait à son esclavage
social et moral ; cette poussière, c'est la poussière qu'ont se-
couée sur la Sorbonne, de leurs pieds fugitifs, les savants, les
philosophes, les libres-penseurs qu'elle a condamnés à l'exil et
qui ont mendié leur pain sur la terre étrangère, parce qu'ils n'ac-
ceptaient pas les antiques fariboles et croyaient pouvoir penser
autrement qu'Aristotc; cette odeur, c'est l'odeur des bûchers sur
lesquels périssaient ceux qui n'avaient pas eu le temps ou la sa-
gesse de fuir et qu'une condamnation de la Sorbonne était venue
arracher jeunes, vieux, malades, mourants, a leur laboratoire, ù
leur cabinet, ou à leur lit de mort; cette poussière, enfin, est
- celle de leurs os, qu'on jetait à tous les vents, mais qui s'est
amoncelée pour témoigner contre la persécution et pour deman-
der justice.
Oui ! l'histoire de la Sorbonne est triste.
Un peu de géographie maintenant.
D'abord, une église... Passons! c'est encore dangereux. Jetons
les yeux sur ces trois grands corps de bâtiments qui entourent
une cour pavée d'herbes plutôt encore que de cailloux. Les flancs
énormes de cette bâtisse recèlent une bibliothèque poudreuse,
où vout fureter quelques vieux professeurs, troupe myope et
presbyte qui, à l'envi des rats, grignotlcnt le coin de tous les
vieux papiers ; ensuite des salles d'examen pour le baccalauréat,
la licence, et le reste; carrées, nues, peintes salement, glacées
l'hiver, ardentes l'été, avec trois fauteuils pour les professeurs,
une chaise pour le malheureux qu'on interroge et des bancs de
bois pour le public ; mais le public n'en abuse pas : c'est tout au
plus si, le jour où passe un fils aussi chéri que paresseux ou
intelligent, une mère cachée derrière son voile et respirant des
sels, un père ramenantsur son front les derniers de ses cheveux,
20 CENTIMES
24 Août 1867.
SOMMAIREj^,
La Rue — JULES VALLÈS ;
La Sorbonne — A.-E. GARNIER;
Les Avocats s'en vont — EDOUARD DANCIN;
Montmartre — FRANCIS MAGNARD;
Le Nouvel Opéra — P. A.;
Le Typo — IL LENEVEUX ;
Une visite — A. DE STAMIR.
LA RUE
A partir d'aujourd'hui la Hue change de domicile et de direc-
teur.
Elle transporte ses Lurcaux rue Diouot, 13, près l'Opéra, le
71) de la ruo Richelieu devant être démoli au mois d'octobre.
Elle n'a plus qu'un propriétaire-gérant, M. S. Limozin, et un
rédacteur en chef, votre serviteur.
M. Daniel Lévy, après m'avoir aidé à lancer la Hue, se retire; la
direction de la Lune le réclame tout entier ; il obéit aussi à des
scrupules de conscience qui ne lui permettent pas d'accepter la
responsabilité de certaines opinions que la Hue n'a pas le droit
d'affirmer, mais qu'elle laisse bien voir.
M. Daniel Lévy emporte avec lui tous nos regrets. Mais l'ad-
ministration ne tombe pas en quenouille. Je m'étais dit, il y a
bien longtemps, en voyant aux bureaux du Figaro certain em-
ployé toujours au travail, donnant un renseignement à celui-ci,
des instructions à celui-là, que si jamais j'avais besoin d'un ad-
ministrateur actif et intelligent, c'était lui que je choisirais.
Je suis allé trouver M. Mercier; je lui ai montré les livres de
la Hue, ce qu'elle valait et lui ai demandé s'il voulait s'occuper
d'e-le. Il a accepté. M. Mercier dirigera désormais l'administra-
tion du journal; et c'est à son ordre que devront être adressés
les mandats. Ce nouveau collaborateur — le plus utile de tous
— a passé cinq ans au Figaro ; espérons qu'il en passera dix à
la Hue.
La-dessus, chers lecteurs, vous m'excuserez de ne pas vous en
dire plus long. Que voulez-vous? on ne va pas en ballon tous
les jours ! Mais je puis vous assurer que si la Hue ne marche
pas, ce ne sera ni ma faute ni celle des collaborateurs.
Le succès nous porte — et puis nous avons tous la foi.
Le rédaeteur en chef,
JULES VALLÈS.
LA SORBONNE
NOTRE DERNIER MOT SUR PET-PE-LOUP.
Il y eut jadis un bonhomme appelé Sorbon qui avait trop d'ar-
gent : il bâtit l'édifice vénérable, mais complètement démodé
qu'on peut voir au quartier Latin... si l'on a du temps à perdre.
La Sorbonne aVennui d'être tout près du Panthéon : ces deux
bonnets decoton qui coillentla montagne Sainte Gencvièvresem-
blent tristes tout le long de la journée. Encore le Panthéon a-t-il
pour lui les premiers rayons du soleil, le grand air et l'espace.
La Sorbonne est plantée profondément parmi les maisons voisi-
nes comme un durillon dans le petit doigt du pied gauche... Ce
sera dur à extirper !
Pauvre boîte ! toute noircie de la lèpre hideuse que lui ont
inoculée les années et l'explication des auteurs latins ! Tout hu-
mide de la moisissure de la Grèce et de Home ! Toute pleine de
vers et de ces vieux parchemins dont les Egyptiens bourraient le
ventre de leurs momies !
Ouvrons-la, pourtant 1
Pouah! quelle odeur et quelle poussière en sortent! Cette
odeur, c'est l'odeur de tous les livres que la Sorbonne a condam-
nés jadis et que la main du bourreau brûlait en place de Grève,
devant la populace ignorante qui applaudissait à son esclavage
social et moral ; cette poussière, c'est la poussière qu'ont se-
couée sur la Sorbonne, de leurs pieds fugitifs, les savants, les
philosophes, les libres-penseurs qu'elle a condamnés à l'exil et
qui ont mendié leur pain sur la terre étrangère, parce qu'ils n'ac-
ceptaient pas les antiques fariboles et croyaient pouvoir penser
autrement qu'Aristotc; cette odeur, c'est l'odeur des bûchers sur
lesquels périssaient ceux qui n'avaient pas eu le temps ou la sa-
gesse de fuir et qu'une condamnation de la Sorbonne était venue
arracher jeunes, vieux, malades, mourants, a leur laboratoire, ù
leur cabinet, ou à leur lit de mort; cette poussière, enfin, est
- celle de leurs os, qu'on jetait à tous les vents, mais qui s'est
amoncelée pour témoigner contre la persécution et pour deman-
der justice.
Oui ! l'histoire de la Sorbonne est triste.
Un peu de géographie maintenant.
D'abord, une église... Passons! c'est encore dangereux. Jetons
les yeux sur ces trois grands corps de bâtiments qui entourent
une cour pavée d'herbes plutôt encore que de cailloux. Les flancs
énormes de cette bâtisse recèlent une bibliothèque poudreuse,
où vout fureter quelques vieux professeurs, troupe myope et
presbyte qui, à l'envi des rats, grignotlcnt le coin de tous les
vieux papiers ; ensuite des salles d'examen pour le baccalauréat,
la licence, et le reste; carrées, nues, peintes salement, glacées
l'hiver, ardentes l'été, avec trois fauteuils pour les professeurs,
une chaise pour le malheureux qu'on interroge et des bancs de
bois pour le public ; mais le public n'en abuse pas : c'est tout au
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intelligent, une mère cachée derrière son voile et respirant des
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